L’HISTOIRE ROMAINE À ROME

 

Appendices

Bref sommaire des évènements jusqu’à la mort de César - (705-710).

 

 

Et d’abord, de l’an 705 à 710 [49 à 44 av. J.-C.], dans ces quelques années si dramatiques, César, remarquons-le, n’a fait à Rome que de courts séjours ; et c’est pour l’esprit un étonnement profond que d’énumérer les lois et les travaux créés ou ébauchés par lui, dans les intervalles que lui laisse la guerre.

Premier séjour (705 - Calendes d’avril). César revient de Brindes à Rome après le départ de Pompée pour l’Épire. La guerre d’Italie ou de 60 jours est finie. Il ne reste à Rome que peu de temps, et se précipite en Espagne (bell. civ., 1, 32-33).

Deuxième séjour (Calendes d’octobre : décembre). Il revient d’Ilerda, est nommé dictateur pour la première fois, tient les comices consulaires, est nommé consul pour l’année suivante avec P. Servilius Valia Isauricus, continue les consuls et autres magistrats de l’année dans les proconsulats et autres charges, règle la question des dettes, rappelle les bannis, concède la cité aux Transpadans, et au bout de il jours dépose la dictature. Puis, la veille des Nones de janvier (bell. Civ., 3, 6), il part pour la Grèce. Après Pharsale (705-707) les honneurs s’amoncellent sur lui. Durant son absence, il est fait consul pour 5 ans, et dictateur pour la seconde fois. Du milieu de mars au mois de juin 707, on reste sans nouvelles de lui à Rome (ad Attic., 17, 3). Troubles excités par M. Caelius et Milon, puis après eux par Dolabella (706-707).

Troisième séjour. Enfin César revient en Italie, après les guerres d’Égypte et d’Orient heureusement terminées (septembre 707). Il apaise la révolte de ses légionnaires, est nommé consul et dictateur pour la troisième fois. Il élit consuls (consules suffecti) pour la fin de l’année Q. Fufius Calenus et P. Vatinius, préteur Crisp. Sallustius; il porte les préteurs pour 708 à dix ; élève au nombre de seize les pontifes, augures et quindécemvirs, et ouvre le sénat à des chevaliers, à ses centurions et autres hommes de condition médiocre.

En décembre 707, il part, passe par Lilybée, et va en Afrique. Campagne et bataille de Thapsus (avril 708).

Quatrième séjour. César quitte l’Afrique aux Ides de juin, et arrive à Rome vers la fin du même mois (VI Calend. de sextilis. - 28 juin (b. afr. 98), avril du calendrier nouveau).

A Rome, supplications de 40 jours. Le sénat lui vote 70 licteurs : il atèle des chevaux blancs. Honneurs inouïs : dictature pour dix ans : chaise curule à côté et au-dessus des consuls. Il vote le premier : il aura une statue avec l’inscription César, demi-dieu. — Il célèbre ses triomphes, dédie au peuple un nouveau Forum, élève un temple à Vénus genetrix. Jeux en l’honneur de sa fille. Largesse, banquets, annone réduite et régularisée.

C’est durant ce séjour (4 mois), que César décide que les propréteurs ne garderont qu’un an leur province, que les proconsuls resteront deux ans en charge ; que les juges seront exclusivement pris parmi les sénateurs ou chevaliers (lex judicaria). - Réforme du calendrier.

Fin décembre (708), César part pour l’Espagne. On se rappelle qu’après la campagne d’Ilerda, il y avait laissé Q. Cassius Longinus (b. civ. 2, 21) : mais celui-ci s’était fait détester de tous, et la moitié de ses légionnaires (5 légions) avait fait défection. C. Trebonius, son successeur, n’avait point eu meilleur succès. Les Pompéiens se rendent de tous côtés en Afrique, où Gnæus Pompée les vient rejoindre (708). Après Thapsus, les débris de l’armée républicaine ont aussi passé le détroit. avec Attius Varus et T. Labienus. Ils comptent bientôt 13 légions sous leurs ordres. Les lieutenants de César Q. Pedius et Q. Fabius Maximus ne peuvent leur tenir tête (bell. Hisp. 2, 7. 30). — César arrive enfin à Obulco (Porcuna), à 300 stades de Cordoue (Appien, b. c. 103). La guerre, dont les récits nous arrivent confus, traîne en longueur autour de nombreuses places assiégées successivement Ulia (Montemayor), Corduba, Atequa, (b. Hisp. 3-27). Enfin Pompée, quittant ses retranchements d’Ucubis (non loin du Salado, Rumen Salsum), vient se poster à Munda (auj. Monda entre Ronda et Malaga), pour y livrer la bataille. Elle a lieu le jour des Liberalia (b. Hisp. 31), ou le 17 mars 709. Longtemps indécise et chaudement disputée, elle se termine sur le soir par la défaite des Pompéiens, dont 33.000 seraient morts, et parmi eux Labienus et Varus (ibid. 31). Jadis, s’écrie César, j’avais combattu pour la victoire, aujourd’hui, pour la première fois, j’ai lutté pour la vie ! (Plut. Cœsar 56. Appien 104). Les villes rebellés se soumettent. Gnæus Pompée est tué dans sa fuite ; Sextus se réfugie chez les Cajétans (b. Hisp. 36-40).

La guerre civile est finie : en Espagne, d’ailleurs, les Pompéiens ne songeaient plus à reconstituer la république romaine : ils ne voulaient que fonder un état séparatiste, et donner pâture à leurs haines, et à leurs cupidités. De la république, de la liberté, il n’était point question chez eux. Ce parti était désormais condamné.

Cinquième et dernier séjour (octobre 709 - mars 710). Triomphe de César et de ses lieutenants Pedius et Fabius Maximus. — Supplications de 50 jours. — César dictateur à vie. Il prend le titre d’Imperator, avant son nom, pour lui et pour ses héritiers. Préfet des mœurs : consul pour dix ans. Il a le droit de nommer ou indiquer les magistrats. Il porte les sénateurs à 900 : crée des familles patriciennes, donne à 10 prétoriens le titre et le rang de consulaires, nomme 14 préteurs pour l’année courante, en nomme 16 pour 710, avec 40 questeurs, porte à 6 au lieu de 4 le nombre des édiles. — Il revêt en public la pourpre triomphale, la couronne de laurier : sa tête est figurée sur les monnaies : le mois de juillet (Julius) lui est consacré. — Restauration des colonies de Corinthe et de Carthage.

Plans de campagne contre les Parthes. César veut soumettre les Daces en passant, puis les peuples de la région du Caucase, puis s’en aller venger la défaite de Crassus, et refouler au-delà d’une frontière de bonne défense le seul ennemi extérieur dont Rome ait encore souci.

Il a fixé son départ au quatrième jour après les Ides de mars : ses troupes l’attendent en Illyrie. Il a nommé les magistrats pour 711 et 712 : Fabius Parisa et Hirtius. Decimus Brutus et Munatius Plancus occuperont successivement le consulat : Asinius Pollio ira en Espagne ultérieure, Lepidus gouvernera la Citérieure et la Narbonnaise : le même Munatius Plancus aura la Transalpine, M. Brutus la Macédoine, C. Cassius la Syrie. Toutes les provinces sont distribuées.

Les tentatives d’intronisation de la royauté marquent ces derniers temps. César a déjà puni les deux tribuns qui ont arraché un diadème posé sur la tète de sa statue : déjà Antoine, aux Lupercales, à plusieurs reprises a tenté de le couronner lui-même, et voici que les gardiens des oracles sibyllins annoncent qu’un roi seul pourra vaincre les Parthes.

Pendant ce temps, la conjuration s’est formée. Elle compte plus de 60 adhérents, et parmi eux bon nombre des lieutenants anciens ou nouveaux du dictateur, poussés par la haine ou l’envie, ou l’ambition non satisfaite. Bien peu, sauf J. Brutus et quelques autres se dévouent à l’idée républicaine et à la liberté. Citons Decimus Brutus, Trebonius, Minucius Basilus, Publius et Lucius Casca, Tillius Cimber, Servius Galba. Mais l’âme de la conspiration, c’est C. Cassius et M. Junius Brutus.

Les rumeurs qui circulent, la crainte de se voir découverts poussent les conjurés à hâter leur coup. César a convoqué le sénat pour le jour des Ides (15 mars). Il s’y rend. Là, pendant qu’Antoine est retenu au dehors par Trebonius, les conjurés l’entourent. Tillius Cimber s’approche, feignant de lui demander la grâce de son frère, banni de Rome, lui saisit et rabat la toge. Casca le frappe par derrière : tous les autres se jettent sur lui. Et toi aussi, Brutus ! s’écrie la victime : puis se voyant enveloppé, César ramène sa toge sur son visage, se laisse frapper sans résistance et tombe au pied de la statue de Pompée, percé de vingt-trois blessures. Il était dans sa cinquante-sixième année.

 

Nous renvoyons ici le lecteur aux sources originales, à Dion Cassius (44, 12-20), à Appien (111-123), à Plutarque surtout (Cœs. 60, 69. Brut. 14-17), à Suétone (Cœs. 80-82) et enfin chez les modernes au récit exact et circonstancié de M. Merivale (hist. of the Rom. under the Empire, 2, c. 21. et 3, c. 22).

Le jugement des contemporains ne se fit point attendre et devança l’histoire. La chose a été virilement faite, s’écrie Cicéron, mais ce fut un dessein d’enfants ! Qui donc ne voit qu’il laisse un héritier de sa royauté ? (Ad Att. 14, 21, cf. ad Att. 15, 4 : Excisa enim est arbor, non evulsa. Itaque quam fruticetur, vides.) On a coupé l’arbre, au lieu de l’arracher. Aussi vois comme il repousse !

On sait la suite !

C. A. Alexandre