LOUIS XIII ET RICHELIEU

DEUXIÈME PARTIE

 

LETTRES INÉDITES DE LOUIS XIII À RICHELIEU (1622-1642)

 

 

1636. — Le duc de Parme à Paris. — Invasion de la Picardie par les Espagnole. — Ils prennent Corbie. — Terreur des Parisiens. — Fermeté de Louis XIII et de Richelieu. — Reprise de Corbie. — Journal du siège rédigé par Louis XIII. — Les Impériaux envahissent la Bourgogne. — Ils sont repoussés. — Fuite de Monsieur et du comte de Soissons. — Louis XIII négocie avec son frère. — Monsieur se soumet. — Traité avec le comte de Soissons.

 

Mon cousin, jenvoye ce gentillome exprès pour savoir de vos nouvelles estant en peine de vostre santé, je vous envoye un mémoire cy joint dun avis que jay eu je me porte bien grace au bon Dieu lequel je prie vous doner la santé telle que je vous la souhaite et quil vous tienne en sa s'a garde. — LOUIS. — St Germain, premier janvier 1636. — (Ibid., fol. 162.) — (Original.)

 

Du 3e Janvier 1636, a 4 heures du soir.

Je juge très a propos denvoyier quérir ceux du Parlement pour samedy je remettroy laudiance des nonces a dimanche il faut que M. de Chavigny leur face dire parce que M. de Brulon[1] nest pas icy pour les avertir.

On a quelque espérance de St Simon et les médecins disent que le 14 comance assés bien[2].

M. de la Force est arrivé a qui jay creu devoir faire bone chère[3]. — LOUIS. — (Ibid., fol. 164.) — (Original.)

 

Le 20 décembre 1635, Louis XIII, dans un lit de justice, avait fait enregistrer au Parlement quarante-deux édits créant de nouveaux offices. C'était un moyen de se procurer l'argent dont on avait tant besoin, car les nouvelles charges trouvaient toujours des acquéreurs qui les payaient un haut prix. Mais les conseillers aux enquêtes, trouvant sans doute que les nouveaux officiers, augmentant le nombre des magistrats, allaient par cela même diminuer leur importance, se réunirent le 22 pour demander l'examen détaillé des édits. En réponse à cette demande, le roi défendit formellement toute assemblée des chambres. Mais les conseillers aux enquêtes, entêtés dans leur opposition, vinrent, malgré la défense royale, siéger à leur place et empêchèrent les plaidoiries ordinaires en réclamant l'assemblée des chambres et en accusant ceux de leurs collègues qui ne voulaient pas se joindre à eux de sacrifier les intérêts de la compagnie à leurs intérêts personnels. C'était pour les réprimander de cette conduite que Louis XIII faisait appeler auprès de lui une députation de membres du parlement. Il les reçut le 5 janvier avec hauteur, et leur parla avec colère. Le lendemain, cinq conseillers étaient relégués dans leurs terres. Dès ce moment toute opposition du parlement devint impossible, car Louis XIII mit le retour des exilés comme prix à la complaisance de leurs collègues. Ceux-ci venant le trouver, le 22 janvier, pour implorer sa clémence, il leur répondit durement : Je ne capitule point avec mes sujets et mes officiers, je suis le maitre et veux être obéi. Et les conseillers exilés ne reprirent possession de leurs siégea que lorsque toute résistance eut disparu[4].

 

Le 5 Janvier 1636.

Je voy par vostre mémoire que vous noubliés rien pour faire que mes afaires ailent bien[5].

Pour le reglement entre la grande chambre et les enquestes jay une pensée la desus que je vous diroy a la première veu.

On me vient de dire que le liège est mort il avoit la charge de major de la Rochelle et capna des tours laquelle je vous mais entre les mains pour en disposés a qui vous voudrés. — LOUIS.

(En marge, le roi a ajouté :) Si vous navés envoyé un gentilIiirne a M. le conte la haine quil porte au cardal de la Valette peut empescher de luy bailer des troupes promtement[6]. — (Ibid., fol. 165.) — (Original.)

 

De Versailles, ce 17 janvier 1636.

Je trouve bon de donner demain audiance a lambr de Holande pourveu quil vienne a 10 heures du matin[7].

Je vous diroi force choses qui se sont passées depuis que je vous ay escrit sur lafaire de la fille je seroy bien ayse de savoir ce quil y a contre le borgne pour ne perdre locasion. — LOUIS.

Si vous rencontrés demain Sanguin avant que vous mayés yeti et quil vous parle de la fille faites semblent de nen avoir ouy parlé. — (Ibid., fol. 166.) — (Original.)

 

Mon cousin, la Coudrelle porteur de cette lettre est celuy que jay nomé pour comander au fort de la Croix il a desiré que je vous escrivisse par luy pour estre mieux reseu de vous ne vous ayant jamais salué estant toujours a sa charge et peu a la court[8] je men retourne a Paris a cette heure pour travailer a notre balet[9] tout le reste va le mieux du monde vous mentendés bien[10] assurés vous toujours de mon affon qui sera toujours telle que vous la pouvés désirer. LOUIS. — A Versaille, ce 29 janvier 1636. (Ibid., fol. 167.) — (Original.)

 

(Fin de Janvier 1636)[11].

Mon cousin si la coudrelle na veu ma lettre je vous prie de ne luy faire voir pour des raisons que je vous diroy a la première vue. — LOUIS. — (Ibid., fol. 170.) — (Original.)

 

De Paris, ce 22 février 1636.

Je parleroy a M, de Bulion pour les garnsons de Picardie[12].

Je parleroy a Mr le Prince de lafaire de la B.[13] (la Bourgogne).

Mrs de Monbason et de Chaulnes vont point visité le duc de Parme et ne parlent point dy aler.

Je parleroy aux autres quand ceux la lauront veu[14].

Je ne peus plus demeurer a Paris sans estre malade ny ayant aucun repos[15]. — LOUIS. — (Ibid., fol. 168.) — (Original.)

 

De St Germain, ce 26 feuvrier 1636.

Jay veu sur le mémoire que M. de Brulon ma aporté quil aloit voir M. de Ventadour de ma part pour luy demander de voir le Duc de Parme jy avois envoyé avant que partir de Paris et mavoit fait reponce quil ne manqueroit dy aler je ne say si il la fait jay comandé audit de Brulon de faire ce qui est contenu dans vostre mémoire[16].

Je vous envoya dans ce paquet un mémoire du colonel Sinot irlandois auquel il est a propos de faire donner quelque argent pour la subsistance de son Regt autrement il se débendera[17].

Vic[18] qui etoit cornette de ma Compnie est mort jay jetté les yeux sur Roguemont pour estre en sa place en recompensant les enfans de telle sôme que je voudroy je n'ay voulu luy en parler ny a qui que ce soit sans savoir auparavant si vous aprouveriés ce choix vous men aviés déja parlé il y a quelque temps pour le recompenser qui est la cause qui my a fait penser, on dit icy que vous alés Samedy a paris voir dancer le balet a larsenac[19] je vous prie me mander ce qui en est[20].

Je me porte bien et suis tres ayse davoir seu que vous vous portiés mieux que ses jours passés. — LOUIS.

M. de Brulon ma dit quil estoit venu des nouvelles ditalie et que les espagnols estoient entrés dans le Parmesan. — (Ibid., fol. 169.) — (Original.)

 

De St Germain, ce 8e Mars 1636.

Je suis de vostre opinion que si le D. de Parme eut eu a venir Mn de Brulon et Boutilier vous en aurois ené avis voyant que cela nest point je mene aujourduy la Reyne a la volerie le temps estant parfaitement beau[21].

Je meclererois ier au soir de lautre afaire laquelle jay trouvée ciime je la pouvois desirer le tout estant contraire a ce que lautre mavoit dit[22], jay dormi cette nuit X heures et me porte très bien graces au bon Dieu. — LOUIS.

Je prie Dieu que la consultation des médecins vous[23].....

 

Du 14e Mars 1636.

Jay escrit une lettre bien seche a Mrs de Bulion et Boutilier sur le paiement des troupes de Holande je croy quils en prendront lalarme bien chaude[24].

La Coudrelle ne désire plus le gouvernement du fort de la Croix sexcusant sur son peu de moyen pour y subsister.

La bloquerie colel liégeois demande quelque contentement pour son paiement ou il a quelque raison on en poura parler quand on travailera pour le colonel étrangers, il est très bon hème et point difficile. — (Ibid., fol. 174.) — (Original.)

 

De St Germain, ce 29e Mars 1836.

Je vous escris un billet dans ce paquet pour la subsistance des recrues lequel vous pouvés envoyier a M. de Bulion pour luy faire voir ciime je prens cette dame a cœur.

Je suis en peine de vostre santé test pourquoy jenvoye ce gentillome pour men aporter des nouvelles.

Vous aurés seu par le cardal de la Valette ce que nous fimes ier pour les cartiers.

Jeuse esté ier a Ruel sans que le duc Bernard vous aloit voir. — LOUIS. — (Ibid., fol. 175.) — (Original.)

 

De St Germain, ce 23 Mars 1636.

Dès que je vis Mr des Noyiers[25] et Bellesence il me souvint sur le Champ de ce que vous maviés dit il y a 3 semaines jen av rendu graces au bon Dieu dès ce matin après la ciimunion je le feroy encore cette après dinée[26].

Jatandroy Mr des Noyiers pour savoir les troupes qui sont les plus prestes a marcher.

Les Suises qui sont a Bar et Toul sont prets a se débander faute de argent si il ny est pourvu promtement je crains que tous sen soit alé quand la montre arivera je me réjouis de quoi vous vous portés bien je suis aussi en parfaite santé. — LOUIS. — (Ibid., fol. 176.) — (Original.)

 

De St Germain, ce 30 Mars 1636.

Je vous envoye la lettre pour mon frère laquelle jay escrite de ma propre main vous le pouvés dire au Sr de chavigny[27], les gens du duc Bernard ont passé la meuse et sont venus dans le barois ou ils ont pris plus de 300 chevaux dans les vilage et 19 des plus riches laboureurs du pais lesquels ils ont mené à Aden Chasteau puis leur ont fait paier rason cbme enemis, ils sont ausi venus jusques aux portes de Bar pour prendre des bourgois pour leur faire le mesme traitement ceux de la ville sont sortis sur eux lesquels en ont pris quelques-uns prisonniers, si on soufre quils passent la meuse ils pilleront tout le Barrois et la Champagne jusques vers Chaalons[28].

Je me porte bien graces au bon Dieu — LOUIS. — (Ibid., fol. 178.) — (Original.)

 

De St Germain, ce 1er avril 1636.

L'ambeur de Holande mest venu voir ce matin pour me représenter la grande nesecité ou sont mes troupes qui sont par dela je luy ay promis dy faire pourvoir promtement cest pourquoy vous en parlerés a Mrs de Bulion et Boutilier cime il faut[29].

La recrue de Normandie part demain de mante laquelle est composée de 1290 homes fort bons si on ne pourvoit à leur subsistance en arrivant tout se débandera.

La bloguerie est toujours après moy pour son payement vous en parlerés à M. des Noyiers pour savoir ce que c'est il est home qui sert bien et méritte que on preigne soin de luy[30]. — LOUIS.

Jay fait ce mémoire came il est afin que vous le faciez voir à M. de Bulion si vous le jugés a propos. — LOUIS. — (Ibid., fol. 179 et 180.) — (Original.)

 

De Pontoise, ce 8e avril 1636.

Vous saurés par ce porteur lieutenant de mon cousin le Duc de St Simon came les 7 compnies de cavalerie de Holande que nous avions mandées sont repassées il lest nécessaire de leur faire donner un peu dargent et une garnison pour les remettre nestant a présant en estat de servir la plus part de leurs chevaux estant morts ou très mal menés[31]. — LOUIS. — (Ibid., fol. 181.) — (Original.)

 

De Chantilly, ce 14e Avril 1636, a 2 heure aprés midy.

Je trouve très bon que la ferté Senectere face le voyage Dangleterre[32] ainsi que Mr Boutilier me la mandé je ne luy ai rien dit de ce que son père a mandé.

L'ambr Dangleterre[33] ma fort pressé pour avoir réponse sur un mémoire quil a baillé a Mr de Chavigny ou pour le moins savoir en quel temps il la pourra avoir parce quil dit que Mr de Chavigny luy dit en partant que son père luy baileroit réponce dans 2 jours après quil vous lauroit faite voir ce qui na esté fait qui est la cause que il me presse pour savoir le temps qui la poura avoir ayant deja mandé au roy son maistre la réponce que luy avoit faite Mr de Chavigny je luy ay répondu que je escrirois a paris afin que on vit le temps que laditte reponce seroit preste pour me la faire voir et en suite luy dire le temps quil la pourroit avoir.

Il ma parlé pour la révision d'un procès qui a esté jugé au conseil touchant le vesseau que du Chellart a pris a la coste du Maroc.

Il ma parlé ensuite de 7 anglois vesseaux que M. de Mantes a arestés a Marseille pour les faire relascher et a finy son audiance par me prier que on donast des comisaires pour diverses afaires de marchans dont il est chargé.

Je luy ay dit sur ces 3 derniers points que je vous escrirois afin que on rendist justice a qui il apartient sur ces 3 derniers afaires.

Le Nonce ma veu[34] qui ma parlé de 4 lieux que lempr avoit choisis pour foire une assemblée pour la paix savoir Spire trente ausbourg et Constance je luy ay dit que nous en avions proposé quelques autres il ma dit sur cela cestoit liege ou cologne je luy ay dit ouy ensuite de quoy il ma prié que Sa Sainteté put savoir promtement le lieu que je désirois je luy ay dit que je y penserois un peu et en aviserois avec ceux de mon conseil puis je luy ferois savoir mon intention[35].

Je vous envoye dans ce paquet une lettre que jay reseu de mon frère jay remis le porteur a luy faire réponce dans deux jours laquelle vous me envoyerois avant ce temps la[36].

Jav pris deux loups ce matin avec grand plesir[37] et me portes fort lien graces au bon Dieu. — LOUIS. — (Ibid., fol. 182.) (Original.)

 

Mon cousin, M. de Coalin mayant dit quil vous aloit trouver je lay chargé de ce mot pour vous aseurer toujours de la continuation de mon affection et de limpatiance que jay de vous voir quand mes afaires vous le pouront permettre. Je Bône demain audiance a Mrs du clergé[38] jay comandé a M. Darcourt de partir diligemment ce quil ma promis de faire[39] le Secrétaire de Parme[40] ma veu ce matin pour presser le secours de son maistre je luy ay dit que nous avions fait toutes les choses posibles pour le haster, ma santé va très bien je prie le bon Dieu de tout mon 'mur que la vostre soit telle que je la désire et quil vous tienne toujours en sa Ste garde. — LOUIS. — A Chantilly ce 19 avril 1636. — (Ibid., fol. 183.) — (Original.)

 

Mon cousin, on ma dit que le duc Bernard doit venir demain icy cy jay quelque chose à luy dire pour son afaire je vous prie de me le faire savoir auparavant quil arive icy[41] jay fait réponce a ce que ma aporté M. de Bordeaux par luy mesme[42] aseurés vous toujours de mon affection. — LOUIS. — A Chantilly, ce 20 avril a midy 1636. — (Ibid., fol. 184.) — (Original.)

 

De Chantilly, ce 20 avril 1836.

Jay ouy Mrs du clergé auxquels jay respondu de mot à mot suivant vostre mémoire[43] M. de Bordeaux vous dira ce qui cy est passé.

Je suis très ayse que lafaire du duc Bernard soit sur le point destre achevée jay parlé au Prest du Bernet come vous me laviez mandé[44].

Il y a huit jours que M. de Souvray ma dit que vous vouliés quil aloit voir !armée navalle je luy dis que je le voulois bien et en suis très ayse[45] je suis très ayse de la confirmation que cette persone donne de quelque bon succès je essoyeroy a me randre digne des gràces quil plait au bon Dieu de me faire tous les jours.

Jay brûlé vostre mémoire. — LOUIS. — (Ibid., fol. 185.) (Original.)

 

De Chantilly, ce 22 avril 1638.

Jay parlé au duc Bernard des désordres que font ces troupes et de ce quils ont enlevé une des compnies de Canillac, il ma tesmoigné en estre extresmement fasché et ma dit quil avoit desja escrit pour faire tout rendre et que la faute venoit que celuy quil avoit laisé pour comander ses troupes nestoit pas assés absolu et que dès quil seroit retourné quil empescheroit bien ces désordres.

Il ma parlé du dessin quil avoit de se raprocher du conté je luy ay dit les raisons portées dans vostre mémoire qui sont le besoin que jay de faire passer des troupes et des munitions de guerre par la Suise pour les envoyier aux grisons avant que faire aucune rupture avec la conté ce quil a fort aprouvé je luy ay parlé en suitte du desain de reprendre la place de la moselle et faire un efort de costé ce quil ma tesmoigné aprouver mais je voy bien par son discours que il voudroit bien vers Oulme ou Constance[46] il ne ma point parlé de son traité ny moy a luy je luy ay fait part des nouvelles de Liége et de ce que ses troupes qui étoient avec M. de Turene avoient fait de quoy il a tesmoigné grande joye[47].

Je luy ay fait la meileure chère que je puis on ma fait cognoistre quil desiroit extresmement me baller la serviette a mon disner ce qui a esté fait de quoy il a tesmoigné grand contentement a plusieurs a qui il a parlé depuis, pour changer de discours M. de Souvray est venu a moy me dire quil croyoit que je nentendois pas quil fit ce voyage a ses dépens et que pour cet effect il faloit que jescrivisse a M. de Burton de luy doner de largent contant pour faire son voyage je luy ay dit que je le feroy 2 heures après jay reseu vostre lettre qui sera cause que je le remettray jusques a vostre venue je croy que ce voyage nest que pour avoir de largent et des lettres destat ciiple vous avés très bien dit ce que je savois bien et que je navois osé vous escrire je ne say si je vous ay desja escrit ou non de vostre bone œuvre qui est de faire comandement par le chevalier du guet a labesse de St. Pierre de Mets qui est a paris de ce retirer en son abaye on dit quelle vit dans paris avec grand scandalle.

Jacorde a M. de Bulion le prioré quil me demende pourveu que vous jugiés que la persone pour qui il le demende en soit capable

Le duc Bernard ne sen ira que jeudy dicy[48] je me resjouis extresmement de vostre aproche a reaumont[49] je ne manqueroy de vous aler voir samedy nous parlerons de la faire de brehart a la première vue. — LOUIS. — (Ibid., fol. 486.) — (Original.)

 

De Versaille, ce 24 avril 1636.

Je me resjouis extresmement de quoy vostre fiebvre ne revint point ier si je neusse seu le mémoire de ce cette nuit jeuse fait fort froit a M. le prince mais a cette heure je luy feroy très bUne et lechaideroy came il faut a lafaire des illes.

Jay doné tout lordre pour le deuil de lampreur.

Madame de Rohan nest point venue si elle vient je luy feroy bone chère il faut songer a faire de bons choix pour les creches vaquants.

Vervins doit venir aujourduy je luy parleroy come il faut.

Je recognus ier par le discours du duc de Veimmar que il ne fait pas estat de partir si tost je croy quil est nessesaire de le presser.

On me vient de dire que Vervins est arivé je parleroy a luy dès que je le verroy. — LOUIS. — (Ibid., fol. 187.) — (Original)

 

Mon cousin, jentendis ier au soir fart au long le Sr Prioleo[50] qui ma fait entendre les nécessités de cette armée qui sont le pain et les recrues pour le pain je vous prie den parler de ma part a M. de Bulion cela estant du tout nessesaire et quil est besoin que ledit Prioleo emporte des lettres de change pour cet effet[51], pour les recrues il faut faire escrire a ceux qui les font de les haster, M. le duc de Veimmar est party dicy très satisfait de moy et ma tesmoigné quil maloit servir de bon cœur et quil feroit merveilles, Montozier[52] sachant qu'il y avoit une de ses compagnies vacante dans son regt vint icy a la haste me la demander je luy ay acordé ne sachant pas que M. de Rohant la demandoit pour un lieutenant qui a toujours très bien servy, cest pourquoy vous dirés a M. des Noyiers quil ne lexpédie point a celuy pour qui Montozier l'avoit demandée et quil lexpedie a celuy pour qui M. de Rohan la demande nomé clavaut je finiroy celle cy en vous aseurant toujours de mon afection. — LOUIS. — A Chantilly, ce 26 avril 1636. — (Ibid., fol. 188.) (Original.)

 

Je trouve très bon que M. de Souvray ne face point ce voyage je croy que ayant des lettres destat il a tout ce quil luy faisoit dezirer cette comicion.

Le marquis de Villeroy[53] servira très bien en larmée de M. le Prince et je le trouve très apropos.

Je me resjouis de la venue de Mr de Chavigny[54] pour apprendre par luy en quelle disposition est mon frère.

Jiroy demain vous voir sur les 2 heures après midy[55]

Je me porte bien grâces au bon Dieu. — LOUIS. — De Chantilly, ce 28 avril 1636. — (Ibid., fol, 189.) — (Original.)

 

De Versaille, ce 29 avril 1636.

Je ne manqueroy de me randre samedy a Ruel a 2 heures après midy pour vous voir.

Je parleroy a M. de la force.

Je diroy à la reyne quelle done le tabouret a la fille de madame de la trimouille.

Je neparleroy a persone de lafaire du cardinal de la Valette ce pour les raisons que vous me mandés.

Si vous nestiés proche de mesrs des finances tout demeureroit en errière.

Le père Monot[56] me doit venir demain dire adieu a X heures du matin si vous savés que il me veille parler de quelque chose dafaire je vous prie de me faire savoir ce que jay a lui repondre. — LOUIS. — (Ibid., fol. 190.) — (Original.)

 

Mon cousin, le frère du gouverneur de guize vient dariver lequel ma aporté un oizeau pour héron du cardal infant qui a esté pris proche de guize il ma dit que toutes les troupes tant cavalerie que infanterie qui estoit sur cette frontière tirent vers le Luxembourg et quil ne reste dans les places que les garnisons ordinaires, le gouverneur de bohain aient a la guerre avec 80 chevaux et 160 homes de pied ont esté chargés par 300 chevaux des enemis lesquels ont tué toute linfanterie pris le gouverneur de bohain prisonnier la cavalerie cest sauvée de vitesse je prie Dieu que ce soit la une partie de ce qui doit ariver a nos troupes M. des noyers vous parlera de quelque chose que demande ledit frère du gouverneur de Guize pour la subsistance de la cavalerie qui est la en garnizon sur quoy vous ordonnerés ce que vous jugerés à propos jay escrit dès le jour de la cention a M. le chancelier la lettre que vous savés[57] tous les vieux regts ont tous qui 300 qui 400 homes plus quil ne leur faut cest grand domage de lesser perdre tout cela si on ne leur veut lesser il les faudroit faire doner aux autres regts qui ne sont pas complets assurés vous toujours de mon afection qui durera éternellement. — LOUIS. — A Chantilly, ce 5 may 1636. — (Ibid., fol. 191.) — (Original.)

 

De Chantilly, ce 1er mai 1636.

Jay remis le touchement des malades a la my aoust soubs prétexte de la peste qui esta Paris et en plusieurs vilages[58] jay doné ordre pour laumosne extraordinaire laquelle javance sur mes menus plaisirs mais il faudra que M. de Bulion me renbource.

Je trouve très bon la proposition pour M. de Bouilon tant pour la lieutenance généralle soubs M. le conte que pour lordre du St Esprit pourveu que je puise faire le dernier sans contrevenir a mes veux et le tout à. condition qui se déclarera catolique auparavant[59] je trouve bon ausi que on face revenir le baller, pour Vobecourt il est bon de le lesser à chaalons y pouvant servir utilement.

Le bruit court icy que 800 croates se sont venus rendre et quils sont proches de troie plusieurs men ont parlé je nay pas fait semblent de savoir quil y eut nul traité avec eux je vous prie me mender si cette nouvelle est vraye ce que jay peine a croire a cause de ce que Mayolas a mandé.

Je fais estat de partir lundy dicy pour aler a Versaille ou je seroy 5 ou 6 jours et après aler a fontenebleau[60] si vous jugés que mes afaires me le puisent permettre ma santé va fort bien graces au bon Dieu.

Jacorde a Espenan la charge quil me demande[61]. — LOUIS. (Ibid., fol. 492.) — (Original.)

 

Mon cousin, je vous envoye le vieux bellevue lequel javois envoyé a la frontière de Picardie pour traiter avec le gouverneur d'une place quil vous dira je voy lafaire en assez bon estat quand vous laurés entendu vous luy dirés ce quil aura a faire la dessus celle-ci nestant a autre fin je prieroy le bon Dieu de tout mon cœur quil vous tienne toujours en sa Ste garde. — LOUIS. — A Chantilly, ce 10 may 1636.

Je vous envoye dans ce paquet la reponce que M. de Bulion ma faite. — (Ibid., fol. 193.) — (Original.)

 

De Fontenebleau, ce 21 mai 1636.

Je suis bien fasché de la mauvnise humeur du duc Bernard jay peur que ce soit des gens mal affectionés qui sont a paris qui ly mettent test pourquoy le plus tost que on pourra le faire partir sera le meilleur[62].

Pour lafaire de Hagnau il ne se peut faire autre chose que dy envoyer le cardal de la Valette[63].

Je croy que la cavalerie qui est passée au conté est pour empescher les courses que les Suède y ont deja faites — come ma dit le marquis de la force — et non pour faire grande opposition à nostre armée le nombre de 1200 chevaux nestant asés bastant pour cela cela fait voir quils nont pas grandes troupes vers brisac puis qui se servent de celles de Luxembourg pour secourir le conté[64].

Je suis en peine de lafaire de Coblens et ny voy pas guère de moyen dy remedier[65] il faut savoir au vrai si le duc Charles est à St Avol[66] je suis bien marry que lafaire de Brehart nest reusy.

Je trouve très bon de faire le vœu a la fason que vous me le mandés dans vostre mémoire du 19 may 1636[67].

Je ne mengageroy point pour leveche de grasse que je nay vostre avis[68].

Je me porte très bien griices au bon Dieu auquel il faut bien recomander toutes nos afaires puis il en disposera selon sa ste volonté.

Je vous prie me mander quelles nouvelles il y a du costé de Rocroy. — LOUIS. — (Ibid., fol. 194 et 195.) — (Original.) — (Ibid., 1636, janvier à mai, fol. 414.) — (Copie.)

 

De Fontenebleau, ce 30 may 1636.

Je vous envoye dans ce paquet une lettre de bellevue avec un petit billet qui est dedans que jay resue par son fils qui vous rendra ce paquet, vous verrés lestat ou est lafaire cest pourquoy je ne vous en parleroy pas davantage.

Jay comancé la nostre dame que M. de Chavigny ma demandé de vostre part laquelle sera achevée demain sil plait a Dieu[69].

Ma santé va toujours bien. — LOUIS.

Mon frère sera mercredy icy[70]. — (Ibid., t. V, fol. 196.) (Original.)

 

De fontenebleau, ce 4 juin 1636.

Jay veu le mémoire qui vient de la conté par ou je voy que tout comance bien jespère que le bon Dieu nous en donnera bone isue come ausi en toutes nos autres armées[71].

Je suis très ayse que nostre armée de holande repasse il me semble quil est a propos de comander aux capnes de cavalerie qui en sont de aler présentement tenir leurs recrues prestes pour renforcer leurs compnies quand elles ariveront afin que elles soient bien tost en estat de servir autrement elles seront 2 mois dans les garnisons a manger le peuple sans rien faire[72].

Pour le père Rigaut je trouve bon cette proposition mais je nantendroy point de sermon que a la my aoust et a la tousains et en avant cest pourquoy si il faloit que jentendisse le serment tous les dimanches et festes entre cy et la cela menbaraseroit fort[73].

Je me porte bien graces au bon Dieu.

Jatans mon frère ce soir. — LOUIS. — (Ibid., fol. 197) — (Original.) — (Ibid., 1636, juin à septembre, fol. 9.) — (Copie.)

 

De St Germain, ce 8 juin 1636.

Jay veu la lettre que vous escrivés à M. de Brezé laquelle est très bien[74].

Je parleroy a bellefons cime il faut je vis ier derlac[75] a qui je fis tres bone chère et luy temoigne grande satisfaction du Duc de Veimmar.

Je parleroy a lenvoyé de hesse dôme vous me mandés[76].

Je ne partiroy que lundy pour fontenebleau et lavois dit dès ce matin a Mr de noyiers pour vous le dire. — LOUIS. — (Ibid., t. V, fol. 198.) — (Original.)

 

Mon cousin, je vous envoye dans ce paquet un mémoire de quelques pansées que jay eues depuis les bonnes nouvelles que vous maves envoyées vous en prendrés ce quil y aura de bon et rejetterés ce que vous ne trouverée a propos celle cy nestant a autre fin je prieroy le bon Dieu de tout mon cœur quil vous conserve et garde ausi long temps que je le désire[77]. — LOUIS. — A Tigery, ce 16 juin[78] 1636. — (Ibid., fol. 199.) — (Original.)

 

Mon cousin, je vous envoye un lieutenant de navaille lequel est très bien instruit de tout ce qui se passe a Dolle Breauté nest point blessé mais il y a force autres capnes de Picardie et des meileurs, celle cy nestant a autre fin que je prieroy le bon Dieu de tout mon cœur quil vous tienne en sa Ste garde. — LOUIS. — A Tigery, ce 17 (juin) a 2 heures après midy 1636. — (Ibid., fol. 201.) — (Original.)

 

Du 24 juin 1636.

La mort du mareschal de Toiras nenpirera pas nos afaires en Italie selon ma pensée au contraire je croy que M. de Savoie nayant plus un tel esprit avec luy sera plus aysé a gouverner[79].

Sr Simon ma demandé pour M. Desche[80] les chiens pour renart et pour lièvre qui est la mesme chose que avoit le mareschal de toiras[81] je creu que je les luy devois acorder et que vous ne le trouveriés pas mauvois. M. de Souvié les demandoit ausi mais je lavois promis des ier a Sr Simon et puis quelquefois on ne sacomode pas toujours bien avec M. de Souvié.

Le mareschal de Brézé ira ce soir coucher a paris et demain au matin se rendra a Conflans il vous parlera de ma part de quelques afaires dont je lay chargé ayant entière confiance en luy.

Vostre mémoire ma tiré un peu de peine du costé du cardai de la Valette non seulement pour mes afaires mais ausi pour sa personne que jaime extremement.

Jay veu M. le nonce qui ma parlé de forces afaires de quoy vous rendra conte le maréchal de Brézé. — LOUIS. — (Ibid., fol. 214 et 215.) — (Original.)

 

De fontenebleau, ce 27 juin 1636.

On ma dit ce matin a mon reveilque le train du mare de Brezé estoit alé a Paris ce qui ma confirmé dans une pensée que jeus lorsque vous me mandates que je lenvoyace a Paris pour les recrues des troupes de Holande qui est que vous trouvates cette occasion pour loster dicy de peur qu'il ne fit quelque chose qui me fut désagréable sur lafaire de quoy je vous ay escrite il vous souviendra que mon mémoire portoit que je nen estois nullement fasché contre luy je vous puis asurer encore que je ne lay esté en fason du monde et vous prie que si il ny a que ce sujet la qui vous empesche de le laisser revenir icy — et quil ne soit utille a Paris pour mes afaires ou les vostres — de me le renvoyer estant très ayse de la voir auprès de moy my fiant extresmement.

On dit que dans le conté il y a grande quantité de bleds il me semble quil seroit bien descrire a M. le Prince de men faire serrer le plus quil poura et en faire des magasins tant pour nos troupes que pour loster aux enemis qui sen pouront servir.

Je me suis un peu trouvé mal ier au soir jeus un peu demotion avec froit a cette heure je me porte assés bien et men va a la chasse pour me divertir[82].

Je vous prie de faire en sorte que on puisse atraper ce mousquetaire de quoy je vous escrivois ier, il se promene par paris efrontement je vous avoue que cette afaires me tient au cœur[83]. — LOUIS. — (Ibid., fol. 216.) — (Original.)

 

De Fontenebleau, ce 8 juilet 1636.

Vous recevrés ce billet par le baron de busy lequel jay fort entretenu et pour un prisonnier il est ausi bien instruit des araires de Flandres que si il avoit esté parmy eux en liberté.

Je trouve très bon que on envoye dans les places de Picardie tous ceux qui sont només dans vostre mémoire.

Japrouve ausi que M. Daluin[84] leve un Regt soubs le titre de Languedoc.

Il ny a point de chevaux de poste sur le chemin de Dolle il faut parler a M. de Nouveau[85] pour y en faire mettre.

Il faudrait haster le Regt suise de Derlac qui vient de Bar pour le mettre dans les places qui ont besoin de plus forte garnison quils nont. — LOUIS. — (Ibid., fol. 218.) — (Original.)

 

De Fontenebleau, ce 11 juilet a 7 heures du soir 1626.

Japrouve ce que vous me mandés tant pour le comte Dalès[86] que pour les autres ce quil faut executer promptement[87].

On ne sauroit faire meileur choix que de Moison pour comander dans Verdun[88].

Je trouve très bon que lon done le drapeau blanc aux Regts de 20 compnies et ce que je vous ay mandé na jamais esté a intention de ne leur pas doner[89].

Je me randroy demain a Juvisy[90] a 6 heures du soir. — LOUIS. — (Ibid., fol. 219.) — (Original.)

 

S'il est dans la vie d'une nation une période qui peut lui être fatale, c'est celle où un système vieilli et usé va faire place à un système nouveau. Si, à ce moment, la nation n'est pas dirigée par des hommes de génie, ou si elle ne s'abandonne point à la nouvelle direction qui cherche à s'imposer à elle, la lutte qui s'organise dans son sein entre les anciens intérêts et les intérêts nouveaux peut s'éterniser et amener la décadence. Qu'à cette cause d'abaissement vienne se joindre la guerre étrangère, celle-ci risque d'être désastreuse pour la nation en voie de réorganisation, et les deux causes réunies peuvent produire rapidement sa ruine complète. Dans ces circonstances, ce n'est plus un effort normal, mais un effort désespéré, qu'il lui faut tenter pour vaincre. Si elle réussit, toute résistance intérieure disparaît, le système nouveau est établi sur de fortes bases, et il se consolide assez pour être bientôt reconnu à l'extérieur autant qu'il est accepté au dedans.

Le milieu du dix-septième siècle a été pour la France une de ces phases périlleuses d'où un peuple ne sort que tout à fait fort ou définitivement affaibli. Cette période de transformation, pendant laquelle la royauté termina au grand jour l'œuvre qu'elle poursuivait sourdement depuis si longtemps, en achevant de détruire la féodalité, pour établir unique et forte sa propre puissance, commença avec le second ministère de Richelieu, se termina à la mort de Mazarin et eut pour moment critique l'année 1636. Cette évolution se serait accomplie plus rapidement si la guerre étrangère avait pu être évitée par la France. Mais cela n'était pas possible. En même temps qu'elle combattait son ennemi intérieur, la royauté fut obligée de lutter contre l'ennemi extérieur, dont l'extrême puissance menaçait l'existence même de notre nationalité. Cette nécessité faillit tout perdre. La lutte intérieure, en désorganisant la société française pour lui donner une autre forme, absorba ou fit dévier la plus grande partie des forces nécessaires contre l'étranger, de telle sorte que, dès que celui-ci, après avoir vaincu ou éloigné les alliés de la France, la trouva isolée, il put envahir son territoire sans rencontrer de résistance sérieuse.

La féodalité, en succombant sous les attaques réitérées de Louis XIII et de Richelieu, leur rendit coup pour coup. Elle désunit la famille royale, en prêtant son concours aux sottes jalousies ou aux ambitions mesquines de la mère et du frère du roi. Les plus grands seigneurs ne craignirent pas de s'allier aux ennemis de la France et de les appeler sur le sol français. Aucun d'entre eux ne crut trahir ses devoirs en livrant sans les défendre les villes qui leur avaient été confiées ou en refusant de se battre lorsqu'on le leur demandait. Ils ne pensaient pas dépendre de la royauté, se considéraient comme libres et ne voyaient dans le roi que le plus puissant d'entre eux. Aussi ne se crurent-ils jamais coupables lorsqu'ils se révoltèrent pour défendre leurs privilèges, qu'ils regardaient comme des droits. A cette époque, le respect de l'omnipotence royale était loin d'être entré dans les mœurs, car tous ceux que Richelieu, accomplissant l'œuvre implacable de l'édification du système nouveau, eut à réduire, protestèrent toujours de leur dévouement personnel et dé leur fidélité envers le roi, tout en le combattant par des moyens qui les déshonoraient. Tous prétendirent n'attaquer que le ministre et ne poursuivre, dans leur rébellion, que sa chute ; de telle sorte que, pendant tout son règne, Louis XIII, qui ne voulait à aucun prix se séparer du cardinal, ne put compter d'une façon absolue que sur les alliés ou les créatures de Richelieu. Cette nécessité fatale, dans laquelle se trouva toujours le fils d'Henri IV, explique et justifie la conduite du grand ministre, contraint de donner, pendant la durée de son ministère, toutes les missions importantes à ceux qu'il savait lui être personnellement dévoués, et de tenir toujours à l'écart ceux de ses adversaires auxquels leur naissance semblait avoir donné des droits. D'ailleurs, nous ne saurions trop le dire, jamais Richelieu n'accorda le moindre emploi sans prendre, au préalable, l'avis du roi, qui toujours approuva les choix de son ministre.

Mais cette obligation, funeste en ce qu'elle éloignait des champs de bataille beaucoup d'éléments qui y eussent été utiles, ne fit perdre à la France au-bon général. Cette période ne produisit pas, chez nous, d'homme ayant le génie militaire. Ni l'un ni l'autre des deux partis qui se disputaient le gouvernement de notre pays ne possédait de grand capitaine. Il est à remarquer, cependant, que les généraux dont Richelieu se servit avaient tous beaucoup plus de talents que ceux qu'il laissa de côté parce qu'ils lui étaient hostiles ou, tout au moins, n'avaient pour lui aucun attachement. Le prince de Condé, le cardinal de la Valette, le comte d'Harcourt, le maréchal de Brezé, le duc Bernard de Weimar, sans être des capitaines hors ligne, étaient tous beaucoup plus capables de commander une armée que Gaston d'Orléans, que le comte de Soissons, le duc d'Angoulême, le maréchal de Châtillon, Bassompierre et tant d'autres, dont la naissance faisait la valeur.

Le voyage de Louis XIII en Lorraine, à la fin de 1635, avait été utile à sa cause, car à peine un mois après qu'il eut quitté cette province, les dernières troupes impériales, reconnaissant l'impossibilité de s'y maintenir plus longtemps, l'évacuaient complètement. La campagne de 1636 commençait donc, de ce côté, dans les meilleures conditions. Il en était de même, du reste, sur presque tous les points de la frontière française. Le maréchal de la Force s'était, pendant l'hiver, cantonné en Lorraine, protégé par le cardinal de la Valette et le duc de Weimar, qui opéraient en Alsace. Le duc de Rohan, à qui, pour l'occuper et ne pas avoir à le craindre, tout en en tirant quelques services, on avait confié la défense d'un pays protestant contre les Espagnols, se maintenait toujours victorieusement dans la Valteline et chez les Grisons. Le comte d'Harcourt venait de partir pour prendre le commandement de la flotte de la Méditerranée, destinée à chasser les Espagnols des îles de Lérins, dont ils s'étaient emparés l'année précédente. En Franche-Comté, le prince de Condé s'était arrêté pour assiéger la ville de Dôle, dans laquelle toutes les autorités de la province s'étaient retirées, et qui lui résistait avec ténacité. En Italie, le maréchal de Créquy et le duc de Savoie agissaient mollement et sans grand succès, mais ils y retenaient une armée espagnole. Du côté de la Picardie seulement, la frontière française était découverte. Il n'y avait dans cette province aucune armée. On avait pensé que les Espagnols, appelés de tous côtés, ne pourraient réunir assez de forces pour agir encore dans le nord, et que, d'ailleurs, le prince de Condé s'emparerait, sans doute, rapidement de la Franche-Comté, ce qui permettrait de transporter son armée sur la frontière de Picardie . Néanmoins, Louis XIII et son ministre se préoccupaient vivement de réorganiser le corps qui, en 1635, avait fait la campagne de Flandre sous les ordres du maréchal de Brézé, et dont les derniers soldats étaient revenus, depuis peu, de Hollande avec leur chef. C'est ce qui résulte de plusieurs lettres du roi et de Richelieu, adressées soit aux surintendants des finances, soit au secrétaire d'État à la guerre, de Noyers, soit au maréchal de Brézé, soit, celles du roi, à Richelieu lui-même. Mais l'incurie d'une administration à peine née et surtout la mauvaise volonté systématique de tous les adversaires de Richelieu retardaient Malheureusement la formation de cette armée.

Les Espagnols profitèrent de cette situation. Vers la fin de juin, le cardinal-infant appela auprès du prince Thomas de Savoie, qui commandait l'armée espagnole en Flandre, deux généraux allemands, Piccolomini et Jean de Wert, qui assiégeaient Liège à ce moment, et les trois corps d'armée envahirent la France. Leur marche et leurs premiers succès furent rapides. Entrés en France dans les premiers jours de juillet, ils s'étaient déjà, à la fin du même mois, emparés de toutes les villes fortifiées situées au-delà de la Somme, avaient traversé cette rivière, étaient entrés dans Roye et mettaient le siège devant Corbie, à trente-trois lieues de Paris. Après huit jours d'une faible résistance, cette ville suivit l'exemple de ses voisines et ouvrit ses portes, le 15 août, aux ennemis de la France. Mais cette semaine avait suffi à Louis XIII et au cardinal pour organiser la résistance. La France allait être sauvée, encore une fois, par l'énergie de ses chefs et le patriotisme de ses habitants.

Dès les premiers jours de l'invasion, Richelieu prit les mesures que réclamait la situation. Le 5 juillet, il ordonne au duc de Montbason de réunir la noblesse de l'Ile-de-France pour en former le noyau d'une nouvelle armée[91] ; le même jour, il fait partir le maréchal de Brézé pour la Picardie, avec mission d'organiser la défense de Corbie[92]. En même temps, Louis XIII ordonne de faire par toute la France des processions et des prières pour obtenir la protection du ciel en faveur de nos armes[93] ; Richelieu, de son côté, faisait un vœu à la Vierge, afin d'atteindre le même but[94]. Ni l'un ni l'autre ne perdent un instant, et nous croyons que les historiens se sont trompés en affirmant quo, dans le premier moment, Richelieu, ne jugeant pas la résistance possible, proposa d'abandonner Paris pour se retirer derrière la Loire, et que Louis XIII seul, par son insistance, le fit résoudre à rester dans la capitale et à y organiser la défense du territoire. Si le cardinal avait émis l'avis qu'on lui a prêté, il n'aurait pas, selon nous, épousé les projets de son maître avec la vigueur qu'il apporta dans leur exécution ; son caractère, son tempérament s'opposaient à ce qu'il mit en pratique des idées qu'il n'approuvait pas. A ce moment, comme toujours, ces deux personnages eurent une pensée unique, un but commun : sauver la France, et ils ne divergèrent pas sur les moyens. Ni l'un ni l'autre ne désespéra. Comment ne serait-on pas convaincu d'ailleurs que Richelieu fut d'un avis semblable à celui de Louis XIII, quand on le voit, le 27 juillet, recommander au comte de Soissons, seul général en face de l'ennemi en ce moment, beaucoup de prudence en même temps que beaucoup d'énergie et de célérité dans ses opérations ? En ces occasions, lui dit-il, les moments valent des années ; je vous supplie de vous en souvenir[95]. Quant à lui, son génie suffit à tout, et lui fait trouver de nouveaux soldats et de nouvelles ressources dans un pays épuisé par neuf années consécutives de guerres étrangères et de guerres civiles. Il se sert des sentiments de patriotisme qu'éveille dans le cœur des Parisiens le danger imminent que court leur ville, et en obtient de grands sacrifices. Un corps de vingt mille hommes, dont les habitants de Paris font tous les frais, s'organise dans la capitale. Ceux qui ne s'enrôlent pas contribuent aux dépenses nécessaires ou vont travailler aux fortifications de la ville. Les plus âgés prennent pour eux la garde des portes et la police intérieure. Tous enfin font leur devoir avec enthousiasme ; si quelques récalcitrants élèvent la voix, ils sont bientôt réduits à se taire par le ferme langage et l'attitude énergique de Louis XIII. En effet, des membres du Parlement s'étant faits les interprètes de plaintes inévitables dans une pareille crise, le roi les mande devant lui, le 11 août, pour leur reprocher leur conduite antipatriotique. Messieurs, leur dit-il, je n'eusse jamais cru avoir besoin de vous envoyer quérir pour le sujet qui vous amène ici. Ce n'est point à vous à vous mesler des affaires de mon Estat, et vous n'avés peu penser à ce qui s'est faict ce matin en l'estat présent sans une très-mauvaise volonté. Je ne parle pas de tout le corps, mais seulement de quelques-uns pleins de malice et d'envie. Je ne souffrirai eu aucune façon leur entreprise, comme vous pouvés croire[96]. Et comme on avait accusé Richelieu d'avoir agi en dehors de lui, le roi déclare hautement que tout ce qui a été fait, l'a été par son ordre[97].

Mais les troupes levées en hâte à Paris n'étaient pas assez solides pour résister seules aux bandes espagnoles. Le 8 août, Louis XIII se décide, à contre-cœur, à abandonner la conquête de la Franche-Comté ; il donne l'ordre au prince de Condé de lever le siège de Dôle et d'envoyer ses meilleurs soldats vers la Picardie[98]. Le même jour, il ordonnait au comte de Soissons de faire repasser l'Oise au corps qu'il commandait, et de s'établir fortement en deçà de cette rivière, pour couvrir Paris en attendant l'arrivée des troupes du prince de Condé[99]. Dans le même temps, son ministre négociait, mais inutilement, avec les capitaines espagnols qu'il supposait pouvoir gagner[100].

Malgré tous les efforts du roi et de Richelieu, le 15 août, jour où les Espagnols entraient dans Corbie, l'armée française de Picardie se composait à peine de 7.000 hommes[101], et le cardinal reconnaissait que l'on ne serait prêt définitivement que trois semaines plus tard[102]. Mais, dans le même moment, Condé abandonnait le siège de Dôle et envoyait dans le Nord douze régiments d'infanterie ; de plus. le duc d'Orléans arrivait à Paris, le 19, avec l'arrière-ban de son apanage, ce qui permettait à Richelieu d'annoncer au cardinal de la Valette, le 23 août, la réunion en Picardie, pour le 6 septembre, d'une armée de 10.000 chevaux et de 25.000 hommes de pied[103].

Louis XIII partit de Paris le 1er septembre, pour aller prendre le commandement de ces troupes. Le 13 du même mois, l'armée française repassa l'Oise et s'avança de nouveau vers la Picardie. Les Espagnols qui, depuis la prise de Corbie, n'avaient rien entrepris d'important et s'étaient contentés de piller le pays qu'ils occupaient, se retirèrent à son approche et lui laissèrent reprendre Roye, qui résista seulement quelques jours. Ils ne s'opposèrent même pas au passage de la Somme. Richelieu et son maître, arrivés le 2 octobre à Amiens, s'empressèrent de profiter du mouvement de retraite de l'ennemi pour mettre le siège devant Corbie, qui capitula le 14 novembre, après un mois d'investissement et une défense assez molle.

Après la reprise de Corbie, la France était sauvée, et la prépondérance de la royauté partout reconnue au sortir de cette crise terrible. En effet, la royauté seule sauva la France, en 1636, d'un démembrement imminent. Dès ce-moment, la nation entière ose rangea de son côté contre la féodalité, qui, par ses divisions et son égoïsme, avait permis qu'une invasion fût possible. Aussi, le résultat définitif de la lutte intérieure pouvait-il être prévu avec certitude après de tels événements. La Fronde, qui vint douze ans plus tard, ne fut que le dernier râle de la féodalité expirante ; cette révolte ne pouvait se terminer autrement qu'elle ne le fit, car depuis 1636 la féodalité n'était plus une puissance, elle était devenue un parti. Elle n'avait plus de force depuis qu'elle avait laissé la royauté appeler directement le peuple à la défense du territoire envahi. Après la terrible année de Corbie, la féodalité conservait des partisans, mais elle n'avait plus la nation avec elle.

 

A Chantilly, ce 4 septembre 1636.

Mon cousin, jenvoye ce gentillôme exprés pour savoir de vos nouvelles nen ayant point eu dojourduy ce qui me fait craindre que vous ne vous soyiés trouvé plus mal que de coutume, je vous prie me mander si vous viendrés demain loger a la Victoire ou a Sanlis si il ny a rien qui presse je serois bien aise de demeurer encor demain icy je vous prie me le mander par ce porteur, je suis plus révolté que jamais contre le Regt de Comarin je croy que a la fin il faudra séparer les compnies dans les autres Regts si on sen veut bien servir il nest venu nulles nouvelles des ennemis depuis ce que je vous mandoy ier[104], asurés vous de mon affection qui sera toujours telle envers vous que vous, la pouvés désirer et prieroy le bon Dieu de tout mon cœur qu'il vous redonne la santé telle que je la désire. — LOUIS. — (Ibid., fol. 224.) — (Original.)

 

De Chantilly, ce 4 septembre 1636.

Je donneroy ordre de faire arester les capnes qui ont quitté Doulans.

Je suis en peine de votre mal je vous prie que jen sache souvent des nouvelles.

Jay peur que du Bois[105] soit enlevé ou tué jaimerois mieux le faire loger au bois de Vincennes[106] en lui dônant la liberté de chasser dans le parc.

Jatans a toutes heures un valet de pied que jay envoyé a Conpiègne pour savoir lestat du mal et les ordres que on y aura mis.

Monsr des Noyers menvoyera les nons des oficiers absants de la garnison de Doulans que Renbure a anvoyié afin que je face arester ceux qui se trouveront icy,

Jenvoye dans ce paquet un controole a Descures afin quil ne preigne point nos logements cône il fait tous les jours — LOUIS. — (Ibid., fol. 225.) — (Original.)

 

De Sanlis, ce 18 septembre 1636.

La compnie du baron de Senae est de chevaux légers assés bonne elle est de 50 maistres je lay vue il la faudroit séparer dans les vieilles compnies qui sont foibles ou la donner a quelqun.

Mr Dangoulesme ma proposé daler a Chasteau tierry ce que jay extremement aprouvé je me porte très bien

Jay encore entretenu le major qui a proposé la faire de Corbie il dit quil ny a pas moyien de ce loger au 2 pont parce que il est trop veu de la ville et que derrière la chausée on ny peut aler ny travailer parce que cest tout marais. — LOUIS. — (Ibid., fol. 226.) — (Original.)

 

De Senlis, ce 20 septembre 1636.

Je vous prie me mander si nous continuons dans la resolution de partir lundy[107] parce quil faut donner aujourduy a midy les ordres aux troupes qui sont derrière de marcher demain auprès de Pont.

Mr de Sanlis veult faire publier le jubillé pour lundy regardés si il ne seroit point a propos de ly faire remettre jusques a mardy ou mercredy afin qu'il ne comansast pas le jour du partement. — LOUIS.

Nous navons icy ni meches ni plomb. — (Ibid., fol. 227.) (Original.)

 

1 Octobre 1636.

Mon cousin, il ne se peut rien adjouter au mémoire que vous m'avés. envoyié je croy que le meileur avis que vous puissiés prendre et daler a Amiens[108] Epenan vient dariver qui aporie de nouvelles dificultés sur toutes choses lesquelles il faut surmonter assurés vous de mon affection. — LOUIS. — (Ibid., fol. 228.) (Original.)

 

Mon cousin, lespinoy un de mes mousquetaires que.javois envoyié dans larmée des enemis revint ier au soir a Amiens dôner avis a Mr de Chatillon de lentreprise de Jean de Wert il vous dira tout ce quil a apris parmy eux et lestat de leurs forces[109]. — LOUIS. — A la campagne ce 4 octobre 1636 près Sailly. — (Ibid., fol. 229.) — (Original.)

 

De Demuin, ce (10) octobre 1636[110].

Il est très a propos de donner le prest et comancer le plus tôt que on pourra côme ausi du pain a la cavalerie, il seroit a propos de faire faire la revue aux regts de paris mayant esté asuré quil y en a qui vont pas 300 hômes et sont paiés pour 600 entre autre moncaut.

Je nay pas jugé a propos de laiser aler Mr le conte a la guerre a cette (heure) mais bien quand les travaux seront un peu plus avancés de peur que pendant que ils iroient dun costé les enemis ne vincent par lautre et ne jettassent quelque chose dans Corbie, quand le retranchement sera un peu plus avancé et le marais inondé, il ny aura plus rien a craindre, jiroy demain dés la pointe du jour aux travaux de dela et nen reviendroy que au soir. LOUIS. — (Ibid., fol. 233.) — (Original.)

 

De Demuin, ce 20 octobre 1636 à midy.

Il est nesesaire de faire fournir mercredy[111] de lavoine pour les 600 chevaux qui doivent entrer en garde aux lignes parce que ils y demeureront 24 heures et ensuite pour toutes les gardes qui se feront du dit costé. — LOUIS. — (Ibid., fol. 230.) — (Original.)

 

De Demuin, ce 22 octobre 1636.

Il est nessesaire denvoyer les tourbes pour les corps de garde au bac a dour[112].

Faudroit choisir quelqun pour avoir le mesme soin du paiement des travaux que M. de Chartres a dela.

M. le conte comance déjà a faire le protecteur des gens de guerre disant que la cavalerie ne peut subsister de deca si on ne lenvoye au loin quil la faut espargner que pour lui si il en estoit creu que on la logeroit mieux et plusieurs autres discours come cela. — LOUIS. — (Ibid., fol. 231.) — (Original.)

 

Mon cousin, le marquis de la force mayant témoigné desirer venir avec moy je creu lui devoir permettre ayant toujours besoin de quelqun avec moy a cette heure que je ramasseroy des recrues[113] je vous envoyroy demain matin mon cousin le duc Dangoulesme qui vous dira toutes nos résolutions. — LOUIS. A demuin, ce 26 octobre 1636. — (Ibid., fol. 232.) — (Original.)

 

Décembre 1636.

Moi cousin, les longueurs du Sr Du Bois nont point de raport a ses promesses, mais ce nest pas ce qui me fasche, le péril ou il se met tous les jours me déplaist et vous sçavez le bruit que fait son travail et !envie que beaucoup dé gens ont de se saisir de sa personne, nous avons esté trompés a ne juger pas mal de beaucoup despris comme vous sçavés, il est a craindre que nous le soyons encore et ce me seroit un desplaisir irréparable qu'on fit mal a cet home et que mes enemis sen peussent prévaloir,je vous prie dy bien penser et ne vous reposés pas sur la bonté de facile créance du bon père joseph et sur celle que vous mesme avés quelquefois car il en pouroit ariver inconvénient.

Ma pensée est que vous faciés conduire cet bôme au Bois de Vincennes pour y estre jusques a ce que nous soyons asseurés quon ne puisse luy faire mal dailleurs, si vous estes du mesme avis, je vous envoye Desprez pour cet effet, sinon je velus charge de levenement test a dire quo sil en arrive mal vous vous souviendrez que ma pensée nestoit pas quon laissast les choses en lestast quils sont[114].

Asseurez vous de mon affection qui ne vous manquera jamais. — LOUIS. — A Noizy a 5 h. du soir. — (Ibid., fol. 23 — (Original.)

 

Les troupes impériales, profitant du départ de l'armée du prince de Condé, avaient repris l'offensive en Franche-Comté et pénétré en Bourgogne. Après avoir menacé Dijon, les impériaux étaient venus mettre le siège devant Saint-Jean -de-Losne. Mais la résistance héroïque de cette ville permit aux Français de la secourir à temps. Le siège fut levé au commencement de novembre. Le cardinal de la Valette et le duc de Weimar, accourus de Lorraine, avec des troupes fraîches, poursuivirent les ennemis, qui perdirent dans leur retraite plus de huit mille hommes et une partie de leur artillerie. Le 14 novembre, ce côté de la frontière française était libre, Corbie venait de se rendre, nos soldats se maintenaient en Italie et dans la Valteline, les ducs d'Épernon et de la Valette préparaient vers notre frontière du midi une nouvelle armée, destinée à reprendre Saint-Jean-de-Luz, dont les Espagnols s'étaient emparés au mois de septembre, et à empêcher de ce côté de nouvelles attaques. La France respirait enfin : elle était sortie victorieuse de tous les périls qu'elle avait courus pendant cette terrible année de Corbie, dont la nation garda longtemps le souvenir. Partout l'on chantait le Te Deum, partout le peuple s'abandonnait à sa joie et les gouvernants à leur triomphe. Ce fut ce moment que choisirent le comte de Soissons et le duc d'Orléans pour faire courir de nouveaux dangers à la paix publique. Le premier, que les succès de nos armées irritaient parce qu'ils étaient en même temps le triomphe de Richelieu, profita de la faiblesse de caractère du frère du roi, pour l'entraîner dans un nouvel acte de folie.

Dans la nuit du 19 au 20 novembre les deux princes quittèrent secrètement Paris. Mais ils n'avaient concerté aucun projet, car ils se séparèrent aussitôt, le comte de Soissons pour aller à Sedan, Monsieur pour se retirer simplement à Blois, dans son apanage. Les deux princes ne s'accordèrent guère que sur un point ; tous deux se plaignirent de la tyrannie du cardinal. Ils écrivirent séparément au roi, pour expliquer leur départ et lui exposer leurs griefs ; mais le comte de Soissons se montra plus coupable que le duc d'Orléans, car il essaya d'entraîner la Champagne dans la révolte qu'il méditait, par un manifeste qu'il adressa à toutes les villes de cette province[115].

Au moment du départ des deux princes, le roi se trouvait à Versailles, et Richelieu, resté à Amiens, lui avait écrit la veille, 19, qu'il se préparait à revenir auprès de lui[116]. Louis XIII devait donc prendre seul, et sans les conseils de son ministre, les mesures nécessitées par le départ de son frère et de son cousin. Il sut les prendre. Ce prince, que l'on nous a trop souvent représenté dépourvu d'initiative, ne donnant jamais d'ordre lui-même, copiant toujours les lettres ou les actes préparés par Richelieu et incapable de les diriger, écrit cependant à Chavigni, le 20, le jour même de la fuite du duc d'Orléans et du comte de Soissons, la lettre suivante, dans laquelle , sans entrer dans les détails d'exécution, comme le faisait Richelieu, il indique néanmoins les mesures nécessaires et la forme dans laquelle elles doivent être prises : M. de Chavigny, dit-il, et la ville au clercs escriront chacun en leur départe pour avertir les villes du départ de mon frère et de M. le comte, conferront avec M. de Bulion de ce que doit contenir la dépesche on en voyera diligemment à toutes les places de Champagne côme mouson Rocroy Charleville mont olympe[117], fait à Versaille ce 20 à. 3 heures après midy 1636. — LOUIS[118]. Il est même à remarquer, qu'en cette circonstance, Louis XIII montra plus de perspicacité que Richelieu, car, dès que celui-ci eut appris le départ du duc d'Orléans et du comte de Soissons, il manda à Chavigny que les deux princes devaient avoir pris la route de Piémont, celle d'Angleterre ou celle de Guyenne, et qu'il fallait écrire aux chefs des corps qui se trouvaient dans cette dernière direction, pour leur apprendre la vérité et les empêcher par là de se laisser tromper ou entraîner hors de leur devoir par les fugitifs[119]. Louis XIII, en supposant que son frère et son cousin s'étaient dirigés vers la Champagne, se montrait plus logique, car il est évident que le comte de Soissons, qui avait commandé dans cette province, où il possédait de grands domaines, devait y avoir aussi des amis et des partisans en plus grand nombre qu'en Guyenne, province qui depuis longtemps semblait inféodée aux d'Epernon. De plus, on savait le comte de Soissons lié avec le duc de Bouillon, qui possédait Sedan, où les deux princes pouvaient trouver un asile ; il était donc naturel de présumer, comme le fit Louis XIII, que les deux cousins avaient pris la direction de l'est, où le duc d'Orléans pourrait, d'ailleurs, trouver dans le duc de Lorraine un allié fidèle et intéressé.

Quoi qu'il en soit, dès que Richelieu apprit que Monsieur s'était séparé du comte de Soissons au sortir de Paris, il s'empressa d'agir pour empêcher que leur départ ne fût le commencement d'une révolte. Dédaignant le comte de Soissons dont l'isolement faisait la faiblesse, il concentra tous ses efforts sur Monsieur. Le 23, il lui écrit, pour lui montrer combien il avait eu tort de céder aussi légèrement aux conseils de son cousin et pour essayer de le décider à revenir à Paris[120]. Le 25, Louis XIII écrit aussi à son frère dans le même sens[121]. En même temps on envoie auprès du duc d'Orléans Bautru, conducteur des ambassadeurs, pour agir plus directement sur l'esprit du prince et le convaincre de l'intérêt qu'il a à se soumettre. Mais ce négociateur ne réussit pas dans sa mission. Il n'avait pas assez de valeur personnelle et d'autorité pour ramener Monsieur. Il fallait un homme plus habile et dont la situation pût inspirer confiance à Gaston. On envoya Chavigny. Le 5 décembre, celui-ci reçut directement du roi l'ordre d'aller trouver le duc d'Orléans, pour négocier avec lui les conditions de son retour[122]. Le jeune secrétaire d'État partit aussitôt, accompagné du comte de Guiche. Les deux ambassadeurs agirent si bien que, le 11 décembre, ils décidaient Monsieur à signer un acte de soumission au roi[123]. Dans cet écrit, le duc d'Orléans suppliait son frère de faire juger de nouveau et promptement la question tant controversée de son mariage avec la princesse Marguerite, lui demandait une place de sûreté et le priait de traiter favorablement le comte de Soissons. Malgré sa diligence, Chavigny ne pouvait être revenu à Paris le 12 décembre ; aussi voyons-nous Louis XIII, ce jour-là, se plaindre de n'avoir reçu aucune nouvelle de lui.

 

De Noisy, ce 12 décembre 1636.

Je me rendroy après demain a Ruel pour savoir ce que raportera M. de Chavigny an estant en impatiance, il faut faire ou faillir promptement cette afaire pour ne leur donner loisir dajusttet leurs afaires et gagner quelque gouverneur.

On ma asuré que les receveurs de largent que ceux de paris ont donné en ont encore entre leurs mains, il seroit bon de les faire compter.

Je trouve très bon que lambert aille a Charleville je vous rendroy demain reponce sur le major de Nancy. — LOUIS. — (Ibid., fol. 238.) — (Original.)

 

Dès que le roi eut connaissance de la soumission de son frère, il lui écrivit pour lui accorder tout ce que Gaston lui avait demandé en faveur du comte de Soissons. Quant au mariage de Monsieur, Louis XIII n'en parle pas dans sa lettre du 16 décembre[124], mais le même jour, Richelieu écrivait au prince à ce sujet. Il l'assurait de l'affection du roi et lui disait que Sa Majesté ne pouvait considérer comme valable le mariage qu'il avait contracté sans son autorisation, mais qu'elle lui permettait d'accomplir cette union, si, de son côté, Monsieur voulait promettre de prendre les intérêts du roi et de la France contre ceux du duc de Lorraine, et, si les circonstances s'y obligeaient, de combattre celui-ci, malgré la parenté qui l'unirait à lui[125]. Monsieur refusa d'accepter ces conditions. C'était provoquer la guerre civile et la provoquer follement, car pendant toutes ces négociations Gaston était resté inactif, tandis que Richelieu réunissait des troupes entre Paris et Orléans. Aussi, dès que Louis XIII connut le refus de son frère, quitta-t-il Paris pour s'avancer vers Orléans avec son armée. Monsieur, effrayé, se laissa convaincre par le cardinal de la Valette qu'on lui avait envoyé au dernier moment, et vint trouver le roi, le 8 février 1637. Cette fois, il accepta les conditions que Louis XIII lui avait proposées et toute cause de division disparut. Quant au comte de Soissons, laissé d'abord en dehors, on traita quelques mois après avec lui, pour l'empêcher de se jeter définitivement dans les bras des Espagnols, ce qu'il allait faire sur les sollicitations de la coupable Marie de Médicis. Ce second traité ne fut pas favorable à la monarchie, et l'on peut dire qu'en cette circonstance le comte de Soissons dupa Richelieu, puisque ce prince obtint la permission de rester à Sedan, ce qu'il désirait. Cela lui permit de continuer impunément ses intrigues et ses négociations avec les Espagnols et de faire de cette ville, en 1641, la base d'opérations d'une nouvelle révolte, qui faillit être fatale à l'autorité de Richelieu et peut-être même à celle de Louis XIII, car nul ne peut dire ce qui serait advenu, si une mort accidentelle n'avait enlevé le comte de Soissons, le 6 juillet 1641, au milieu de ses succès sur l'armée royale

 

De Noisi, ce 19 decembre 1636.

Je pensois aler a Ruel vous voir mais voyant le temps si mauvois et si rude jay creu que vous ne seriés point fâché que je ny alasse point aujourdhuy je vous envoye lutas qui vous parlera de plusieurs petites afaires de ma part, si vous jugés apropos quil parle a Mr de Chatillon de ma part il le fera. — LOUIS.

Je vous prie me mander corne va lafaire de du Bois. — (Ibid., fol. 239.) — (Original.)

 

De Noisi, ce 19e decembre 1636.

Puisque Liancourt a veu M. de Chavigny il nest pas besoin de luy rien mander jay escrit a M. de Chatillon de ce rendre demain a Ruel ou je seroy a 1 heure après midy. — LOUIS. (Ibid., fol. 240.) — (Original.)

 

De Noisi, ce 23 décembre 1636.

Je vous envoye 2 billets que jay reseus de Rembure je croy quil est besoin de luy faire savoir ce quil a a répondre au gouverneur Darras je trouve bien estrange que nous nayons point de nouvelles de M. de Chavigny[126]. — LOUIS. — (Ibid., fol. 241.) — (Original.)

 

 

 



[1] Conducteur des ambassadeurs.

[2] Louis XIII veut, sans doute, parler ici du quatorzième jour de la maladie de Saint-Simon. La Gazette du 5 janvier dit que : on lui rapporte qu'il y a plus à espérer qu'à craindre en la maladie du duc de Saint-Simon. Et le 12, elle annonce sa convalescence.

[3] Le maréchal avait demandé un congé, qui lui fut accordé le 14 décembre, comme nous l'apprennent deux lettres, l'une du roi, l'autre de Richelieu, qui ont été publiées dans les Mémoires de la Force, t. III, p. 438 et 439. Le vieux maréchal avait laissé le commandement de son armée, pendant son absence, à son fils, le marquis de la Force.

[4] V. les Mémoires d'Omer Talon, collection Michaud, 3e série, t. VI, pages 41 à 59.

[5] Louis XIII fait, sans doute, allusion au mémoire rédigé par Richelieu la veille ou le même jour, et destiné à régler tout ce qui devait se passer entre le roi et les députés du parlement qui allaient être reçus par Louis XIII quelques heures après.

[6] Le comte de Soissons avait dû être prévenu du projet primitif, pour le ravitaillement des places d'Alsace, projet qui lui confiait la direction de cette expédition, et ce prince n'avait pas dû être flatté de se voir remplacé par le cardinal de la Valette, qui, à cause de sa qualité d'ecclésiastique, était un objet de haine et de jalousie pour tous les officiers supérieurs.

[7] Quelques difficultés commençaient déjà à diviser les deux paya. Le parti de la paix semblait devoir l'emporter en Hollande, et cela d'autant plus facilement que le prince d'Orange s'était peu à peu rallié à lui depuis l'échec de l'expédition française en Flandre. Des négociations pour arriver à une nouvelle trêve avaient même été entamées entre l'Espagne et la Hollande. Il semble résulter de Mémoires du cardinal aux ambassadeurs français auprès des États, que Richelieu, se sentant abandonné par la Hollande, aurait eu un instant la pensée de négocier aussi pour le compte de la France une trêve avec l'Espagne. Mais, comme les négociations des Hollandais n'aboutirent pas, le cardinal ne donna pas suite à son projet. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 404, et t. VII, p. 1016, Mémoires au maréchal de Brézé et à Charnacé.)

[8] Voir la lettre suivante et une autre du 14 mars sur cette affaire du fort de la Croix.

[9] Est-ce le ballet qui fut donné le 12 février au Louvre ? Nous ne savons. La Gazette du 19 février donne la composition de celui-ci. En l'annonçant le 16, elle disait qu'on l'appelait le ballet de l'improviste, parce qu'il avait été composé et dansé en six jours. Nous pensons qu'elle se trompait sur ce point, et que c'était le même ballet dont Louis XIII parle ici.

[10] Encore une allusion à l'intention manifestée par Mlle de la Fayette de se retirer dans un couvent.

[11] Nous datons cette lettre de la fin de janvier, car nous pensons qu'elle dut être écrite presque immédiatement après la précédente, à laquelle elle fait sans doute allusion. Cette courte note est écrite au crayon.

[12] On sait que les surintendants des finances délivraient toujours difficilement l'argent nécessaire à l'entretien des troupes. Dans une lettre au maréchal de Brézé, Richelieu écrivait, le 30 janvier, à ce sujet : M. de Charnacé, qui a fait deux voyages en France depuis qu'il est en Hollande, açayt la facilité qu'il y a à faire faire à ces messieurs autre chose que ce qu'ils veulent. Ils estiment quelquefois beaucoup de choses faites quand ils les ont résolues, et, cependant il est vray que l'exécution ne suit pas. Je m'en plains à eux même fort souvent, et je vous puis dire que je n'ay presque rien qui traverse le contentement de ma vie que pareilles rencontres. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 411.) Nous avons aussi une lettre inédite de Louis XIII qui montre de quelle façon il fallait insister pour obtenir des surintendants les payements jugés nécessaires. Mrs de Bulion et Boutilier, écrit-il le 1er janvier 1636 à ces deux surintendants, les capitaines que jay mandé pour faire les recrues sont arrivés et natendent que de largent pour aler travailer vous les ferés expédier promtement ny ayant point de temps a perdre la diligence est très nécessaire en cette afaire. (Arch. des aff. étrang., France, t. V, fol. 163.) Malgré ces recommandations, nous verrons le mécontentement de Louis XIII éclater, dans une lettre du 20 mars, parce que les recrues manquent du nécessaire.

[13] On songeait à attaquer l'Espagne dans toutes ses possessions, mais la Franche-Comté, qui était presque indépendante à cause de son isolement et de son éloignement de la métropole, offrait peu de prétextes pour y envoyer une expédition. Cependant le prince de Condé, qui commandait en Bourgogne, dans un rapport au roi, daté du 16 février, montrait quels arguments on pourrait faire valoir pour excuser une agression de la comté, qui avait avec la France des traités particuliers de neutralité. Le prince proposait, en outre, de traiter avec quelques personnes influentes de cette province. Ce rapport, à chacun des paragraphes duquel le cardinal fit des réponses marginales, fut approuvé par le roi le 23 février. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 421.)

[14] Édouard Farnèse, duc de Parme, nouvel allié de la France, n'avait guère k se louer des résultats que cette alliance lui apportait, puisqu'il voyait ses États envahis par les Espagnols. Il venait en France pour obtenir que de nouvelles troupes fussent jointes à celles du maréchal de Créquy, qui commandait en Italie, et au corps du duc de Rohan dans la Valteline, afin d'agir avec plus de vigueur pendant la prochaine campagne qu'on ne l'avait fait précédemment. Comme Richelieu tenait à ménager un allié aussi précieux que fidèle, il avait voulu le recevoir avec tous les honneurs dus à un prince souverain, et avait fait donner l'ordre aux ducs et pairs d'aller saluer le duc de Parme à son arrivée. Ceux-ci refusèrent tout d'abord, mais cédèrent de mauvaise grâce, quelques jours après, devant les ordres formels de Louis XIII. Le roi avait apporté plus d'empressement à complaire au prince italien, car, dès le jour de l'arrivée de celui-ci à Paris, Louis XIII, qui était alors à Versailles, était venu au Louvre avec la seule intention de recevoir immédiatement le duc de Parme.

[15] D'après la Gazette, Louis XIII ne retourna pourtant à Versailles que le 24.

[16] Nous n'avons pas trouvé ce Mémoire.

[17] D'après la Gazette du 1er mars, le colonel Sinnot commandait quinze compagnies de soldats irlandais.

[18] Ce Vic était le fils du garde des sceaux dit même nom, mort en 1622.

[19] On disait alors indifféremment arsenac ou arsenal.

[20] Le cardinal n'alla à Paris que le 2 mars, mais il alla, en effet, à l'Arsenal voir danser le ballet des deux magiciens. (Gazette du 8 mars.)

[21] En effet, le 8, dit la Gazette du 15 mars, le roi mena la reine et toutes les dames à la chasse, où Leurs Majestés eurent toutes sortes de divertissements. Le duc de Parme ne partit que le 18. La Gazette du 22 dit que, le 15, il alla à St Germain, où après toutes les caresses imaginables son Altesse eut son audience d'adieu de la part du roi et de la reine : d'où il alla à Ruel prendre aussi congé de Son Eminence... le 17, Son Eminence alla encore voir Son Altesse de Parme et se dirent derechef adieu avec de grands tesmoignages de réciproque affection. A ce propos, Louis XIII écrivait à Chavigny, le 4 mars, quelques mots qui peignent bien son horreur pour le faste et toutes les cérémonies publiques : Quand le duc de Parme me viendra dire a Dieu, dit-il, qu'il dîne avant que de venir icy. (Arch. des aff. étrang., France, t. V, fol. 171.)

[22] Cette phrase fait, sans doute, allusion aux projets de Mlle de la Fayette et aux intrigues de ses parents.

[23] Nous ne savons comment la phrase doit se terminer, car la feuille a été coupée à cet endroit par le relieur gui a réuni les différentes lettres de ce volume. Nous n'avons aucune autre indication sur l'indisposition probable de Richelieu.

[24] C'étaient les dernières troupes françaises restées en Hollande après la désastreuse campagne de Flandre en 1635. Elles étaient placées sous les ordres du maréchal de Brézé. Dès le commencement de décembre 1635, celui-ci se plaignait du manque d'argent dans lequel on le laissait, et Louis XIII ordonnait an surintendant de subvenir aux besoins de ce corps d'armée. (V. ci-dessus, une lettre du 3 décembre.) Cependant, à la fin de janvier, le maréchal de Brézé se plaignait encore, et nous ne le trouvons pas encore contenté an milieu de mars. En lui répondant le 30 janvier, Richelieu l'informait pourtant de l'envoi de l'argent qu'il avait réclamé. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 411.) Mais, nous l'avons déjà vu, l'administration était à organiser entièrement. A ce moment, rien n'était fait encore complètement et rien ne marchait.

[25] Sublet des Noyers avait, depuis le 12 février, remplacé Servien comme secrétaire d'Etat de la guerre. Ce dernier, victime d'une intrigue de cour, avait été relégué à Angers, sans pourtant être disgracié, car la lettre qu'écrivit Richelieu aux membres du présidial d'Angers, à cette occasion, est remplie de témoignages d'estime à l'égard de l'ancien secrétaire d'Etat. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 420.)

[26] Le soir du 22, le sieur Belsence, aide de camp, apporta au roi la nouvelle de la prise du général Colorado et défaite de ses troupes par le marquis de la Force. (V. Gazette de France du 29 mars.) Ce petit combat avait eu lieu entre Baccarat et Raon-l'Etape. D'après la relation, évidemment exagérée, qu'en donne la Gazette du 25 mars, les impériaux, qui étaient au nombre de deux mille, laissèrent sur le champ de bataille mille des leurs et entre les mains des Français quatre cents prisonniers. Quant à ceux-ci, la Gazette affirme qu'ils ne perdirent dans cette affaire que trente ou quarante hommes. Dès le 25, Richelieu adressait au maréchal de la Force des félicitations pour le succès obtenu par son fils et la prudence avec laquelle celui-ci s'était conduit. Le 2 avril seulement, il écrivit dans le même but au marquis de la Force ; mais, cette fois, sa lettre était accompagnée des complimente que devait répéter au vainqueur le même gentilhomme, M. de Belsence, qui avait apporté à Saint-Germain la nouvelle du combat. (V. Papiers de Richelieu, t. V, pp. 968 et 969.)

[27] On sait que Chavigny était le chancelier de Gaston. Cette lettre, destinée à Monsieur, avait été préparée par le cardinal et était écrite dans le seul but de lui rendre service, puisqu'il ne s'agissait que de reprocher au duc d'Orléans sa conduite envers un de ses officiers, qui était en même temps fort bien auprès de Richelieu, ce que Monsieur savait. C'était, on le conçoit, une raison suffisante pour que ce dernier suspectât sa fidélité ; mais le cardinal n'entendait pas laisser maltraiter ses dévoués, et il savait les défendre, comme on le voit, même contre le frère du roi. Ce dernier, du reste, était toujours prêt à trouver mauvais les actes de son frère. Dans cette lettre, dont il acceptait bien tous les termes, puisqu'il s'était donné la peine de la copier entièrement, il lui parlait assez vertement : J'impute votre procédé, disait-il, à de mauvais esprits dont jay chargé le sieur de Chavigny de vous parler de ma part. Telles gens sont des pestes auprès de personnes de vostre qualité, quand jen recognois auprès de moy jy remédie en les esloygnant le plus promptement possible que je puis, c'est ainsy que vous en deves user pour vostre bien et pour mon contentement. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 437.)

[28] Voyez, plus loin, une lettre du 22 avril.

[29] Le 2 décembre précédent, Richelieu écrivait déjà à Louis XIII que, selon le maréchal de Brézé, qui commandait les dernières troupes françaises restées en Hollande, ces soldats demandaient l'aumosne et mouraient de faim. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 367.) Et cependant, le 15 avril, rien n'était fait pour ces malheureuses troupes, et le cardinal se plaignait au roi de ne pouvoir leur payer la solde qui leur était due. (Idem, t. V, p. 441.)

[30] V. plus haut, une lettre du 14 mars. Quelques jours après, Richelieu écrivait aux surintendants à ce sujet : Il y a longtemps, disait-il le 5 avril, que j'ay conjuré Messieurs les surintendants de vouloir donner une après-disnée pour vuider toutes les prétentions de tous les étrangers qui sont particulièrement à la solde du roy ; je ne parle pas de M. le duc Bernard, où ces messieurs ont travaillé, mais de tous les autres. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 440.)

[31] Malgré cette recommandation, Louis XIII était encore obligé d'écrire le 29 juin aux surintendants, pour leur recommander ces troupes : Les troupes qui sont revenues de holande, leur disait-il, vont encor rien receu pour leurs recrues, ce qui est du tout nesessaire, cest pourquoy vous y ferés diligemment pourvoir. (Arch. des aff. étrang., France, t. V , fol. 217.)

[32] Il partit le 17, dit la Gazette du 19 avril, vers leurs majestés Britanniques de la part du roi pour se conjouir de la naissance de la petite princesse dont la reine d'Angleterre est naguère accouchée. Il s'agit de la princesse Elisabeth, née à la fin de 1635, fille de Charles Ier d'Angleterre, et qui mourut le 8 septembre 1650.

[33] D'après la Gazette, il était venu à Chantilly le matin du 14 avril.

[34] Il était venu aussi le matin de ce même jour à Chantilly.

[35] La France, l'Allemagne et l'Espagne feignaient à cette époque de désirer la paix, tout en armant de plus en plus et en se préparant pour la prochaine campagne. Le pape, de son côte, tentait par tous les moyens de faire commencer des négociations sérieuses. La guerre, dans les conditions où elle se faisait alors, était, en effet, préjudiciable au dernier point au Saint-Siège, et Urbain VIII eût préféré voir les puissances catholiques s'unir entre elles contre les hérétiques ou les infidèles, plutôt que de se déchirer mutuellement. Les alliances de la France avec les protestants d'Allemagne et avec les Hollandais faisaient surtout souffrir ce pape, qui de tout temps s'était opposé à ce qu'elle suivit une politique qui lui semblait compromettre les intérêts de toute la chrétienté. Quoi qu'il en soit, Cologne fut adoptée par le pape et les Espagnols comme lieu de réunion pour y traiter de la paix. Le 23 août, la Gazette annonçait l'arrivée prochaine des plénipotentiaires dans cette ville. Vers la même époque, Richelieu rédigeait l'Instruction destinée aux représentants de la France au congrès. (V. cette Instruction, Bibliothèque nationale, Fonds Fontanieu, portefeuille 83, pièce 13.) Cette réunion n'eut pas lieu en 1636, et on sait que l'Europe dut attendre la paix jusqu'à la conclusion du traité de Westphalie en 1648.

[36] Cette réponse à Monsieur dut être envoyée le 18, en même temps que la lettre que Richelieu lui écrivit ce jour-là. M. Avenel n'a pas découvert la réponse en question, mais il est évident qu'elle dut être faite, puisque le cardinal y fait allusion dans une lettre à Chavigny, du même jour 18 avril. (V. Papiers de Richelieu, t. V, pp. 442 et 444.)

[37] La Gazette de France du 19 avril dit que le 14 avril, dans l'après-dinée le roi mena le nonce à la chasse au loup qui fut heureuse. Nous le voyons, elle s'est légèrement trompée sur ce point.

[38] Voir plus loin une seconde lettre du 20 avril.

[39] Le comte d'Harcourt avait été nommé, le 9 avril, général de l'armée navale, destinée à opérer dans la Méditerranée et à tenter de reprendre les îles de Lérins aux Espagnols. L'archevêque de Bordeaux avait été nommé chef du conseil de marine de l'expédition. (V. la Gazette de France du 19 avril.) Le comte d'Harcourt devait, ainsi que son collègue, aller à l'île de Ré attendre le duc d'Orléans, qui faisait partie de l'expédition. Malgré l'ordre formel du roi, le comte ne partit que le 1er mai. (V. Gazette du 3 mai.)

[40] Le comte Scoti, qui avait accompagné son mettre en France et y était resté après le départ de celui-ci, pour défendre ses intérêts.

[41] Le 16 avril, Louis XIII avait accordé au duc de Weimar une pension de 150.000 livres pour le récompenser de ses services et l'attacher plus étroitement à la France. Le duc de Weimar vint, en effet, le même jour à Chantilly pour faire ses adieux au roi avant de partir pour l'armée. (Gazette du 26 avril.)

[42] L'instruction qui lui fut donnée avant son départ est datée de ce même jour 20 avril. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 970.)

[43] Ce paragraphe donne une date certaine à ce mémoire de Richelieu, destiné à être lu par le roi aux députés du clergé. M. Avenel n'ayant, sur ce point, aucun document pour le guider, l'avait daté du 25 avril, parce que ce jour-là le cardinal alla trouver le roi à Chantilly. Cette lettre de Louis XIII détruit d'ailleurs la base d'argumentation de M. Avenel, car il est évident que Richelieu n'assistait pas à cette entrevue, puisque le roi lui apprend ici qu'elle a eu lieu.

[44] Toute cette lettre est une réponse à un mémoire de Richelieu, que M. Avenel a daté de la fin d'avril. La véritable date doit être le 19 ou 20 avril. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 453.) Le président de Bernet était président du parlement d'Aix. Dans son mémoire, Richelieu annonçait au roi que ce magistrat irait prendre congé de lui avant de retourner en Provence.

[45] Si le roi estime à propos, disait Richelieu dans le mémoire, d'envoyer quelqu'un de sa part en son armée navale pour la voir et encourager tout le monde de sa part, on m'a dit que M. Souvré ne seroit pas fâché de faire ce voyage. Ce personnage était Jean de Souvré, marquis de Courtenvaux et fils du maréchal de Souvré, ancien gouverneur de Louis XIII. Jean de Souvré fut, pendant quelque temps, gouverneur de Touraine. Sa petite-fille, Anne, épousa Louvois en 1662. Voir, au sujet de son projet de voyage, la lettre suivante et une autre du 28 avril.

[46] Nous lisons dans la Gazette du 12 avril : L'archiduchesse du Tyrol avoit eu ordre de l'empereur de donner quartier sur ses terres à trois régiments allemande ; mais l'évêque de Constance, après lui avoir remontré la grande ruine qu'avoient apportée au pays ceux de l'année dernière, s'y est opposé, et résolut de leur en disputer l'entrée avec la milice du pays, si on l'y vouloit forcer.

[47] Le vicomte de Turenne avait battu quatre régiments impériaux qui assiégeaient le château de Sancy, avait ravitaillé ce château et fait un grand butin. (V. Gazette de France du 26 avril.)

[48] Le 29, le duc de Weimar prit congé de la cour de France. (Gazette du 3 mai.) Néanmoins, ainsi que nous le verrons plus loin, il ne partit point encore pour l'armée.

[49] Le cardinal, venu à Paris le 22, alla à St-Brise le 24 et de là à Royaumont. (Gazette du 26 avril.)

[50] Prioleau, secrétaire du duc de Rohan. Il était arrivé à Paris le 22, apportant des nouvelles du duc.

[51] Le 12 mai, Richelieu écrivait au roi que l'on venait d'envoyer s cent mille francs à M. de Rohan pour le pain. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 459.)

[52] Charles de Sainte-Maure de Montausier, qui épousa plus tard, en 1643, la célèbre mademoiselle de Rambouillet. Il devint duc et pair en 1664.

[53] Nicolas de Neufville, marquis de Villeroy. Maréchal de camp en 1624, il fut gouverneur de Pignerol de 1631 à 1635. Il combattit ensuite dans toutes les campagnes qui suivirent, et devint lieutenant général en 1643 et marchai de France en 1646. Gouverneur de Louis XIV, il fut nommé duc et pair en 1663 et mourut en 1685.

[54] Il arriva le 1er mai. (Gazette du 10 mai.)

[55] Il n'y alla pas, ainsi que l'indique la lettre suivante.

[56] Pierre Monod, jésuite, confesseur de la duchesse Christine de Savoie, sœur de Louis XIII. Il était venu à Paris avec le projet de tenter, pour la première fois, d'obtenir pour la maison de Savoie les honneurs de la royauté. Ayant échoué dans sa mission, il profita de sa présence en France pour conspirer contre Richelieu. Mais celui-ci, qui le surveillait, le renvoya à Turin et devint dès lors un ennemi dangereux pour lui. En 1640, il le fit enlever et enfermer à Pignerol. La mort de Richelieu ne délivra pas le prisonnier, qui mourut à Miolaus en 1644.

[57] Dans cette lettre, Louis XIII se plaignait des vexations dont les gens de guerre accablaient les habitants des pays qu'ils parcouraient et engageait le chancelier à faire châtier sans pitié ceux qui seraient reconnus coupables. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 455.) L'Ascension, jour où fut écrite cette lettre au chancelier, tombait le 1er mai en 1636.

[58] Cette résolution fut publiée à son de trompe par les rues de Paris le 10 et annoncée par la Gazette du 17 mai.

[59] Le 12, Richelieu répondait à ce sujet : Nous avons avisé de renvoyer M. de Bouillon en Hollande pour les raisons que M. de Chavigny dira demain au matin à V. M. à son lever. Il ne recevra point maintenant l'honneur qu'il vous plaît lui faire de vostre ordre ; il a communié à cette Pentecôte et est catholique zélé. (Papiers de Richelieu. t. V, p. 460.)

[60] Le roi alla à Versailles le lundi 12 mai et le 13 à Rueil, où il y eut conseil. Il partit de Versailles pour Fontainebleau le 17.

[61] Roger Bostot d'Espenan était un gentilhomme dévoué à Richelieu, qui l'aimait beaucoup. A cette époque, d'Espenan avait demandé un emploi dans l'armée du prince de Condé en Bourgogne.

[62] Le 19, le cardinal avait écrit au roi : Le duc Bernard est toujours indisposé et qui plus est en assez fascheuse humeur. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 466.)

[63] Haguenau était pressée par les impériaux. Richelieu, dans la même lettre, informait le roi que le cardinal de la Valette allait tenter de secourir cette ville. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 466.)

[64] Le cardinal, toujours dans le même rapport, apprenait au roi que 1.200 cavaliers espagnols étaient passés du Luxembourg en Franche-Comté. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 466.)

[65] Coblentz, abandonnée depuis la retraite du cardinal de la Valette vers Metz, était dans un état désespéré. Cette ville se rendit dans les derniers jours du mois de mai.

[66] C'était seulement sur un on-dit que Richelieu annonçait la présence du duc à Saint-Avold.

[67] Richelieu avait proposé au roi d'offrir à Notre-Dame de Paris une lampe d'argent et de fonder à cette occasion un service perpétuel en l'honneur de la Vierge et afin d'obtenir sa protection dans la guerre contre les Espagnols. Une copie de ce vœu de Louis XIII se trouve aux affaires étrangères. (France, t. XVI, pièce 60.)

[68] C'est à Antoine Godeau, qui fut de l'Académie française, que Richelieu accorda l'évêché.

[69] C'est, sans doute, à une retraite faite à l'occasion de son vœu que Louis XIII fait allusion ici. La Gazette du 31 mai dit que le roi ne laissa passer aucun jour de cette semaine sans assister au salut. Or le 1er juin était un dimanche.

[70] Il arriva, en effet, à Fontainebleau le mercredi 4 juin.

[71] Tout ceci répond à un mémoire de Richelieu du 3 juin. Dans ce Mémoire, le cardinal annonçait au roi l'arrivée d'un courrier venant de Franche-Comté et apportant des nouvelles de ce paya. Le prince de Condé assiégeait à ce moment la ville de Me, dans laquelle s'étaient renfermés l'archevêque et les membres du parlement de Besançon. Cette nouvelle explique la satisfaction exprimée par Louis XIII. Ce siège, d'ailleurs, n'eut pas un heureux résultat, puisque le prince de Condé fut obligé de le lever le 15 août suivant.

[72] Dans un rapport précédent, daté du 27 mai, Richelieu annonçait que les dernières troupes françaises qui se trouvaient en Hollande allaient revenir en France. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 473.)

[73] Dans un rapport du 3 juin, Richelieu, parlant du P. Rigaut, supérieur des Carmes de Paris, disait au roiqu'il étoit à propos de lui donner le brevet de prédicateur du roi et lui dire qu'il le retenoit pour prêcher les dimanches de ce carême devant lui... Par mégarde on avait écrit : les dimanche et ce carême. C'est ce grand nombre de sermons que cette dernière version lui promettait qui effrayait Louis XIII. Du reste, dès le lendemain 5 juin, Richelieu rectifiait dans un nouveau rapport les termes mal copiés de celui du 3 juin et s'excusait de la méprise qui avait été faite. (V. Papiers de Richelieu, t. V, pp. 476 et 478.) La Gazette nous apprend que le P. Rigaut ne commença ses sermons qu'à la Toussaint.

[74] Cette lettre n'a été trouvée ni par M. Avenel, ni par nous, et nous ignorons quel pouvait en être le sujet.

[75] Jean-Louis d'Erlach était lieutenant du duc Bernard de Saxe-Weimar.

[76] Nous n'avons pas non plus la lettre de Richelieu, à laquelle Louis XIII fait allusion ici.

[77] Nous n'avons trouvé ni la lettre de Richelieu ni le Mémoire écrit par le roi.

[78] La Gazette du 21 dit que le 14 le roi partit de Fontainebleau et alla coucher à Tigeri ; le lendemain à Crône, le 18 à Conflans. Elle fait, sans doute, erreur, puisque nous retrouvons Louis XIII à Tigeri le 16 et même le 17. (V. la lettre suivante.)

[79] On sait que le maréchal de Toiras avait quitté le service de la France pour passer à celui du Piémont. Il avait été tué le 14 juin en assiégeant Fontanella, dans le Milanais. Ce que dit ici Louis XIII de ce soldat, qui avait rendu tant de services à la France, pourrait faire supposer que Richelieu ne détestait pas Toiras, comme on l'a cru, mais que si le cardinal a agi quelquefois contre lui, c'est qu'il sentait l'obligation de ne pas défendre un officier que n'aimait pas le roi.

[80] C'était le père d'une des filles d'honneur de la reine.

[81] En 1615, pendant le voyage de Louis XIII à Bordeaux, où il allait épouser Anne d'Autriche, le jeune Toiras, qui alors était en faveur auprès du roi, en avait obtenu la charge de la meute des chiens pour le lièvre et le renard. Quelque temps après, ses talents de chasseur lui avaient fait donner aussi la lieutenance de la vénerie. C'est la première de ces charges, que le maréchal avait conservée malgré sa disgrâce, qui excitait les convoitises des seigneurs de la cour.

[82] Le lendemain, Richelieu, inquiet, écrivait à Chavigni pour en obtenir quelques nouvelles de la santé du roi. Le 29, de plus en plus inquiet, il écrivait encore au jeune secrétaire d'État. Pour le presser davantage de répondre et expliquer cette seconde lettre il ajoutait, après avoir signé : Nous n'avons aucune nouvelle. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 976.)

[83] Louis XIII veut, sans doute, parler du duel dont il est question dans une pièce gui ne porte qu'au dos la date du 25 juin et qui est adressée au roi par Richelieu. M. de Humières et M. de Lancosme se sont battus dans Paris, dit le cardinal, accompagnez chacun d'un gentilhomme. Ils ne man. pueront pas de dire que ce n est qu'une rencontre. Qui les pourroit prendre, le bois de Vincennes leur est préparé, selon le dessein général qu'en a fait Vostre Majesté ; mais il sera difficile... (Papiers de Richelieu, t. V, p. 493.) On sait que Louis XIII était fort ennemi du duel, contre lequel il ne cessa de rendre des ordonnances très-sévères.

[84] Charles de Schomberg, duc d'Halluin, fils du maréchal de Schomberg. Il devint lui-même maréchal de France en 1637. En 1646, il épousa madame de Hautefort.

[85] C'était l'administrateur des postes.

[86] Louis de Valois, fils du duc d'Angoulême, et qui succéda plus tard au maréchal de Vitry dans son gouvernement de Provence.

[87] La Capelle venait d'être prise par les Espagnols, qui étaient entrés en Picardie. Dans un Mémoire du 11 Juillet, Richelieu demandait au roi d'envoyer en diligence Mr le comte d'Ales à Abeville, Mr de Vignolles à Péronne et le marquis de Sourdis à Nancy pour un temps... parce que cela pressoit extraordinairement. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 509.)

[88] Richelieu, après l'avoir proposée, hésitait à maintenir la nomination de ce Moison comme maréchal de camp à Verdun.

[89] Des doutes s'étaient élevés sur le sentiment du roi à propos de la manière dont ces régiments devaient être traités, et, dans un autre rapport du même jour, Richelieu disait à Louis XIII qu'il était d'usage de donner le drapeau blanc aux régiments de vingt compagnies, que si 1 on ne le faisait cette fois encore, les officiers se dégoûteraient du service, et que cet oubli de l'usage n'offrait d'ailleurs aucun avantage. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 506.)

[90] Dans un autre rapport du même jour, Richelieu demandait au roi teillai plairait de venir coucher le lendemain à Juvisy, Richelieu était à Charonne en ce moment.

[91] Papiers de Richelieu, t. V, p. 496, lettre à de Noyers.

[92] Papiers de Richelieu, t. V, p. 878, lettre au duc de Chaulnes.

[93] Papiers de Richelieu, t. V, p. 500, lettre aux évêques de France.

[94] Papiers de Richelieu, t. V, p. 497, copie du vœu à la Vierge.

[95] Papiers de Richelieu, t. V, p. 518.

[96] Papiers de Richelieu, t. V, p. 541.

[97] Histoire de Louis XIII, par le P. Griffet, t. II, p. 749.

[98] Papiers de Richelieu, t. V, p. 534.

[99] Papiers de Richelieu, t. V, p. 530.

[100] Papiers de Richelieu, t. V, pp. 536 et suivantes.

[101] V. une note du roi en marge d'un Mémoire de Richelieu, Papiers de Richelieu, t. V, p. 516.

[102] Lettre à Chavigny. Papiers de Richelieu, t. V, p. 549.

[103] Lettre à Chavigny. Papiers de Richelieu, t. V, p. 987.

[104] Nous n'avons pas cette lettre.

[105] C'était un ancien capucin qui prétendait avoir découvert le moyen de faire de l'or et avait offert au roi de lui vendre son secret. Nous aurons à revenir sur ce singulier personnage.

[106] Il est à remarquer que, par cette dénomination, on voulait désigner le donjon de Vincennes. Cet euphémisme devait paraître un peu exorbitant à ceux qui étaient enfermés dans cette forteresse.

[107] Pour Roye, qui venait d'être repris par l'armée française.

[108] Il y arriva le 2. Le Mémoire dont parle Louis XIII est sans doute celu dans lequel Richelieu lui exposait ses idées sur la conduite qu'il fallait tenir au sujet de Corbie et dans lequel il lui conseillait de retenir auprès de lu le duc d'Orléans et le comte de Soissons. (V. Papiers de Richelieu, t. V p. 590.)

[109] Le siège de Corbie ôtait commencé. Louis XIII l'annonçait à la France et donnait en même temps quelques détails sur les dernières opérations de l'armée, dans un article qu'il écrivait le 8 octobre et que la Gazette de France publiait le 14 du même mois, mais avec les modifications jugées nécessaires pour le public par Renaudot. Nous avons déjà donné un spécimen des articles du roi-journaliste. Durant tout le siège de Corbie, Louis XIII continua sa collaboration à la Gazette de France. La longueur de ses articles nous met dans l'impossibilité de les reproduire ici. On les trouvera d'ailleurs en manuscrits à la Bibliothèque nationale, Fonds français, t. 3840.

[110] Cette lettre ne porte pour date que ces mots : de Demuin ce ... octobre 1636, nous pensons qu'elle a dû être écrite le 9 ou le 10 ; car, le 9, Richelieu, en écrivant au roi, lui disait : Je crois qu'il est à propos que Sa Majesté estant en travail ordonne la revue de l'infanterie de l'armée et déclare que les pretz commenceront lundy, afin que tous les soldats luy en sçachent le gré qu'ils doivent. Si elle approuve le pain de la cavalerie, c est à dire une ration par cavalier pour le temps qu'elle sera au lieu où elle est, elle doibt aussy le leur faire savoir pour la me sme raison que dessus. (V. Papiers de Richelieu, t, V, p. 620.) Il nous semble que la lettre de Louis XIII répond à celle du cardinal.

[111] Mercredi 22 octobre. Richelieu répondit le même jour, dans une lettre que Cherré, son secrétaire, a datée plus tard à tort du 19 octobre, que l'on n'avait pas encore distribué d'avoine parce que les cavaliers prétendaient obtenir une ration plus forte que celle à laquelle ils avaient droit. Il ajoutait du reste que le roi allait être obéi. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 630.)

[112] Dans une lettre à Chavigni, du même jour, Richelieu répondit que le roi aillait être obéi. (Papiers de Richelieu, t. V, p. 634.)

[113] Les Mémoires de la Force nous disent, au contraire, que Louis XIII, voulant avoir toujours auprès de lui le marquis de la Force, lui ordonna de le suivre ; sur ce point de détail, nous pinsons que le roi doit être cru de préférence à l'auteur de ces Mémoires. (Mémoires de la Force, t. III, p. 183.)

[114] Cette lettre est une réponse à une autre que Richelieu avait écrite le même jour à Louis XIII au sujet de l'aventurier qui les trompait tous deux depuis longtemps déjà en leur persuadant qu'il possédait le secret de faire de l'or. Dans cette lettre, le cardinal proposait lui-même de s'assurer de Dubois et de le faire arrêter le même jour ; aussi nous ne comprenons pas ce qu'a voulu dire Louis XIII dans sa dernière phrase. (V. Papiers de Richelieu, t. V, p. 702.) Ce Dubois avait été présenté au roi et au cardinal par le P. Joseph, qui, on le sait, accordait facilement créance aux nécromanciens de son temps. La proposition de l'aventurier ne pouvait d'ailleurs pas paraitre étrange à Richelieu, car, à cette époque, on croyait encore possible la découverte de la pierre philosophale. Aussi fut-il entouré de soins de toutes sortes, et Louis XIII lui promit-il des lettres de noblesse pour récompenser sa découverte. Dubois, qui, ancien capucin, s'était fait luthérien, puis s'était marié sous le nom de Mailly, se nommait réellement Pigard. Son intention était sans doute d'exploiter le besoin d'argent où se trouvait alors le gouvernement français et de s'enrichir à ses dépens ; mais il fut trompé dans son attente, car, comme sa présence et ses promesses s'étaient ébruitées. on l'enferma au fort de Vincennes pour le mettre à l'abri des entreprises des ennemis de la France. Le pauvre diable dut se résigner. Il essaya de gagner du temps en continuant d'exploiter la crédulité de ceux dont il était le prisonnier. Il y réussit pendant quelque temps, mais enfin son imposture l'ut découverte, et, le 25 juin 1637, il était mis à mort par arrest de la chambre de justice, pour magie, fausse monnoye et autres crimes. (V. Gazette de France du 27 juin 1637.)

[115] Arch. des aff. étrang., France, 1638, trois derniers mois. Ce volume contient dix exemplaires manuscrits du manifeste du comte de Soissons, adressés aux villes les plus importantes de la Champagne.

[116] Papiers de Richelieu, t. V, p. 681.

[117] Citadelle située en face de Charleville, de l'autre côté de la Meuse.

[118] Arch. des aff. étrang., France, t. V, fol. 236. Original inédit.

[119] Papiers de Richelieu, t. V, p. 688.

[120] Papiers de Richelieu, t. V, p. 695.

[121] Papiers de Richelieu, t. V, p. 696.

[122] Arch. des aff. étrang., France, t. V, fol. 237.

[123] V. Bibliothèque nationale, Fonds Baluze, papiers des armoires, lettres, paquet VII, n° 2, 3 et 4, fol. 28.

[124] Papiers de Richelieu, t. V, p. 711.

[125] Papiers de Richelieu, t. V, p. 713.

[126] C'est de la mission de Chavigni auprès de Monsieur que Louis XIII veut parler ici.