Numa Denys Fustel de Coulanges est issu d'une famille de
Bretagne installée à Paris. Il a pour père un lieutenant de vaisseau qui
décède peu après la naissance de son fils. Fustel est alors recueilli par son
grand-père qui, grâce à l'amitié qu'il entretient avec le proviseur, le fait
admettre au lycée Charlemagne à Paris. Selon toute apparence, c'est ce même
directeur qui prend en charge les frais de scolarité de Fustel. Jeune lycéen, il lit avec avidité les leçons de Guizot sur
la Civilisation en France, qui aura une forte influence sur son avenir
d'historien. Élève moyennement doué, il est admis à l'École normale
supérieure « à un rang médiocre », d'après son élève et biographe Paul
Guiraud. Dans l'ambiance d'une période idéologiquement troublée, il fréquente
avec assiduité la bibliothèque de l'École. Nommé membre de l'École française
d'Athènes, il dirige, lors de son séjour en Grèce, des fouilles
archéologiques dans l'île de Chio. Il soutient en 1858 une thèse sur l'historien grec Polybe
et une autre sur les Vesta, à un moment où les questions touchant les
origines indo-européennes sont très discutées. En 1860, il est nommé
professeur d'histoire à l'université de Strasbourg, où il met en forme ses
notes de cours qui feront la matière de La
Cité Antique, ouvrage majeur dans
lequel il sait mettre en évidence le rôle joué par la religion dans
l'évolution politique et sociale de la Grèce et de Rome. Le lycée impérial de
Strasbourg, jouxtant la cathédrale a été baptisé lycée Fustel de Coulanges en
1919, en mémoire du professeur d'histoire de l'université de la ville. Obligé de quitter Strasbourg du fait de l'annexion de
l'Alsace-Lorraine par les Allemands en 1870, il est nommé maître de
Conférences en 1870 à l'École Normale Supérieure, dont il sera le directeur
en 1883. En 1875, il obtient une chaise de professeur à la Sorbonne et il est
élu membre de l'Académie des sciences morales et politiques. Curieusement, et même si quelques questions touchant à
l'Antiquité le préoccupent, en particulier celle de la propriété et de sa
transmission, Fustel de Coulanges va se tourner vers l'histoire médiévale,
d'une part pour montrer combien les institutions françaises n'ont pas grand
chose en commun avec le droit germanique (la France est alors en plein
conflit avec l'Allemagne) et d'autre part pour asseoir un certain nombre de
ses intuitions méthodologiques. Enseignant capable d'attirer à lui de nombreux disciples
par la qualité de son travail et l'ascétisme intellectuel auquel il se
soumet, Fustel est un innovateur qui engage l'historiographie française sur
des voies nouvelles. Pour lui, l'engagement politique, cher à Michelet ou
Thierry, doit être écarté afin d'éviter toute idée préconçue et de favoriser
autant que possible la vérité historique. Il expose, en 1888, dans la célèbre préface de La
Monarchie Franque (Tome II de sa monumentale Histoire des institutions
politiques de l'ancienne France dont la publication a démarré dix ans plus
tôt), les impératifs d'une méthode historique que l'historien doit respecter
les yeux « uniquement fixés sur les sciences ». Fustel projetait de mettre sur pied un ouvrage qui
couvrirait la période allant de la fin de l'empire romain jusqu'à la
Révolution française. Malheureusement, malade, il avait, à sa mort en 1889, à
peine esquissé la mise en oeuvre des immenses matériaux qu'il réunissait
depuis plus de vingt ans. Inachevée, son Histoire des institutions politiques
de l'ancienne France (6 tomes) allait être pieusement achevée par son
disciple Camille Jullian (futur spécialiste de l'histoire de la Gaule). Certains volumes, déjà entièrement rédigés par le maître, ne demandèrent que peu de reprise, ainsi la Gaule romaine et les Origines du régime féodal, d'autres à peine commencés (les transformations de la royauté pendant l'époque carolingienne, publié en 1891) furent presque entièrement recomposés à partir de notes éparses. Quoique dépassée aujourd'hui compte tenu des recherches récentes, l'oeuvre de Fustel reste encore précieuse par sa qualité intrinsèque mais surtout par les efforts de l'auteur pour reconstituer avec le plus d'exactitude possible les sentiments et les besoins des hommes du temps passé. Son influence est importante, notamment pour ce qui est de l'interprétation du rôle fondamental que joueraient les religions dans la structuration des sociétés. Le sociologue Émile Durkheim dédicacera sa thèse d'université à la mémoire de Fustel de Coulanges.
Sa biographie sur Wikipédia. Biographie de Paul Guiraud. |