RICHELIEU ET LA MONARCHIE ABSOLUE

 

APPENDICES.

APPENDICES DU LIVRE III.

VIII. — REFUS D'ENREGISTREMENT D'UN ÉDIT PAR LA COUR DES AIDES.

 

 

Extraits des registres de la Cour[1]. — Le 10 février 1631, la Cour des aides assemblée sous la présidence de M. de Longueil, premier président, celui-ci dit que M. le comte de Soissons allait venir faire vérifier des édits ; qu'on pouvait craindre que celui du quart du prix du vin ne s'y trouvât, et qu'il donnerait lieu à une sédition dans la ville. On en parla aux gens du Roi[2], qui firent remarquer qu'il n'est pas de l'ordinaire de se séparer quand un prince vient en la cour pour exécuter l'ordre du Roi, néanmoins qu'ils obéiront à ce que la Cour ordonnera. On délibéra de faire des remontrances sur la forme extraordinaire de vérifier les édits, et sur la pauvreté et nécessité du peuple. Pendant que les gens du Roy demanderont au garde des sceaux une audience du Roy, un président et deux conseillers, MM. Loysel, Barthélemy, Hébert, seront députés vers M. le comte de Soissons, pour lui faire savoir cette délibération, et le prier de ne prendre la peine de venir en la cour.

Après quoi la séance est levée.

Au bas de l'escalier allant à la Chambre des comptes, la députation rencontra M. le comte de Soissons, accompagné du maréchal de Vitry et de MM. Viguier et Le Bret, conseillers d'État, et ils l'attendirent sur la dernière marche de l'escalier.

Le président Loysel lui dit qu'ayant appris qu'il étoit envoyé vers la Cour pour vérifier des édits dont elle n'avoit eu aucune connoissance, elle avoit envoyé faire des remontrances au Roy. Qu'il se pouvoit souvenir qu'a son dernier voyage en ladite cour, elle lui avoit fait plainte de ce mépris de l'autorité à elle donnée par les édits et les ordonnances de nos Boys ; sur quoi il avoit été arrêté au registre que si pareilles vérifications se présentaient à l'avenir, elle iroit sur l'heure faire ses plaintes au Roy, ce qu'elle avoit jugé devoir exécuter, et s'étoit par conséquent séparée, suppliant le comte de Soissons de remettre son entrée en attendant la volonté du Roy.

Le prince répondit qu'il regrettoit de n'avoir pas été averti plus tôt, et MM. Viguier et Le Bret dirent au comte de Soissons : Voilà qui n'est pas bien. — M. Loysel répliqua que cela était très-bien, puisque la cour l'avoit ainsi ordonné pour maintenir son autorité.

Le comte de Soissons déclara que le Roy lui ayant commandé d'aller en la Cour des aides, il devoit y aller, et comme M. Loysel lui répliqua que les Chambres étoient vides et que la séance étoit levée, il ne répondit rien, mais monta à la Chambre des comptes.

Le 11 février, M. Tiraqueau, avocat général, dit qu'il étoit allé la veille trouvé le garde des sceaux, et lui ayant remontré que, suivant les édits et ordonnances, la Cour étoit fondée à demander la représentation des édits avant de les vérifier, et même de les refuser s'ils n'étoient pas justes, et qu'on avoit député vers le comte de Soissons, le garde des sceaux lui répondit que, le Roi étant parti, il étoit impossible d'avoir audience. Sur quoi la cour arrêta que M. le président de Maupeou, assisté de six conseillers, ira vers le Roi faire ses très-humbles remontrances.

Extraits des registres du conseil d’État. — Le 27 février, on y rapporte ce qui s'étoit passé à la Cour des aides, mais avec cette variante dans l'entrevue du comte de Soissons avec le président Loysel. Bien que ledit sieur comte, disoit-on, leur eût remontré que la faute qu'ils faisoient leur seroit imputée à désobéissance et à un mépris de l'autorité de Sa Majesté, même qu'il les eût exhortés de retourner en ladite Cour, de rassembler la compagnie, et de l'y attendre, néanmoins ils ne s'en seroient souciés, de sorte que lorsque ledit sieur comte s'y seroit transporté, il n'y auroit trouvé aucun des officiers de ladite Cour, ni greffiers, ni huissiers, ce qui auroit été cause que ledit comte se seroit retiré sans rien faire.

Le Roi en son Conseil, ne voulant laisser cette désobéissance impunie, a interdit tous les officiers de ladite Cour de l'exercice de leurs offices pour le temps et espace d'un an, commencer du jour de la signification du présent arrêt.

Ils étaient en même temps privés de leurs gages, et leurs attributions étaient transportées au conseil.

L'arrêt de la Cour des aides devait être biffé des registres, déchiré et remplacé par celui du conseil d'État, afin de servir d'exemple à la postérité.

Extrait du registre de la Cour des aides. — Le 6 mars au matin, après la lecture faite dudit arrêt du conseil du 27 février dernier, tous nos seigneurs de la Cour des aides, et M. le premier président[3], se retirèrent en corps, descendant par les degrés en la salle du palais qu'ils traversèrent, et passèrent deux à deux jusqu'au haut des grands degrés et perron, suivis du greffier et huissiers.

Dudit jour les huissiers du conseil, ayant leurs chaînes d'or au col et leur toque de velours noir, ont sommé Dupin, clerc du greffe de la Cour, de leur représenter la délibération du 10 février dernier, pour la biffer, et au lieu d'icelle, insérer ledit arrêt du conseil, à quoi Dupin a répondu que ledit acte est entre les mains de messieurs les président et conseillers.

Du 7 mars. — Lettres patentes portant commission à MM. Le Bret et Favier[4], conseillers d'État, MM. Thevin, de Paris, de Lanoy, Courtin, Deschamps, Dufay, Gobelin, Mangot et Seguier, maistres des requêtes, et MM. Charpentier, Le Tonnelier, Thiersault, Dorien, Lanier et Le Gros, conseillers au grand conseil[5], pour se transporter en la Cour des aides, et y exercer ladite juridiction, comme faisoient les officiers de ladite cour avant leur interdiction, commission au sieur de Mesmes d'Yrval, maitre des requêtes, pour exercer la charge de procureur général[6], et à maistre J. Robert, avocat du Roy au Châtelet, pour exercer l'office d'avocat général, ordonné que copies collationnées seront envoyées aux sièges des élections et greniers à sel de ce ressort.

Dudit jour. — Lettre de cachet du Roy aux officiers du grand conseil, qui défend de délibérer sur la question de savoir si les conseillers députés par Sa Majesté pour aller exercer en la Cour des aides doivent s'y transporter, et ordonne auxdits députés d'y aller.

Pareille défense aux maîtres des requêtes de délibérer sur ladite proposition et interdiction de maîtres Thévin, Turquant[7] et de Charve, pour l'avoir agitée.

On voit que ces deux corps entièrement dévoués au Roi et au ministère, furent. néanmoins opposés à cette mesure violente. La Cour des aides n'avait été suspendue qu'une fois, pour un jour, depuis qu'elle existait.

Du 10 mars. — Ce jour, MM. les commissaires nommés pour tenir la Cour des aides sont venus en ladite cour, pour y faire publier et registrer leur commission. Ils s'y sont rendus sur les onze heures du matin, ont passé par la grand'chambre, et sont descendus en la buvette, où ils ont conféré pendant une demi-heure, parce que ladite grand'chambre étoit pleine de monde. Étant ensuite montés en ladite chambre, ils se sont assis sur les bas sièges, les conseillers d'État et maitres des requêtes sur le banc des présidents, et les conseillers au grand conseil sur les bancs des deux côtés. (Le procureur général fit donner lecture de leur commission qui fut enregistrée.) Et à l'instant messieurs s'étant levés et étant descendus à la buvette, ont mandé le clerc du greffe, à l'effet d'avoir les registres et instructions nécessaires.

Du 13 mars. — Défenses ont été faites par le Roy à messieurs de la cour de Parlement de s'entremettre en aucune manière de la connoissance de la Cour des aides, le Parlement n'étant compétent pour juger de telles matières.

Les 13, 11 et 15 mars, les commissaires ordonnèrent vainement aux greffiers, commis et huissiers d'apporter les registres et rôles pour rendre la justice.

Le 17 mars, on enregistra l'édit portant révocation de l'imposition du quatrième du vin vendu au détail (édit qui avait causé l'émotion populaire)[8].

Tout conspirait contre les commissaires. Les huissiers avaient emporté les registres, les procureurs et avocats ne voulaient pas occuper et plaider devant eux, les officiers pourvus en province ne voulaient pas se faire installer par eux, et personne ne les considérait comme un corps véritable.

Le 24 mars, les commissaires mandèrent les procureurs de communauté, et leur enjoignirent d'avertir le bâtonnier des avocats que les audiences seront données ; afin que les avocats se tiennent prêts pour plaider les causes qui seront appelées sur le rolle.

Le même jour ils arrêtèrent que MM. Lormyer et Guérin seront tenus dès demain de remettre au greffe les procès qui sont à leur rapport, sinon dès à présent ladite Cour les a condamnés chacun en 300 francs d'amende.

Du 28 mars, le bâtonnier des avocats et les procureurs de communauté mandés en la Cour, lecture leur a été faite d'un arrêt du Conseil, portant qu'au préjudice de la déclaration de Sa Majesté, rétablissant le greffier en chef, les substituts, commis et huissiers, avec injonction à eux de venir exercer leur charge, la plupart d'entre eux refusent d'y venir, et, à leur exemple, les avocats et procureurs refusent d'occuper pour les parties. C'est pourquoi Sa Majesté leur enjoint à tous d'exercer leur charge, à peine d'interdiction et de 500 francs d'amende.

Du 1er avril. — M. Maillet, bâtonnier des avocats, mandé, enquis quelle diligence il a faites pour faire venir les avocats aux audiences de ladite Cour, a dit qu'il n'a pu avoir aucune résolution des avocats au sujet dudit arrêt. Mais il demande à la Cour de surseoir les audiences pour quinze jours. On déclare que l'audience publique tiendra demain 2 avril.

Cette audience ne peut avoir lieu, puisque le procès-verbal porte : Il paroit que depuis ledit jour 1er avril jusqu'au 29, du même mois, MM. les commissaires sont entrés de temps en temps, mais qu'ils n'ont expédié que quelques requêtes.

Pendant ce temps, les négociations se poursuivaient activement entre le gouvernement et la Cour des aides.

Du 15 mars. — M. le président de Maupeou, deux conseillers, M. de Marle de Versigny, procureur général[9], sont allés visiter M. le comte de Soissons, et ont parlé d'abord à M. de Senneterre, qui leur a dit de bien prendre garde que le Parlement parlât pour eux, car cela ruineroit leurs affaires. Ledit sieur de Senneterre[10] leur a demandé si la Compagnie vérifieroit les édits. A quoi M. de Maupeou a répondu qu'elle les vérifieroit s'ils étoient justes. Ledit sieur de Senneterre a aussi demandé si M. le comte de Soissons seroit le bienvenu, et si la Compagnie ne lèveroit pas la séance. A quoy M. de Maupeou a répondu qu'il en délibéreroit avec la Compagnie, et que l'interdiction de la Cour étoit mal fondée, 'qu'ils ne l'avoient pas méritée, et qu'ils ne pouvoient avoir tort d'avoir ordonné des remontrances au Roy.

A quoi ledit sieur de Senneterre a répliqué qu'on ne vivoit pas à présent comme autrefois, qu'ils avoient été eux-mêmes disgraciés autrefois pendant deux ans. Que le Roy étoit le maître, et se feroit obéir, et que si le Parlement pensoit s'en mesler, décimation auroit lieu.

Ensuite MM. les députés ayant été présentés à M. le. comte de Soissons, M. de Maupeou lui aurait dit que la cour était fondée à délibérer sur les édits, et la forme n'étoit pas que le Roi les fasse publier par un prince, auparavant les remontrances. La Cour avoit cru avoir très-juste raison de les ordonner, elle a estimé d'agir avec plus de respect, d'envoyer un des présidents, et deux conseillers l'en avertir, que de se lever devant lui, comme messieurs de la Chambre des comptes avaient fait autrefois de devant monsieur son père, ce qui avoit été trouvé très-mauvais. — A quoi M. le comte a répondu : Vérifiera-t-on les édits, et si j'y retourne, serai-je le bienvenu ? et la Compagnie ne se lèvera-t-elle point ? — M. de Maupeou ayant dit que les édits seroient vérifiés s'ils étoient justes, et qu'il conféreroit avec la Compagnie sur la réception, M. le comte de Soissons a dit qu'il dépêcheroit un courrier au Roy, lorsqu'il saurait si le Parlement ne s'étoit pas assemblé. M. le comte de Soissons a conduit MM. les députés jusqu'à la porte de la chambre, et ledit sieur Senneterre les a conduits jusqu'à la porte de la rue.

Du 21 mars. — Messieurs étant assemblés chez M. le premier président, mondit sieur le premier président leur a dit qu'il a été avec deux de Messieurs et M. le procureur général à l'hôtel du comte de Soissons, lequel n'étant pas levé, ils ont parlé à M. de Senneterre :lequel leur a dit que pour obtenir le rétablissement de la Compagnie, il falloit vérifier les édits ; à quoi M. le premier président ayant répondu qu'ils ne pouvoient pas promettre la vérification des édits pour son rétablissement, sans crime, M. de Senneterre leur a répliqué de bien prendre garde de ne pas fâcher le Roy ; qu'ils avoient commis une espèce de rebellion en quittant leurs places. — M. le premier président lui dit qu'ils étoient obligés en conscience de faire leurs remontrances, et qu'ils pouvoient les faire de bouche et par écrit ; que M. le comte n'étoit venu qu'à dix heures et demie, au lieu que la Cour se lève tous les jours à dix heures. Ensuite, M. le premier président ayant été, avec MM. les députés, introduit dans la chambre de M. le comte de Soissons, il leur dit : Le Roi vous a rétabli ; allez le remercier. Et il ajouta : Vous savez bien ce que vous avez promis, c'est la vérification des édits que vous avez promise. — le premier président a répondu que la Compagnie n'y avoit jamais pensé, et qu'elle ne le pouvoit faire sans crime. — M. le comte de Soissons se mit en colère, disant : Quoi ! vous ne m'avez pas promis de vérifier les édits ? — Oui, dit M. le premier président, s'ils sont justes ; et ceux qui sont venus ici avant nous n'en ont pas pu dire davantage, car c'est l'intention de la Compagnie. Ce fait, M. de Senneterre les a accompagnés jusqu'au bas de l'escalier.

Le même jour, la Cour députa au Roi le premier président, le procureur général et deux conseillers, qui allèrent le trouver à Dijon.

Du 14 avril. — M. le premier président a fait récit du voyage de MM. les députés, contenant qu'ils étoient partis de Paris le dernier mars, dans le carrosse de M. le premier président, à six chevaux et quatre chevaux de selle, et étoient arrivés à Auxerre, le 3 avril au soir. Qu'ils avoient été salués par les officiers de l'élection et du grenier à sel, qui leur apportèrent des présents, comme avoient fait les autres officiers des lieux où ils avoient passé. Que sur l'avis qu'ils y eurent du retour de Sa Majesté à Fontainebleau, ils étoient arrivés le 8 ; et avaient été visiter M. le garde des sceaux, M. le cardinal de Richelieu, et M. d'Effiat, surintendant des finances. Que le lendemain, M. le garde des sceaux les avoit invités à dîner, où il étoit seul assis au bout de la table, M. le premier président à sa main droite, M. Hébert près de lui, et MM. les maîtres des Requêtes de l'autre côté ; que M. le garde des sceaux, après dîner, avoit présenté au Roy MM. les députés qui saluèrent Sa Majesté, laquelle croyant que M. le premier président s'alloit mettre à genoux, lui fit signe de parler debout, ce qu'il fit, et avoit dit au Roy entre autres choses, qu'ils supplioient Sa Majesté de leur permettre d'appeler de sa puissance absolue au tribunal de sa justice et bonté souveraine, de son suprême pouvoir à sa débonnaireté singulière, espérant que Sa Majesté, en considération des longs et fidèles services qui lui ont été rendus, fléchiroit à la requête très-humble qu'ils lui faisoient, pour le rétablissement de leur Compagnie ; à quoi le Roy avoit répondu qu'il aviseroit de cette affaire avec son conseil.

La Chambre fut rétablie le 7 mai après avoir promis de vérifier, et tint sa première audience le 10.

Du 10 mai. — Béranger, huissier, a dit que les procureurs de communautés demandoient à entrer. M. le premier président ayant dit de les faire entrer, ils ont dit qu'ils étoient députés de la part de la communauté des avocats et procureurs, pour témoigner à la cour leur joie de son rétablissement ; comme ils avoient ressenti avec beaucoup de déplaisir et d'affliction que messieurs auroient cessé de rendre la justice par la volonté du Roy. M. le premier président leur a dit que la Cour a agréable les premiers témoignages de leur bonne volonté ; que vendredi prochain l'audience sera ouverte, et qu'on commencera d'appeler les causes sur le colle où l'on en étoit demeuré à la dernière audience, avant l'interdiction. Et sur ce que les gens du Roy ont remontré que plusieurs des officiers des élections et greniers à sel avoient retardé de poursuivre leurs réceptions, jusqu'à ce que la Cour fût rétablie, n'ayant voulu reconnaître d'autre juge qu'elle, aucuns d'eux étant demeurés  en cette ville à grands frais, la Cour a retenu que les officiers pourvus auparavant qu'elle ait cessé d'exercer, et ceux dont les lettres de provision seroient de datte antérieure, seroient reçus en la manière accoutumée, sans qu'il soit payé aucun droit pour leur réception.

 

 

 



[1] Collect. Rondonneau. — Archives nationales ADIa. (Au registre étant au greffe de l’Hôtel de ville, commençant le 16 août 1628 et finissant le 14 août 1632).

[2] Le procureur général et les avocats généraux.

[3] René de Longueil, sieur de Maisons (sa terre fut érigée plus tard en marquisat), premier président de la Cour des aides à la mort de Nicolas Chevalier, fut ensuite président à mortier au Parlement (1643), puis surintendant des finances et ministre d'État. A la Fronde, il demeura du parti de la cour ; en 1677. — Il comptait dans sa famille un cardinal (1456) et un premier président de la Chambre des comptes.

[4] Favier avait été intendant de justice, police et finances en 1617, dans le Perche, et en 1628 en Provence.

[5] Tanneguy de Lanoy, sieur de Criqueville, conseiller au grand conseil, puis maître des requêtes, enfin président au Parlement de Rouen ; † 1650 ; il avait payé sa charge 62.000 écus. Il n'a rien de commun avec la comtesse de Lanoy, dame d'honneur de la Reine en 1622.

François Couran, conseiller au Parlement depuis 1595, fut reçu maître des requêtes en 1613. Son fils avait épousé une nièce de Picard, trésorier des parties casuelles, fils de ce cordonnier Picard, si populaire à Paris, que les gens du maréchal d'Ancre insultèrent. Courtin fut secrétaire des commandements de la Reine Christine ; il alla à Munster avec les plénipotentiaires. Il était intimement, lié avec l'archevêque de Bordeaux Henri de Sourdis. On voit à cette même époque d'autres Courtin conseillers au Parlement, receveur des finances à Bordeaux, procureur du Roi au présidial de Blois et receveur des aides et tailles à Beauvais.

Pierre Gobelin, sieur du Quesnoy, était le fils de Balthazar Gobelin, trésorier de l'épargne en 1603. Il fut chargé de diverses missions en Lorraine. Bassompierre se plaint de lui dans ses Mémoires, et Richelieu le blâme de n'avoir pas envoyé de l'argent pour les troupes en un cas urgent. Sa sœur Marthe épousa le président Lescalopier. On voit un Jacques Gobelin, trésorier des finances à Soissons, et une Marguerite

Gobelin mariée à Mathieu Langlois, procureur à la Chambre des comptes.

Claude Mangot, sieur de Villarceaux, fils du secrétaire d'État de ce nom disgracié par Luynes. Le père avait peu de bien. Commissaire d'un procès où le maréchal d'Ancre pouvait être fort compromis en 1613, sa conduite adroite lui valut la faveur de ce favori, qui le nomma ambassadeur en Suisse, premier président au parlement de Bordeaux et garde des sceaux (1616).

Séguier de Raney, marquis de Sorel, avait épousé Marguerite de La Guesle, dame de Chars, fille du procureur général au Parlement de Paris ; il eut par elle le marquisat d'O, et sa fille la marquise d'O épousa le duc de Luynes, fils du connétable.

Charpentier fut ensuite conseiller d'Etat et président au parlement de Metz.

Lanier fut chargé en 1618 d'instruire le procès de Barbin, le surintendant, par ordre de Luynes, à qui il allait en rendre compte chaque soir. Bien que Barbin, créature du maréchal d'Ancre, fût innocent, Lanier aurait promis, si l'on en croit Richelieu, de faire donner un arrêt de mort contre lui. Il fut, en 1635, envoyé en Suisse pour juger et condamner un nommé Clausel, coupable « de mauvaises propositions n contre la France. Il devint maitre des requêtes, conseiller d'État et ambassadeur ordinaire chez les Grisons.

[6] De Mesme, sieur d'Yrval, frère du président de Mesmes et du comte d'Avaux, fut l'héritier de ce dernier. Il fit donner à son fils, par le crédit de sa famille, une abbaye de 18.000 livres de rente.

[7] Turquant (ou Turcan) avait été précédemment conseiller au grand conseil. On fit plusieurs chansons sur son compte, et Tallemant dit qu'il fut toujours «un diseur banal de fleurettes. Madame Turquant sa mère se remaria avec le marquis de Royan, de la maison de La Trémoille. Le maitre des requêtes Turquant avait pour femme la fille d'un intendant de M. de Guise ; elle était légère, et le mari, d'après Tallemant, préféra, pour voir dissoudre son mariage, accepter le congrès, et se résigna à être faussement accusé d'impuissance. Après la cassation de son mariage, madame Turquant épousa le marquis de Canillac, qui, parait-il, la battait. — Turquant était beau-frère du poète Montereul.

[8] La révocation datait du 10 mars 1631.

[9] Le président de Maupeou était sans doute le fils de Pierre de Maupeou, président à la Chambre des comptes depuis 1624, par la résignation de Potier, conseiller d'État, intendant des finances, † en 1641, à quatre-vingt-huit ans. Le père avait exercé, à titre de doyen des intendants des finances, les fonctions de contrôleur général, qui, à la mort du maréchal d'Ancre, appartenaient à Barbier. Les Maupeou avaient été anoblis en 1586, en la personne de Pierre de Maupeou, sieur de Nouveau, trésorier d'Anne de Joyeuse. Cette branche de la famille était calviniste.

Christophe-Hector de Marie de Versigny, procureur général à la Cour des aides, membre de l'Assemblée des notables de 1626, devint président à la Chambre des comptes en 1631. Il avait épousé Marie-Colbert, sœur d'un maître à la Chambre des comptes de ce nom. Il eut une fille, mariée à Michel Bouette, auditeur à la Chambre des comptes (1633). Christophe de Marie descendait d'Hector Le Corgne, dit de Marie, sieur de Versigny, premier président au parlement de Paris et chancelier de France en 1403. — On voit en 1627 et 1637 un Charles de Marie receveur général du taillon à Amiens, et un Nicolas de Versigny fermier de la geôle du petit Châtelet, mais nous ne savons s'ils ont avec le procureur général quelque lien de parenté.

[10] Henri de Senneterre (ou Saint-Nectaire), 1573-1632, marquis de La Ferté-Nabert, chevalier des ordres, lieutenant général en Champagne, ambassadeur en Angleterre et à nome. Il avait été gouverneur de M. le comte de Soissons, par la faveur de la comtesse de Soissons, chez qui sa sœur Madeleine de Senneterre était toute-puissante. Il devint maréchal de camp, et son fils devint maréchal de France. Il était d'une bonne maison d'Auvergne, mais » fort incommodée ». Dans sa jeunesse il était logé et nourri à prix fixe par un traiteur avec un laquais et un cheval. On raconte qu'il fut du vivant du comte de Soissons l'amant de la comtesse sa femme, et qu'il l'épousa secrètement après la mort de ce prince.