LA VIE PRIVÉE DES ANCIENS

TOME II — LA FAMILLE DANS L’ANTIQUITÉ

CONSTITUTION DE LA FAMILLE — II. - USAGES ÉGYPTIENS

 

 

LES REPAS ÉGYPTIENS. - LES MORTS À TABLE. - LES PRIÈRES. - LES ABLUTIONS. - LES USTENSILES DE TABLE. - LES RELATIONS SOCIALES. - LA MUSIQUE ET LA DANSE. - JEUX DES ÉGYPTIENS. - LA PROMENADE.

 

LES REPAS ÉGYPTIENS. — Les monuments ne nous fournissent pas sur la salle à manger et en général sur les usages de la table en Égypte des renseignements aussi précis qu’on pourrait le désirer. Nous pouvons néanmoins consulter à ce sujet les représentations de repas funèbres qui, sauf certains rites particuliers, comme la mise du collier funéraire que nous voyons dans la figure 5, peuvent nous donner dans une certaine mesure une idée de la manière dont on prenait les repas.

Un fait qui semble absolument démontré, c’est que l’usage d’une table commune, où plusieurs personnes dînent ensemble en puisant dans les mêmes plats, était à peu près inconnu.

Les tables étaient fort exiguës et ressemblaient assez à nos petits guéridons posés sur un seul pied. La figure 5 nous montre une de ces tables sur laquelle sont divers aliments, mais ils y sont seulement déposés et même d’une manière assez encombrante. C’est qu’en effet on ne mangeait pas sur la table ; on y plaçait les aliments, mais on ne les consommait qu’après les avoir retirés.

La table au reste n’était pas du tout un meuble nécessaire à un Égyptien qui voulait faire un repas. La figure 6 nous montre les provisions contenues dans des paniers et les dîneurs qui y prennent à même le mets qui leur convient. Les liquides se servaient dans de petites tasses que le serviteur apportait et dans lesquelles il versait ensuite la boisson.

Athénée nous apprend que ces usages subsistaient encore au temps de la domination romaine. Il y a, dit-il, une troisième sorte de soupers que j’appelle ceux des Égyptiens. On n’y dresse point de tables, mais les plats y sont portés à la ronde. Les habitants de l’Égypte gardèrent donc longtemps leurs habitudes traditionnelles. Il est probable toutefois que celle-ci doit s’appliquer seulement à l’intérieur du pays, car ceux qui demeuraient à Alexandrie et dans les villes du Delta avaient complètement adopté les usages de la Grèce.

 

LES MORTS À TABLE. — Hérodote rapporte qu’aux festins des riches, on portait après le repas, devant les convives, un petit cercueil avec une figure en bois si bien travaillée et si bien peinte qu’elle représentait parfaitement un mort. On la montrait à chacun des invités en disant : Jetez les yeux sur cet homme, vous lui ressemblerez après votre mort ; buvez donc maintenant et vous divertissez. Cette figure mortuaire était probablement une image d’Osiris, type de toutes les momies humaines. On a attribué, sans beaucoup de preuves, à l’usage dont parle Hérodote, la confection d’un certain nombre de statuettes trouvées dans les tombeaux (fig. 7).

Plutarque parle également de cet usage, auquel il semble vouloir donner une signification morale plus élevée.

Quant à la façon de faire d’Égypte, où ils ont accoutumé d’apporter ordinairement au milieu d’un festin l’anatomie sèche d’un corps d’homme mort et le montrer à tous les convives, en les admonestant de se souvenir qu’en peu de temps ils seront tels, encore que ce soit un fort malplaisant et importun entremets, toutefois a-t-il quelque commodité. Car s’il ne convie la compagnie à faire grande chère et à se donner du plaisir, au moins les incite-t-il à se porter amour et dilection les uns aux autres, les admonestant de se souvenir, que la vie étant courte de soi-même, ils ne cherchent pas à la faire trouver longue par affaires fascheux et ennuyeux. (Plutarque, Amyot, Banquet des sept sages.)

 

LES PRIÈRES. — Les Égyptiens ne prenaient jamais aucun repas sans réciter les prières d’usage. L’historien Josèphe raconte que, lorsque les soixante-douze vieillards chargés par Ptolémée Philadelphe de faire une traduction de la Bible vinrent au palais, le roi les invita à dîner et chargea Éléazar de réciter les prières pour ses compatriotes, au lieu de laisser ce soin aux prêtres égyptiens qui s’en acquittaient habituellement.

Lorsque les députés eurent pris place, dit Josèphe, le roi commanda à l’intendant du palais de les faire servir selon l’usage de leur pays. Il avait cru devoir éloigner de sa table ses prêtres et ses sacrificateurs, et ceux qui avaient coutume de réciter la prière avant le repas ; il engagea donc un des députés qui était prêtre, et qui s’appelait Éléazar, à la faire. Éléazar se leva pour s’acquitter de cette pieuse fonction, et debout au milieu de la compagnie, il fit des vœux pour la prospérité du roi et de ses sujets ; l’assemblée y applaudit par de vives acclamations : chacun ensuite s’empressa de faire honneur aux mets qu’on lui servait.

 

LES ABLUTIONS. — Les Égyptiens se lavaient toujours les mains avant de commencer leur repas, et il est probable que l’ablution des mains devait recommencer après chaque service. C’est un usage que nous trouvons du reste chez presque tous les peuples de l’antiquité et qui s’explique par la nécessité où on était de prendre les mets avec les doigts.

L’ablution des mains se faisait de plusieurs manières. Habituellement on se servait d’aiguières dans le genre de celles que nous reproduisons figures 8 et 9. Le serviteur versait sur les doigts du convive le contenu du vase, qui le plus souvent renfermait une eau odorante. Dans d’autres circonstances, on se lavait simplement les mains dans une coupe (fig.10).

L’eau du Nil était fort prisée, car Polybe nous apprend que Ptolémée Philadelphe, ayant marié sa fille à Antiochus, roi de Syrie, lui faisait envoyer régulièrement de l’eau du Nil, parce que cette princesse n’en voulait pas boire d’autre ; néanmoins l’ivrognerie paraît avoir été, au moins sous la domination romaine, un vice commun en Égypte. Athénée rapporte que les Égyptiens sont passionnés pour le vin.

Ce qui le prouve, dit-il, c’est qu’il n’y a que chez eux on ce soit comme une loi de manger avant tout autre aliment des choux bouillis or la même coutume s’observe encore actuellement chez eux : c’est d’après cet usage que bien des gens commencent par avaler de la graine de chou pour se préserver de l’ivresse.

Ceux qui donnent aujourd’hui des repas, surtout les habitants de la belle ville d’Alexandrie, crient, tempêtent, jurent contre l’échanson, le serviteur, le cuisinier. Les esclaves reçoivent des coups de poing ; l’un d’un côté, l’autre de l’autre, fondent en pleurs ; de sorte que les convives soupent avec tous les désagréments imaginables. (Athénée, Deipnosophistes, I, p. 34.)

 

LES USTENSILES DE TABLE. — Les Égyptiens employaient des ustensiles dont la forme, infiniment variée, peut être considérée comme le type le plus ancien de la plupart de ceux dont nous nous servons aujourd’hui. Parmi les objets usuels dont nous donnons ici la représentation, un certain nombre a été déposé dans les tombeaux ; les autres sont figurés sur les monuments, de l’époque pharaonique. Quelques-uns appartiennent spécialement à l’Égypte et ne se trouvent dans aucune autre contrée, d’autres semblent être au contraire le point de départ d’une forme que les Grecs et les Romains ont ensuite adoptée.

Ainsi les figures 11 à 14 nous montrent des amphores, c’est-à-dire des vases allongés, et généralement pointus par le bas, de façon à ne pouvoir se soutenir eux-mêmes sur leur base. Ce genre de récipient dont les plus anciens modèles sont en Égypte a persisté pendant toute l’antiquité.

Ces vases étaient généralement destinés à contenir des liquides ou des substances alimentaires conservées. La plupart des pots égyptiens présentent une forme allongée (fig. 15 à 35), et même lorsque leur base n’est pas pointue ou arrondie, comme cela arrive souvent, ils auraient été d’un emploi très difficile si les Égyptiens avaient eu comme nous l’habitude de déposer leurs ustensiles sui des tables ou sur des meubles à surface plate. Les vases contenant des approvisionnements se déposaient dans des endroits répondant à nos caves et à nos celliers et ils étaient probablement couchés sur du sable, peut-être même enterrés à une certaine profondeur. On allait les chercher pour les besoins du service et on les remettait ensuite à leur place, mais en aucun ; cas ils n’étaient considérés comme faisant partie des meubles de l’appartement. Il ne s’agit ici bien entendu que des pots usuels et non des vases d’ornement qu’on employait comme décoration et dont nous nous occuperons en temps et lieu.

On voit aussi par les figures qui précèdent que, à côté du vase fin et de forme allongée, on trouve jusqu’au récipient en forme de boule, et qu’une multitude d’ustensiles en terre ou en métal, avec ou sans anses, servaient aux Égyptiens pour contenir des liquides. Les plats n’étaient pas moins nombreux ni moins curieux dans leur forme et il y en a quelques-uns dont la destination pourrait aisément s’établir : nous avons ici des casseroles, des tourtières, etc. (fig. 36 à 40).

Voici maintenant des plats dont la forme aussi bien que le décor appartiennent spécialement à l’Égypte : l’un présente l’apparence d’une oie, l’autre d’une coquille. Ces plats étaient probablement destinés à contenir quelques mets particuliers, mais aucun texte ne nous vient en aide pour savoir leur usage exact, car les papyrus, qui fournissent des renseignements si précis au sujet de la vie future, sont à peu près muets quand il s’agit de l’existence terrestre et quotidienne (fig. 41 à 44).

Les tombeaux égyptiens ont été, comme on sait, une véritable mine pour les ustensiles de ménage. On y a découvert entre autres des cuillères de bronze, quelquefois dorées, et d’autres en ivoire. Les unes sont surtout remarquables par leur manche, qui se termine souvent par une tête d’oiseau. D’autres sont en bois dur et ressemblent exactement aux cuillères dont se servent encore aujourd’hui les cuisinières. D’autres affectent au contraire des formes bizarres comme on en trouve si souvent dans les objets égyptiens (fig. 45 à 50).

Les Égyptiens se servaient d’ustensiles du même genre pour puiser les liquides dans des grands vases. Ce sont de petits récipients dont le manche est extrêmement long et dont la forme générale rappelle assez celle de nos pipes (fig. 51 à 53).

La quantité de cuillères qu’on a recueillies en Égypte est très considérable, mais on n’a pas retrouvé un seul ustensile qui puisse être employé comme nos fourchettes. Nous sommes donc obligés d’admettre que les Égyptiens, aussi bien que les Grecs et les Romains, mangeaient la viande avec les doigts.

 

LES RELATIONS SOCIALES. — Hérodote raconte comment dans l’ancienne Égypte on se saluait en s’abordant : Avec les Lacédémoniens, dit-il, les Égyptiens sont d’accord sur cet usage : lorsqu’ils rencontrent un vieillard, les jeunes gens lui cèdent le pas et font un détour ; à son approche, ils se lèvent de leur siège. Mais sur celui qui suit, ils ne se rapportent à aucune autre nation hellénique : au lieu de se saluer de la voix dans les rues, ils se saluent y en laissant tomber leur main jusqu’au genou. Les monuments confirment le dire de l’historien grec et on voit sur plusieurs peintures égyptiennes des hommes laissant tomber leur main jusqu’au genou en signe de salutation. C’était pour eux l’équivalent de la main portée au chapeau dans les sociétés modernes.

Chaque personne qui entrait allait saluer les maîtres de la maison, qui leur souhaitaient la bienvenue. C’était un usage parmi les dames d’échanger une fleur du bouquet qu’elles portaient toujours avec elles. Puis on félicitait la maîtresse de la maison sur l’élégance de son ameublement, car, d’après un usage que nous retrouverons en Grèce, il eût été malhonnête de ne pas exprimer son ravissement pour le goût exquis des hôtes qui vous recevaient.

Des serviteurs apportaient à chaque nouvel arrivant une guirlande de fleurs, en même temps qu’ils approchaient un siège. Un d’eux servait ensuite des rafraîchissements, et un autre venait reprendre les coupes vides. Chaque personne qui avait bu recevait une serviette pour s’essuyer la bouche. A mesure qu’un nouveau venu arrivait, on faisait circuler des rafraîchissements à la ronde (fig. 54).

La musique et la danse égayaient toujours ces fêtes, où les dames venaient en grande toilette et portaient habituellement une fleur de lotus sur le front. Il est certain que les dames égyptiennes aimaient passionnément ce que nous appelons aujourd’hui le monde, et leurs réunions de plaisir sont figurées avec une grande naïveté sur les bas-reliefs peints qui sont au British Museum et qui proviennent des ruines de Thèbes (fig. 55).

Les Égyptiens riches connaissaient et aimaient toutes les superfluités de la vie, ainsi que le témoigne ce passage du papyrus Anastasi : Tu arrives à la belle retraite que tu t’es ménagée ; tu te rassasies de vin, de bière, de mets, de gâteaux ; des bœufs ont été tués, des vins débouchés ; des chants agréables sont pour toi ; ton chef parfumeur te parfume d’essences ; ton chef d’irrigation apporte des guirlandes de fleurs, etc.

 

LA MUSIQUE ET LA DANSE. — Si on en juge par les monuments, la musique et la« danse étaient fort en honneur dans la société égyptienne. Sur un assez grand nombre de peintures, on voit des chanteurs, qui sont souvent accompagnés de joueurs d’instruments. Les personnes qui chantaient avaient l’habitude d’indiquer le rythme en battant la mesure avec leurs mains, comme on le voit sur la figure 56.

La harpe et la flûte sont les instruments dont on se sert habituellement pour accompagner le chant. La figure 57 montre un chanteur, dont les bras obéissent à un mouvement rythmé et qui a en face de lui un harpiste et un joueur de flirte simple. Cette flûte est très longue et n’est pas celle qu’on trouve le plus souvent sur les monuments : on y rencontre bien plus communément la flûte double, telle qu’on la voit représentée sur la figure 58. Ici nous avons plusieurs chanteurs dont les bras se meuvent à l’unisson ; c’est un véritable concert vocal.

Au contraire, la figure 59 nous fait voir un concert instrumental entièrement exécuté par des femmes. La première a une harpe, la seconde une cithare, la troisième une double flûte, la quatrième une sorte de lyre et la cinquième un tambourin de forme quadrangulaire. Le petit cône placé sur la tête de ces musiciennes montre qu’elles sont réunies pour une cérémonie funèbre.

La danse était aussi bien que le chant un amusement favori des Égyptiens. Les hommes se livraient autant que les femmes à cet exercice ; toutefois, les textes faisant défaut, il est difficile de distinguer sur les monuments si les personnages que l’on voit danser exercent une profession pour amuser les autres, comme cela se fait en Orient, ou s’ils dansent pour se divertir eux-mêmes, comme cela se pratique chez nous.

Une peinture de Thèbes (figure 60) montre une danse exécutée avec l’accompagnement de chanteurs qui battent la mesure avec leurs mains, et d’une joueuse de castagnettes. Malgré ce luxe d’accompagnement, le personnage qui est en l’air ressemble à un acrobate qui, saute plutôt qu’à un danseur qui exécute un mouvement rythmé. La mesure est beaucoup mieux exprimée sur la figure 61, où l’on voit deux danseurs, dont l’un s’accompagne lui-même en frappant sur son tambourin. Quant aux danseurs représentés sur la figure 62, l’attitude que l’artiste leur a donnée semble indiquer un mouvement de rotation assez rapide.

 

JEUX DES ÉGYPTIENS. — Le jeu de balle figure sur les plus anciens monuments de l’Égypte. Plusieurs balles ont été retrouvées dans les tombeaux de ce pays ; le catalogue du musée de Boulaq en signale une qui est formée de feuilles de papyrus ployées et qui remonte à la XIe dynastie ; elle a été trouvée à Thèbes. Mais c’est surtout dans les hypogées de Beni Hassan qu’on peut voir les jeux qui divertissaient les jeunes Égyptiens ; le jeu de balle y figure parmi les autres. Ces joueurs égyptiens étaient des gens assez habiles, et beaucoup de nos lycéens les plus ardents à ce jeu répéteraient difficilement leurs exercices.

Quelquefois les joueurs se contentent de faire sauter plusieurs balles à la fois (fig. 63 I_2023 dans fichier), et en reçoivent une dans la main pendant que les deux autres sont en l’air. Dans une autre peinture (fig. 64 I_2024 dans fichier), les joueurs, montés sur le dos les uns des autres, se renvoient mutuellement la balle. La manière dont ils sont enlevés par leurs camarades pourrait bien paraître un peu étrange et, à vrai dire, ceux qu’on porte sont assis d’une façon qui n’est assurément pas bien commode, mais cela vient peut-être simplement de l’inexpérience de l’artiste. Néanmoins quelques-uns de ces exercices ressemblent à ceux que font les acrobates. Voilà en effet dans cette même figure 64 un personnage qui se tient sur la tête en se croisant les bras derrière le dos et en levant les jambes tout droit en l’air avec une rectitude qui n’est pas très élégante, mais qui ne doit pas être non plus très aisée à garder.

La culbute joue naturellement un rôle assez important dans les exercices des Égyptiens. Nous voyons sur les peintures de Beni Hassan des jeunes hommes qui se jettent en arrière en faisant la roue avec leurs bras, d’autres qui montent les uns sur les autres pour montrer leur force et leur souplesse, d’autres enfin qui se livrent à toutes les contorsions dont le corps humain est susceptible.

Parmi les tours qui sont représentés, il y en a un qui consiste à être assis par terre, les jambes étendues, et à se relever sans mettre les mains et sans se servir des genoux. Ailleurs on voit deux hommes balançant par les bras deux femmes étendues qu’ils relèvent alternativement (fig. 65).

II ne faudrait pas croire cependant que les jeux des anciens Égyptiens consistassent uniquement en tours de force. Les amusements, analogues à notre jeu de dames ou à notre jeu d’échecs y étaient au contraire fort en honneur (fig. 66). On les voit figurer sur les peintures qui décorent les hypogées ; il parait que les rois eux-mêmes ne dédaignaient pas d’en user, car une sculpture de Thèbes représente Ramsès XII en train de poser son pion sur la tablette du jeu. Nos musées renferment de petits pions en ivoire, en poterie ou en verre, qui proviennent de jeux de cette nature.

On a trouvé aussi en Égypte des dés cubiques et couverts de petits trous noirs, dont le nombre est différent sur chaque face, comme ceux dont nous nous se servons (fig. 67). Nous avons au musée égyptien du Louvre (salle historique, armoire C) une boite à jeu ou damier de forme rectangulaire, oblongue, en faïence verdâtre, qui a appartenu à la reine Hatasou. A l’intérieur, il y a une cavité destinée à contenir les pions dont se servaient les joueurs. La partie supérieure porte une division de vingt cases et la partie inférieure une division de trente cases. Les hiéroglyphes portent avec le nom de la reine Hatasou des vœux de santé et de stabilité. Une autre boîte du même genre (salle civile, armoire K), montre dans sa décoration le propriétaire occupé à diriger les pièces. On attribue à ce jeu un sens astronomique.

Une boîte analogue figure au musée de Boulaq ; elle a été trouvée clans un tombeau de Thèbes. Des divisions en lignes droites établissent comme une sorte d’échiquier sur la partie supérieure. La boîte qui n’est qu’un damier est pourvue d’un tiroir destiné à contenir les pions. Les légendes inscrites sur ce meuble montrent que les cases du damier avaient chacune une désignation particulière, et ce nom paraît astronomique.

Le jeu de cerceau se trouve sur les monuments égyptiens (fig. 68). Le cerceau est très petit et comme les joueurs ont une baguette munie de crochets qu’ils emboîtent est probable qu’ils s’efforcent de faire sauter le cerceau en l’air plutôt que de le faire simplement rouler sur le sol.

Si le jeu de la main chaude n’est pas d’origine égyptienne, on voit dans les peintures des hypogées des scènes qui y ressemblent beaucoup. Un personnage agenouillé baisse la tête et présente la partie postérieure de son corps, sans doute pour y recevoir quelque claque. Néanmoins comme les joueurs ont le poing fermé, et non pas la main ouverte, il doit y avoir quelque différence (fig. 69). Peut-être aussi faut-il ne voir là qu’une les Italiens appellent la morra et qui paraît avoir été connu de plusieurs peuples de l’Antiquité.

 

LA PROMENADE. — Les Égyptiens aimaient la promenade ; les berges plantées d’arbres qui bordaient le fleuve et les canaux, à l’approche des villes, étaient, pour les oisifs, un lieu de réunion et de conversation.

Les vieillards se servaient de cannes qui ne différaient pas beaucoup des nôtres ; quelques-unes sont pourvues d’inscriptions comme celle-ci : bon bâton pour soutenir la vieillesse. Le nom des propriétaires est généralement gravé sur ces cannes, dont on peut voir divers échantillons dans nos musées. Au reste, le plus souvent les cannes qu’on a retrouvées sont des badines comme les nôtres (fig. 70-71).

Toutefois les gens aisés sortaient plus volontiers dans des palanquins notre figure 72 montre la construction de ces palanquins, derrière lesquels un serviteur tenait une espèce de grand bouclier recouvert en peau de bête, destiné à servir de capote. Le palanquin n’était d’ailleurs usité que pour aller dans un endroit très rapproché et quand on n’était pas bien pressé d’y arriver ; autrement on employait les chars.

La forme des chars est à peu près uniforme, mais fort élégante (fig. 73). La caisse s’ouvrait par derrière et était arrondie par devant. Quelquefois le milieu de cette caisse, mais le plus souvent son extrémité postérieure repose immédiatement sur l’essieu qui est en métal et dont les extrémités sont percées de trous où on plaçait des chevillettes pour empêcher l’écartement des roues. A l’extrémité du timon, on voit le joug attaché aux harnais par des espèces d’anneaux. Les roues au nombre de deux ont de quatre à six raies. Elles devaient avoir une certaine largeur pour ne pas s’enfoncer dans le sol où elles roulaient, mais il est difficile de s’en faire une idée bien juste à cause de l’absence de perspective sur les monuments figurés. Elles paraissent avoir toujours été en métal : mais la caisse était en bois orné de peintures, et quelquefois plaqué de métaux précieux. Leur légèreté permet même de penser que quelques-unes pouvaient être entièrement en métal. La caisse était solidement établie sur l’essieu : des montants en métal la retenaient même au timon, et une espèce de traverse, quelquefois terminée par une fleur de lotus, en augmentait la solidité ; mais il est remarquable que l’essieu ait été placé à l’extrémité du char et non pas au milieu.