LIVRE II. — DEPUIS LA RETRAITE DU PRINCE CHARLES VERS LA LOIRE (JUIN 1418), JUSQU’À LA MORT DE CHARLES VI (21 OCTOBRE 1422).
La religion, ses commandements, les pratiques du culte, occupaient une grande place dans les actes publics et privés du prince Charles. Ce n’est pas que la Providence lui eût naturellement départi le caractère, ni le tempérament d’un saint. Ce n’est pas que la foi, la vertu des confesseurs et des martyrs, habitassent l’âme du jeune régent ! Au contraire, la complexion physique et morale de Charles VII se composait d’un fonds de sensualité remarquable. Sa vie parait avoir été, sous certains rapports, une longue carrière d’immoralité. Au sein de ses licencieuses et inaccessibles retraites, tout au plus parvint-il à voiler, à dérober les scandales d’une lascivité, qui semble avoir été, chez lui, comme un vice congénial et héréditaire. En tous les sujets qui comportaient l’application de son jugement, il portait le scalpel d’un esprit douteur et méfiant. Jamais, dans sa politique, les froids calculs de ses intérêts monarchiques, ni la raison d’État, ne s’inclinèrent devant la cause abstraite de l’Église et de la foi chrétienne. Mais, au quinzième siècle, la religion était semblable à l’air, que nous respirons en commun. Il n’entrait clans l’esprit de personne de supposer, à cet égard, qu’un autre élément de vie fût possible. Personne, en général, ne songeait même à prendre une partie quelconque de cet élément, pour le soumettre à une analyse critique. Dans les hautes régions sociales auxquelles appartenait le dauphin de France, la piété était particulièrement une tradition de famille et dynastique. L’observation des préceptes de la foi constituait, pour les princes, aux yeux des populations, non seulement un devoir, mais un titre de recommandation spéciale. Les pratiques du culte, qui s’alliaient à toutes les modes et à toutes les élégances du monde, leur fournissaient une occasion, sans cesse renouvelée, d’occuper avec avantage le rang qu’ils tenaient de leur naissance et de la hiérarchie. Charles dauphin rendit, à Mehun-sur-Yèvre, le 8 octobre 1420, une ordonnance contre les blasphémateurs. Cet acte, renouvelé des anciens édits, punissait d’une peine progressive ceux qui juraient, renoyaient, maugréaient et despitaient le nom de Dieu, de la glorieuse vierge Marie, des saints et saintes, etc. La justice seigneuriale devait connaître de ces délits. Pour la première faute, le coupable encourait une amende de cinq à vingt sous parisis, selon l’arbitrage du juge et au profit du seigneur local. La peine était double, triple ; elle entraînait enfin l’emprisonnement, dans les cas de première, deuxième et troisième récidive[1]. Dès cette époque, le prince Charles avait son service de chapelle somptueusement organisé. Le docteur Gérard Machet et messire Étienne de Montmoret, prêtre, y présidaient ; le premier, comme confesseur, et le second, comme aumônier du régent. Tous deux étaient assistés de plusieurs chapelains auxiliaires. La chapelle du prince comprenait également des artistes en musique religieuse, les uns chanteurs, les autres instrumentistes[2]. Chaque jour, le dauphin entendait au moins deux messes, l’une à note ou en musique ; la seconde et la troisième étaient des messes basses ou sans musique. Il récitait en outre quotidiennement ses heures canoniales, se confessait chaque jour et communiait aux grandes fêtes. Ses offrandes à la messe et aux corporaux de l’autel s’élevaient, journellement, à douze deniers parisis. Il suivait à cet égard le même ordre, les mêmes pratiques et consacrait à ces offrandes la même somme, que la reine, Marie d’Anjou, son épouse. Toutes les fois que le prince arrivait prendre son séjour dans une ville, il avait coutume, le lendemain, de visiter dévotement la cathédrale ; et, la veille de son départ, il renouvelait avec exactitude sa visite. Aux mois de février-mars 1421, le dauphin Charles habitait Poitiers, l’a ville sainte, aux nombreux moutiers. Là, des souvenirs empreints sur la pierre, figuraient les plus anciennes traditions de la royauté. Là, se mêlaient aux récits merveilleux des romans aquitains les légendes des saints et de l’Église. Les conseillers du jeune prince le retenaient dans cette pieuse et sûre résidence, occupé des actes religieux qui avaient pour objet la célébration du carême. Ils le préservaient ainsi du tumulte de la guerre et dé ses périls. Le 20 mars 1421 (jeudi saint), deux jours avant la bataille de Baugé, Charles, vêtu d’un sac ou manteau de toile, aussi bien que les officiers de sa maison, accomplissait les cérémonies du mandé qui consistaient à laver les pieds de douze pauvres[3]. Le lundi 24, lendemain de Pâques, au matin, un gentilhomme de Sologne, nommé. Louis Boyau, qui avait pris part à la bataille, arriva dépêché par les seigneurs de France, vers le régent. Le messager trouva le prince au château des comtes de Poitou, sa résidence habituelle. Aussitôt, Charles se rendit à pied du château à la cathédrale. Le régent y fit célébrer cette victoire par un Te Deum, et par un sermon, que prêcha MI Pierre de Versailles. Étant retourné ensuite à sa demeure pour y prendre quelque réfection, le prince quitta immédiatement Poitiers, se dirigeant, vers Tours et coucha cette nuit à Mirebeau[4]. Les jours suivants, Charles vint au gîte à Loudun, Chinon, Azay-le-Rideau, puis à Tours, où il arriva le 29. Le lendemain, 30 mars, était le dimanche de la Quasi-modo. A l’heure de l’office, le régent se présenta, vêtu en chanoine de la célèbre église de Marmoutiers de Tours, devant la porte de cette collégiale. Après avoir prêté le serment accoutumé de la part des rois de France (chanoines-nés de Marmoutiers), il pénétra dans l’église. L’héritier du trône prit part aux distributions de pain, de vin et d’argent qui représentaient sa prébende, et fut reçu avec honneur par le chapitre. Charles était accompagné de son jeune cousin Jean, duc d’Alençon, de Pierre II, seigneur d’Amboise, et d’un cortége de gens de cour. Dans le nombre, se trouvaient trois notables prélats attachés à la cause du dauphin : Louis d’Harcourt, archevêque de Rouen, Jean de Norry, compétiteur du siège de Sens ; et l’archevêque de Bourges, Guillaume de Boisratier, conseiller du régent. Ce dernier personnage était en même temps chanoine de Marmoutiers : il célébra pontificalement la grand’messe du jour devant l’assistance[5]. Cependant les vainqueurs de Baugé étaient arrivés à Tours, accompagnés de leurs prisonniers. Le mois d’avril se passa en réjouissances destinées à fêter cette victoire. Diverses mesurés, arrêtées dans le même temps, servirent à préparer de nouveaux succès pour l’avenir. Du 1er au 5 avril, le dauphin régent conféra au comte de Bucan l’épée de connétable. Un grand festin réunit, à la table du prince, les généraux victorieux, et les capitaines anglais que la fortune des armes avait faits captifs du dauphin, leur amphitryon[6]. Avec l’épée de connétable (première charge militaire du royaume), Jean Stuart reçut du prince un singulier présent. Charles lui donna un astrologue : maître Germain de Thibouville, docteur en médecine et souverain astrologien. Ce prophète, attaché au parti du dauphin, avait accompagné Barbazan lors du siége de Melun. Passé au service de lord Stuart, il pronostiqua, dit-on, immédiatement, la mort de Charles VI et d’Henri V. Jean Stuart de Darnley, par lettres du 23 avril, fut investi de la seigneurie de Concressaut en Berry. Le dauphin distribua aux divers capitaines qui s’étaient signalés en Anjou, d’autres libéralités ou récompenses[7]. Dans le même temps, Guillaume Cousinot, le fidèle chancelier dut duc d’Orléans, accourut de Blois à Tours. Il se mit en rapport avec le dauphin et les seigneurs d’Écosse. Le but de ses instances était d’obtenir que les grands personnages anglais, tombés au pouvoir de leurs adversaires à Baugé, fussent échangés contre les deux princes d’Orléans, captifs l’un et l’autre en Angleterre. Par ses soins, un Anglais fut dépêché comme interprète négociateur. L’Anglais se rendit à Paris vers le duc d’Exeter, Thomas. Beaufort, gouverneur de cette capitale et vers la duchesse douairière de Clarence. Cet envoyé leur proposa, de la part du dauphin et du due d’Orléans, de rendre la liberté au bâtard de Clarence, nommé aussi Thomas Beaufort, fils naturel du feu duc de Clarence et prisonnier du dauphin. En retour, Jean, comte d’Angoulême, devait être également délivré de captivité. Mais ces négociations vinrent échouer devant l’inexorable résistance que leur opposa le roi d’Angleterre[8]. Charles de Valois réunit, à Clermont en Auvergne, les trois états des provinces soumises à son obéissance. Le motif évident de cette convocation était de se procurer de nouveaux subsides. Le conseil du dauphin se disposait à reprendre la campagne. L’alliance écossaise fut encore invoquée. Cette fois, la charge de négociateur échut à un écuyer breton, nommé Henri de Pluscallet, qui, depuis 1420, avait suppléé ou remplacé Tanguy Du-, châtel, son compatriote, dans le gouvernement de la Rochelle. Pluscallet fit les avances pécuniaires de l’expédition. Elles se montèrent à trente-six mille écus d’or, en y comprenant le fret des navires et le transport des troupes. En garantie de cette avance, le dauphin dut engager au prêteur les châteaux et forteresses de Taillebourg et de Châtelaillon, sis en Saintonge à peu de distance de la Rochelle[9]. Charles, pendant sa résidence à Tours du 29 mars au 7 avril, remit sa maison sur le pied de guerre et s’équipa personnellement pour entrer en campagne. Hans ou James Poulvoir, peintre écossais, lui peignit et vernissa trois lances de bataille. Ses orfèvres, brodeurs et couturiers confectionnèrent à son usage un riche appareil de vêtements et d’armures militaires[10]. Vers les premiers jours d’avril, les troupes d’agression, d’un côté, et le dauphin, d’un autre, déployèrent sur les champs leurs bannières. Les forces du régent, groupées auprès de Tours, se dirigèrent par Vendôme, Châteaudun et le Perche. Charles partit de Tours le 8 avril et prit sa demeure à Chinon. Après un séjour d’une semaine environ dans cette ville, il gagna Saumur, où il se tint du 14 au 26. Il passa, le 27, à la célèbre abbaye de Saint-Florent lès Saumur. Le 28 et le 29, il visita les positions militaires et le lieu de la bataille à Beaufort-en-Vallée, puis à Baugé. Puis, par Duretal, le prince, entra dans le Maine à Sablé, où il arriva le 4 mai[11]. Le dénouement inattendu de la conspiration des Penthièvres avait modifié gravement la ligne de conduite suivie en premier lieu dans cette affaire, par le gouvernement du dauphin. Ravisés et mieux inspirés, les conseillers de Charles se rapprochèrent du duc de Bretagne, cherchant à lui complaire et à le rallier. Une entrevue, dans ce dessein, fut ménagée à Sablé, où le prince fit, du 4 au 9, sa résidence. Instruit par l’expérience, Jean VI n’entendit à ces pourparlers qu’après avoir obtenu de sûres garanties et s’être fait donner des otages. Le duc exigea ensuite, et avant toute autre transaction, que le régent s’obligeât solennellement, par parole de prince, à éloigner de son conseil et de sa cour le président de Provence, le jeune bâtard d’Orléans, Guillaume d’Avaugour et Pierre Frotier. Ces personnages étaient nominativement signalés à la vindicte de Jean VI, comme les fauteurs de l’attentat commis, contre sa personne, par les Penthièvres. Charles prêta le serment qui lui était demandé, malheureusement, la force, aussi bien que la volonté, manquaient au jeune prince, pour accomplir loyalement une semblable promesse[12]. Les négociations, après ces préliminaires vidés, suivirent aisément leur cours. Le dauphin accueillit avec beaucoup d’égards et de bonne grâce, Richard de Bretagne, frère de Jean VI, et les autres ambassadeurs de Bretagne. Charles offrit à son jeune parent un beau coursier. Par lettres datées du 8 mai, il lui donna en apanage le comté d’Étampes, à raison, était-il dit, de ce que Richard s’employait actuellement à la cause du dauphin. D’après le texte des mêmes lettres, cette libéralité avait encore pour but de récompenser le service que Richard avait rendu au régent en ramenant à ce prince la dauphine[13]. Le mémé jour, un traité de pais, d’alliance et d’amitié, fut signé entre Charles de France et le duc de Bretagne. Jean VI reconnaissait, dans ce contrat, que l’usurpation d’Henri V constituait un attentat criminel. Ce préjudice, ajoutait le duc, atteignait non seulement le régent Charles, mais aussi : les autres parents de Monseigneur qui lui pourraient par droit succéder.... en espécial nous Jehan, duc de Bretagne, qui avons espousé la fille du roi.....En conséquence, le duc se considérait comme obligé, en honneur et en justice, à se déclarer l’ennemi d’Henri V. De son côté, le prince Charles désavouait hautement le coup de main exécuté par Olivier de Blois et ses complices. Les deux princes, en un mot, s’engageaient solennellement et mutuellement, à s’unir, par une alliance offensive et défensive, en même temps contre le roi d’Angleterre et contre les Penthièvres. A la suite de cette entrevue, un contingent de forces bretonnes fut levé immédiatement et placé au service du régent, sous les ordres de Richard, comte d’Étampes[14]. Le régent de France, comte de Poitou, indépendamment du comté d’Étampes, transporta encore à son cousin Richard de Bretagne les terres de Palluau, Thouarcais, et autres, sises dans son comté de Poitou et confisquées sur la branche des Penthièvres. Enfin un double mariage, conclu sous les auspices du prince royal, fut destiné à cimenter pour toujours cette réconciliation. Richard de Bretagne, né en 1395, devint l’époux de la princesse Marguerite d’Orléans, née en 1406 et sœur du duc poète. Jean II, duc d’Alençon, âgé de quatorze ans, était, par Marie de Bretagne, le neveu maternel de Jean VI. Charles dauphin lui donna pour épouse Jeanne d’Orléans, fille unique du duc Charles et plus jeune encore que son époux, étant née le 13 septembre 1409[15]. Les deux unions furent célébrées immédiatement, avec une grande pompe, dans les salles du château de Blois, tendues, pour cette solennité, de magnifiques tapisseries, que le somptueux Louis d’Orléans y avait réunies en grand nombre[16]. Durant ce temps, les troupes du dauphin avaient recommencé les hostilités. En sortant de Tours, elles s’arrêtèrent devant un château-fort sis au lieu nommé le Bouillis, près Vendôme. Cette place était occupée par les Bourguignons. Prise d’assaut, elle fut livrée aux flammes, et les défenseurs, passés au fil de l’épée[17]. Le connétable de Bucan, accompagné de La Fayette, de La Hire, de Saintrailles et d’environ six mille combattants, se dirigea vers la Normandie. Cette armée vint mettre le siége devant Alençon, qui, depuis trois ans était tombé au pouvoir du roi d’Angleterre. Le comte de Salisbury, informé de ce mouvement, réunit le peu de troupes que lui fournirent, à l’état disponible, les garnisons normandes. Il s’avança ainsi jusqu’à proximité des assiégeants. Bientôt les deux armées furent à portée de combattre. Mais le lieutenant d’Henri V, intimidé par l’exemple de son prédécesseur le duc de Clarence, jugea prudent de ne point tenter un nouveau conflit. Masquant habilement sa retraite ; il se rabattit sur l’abbaye du Bec., où il fut poursuivi l’épée dans les reins par les troupes françaises. Ces dernières firent subir à l’ennemi une perte de deux à trois cents hommes, tués ou blessés. Après cette escarmouche, l’armée du dauphin reçut une nouvelle direction. Quittant la frontière normande des Anglais et abandonnant le siège d’Alençon, les troupes du régent se replièrent, d’une part, sur l’Anjou et, de l’autre, sur le pays Chartrain[18]. Charles dauphin, en partant de Sablé, était venu se fixer au Mans (du 15 au 23 mai). Il prit ensuite son séjour à la Ferté-Bernard (du 24 mai au 9 juin) et se, disposa ; dans cette ville, à rejoindre l’expédition, qui avait été envoyée vers Chartres. Le 10 juin, Charles rallia ses troupes à Montmirail. Jean, duc d’Alençon, son cousin, et le comte d’Aumale, s’y trouvèrent réunis aux comtes de Bucan et de Wigton. Cette place était défendue, au nom du duc de Bourgogne, par deux capitaines appelés l’un Fouquet Pesas, et l’autre Jannequin. Les forces supérieures du régent ne leur permettaient pas une longue résistance. Montmirail fut bombardé, puis rasé, et les deux capitaines passèrent au service du dauphin[19]. De là, l’expédition se tourna vers Beaumont-le-Chétif[20]. Le dauphin se posta le 12, à Frénée[21] près Beaumont, pendant que les troupes assiégeaient le château. Trois jours après, Beaumont était rendu. Les troupes du régent se portèrent alors devant Chartres. Le prince Charles avait à ses ordres, sous les murs de cette ville, tant de noblesse que d’archers, arbalétriers et auxiliaires, environ vingt mille hommes[22]. On commença d’investir la place, de tous côtés. Le régent, après avoir marché par Brou, Illiers et Nogent-sur-Eure, passa devant Chartres et s’arrêta non loin de cette ville à Saint-Prest. Mais Chartres appartenait au parti bourguignon. Le bâtard de Thien, l’un des meilleurs capitaines de ce parti, avait été envoyé de Paris pour la défendre. En un mot, la résistance parut au conseil du dauphin tellement assurée, qu’il poursuivit son entreprise en marchant de Saint-Prest sur Gallardon[23]. Le 23 juin, Charles de France assistait au siége de cette dernière ville. Gallardon servait d’asile et de retraite aux plus exaltés Bourguignons de la contrée. De grandes richesses s’y trouvaient réunies. La défense avait pour chef un Parisien nommé le Rousselet, capitaine et bailli de l’endroit, assisté, de Me Gilles Cousin, avocat de Chartres. Après six jours de siège, Gallardon tomba au pouvoir des troupes françaises, bretonnes et écossaises, qui soutenaient la cause du dauphin. Charles de Montfort, capitaine breton, avait été tué par les assiégés. La perte de ce seigneur, très estimé de ses compagnons d’armes, exaspéra les vainqueurs ; ou plutôt elle servit de texte à des barbaries, très familières, dans ces temps, à une soldatesque grossière et effrénée. Après, un assaut général et meurtrier, la ville fut envahie, le 25 juin, par les dauphinois. De nombreux et inoffensifs habitants s’étaient réfugiés dans l’église. Bien que ces malheureux se rendissent à discrétion, les vainqueurs en firent une cruelle boucherie. Le Rousselet et Cousin furent pendus ou décapités, et la ville livrée au pillage. Indépendamment des lieux ci-dessus dénommés, Bonneval et divers autres châteaux ; ou points fortifiés du pays chartrain ; se soumirent à l’autorité du régent[24]. Dans le Nord, la lutte se poursuivait avec des fortunes diverses. Les troupes du dauphin s’emparaient du château de la Folie près Braine (département de l’Aisne). Ils prirent égaleraient Cuile, Saint-Pierremont, Mareil, faisant tous les jours des courses, jusqu’aux portes de Reims. Le 4 juin 1421, un gros de partisans assaillit les faubourgs de cette ville et enleva tout le bétail. Mais les bourgeois de Reims exécutèrent une sortie et refoulèrent les agresseurs[25]. Toutefois le conseil du dauphin ne poursuivit pas cette campagne au delà du terme précédemment indiqué. Le 30 juin 1421, Charles, régent de France, passa le gué de Langroy. Puis, retournant par Saurs (à peu de distance de Chartres), il traversa rapidement Illiers, Brou, Châteaudun, Vendôme, Château-Renard et regagna ainsi la Touraine. Le 11 juillet 1421, Charles dauphin avait établi sa résidence au château d’Amboise, chez Pierre II, seigneur de ce lieu et de Chaumont. Il y séjourna presque constamment jusqu’à l’automne[26]. Henri V, en effet, avait reparu sur le rivage de France. Le roi d’Angleterre, après le couronnement de Catherine, entreprit de visiter avec elle ses provinces du Nord. Il se trouvait à peu de distance d’York, lorsque, dans les premiers jours d’avril, il apprit les résultats de la journée de Baugé. A cette nouvelle, la colère et le dépit l’emportèrent, chez le hautain monarque, sur l’affection fraternelle et sur la douleur. Le roi avait prescrit à son frère d’observer les frontières du Perche et d’Anjou, mais de garder la défensive. Emporté par sa bouillante ardeur, le duc de Clarence avait engagé la bataille malgré les avis du comte de Huntingdon. Henri V, lorsqu’il fut instruit de cette défaite, déclara, dit-on, que si son frère avait survécu, il l’eût puni de mort pour avoir ainsi transgressé ses ordres[27]. Le voyage conjugal qu’Henri de Lancastre venait d’accomplir au sein des populations, lui servit à ranimer le zèle de ses compatriotes. Des subsides considérables furent votés par les communes réunies à Westminster. Henri termina ses préparatifs et mit à la voile sur la plage de Douvres. Il était suivi de l’armée la plus nombreuse et la plus redoutable qui eût jusque-là marché sous ses ordres[28]. Le 10 juin 1421, Henri V débarqua de nouveau à Calais. Il était, dès ce jour, accompagné de quatre mille hommes d’armes et de vingt-quatre mille archers. Aussitôt la descente opérée, il renvoya ses vaisseaux en Angleterre. Le duc de Bourgogne se porta au-devant de lui à Montreuil, comme un vassal et auxiliaire. Il lui fraya la route à travers. la Picardie. Les Anglais et Bourguignons de France attendaient avec anxiété la venue de l’héritier régent. Les dauphinois enlaçaient les approches de la capitale et y tenaient comme bloqué le duc d’Exeter. Sur les vives instances du gouverneur de Paris, Henri V, le 11 juin, lui envoya un premier secours de douze cents lances ou hommes d’armes[29]. Le roi d’Angleterre se hâtait lentement. Il procédait avec le calme de la réflexion et l’assurance que lui inspirait la conscience de ses talents et de son prestige. De Montreuil, il prit sa route par Vast en Ponthieu (ou Airon Saint-Vast), Saint-Riquier, Abbeville, Beauvais, Gisors et se rendit à Paris. Là, il salua le roi ainsi que la reine et pourvut aux affaires de haute administration. Chemin faisant, Henri V s’était mis en rapport avec le conseil de Rouen, avait distribué à ses lieutenants leurs commandements respectifs, et organisé de toute part des intelligences. Placé au centre de ce réseau, aucun rayon, aucun point n’échappait à sa vigilance. Henri de Lancastre, informé des progrès que venait d’accomplir le régent, lança son frère Humphrey, duc de Glocester, et William Pole, comte de Suffolk, à la poursuite de l’ennemi. Pour lui, il établit son quartier général et sa résidence habituelle à Mantes sur la Seine, où il arriva vers le 25 juin[30]. Le duc de Bourgogne avait amené à Mantes, près du roi anglais, un contingent de trois mille hauberts, ou gens d’armes d’élite. Quinze mille combattants, sous les ordres de Glocester, se portèrent à Chartres, où ils arrivèrent sur les vestiges du dauphin. Mais ils ne trouvèrent à qui parler[31]. Le 18 juillet, les Anglais mirent le siège devant Dreux. Cette place importante, défendue par la nature et par des ouvrages militaires, offrait un appareil de défense multiple et formidable. Elle avait pour capitaine un notable chevalier, natif de Guyenne et nommé Amaury d’Estissac. Mais ce capitaine et son lieutenant étaient absents. La garnison, composée de huit cents hommes, se voyant isolée, sans espoir de secours, entra en pourparlers. Le duc de Glocester et le roi d’Écosse[32] représentaient à ce siège Henri V. Le 8 août, il fut convenu, entre les parties belligérantes, que si, dans douze jours, les assiégés n’étaient pas secourus, ces derniers rendraient la place au roi anglais. Le 20 août, aucun secours n’ayant été envoyé, les assiégés sortirent de Dreux, avec leurs biens et la vie sauve. Toutefois ils furent tenus de jurer que, durant le délai d’un an, ils ne s’armeraient pas contré le roi d’Angleterre[33]. Après la capitulation de Dreux, Henri V se rendit, en pèlerinage, nu-pieds, à Notre-Dame de Chartres. Ce lieu de dévotion était des plus renommés. Le régent anglais fut reçu avec acclamation par le clergé, spécialement par l’évêque, nommé Jean de Frétigny, et par les autres Auglo-Bourguignons de cette ville. A l’exemple de Dreux, Tillières, Croisy, Nogent-le-Roi, Épernon, Bonneval, Gallardon et autres châteaux ou places des environs, tombèrent au pouvoir des Anglais[34]. Mais la Piété, chez Henri V, était la compagne assidue de la Politique. En visitant Notre-Dame de Chartres, il se rapprochait des rives de Loire, occupées militairement par le dauphin. Chaque jour les contingents, préparés, arrivaient aux postes que leur avait assignés la prévoyance de cet habile chef militaire. Le 5 août avait été fixé pour l’un de ces rendez-vous ou convocations de ban. Le même jour, les conseillers du dauphin tinrent, à Blois, sous les auspices et au nom de ce prince, un grand conseil d’État et de guerre. Charles, qui habitait à cette date le château de Chinon, peu éloigné de Blois, n’assista point à cette réunion. Elle fut principalement composée des chefs de l’armée. De ce nombre étaient le connétable, Darnley, Wigton, capitaines écossais ; les deux maréchaux de France : Amaury de Séverac et Gilbert de La Fayette ; T. Duchâtel, maréchal des guerres du régent ; Jean de Torsay, grand maître des arbalétriers ; le vicomte de Narbonne et plusieurs autres. Martin Gouge de Charpaigne, évêque de Clermont, chancelier du régent et l’archevêque de Reims, Renauld de Chartres, membres du conseil, étroit ou conseil ordinaire du dauphin, y représentaient la politique et l’autorité civiles[35]. L’assemblée délibéra sur les conjonctures présentes. Elle prit en spéciale considération le siège de Dreux, soutenu par les serviteurs du dauphin, et la nécessité de les secourir. Mais déjà de précédents appels d’hommes avaient été publiés au nom de l’héritier légitime du trône. Les possesseurs de fiefs, tenus au service des armes envers la couronne, n’avaient point répondu à ces appels, avec toute la précision et l’unanimité désirables. En conséquence, le conseil adressait aux vassaux un nouveau mandement, en forme de lettres royaux ou ordonnance. Le ban général était expressément convoqué ou prorogé, pour le 25 du mois d’août, à Vendôme. C’est de là que les troupes devaient partir, pour aller à Dreux, faire lever le siège, et ailleurs. L’ordonnance, enfin, libellée, sur ce point, avec une énergie tonte militaire, stigmatisait, moralement, ceux qui persisteraient à négliger l’accomplissement. des devoirs de leurs fiefs. Elle prononçait en ce cas la confiscation des tenures et la dégradation, quant aux tenanciers, de toutes leurs prérogatives de noblesse[36]. L’ordonnance du 5 août fut de nul effet, comme on l’a vu, en ce qui concerne le siégé de Dreux. Mais les hostilités ne tardèrent pas à recommencer sur un autre théâtre. Au jour dit, 25 août, les comtes de Bucan, de Wigton, T. Duchâtel, le vicomte de Narbonne et autres capitaines du dauphin, se réunirent à Vendôme et de là se rendirent en divers cantonnements. Henri V, instruit de ces faits, partit de Chartres et vint faire étape à la Ferté Villeneuil. Après avoir tenté une attaque infructueuse sur Châteaudun, il dirigea l’une de ses colonnes sur Vendôme et une autre sur Baugency[37]. A Vendôme, les gens du dauphin s’avancèrent jusqu’au gué du Loir, attendant l’ennemi de pied ferme. Les Anglais l’emportaient de beaucoup en nombre. Mais la position du terrain leur était désavantageuse. Leurs troupes, d’un autre côté, manquaient de vivres, bien que chaque soldat eût reçu huit mois de solde avant de quitter le rivage britannique. Les deux armées s’observèrent pendant quelques jours ; puis les Anglais, n’osant attaquer l’ennemi, décampèrent[38]. Durant ce temps, Henri V se transféra de sa personne à la Bruyère près Baugency. Ses troupes franchirent la Loire à la vue de Tanguy Duchâtel, qui occupait Saint-Dié. Dé son côté, ce capitaine ne crut pas devoir engager une attaque sérieuse. Les Anglais firent une pointe dévastatrice en Sologne et parvinrent à s’établir pendant deux jours devant Baugency. Mais au bout de peu de temps, dans le cours de septembre, le roi d’Angleterre replia ses tentes et marcha vers Orléans[39]. La famine et la maladie décimaient l’armée d’Henri V. Arrivés devant Orléans, les Anglais, pressés par la soif, pillèrent quelques tonnes de vin et tentèrent un coup de main acharné sur les faubourgs de la ville. Mais les Orléanais, préludant aux exploits, qui, peu d’années plus tard, devaient jeter un si grand lustre sur leur histoire, repoussèrent avec succès les envahisseurs[40]. Après trois jours de station devant Orléans, les Anglais délogèrent en s’avançant vers l’est. Dans le même temps, leurs coureurs avaient rejoint ou saisi, sur la rive de Beauce, une troupe de cinquante à soixante cavaliers dauphinois, qui côtoyaient et harcelaient le gros de l’armée anglaise. Ces cavaliers, poursuivis par les Anglais, se réfugièrent dans un château fort appelé Rougemont[41], qui tenait pour le parti français. Le capitaine ou châtelain, Génois de nation, se nommait le marquis du Guaret (Caretto ?). La place étant tombée au pouvoir des Anglais, Henri V fit incendier le bâtiment et distribuer à ses troupes les vivres qui s’y trouvaient. Le capitaine et la garnison furent pendus ou noyés jusqu’au dernier, par ordre du vainqueur[42]. De là, Henri V et ses troupes prirent leur route par le Gâtinais et vinrent s’établir à Joigny. Le 22 septembre, Villeneuve-le-Roi sur Yonne fut assiégée par les Anglais, et ne tarda pas de se soumettre à leur puissance. Henri de Lancastre, peu de temps après, passa la Seine et l’Yonne à Moret et à Montereau. Il gagna ensuite Melun, puis Vincennes, et retourna de la sorte au sein de la capitale[43]. Le roi d’Angleterre, dans le cours de cette campagne, avait perdu plus de quatre mille hommes, presque sans coup férir. Ces malheureux soldats, réduits à manger de l’herbe, périssaient par milliers. Leurs cadavres, tout habillés, jonchant les routes et les bois, marquaient ainsi leur passage. La nature semblait faire cause commune avec la juste querelle de la France et sévissait spécialement contre les oppresseurs. Les troupes du dauphin, avitaillées par les villes patriotes de la Loire, avaient dû, il est vrai, compter avec la maladie. Mais tel fut leur unique ou principal ennemi. Les adversaires du dauphin eurent à subir des épreuves beaucoup plus terribles[44]. La guerre traînait après elle tous les autres fléaux qu’elle engendre. L’an 1421, dit un chroniqueur normand, fut la plus forte année en France (Ile-de-France), et en Normandie que oncques homme vit, de tous vivres et de toutes autres choses nécessaires à corps d’homme, et oncques n’en vit-on si mauvais de biens, ni de fruitages : noix, pommes poires, prunes, cherises et de tous autres choses, avec les mutations de monnoie qui pardétruisoient tout[45]. La terre, abandonnée des cultivateurs, demeurait stérile. Un trouble inaccoutumé dans l’ordre des saisons, et l’intempérie de l’air avaient déterminé des maladies qui se joignaient à la misère publique. Le gouvernement anglais, à Paris et à Rouen, s’était vu entraîné lui-même à déprécier les monnaies. De là, une perturbation immense, suivie du renchérissement des denrées les plus nécessaires à l’existence. Au terme de la Saint-Jean (24 juin), le populaire s’ameuta au sein de la capitale et fit entendre ces murmures qui n’avaient point grondé en vain dans les jours redoutables. Le gouvernement anglais s’émut et dut intervenir, comme modérateur, pour le paiement des rentes et loyers. En cest an (note un autre nouvelliste, rédacteur du Journal de Paris), fut hiver si long et si divers, qu’il faisait très grand froid jusqu’en la fin du mois de mai et en la fin de juin n’étaient pas encore les vignes fleuries ; et fut si grande année de chenilles que le fruit fut tout dévasté... En ce temps, étoit le vin si cher que chacune pinte de vin moyen coûtoit quatre sols parisis[46]... Et furent en ceste année trouvés à Paris en aucuns lieux, escorpions qu’on n’avoit point accoustumé de voir... En ce temps étoit très grande mortalité. Tous mouroient de chaleur, qui leur prenoit la tête, accompagnée de fièvre. Ils mouroient sans être autrement malades ou affaiblis de corps, et, parmi eux, dans la force de la vie, les jeunes gens[47]. La famine, rapporte un troisième, étoit si grande ès pays entre Seine et Loire, Champaigne et Brie, mesmement dans Paris, qu’il fut trouvé une femme morte de faim, son enfant vif tenant encore la mamelle de sa mère, y cuidant trouver substance. On vit des pauvres refuser un peu de nourriture, que leur apportait la pitié. Ils répondaient : Donnez à d’autres, je n’ai plus la force de manger. Ce que le menu peuple souffroit tant de pauvreté, de faim, de froid et de toutes autres méchances, nul ne le scet, que Dieu de Paradis ; car quand le tueur de chiens avoit tué dés chiens, les pauvres gens le suivoient aux champs pour avoir la chair ou les tripes pour les manger. Enfin les loups apparaissaient dans les villages et dans les villes. Ils déterraient, de leurs pattes, les cadavres frais et nombreux que recevaient chaque jour les cimetières. En ce temps, étoient les loups si affamés, qu’ils entroient de nuit ès bonnes villes et faisoient moult de divers dommages. Souvent passoient à la nage la rivière de Seine et autres. Ils pénétroient dans les rues et mangeoient, en sautant, les jambons suspendus aux portes. On en vit dans plusieurs lieux se jeter sur les femmes et sur les enfants pour les dévorer[48]. Tels étaient (mémorable enseignement), tels étaient les fruits que produisait déjà la domination étrangère. |
[1] Ordonnances, t. XI, p. 105. Cet édit, renouvelé du douzième siècle, le fut encore très souvent depuis lors, notamment le 11 février 1425 ; Ms. Blancs manteaux, t. VIII, n° 105. Voy. Dareste de la Chavanne, Histoire de l’administration en France, 1845, in-8°, t. I, p. 220, note 1.
[2] Comptes de la chapelle et autres. Godefroy, Charles VI, p. 797 et suiv.
[3] Henri Bande dans Jean Chartier, etc. t. III, p. 129,318. Quicherat, Procès de la Pucelle, etc., t. V, p. 340. K. K. 56, Passim.
[4] Ursins-Godefroy, p. 390. Berry, p. 441. Itinéraire. Le prince Charles, par une lettre datée en nostre Chastel à Poitiers le 20 mars, annonce aux Tourangeaux son intention d’aller prochainement les visiter. V. Luzarche, Lettres de Tours, p. 35.
[5] Itinéraire. Ms. Baluze, n° 17, f° 347.
[6] Cousinot, p. 181. J. Chartier, t. III, p. 317.
[7] Simon de Phares, Ms. français, n° 7487. Sources citées. Stuart, History of Stewarts, p. 118. Catalogue Joursanvault, n° 3386.
[8] Catalogue Joursanvault, n° 3386, 3392. Tyler, Memoirs on Henri V, t. II, p. 218, 260, 292, 306.
[9] Par délibération du 22 avril, le chapitre de Marmoutiers décide qu’il enverra des députés à l’assemblée des trois états, convoqués, à Clermont, par le dauphin. (Ms. Baluze, n° 77, f° 347.) — Arcère, Histoire de la Rochelle, t. II, p. 563. J. 183, n° 186 à 141. D. Morice, Actes de Bretagne, 1744, t. II, col. 1125. En 1424, Charles VII, sur cette créance, était encore redevable de sept mille escus, pour lesquels, l’un des florons de la bonne couronne du roy est engagé à la Rochelle, en la main de Penant Baudin. (J 183, n° 140.)
[10] Espée de parement de Monseigneur. Main-d’œuvre et argent ciselé sur la garniture de la poignée, payés 715 fr. tournois. Étui de Cordouan (cuir de cordonnerie) pour ladite épée, etc. Comptes dans Chartier, t. III, p. 305, 306. Itinéraire.
[11] Cousinot, p. 181. Itinéraire. Le Courvoisier de Courteilles, Histoire des évesques du Mans, p. 670 et suiv.
[12] D. Morice, t. I, p. 487.
[13] Itinéraire. D. Morice. J. Chartier, t. III, p. 304, 315. Ordonnances, t. XI, p. 121.
[14] D. Morice, t. II, p. 487. Actes de Bretagne, t. II, col. 1002.
[15] Jeanne d’Orléans fut sans doute placée, immédiatement au service et dans la compagnie de la, jeune régente, Marie d’Anjou. Elle figure à ce titre dans les comptes de la reine, dès l’avènement de Charles VII à la couronne. (K. K. 56, f° 8, v° et passim. Lincy, Femmes célèbres, t. I, p. 648.) L’acte de 1421 parait n’avoir été qu’une promesse ou fiançailles. Le mariage eut lieu, d’après Cagny (ch. LXXIX), et Cousinot (ch. 205) ; historiographes des deux maisons, le dimanche 29 août 1423. Jeanne, à cette dernière date, allait entrer dans sa quinzième année, et le duc, né le 2 mars 1407, était âgé de plus de seize ans. Cependant, à la date du 30 septembre 1423, on trouve dans les comptes de la cour la jeune duchesse dénommée Mademoiselle d’Orléans. (K. K. 56, f° 28 et suiv.)
[16] A. Morice, loc. cit. Preuves de Bretagne, t. II, col. 1091 et 1093. Cousinot, chap. CXC et CCV. Monstrelet, édit. d’Arcq, t. IV, p. 41. Chastelain, p. 76. Bibliothèque de l’école des Chartes, t. VIII, p. 137. La Saussaye, Histoire du château de Blois, 1850, p. 97.
[17] Cousinot, p. 151.
[18] Redet, Catalogue de Dom Housseau, p. 326. Monstrelet, p. 40. Chastelain, p. 75.
[19] Itinéraire. Religieux, t. VI, p. 462. Ursins, p. 391. Raoulet, p. 170. Cousinot, p. 151. Cagny, chap. LXXIII.
[20] Ou le Chartif ; aujourd’hui Beaumont-les-Autels, canton d’Authon, entre Nogent-le-Rotrou et Brou (Eure-et-Loir).
[21] Probablement Frestay ou Freté, près Beaumont, au sud, entre Beaumont et Brou.
[22] Itinéraire. — Et comme il fut estimé par gens à ce connoissant, pouvoit avoir ledit dauphin en sa compagnie de six à sept mille harnois de jambes, quatre mille arbalétriers et six mille archers. Monstrelet, p. 44. Au 10 juin, Cagny suppute Perfectif de ces troupes, a passé trente mille combattants. Vingt mille nous parait être une moyenne vraisemblable. Voy. la note suivante.
[23] Puis passa par devant Chartres et n’y voulut asseoir le siège pour révérence de Dieu et de sa benoite mère (Notre-Dame de Chartres). Cousinot, p. 181. — Monstrelet, etc., d’accord avec l’évidence des faits, donnent un tout autre motif à cette retraite. Dans une lettre du 26 juin, le dauphin mande aux Tourangeaux de venir apporter des vivres à la compagnie qui est si grant et si notable que pleça ne fut vue telle.
[24] Lettre du dauphin aux habitants de Tours : En nostre ost devant Galardon le 26 juin.... Nous avons grâces à monseigneur recouvert les places de Montmirail, Boisrufin, Beaumont-le-Chétif et Villebon au pays du Perche. Et le jour de hier, au vespre fut prise par assaut et qui ne dura pas un quart d’heure, cette ville et place de Galardon... Ils se sont par, résistance opiniâtre, laissé de tous points destruire. Lettres de Tours, p. 37 et suiv. Itinéraire. Religieux. Ursins. Raoulet. Gousinot. Gagny.
[25] D. Marlot, Histoire de Reims, in-4°, t. IV, p. 167.
[26] Monstrelet, p. 43. Religieux. Ursins. Cousinot. Itinéraire. Cette retraite est ainsi motivée dans un document authentique : ... Comme... par maladie survenue en nostre ost (armée), et pour voir le gouvernement et manière d’entreprendre d’iceux ennemis, et autres causes à ce nous mouvans, nous soyons tenu sur la rivière de Loire, en rafraîchissant nos gens, etc. (Ordonnances, t. XI, p. 126.)
[27] Tyler, t. II, p. 287. Ms. 6239, f° 112. D. Morice, Histoire de Bretagne, t. II, p. 486. Mémoires de Thomas Basin, t. I, p. 39, 40.
[28] Ibidem.
[29] Monstrelet, p. 43 et suiv. Chastelain, p. 78. Saint-Remi, p. 455. Fenin-Dupont, p. 155.
[30] Sources précédentes. Ms. Bréquinny, n° 80, f° 228 : Lettre d’un Anglais à Henri V ; 15 juin, situation intérieure de l’Anjou et de la Normandie ; nouvelles militaires et politiques. Même Ms., te 229 : Lettre à Henri V, 2 juillet ; nouvelles de la Lorraine et des Trois-Évêchés. Les Anglo-Bourguignons ont pris sur les Armagnacs divers châteaux, sous la conduite du comte de Saint-Paul. Ils ont pénétré à Gondrecourt (à deux ou trois lieues de Domremy). — Henri V était au gîte à Paris le 4 juillet venant de Gisors. (X. X. 1480, f° 236. Félibien, Preuves, t. II, col. 586 a.) Le 5, il se rend à Notre-Dame, pour y faire ses dévotions publiques. Le roi et la reine se trouvaient alors à Paris. Le 8, il part à la tète des troupes, se dirigeant vers Chartres. (Ibid. f° 236, r° et v°.) Il était à Mantes le 12. (Delpit, p. 231. Tyler, II, 300.)
[31] Elmham, p. 209. Religieux, t. VI, p. 464. P. Cochon, p. 441.
[32] Jacques Ier, roi d’Écosse, étant tombé au pouvoir d’Henri V, celui-ci le fit son prisonnier d’une manière peu loyale. Dès lors, il le conduisit partout avec lui et le contraignit de servir en France, sous ses ordres, contre le dauphin. Henri V espérait contrecarrer, par ce procédé, l’alliance écossaise si chère au régent français. Il mettait ainsi les soldats écossais aux prises avec leur propre roi.
[33] Religieux, 466. Ursins, 392. Berry, 441, Cousinot, chapitre CLXXXV. Chronique de Normandie, f° 178, v°. Monstrelet, p. 69. Chastelain 93, 94. Pendant le siége, Henri V se tenait à Moronval près Dreux. (Chronique de Normandie.) Il y était encore le 22 août (J. 211, n° 48). La place avait été livrée précédemment au dauphin par un Anglais que la Chronique de Normandie nomme le comte de Tillères. (Il y a un Tillères près Dreux). Excepté de la capitulation, il fut pris comme traître par les vainqueurs et pendu. (Elmham, p. 311.) Au sortir de Dreux, les assiégés furent guettés par un Bourguignon, nommé le bâtard de Thierry, qui les attendait, en force, dans un embuscade. Quatre cents d’entre eux y périrent. (P. Cochon, p. 411.)
[34] Elmham, p. 311. Cochon, p. 441. Cousinot, chap. CLXXXV. Chastelain, p. 93. Journal de Paris, p. 652. Lépinois, t. II, p. 7 5.
[35] Monstrelet, p. 69. Chronique de Normandie, f° 69. Itinéraire.
[36] Ordonnances, t. XI, p. 126 et suiv.
[37] Cousinot, chap. CLXXXVI. Berry, p. 441. Religieux, t. VI, p. 464. Ursins dans Godefroy, p. 392.
[38] Berry. Monstrelet. Religieux. Ursins.
[39] Les mêmes, Raoulet, p. 175. Monstrelet, p. 70. Elmham, p. 311. Chron. de Normandie, 175, v°. Le 6 septembre 1421, le capitaine de Blois certifie que F. de Jouteron, a délivré pour mener hâtivement à Baugency, vers le bâtard de Joinville, capitaine dudit lieu, pour la défense de la place, deux casses (caisses) de trait commun (flèches ou viretons), un petit canon de fer garny de deux hoestes de fer et 50 livres de pouldre à canon en un sac de cuir. (Catalogue Joursanvault, t. II, n° 3173.)
[40] Chronique de Normandie. Elmham.
[41] Deux localités de ce nom subsistent, à peu de distance l’une de l’autre, dans la situation désignée, par delà la forêt d’Orléans, au nord. Il s’agit sans doute ici de Rougemont-sous-Aschères. Chastelain donne à ce château le nom de Longueil.
[42] Monstrelet. Berry. Elmham. Chron. de Normandie. Chastelain, p. 95.
[43] Elmham, p. 313. Chron. de Normandie. Cousinot. Religieux, etc.
[44] Berry, p. 442, etc.
[45] P. Cochon, p. 443.
[46] Au lieu de quelques deniers, prix des temps d’abondance.
[47] Journal de Paris, p. 651, 652.
[48] S. Remi, p. 455. Journal, p. 651, 652.