L'administration judiciaire de Michel Le Tellier n'a jamais été vraiment étudiée. Seul, l'édit de 1679, qui est, il est vrai, d'une importance capitale, a été analysé dans un article général sur l'Enseignement du droit français dans les universités aux XVIIe et XVIIIe siècles[1]. Cependant, Rulhières, dans ses Eclaircissements, avait depuis longtemps signalé un recueil de lettres de ce vieux chancelier, adressées à tous les parlements sur différentes matières de jurisprudence, et Camus et Dupin, dans leurs Lettres sur la profession d'avocat, un recueil des édits déclarations et arrêts...[2] Ces documents et d'autres encore autorisent à affirmer que l'œuvre judiciaire de Le Tellier est loin d'être négligeable, qu'elle est même, en un certain point, révolutionnaire. I. — La carrière judiciaire de Le Tellier. Examinant la situation du ministre en août 1664, un anonyme écrit M. Le Tellier est... souvent employé par Sa Majesté dans les choses, qui dépendent de la justice ordinaire ou qui sont de la police commune, comme y étant savant et expérimenté, ayant passé par 4 ou 5 diverses charges de la robe, hautes et considérables, dans un intelligent, qui se perfectionna fort en ce genre d'affaires[3]. Rien de plus juste que cette appréciation. Après avoir suivi les cours du collège de Navarre[4], Le Tellier étudia à Paris le droit avec un docteur et Claude Colombet, professeur réputé. A dix-sept ans, il bénéficia des abus existant dans les universités, puisque, sans avoir été inscrit dans celle d'Orléans, il obtint d'elle, le 15 septembre 1621, les diplômes de licencié en droit civil et en droit canon[5]. En 1624, sa mère acheta, pour lui, à Marie de Sérignan, veuve de Jean de La Croix, une charge de conseiller au grand conseil[6]. D'après son biographe, le jeune magistrat, qui n'avait pas l'âge requis, se distingua fort par la capacité avec laquelle il répondit lors de sa réception et, ensuite, s'acquit une telle réputation que certains pensaient déjà qu'il s'élèverait plus tard aux plus hautes charges de l'état, opinion émise aussi par les auteurs d'oraisons funèbres, en particulier Maboul et Fléchier. Au bout de sept ans et après son mariage avec Elisabeth Turpin, il quitta, le 24 octobre 1631, cette assemblée tranquille et austère, et vendit sa charge à Jean Lhuillier, avocat au parlement, pour 102.000 livres tournois[7]. En novembre, il recevait ses provisions de procureur du roi au Châtelet, office que lui cédait Claude Gobelin, moyennant 270.000 livres payées solidairement par Le Tellier et son beau-frère, Jean Baptiste Colbert de Saint-Pouenges[8]. C'était une augmentation notable de situation, les fonctions de procureur ayant une importance considérable pour l'administration de la capitale à tous égards. Aussi, la Gazette, annonçant l'accord ou composition, ajoute-t-elle : Il en faudrait moins que cela pour acheter ailleurs une souveraineté, tant les Français sont faits à ne rien épargner pour servir leur roi et leur patrie[9]. Peu après, le 28 janvier 1632, Le Tellier était nommé conseiller d'état, et, le 26 juillet, conseiller d'état, finances et conseil privé[10]. Procureur, il eut à rendre la justice, ce qui lui valut, selon Le Pelletier, Bossuet, Fléchier et Maboul, un grand crédit et une grande réputation[11]. A cette appréciation générale, le dernier de ces orateurs ajoute une note particulière : Paris, dit-il, qui, par la multitude presque innombrable de ses habitants... est sujette à de grands désordres, avait besoin d'un magistrat, qui, joignant la fermeté à la prudence, veillât a sa sûreté, y établit l'ordre et la police... Sous ce dernier vocable on doit comprendre non seulement la police au sens actuel de ce mot, mais toutes sortes de matières, hygiène, salubrité publique, voirie, etc. Aussi peut-on attribuer à l'initiative de Le Tellier le procès verbal et rapport fait pour le nettoiement et pavage de la ville, fauxbourgs et banlieue de Paris avec l'ordre nécessaire pour bien et dûment faire ledit nettoiement et pavage, document du 30 août 1636, très intéressant pour l'histoire de la capitale[12]. L'année suivante, le procureur fit aussi procéder à une évaluation de la population parisienne, un des premiers recensements[13]. N'ayant pu s'entendre avec le lieutenant civil, Isaac de Laffemas, créature de Richelieu, homme, dit Le Pelletier, de manières bizarres, pleines d'une vaine et fade ostentation, il préféra vendre sa charge à Louis Chauvelin, conseiller au grand conseil, pour la somme de 330.000 livres[14]. Par contre, il avait gagné la confiance du surintendant des finances, Claude de Bullion, au fils duquel il aurait rendu service dans une affaire privée. Par son intermédiaire, il acheta, le 31 décembre 1638, à Louis de Machault la charge de maitre des requêtes, qu'il paya 163.000 livres[15]. Grâce à lui encore, il fit partie de la commission, qui, sous la présidence du chancelier Séguier, alla enquêter en Normandie coure les rebelles, les Va-nu-pieds ; de la mi-décembre 1639 au 21 février 1640, il interroge, conduit des instructions et rédige des rapports, menant presque tous les procès à l'absolution, parce qu'à son avis la révolte avait été due aux excès des exactions commises par les partisans sur le peuple[16]. Quelques mois plus tard, le 3 septembre, il est nommé intendant de l'armée d'Italie, grâce encore au surintendant, qui dressa lui-même ses instructions et entretint avec lui une correspondance suivie[17]. Le 17 avril 1643, il fut rappelé pour remplir les fonctions de secrétaire d'état de la guerre, d'abord par commission, le 22 octobre 1645 définitivement. Pour avoir tous les titres nécessaires, il lui restera à acquérir, d'Antoine Le Riche, le 15 mars 1646, la charge de conseiller et secrétaire du roi, moyennant 27.000 livres[18]. Dans ses nouvelles fonctions, il ne fut pas confiné, on le sait, dans l'administration militaire : il fut employé dans toutes sortes d'affaires politiques, religieuses, diplomatiques, etc. Il connut à la fois des officiers et des civils, et, parmi ces derniers des membres du parlement, qui le recherchaient. Lamoignon dit en effet : La nécessité de mes affaires et le besoin que j'eus de la cour m'obligèrent à commencer de devenir courtisan. Par l'entremise de Le Pelletier, il prit avec Le Tellier des liaisons qui devinrent vite étroites, puisque le ministre intervint auprès de Mazarin pour faire nommer Lamoignon président à mortier en 1657, et premier président en 1658[19]. Ces relations eurent rapidement un heureux résultat pour Le Tellier. Prenant en effet le pouvoir en mains en mars 1661, Louis XIV se rendit compte que la justice était mal rendue en France, et il a dressé contre elle un réquisitoire bref, mais concluant[20]. Il mit quatre ans, c'est-à-dire attendit la fin du procès de Fouquet, pour réaliser son projet de la réformer[21]. A cet égard, Lamoignon avait conçu un vaste plan pour modifier la justice civile et criminelle. D'après son fils, non seulement Le Tellier l'aurait adopté avec enthousiasme, mais aurait demandé à son auteur de lui laisser prendre dans cette œuvre la première place[22]. Sans adopter entièrement cette opinion, peut-être intéressée, il suffira de constater que le ministre participa activement aux délibérations de la Chambre de réformation, qui tint, sous la présidence du roi, ses séances les dimanches, de quinze jours en quinze jours, à partir du 25 septembre 1665[23]. Ce jour-là les 11 et 25 octobre, le 28 novembre, il prend la parole pour insister sur l'importance et l'étendue de la matière et recommander que l'on n'aille pas trop vite. Une autre fois, après avoir loué le roi de ses excellentes intentions, il déclare que les parlements doivent savoir ce qui leur sera prescrit et à quoi ils doivent obéir, afin que, s'il y a quelques remontrances à faire, ils puissent s'en acquitter : tout ce qui a trait aux coutumes, immunités, franchises, doit être renvoyé à plus tard, pour ne pas troubler la tranquillité publique. Il ne faut pas attacher trop d'importance aux mots cour souveraine, parce qu'il n'y avait pas lieu d'en tirer aucune comparaison avec la souveraineté royale. Maîtres des requêtes, présidiaux, prévôts des maréchaux, intendants se qualifient de juges souverains. Néanmoins, pour satisfaire au scrupule, il serait plus prudent de n'en faire aucune mention dans l'article, ainsi qu'il a été pratiqué en 1629. Le Tellier s'oppose enfin à la demande de deux dames nobles, qui veulent établir une prison : car le nombre de ces établissements particuliers est trop considérable, et les abus, qui y sont commis, très graves[24]. Ainsi, des délibérations de cette chambre, créée pour donner des lois fixes et certaines, qui composeraient un seul corps de règlements, il résulta, nous le savons, l'ordonnance civile (20 avril 1667) et l'ordonnance criminelle (1670), à l'élaboration desquelles Le Tellier a personnellement collabora et auxquelles il se référera bien souvent plus tard, quand il sera chancelier. Depuis longtemps, ce que l'on appelle l'opinion publique le désignait pour cette haute fonction. Guy Patin en parle déjà en 1660 et 1661[25]. D'après le vénitien Alvise Sagredo, Le Tellier, en 1666, soutient en tout Louvois, perchè aspira di ottenere per se l'eminente posto di guarda sigilli quando venisse a mancare il cancelliere[26]. Il fallut attendre jusqu'en janvier 1672 que le chancelier Séguier manquât, à l'âge de 84 ans. Aussitôt Guy Patin désigne Le Tellier comme son successeur[27]. Tout en émettant d'abord le même avis, d'Ormesson finit par dire seulement que chacun nomme celui qui lui plaît[28]. Plus discret encore, Le Pelletier note simplement que la place demeura du temps à remplir[29]. Louis XIV, en effet, qui venait de nommer Louvois ministre d'état, se heurta à une double hostilité, celle de Colbert contre la candidature de Le Tellier dont le contrôleur général jugeait l'élévation dangereuse pour lui, et celle du secrétaire d'état de la guerre contre la nomination du premier président Lamoignon[30]. Fort embarrassé, Louis XIV prit pour lui les sceaux, qu'il tint avec l'aide de conseillers d'état et de maîtres des requêtes[31]. Lorsque, le 23 avril, il partit pour commencer la guerre contre la Hollande, il les remit à Etienne II d'Aligre, cousin de Le Tellier : Par ce choix, chacun juge que M. Colbert est le patron[32]. Cette opinion de d'Ormesson est évidemment exagérée. La déconvenue de Le Tellier n'entamait en rien son influence et celle de son fils, qui allait au contraire s'accroître. Beaucoup plus vraisemblable est la note de Le Pelletier : Il ne parut jamais dans la conduite ni dans les discours de M. Le Tellier et de sa maison qu'il eût aucune peine ni aucun ressentiment contre ceux qui avaient eu part à cette promotion et à son exclusion[33]. Au bout de cinq ans mourut le parent du ministre, et, le 27 octobre 1677, Louvois, écrivant à Le Pelletier, ne doute pas qu'il ne le complimente de tout cœur sur le présent que le roi a fait aujourd'hui à M. Le Tellier[34]. D'après le confident, cette nomination fut accueillie avec une acclamation et une satisfaction de tous les ordres de l'état[35]. Louis XIV aurait demandé à Colbert de renoncer à son opposition et le contrôleur général aurait même été favorable à Le Tellier, dans l'espoir de lui succéder ![36] Beaucoup plus acceptable est l'opinion de ceux qui attribuent aux sollicitations de Louvois l'accès de son père à la première magistrature[37], accès facilité aussi par les longs services de M. Le Tellier, sa fidélité et son attachement au roi dans les temps difficiles, sa grande expérience et sa capacité. Les provisions du 29 novembre, qui résument la carrière du nouveau chancelier, furent présentées au parlement de Paris le 17 novembre. Elles étaient accompagnées d'une lettre du roi à cette cour, lui enjoignant de déférer aux ordres que désormais lui adresserait Le Tellier : il en fut de même pour la cour des aides et le grand conseil[38]. Le parlement, toutes chambres assemblées, entendit la lecture des actes officiels. Puis, la grand'chambre nomma une délégation de neuf membres, qui se rendit auprès du chancelier : Potier de Novion, premier président, qui était à sa tète, lui adressa le compliment d'usage[39]. Le secrétaire du grand conseil voulut agir de même : selon Mme de Sévigné, Le Tellier l'aurait interrompu brusquement pour le remercier et ajouter : Mais M. Berryer, point de finesses, point de friponneries, adieu M. Berryer[40]. Le 20 janvier 1678 au parlement et le 18 mars à la cour des aides, un avocat réputé, René Pageau, prononça deux panégyriques d'une éloquence verbeuse, où l'historien peut glaner quelques rares renseignements. Au grand conseil, un de ses collègues, Louis Le Camus, avait, lui aussi, vanté les qualités de Le Tellier, éloge outré et phraséologique, absolument inutilisable[41]. Santeul, n'hésita pas à composer une poésie, de huit pages, dédiée au chancelier et imprimée à Paris[42]. Toutes les formalités furent terminées au parlement le 3 février par l'enregistrement des provisions et un discours de l'avocat général Talon[43]. Le Tellier ne fut pas ébloui par sa nouvelle dignité. Les contemporains ont transmis les paroles prononcées par lui, lors de son élévation. Le roi, aurait-il dit, honorait sa famille et couronnait son tombeau, et, d'autre part, le titre de chancelier était un beau titre pour son épitaphe[44]. C'est donc avec sa modestie coutumière qu'il commença à remplir ses importantes fonctions. II. — La chancellerie, la tenue et la défense du sceau. Le chancelier Le Tellier devient le second personnage de l'état. Sans insister sur l'honneur découlant de cette dignité, il conserve, par une insigne faveur de Louis XIV et par une dérogation à la tradition établie depuis longtemps, le titre et les fonctions de ministre d'état. Il continue à prendre part aux délibérations du conseil d'en haut, et il va assister à celles des conseils d'état, de finances, de dépêches, des parties et à la grande direction : il préside plusieurs de ces assemblées[45]. Il est donc inexact de dire qu'avec lui le rôle effectif du chancelier, à cette époque, ne correspond ni à son rang dans l'état ni à sa dignité[46]. Déjà auparavant, Louis XIV, partant au printemps pour un long voyage en Flandre ou pour les armées, déléguait sa signature, non à Colbert ou à Lionne, mais à Le Tellier. Après 1677, celui-ci conserve, s'il n'augmente pas, son influence politique et participe toujours avec efficacité au gouvernement. Les contemporains ne se sont pas trompés sur ce cas, considéré alors comme exceptionnel. Sans recourir à tous ceux qui, à l'occasion de sa nomination, parlent en termes enthousiastes ou aigris du bonheur et de l'ascension de la maison Le Tellier, je note que Spanheim, témoin froid et méthodique, affirme que Le Tellier exerça la charge de chancelier conjointement avec celle de ministre d'état. Pour Pageau, il est heureux de le voir chancelier et ministre d'état tout ensemble, et on doit louer la sagesse de notre incomparable monarque qui n'a pas voulu qu'en lui l'une de ces dignités fit place à l'autre et qui l'a retenu dans son conseil particulier, en le donnant à son peuple. Enfin, dans un mémoire inédit sur l'origine du chancelier de France, on peut lire expressément que cette charge... s'est accrue tellement que c'est un des piliers principaux de l'état[47]. Ce pilier ne donne pas seulement de l'honneur et du pouvoir. Matériellement, il place le titulaire dans une situation substantielle et fort enviable. Nous la connaissons par les comptes tenus soigneusement et régulièrement par Le Tellier lui-même, tout au moins jusqu'en 1680. Le chancelier reçut d'abord, pour son emmeublement, 10.000 livres, 12 chaises e1 12 fauteuils recouverts de maroquin, 12 autres chaises et fauteuils, une table avec un grand tapis vert..., et une tapisserie de fleurs, qui se fait par M. Le Brun aux Gobelins pour le salon de Versailles[48]. Si, pour son entrée en fonctions, il verse 500 pistoles d'or aux premiers valets de chambre de Sa Majesté, il touchera annuellement 20.000 livres comme ministre d'état, 40.000 d'appointements ordinaires et 30.000 d'extraordinaires, 12.000 pour ses secrétaires, 1.000 pour ses valets de chambre, 1.000 écus, 15.000 livres pour parties casuelles et droit de nomination aux charges dépendant de celle de chancelier, 4.000 pour ses domestiques, 1.800 pour droit de charrette, 12 ou 1.500 comme secrétaire du roi, autant pour le visa de chaque lettre (20 sols), scellée en vert[49]. Ce n'est pas tout. Aussitôt après la nomination, les marchands merciers lui apportent 12 aunes de velours noir. A chaque mutation les secrétaires du roi doivent 60 livres pour le satin de Monseigneur : en prêtant serment, les trésoriers de France, 208 livres chacun pour le velours de Monseigneur, et, dans les folios suivants du manuscrit, se poursuit la longue série des droits et des cadeaux, parmi lesquels je me borne à mentionner un écritoire de vermeil doré, offert par la chambre des comptes, 12 minots de sel à prendre au grenier des gabelles, 640 livres de cire blanche pour l'usage de sa maison, etc.[50] Au très bas mot, par chacun an, 129.200 livres, en face desquelles les dépenses sont insignifiantes. Sous ses ordres Le Tellier a un personnel assez nombreux : 12 commis parmi lesquels sont pris ses secrétaires, 4 conseillers gardes-rôles, dépositaires des minutes, 4 conservateurs des hypothèques des rentes sur l'hôtel de ville[51], huissiers, des audienciers et des contrôleurs des audiences avec un contrôleur général, 2 ou 4 chauffe-cire, scelleurs héréditaires de France[52], un valet chauffe-cire héréditaire et un fourrier ordinaire des logis. Pour la plupart, ces officiers servent par quartier, recherchent la survivance pour leurs enfants : ils paient alors un droit au chancelier, par exemple 1.500 livres pour les gardes-rôles[53]. Il y a, en outre, un lieutenant de la prévôté de l'hôtel, 2 gardes et un médecin[54]. De tous ces fonctionnaires, nous ne connaissons guère que deux secrétaires, Philippe joseph Perrotin, sieur de Barmond, avocat au parlement[55] et, beaucoup mieux, Jean Pierre Arnaud Junquières. Ce dernier, premier secrétaire, contrôleur général de l'audience, obtiendra, le 19 novembre 1701, la survivance pour son fils Michel[56] : il est en relations épistolaires avec Louvois, qui lui demande de soulager le plus possible son père, de n'être pas si paresseux pour lui envoyer des nouvelles, ou qui s'entretient avec lui de questions judiciaires, etc.[57] Le chancelier possède trois
prérogatives très considérables, attachées inséparablement à sa charge, qui
sont l'expédition des édits et de tous les autres mandements du roi, la présidence
du conseil d'état et la surintendance de la justice[58]. Il nomme non
seulement le personnel de la chancellerie, mais, dans les parlements et les
présidiaux, les référendaires, les commis de l'audience, les huissiers, les
200 avocats du conseil, avec la finance qui en
parviendra pour le chef de la justice, ne
nous réservant, dit le roi dans la déclaration de juin 1678, que la première finance[59]. Il délivre
aussi les provisions à tous les officiers du
royaume et scelle toutes les pièces importantes. A. ce double point de vue, de graves abus se commettent au préjudice des droits financiers du sceau de la grande chancellerie ou des chancelleries près les cours. Le Tellier les défend avec énergie, menaçant de peines sévères les contrevenants. Parmi eux, les uns, les solliciteurs, soit pour éviter la dépense, soit par ignorance, s'adressent à n'importe qui. Le 17 juillet 1681, il leur est interdit de recourir à autres que les officiers de la grande chancellerie, qui ont droit à signature, et à tous conseillers et secrétaires du roi de dresser ni écrire des expéditions qui se scellent en ladite chancellerie : sinon, 3.000 livres d'amende et même prison, et, en cas de récidive, punition corporelle[60]. Car les fonctionnaires eux-mêmes sont les plus répréhensibles : ils exercent leurs charges avant d'avoir obtenu les provisions du grand sceau, les huissiers et sergents signifient des commissions ou arrêts, qui n'ont pas été scellés. Comme l'honneur du sceau y est intéressé[61], le chancelier réprime avec vigueur ces menées, en usage sur tout le territoire[62]. Au président de la prévôté royale du Mans, qui, par un
jugement, a reçu des particuliers à participer aux
lettres de bénéfice d'inventaire, obtenues par d'autres, il écrit le
31 juillet 1683 : En cela, vous avez suppléé des
lettres de la chancellerie, que lesdits particuliers auraient été obligés
d'obtenir. Cette conduite est de telle qualité qu'on ne peut la dissimuler,
et je vous avertis que, s'il vous arrivait de tomber dans de pareilles
fautes, on vous rendrait responsable en votre propre et priva nom des droits
du sceau, qu'auraient dû payer les impétrants pour les lettres de bénéfice
d'inventaire, et des dommages et intérêts des parties pour la nullité de vos
jugements[63]. Au garde scel
de la chancellerie de Bretagne, qui lui demande d'être informé, il répond
qu'avant de délivrer des provisions, les grands audienciers et les
contrôleurs généraux de la grande chancellerie procèdent à une enquête sur la
vie, mœurs et religion des demandeurs puis, le chancelier scelle les
provisions ou délègue son pouvoir à un maitre des requêtes et, en l'absence
de celui-ci, au garde-scel de la chancellerie dans
laquelle l'officier doit servir. Voilà ce qui se pratique, et, pour
que cette règle soit suivie, le 11 avril 1682, est envoyé un règlement aux
chancelleries près les parlements[64]. Le Tellier tient de plus en plus à édicter des lois
générales. Il constate qu'on n'a pu empêcher les
surprises et même les falsifications des lettres du grand sceau. Des solliciteurs et gens de néant dressent en effet
eux-mêmes des expéditions, et les officiers de la grande chancellerie les
signent sans les examiner ni connaître même ceux qui
les ont écrites. L'arrêt du 17 juin 1681 remédiera à cet abus si préjudiciable à la
dignité de la grande chancellerie[65]. Le Tellier suit
une ligne de conduite analogue à propos des lettres de rémission, que les
chancelleries dés parlements se sont attribué le droit de délivrer dans tous
les cas d'homicide, de telle sorte que les plus
scélérats trouvent l'impunité de leurs crimes. Il prend la peine
d'expliquer au présidial de Rennes que les
rémissions sont pour ceux qui ont trié et les pardons simples pour ceux qui
ont été présents à l'action : elles doivent être scellées du grand sceau de cire verte, à lacs de soie
rouge et verte, visées de moi et sans autre date que celle du mois[66]. Pour mettre fin
à ces empiètements des chancelleries provinciales, sont publiés, en 1678 et
en 1681, deux édits portant qu'il ne sera expédié
aucunes lettres de rémissions dans les chancelleries près les cours que pour les
homicides involontaires[67]. Cette défense
fut-elle respectée ? On ne sait. On constate seulement que, sous divers
prétextes, les juges retiennent, pendant des mois, en prison, des inculpés
ayant obtenu des lettres de rémission, qu'ils ne veulent pas entériner[68]. Ce n'est pas seulement par des actes officiels de portée
générale que Le Teiller manifeste sa volonté de voir le service du sceau
fonctionner avec régularité et maintenir son prestige : c'est aussi, par des
lettres et des documents particuliers. Ainsi, à Bordeaux, près de la chambre
de l'édit, les secrétaires de la chancellerie doivent se départir entre eux pour qu'il n'y ait aucune interruption et
que les jours ordinaires de sceau ne soient
pas changés[69].
Par des arrêts, Le Tellier réglemente la chancellerie toulousaine, ses
tarifs, ses obligations de sceller toutes les lettres
qui seront de justice, et il enjoint à un président du parlement de
confier le sceau, non à son fils, mais au plus
ancien conseiller suivant l'ordre du tableau[70]. A Grenoble, il
apprend à l'intendant Lebret que l'appel d'un particulier contre un garde
scel doit être porté devant le chancelier : Mais,
ajoute-t-il, comme l'affaire n'en vaut pas la peine,
il serait bon, pour éviter des longueurs, que vous voulussiez prendre soin de
vous faire donner les moyens d'appel et les défenses des parties et que vous
essayassiez de les accommoder[71]. A la
chancellerie lyonnaise, un secrétaire du roi aura une clef du coffre où sont
les sceaux : l'audience sera tenue le mercredi et le samedi par le conseiller
garde scel les lettres et expéditions y seront scellées,
taxées, contrôlées et paraphées en la manière accoutumée[72]. A Dijon, les
greffiers du ressort du parlement, n'ayant pas de
lettres de ratification du grand sceau sur leurs contrats d'acquisition ou
d'engagement, devront, dans un délai de deux mois, régulariser leur
situation, à peine d'interdiction de leurs charges
et de 3.000 livres d'amende, même d'être déchus de leurs remboursements[73]. A Besançon, le
chancelier de France s'abaisse jusqu'à indiquer les moyens d'économiser la
cire trop chère : On peut, si on veut, se dispenser
de mettre de la cire pour toute l'étendue du placard, pourvu qu'il y en ait
assez pour marquer l'essentiel de la figure : plus important lui
parait être que le premier président paraphe les lettres scellées, afin d'éviter les faussetés, qui ne sont que trop
fréquentes sur le fait des lettres de chancellerie[74]. A Rouen enfin,
Le Tellier doit résoudre des prétentions ou des violations de règlements.
Ainsi, les chauffe-cire sont tente de lui remettre leurs titres pour qu'il
liquide leurs droits prétendus. Les officiers
de cette chancellerie seront interdits, condamnés à 10.000 livres d'amende et
aux dépens, s'ils enregistrent des arrêts du conseil sans lettres patentes expédiées et scellées de la grande chancellerie.
Les huissiers, ayant tenu des discours insolents sur
le pareatis du grand sceau, ont vu leurs charges supprimées ; mais,
comme ils avaient eu jusqu'alors une bonne conduite,
la procédure sera provisoirement suspendue[75]. En ce qui touche spécialement la chancellerie, il est donc
incontestable que Le Tellier a réagi contre le relâchement, la négligence et
les fraudes, installés depuis longtemps dans ce service. Il a voulu rendre
aux sceaux de toutes les chancelleries (grande
et provinciales) le relief et la dignité qu'ils avaient perdus. Il a
pris cette tache à cœur, comme le reconnaissent des témoins bien informés et
sers. D'après Le Pelletier, il liquida l'arriéré, de façon à n'en laisser aucune (affaire), en état d'être jugée, qu'il ne l'ait terminée[76]. Beaucoup plus précis,
Louvois se plaint du long travail de M. le
chancelier, qui tient le sceau deux fois par jour. Il supplie, en ces
termes, son père : Je vous conjure, par la bonté
dont il vous plaît de m'honorer, de penser à vous faire soulager, et, en vous
faisant rendre compte, dans le courant de la semaine, des lettres du sceau,
qui demandent le plus d'application, de vous mettre en état de les sceller en
public après avoir reconnu ce que vous aurez écrit en particulier. J'espère
que, moyennant cet expédient, vous diminuerez le travail du sceau au moins
d'un tiers[77]. Le Tellier
écouta-t-il son fils ? En tout cas, Louis XIV reconnut lui-même avec quelle
assiduité le chancelier se consacrait à sa tâche : Le
roi, lui écrit Louvois, s'est fort loué de l'application
que vous donnez à empêcher les abus du sceau, et vous a rendu sur cela la
justice que vous méritez[78]. Ce fut le jeudi 18 octobre 1685, dit Le Pelletier, qu'il tint à Chaville le sceau en public pour la dernière fois de sa vie : quand les expéditions, qu'on lui présenta, furent scellées, il fit lire l'édit de révocation de l'édit de Nantes[79]. III. — La décadence de la magistrature. Le chancelier n'a pas seulement à sceller des actes officiels et à délivrer des provisions. Il est le magistrat des magistrats, le chef de la justice et de tous les officiers de paix[80], fonctions fort délicates et fort pénibles. Dans la description des défauts de la justice et de la magistrature, les auteurs d'oraisons funèbres ont trouvé un facile exposé d'une éloquence parfois phraséologique et d'une ampleur dont ils ont, sauf exception, abusé[81]. Plus résumée, mais précise et dure, est, en 1661, l'opinion, formelle de Louis XIV, qui entraîna pratiquement la réunion de la commission de réformation et la publication des ordonnances de 1667 et 1670[82]. Des intendants, à leur tour, ont tracé un tableau peu flatté de l'administration judiciaire. Tel le mémoire laissé par Du Bois-Baillet en Béarn à son successeur Foucault et les constatations multiples de ce dernier : situation déplorable, inobservation totale des règlements et des grandes ordonnances, insuffisance, partialité et cupidité des magistrats, qui jugent leurs propres causes et celles de leurs parents, leurs mauvaises intentions, peu d'assiduité, longueurs de la procédure, qui est menée par des ignorants, augmentation des frais, etc.[83] En Vautres termes, la justice n'existait pas en France, ou plutôt elle était au service des magistrats et non du public. Le Tellier a adopté pour l'administration judiciaire quelques principes généraux très nets. Tout d'abord, il ne se tient pas pour importuné si l'on s'adresse directement à lui pour sauvegarder les intérêts des parlements et, dit-il, je me crois tellement en obligation d'y entrer, comme étant du fait de ma charge, que je ne ferai pas difficulté d'y donner mon application préférablement aux autres affaires. S'il approuve un magistrat toulousain de s'être adressé au secrétaire d'état, qui a le Languedoc dans son département, il ajoute néanmoins : Vous auriez satisfait à votre devoir, si vous m'en aviez envoyé autant : car il faut que vous sachiez que je dois être informé, préférablement à qui que ce soit, de toutes les choses qui regardent la justice[84]. En second lieu, les magistrats doivent juger en toute indépendance. Le roi, persuadé qu'ils font leur devoir, n'a pas l'intention de les géhenner, leur laisse une liberté entière, leur demande de rendre leurs sentences selon vos consciences, sans que vous puissiez être retenus par aucune considération[85]. Le souverain, de son côté, ne dissimulera rien à ceux auxquels il a confié le Soin de cette administration. Il leur fera part des avis qu'il reçoit, et qui sont quelquefois sans fondement. Mais il en résulte aussi un bien considérable en ce que ceux qu'ils ne regardent pas en profitent, et que les autres, qui y ont part, se corrigent[86]. En définitive, le roi et son chancelier dirigent : ils surveillent la façon dont les magistrats exercent leurs fonctions. Ainsi convient-il d'interpréter les paroles prêtées à Le Tellier par Maboul, qu'il ne pouvait à la vérité juger partout, mais qu'il était obligé de répandre partout l'esprit de la justice et de la faire régner dans tous les tribunaux du royaume[87]. Comment, dans la pratique, a-t-il réalisé son programme[88] ? IV. — L'enseignement du droit et l'édit d'avril 1679. L'ignorance des magistrats provenait essentiellement de la décadence, commencée depuis un siècle environ, des études juridiques[89]. L'enseignement du droit avait été délaissé par les jurisconsultes réputés. Dans certaines universités, seul le droit canonique était professé : dans toutes, le droit civil était proscrit depuis la décrétale du pape Honorius III (1219), menaçant d'excommunication celui qui aurait l'audace de l'enseigner ou d'en suivre les leçons[90]. Rétribués par leurs 'élèves, les professeurs étaient portés à une indulgence excessive, qui leur attirerait un nombreux auditoire et, par suite, des émoluments fort appréciables. Ils faisaient leurs cours sans aucune régularité, selon leur fantaisie, s'abstenaient suivant leur bon plaisir ; La délivrance des diplômes donnait lieu à un trafic répréhensible, réglée non d'après les certificats d'assiduité des étudiants et leur capacité, mais selon l'importance de la somme offerte. Ainsi, dit Fléchier, une téméraire jeunesse se jetait sans étude et sans connaissance dans les charges de la robe[91]. Le Tellier entend remédier à ces défectuosités capitales, et que les charges publiques soient remplies de sujets dignes[92]. Comme pour d'autres matières, il ne réalisa pas une œuvre originale. Il coordonna les efforts quelque peu décousus, tentés auparavant par l'édit de 1625 et le code Michau de 1629[93], tint compte des suggestions émises par la commission de réformation, dont il avait fait partie, et des ordonnances de 1667 et 1670. Tout cela, joint aux idées personnelles du chancelier, explique la rédaction du célèbre édit d'avril 1679, qui allait modifier et étendre l'enseignement du droit. D'ailleurs, selon son habitude, Le Tellier ne considère pas ce premier règlement comme définitif. Il observe son fonctionnement, et, à mesure qu'il en constate le besoin, il publie des compléments jusqu'au 6 août 1682[94]. Autre précaution encore : il prescrit qu'aussitôt après la promulgation de l'édit de 1679 une assemblée des professeurs sera tenue dans toutes les facultés de droit pour discuter le problème et émettre des avis qui seront envoyés au chancelier. Les intendants agiront de même. Ces prescriptions ne restèrent pas vaines : des propositions furent adressées à Le Tellier, qui en tint compte[95]. Le motif de la réforme est expliqué avec une parfaite netteté : il s'agit de donner à ceux qui se destinent à ce ministère (la justice) les moyens d'acquérir la doctrine et la capacité nécessaires en leur imposant la nécessité de s'instruire des principes de la jurisprudence, tant des canons de l'église et des lois romaines que du droit français[96]. L'enseignement du droit civil et économique sera donc rétabli dans toutes les universités du royaume, où il y a faculté de droit[97]. Seules, ces facultés le donneront et, à cet égard, auront un véritable monopole. Plus d'enseignement libre. Il est défendu à toutes personnes autres de faire leçon publiquement de droit civil et canonique, sous peine de 3.000 livres d'amende, etc. et d'assembler des écoliers chez elles. Il leur est absolument loisible d'aller dans les maisons de ceux qui voudront faire des répétitions particulières. Le Tellier sait bien que cette défense, inscrite déjà dans l'article 44 du code Michau, a été impunément violée et, comme il tient cette fois à la faire respecter, il écrit au lieutenant civil, juge conservateur des privilèges de l'université de Paris, pour qu'il contienne les siffleurs ou docteurs particuliers dans les termes de l'édit et leur permette seulement des répétitions, comme il se pratique en théologie et en philosophie. Il conclut en ces termes formels : Je vous prie de donner une particulière application à ce que dessus et recevoir les dénonciations des professeurs pour faire la justice convenable[98]. En cas de vacance, les professeurs de droit seront nommés par la voie de la dispute et du concours, conformément aux statuts et règlements des facultés[99]. Leur paiement n'est pas nettement précisé : on voit seulement que la moitié des droits pour les degrés de baccalauréat et de licence sera distribuée également et partagée, mesure exclusivement destinée à permettre de verser aux maîtres partie des émoluments de leurs chaires plus promptement et commodément[100]. En revanche, le cumul leur est interdit. Si les officiers de judicature ne peuvent être élus dans une faculté de droit à moins d'avoir résigné leurs charges et d'être honoraires, les professeurs ne pourront être pourvus d'aucune fonction, si ce n'est celle d'avocat du roi dans les sièges où sont établies lesdites facultés[101]. Ils ont pour principale tâche de faire lire et entendre, par leurs écoliers, les textes du droit civil et canonique, qui servent de fondement aux libertés de l'église gallicane. Il y aura, chaque jour, deux leçons différentes, pendant lesquelles les étudiants écriront ce qui sera dicté par le professeur[102]. D'autre part, les intendants ayant indiqué dans leurs mémoires que le nombre des maîtres est trop faible pour suffire à tout, Le Tellier, dès le 23 mars 1680, leur adjoint des docteurs agrégés. Ceux-ci, nommés pour la première fois par le roi sur la proposition de l'assemblée des professeurs, seront ensuite élus dans les facultés parmi ceux qui font profession d'enseigner le droit civil et canonique, parmi les avocats ou les magistrats et juges honoraires. Ils doivent avoir trente ans, être docteurs en droit et obtenir les deux tiers des votes. Leur fonction principale est d'assister aux assemblées, où ils ont voix délibérative et où sont formés les jurys d'examen : ils font partie de ces jurys, votent sur l'admission ou le refus des candidats bacheliers, licenciés et docteurs. Pendant la vacance d'une chaire, ils font les leçons de droit civil et canonique, et, en 1682, il est déclaré qu'ils appartiennent au corps des facultés. Les droits à eux alloués leur seront versés par le bedeau de chacune faculté, suivant le tableau qui en sera fait et sans aucune diminution des droits et émoluments appartenant aux professeurs[103]. Pour éviter toute fraude nul étudiant ne sera admis s'il n'a 18 ans accomplis[104]. Tous prendront quatre inscriptions par an et écriront eux-mêmes leur nom et leur qualité sur un registre déposé dans chaque faculté. Tous les trimestres, des cahiers de même nature seront envoyés aux officiers du parquet de nos parlements, dans le ressort desquels sont situées les universités. Le parquet procédera à une vérification minutieuse avant de viser aucune licence et de présenter au serment d'avocat ceux qui ne rempliraient pas les conditions requises[105]. Celles-ci, outre l'obligation des inscriptions, sont de suivre assidûment les cours pendant trois années. Au bout de la seconde, premier examen particulier avec soutenance d'un acte publiquement pendant deux heures au moins, à la suite duquel le candidat, reconnu apte, est proclamé bachelier. A la fin de la troisième, processus semblable, examen, soutenance publique de trois heures pour répondre tant du droit canonique que du droit civil, obtention du degré de licence. Un an après, les étudiants désireux d'être docteurs répondront pendant quatre heures sur de différentes manières de l'un et de l'autre droit. Les candidats, reconnus insuffisants dans ces divers examens, seront tenus de faire des études supplémentaires pendant six mois ou un an. Il est formellement interdit aux professeurs de dispenser qui que ce soit des règlements ou d'accorder des attestations fausses des années d'études[106]. Le Tellier tient la main à ce que tous ces règlements
soient respectés. La faculté d'Angers ayant, malgré tout, accordé certaines
facilités, il mande à l'intendant de prévenir le recteur et les professeurs qu'il ne leur appartient pas de donner des extensions aux
volontés du roi et qu'ils doivent observer à la lettre ce qui est statué,
s'ils ne veulent que Sa Majesté y pourvoie[107]. Fléchier
apprécie donc sainement les efforts du chancelier en disant : Il rétablit les études et fit revivre dans les écoles du
droit ces exercices publics et solennels et ces rigoureuses épreuves, qui
feront refleurir les lois et l'éloquence de nos pères[108]. L'édit de 1679 pouvait porter préjudice aux étudiants ayant déjà commencé à suivre des cours ou étant trop âgés pour continuer. Cette situation n'échappe pas à l'attention de Le Tellier. Dans ses lettres et dans des déclarations officielles, il traite méticuleusement les cas des étudiants ayant moins de 20 ans, ayant davantage ou ayant 27 ans. Il tend à faciliter la tâche de ces derniers en raccourcissant le temps de leurs études. Par contre il veille soigneusement à réprimer les fraudes de ceux qui projettent d'échapper aux clauses de l'édit de 1679 en obtenant à l'avance de fausses lettres de licence[109]. Le souci en faveur des élèves probes se montre encore dans le désir d'aider ceux qui sont pauvres et méritants, mais ne peuvent subsister sans le secours de bourses. Toutes celles, décide-t-on, qui sont fondées pour les étudiants en droit, ne pourront être distribuées à d'autres : elles sont exclusivement destinées à ceux qui auront étudié ès lettres humaines et en philosophie et désirent ensuite apprendre le droit. Pour éviter à l'avenir tout abus, les principaux des collèges, où sont créées ces bourses, exigeront des bénéficiaires la présentation des attestations délivrées par les professeurs dont ils suivent les cours : annuellement, à la Saint-Martin, ils enverront au procureur général du parlement de Paris un certificat contenant le nombre des bourses... le nom de ceux qui les remplissent et le temps de leurs études. Trop de précautions ne nuisent pas[110]. Il en est de même à propos de la valeur des diplômes obtenus par les étrangers dans les universités du royaume et par les français hors du royaume, controverse depuis longtemps en débat et jamais franchement résolue. Désormais, les premiers seront admis dans les facultés françaises de droit, où ils pourront même y prendre des degrés : mais ces diplômes n'auront aucune valeur pratique en France. Les seconds, ayant étudié dans les universités étrangères, qui leur auraient délivré des certificats de présence et même des lettres de licence, sont tenus, s'ils veulent avoir des diplômes valables, de faire les années d'études, soutenir les actes dans une faculté française et satisfaire à tout ce qui est porté par l'édit de 1679[111]. Tel est l'ensemble des mesures générales et spéciales prises pour restaurer l'enseignement du droit civil et canonique. Logique et déjà imposant, il est complété par une innovation essentielle, destinée à servir à la parfaite instruction de ceux qui entreront dans les charges de judicature. Par l'article XIV, l'édit de 1679 annonce la volonté que le droit français, contenu dans les ordonnances et dans les coutumes, soit publiquement enseigné, et l'intention de nommer bientôt des professeurs, qui expliqueront les principes de la jurisprudence française et qui en feront des leçons publiques. Tout ce qui touche à ce maître nouveau, qui parlera en français et non en latin, est précise dans la déclaration du 6 août 1682[112]. Il sera du corps des facultés, aura voix délibérative dans toutes les assemblées, prendra séance entre le plus ancien maître et le second. Il ne pourra ni devenir doyen, ni participer aux gages et émoluments des professeurs. Il ouvrira les cours en même temps que ses collègues et, pendant une heure et demie au moins, dans l'après-midi, il dictera et expliquera en langue française le droit contenu dans les ordonnances et les coutumes. Ce cours sera obligatoirement suivi pendant une année par ceux qui voudront être reçus au serment d'avocat et qui devront obtenir une attestation particulière de leur maître. Pour chacune d'elles, celui-ci recevra six livres, ce qui constitue un traitement fort peu élevé. En cas de vacance, le parquet du parlement de Paris dresse une liste de trois personnes, choisies parmi les avocats ayant exercé pendant dix ans au moins avec assiduité et succès ou parmi les magistrats pourvus depuis le même laps de temps d'une charge dans nos justices. Le chancelier désigne celui qui lui parait le plus digne. A l'encontre de ses collègues, le professeur de droit français est donc un professeur royal. Pour la province, les intendants sont consultés sur ce sujet ou sur l'union possible de cette chaire avec celle de droit civil[113]. Les nominations commencèrent à l'université de Paris par celle de l'avocat François de Launay, dont nous possédons le discours d'ouverture, prononcé le 28 décembre 1680, éloge, phraséologique et encombré de citations antiques, du chancelier et de Louis XIV, qui veulent le bonheur des sujets[114]. Entre 1680 et 1683, elles se succédèrent : les universités de Paris, Orléans, Bourges, Caen, Angers, Reims, Poitiers, Dôle[115], Cahors, Nantes, Toulouse, Bordeaux, Valence, Perpignan[116] et Aix furent pourvues de chaires de droit français. Telle fut cette innovation essentielle, qui étendit largement et heureusement le champ de la science juridique. Le chancelier Le Tellier a donc porté une grande attention aux études juridiques, en profonde décadence au moment où il étudiait lui-même et pendant les années suivantes. Son effort pour les restaurer et en étendre le champ ne saurait être nié. Dans ce but, le ministre a repris et coordonné tout ce qui avait été maladroitement essayé avant lui et il a ajouté beaucoup. Les mesures techniques ne lui ont pas paru suffisantes. Pour relever le prestige des professeurs et les inciter, en même temps, à l'assiduité et au zèle, il leur a réservé un traitement de faveur. Après avoir exercé pendant vingt ans, les martres en droit civil et canonique seront reçus dans toutes les charges de judicature sans examen, et l'ancien ou doyen aura entrée et voix délibérative dans l'un des sièges, bailliages ou présidiaux. Ils seront préférés aux autres gradués, sauf les docteurs en théologie, pour la nomination aux bénéfices. Les professeurs de droit français, à leur tour, auront voix délibérative et séance dans le siège royal de la ville dans laquelle ils auront enseigné ; le roi se réserve même d'abréger le délai de vingt ans en faveur de ceux qui l'auront mérité par leur application et leur capacité[117]. V. — Les magistrats. Ayant satisfait aux conditions requises, les étudiants licenciés prêtent le serment d'avocat. Ceux qui se destinent à la magistrature doivent assister assidûment aux audiences des cours et sièges, où ils font leur demeure, pendant deux ans au moins. Le parquet et le bâtonnier ou doyen des avocats leur délivreront des certificats d'assiduité : sinon, le chancelier ne scellera pas les provisions des futurs officiers[118]. Ces derniers attendent ensuite d'avoir, même après l'achat d'une charge, l'âge fixé pour pouvoir entrer en fonctions. A cet égard, les sentiments de Le Tellier ont varié, parce que le gouvernement royal entendait, tirer finance de ceux auxquels il accorderait des dispenses[119]. L'édit de novembre 1683 renouvela, enfin, la règle inscrite dans les anciennes ordonnances et dès lors suivie. Les conseillers des cours supérieures, — les conseillers, les avocats et les procureurs généraux des présidiaux, — les martres, correcteurs et auditeurs des comptes peuvent se faire pourvoir à l'âge de 25 ans, et les maîtres des requêtes à 31[120]. Il ne reste plus au candidat qu'à passer un examen devant un jury, composé de deux conseillers au moins de chaque chambre de la cour dont il veut faire partie. Ce jury assemblé, à 8 heures précises du matin ou à 2 heures après-midi en cas de surcharge d'affaires, disputera contre l'officier tant sur la loi que sur les fortuites et sur la pratique[121]. L'examen étant déclaré suffisant, le candidat prend rang parmi les magistrats. Ceux-ci doivent s'attirer le respect par la sagesse de leur conduite, aussi bien que par la
dignité du caractère dont nous les honorons. Leur tenue doit être
impeccable : car les habits, qui rendaient les
magistrats vénérables aux yeux des autres, les faisaient souvenir de la
modestie et de la gravité que leur profession désire. Or, déjà les
étudiants ont l'audace de porter des épées. Ils se contenteront désormais d'habits modestes, convenables à leur condition :
sinon, ils feront une quatrième année d'études. De leur côté, des magistrats
se livrent à la même licence : ils vont au
palais avec des cravates, habits gris et la canne à
la main et ne gardent ainsi aucune décence.
Aussi, en avril et juin 1684, le chancelier publie-t-il trois édits sur la décence des habits, concernant les membres
des parlements. Ces magistrats porteront leurs robes
fermées avec des collets unis au palais, dans les cérémonies publiques et dans
toutes les fonctions de leurs charges. Chez eux et dans les lieux où ils peuvent aller sans diminution de
leur dignité, ils revêtiront des habits noirs avec des manteaux et des
collets. Les officiers des présidiaux et principaux sièges royaux observeront
la même discipline. Ce règlement sera lu deux fois par an dans les assemblées
tenues par les cours pour la lecture des ordonnances et pour les mercuriales[122]. En échange, Le
Tellier défend avec vigueur ces juges auxquels il veut inculquer le sentiment
de l'honneur. Ainsi, les plaideurs mécontents, qui inséreront dans leurs
requêtes en cassation des termes injurieux pour
les rapporteurs, paieront 3.000 livres d'amende : les huissiers, qui
signifieraient de tels actes, seraient privés de leurs charges[123]. La même énergie s'exerce contre les juges, qui sont pris en faute et contreviennent aux règlements. Ceux de Limoux, ayant favorisé un inculpé de meurtre du tambour de la ville, doivent être rigoureusement châtiés, parce qu'ils délinquent en n'exécutant pas ce qui est prescrit par l'ordonnance touchant la procédure[124]. Le Tellier, s'adressant volontiers aux premiers présidents : parce qu'ils doivent donner l'exemple, appuie souvent ses reproches sur de hautes considérations morales. A celui du parlement d'Aix, qui s'est livré à des déportements, il écrit : Si vous voulez conserver la dignité de votre charge, demeurez dans les règles, n'entreprenez rien contre l'ordre et conduisez-vous avec toute la modération, qui est convenable au premier magistrat d'une grande compagnie, lequel est tenu de compatir aux faiblesses de ceux qui sont obligés de servir avec lui[125]. A Toulouse, au préjudice de l'ordonnance de 1667, le parlement rend des arrêts, par lesquels il interprète, corrige et rétracte d'autres : de là des longueurs et de nouveaux frais pour les parties en litige. Le Tellier sévira contre les coupables et enjoint au premier président de faire cesser ces mauvais usages. Votre conscience et votre devoir vous y engagent[126]. Celui de Besançon, tantôt se retire lors de la délibération de sa compagnie sur une lettre du roi, tantôt fait retirer les conseillers parents du procureur général. Le chancelier le rabroue vertement : À l'avenir, en pareilles occasions, qui regarderont le service du roi ou le public, vous devez rester en place quand même vos proches y seraient intéressés et, quand le procureur général est le vengeur public, n'agit qu'en cette qualité et non personnellement, ses parents ne peuvent être récusés[127]. A Pau, enfin, les présidents ou autres assistent aux causes et procès, dans lesquels ils ont des parents. Le procureur général s'y oppose avec raison : outre que cela est conforme aux ordonnances, la bienséance le veut. D'ailleurs, cette cour béarnaise parait avoir été fort insubordonnée et corrompue, si l'on en juge par les détails nombreux et pittoresques transmis par l'intendant Foucault en 1684. Aussi le premier président La Vie est-il exilé à Fontenay-le-Comte pour malversations : le président Gassion blâmé pour des faveurs accordées à ses proches, le procureur général Cazaux mandé à la cour pour fournir des explications sur sa conduite blâmable à divers titres[128]. VI. — Les moyens employés pour la distribution de la justice. Voulant tenir en mains les magistrats dont il reste le chef, Le Tellier entend qu'ils s'acquièrent le respect de tous par la régularité et l'assiduité dans leurs fonctions. Sans doute remplissent-ils tout leur devoir avec l'intégrité qu'ils sont obligés. Néanmoins, il sera bon de tenir, à la Saint-Martin, une mercuriale pour rappeler tout ce qui a trait au bon fonctionnement du service[129]. Viennent ensuite les mesures de détail pour mettre fin à l'absence trop fréquente des juges. Ceux de la chambre des requêtes, siégeant à La Réole, ne pourront en désemparer, si ce n'est pendant les féeries ou vacations ou autre congé de Sa Majesté[130]. A Toulouse et à Bordeaux, s'il n'y a pas au palais un président aux heures réglées, il est inutile d'en envoyer quérir dans la ville, les conseillers travailleront et le plus ancien présidera[131]. Ceux qui proposent à Le Tellier d'employer les petites fêtes du palais, qui ne le sont pas dans la ville, pour le jugement des procès de l'ordinaire ou de consacrer le samedi de chaque semaine à l'expédition des affaires des privilégiés, sont chaudement félicités de leur initiative par le chancelier[132]. Le temps des vacations est, lui aussi, propice à la négligence dans les présidiaux, dont les officiers vont vivre à la campagne. Du 1er septembre à la Noël, ordonne Le Tellier, il devra rester sept juges qui ne pourront quitter le siège pour quelque cause et occasion que ce puisse être, sous peines de désobéissance : ils établiront entr'eux un roulement pour que la justice ne soit pas retardée[133]. Dans le même but d'accélération, le chancelier prescrit l'établissement de rôles pour les causes d'audience : les plaideurs sauront ainsi le jour où leur procès viendra sûrement. Les arrêts signés du parquet et des parties, qui sont tombées d'accord, seront expédiés immédiatement, sans tenir compte des influences diverses qui pourraient se manifester. Il me reste, écrit en effet Le Tellier au premier président de Bordeaux, à vous faire observer une chose, qui, outre qu'elle est contraire aux ordonnances, est extrêmement indécente : ce sont les sollicitations fréquentes des juges auprès de leurs confrères[134]. Toutes les menées, qui peuvent fausser et retarder le travail, doivent être abolies. Il est interdit au doyen ou au plus ancien conseiller d'une chambre de recueillir les opinions en présence d'un président, à peine d'interdiction, ou à un avocat du roi de rester parmi les conseillers, pendant que plaide son confrère, le procureur[135]. Pas davantage, le procureur général ne doit concerter avec les avocats généraux à l'avance les conclusions sur les affaires portées à l'audience : car les avocats généraux sont susceptibles de changer de sentiment après avoir entendu les plaidoiries ou reçu des communications des parties présentes[136]. Toutes ces pratiques diverses sont absolument contraires au règlement les mesures prises par le chancelier doivent y mettre fin et substituer à la fantaisie fâcheuse la régularité bien ordonnée et profitable aux plaideurs. Pour que la justice agisse légalement et vite, Le Tellier promulgue aussi des arrêts ou des édits de portée générale, destinés à indiquer les modalités de travail dans certains organismes anciens ou à créer de nouvelles chambres dans les parlements surchargés d'affaires. Quelques exemples suffiront pour faire connaître sa pensée et sa méthode. En janvier 1685, parut l'édit sur l'administration de la justice au Châtelet de Paris, complétant l'arrêt du 16 octobre 1684[137]. Ses trente-deux articles règlent avec la plus grande précision le service dans les deux audiences (art. I), celles de la prévôté et du présidial, la nature des affaires diverses et complexes qui seront portées devant chacune d'elles, la compétence du lieutenant civil, des lieutenants particuliers et des procureurs du roi (art. II-XV), la division en quatre colonnes et les fonctions des conseillers (art. XVI-XIX), le travail des avocats (art. XX-XXIV), celui du lieutenant criminel (art. XXV-XXVII), la question des prisonniers, de leur interrogatoire dans les vingt-quatre heures, de leur libération et des frais (art. XXVIII-XXXII). Rien n'est laissé dans l'ombre : d'un bout à l'autre se montre le souci d'une justice bonne, honnête et rapide : pour éviter aux plaideurs des dépenses trop élevées ou une exploitation éhontée, tout est minutieusement réglé dans ce document d'importance capitale. A Rouen, la multiplicité excessive des affaires rend nécessaire la création d'une seconde chambre des enquêtes, en juillet 1680. Elle sera composée de deux présidents et de vingt-huit conseillers, et tiendra séance aux mêmes jours et heures que la première. Tandis que le premier et le second président restent attachés à la grande chambre, les six autres choisiront, suivant l'ordre de leur ancienneté, entre la Tournelle et les deux chambres des enquêtes. Dans l'édit de création, suivent plusieurs articles relatifs à la nature des procès, devant être répartis entre les diverses chambres et dont la distribution sera effectuée par le président des enquêtes, et à la question si épineuse des taxes, qui sont indiquées ici encore, avec précision[138]. Dans tous les parlements, les magistrats prennent des vacances. Mais la justice ne peut être interrompue, et les parties ne doivent pas attendre. Aussi, chaque année, au mois d'août, sera-t-il constitué une chambre de vacation. Elle siégera du sept septembre à la veille de la Saint-Martin. Elle sera composée d'un président, deux conseillers clercs et onze laïques, qui ne pourront s'absenter sans en avoir obtenu notre ordre par écrit et en cas d'absence, maladie ou légitime empêchement. Elle jugera à la fois au civil et au criminel, sauf certaines causes qui sont spécifiées dans le règlement de mai 1685[139]. Enfin, dans le Gévaudan et le Vivarais, de 'nombreux crimes restant impunis par la négligence des officiers royaux subalternes et de l'autorité des seigneurs, qui s'entendent pour composer avec les inculpés, Le Tellier décide que, pour rétablir l'ordre, le présidial de Nîmes enverra spécialement huit de ses membres et un des officiers du parquet à Marjevols, où ils jugeront, du quinze septembre au premier novembre, tous les procès criminels, leur enquête et leur décision étant appuyées par dix archers. Ces juges, ayant trouvé beaucoup de négligence et de connivence, n'ont pu accomplir entièrement leur tache dans le délai marqué : leur séjour est donc prolongé pour qu'ils puissent l'achever sans encombre[140]. Qu'il s'agisse de la justice ordinaire ou extraordinaire, Le Tellier a donc toujours eu en vue de la rendre efficace, constante et prompte, prenant en temps voulu les mesures nécessaires et munissant ses subordonnés de directives détaillées. Il leur vient en aide d'une autre façon. Chancelier, il suit la méthode du secrétaire d'état de la guerre. Il se fait, dirait-on, le maître d'école des magistrats, répond à leurs demandes, explique et défend les droits du roi, la légalité et l'observation des ordonnances. Ses lettres si nombreuses sur les questions de procédure, le respect des formes, etc., sont la meilleure preuve de la faiblesse professionnelle de la magistrature, qu'il est essentiel de reprendre en mains. On peut être étonné, en effet, qu'un intendant, ayant des attributions judiciaires, ne sache pas la différence entre les majeurs, qui ont atteint l'âge de vingt-cinq ans et n'ont pas besoin de l'autorité du prince pour être émancipés, et les mineurs qui doivent avoir des curateurs en beaucoup de leurs actions[141]. On peut être surpris, encore, qu'un procureur ignore que la justice d'appel est obligatoire, quand des juges en première instance ont condamné à des peines corporelles, aux galères, au bannissement ou à l'amende honorable, bien que l'inculpé acceptât cette première sentence[142]. De même, ceux qui, poursuivis, n'auront pas été reconnus coupables par les juges inférieurs ou dont le cas n'aura pas entraîné des conclusions à des peines afflictives, seront obligatoirement entendus de bouche dans la chambre du conseil, derrière le bureau, pour que les juges aient le moyen de s'éclaircir par cette voie[143]. De même enfin, si un plaideur fait appel d'une sentence rendue par un subdélégué, ce n'est pas à l'intendant qu'il s'adressera, voie qui ne serait pas judiciaire, mais au chancelier seul[144]. A celui-ci incombe le devoir d'apprendre la procédure à des magistrats peu savants. S'il s'agit des frais de justice, cause de graves abus, comme nous le verrons, Le Tellier s'attache à les établir avec la précision la plus complète, afin que les finances du roi et des plaideurs soient protégées, et que les magistrats ne puissent pas arguer de l'absence de tout règlement pour déterminer les taxes à leur guise. Ainsi, dans les procès criminels où il n'y a point de partie civile, ces dépenses devaient être prélevées sur la moitié des amendes. Mais cette proportion n'étant pas suffisante, l'instruction et le jugement de ces causes sont arrêtés, et le crime reste impuni. Par l'arrêt du 26 octobre 1683, les sommes nécessaires seront prises sur les revenus des domaines royaux, et payées par leurs fermiers. Les juges toucheront seulement leurs frais de nourriture et de voiture pour leurs enquêtes, sans aucunes épices, droits et vacations, ni les droits et salaires des greffiers. Les fermiers poursuivront le remboursement de ces avances sur les deux tiers des biens confisqués des condamnés et exécutés[145]. Si l'on choisit un exemple touchant non plus le roi, mais le particulier, on apprend que, dans les différends sur la reconnaissance des promesses et billets sous seing-privé, le juge, chargé de la vérification des pièces, dressera un seul procès-verbal pour lequel il sera versé un écu au conseiller de parlement, quarante sous aux officiers des bailliages et des sénéchaussées où il y a un siège présidial, et vingt sous aux autres[146]. Et défense absolue d'outrepasser ce tarif. Le Tellier s'efforce enfin d'inculquer aux magistrats l'observation des formes et des ordonnances, ce que jusqu'alors ils ont trop souvent négligé par paresse, ignorance ou légèreté. Ainsi, le concile de Trente ayant déclaré que le mariage n'est pas un sacrement quand il n'est pas fait par le propre curé et en présence de témoins, les cours appliqueront les règlements royaux, qui privent les contractants des effets civils, quand les formes prescrites n'ont pas été observées[147]. Ainsi, Le Tellier se refuse à modifier la jurisprudence particulièrement quand le bien du service de Sa Majesté et celui de ses sujets n'en souffrent point et qu'elle n'est pas directement contraire à l'ordonnance[148]. Ainsi encore, il reproche au premier président du parlement d'Aix d'avoir empêché cette cour de délibérer sur l'envoi d'une députation au roi : Vous savez, dit-il, que l'ordonnance permet aux compagnies de faire des remontrances après l'enregistrement des lettres patentes, et il est juste de les maintenir dans cette liberté[149]. Par contre, il désire introduire la législation française dans les pays récemment réunis et y faire observer les grandes ordonnances publiées depuis 1667. Rien n'est plus utile au service du roi, mande-t-il au premier président du parlement de Metz, que d'abolir doucement les styles de Lorraine. Au président du conseil-de Pignerol : Il est convenable de suivre autant qu'on peut les maximes de France dans les pays cédés, surtout quand les peuples s'y accommodent. Si, au contraire, le pays a toujours été gouverné, tant à l'égard de la justice que de la police, différemment des autres provinces du royaume, comme le Béarn, l'intendant doit prudemment observer ce qui se passe, écouter ce qu'on vous représente et en donner avis simplement le roi prendra la décision selon qu'il sera de son bon plaisir et autant que son service le pourra requérir[150]. Et, de ce souverain, il défend avec énergie les droits en matière judiciaire. Il admoneste, en particulier, les conseillers normands, parce qu'ils accordent des commutations de peine, ce qui n'appartient qu'au roi, et ne se soumettent que de mauvais gré[151]. Il enjoint, en même temps, à la cour de Paris d'informer Sa Majesté la qualité des accusés, de celle de leur crime et de leur infirmité. Il s'agit ici des galériens invalides dont Sa Majesté consentira, sur les propositions du parlement, mais en agissant selon son bon plaisir, à commuer la peine en celle du fouet et de la fleur de lys, outre le bannissement[152]. En somme, le chancelier a usé de divers moyens pour remettre, peut-on dire, sur pied la magistrature et lui permettre de distribuer la justice sainement, sans retard et en connaissance de cause. Il n'a pas ménagé ses efforts, afin qu'ayant recouvré son ancien renom, elle participe avec le roi et son ministre au soulagement des sujets. VII. — La lutte contre les conflits de préséance et d'attributions. Il a eu, d'ailleurs, fort à faire. Car le monde judiciaire est un monde fort agité. Il a perdu la notion de l'intérêt général, en faveur duquel il doit agir, pour se préoccuper avant tout de ses droits, c'est-à-dire de ses privilèges, et aussi de sa situation matérielle, c'est-à-dire considérer la charge qu'il a achetée comme un capital devant rapporter le revenu le plus élevé possible. De là des conflits et des abus susceptibles de désorganiser, d'enrayer et de fausser la justice. Ce n'est pas la moindre tâche à laquelle a dû se consacrer Le Tellier : la multiplicité de ses lettres prouve la variété et la profondeur du mal, qu'il a voulu atténuer, sinon guérir complètement. Les moins importants des conflits, mais non les moins vifs, sont ceux de préséance, en particulier dans les présidiaux. Les officiers de celui de Bourges prétendent que, dans les jugements qu'ils rendent avec l'intendant, leur nom soit placé immédiatement après celui de ce magistrat. Ils ont raison, dit Le Tellier, parce que dès lors que vous êtes obligé de juger dans un présidial, les conseillers qui le composent sont juges délégués comme vous[153]. Le parlement de Bordeaux ayant refusé de reconnaître les présidiaux créés à Sarlat et à Libourne, entend néanmoins que le roi lui communique la réception des officiers de ce siège : prétention injustifiée[154]. A Sarlat même, les huissiers manifestent l'intention de se mettre en grève, parce qu'ils ne peuvent souffrir la qualité du premier huissier qu'a l'un de leurs confrères : s'ils ne servent pas avec l'assiduité qui convient, ordonne le chancelier, il faut les interdire et commettre des praticiens pour exploiter leur place[155]. A Saintes, le lieutenant général et le procureur du roi font difficulté de se voir : l'inimitié qui est entre vous et lui, écrit Le Tellier à l'un et à l'autre, vous regarde personnellement et non le devoir de votre charge. Ainsi, quand le service du roi ou celui du public requerront que vous l'alliez voir, vous devez le faire sans que vous en puissiez être retenu sous quelque prétexte que ce soit[156]. En Provence, l'intendant s'est abstenu d'assister à un Te Deum, le parlement n'ayant pas voulu lui permettre de prendre, dans l'église, le rang de commandant dans la province : mais, lui répond le chancelier, puisque le lieutenant du roi, Monsieur de Grignan, est dans le pays, votre pouvoir et votre caractère de commandant cessent[157]. A Vienne, le lieutenant du prévôt a refusé de signer une sentence rendue au présidial, parce qu'on n'a pas voulu qu'il signât le premier et à la place la plus honorable : le prévôt, objecte Le Tellier, ne devant apposer sa signature qu'après le premier conseiller, son lieutenant ne peut, au plus, avoir d'autre prérogative[158]. Il ne serait pas mal aisé de multiplier les mauvais exemples, causés par cette susceptibilité outrée et ces piqûres d'amour-propre mal entendu. Ce sont ensuite des conflits d'attributions, beaucoup plus ennuyeux et graves, chacun cherchant à empiéter sur le domaine du voisin. Les magistrats en exercice, par exemple, contestent que, dans chaque présidial, il y ait plus de deux conseillers ayant obtenu, après vingt ans de service, des lettres d'honoraire ou de vétéran. Touchant les intérêts particuliers, cette question de l'honorariat est, par suite, très âpre. Le Tellier, fatigué de répondre, semble pour une fois perdre sa patience coutumière : Il est bon que vous sachiez, écrit-il au présidial de Blois le 9 septembre 1685, ce que je vois que la plupart des officiers ignorent comme vous, c'est que, quoique dans les lettres de vétérans, il soit dit qu'il n'y aura que deux officiers vétérans, l'impétrant compris, cela s'entend avec la compagnie lorsqu'elle tient le siège, parce qu'il n'y doit avoir que deux opinants honoraires : mais le roi n'a pas voulu restreindre à ce chiffre le nombre de ses vieux serviteurs, qui doivent obtenir la récompense due à leur mérite[159]. Si, par suite d'absence ou de récusation de tous les officiers, le conseiller honoraire, resté seul, entend connaître des affaires, il n'est pas fondé dans sa prétention : car il n'a pas à exercer la fonction de juge, il a simplement l'honneur d'être assis au siège et d'y opiner et avoir voix délibérative[160]. Dans les parlements, les difficultés sont analogues et offrent une très grande variété. A Toulouse, les conseillers de la grand'chambre, allant servir à la Tournelle, prétendent succéder aux places et aux procès de ceux qu'ils relèvent et éluder ainsi la liberté qu'ont les présidents de distribuer des procès selon la connaissance qu'ils ont de la capacité des conseillers pour les différentes natures d'affaires : Le Tellier les rappelle à l'ordre[161]. A Bordeaux, les gens du roi ne sont pas d'accord sur leurs fonctions : avocats généraux et procureur général se disputent la plaidoirie et la plume. Par un arrêt du vingt avril 1684, en quinze articles, le chancelier explique aux uns et à l'autre le rôle spécial qu'ils doivent jouer dans l'administration de la justice et, comme le procureur général a déclaré ne pouvoir être censuré que par le roi, il le ramène à une vue plus saine de la réalité, lui disant : Il est vrai que vous ne devez rendre compte de votre conduite qu'à Sa Majesté pour les choses qui peuvent regarder son service : mais, s'il n'a rien à dire à cet égard, en ce qui concerne la distribution de la justice, le parlement peut vous en demander raison[162]. A Dijon, le différend entre la cour et le procureur général s'est vite aggravé et aigri, les deux parties tendant à agir indépendamment l'une de l'autre et envoyant au chancelier mémoires sur mémoires pour exposer leurs thèses et soutenir leurs prétentions si variées et si bizarres, qui sont longuement exposées dans l'arrêt du 5 septembre 1684, et touchent non pas seulement aux attributions professionnelles, mais encore à la moralité des deux adversaires. Le chancelier, en vertu de cet acte, règle le litige par un compromis : tout en sauvegardant la dignité du procureur général et certains de ces droits, il lui enlève tout ce qu'il s'était indûment attribué et le restitue aux conseillers[163]. A Metz, le procureur général a présenté, en pleine audience, des réquisitions verbales, de telle sorte que le public en a été scandalisé. Le Tellier lui apprend qu'il aurait dû former opposition par écrit, attendre que le parlement se fût prononcé à cet égard, et, ensuite, s'adresser au roi, à qui revient la dernière décision. Ici encore le bruit a été grand, le premier président, le procureur général et les magistrats en ayant écrit au chancelier[164]. A Rouen, les conseillers de la chambre des requêtes sont peu considérés par leurs confrères, qui tâchent de les maintenir à l'écart et de restreindre leur compétence. La déclaration du 6 juillet 1680, réglant le conflit, prescrit qu'ils assisteront à toutes les assemblées des chambres, sauf à celles qui se tiendront pour le jugement des procès des particuliers. Si une députation est décidée par le parlement, un conseiller des requêtes en fera partie, dans le cas où il y en aurait un des enquêtes. Surtout, les attributions professionnelles sont précisées avec une minutie extrême, pour éviter tout empiètement à l'avenir et pour que les officiers vivent entre eux en bonne intelligence[165]. A ce différend, en succède un autre. Après avoir, au début de l'année judiciaire, opté pour un service, les présidents des chambres en prennent à leur aise, vont n'importe où, de telle sorte que les conseillers de certaines d'entre elles se plaignent de n'avoir personne pour présider. L'arrêt du 1er septembre 1685 ordonne que les présidents ne devront pas abandonner le service choisi, sauf dans le cas où par absence, maladie ou légitime empêchement, il ne s'en trouverait aucun dans une chambre[166]. L'entente fut-elle rétablie par ces règlements entre les diverses catégories de parlementaires, et par les décisions logiques et raisonnables du chancelier ? Il serait téméraire de l'affirmer. D'autre part, dans les cours supérieures comme dans les présidiaux, il est un motif général de discorde : dans toutes ces compagnies se trouvent des parents. De là des intrigues, des coteries pour que tous aient la même attribution, celle du droit de vote, qui établirait entre eux l'égalité et leur donnerait une influence semblable dans les procès ou les assemblées. Ainsi s'est posée la question des incompatibles, titulaires et honoraires, que Le Tellier eut beaucoup de peine à résoudre. A deux reprises, le 30 juin 1679 et en janvier 1681, il est obligé de rappeler les magistrats au respect de l'édit de juillet 1669 : les voix des parents au second degré ne seront comptées que pour une, quand elles seront uniformes[167]. Mais ces règlements ne sont pas volontiers compris par les magistrats intéressés, et le chancelier est forcé d'entrer dans des détails infimes, qui surprennent le lecteur de sa correspondance. Il explique fréquemment, par exemple, que la parenté entre deux officiers, qui ont épousé les deux sœurs, ne pouvant être considérée que comme une alliance, ils ne peuvent ainsi faire d'incompatibilité : de même pour les cousins germains[168]. Il n'hésite pas à réprimander fortement les premiers présidents, qui ne se conforment pas aux édits ou les interprètent mal[169]. Il répond, sans se lasser, sur une foule de cas spéciaux, aux demandes de renseignements qui lui viennent de tous côtés[170]. Brienne le fils estimait que les fonctions de Louvois étaient toutes dans le détail : que dire de celles du chancelier quand on le voit forcé de s'occuper de tant de questions menues et d'importance si minime ? Entre les diverses juridictions enfin, c'est à qui empiétera le plus. Les parlements entreprennent sur l'autorité des présidiaux et des prévôts des maréchaux. Ils en veulent surtout à ces derniers, que Le Tellier soutient fortement en exposant à Leurs adversaires quelles sont leurs réelles attributions[171]. A leur tour, bailliages et sénéchaussées d'une part, présidiaux de l'autre s'efforcent mutuellement de réduire leur compétence au détriment les uns des autres. Mais, comme l'intention du roi n'est point que l'on intervertisse l'ordre des juridictions et qu'au contraire Sa Majesté veut que chacun fasse sa charge, des arrêts et des lettres particulières s'efforcent de remettre les choses au point, avec menace de forte pénalité contre les délinquants[172]. A leur tour, les élus tentent de prendre la qualité, de juges et d'en faire les fonctions : ils ne doivent se mêler d'autre chose que de ce qui regarde les tailles et les fermes, et non de ce qui concerne la justice ordinaire[173]. Bien plus, en Flandre, des gens non gradués ou les magistrats des villes jugent les affaires criminelles : erreur complète et contraire au bien de la justice, écrit Le Tellier à l'intendant[174]. Enfin, les trésoriers de France de Riom et les sénéchaussées de Riom et de Clermont se disputent le droit de lever les scellés, apposés sur les effets du défunt évêque de Clermont : pendant ce débat macabre, les pauvres souffrent et même les grains qui sont sous les scellés dépérissent. En conséquence, des économes sont ou seront nommés pour régir les fruits et les revenus temporels de l'abbaye de Manlieu et de l'évêché de Clermont. Les juges n'ont rien à voir là-dedans, sauf la sénéchaussée de Clermont, qui dressera l'inventaire des effets délaissés par le prélat et connaîtra des différends qui peuvent concerner sa succession[175]. VIII. — La lutte contre les abus. Si les conflits variés dans les cours et entre les diverses juridictions causèrent beaucoup de souci au chancelier, que dire des abus de toutes sortes, qui s'étaient glissés dans la magistrature et s'y étaient incrustés ? On a souvent, et à bon droit, insisté sur cette plaie, et il est inutile de refaire ici un tableau, fréquemment dressé. Seule l'action particulière de Le Tellier importe, et quelques exemples choisis permettront de l'apprécier. Tout d'abord, il convient de mettre un terme aux agissements de ceux qui ont intérêt à éloigner le jugement des affaires par un nombre infini de cédules évocatoires, signifiées la veille de la sentence ou pendant les vacations ou le dernier jour du semestre. Toutes ces malices doivent disparaître. Dans ce but, les juges passeront outre à ces évocations et termineront sans délai les procès pendants devant eux, et ceux qui useront de ce subterfuge seront condamnés à 300 livres d'amende. On ne saurait agir autrement pour les requêtes en cassation des arrêts de parlements, présentées abusivement devant le conseil du roi : les avocats, plaidant devant cette assemblée, ne devront en signer aucune avant la promulgation d'un arrêt, sous peine de 500 livres d'amende[176]. Si les plaideurs usent de toutes les malices, les magistrats ne leur cèdent en rien et, pour divers motifs, se livrent à de mauvaises pratiques. Procureurs généraux et conseillers gardent longtemps les pièces des procès après le jugement sans mettre les arrêts, ou les remettent à leurs clercs pour les expédier, ou les suppriment selon les avantages qu'ils en retirent. D'autres, à Toulouse, envoient indifféremment les informations aux greffes civil ou criminel, de telle sorte qu'on les décrète à la Grand'chambre comme à la Tournelle. Il en résulte une situation et bizarre et déplorable : En toutes les procédures, il se trouve deux accusateurs et deux accusés, parce que l'un s'adresse à la Grand'Chambre et l'autre à la Tournelle, l'accusé et l'accusateur se trouvent décrétés et souvent condamnés tous deux par contumace, l'un à la Grand' Chambre et l'autre à la Tournelle, en sorte qu'on voit l'accusateur et l'accusé effigiés en même temps. D'autre part, les greffiers ne répugnent pas à confier à autrui les originaux des actes, à eux remis. Craignant de n'être pas payés de la dépense du papier timbré et de leurs salaires[177], ils ne veulent même pas donner l'autorisation de prendre des copies et préfèrent laisser emporter les minutes originales. Le chancelier s'élève contre ces abus dans les déclarations particulières adressées à partir de 1681 aux parlements de Toulouse (juillet) et Dijon (décembre). Puis, le règlement général du 28 février 1682 décide que désormais les originaux devront rester toujours dans les greffes de ces cours, sauf dans le cas où les procédures seront arguées de faux ou les juges accusés de prévarication : il ne pourra en être délivré que des grosses ou copies. La question financière tient une grande place dans la vie
des magistrats, désireux d'augmenter leurs revenus grâce à des taxes et épices
de toutes sortes. Dans la plupart des cours, le président d'une chambre
appelle auprès de lui le plus ancien conseiller et le rapporteur d'un procès
sous le prétexte d'examiner rapidement la cause et de hâter ainsi le
jugement, en réalité pour prélever une taxe de 2 à 3 écus par séance. Dans
d'autres compagnies, on ne travaille point au sable dans
le palais. Aussi, lorsqu'il s'agit de compter
les heures pour compter les vacations, le calcul en est un peu arbitraire.
Un si méchant usage, dit Le Tellier, doit
être entièrement supprimé et il faut remettre les
choses dans le cours ordinaire[178]. D'autre part,
les magistrats, désignés pour effectuer des
descentes sur les lieux, se taxent eux-mêmes, mais ne gardent pas souvent l'équité, qui serait à désirer, dont
les sujets du roi souffrent. Avant de prendre une décision, le
chancelier demande aux intendants un mémoire contenant l'état des taxes qui
se lèvent, en distinguant nettement ce qui se prend
au parlement, à la cour des aides, aux présidiaux et aux sièges royaux subalternes : l'intendant émettra son
avis et le roi décidera en connaissance de cause. Rien de définitif ne put
être résolu, semble-t-il, puisqu'en 1685 encore le clerc d'un conseiller au parlement
de Toulouse recevait une pistole par jour pour ses vacations,
comme ayant dressé le procès-verbal, quoique ce fût au greffier de la
commission[179]. Bien plus fréquent et grave est l'abus des épices. L'imagination des magistrats se donne ici libre carrière dans tous les tribunaux sans exception et se met au service de la cupidité. Les rapporteurs d'un procès ne consentent à envoyer aux greffes les arrêts qu'après avoir touché les épices, de telle sorte que les accusés, même absous, restent en prison et que, pour ce motif, le conducteur des forçats n'a pu prendre livraison de trois condamnés aux galères. Indigné de cette manière d'agir des juges, Le Tellier écrit : Il leur importe de changer une conduite si préjudiciable au bien de la justice et contraire au désintéressement dans lequel doivent vivre ces magistrats que Sa Majesté prépose pour la rendre : si l'on ne se corrige, le roi sévira durement contre ceux qui contreviendraient à sa volonté[180]. Nullement touchés par ces arguments moraux, certains vont plus loin encore Pour être assurés de recevoir de l'argent, ils ont introduit l'usage de faire consigner les épices avant de mettre le procès sur le bureau et de le faire juger. Il en résulte des situations extravagantes, comme le fait ressortir Le Tellier : Un appelant d'une sentence, qui l'a condamné à mort, étant ès prisons des conciergeries, est souvent obligé, faute par la partie civile de faire la consignation pour faire juger le procès, de la faire lui-même, afin d'éviter la longueur de la prison dans l'attente de la mort qu'il sait qu'il ne peut éviter. La déclaration du 26 février 1683, qui signale ce cas bizarre, ordonne que tous les procès civils et criminels doivent être incessamment rapportés et jugés, et prononce de dures peines contre les délinquants. Car, dit ailleurs le chancelier, il est indigne d'un magistrat de se faire payer de ses peines par avance et encore plus de recevoir de la main de la partie[181]. Il se heurte aussi à la rapacité des greffiers, déjà signalée. Plusieurs sont condamnés[182]. Mais, la répression s'avérant impuissante, Le Tellier tente, en 1684, de mettre un frein à cet abus en promulguant des règlements qui concernent les greffiers du parlement de Paris et des prisons. Dans ces actes, non seulement il délimite, amplement et avec un soin extrême, la nature de leurs fonctions et leur compétence, mais encore fixe dans le plus grand détail et pour tous les cas les sommes qu'ils doivent toucher. Rien ne montre mieux que ces deux documents les exactions commises par ces officiers et l'action du chancelier pour y mettre un terme, en ne laissant place à aucune échappatoire[183]. Le Tellier, toujours à propos de l'argent, a eu à s'occuper fréquemment des prisonniers, exploités, comme nous l'avons vu, de diverses façons. Sans doute, à Toulouse, les conseillers du parlement, soit par humanité, soit par intérêt, soit par esprit d'indépendance, descendent dans les geôles lors des grandes fêtes et libèrent des prisonniers, que l'assemblée des chambres avait, cependant, estimé devoir demeurer et ne pas jouir de cette grâce : Le Tellier rappelle ces magistrats à plus de circonspection[184]. Bien plus difficile et important est le problème de l'alimentation des détenus, dont huissiers et greffiers exigent diverses sommes, et qui, d'autre part, meurent parfois de faim[185]. Pour arrêter ces trafics et déterminer les obligations de chacun, le chancelier publie, en janvier 1680, une importante déclaration de portée générale. Il interdit à tous huissiers et autres d'emprisonner aucuns de nos sujets pour dettes... sans consigner entre les mains du greffier de la prison ou du geôlier la somme nécessaire pour la nourriture du prisonnier pendant un mois. Cette dépense incombe aux créanciers, qui verseront à l'avance et mensuellement pareille somme. Faute de quoi ; les conseillers parlementaires, chargés de la visite des prisons, ordonneront l'élargissement du prisonnier, sur sa simple réquisition, sans autre procédure. Greffiers des prisons et geôliers ne percevront pas des droits plus élevés que ceux réglés avec précision dans le document, et rendront, en cas de décès ou d'élargissement, ce qui restera des sommes à eux consignées par le détenu ou ses créanciers[186]. Les principes d'humanité et, aussi et surtout, les finances, royales seront sauvegardés. Le Tellier a encore à se prémunir contre des faux de toutes sortes. Ceux qui exposent la fausse monnaie, dit-il, ne sont pas moins coupables que ceux qui la fabriquent. Bien que les ordonnances ne les condamnent pas précisément à la peine de mort, il convient de la leur appliquer. Si le faussaire est un ecclésiastique, il sera jugé par le présidial, la qualité de son crime l'ayant rendu indigne du privilège de ceux de son caractère[187]. Ceux qui ont fait et passé de faux contrats et porté faux témoignages sont encore plus dangereux : car leur crime attaque singulièrement la société civile et trouble le repos de la sûreté des familles. Tous les officiers qui l'auront commis pendant leurs fonctions seront punis de mort. Ils sont nombreux, puisque la déclaration de mars 1680 énumère juges, greffiers, ministres de justice, de police et de finances de toutes nos cours et juridictions... ceux des officialités et des justices des seigneurs, officiers et ministres des chancelleries, gardes des livres et registres des chambres des comptes et des bureaux des finances, ceux des hôtels de ville, archiviers, leurs clercs et commis. Même peine contre les faussaires des lettres de chancellerie. Dans le Gévaudan, aucun notaire ne pourra exercer avant d'avoir été reçu et fait enregistrer ses provisions dans la sénéchaussée, la présentation du contrat d'achat de cet office ne suffisant plus. Dans tous les actes notariés, si une partie déclare ne pas savoir écrire, la présence et la signature de deux témoins sont indispensables, sous peine de nullité[188]. Le présidial de Rennes, de son côté, ne sachant de quelle manière juger les fabricateurs de faux timbres, Le Tellier, avant de répondre, demande un extrait des charges, informations et procédure[189]. Les faux pour acquérir des titres de noblesse ne pouvaient manquer à cette liste. Les cours en ont enregistré beaucoup : le lieutenant général de Coutances en a acheté et se propose de les présenter au parlement et à la cour des aides de Rouen. Le Tellier prie l'intendant Le Blant d'avoir l'œil sur ces agissements délictueux[190]. Quant à ceux qui ont été replacés parmi les roturiers et entendent faire réviser cette décision sous prétexte de pièces nouvellement recouvrées, le roi ne veut pas que l'on écoute des suppliants de cette nature et qu'on les autorise à se pourvoir par quelque voie que ce soit et sous quelque prétexte que ce puisse être[191]. Il est impossible de mentionner toutes les autres sortes d'abus, auxquels le chancelier est tenu de mettre fin. On le voit, par exemple, édicter la peine de mort contre les auteurs coupables et complices de vols et larcins, commis dans les maisons royales, comme l'avant-cour du château de Versailles[192]. Il fait rechercher les bigames, recommandant de ne pas les condamner à mort : La peine des galères perpétuelles serait la plus convenable, Sa Majesté estimant qu'elle serait plus utile à son service que l'autre ne donnera satisfaction au public[193]. Pas plus que ses contemporains, il n'a d'indulgence pour les Bohêmes ou Egyptiens, ces voleurs que l'on n'a pu chasser entièrement du royaume. Les hommes seront attachés à la chaîne des forçats et serviront sur les galères à perpétuité, les femmes et les filles seront rasées, et, si elles continuent de vaguer et de vivre en bohémiennes, fustigées et bannies : les jeunes enfants, envoyés dans les hôpitaux pour y être nourris et élevés comme les autres enfants qui y sont enfermés. Les gentilshommes, osant accorder retraite et protection chez eux à ces vagabonds, seront privés de leur justice, poursuivis, et leurs fiefs réunis au domaine royal[194]. Arrêtons-là cette énumération des cas particuliers si divers : il serait aisé de l'allonger. Elle suffit pour montrer combien étendue et malaisée fut la tâche du chancelier. IX. — L'organisation de la juridiction ecclésiastique. En résumant l'administration judiciaire de Le Tellier, comme les autres auteurs d'oraisons funèbres, Bossuet ajoute une note particulière : Sous la conduite de ce ministre, dit-il, nous avons comme un nouveau code favorable à l'épiscopat[195]. Opinion juste, Le Tellier n'ayant pas, en effet, négligé la justice ecclésiastique. Il a tenu d'abord à relever les études de droit canonique, comme celles de droit civil : même obligation pour les étudiants de suivre les cours pendant trois ans et d'acquérir les grades de bachelier et de licencié. Par l'article IX de l'édit d'avril 1679, les ecclésiastiques, qui ne voudront obtenir les degrés qu'en droit canon, pourront seulement répondre dudit droit. Cependant, comme cet édit ne mentionne pas spécialement les officiaux et qu'il importe que ces juges d'église possèdent la doctrine et la capacité nécessaires pour leur ministère, la déclaration du 26 février 1680 précise que nul ne pourra l'exercer, s'il n'est licencié en droit canon, le tout à peine de nullité des sentences et jugements qui seront rendus[196]. Les docteurs en théologie de la faculté de Paris ayant protesté contre leur exclusion, qui priverait l'église du secours qu'elle a tiré jusques à présent de leur travail et de leur zèle, Le Tellier a modifié en leur faveur sa première résolution. Seront admis à accomplir les fonctions d'officiaux ceux qui seront licenciés ou docteurs en théologie dans la faculté de Paris ou dans les autres facultés de théologie ou du droit canon dans notre royaume[197]. Certes, il ne confond pas le caractère particulier de chacune des deux matières : Le temps d'étude, dira-t-il, fait en théologie, ne peut servir pour obtenir les degrés en droit canon : ce sont deux études différentes[198]. Mais une seule chose importe à ses yeux : les futurs juges doivent être gradués et il ne se relâchera que très rarement et pour des raisons exceptionnelles de cette règle absolue[199]. Comment s'exercera cette justice, pourvue d'officiaux
instruits[200]
? Le Tellier pense, tout d'abord, à supprimer les différends survenus par
suite des interprétations diverses des anciennes ordonnances. Les ecclésiastiques
sont troublés, remarque-t-il, en la jouissance de leurs privilèges et immunités :
les diocèses, enclavés dans le ressort de divers
parlements, ont à se conformer à des usages différents ou contraires :
dans ces contestations, les personnes privilégiées peuvent s'assurer
l'impunité. Telles sont les raisons invoquées dans le préambule de la
déclaration de février 1678, relative à la procédure qui sera suivie dans les
procès criminels intentés à des ecclésiastiques. L'instruction en sera faite conjointement tant par les juges d'église que par nos
juges, dans le ressort desquels sont situées les officialités. Les
magistrats royaux iront au siège de la juridiction ecclésiastique, y
procéderont aux interrogatoires des témoins, aux confrontations, le tout devant
être consigné par les greffiers en des cahiers
séparés de ceux des greffiers des officiaux. Le jugement sera rendu
par eux d'après cette procédure, sans que, sous
quelque prétexte que ce puisse être, lesdits juges puissent juger lesdits
ecclésiastiques sur les procédures faites par les officiaux pour raison du
délit commun. Si, d'autre part, des procès intentés à des
ecclésiastiques sont instruits dans des parlements, les évêques donneront leur vicariat à l'un des conseillers clercs desdits
parlements, qui, conjointement avec un collègue laïque, procédera
contre l'inculpé[201]. En juillet 1684, cette déclaration générale est interprétée par une seconde pour maintenir la discipline de l'église et conserver à ses ministres la juridiction qu'ils exercent sous notre protection, et préciser les modalités. Si un official déclare vouloir instruire des procès intentés à des ecclésiastiques, ceux-ci, dans la huitaine, sont transportés dans les prisons de l'officialité. Dans le même temps, le juge royal du lieu, dans lequel on prétendait que le écime a été commis, doit se rendre au siège de cette officialité, quand même il serait hors le ressort dudit siège. L'enquête sera effectuée en commun : l'accusé est ensuite ramené dans les prisons royales et jugé par les magistrats royaux[202]. Ainsi la justice ecclésiastique est maintenue : la justice
royale l'aide, la protège et a le dernier mot. Dès 1665, à la commission de
réformation, Le Tellier avait déjà exprimé cette idée à la séance du 25
octobre : Les tribunaux ecclésiastiques,
avait-il dit, sont soumis à la juridiction royale,
dont la preuve est évidente par l'appel comme d'abus, qui justifie leur
dépendance et les soins qu'on a eu de prévenir leur entreprise[203]. Aussi tient-il
la main à ce que les empiétements des officiaux soient réprimés : Il faut, écrit-il au parlement de Besançon, que vous conteniez la juridiction ecclésiastique dans les
bornes qu'elle doit avoir suivant les ordonnances du royaume et qu'en tous
rencontres vous mainteniez les libertés de l'église gallicane comme font les
autres parlements du royaume[204]. Mais il ne
tient pas davantage à ce que cette action parlementaire puisse être regardée comme une entreprise sur la juridiction ecclésiastique,
ainsi qu'il le dit à la cour de Provence[205]. Que chacun
accomplisse sa fonction suivant l'ordonnance et
reste dans les limites de son domaine : l'entente régnera et la distribution
de la justice s'effectuera sans difficulté[206]. Le Tellier, en somme, a entendu que les juges ecclésiastiques exercent leur charge avec régularité, zèle et compétence, de façon à acquérir ainsi le respect, comme leurs collègues. Ici, comme en bien d'autres matières, les préoccupations morales tiennent une grande place[207]. X. — La surveillance de la librairie. il appartient enfin au chancelier de France de surveiller étroitement la librairie, d'arrêter selon les paroles de Fléchier l'intempérance d'esprit et la licence d'écrire de ceux qui... jettent dans le public les fruits amers de leurs études frivoles ou mal digérées[208]. Sans parler des édits ou arrêts bien connus, promulgués ou visés par Le Tellier, la conception du chancelier ressort nettement de ses lettres aux parlements et aux intendants. La cour de Grenoble, ayant confié à l'évêque l'examen du Miroir de la piété chrétienne, est invitée à ne prendre aucune connaissance des livres en ce qui concerne la foi et la religion. Elle n'a qu'à ordonner, par manière de police, la suppression de ceux qui ne sont pas imprimés conformément aux règlements ou sont contraires au service du roi et au bien du public[209]. Même situation à Bordeaux, où le parlement fait procéder, par l'université, à l'examen d'un ouvrage du ministre Merlat : selon le chancelier, la compagnie ne peut pas s'être exclue d'en juger elle-même en définitive, et, ainsi, les juges sont en liberté d'opiner comme ils croiront pour le mieux[210]. A Rouen deux livres ont été imprimés par permission du parlement normand. Le Tellier est surpris qu'il ait donné de tels privilèges, et d'autant plus qu'ils ont toute l'étendue du grand sceau, où seulement ces sortes de grâces s'expédient. La cour s'abstiendra donc à l'avenir, et, profitant de l'occasion, le chancelier ajoute qu'il parait souvent à Paris des arrêts donnés par ledit parlement, contraires aux règles de la justice : le premier président, qui a plus d'intérêt que personne à la réputation de la compagnie, devra veiller à ce qu'elle ne reçoive de diminution. Mais la fraude s'installe à Rouen où l'on imprime secrètement et sans privilège des ouvrages, par exemple La foi dévoilée en 1681. L'intendant, informé, est invité à faire saisir tous les exemplaires et en faire rompre les planches, avant d'entreprendre la procédure contre le libraire, ainsi que de raison. Par désir de gain, les commerçants normands n'hésitent pas à se soustraire à leurs obligations. Aussi, lorsqu'un magistrat s'oppose à leurs agissements illicites, refuse de donner mainlevée pour le débit du livre imprimé à Cologne, quoiqu'il ait été approuvé des docteurs, jusques à ce qu'il vous apparaisse du privilège du grand sceau, le chancelier le félicite-t-il vivement[211]. A Lyon, contestations, intrigues, luttes analogues entre
les imprimeurs-libraires et l'intendant Dugué, beau-frère de Le Tellier. En
1681, le Père Malebranche demande, à Paris, au grand sceau le privilège pour
son Traité de la nature de la grâce. Mais, à Lyon, on l'imprime, sans
attendre, en lui donnant pour titre le Quatrième tome de la Recherche de la
vérité : il existe aussi des exemplaires de ce livre qui paraîtront de l'impression de Bruxelles ou d'Hollande.
Il faut tout saisir, ordonne Le Tellier, et arrêter les imprimeurs. Mais les
Lyonnais ne se laissent pas décontenancer, ils impriment et débitent des
ouvrages sans privilège du grand sceau : il
faut sévir contre tous ces marchands, et, par quelque châtiment, arrêter la
liberté qu'ils prennent. En 1682, il s'agit des Réflexions sur les vérités
évangéliques et du Dictionnaire de Richelet, qui
est une espèce de libellé diffamatoire. Le Tellier expédie un arrêt :
mais, avant de te faire signifier et exécuter,
Dugué devra recueillir de Crieuses informations, afin
qu'on ne fasse pas de bévue. Pourchassés ainsi, les libraires
soutiennent avoir le droit d'imprimer un livre, quand
il l'a été avec privilège du grand sceau, même quand le temps porté par ledit privilège est expiré. Le
Tellier est, cette fois, d'accord avec les malins : Ils
ne se trompent pas... : c'est la règle
établie de tout temps et il n'y a pas été dérogé. Cela ne l'empêche
pas de continuer sa surveillance contre la tromperie. Un marchand lyonnais de
dentelles ne s'avise-t-il pas, en 1683, d'avoir dans sa boutique quelques livres espagnols de prières et grammaire et
autres livres non défendus ? Pour cette fois il les expédiera à ceux
qui le désireront : Mais il faut bien lui défendre
de se mêler, ni d'autres marchands que des libraires, d'en faire le débit en
quelque manière que ce soit[212]. A son tour, le parlement d'Aix n'observe pas les règlements. Il a permis à Un prêtre de faire imprimer et vendre pendant dix ans l'Explication des usages et coutumes des Marseillais. Il a outrepassé ses droits ; car, il n'y a que le grand sceau seul, d'où puissent émaner les privilèges pour l'impression des livres. Même quand il s'agit de livrets ou feuilles volantes, dont les magistrats des villes permettent l'impression après qu'ils sont approuvés, ces magistrats ne peuvent pas défendre à d'autres de les imprimer, le pouvoir des juges n'ayant point cette étendue[213]. Comme on l'a vu déjà Le Tellier prend en mains la cause de la grande chancellerie et rappelle constamment les libraires au respect des ordonnances. Il renvoie le plus souvent à celle de 1667, qui a une portée générale. Il procède par arrêt sur des cas spéciaux : par exemple, celui du 29 avril 1678 oblige les solliciteurs des permissions à adresser au chancelier une copie manuscrite du futur ouvrage : celui de février 1682 est un règlement concernant l'imprimerie et librairie lyonnaise. Le 22 mars de cette même année est publié l'arrêt destiné à mettre un frein à la malice si ingénieuse des libraires. Ceux-ci, sous le titre de tome II et subséquents, impriment en réalité des ouvrages nouveaux, où on a glissé des maximes et des matières suspectes. Ou bien, ils ajoutent des préfaces, avertissements ou épîtres dédicatoires, où les auteurs insèrent des choses qu'ils n'ont osé mettre dans les corps des livres. Tous ces trafics sont absolument interdits pour mettre un bon ordre à l'imprimerie et à la librairie. Il faudra une nouvelle approbation et de nouvelles lettres de privilège, délivrées par la grande chancellerie[214]. Ces efforts furent vains ; les libraires réussiront, on le sait, à exercer leur métier lucratif en marge de la loi et les fraudes, dont ils usèrent, continuèrent comme avant. XI. — Jugement sur l'œuvre judiciaire de Le Tellier. Les contemporains ont loué l'œuvre judiciaire de Le Tellier. Les auteurs d'oraisons funèbres l'ont appréciée en termes plus ou moins généraux. Hersan insiste sur la faiblesse des études juridiques et leur relèvement : Fléchier, sur l'ordre établi par le chancelier dans le conseil, sur ses principes inviolables d'une exacte et sévère équité, sur la lutte menée conte les malignes subtilités de l'avarice et la longueur des procédures : Bossuet, sur sa justice qui n'était pas moins prompte qu'elle était exacte, l'autorité qu'il donne aux arrêts du conseil, et le désir de Le Tellier de tenir la balance égale ; Maboul, enfin, qui appartient à une famille de magistrats, sur les méfaits du monstre de la chicane, fortement affaiblie par le chancelier, la réduction de la procédure, la volonté de supprimer l'ignorance chez les juges, la façon dont le Tellier rendait la justice, impartiale, n'ayant égard ni à la grandeur ni à la misère et écoutant tout le monde avec une égale douceur[215]. D'après Le Pelletier, le chancelier se fit craindre des
mauvais juges et fortifia les bons plus par son
exemple que par son autorité. Il établit dans
le conseil du roi plus en faisant qu'en parlant une pureté, un zèle et une
application avec émulation à bien faire son devoir, qui servait de modèle à
toutes les compagnies du royaume[216]. Plus
brièvement, mais non moins justement, Sourches note : La justice s'exerçait avec toute l'exactitude possible sous un
chancelier également habile et bien intentionné[217]. Un siècle plus
tard, un protestant, Rulhières, qui a consulté le recueil des lettres du
premier magistrat, traduit ainsi l'impression résultant de sa lecture r On le voir, dit-il, ralentir
leur impétuosité (celle des parlements), se conduire en sage modérateur, en digne chef de la
justice[218]. A cette conclusion est aussi conduit l'historien, qui, loin de considérer Le Tellier comme doté d'un titre purement honorifique, voit en lui un chancelier agissant, ayant réalisé sans faiblesse, avec fermeté, régularité et conscience, une tâche assurément importante. Il a voulu que les magistrats fussent instruits et eussent le sentiment de l'honneur et de la dignité, que la justice ne fût plus un objet de commerce et fût rendue avec impartialité et sans délai pour le soulagement des peuples. Il a poursuivi sans faiblir les abus innombrables et de toutes sortes qui faussaient cette administration. Son but général et très élevé, d'inspiration à la fois technique et morale, fut de rendre aux sujets la confiance, qu'ils avaient perdue, dans la justice du roi. Là doit s'arrêter l'historien. Pour lui, il est de toute évidence que le travail d'un juriste sur l'œuvre judiciaire de Le Tellier apporterait des renseignements inédits, curieux et importants sur l'état de la magistrature française dans le dernier quart du XVIIe siècle : il est à souhaiter qu'une étude de ce genre soit entreprise. |
[1] Curzon, L'enseignement..., ext. de N. Rev. Droit fr. étr., 1919, t. 43, p. 209 et 305.
[2] Rulhières, chap. 14 : — Camus et Dupin, édit. de 1832. — Ces documents sont les suivants : 1° B.N., f. fr., 5267 ou 21118, Recueil de lettres écrites depuis le 1er janvier 1678, concernant la justice, par Monseigneur Le Tellier, chancelier de France : — 2°, B. N., f. fr., 10985, Recueil de quelques lettres concernant la justice, écrites par Monseigneur le chancelier Le Tellier, depuis 1678 jusques en octobre 1685 qu'il est décécl6 : — 3°, Recueil des édits, déclarations et arrêts, qui ont été donnés sur diverses occurrences concernant la justice (t. I, janvier 1678-31 mars 1682 : — t. II, 1682-octobre 1685 : imprimés in-4°, reliés en beau maroquin, aux armes de Le Tellier, se trouvent à B. S. G., réserve, 4° F, 743). Il faut aussi consulter Isambert, XIX, n° 863-1192 : — B. N., f. fr., 8753 à 8757 ter, correspondance de Le Blant, intendant de Rouen : — Fr. Duchesne, Hist. des chanceliers... : — Ab. Tessereau, Hist. grande chancel... : — P. Viollet, Le roi et ses min., p. 190, 195, 312, et Hist. du dr. civ. (bib., p. 260).
[3] Relat. de la conduite présente... dans Arch. cur., 2e série, t. X, p. 60.
[4] Pour les détails biographiques, v. L. André, Deux mém. inéd., (Vie du chancelier..., par Cl. Le Pelletier).
[5] Arch. Doud., cart. 152, li. 589 : ces diplômes, sur parchemin, rédigés en latin, sont en très mauvais état.
[6] Id., cart. 161, li. 579 : — Cf. Duchesne, 289.
[7] Id., cart. 151, li. 579 : en attendant le paiement, intérêts au denier 16 (6,33 %) : la charge rapportait 600 livres de gages et autres droits. — Cf. Pageau ; 10.
[8] Arch. Doud., cart. 152, li. 587. — D'après B. N., M. M., 228, notice 13, Le Tellier aurait évincé un concurrent, parce qu'il payait comptant. Il lui manquait 10.000 écus : Louis Le Pelletier, son ancien tuteur, père de Claude, étant alors dans l'administration financière, les lui aurait fournis, ou la moitié. Comme ces notices sont établies d'après les mémoires de M. L. C. D. R., œuvre de Courtilz de Sandras, le renseignement doit être accueilli avec réserve.
[9] Gazette, 28 octobre 1631.
[10] Arch. Doud., cart. 126, li. 478.
[11] Le Pelletier, 50 : — Bossuet, 410 et sq. : — Fléchier, 8 : — Maboul, 9.
[12] Se trouve dans Félibien, édit. de 1725, in-f°, t. 4, p. 119.
[13] Sauval, Hist. et recherch., I, 225-6 : — Poète, Rev. Par., 1912, 1er mai. — Il se souviendra longtemps de cette époque : Je n'ai pas besoin d'exemples pour me persuader que vous êtes dans ce droit-là (tenir les criées). Je serais celui qui pourrait même vous en fournir, parce que je l'ai vu du temps que je servais au Châtelet, me souvenant très bien que la criée du duché d'Aiguillon fut faite par devant M. Moreau, lieutenant civil : B. N., f. fr., 5267, p. 109, — ou 21118, p. 113, au lieutenant civil Le Camus, 30 septembre 1679.
[14] Arch. Doud., cart. 152, li. 587.
[15] Id., cart. 151, li. 286 et 576. — A. N., M. M., 828, notice 13 : M. Le Tellier, le père, qui a été chancelier de France, a dit souvent à Messieurs ses enfants et petits-fils qu'il avait l'obligation de sa fortune à M. de Bullion.
[16] V. L. André, Deux mém. inéd., p. 51, note 5 : — Pageau, Disc. au parlement, p. 18-19.
[17] V. L. André, Michel Le Tellier..., p. 48 : — Arch. Doud., cart. 224, li. 900.
[18] Arch. Doud., cart. 224, li. 900.
[19] Gaillard, Vie de Malesherbes, 166 : — Monnier, Guill. de Lamoignon...
[20] Mém., II, 377-378.
[21] Jusqu'en 1665, je n'ai trouvé, en ce qui touche Le Tellier, que ceci au point de vue législatif : A. N., X 1A, 8664, f° 51 v° et sq., Edit portant suppression de plusieurs offices de conseillers secrétaires du roi, maison et couronne de France et autres officiers de chancellerie, et Règlement pour la grande chancellerie et les petites chancelleries du royaume, avril 1664, igné Louis, et, plus bas, par le roi, Le Tellier, enregistré au parlement le 29 avril. Est-ce Le Tellier qui a été l'inspirateur de cette mesure ou bien le chancelier Séguier ? — La même année, Louis XIV institue un conseil du commerce, dont il tiendra la première séance le 3 août : les membres en sont Séguier, Villeroi, Aligre, Le Tellier, de Sève. Lionne et Colbert : Gazette, Paris, 23 août 1664, p. 835.
[22] Monnier, 33.
[23] Ormesson, II, 396.
[24] Colbert, Let..., VI, 369-386, passim : Ormesson, II, 527 : Clément, Rev. Quest. Hist., 1869, t. VII, p. 121, 123.
[25] Patin, III, 304 et 341, 29 décembre 1660 et 9 mars 1661.
[26] Relazioni..., Francia, III, 152.
[27] Patin, III, 748, 754, 767 et 793 : — c. Bossuet, 421.
[28] Ormesson, II, 625.
[29] Le Pelletier, Vie..., 100.
[30] Témoignage très net du marquis de Saint-Maurice, Let., II, 258, 4 mars 1672 : même opinion sur l'opposition de Colbert dans Le Pelletier, Mém., p. 139, — dans Ormesson, II, 631-632 et dans Courtilz de Sandras, Test. Colbert, p. 358.
[31] B. N., f. fr., nouv acquis., 9734, f° 151 et 152.
[32] Ormesson, II, 631.
[33] Le Pelletier, Vie..., 100-101.
[34] A. N., Guerre A1, 528 min., p. 633.
[35] Le Pelletier, Vie..., 101 : — Gazette, samedi 30 octobre 1677 : — Spanheim, 325 — Sévigné, V, 378 : Bussy, Cor., III, 401 et 402. Mais Bussy n'est pas toujours bienveillant : III, 408, 443, 445 et IV, 32.
[36] Brienne le fils, II, 255 : Courtilz de Sandras, Test... Colbert, 359 : — Gaillard, 210.
[37] Brienne le fils, id. : — Mém. ou Essai..., B. N., f. fr., 14189, f° 135-139.
[38] Provisions dans Arch. Doud., cart. 224, li. 900, — ou B. N., f. fr., 15499, f° 3, — ou A. N., O1, 21, f° 244-6, et 274, f° 17-18, — ou Duchesne, 833-834, — ou Tessereau, II, 25-26. L'acte de serment est dans A. N., O1, 21, f° 246. La lettre du roi au parlement, à la cour des aides et au grand conseil est dans A. N., O1, 21, f° 246 v° et 274, f° 18 v° et Duchesne, 835. La lettre du secrétaire d'état aux trois cours est à la suite de la précédente dans A. N., O1, 21 et 274. Le discours de Harlay est dans Tessereau, II, 26-7 et dans Duchesne, 835.
[39] A. N., X1A, 8400, 24 novembre 1677.
[40] Sévigné, Let., V, 382 — Cf. Bussy, Cor., III, 406, et B. N., f. fr., 23251, n° 609.
[41] Pageau, Discours..., se trouvant avec celui de Le Camus dans B. N., f. fr., 16521, f° 216-278 : — Id., f. fr., nouv. acquis., 9734, n° 74 : — Id., f. fr., 4283, f° 4. Le Tellier gratifia Pageau de 2.000 livres en vaisselle d'argent et Le Camus de 1.000 livres de la même façon.
[42] B. N., f. fr., 15503, f° 573-576, poésie de Santeul : insérée dans Joan. Batptistœ Santotii Victorini opera poetica, Paris, 1694, 16, p. 155-164.
[43] Tessereau, II, 27.
[44] Pageau, 80 : — Duchesne, 834 : — Bossuet, 422.
[45] Sourches, I, 171 et note 1. — Dangeau, I, 88-89 : — Relazioni..., Francia, III, 322 et 374.
[46] G. Pagès, Rev. C. C., 15 décembre 1936.
[47] Spanheim, 323 : — Pageau, 135 : — B. N., f. fr., nouv. acquis., 9734, f° 18 v° — Id., f. fr., 4293, f° 5, Le Tellier lui-même le dit.
[48] B. N., f. fr., 4293, f° 4.
[49] Dangeau, I, 241, apprend qu'on se servait au sceau de trois sortes de cires : de la verte pour tous les arrêts, de la jaune pour toutes les expéditions ordinaires, et de la rouge seulement pour ce qui regarde le Dauphiné et la Provence. Il y a une quatrième cire, la blanche, dont on se sert pour le chevalier de l'ordre : mais c'est le chancelier de l'ordre qui fait ces expéditions-là.
[50] B. N., f. fr., 4293, f° 4-21 passim. Dans ce manuscrit, très curieux et très instructif, on trouve des listes de dépenses, p. ex., une de 1710 livres à distribuer aux pauvres (liste des établissements charitables), une des docteurs et gens de lettres à qui le chancelier a fait donner des gratifications, etc. — Le Tellier a commis une inadvertance en attribuant au chancelier le droit de charrette, qui est dû au seigneur par les tenanciers. V. Ferrière, I, 290-291 : c'est une sorte de corvée qui petit être transformée en rente.
[51] V. Tessereau, II, 139, Tarif des droits attribués aux conservateurs des hypothèques, 3 juillet 1685.
[52] Id., II, 63, Edit du roi leur accordant confirmation de leurs privilèges, décembre 1679.
[53] Id., II, 101, Edit de février 1682. — Cf., II, 74, arrêt du conseil des finances contre les officiers et secrétaires du, roi de toutes les chancelleries, qui n'ont pas payé le droit de survivance pendant l'ouverture de l'annuel de 1681, 21 décembre 1680.
[54] J'extrais ces renseignements de B. N., f. fr., 4293, f° 8 et sq.
[55] Tessereau, II, 140.
[56] Id., II, 34, 72 et 414.
[57] A. N., Guerre A1, 681 min., p. 139, — 694 min., juin p. 286, — 712 min., p. 379 et 519, — 713 min., p. 24, — 717 min., p. 355, let. de Louvois, 29 septembre 1682, 24 juin 1683, 19 avril, 1er mai et 23 septembre 1684. La lettre du 19 avril porte ceci : J'ai reçu les deux lettres... Je vous les renvoie afin que vous les gardiez jusqu'à mon retour, n'étant pas possible de penser ici à de pareilles affaires et encore moins de prendre le temps nécessaire pour répondre à des choses aussi peu pressantes que celle-là.
[58] B. N., f. fr., nouv, acquis., 9734, f° 3.
[59] B. N., f. fr., 4293, f° 8-9 : Tessereau, II, 42 ; texte de la déclaration accordant aux chanceliers la nomination des offices de quatre conseillers du roi, conservateurs des hypothèques sur les rentes... et de quatre conseillers du roi principaux commis desdits, conservateurs. — V., pour la suppression de certains offices de la chancellerie, Mém., II, 377-378.
[60] Tessereau, II, 84.
[61] Foucault, 107.
[62] Pour les ex., v. Tessereau, II, 34 (15 décembre 1677), 38 (26 mars 1678), 63 (12 décembre 1679) : 1500 livres d'amende et interdiction, aux huissiers du grand conseil), 65 (6 février 1680, prévôts et autres sans provision paieront une taxe de 4 livres pour le sceau), 66 (23 mars 1680), 79 (22 avril 1681, sergent condamné W livres d'amende et aux frais), 87 (23 juillet 1681), 137 (25 juin 1685) : — Cf. Foucault, 107.
[63] B. N., f. fr., 5267, p. 525-6. — ou 21118, p. 624-5 : sur cette question, v. Tessereau, II, 46, arrêt du 14 octobre 1678.
[64] B. N., f. fr., 5267, p. 233 — ou 10985, pièce 166, — ou 21118, p. 251, let. du 20 juin 1680 : règlement dans Tessereau, II, 105.
[65] Isambert, XIX, 269.
[66] B. N., f. fr., 5267, p. 124, — ou 10985, pièce 83, — ou 21118, p. 130, let. du 11 novembre 1679.
[67] Rec. des édits, partie, p. 8 et 165 — sur le même sujet, déclaration du 22 novembre 1683, dans Tessereau, II, 119.
[68] B. N., f. fr., 5267, p. 592 et 594, — ou 10985, pièces 483 et 488, — ou 21118, p. 729 et 736, let. des 16 décembre 1684 et 13 janvier 1685.
[69] B. N., f. fr., 5267, p. 11, — ou 21118, p. II, 12 juin 1678.
[70] Tessereau, II, 49-52, 29 novembre et 23 décembre 1678 : — B. N., f. fr., 5267, p. 66 — ou 10985, pièce 43, — ou 21118, p. 69, let. de Le Tellier, 13 juillet 1679.
[71] B. N., f. fr., 5267, p. 387, — ou 10985, pièce 472 — ou 21118, p. 715, du 20 août 1684.
[72] Tessereau, II, 124, arrêt du 9 mai 1684.
[73] Rec. des édits, 1re partie, p. 240, — ou Tessereau, II, 131, arrêt du 8 février 1685 : — Cf. A. Borée, La chancellerie..., passim.
[74] B. N., f. fr., 5267, p. 590, — ou 21118, p. 721, let. du 13 septembre 1684. — Voici une lettre fort instructive sur la garde du sceau, adressée à un président du même parlement, le 27 septembre 1685 : Le roi ayant confié au sieur premier président la garde du sceau pour le parlement de Besançon, il a la liberté de le donner, en son absence, à celui qu'il croit capable d'en faire l'usage convenable de la justice. Les maîtres des requêtes de l'hôtel du roi, qui ont la garde du sceau de la chancellerie du palais à Paris, en usent de même. Car, ceux, qui sont en tour de tenir le sceau les mettent ès-mains de leur collègue, lorsqu'ils ont d'autres affaires. Et il est encore en usage, dans les autres parlements, que lorsque la charge de garde scel vaque, c'est le doyen des conseillers qui en a la garde, ou le plus ancien suivant l'ordre du tableau. Sur tous ces fondements-là le sieur premier président ayant remis le sceau à un des sieurs maîtres des requêtes de votre parlement en son absence, il ne peut lui être rien imputé, non plus que sur la précaution qu'il prend de mettre une marque aux expéditions qu'il scelle. Car on n'en saurait trop prendre pour empêcher les falsifications du sceau. B. N., f. fr., 5267, p. 64t, — ou 10985, pièce 539, — ou 21118, p. 809, — ou Cor. adm., II, p. 255, n° 112. Pour la défense du grand sceau, v. encore, à propos du conseil souverain de Tournai, B. N., f. fr., 5267, p. 573, — ou 21118, p. 696, let. du 25 avril 1684.
[75] Tessereau, II, 53 (curieux exemples cités) et 58 : — B. N., f . fr., 8757 bis, f° 336, — et 8757 ter, foi 681 et 683, let. à l'intendant Le Blant, 17 juillet 1679, 6 et 8 janvier 1682.
[76] Le Pelletier, Vie..., 105, note 1.
[77] A. N., Guerre A1, 693 min., p. 618, — 694 min., juin p. 240 et 241, Louvois à Le Pelletier, à Le Tellier et à l'archevêque de Reims, 31 mai et 17 juin 1683.
[78] A. N., Guerre A1, 534 tr., p. 567, — ou 596 orig., pièce 194, let. du 11 mars 1678.
[79] Le Pelletier, Vie..., 105, note 1.
[80] B. N., f. fr., nouv. acquis., 9734, f° 3.
[81] Bossuet, 431 : — Fléchier, 25 : — Maboul, 27 et sq. : — Hersan, 31-32.
[82] Louis XIV, Mém., II, 377-8.
[83] Cor. admin., I, 12, mémoire de Du Bois-Baillet — Foucault, Mém., années 1684-5.
[84] B. N., f. fr., 5267, p. 102 et 171, — ou 10985, pièce 68, — ou 21118, p. 106 et 182. let. des 16 septembre 1679 et 16 février 1680.
[85] B. N., f. fr., 5267, p. 69, 371 et 632, — ou 10985, pièces 265 et 529, ou 21118, p. 72, 415 et 794, let. des 21 juillet 1679, 3 juillet 1681 et 25 juillet 1685.
[86] B. N., f. fr., 5267, ID, 37, — ou 21118, p. 38, let. du 21 décembre 1678.
[87] Maboul, 33.
[88] Je laisse de côté l'œuvre judiciaire de Le Tellier à l'égard des protestants, qui a été étudiée dans le chapitre XII. — Il arrive que Louvois, lui aussi, s'occupe des questions de justice, demande des consultations ou réponde à son père. V., p. ex., A. N., Guerre A1, 710 min., p. 288, — 713 min., p. 140, 260, 293 et 296, — 714 min., p. 38, — 717 min., p. 355, — 719 min., p. 99 et 235, let. de Louvois entre le 15 février et le 9 novembre 1684. — Cf., B. N., f. fr., 5267, p. 457 — ou 21118, p. 526, let. de Le Tellier, 6 juillet 1682.
[89] J'utilise la brochure de Curzon, tout en m'en tenant exclusivement à ce qui regarde Le Tellier : — cf. édit d'avril 1679, préambule.
[90] Caillemer, traduction du passage de la décrétale, p. 6.
[91] Fléchier, 31.
[92] B. N., f. fr., 5267, p. 25 ,— ou 21118, p. 25, Le Tellier à Réguse, 30 octobre 1678.
[93] Isambert, XVI, 148-150, édit sur les degrés de licence et de doctorat dans toutes les Universités, avril 1625 : — 235-238, code Michau, art. 43-51.
[94] Ces actes sont : déclaration pour le rétablissement du droit civil et canonique (avril 1679), — déclarations des 26 janvier et 26 février 1680, — arrêts des 23 mars et 16 novembre 1680, — déclarations des 22 mai et 6 août 1682. Ils se trouvent soit dans Isambert, XIX, p. 195-406, passim, soit (en partie) dans Rec. des édits, 1ve partie, p. 24, 106, 112 et 121. Les plus importants, de portée générale, sont le premier et le dernier.
[95] Avril 1679, art. III : 23 mars 1680 et 6 août 1682, préambules : — B. N., f. fr., 5267, p. 52-53, — ou 10985, pièce 33, — ou 21118, p. 54-55, Le Tellier à Harlay, 29 avril 1679.
[96] Avril 1679, préambule.
[97] Id., art. I et II.
[98] Id., art. V : — 6 août 1682, art. 18 : — B. N., f. fr., 5267, 1) 150, — ou 10985, pièce 103, — ou 21118, p. 159, let. du 30 décembre 1679.
[99] 6 août 1682, art. 19.
[100] 23 mars 1680 : — 6 août 1682,
art. 16.
[101] 6 août 1682, art. 20.
[102] Avril 1679, art. IV et VI.
[103] Id., art. X et XI : 23 mars 1680 : — 6 août 1682, art. 2 à 10.
[104] 6 août 1682, art. 21.
[105] Avril 1679, art. VI, XV, XVI et XX. Le Tellier tient à ce qu'on lui envoie copie d'es registres, mai 1679 : B. N., f. fr., 5267, p. 56-7, — ou 10985, pièce 35, — ou 21118, p. 58.
[106] Id., art. VII, VIII, X et XII : — cf. 6 août 1682, art. 22.
[107] B. N., f. fr., 5267, p. 419, — ou 10985, pièce 299, — ou 21118, p. 474, à Nointel, 20 octobre 1681.
[108] Fléchier, 32.
[109] Avril 1679, art. XIX : — 6 août 1682, art. 23 : — B. N., f. fr., 5267, p. 56-8, 585 et 624, — ou 10985, pièces 35, 471 et 524, — ou 21118, p. 58-60, 713 et 723, let. de Le Tellier, mai et 29 mai 1679, 18 août 1684 et 29 juin 1685 : cette dernière lettre est excessivement dure pour les professeurs de la faculté de Cahors.
[110] 23 mars 1680 : — 6 août 1682, art. 17.
[111] 26 février 1680 : — Cf. B. N., f. fr., 5267, p. 421 et 461, — ou 10985, pièces 301 et 341, — ou 21118, p. 476 et 532, let. de Le Tellier, fer décembre 1681 et 13 juillet 1682.
[112] Art 11 à 15.
[113] Pour l'université de Cahors, v. Foucault, Mém., 23 avril 1681, et B. N., f. fr., 5267, p. 591, — ou 21118, p. 273, Le Tellier à Du Bois-Baillet, 14 septembre 1684.
[114] Launay, Discours..., 70 pages.
[115] Sur l'université de Dôle, que le parlement de Dijon voulait considérer comme étrangère, V. B. N., f. fr., 5267, p. 248, — ou 10985, pièce 174, — ou 21118, p. 268, let. de Le Tellier, 21 juillet 1680.
[116] Galibert, Le conseil souv..., p. 54, note 3.
[117] Avril 1679, art. XIII : — 26 janvier 1680 : — 6 août 1682, art. 14.
[118] Avril 1679, art. XVI : — B. N., f. fr., 5267, p. 57, 177, 354 et 447, — ou 10985, pièces 123 et 326, — ou 21118, p. 60, 187, 394 et 511, let. de Le Tellier, 29 mai 1679, 24 février 1680, 24 mai 1681 et 2 juin 1682.
[119] Sur cette question des variations d'âge, V. Rec. des édits, 1re partie, p. 95, déclaration du 30 décembre 1679 : — Id., 2e partie, p. 62, déclaration du 9 février 1683 : — B. N., f. fr., 5267, p. 15, 357, 464, 472, 585 et 637, ou 10985, pièces 9, 254, 343, 352, 471 et 535, — ou 21118, p. 15, 398, 535, 546, 713 et 802, let. de Le Tellier, entre le 3 juillet 1678 et le 9 septembre 1685.
[120] Rec. des édits, 2e partie, p. 96 : — Tessereau, II. 120.
[121] Avril 1679, art. XVIII. — Il se produit souvent des difficultés pour la réception des conseillers : sur la variété des cas, v. B. N., f. fr., 5267, p. 45, 442, 562, 564 et 572, — ou 10985, pièces 29, 320, 445, 447 et 456, — ou 21118, p. 47, 505, 682, 684 et 694, let. entre le 31 janvier 1679 et le 17 avril 1684. D'après Littré, on appelait fortuites certaines lois, non indiquées, sur lesquelles ceux qui se présentaient pour quelque emploi de judicature étaient interrogés.
[122] Rec. des édits, 2e partie, p. 124-130 et 148-149 : B. N.. f. fr., 5267, p. 308, — ou 10985, pièce 216, — ou 21118, p. 337, — ou Cor. admin., II, p. 235, n° 88, Le Tellier au présidial de Châlons, 3 février 1681.
[123] B. N., f. fr., 5267, p. 50, — ou 10985, pièce 32, — ou 21118, p. 53, Le Tellier à Harlay, 18 mars 1679.
[124] Cor. admin., II, p. 215, n° 75 : — B. N., f. fr., 5267, p. 88, — ou 21118, p. 92, let. de Le Tellier, 6 août et 1er septembre 1679.
[125] B. N., f. fr., 5267, p. 119 et 139, — ou 21118, p. 126 et 146, let. de Le Tellier, 29 octobre et 11 décembre 1679. Dans la seconde lettre, il dit : Croyez que je n'écoute pas volontiers ce que des petits scribes peuvent me mander contre l'honneur et la réputation de leurs supérieurs et que, si je vous ai écrit quelque chose sur votre conduite, j'y ai été obligé par ce que j'ai recueilli de vos propres lettres.
[126] B. N., f. fr., 5267, p. 142, — ou 10985, pièce 97, — ou 21118, p. 150, ou Cor. admin., II, p. 224, n° 182, let. du 18 (et non 28) décembre 1679.
[127] B. N., f. fr., 5267, p. 546-547, — ou 10985, pièces 421 et 421 bis, — ou 21118, p. 665-668, deux let. de Le Tellier du 28 décembre 1683.
[128] Id., 5267, p 554, — ou 21118, p. 669, let. du 26 janvier 1684 : — Foucault, Mém., 93, 95, 102-105, 108-110.
[129] Id., 5267, p. 107, — ou 21118, p. 119, let. du 24 septembre 1679.
[130] Rec. des édits, 1re partie, p. 156, arrêt du 7 janvier 1681.
[131] B. N., f, fr., 5267, p. 140 et 502, — ou 21118, p. 147 et 589, let. des 26 janvier 1680 et 12 mars 1683 : — Cf. les renseignements précis donnée par Foucault, 98-100, sur la situation du parlement de Pau, à cet égard, en avril 1684.
[132] B. N., f. fr., 5267, p. 12 et 602, — ou 10985, pièces 7 et 500, — ou 21118, p. 12 et 751, let. des 30 juin 1678 et 22 février 1685.
[133] Rec. des édits, 1re partie, p. 194, ou 2e partie, p. 1, déclaration du 13 janvier 1682.
[134] B. N., f. fr., 5267, p. 403-7, — ou 10985, pièce 288, — ou 21118, p. 454-460, deux let. de Le Tellier, du 17 septembre 1681.
[135] Id., 5267, p. 411 et 446, — ou 10985, pièces 294 et 325, — ou 21118, p. 465 et 510, let. des 26 septembre 1681 et 29 mai 1682.
[136] Id., 5267, p. 578, — ou 21118. p. 702. let. du 13 (et non du 18) juin 1684.
[137] Rec. des édits, 2e partie, p. 169 et 217 : — Cf. Id., p. 161 et 165, édit pour la réunion du nouveau Châtelet à l'ancien, septembre 1684.
[138] Rec. des édits, 2e partie, p. 131 et 203, juillet 1680 et 16 mare 1682 — Cf. B. N., f. fr., 8757 ter, f° 671, Le Tellier à Le Blant, 29 juin 1682.
[139] Rec. des édits, 1re partie, p. 38 et 166, et 2e partie, p. 19, 24, 46, 73, 206 et 259, édits pour les chambres de vacations de Rouen, Dijon, Toulouse, Aix, Bordeaux, Besançon et Grenoble, entre juillet 1679 et mai 1685. — Cf. B. N., f. fr., 5267, p. 471, — ou 10985, pièce 351, — ou 21118, p. 544, Le Tellier à Pellot, 11 août 1682 : — Cor. admin., II, p. 212, n° 73, le même à Le Mazuyer, le septembre 1679.
[140] Rec. des édits, Ire partie, p. 79 et 170, et 2e partie, p. 254, déclarations et arrêt, 18 novembre 1679, 8 mars 1681 et 14 mai 1685.
[141] B. N., f. fr., 5267, p. 462, — ou 21118, p. 533, Le Tellier à Foucault, 13 juillet 1682.
[142] Id., 5267, p. 198 et 633, — ou 10985, pièces 139 et 530, — ou 21118, p. 211 et 796, let. de Le Tellier des 10 avril 1680 et 25 juillet 1685.
[143] Rec. des édits, 1re partie, p. 160, déclaration du 12 janvier 1681.
[144] B. N., f. fr., 5267, p. 309, — ou 10985, pièce 217, — ou 21118, p. 338, Le Tellier à Bouville, 6 février 1681. V., sur ce point, Godard, Les pouvoirs...., p. 26, et les réflexions de Ricommard, Rev. hist. mod., septembre-décembre 1937, p. 380 et 399.
[145] Rec. des édits, 2e partie, p. 84 et 94, arrêts des 26 octobre et 25 novembre 1683. Il s'agit simplement des meurtres, viols, incendies, vols de grand chemin et autres crimes de cette nature. Le tarif journalier est ainsi fixé pour les membres du parlement : 15 livres à un président ou conseiller, 10 au substitut du procureur général, 7 livres 10 sols au greffier, moyennant quoi il sera tenu de fournir les expéditions, papier et parchemin timbré, 5 livres à l'huissier. Suit avec la même précision la fixation des frais pour les officiers inférieurs. Les cours ne doivent pas abuser des condamnations en des aumônes applicables à des œuvres pies, ce qui diminue l'importance des amendes prélevées en faveur du roi : Rec. des édits, 2e partie, déclaration du 21 janvier 1685 : — Cf. B. N.. f. fr., 5267, p. 33-36, 582 et 593, — ou 10985, pièces 21-22, 467 et 486, — ou 21118, p. 34-38, 708 et 733, let. de Le Tellier, 14 décembre 1678, 2 juillet 1684, et 4 janvier 1685.
[146] Isambert, XIX, 467, édit de décembre 1684, qui établit, pour la première fois, une procédure égale dans toutes nos cours et sièges : 11 articles règlent tout.
[147] B. N., f. fr., 5267, p. 533, — ou 21118, p. 637, let. de Le Tellier, 18 septembre 1683. — Cf., pour autre cas, Id., 5267, p. 602, — ou 10985, pièce 499, — ou 21118, p. 750, let. du 21 février 1685.
[148] Id., 5267, p. 635, — ou 10985, pièce 533, — ou 21118, p. 800, let. du 13 août 1685.
[149] Id., 5267, p. 459, — ou 21118, p. 530, let. de Le Tellier, 7 juillet 1682, — ou Cor. admin., II, 241, n° 94 (erreur de date).
[150] Id., 5267, p. 305, 447 et 489, — ou 21118, p. 334, 512 et 571, let. des 23 janvier 1681 (Metz), 3 juin 1682 (Pignerol), 13 décembre 1682 (Pau).
[151] B. N., f. fr., 8753, f° 185 ; — Id., 5267, p. 17, — ou 10985, pièce 10, let. de Le Tellier des 29 mars et 3 juillet 1678.
[152] Id., 5267, p. 385, 409 et 423, — ou 10985, pièces 278, 292 et 303, — ou 21118, p. 432, 462 et 479, Le Tellier à Harlay, 21 août, 20 septembre et 29 décembre 1681.
[153] Id., 5267, p. 569, — ou 21118, p. 691, let. du 29 mars 1684.
[154] Id., 5267, p. 32 et 143, — ou 21118, p. 33 et 152, let. des 1er décembre 1678 et 18 décembre 1679.
[155] Id., 5267, p. 206, — ou 10985, pièce 146, — ou 21118, p. 219, let. du 24 avril 1680.
[156] Id., 5267, p. 83-86, — ou 10985, pièces 21-22, — ou 21118, p. 34-38, let. du 14 décembre 1678.
[157] Id., 5267, p. 479, — ou 21118, p. 555, let. du 13 septembre 1682.
[158] Id., 5267, p. 197, — ou 21118, p. 209, let. du 28 mars 1680.
[159] Id., 5267, p. 448, 591, 614 et 638, — ou 10985, pièces 328, 479 et 526, — ou 21118, p. 513, 725, 769 et 803, — ou Cor. admin., II, 252, n° 109, let. de Le Tellier, 4 juin 1682, 15 octobre 1684, 7 avril et 9 septembre 1685.
[160] Id., 5267, p. 605, — ou 21118, p. 756, let. du 8 mars 1685.
[161] Id., 5267, p. 180, — ou 21118, p. 191, let. du 6 mars 1680.
[162] Rec. des édits, 2e partie, p.. 130 : — B. N., f. fr., 5267, p. 628, — ou 21118, p. 789, let. du 13 juillet 1685.
[163] Rec. des édits, 2e partie, p. 183 (texte très instructif). Sur un différend entre les parlements de Besançon et de Dijon, v. B. N., f. fr., 5267, p. 230, — ou 21118, p. 247, let. du 25 juin 1680.
[164] B. N., f. fr., 5267, p. 90-2, — ou 10985, pièces 60-61, — ou 21118, p. 94-96, let. des 5 et 6 septembre 1679.
[165] Rec. des édits, 1re partie, p. 137, surtout art. VIII-XVI.
[166] Id., 2e partie, p. 270-272. Cet arrêt règle aussi la question des carreaux, autre source de dissentiment entre conseillers et présidents : ceux-ci, seuls, auront des carreaux de velours fleurdelisés d'or aux cérémonies ou le parlement assiste, tant dans le palais que dehors, sans que les conseillers puissent s'en servir. Pourront néanmoins les conseillers, si bon leur semble, s'en pourvoir, pour leur commodité, d'étoffe de laine seulement et non fleurdelisée.
[167] Père et fils, frère, oncle, neveu, beau-père et gendre et beau-frère. — Rec. des édits, 1re partie, p. 36 et 163. — Cf. B. N., f. fr., 5267, p. 448, — ou 10985, pièce 328, ou 21118, p. 513, let. du 4 juin 1682.
[168] B. N., f. fr., 5267, p. 83, 229, 302, 466 et 514, — ou 10985, pièces 55, 163, 211, 346 et 393, — ou 21118, p. 86, 246, 330, 538 et 607, — ou Cor. admin., II, 223, n° 81, let. des 12 août 1679, 25 juin et 17 décembre 1680, 26 juillet 1682 et 2 juin 1683.
[169] Id., 5267, p. 99, 102 et 132, — ou 10985, pièces 65 et 68, — ou 21118, p. 103, 106 et 139, let. des 9 et 16 septembre et 7 décembre 1679.
[170] Id., 5267, p. 170, 176, 377, 396, 471, 499, 576, 579 et 599, — ou 10985, pièces 119, 123, 271, 284, 350, 379, 461 et 465, — ou 21118, p. 181, 186, 422, 445, 543, 585, 699 et 705, let. des 16 et 24 février 1680, 19 juillet et 7 septembre 1681, 4 août 1682, 7 mars 1683, 6 mai et 27 juin 1684.
[171] Id., 5267, p. 42, 98, 437, 439 et 544, — ou 10985, pièces 27, 84 et 315, — ou 21118, p. 44, 102, 498, 502 et 652, — ou 8757 ter, f° 673, — ou Cor. admin., II, 217 et 232, n° 76 et 85, let. des 31 décembre 1678, 9 septembre 1679, 15 et 19 avril et 15 juin 1682 et 19 décembre 1683.
[172] Id., 5267, p. 277, 384 et 557, — ou 10985, pièce 430, — ou 21118, p. 300, 431 et 673, let. des 30 août 1680, 20 août 1681 et 31 janvier 1684. — Arrêts des 30 mars 1680 et 16 décembre 1681, dans Tessereau, II, 67 et 98. — S'il y a contention entre un lieutenant criminel et les conseillers d'un présidial, le parlement doit juger le différend : Id., 5267, p. 158 et 575, — ou 10985, pièce 108, — ou 21118, p. 167 et 698, let. des 17 janvier 1680 et 26 avril 1684.
[173] Id., 5267, p. 620 et 639, — ou 21118, p. 777 et 805, — ou Cor. admin., II, 253, n° 110. let. des 16 juin et 19 septembre 1685.
[174] Id., 5267, p. 104, — ou 21118, p. 108, — ou Cor. admin., II, 218, n° 77, let. du 20 septembre 1679.
[175] Id., 5267, p. 454, — ou 10985, pièce 334, — ou 21118, p. 522, let. du 26 juin 1682.
[176] Rec. des édits, 2e partie, p. 82-84 et 177-178, ou Isambert, XIX, 434 et 463, édit de septembre 1683 et arrêt du 14 octobre 1684. — B. N., f. fr., 5267, p. 479, — ou 10925, pièce 360, — ou 21118, p. 556, let. du 4 octobre 1682.
[177] Id., 5267, p. 60, 232, 528-30 et 577, — ou 10985, pièces 39 et 404, ou 21118, p. 63, 249, 629, 631 et 701, — ou Cor. admin., II, 221, n° 79, let. des 14 juin et 29 octobre 1679, 28 juin 1680, 11 août 1683 et 14 mai 1684 : Foucault, 102-103 : — Rec. des édits, 1re partie, p. 183, déclaration du 15 juillet 1681 — Isambert, XIX, 382, règlement du 28 février 1682 (ou mieux, édit du 22 mars 1682).
Sur le caractère du greffier, Le Tellier à l'intendant Harlay, 11 juin 1685 : Si, pour être officier, il faut être revêtu du caractère du prince, à plus forte raison un greffier le doit être, puisqu'il porte la foi des arrêts par sa signature : B. N., f. fr., 5267, p. 619, — ou 10985, pièce 519, — ou 21118, p. 776.
[178] Id., 5267, p. 3, 5, 7, 23-25, 26-30 et 527, — ou 10985, pièces 1-3, 17-18, — ou 21118, p. 3, 5, 7, 23-25, 27, 29 et 626, let. de Le Tellier, mai-novembre 1678 et 10 août 1683.
[179] A. E., Mém. Doc., France, 954, à Dugué, 15 février et 22 avril 1678 : — B. N., f. fr., 8757 bis, f° 364, et 8757 ter, f° 658, à Le Blant et Méliand, 8 février 1681 : B. N., f. fr., 5267. p. 615, — ou 21118. p. 770, 28 ou 29 avril 1685.
[180] B. N., f. fr., 5267, p. 38-40, 268, 316 et 574, — ou 10985, pièces 24, 25, 186 et 459, — ou 21118, p. 40-42, 290, 346 et 697, — ou Cor. admin., II, 214, n° 74, let. des 23 décembre 1678, 15 août et 10 décembre 1680, 17 février 1681 et 25 avril 1684.
[181] Rec. des édits, 2e partie, p. 53-6, déclaration du 26 février 1683 : — B. N., f. fr., 5267, p. 493, — ou 10985, pièce 485, — ou 21118, p. 731, let. du 31 décembre 1684. — Id., 5267, p. 571, — ou 10985, pièce 455, — ou 21118, p. 693, let. du 14 avril 1684 : Les procureurs et avocats du roi ne peuvent prendre aucune chose pour la plaidoirie ou conclusion qu'ils prennent à l'audience.
Id., 5267, p. 623, — ou 21118, p. 781, Le Tellier écrit au premier président de Pau, le 22 juin 1685, une lettre fort instructive : Votre désintéressement sur l'offre du député, qui vous est venu offrir une bourse dans les épices, est fort à estimer, et, afin de vous répondre positivement sur votre scrupule, je me suis fait représenter l'arrêt du mois de février 1682. Et, ayant considéré ce qui y est prescrit à l'égard du président, lequel n'a pas la liberté de prendre part aux épices, qu'il aura taxées, il est sans difficulté que vous pouvez recevoir la part qui vous est offerte dans celles qui sont taxées dans d'autres chambres ou bureaux que ceux que vous présidez.
[182] V. les arrêts dans Tessereau, II, 34, 60, 107.
[183] Rec. des édits, 2illa partie, p. 189, déclaration touchant les greffes du parlement de Paris, 25 novembre 1684 : 12 articles suivis de Taxes que le roi ordonne par provision que l'on paiera aux greffiers gardes sacs de parlement de Paris, et de Taxes que le roi ordonne par provision que l'on paiera aux greffiers et clercs, écrivant en parchemin pour les minutes et les grosses des arrêts rendus en sa cour de parlement de Paris (documents importants). Id., p. 151, édit portant règlement des droits des greffiers des geôles, juin 1684 : 10 articles.
[184] B. N., f. fr., 5267, p. 458, 470 et 570, — ou 10985, pièces 338, 349 et 454, — ou 21118, p. 527, 542 et 692, let. des 7 et 29 juillet 1682 et 12 avril 1684.
[185] Id., 5267, p. 190 et 510, — ou 10985, pièces 132 et 389, — ou 21118, p. 202 et 602, — ou 8757 bis, f° 384, let. des 23 mars 1680, 5 octobre 1681 et 24 mai 1683.
[186] Rec. des édits, Ire partie, p. 100-6, ou Isambert, XIX, p. 223, déclaration du 6 (et non 10) janvier 1680. — Id., 2e partie, p. 151, édit sur les droits des greffiers des geôles, juin 1684. — Cf. B. N., f. fr., 5267, p. 549 et 553-4, — ou 10985, pièce 424, — ou 21118, p. 661 et 666-9, — ou Cor. admin., II, p. 216, n° 75, let. de janvier 1684.
[187] B. N., f. fr., 5267, p. 20 et 129, — ou 10985, pièce 12, — ou 21118, p. 20 et 135, — ou Cor. admin., II, 209, n° 69, et 222, n° 80, let. des 19 août 1678 et 28 novembre 1679.
[188] Rec. des édits, 1re partie, p. 115 et 191, déclarations de mars 1680 .et 19 novembre 1681. — Cf. Foucault, 110 (récit curieux) : — B. N., f. fr., 5267, p. 588, — ou 21118, p. 716, let. du 3 septembre 1684.
[189] B. N., f. fr., 5267, p. 42, — ou 10985, pièce 27, — ou 21118, p. 44, let. du 31 décembre 1678.
[190] Id., 8753, f° 205, let. du 11 décembre 1678.
[191] Id., 5267, p. 130, — ou 10985, pièce 88, — ou 21118, p. 136, let. du 2 décembre 1679.
[192] Rec. des édits, 2e partie, p. 40, déclaration du 7 décembre 1682.
[193] B. N., f. fr., 5267, p. 482, — ou 10985, pièce 362, — ou 21118, p. 559, let. du 21 novembre 1682.
[194] Rec. des édits, 2e partie, p. 37, ou Isambert, XIX, 393, déclaration du 11 juillet 1682. — Foucault, 81-82, condamne un de ces gentilshommes à 1.000 livres d'amende. — Cf. Rec. des édits, 2e partie, p. 31-33, déclaration du 31 mai 1682 contre les bannis continuant à vivre dans le royaume et, s'ils sont repris, frappés de la peine des galères.
[195] Bossuet, Or. fun., 447-448.
[196] Rec. des édits, 1re partie, p. 24 et 112, ou Isambert, XIX, 195 et 228 (erreur de date), déclarations d'avril 169 et du 26 février 1680.
[197] Id., 1re partie, p. 121, déclaration du 22 mai 1680.
[198] B. N., f. fr., 5267, p. 461, — ou 10985, pièce 341, — ou 21118, p. 532, let. du 31 juillet 1682.
[199] Id., 5267, p. 159, — ou 21118, p. 168, Le Tellier à Marillac, 18 janvier 1680 : Le roi, ayant considéré l'importance de rétablissement d'un official à Poitiers pendant la vacance du siège, a bien voulu déroger en cette occasion, mais sans tirer à conséquence, à l'article de l'édit qui prescrit le temps des études nécessaires pour parvenir aux degrés dans le droit canon, et permettre à la faculté de ce droit de l'université de Poitiers de donner lesdits degrés à celui que le chapitre nommera pour être official.
[200] Je laisse de côté la question de la présence ou de l'absence des magistrats protestants dans les procès intéressant les ecclésiastiques : v. le chapitre XII.
[201] Rec. des édits, 1re partie, p. 1-5, déclaration de février 1678. — Cf. B. N., f. fr., 5267, p. 129, — ou 2118, p. 135, — ou Cor. admin., II, 222, n° 80, let. du 28 novembre 1679.
[202] Rec. des édits, 2e partie, p. 157, ou Isambert, XIX, 449, déclaration de juillet 1684.
[203] Cor. admin., II, 385-386.
[204] Id., II, 231, n° 85, — ou B. N., f. fr., 5267, p. 278, — ou 10985, pièce 192, — ou 21118, p. 301. let. du 11 septembre 1680.
[205] B. N., f. fr., 5267, p. 456, — ou 21118, p. 525, let. du 6 juillet 1682.
[206] Pour des exemples, v. Id., 5267, p. 48, 72-74, 332, 603 et 640, — ou 10985, pièces 48, 500 et 538, — ou 21118, p. 51, 73-76, 336, 501 et 806, let. des 15 mars et 25 juillet 1679, 12 mars 1681, 22 février et 25 septembre 1685. — V., aussi, à propos de Cerles, janséniste exalté, qui, dans le diocèse de Pamiers, n'a pas voulu reconnaître la juridiction de son métropolitain, l'archevêque de Toulouse, les lettres caractéristiques de Le Tellier, 13 mars et 19 avril 1681 : — Id., 5267, p. 334-335 et 343-344, — 21118, p. 369-373 et 380.
[207] V. p. ex., Rec. des édits, 1re partie, p. 158-160, déclaration du 7 janvier 1681, portant qu'aucun ecclésiastique, pourvu de deux bénéfices incompatibles, ne pourra jouir que des fruits de celui où il résidera actuellement.
[208] Fléchier, 32. — Cf. Viollet, Le roi et ses ministres, 190-191.
[209] A. E., Mém. Doc., France, 1549, f° 225, arrêt du 29 août 1678.
[210] B. N., f. fr., 5267, p. 212, — ou 21118, p. 227, let. du 24 mai 1680.
[211] Id., 5267, p. 22 et 559, — ou 10985, pièces 14 et 431, — ou 21118, p. 22 et 676, — ou Cor. admin., II, 210, n° 70, let. des 4 octobre 1678 et 5 février 1684 : — B. N., f. fr., 8753, f° 203 et 8757 bis, f° 306, let. des 20 octobre 1678 et 22 novembre 1681.
[212] A. E., Mém. Doc., France, 954, f° 10, 15, 18, 21, 22 et 23, let. à Dugué, 22 avril 1681-16 mars 1682 : — B. N., f. fr., 5267, p. 434 et 538, — ou 10985, pièces 312 et 413, — ou 21118, p. 495 et 643, let. des 16 mars 1682 et 10 novembre 1683 : — Cor. admin., II, 239, n° 91, let. du 16 mars 1682.
[213] B. N., f. fr., 5267, p. 539, — ou 10985, pièce 414, — ou 21118, p. 445, — ou Cor. admin., II, 243, n° 97, let. du 11 novembre 1683.
[214] Cor. admin., VI, 46, note 3 : — A. E., Mém. Doc., France, 954, f° 22, let. du 5 février 1682 : — Isambert, XIX, 386, ou Tessereau, II, 105. — Ajouter Isambert, XIX, 489, arrêt du 31 janvier 1685 obligeant les libraires-imprimeurs à fournir dans la quinzaine des exemplaires pour les bibliothèques royales sous peine de confiscation.
[215] Hersan, 28-32 : — Fléchier, 29-31 : — Bossuet, 439-442 : — Maboul, 28-40.
[216] Le Pelletier, Vie..., 102-103.
[217] Sourches, I, 10.
[218] Rulhières, Eclaircis..., chap. XIV.