Suzanne, Jonas. IL EXISTAIT à Babylone une femme d’une beauté merveilleuse, nommée Suzanne ; ses vertus égalaient ses charmes. Deux vieillards, amis de son époux Joachim, conçurent pour elle une passion criminelle, et se découvrirent l’un à l’autre leur pensée sécrète. Ils formèrent le détestable projet de surprendre Suzanne lorsqu’elle se baignait seule dans son jardin. Cachés tous deux dans ce lieu, ils profitèrent de l’éloignement de ses servantes, coururent prés d’elle et lui déclarèrent leur coupable amour, en la menaçant, si elle résistait, de déposer publiquement qu’ils avaient trouvé chez elle un jeune homme enfermé ; Suzanne, ne pouvant par ses prières les ramener à la justice et à la vertu, leur dit : Je sais dans quel péril je me précipite en vous refusant, mais j’aime mieux tomber innocente entre vos mains que de commettre un péché devant Dieu qui me voit. Les vieillards, furieux, jetèrent de grands cris, ouvrirent les portes, et dirent à tous ceux qui arrivaient qu’ils avaient trouvé Suzanne en adultère, et que, malgré leurs efforts, le coupable s’était sauvé. Suzanne, fut conduite le lendemain au tribunal ; sa famille fondait en larmes. Sa réputation plaidait inutilement pour elle ; le témoignage de deux vieillards respectés était accablant. Les juges la crurent coupable, et la condamnèrent à être lapidée. On la menait au supplice, lorsque Dieu inspira le jeune Daniel, âgé seulement de douze ans, qui s’écria au milieu du peuple : Je ne suis point coupable du sang innocent qu’on va verser. Cette audace émut les assistants, l’affaire fut examinée de nouveau ; la vieillesse corrompue des accusateurs n’osa soutenir ses calomnies devant l’enfant prophète ; leur trouble découvrit leur crime, et ils subirent la peine qu’ils avaient voulu faire souffrir à la vertu. La vie de Daniel est remplie de visions et de miracles ; il convertit les idolâtres, consola les Hébreux, et prédit la fin de la captivité, ainsi que la naissance du Rédempteur. L’Écriture cite encore douze autres envoyés de Dieu, qu’elle nomme les petits prophètes ; Osée et Joël sous le règne de Jéroboam ; Amos et Abdias du temps d’Osias ; Jonas à l’époque où Israël était gouverné par Joas ; Michée pendant le règne de Joathan ; Nahum pendant celui d’Achaz ; Habacuc et Sophonie, contemporains de Jérémie et de Daniel ; Aggée et Zacharie, lorsqu’on rebâtissait le temple. Malachie leur succéda, et fut le dernier des prophètes jusqu’à saint Jean-Baptiste. On retrouve dans leurs ouvrages les mêmes reproches contre les péchés des hommes, les mêmes menaces des vengeances de Dieu, et la même certitude de l’arrivée du Sauveur qu’ils annonçaient. Nous dirons seulement quelques mots de Jonas, dont Il avait annoncé aux Ninivites que leur capitale périrait dans quarante jours. Le peuple, effrayé, jeûna, pria, se convertit ; et Dieu, touché de sa soumission, révoqua son arrêt. Jonas en conçut un vif ressentiment, craignant de passer pour un faux prophète. Un jour, étant assis près de la ville à l’ardeur du soleil, Dieu fit croître à l’instant un grand lierre qui le couvrit de son ombrage ; mais le lendemain le Seigneur fit piquer par un ver la racine de cet arbre qui sécha, et Jonas, brûlé par le soleil, souhaita de mourir. Dieu lui dit alors : Vous vous affligez de ce que ce lierre est mort, quoique vous n’ayez point contribué à sa naissance ; et moi, comment n’aurais-je pas été touché de la destruction de Ninive et des prières de cent vingt mille de mes créatures qui habitent cette ville, et ne savent pas encore discerner le bien du mal ? |