L'HOMME AU MASQUE DE FER

 

PAR MARIUS TOPIN

OUVRAGE AUQUEL L'ACADÉMIE A DÉCERNÉ LE PRIX D'HISTOIRE

PARIS - DIDIER ET Cie - 1883.

 

 

INTRODUCTION.

Arrivée de l'Homme au masque de fer à la Bastille. — Sa mort. — Considérations générales sur ce prisonnier fameux. — Motifs qui m'ont déterminé à faire sur lui de nouvelles recherches. — Plan et but de cet ouvrage.

CHAPITRE PREMIER.

Système qui fait du Masque de fer un frère de Louis XIV. —Le premier, Voltaire a soutenu ce système dans son Siècle de Louis XIV et dans le Dictionnaire philosophique — Invraisemblances que renferme son récit. — Relation sur le Masque de fer introduite par Soulavie dans les Mémoires apocryphes du maréchal de Richelieu. — Des trois diverses hypothèses du système qui fait du Masque de fer un frère de Louis XIV.

CHAPITRE II.

Première hypothèse. — Portrait de Buckingham. — Causes de son voyage en France. — Empressement avec lequel il y est reçu. — Sa passion pour Anne d'Autriche. — Caractère de cette princesse. — Voyage à Amiens. — Scène du jardin. — Quel est le souvenir qu'eu conserva Anne d'Autriche.

CHAPITRE III.

Seconde hypothèse. — Premiers sentiments d'Anne d'Autriche au sujet de Louis XIII. — Joie qu'elle éprouve en arrivant en France. — Premières impressions de Louis XIII. — Sa répulsion pour l'Espagne. — Son éloignement pour le mariage. — Austérité de ses mœurs. — Persistance de sa froideur. — Par quels moyens on le détermine à consommer son mariage. — Diverses grossesses d'Anne d'Autriche. Sa situation politique. — Louis XIII et Richelieu. — Surveillance exercée sur la reine par le ministre. — Maladie du roi à Lyon. Nouvelle grossesse d'Anne d'Autriche. — Impossibilité de l'expliquer par un adultère. — Motifs qui ont porté la reine à cacher un troisième avortement.

CHAPITRE IV.

Troisième hypothèse. — Réconciliation entre Louis XIII et Anne d'Autriche. — Quatrième grossesse de la reine. — Soupçons dont on a parfois accueilli les, naissances royales. — Excellentes précautions prises en France afin d'éviter ces soupçons. — Récit de la naissance de Louis XIV. — Impossibilité d'admettre la naissance d'un frère jumeau. — Absence de Richelieu. — Inutilité de l'enlèvement et de la suppression de ce prétendu frère jumeau.

CHAPITRE V.

Motifs qui empêchent d'admettre l'existence, l'arrestation et l'emprisonnement d'un fils mystérieux d'Anne d'Autriche. — L'époque où il aurait été remis à Saint-Mars, selon les auteurs de ce système, ne peut se concilier avec aucune des dates d'envois de détenus à ce geôlier. — Autres considérations qui s'opposent formellement même à la vraisemblance du système qui fait du Masque de fer un frère de Louis XIV.

CHAPITRE VI.

Le comte de Vermandois. — Son portrait. — Mademoiselle de la Vallière sa mère. — Anecdote tirée des Mémoires secrets pour servir à l'histoire de Perse. — Le P. Griffet en adopte les conclusions. — Arguments qu'il invoque. — Motifs qui rendent suspectes certaines appréciations de mademoiselle de Montpensier. — Invraisemblance du récit des Mémoires de Perse. — Maladie du comte de Vermandois. — Réalité de sa mort attestée par les dépêches les plus authentiques. — Magnificence de ses obsèques. — Fondations pieuses à Arras.

CHAPITRE VII.

Causes qui rendent vraisemblable le système qui fait de Monmouth le Masque de fer. — Situation politique de Monmouth. — Son portrait — On le détermine à la révolte contre le roi Jacques II son oncle. — Il débarque prés du port de Lyme. — Ses premiers succès. — Enthousiasme avec lequel il est accueilli. — Son découragement prématuré. — Sa défaite dans les marais de Sedgmoor. — Sa fuite honteuse. — Il est arrêté et conduit à Londres. — Lèches terreurs du prisonnier. — Son entrevue avec Jacques II.

CHAPITRE VIII.

Bases sur lesquelles Saint-Foix a fait reposer son système. — Discussions de Saint-Foix et du P. Griffet. — La mémoire de Monmouth devient légendaire en Angleterre. — Ballades annonçant son retour. — Preuves irréfragables qui établissent la mort de Monmouth en 1685. — Récit de cette mort. — Entrevue de Monmouth avec sa femme et ses enfants. — Il est conduit à l'échafaud. — Sa fermeté. — Dernières paroles qu'il prononce. — Maladresse du bourreau.

CHAPITRE IX.

François de Vendôme, duc de Beaufort. — Son portrait. — Sa conduite pendant la Fronde. — Médiocrité de ce personnage. — Motifs allégués par Lagrange-Chancel à l'appui de son système. — Leur invraisemblance. — Raisons qui m'ont déterminé à rechercher des preuves qui ne permettent plus de douter de la mort de Beaufort à Candie.

CHAPITRE X.

Causes de l'expédition de Candie. — Intrigue de cour. — Turenne et le duc d'Albret. — Préparatifs de l'expédition. — Beaufort la commande. — Départ de la flotte. — Son arrivée devant Candie. — État de cette île. — Description de la place assiégée. — Dernier conseil de guerre. — Plan d'attaque. — Elle est fixée au milieu de la nuit du 24 au 25 juin 1669. — Les premiers mouvements réussissent. Terrible explosion d'un magasin de batterie. — Panique effroyable. — Déroute des Français. — Réembarquement des troupes. — Certitude de la mort de Beaufort.

CHAPITRE XI.

Considérations générales sur l'enlèvement du patriarche arménien Avedick. — Envoi du marquis de Ferriol à Constantinople, en qualité d'ambassadeur. — Difficultés particulières à ce poste. — Conduite inconsidérée de quelques-uns des prédécesseurs de Ferriol. — Les aventures de Quiclet. — Portrait de Ferriol. — Ses prétentions à Constantinople. — Excentricité de ses manières. — Sa conduite dans les affaires religieuses. — Église arménienne. — Rapide examen de son histoire. — Prosélytisme ardent des missionnaires catholiques. — Leur imprudence. — Ferriol tente d'abord de la réparer. — Résistance opiniâtre du P. Braconnier, jésuite. — Empiètements et exigences des jésuites.

CHAPITRE XII.

Avedick. — Son origine. — Son protecteur, le grand muphti, Feizoulah-Effendi. — Les deux Églises schismatique et catholique se maintiennent dans une concorde parfaite. — Chute de Mustapha II. — Mort du muphti. — Avedick est déposé et emprisonné. — Les Arméniens le délivrent à prix d'argent. — Haine persistante de Ferriol. — Son acharnement contre Avedick. — Il réussit à le faire déposer pour la seconde fois. — Récit de l'enlèvement d'Avedick à Chio. — Il est enfermé dans un bâtiment français. — Péripéties du voyage. — Avedick essaye de donner de ses nouvelles. — Insuccès de sa tentative. — Son arrivée à Marseille.

CHAPITRE XIII.

Le chevalier de Taulès. — Comment il a été conduit à croire que l'Homme au masque de fer était Avedick. — On lui fournit la preuve évidente de l'impossibilité matérielle de ce système. — Taulès persiste et accuse d'un faux les pères jésuites. — Examen du journal de Dujonca. — Sa parfaite authenticité et la sincérité naïve de l'auteur ne peuvent être mises en doute. — Preuves nouvelles de cette authenticité et de l'exactitude de Dujonca.

CHAPITRE XIV.

Avedick est d'abord enfermé dans les prisons de l'Arsenal. — De Marseille il est conduit au mont Saint-Michel — Description du mont Saint-Michel. — Traitements auxquels est soumis Avedick. — Set vaines protestations contre un tel abus de la force. — Emotion universelle excitée dans tout l'Orient. — Plaintes du divan. — Impudence de Ferriol. — Terribles représailles exercées sur les catholiques. — Les faux Avedick. — Expédients auxquels est réduit Ferriol. — Inquiétudes de la cour de Rome. — Duplicité du gouvernement de Louis XIV. — Avedick est transféré à la Bastille. — Suggestions dont il est l'objet. — Il abjure et est rendu à la liberté. — Il meurt à Paris rue Férou. — Acte mensonger dressé à propos de cette mort. — Parts de responsabilité qui incombent à chacun des auteurs de l'enlèvement.

CHAPITRE XV.

Description de Pignerol. — Son passé, sa situation. — Portrait de Saint-Mars. — Ses scrupules et son honnêteté. — Arrivée de Fouquet à Pignerol. — Rapide examen de la carrière du surintendant. — Son erreur au sujet de Louis XIV. — Il le trahit. — Causes de la chute de Fouquet. — Son arrestation. — Son procès. — Sa condamnation. — Il n'y a rien d'obscur dans cette affaire.

CHAPITRE XVI.

Mot de la mère de Fouquet. — Piété du prisonnier. — Danger auquel il échappe à Pignerol. — Surveillance incessante dont il est l'objet à la Pérouse, puis à Pignerol. — Scrupules excessif de Saint-Mars. Précautions prescrites par Louvois. — Espionnage exercé sur Fouquet par ses domestiques et par son confesseur. — Maladies de prisonnier. — II se voue entièrement à l'étude et aux méditations religieuses. —Travaux auxquels il se livre. — Sa nouvelle devise. Intérêt qu'il continue à porter à tous les siens et à Louis XIV. Laconisme des réponses de Saint-Mars.

CHAPITRE XVII.

Brusque et singulière arrivée de Lauzun dans la chambre de Fouquet. — Celui-ci l'a connu autrefois sons le nom de marquis de Puyguilhem. — Lauzun énumère ses titres, ses dignités et se dit cousin du roi. — Fouquet croit son visiteur fou. — Portrait de Lauzun. — Sec aventures. — Son arrivée à Pignerol. — II continue ses visites à Fouquet. — Récits qu'il lui fait. — Belle conduite de Louis XIV envers Lauzun. — Audacieux moyen que celui-ci emploie pour surprendre une conversation entre Louis XIV et madame de Montespan. — Diversité de la conduite de Lauzun et de celle de Fouquet. — Emportements de Lauzun contre Saint-Mars. — Perplexité de celui-ci. — Singulier moyen de surveillance auquel il a recours. — Adoucissement progressif dans le sort des deux prisonniers. — Ils reçoivent l'autorisation de se voir. — Arrivée à Pignerol de la fille de Fouquet. Mésintelligence entre Fouquet et Lauzun. — Causes de cette mésintelligence.

CHAPITRE XVIII.

Système qui fait de Fouquet l'Homme au masque de fer. — Arguments invoqués par M. Lacroix. — Lesquels doivent être absolument rejetés et lesquels discutés. — Fouquet ne possédait point un dangereux secret d'État. — Madame de Maintenon. — Son caractère. — Sa jeunesse. — Ses relations avec monsieur et madame Fouquet. — Son honorable réserve. — Affaire des poisons. — Comment le nom de Fouquet y a-t-il été mêlé ? — Vraisemblance de sa mort produite par une attaque d'apoplexie. — Faiblesse des autres arguments invoqués par M. Lacroix. — Oubli dans lequel était tombé le surintendant. — Deux arrestations mystérieuses.

CHAPITRE XIX.

Intervention des rois de France en Italie. — Politique d'Henri II, d'Henri IV et de Louis XIII. — Conduite judicieuse de Richelieu. — Traité de Cherasco. — Ambition menaçante de Louis XIV. — Situation de la cour de Savoie à la mort de Charles-Emmanuel. — Portrait de Charles IV, duc de Mantoue. — Le marquisat de Montferrat et Casai. — Le comte Matthioly. — Sa carrière politique, sen caractère. — L'abbé d'Estrades et Giuliani. — Projet de cession de Casai à Louis XIV. — Entrevue à Venise de Charles IV et de l'abbé d'Estrades. — Voyage de Matinal à Versailles. — Il communique le projet aux ennemis de la France. — Que faut-il penser de sa conduite ?

CHAPITRE XX.

Perplexité de la régente de Savoie. — Elle découvre à Louis XIV la conduite de Matthioly. — Arrivée de Catinat à Pignerol. — Arrestation du baron d'Asfeld et sa détention à Milan. — L'abbé d'Estrades conçoit, le premier, le projet de l'enlèvement de Matthioly. — Dépêches de l'abbé d'Estrades racontant l'enlèvement et l'incarcération du ministre de Mantoue. — Moyens employés pour recouvrer les pièces officielles de la négociation. — Mystère qui entoure la disparition de Matthioly. — Sa famille se disperse et reste silencieuse et impuissante.

CHAPITRE XXI.

Époque à laquelle remonte le système qui fait de Matthioly l'Homme au masque de fer. — Nombreux écrivains qui se sont occupés de l'enlèvement de ce personnage. — Arguments de Reth, de Roux-Fazillac et de Delort. — M. Jules Loiseleur. — Ses travaux. — De la supposition qu'un espion obscur a été arrêté en 1681 par Catinat. — On ne saurait l'admettre. — Raisons pour lesquelles M. Loiseleur repousse le système qui fait de Matthioly l'Homme au masque de fer. — Solidité de son argumentation et justesse de ses conclusions.

CHAPITRE XXII.

Les lies Sainte-Marguerite. — Leur aspect, leur passé. — Causes diverses de leur célébrité. — Comment j'ai été amené à supposer que Matthioly n'a pas été conduit par Saint-Mars à Exiles. — Documents qui établissent qu'il a été laissé à Pignerol. — Obscurité des deux prisonniers transférés par Saint-Mars à Exiles. — On ne saurait voir en aucun d'eux l'Homme au masque de fer. — Envoi aux lies Sainte-Marguerite des prisonniers de Pignerol.

CHAPITRE XXIII.

Conduite de Charles IV, duc de Mantoue, envers son ancien ministre. — Ses véritables sentiments à son égard. — Précautions particulières prescrites à Villebois et à Laprade pour les prisonniers laissés par Saint-Mars à Pignerol. — Changement dans la situation de Louis XIV en Italie. — Transfèrement des prisonniers de Pignerol aux îles Sainte-Marguerite. — instructions données au maréchal de Tessé. Redoublement de la surveillance de Saint-Mars. — Mystère qui entoure les trois prisonniers. — Importance plus grande de l'un d'eux. — C'est lui qui a été l'Homme au masque de fer.

CHAPITRE XXIV.

Usage du masque autrefois assez répandu. — Cet usage était fréquemment appliqué aux prisonniers en Italie. — Facilité de l'emploi d'un masque pour Matthioly. — Origine de la légende de l'Homme au masque de fer. — De la transmission du secret de roi à roi. Louis XV et Louis XVIII. — Pour quel motif les dépêches que nous avons citées sont-elles restées jusqu'à ce jour inédites ? — Du silence de 8int-Simon. — Dujonca. — Objection de Taules. — Dureté du langage de Louvois. — Age de Matthioly. — Du nom de Marchialy. — Ordre d'arrestation pour Matthioly. — Arrivée à Paris du duc de Mantoue. — Conclusion.

APPENDICE.

 

Si ce livre était seulement destiné à satisfaire une curiosité vulgaire et banale, il n'aurait que quelques pages. Plus élevé est le but que j'ai poursuivi. J'ai entrepris, à propos du plus fameux et du plus légendaire des prisonniers d'État, d'écrire l'histoire des principaux personnages en qui l'on a vu l'Homme au masque de fer. Avec les uns j'ai eu à pénétrer dans la vie intérieure de Louis XIII et d'Anne d'Autriche, et, pour détruire les accusations dont on a souillé la mémoire de cette princesse, je n'ai pas hésité à aborder certains points délicats et à suivre ses accusateurs sur le terrain où ils avaient porté le débat. Mais je me suis imposé l'obligation de toujours respecter mes lecteurs, et, sans blesser leur goût, d'entraîner leur jugement. J'ai suivi les autres personnages dans leur aventureuse carrière, dans leur existence agitée, et quelques-uns d'entre eux jusque dans leur captivité diversement subie, tantôt dans l'inaction monotone de la solitude, tantôt avec la résignation du sage, ou bien encore animée par d'audacieux essais de fuite que toujours fait échouer l'incessante vigilance du plus scrupuleux des geôliers. C'est ainsi que dans ce livre se trouvent réunis Louis XIII et Anne d'Autriche, le séduisant Buckingham, le touchant Vermandois, le versatile Monmouth, Beaufort l'aventureux, Lauzun le téméraire, Fouquet, admirable par sa résignation et ses vertus chrétiennes, l'infortuné Matthioly et Saint-Mars, dont la mémoire, comme son existence même, est inséparable de celle de ses prisonniers.

J'ai donné pour uniques et inébranlables bases à cet ouvrage les matériaux, pour la plupart inédits, trouvés dans nos archives. Durant deux années, je les ai recueillis dans les divers dépôts de manuscrits, et partout, dans les ministères, comme dans les Archives de l'empire, à la Bibliothèque impériale aussi bien qu'à l'Arsenal, à l'Institut comme à l'Hôtel de Ville, j'ai trouvé l'accueil le plus empressé, une libéralité sans réserve, une aménité des plus précieuses. C'est pour moi un devoir, et tout à la fois une satisfaction, de témoigner ma gratitude à MM. Camille Rousset, Gallet de Kulture, Margry, de Beauchesne, Lacroix, Ravaisson, Saige, Aude et Read. Les richesses de nos archives ne sont pas seulement rendues accessibles par la bienveillance de leurs conservateurs, mais encore facilement utilisables par l'ordre qu'ils ont introduit dans l'abondante profusion des documents, par des classifications aussi claires qu'ingénieuses.

Le soin que j'ai eu d'indiquer les sources, et, le plus souvent, de les reproduire tout entières dans les notes, afin de fortifier le récit par ce qui en constitue les fondements mêmes, ne m'a pas mis à l'abri des dénégations les plus absolues. Dans les chapitres XI, XII, XIII et XIV de ce livre, j'ai raconté l'histoire, jusqu'ici à peu près inconnue, de l'enlèvement d'un patriarche arménien, arraché de son pays par un ambassadeur français cédant aux suggestions de quelques missionnaires catholiques. Plusieurs parties essentielles de cet épisode ont été contestées au moment de sa publication dans le Correspondant. Il est vrai que c'est dans la Revue des R. P. Jésuites[1] que l'attaque a été portée. La haute situation du R. Père qui l'a rédigée, l'étendue de son article, l'examen approfondi auquel il s'était livré, m'ont fait une obligation de lui répondre[2]. Quant aux feuilles toujours imprudentes et excessives qui, allant bien au delà de mon honorable contradicteur, ont prolongé le débat, alors qu'il l'avait clos très-opportunément, quant à ces feuilles, dont chacun connaît la Mansuétude et la douceur évangéliques, et qui compromettraient la cause qu'elles croient servir si, depuis longtemps, cette cause n'avait d'autres organes plus chrétiens et plus influents, j'ai dédaigné de répondre à leurs attaques. J'en partage l'honneur avec tant d'hommes éminents, que je suis en quelque sorte confus de les avoir obtenues ; loin de les éviter, tous mes efforts tendront à les mériter davantage.

Des documents mis en œuvre, j'ai donné dans le teste les plus essentiels, en note ceux qui ont une importance moindre, et je me suis contenté de faire connaître les dépôts où se trouvent les matériaux tout à fait secondaires. Le lecteur pourra donc me contrôler lui-même. Sans rien sacrifier de l'exactitude la plus rigoureuse, j'ai essayé d'introduire dans ce récit la vie, le mouvement propre aux personnages mis en scène, mais avec le dessin pur de l'histoire et les seules couleurs de la vérité, encore plus attrayantes que celles de la légende.

 

Paris, le 8 novembre 1869.

 

 

 



[1] Études religieuses et littéraires, numéro du 15 août 1869.

[2] On trouvera cette réponse dans l'Appendice.