Les Francs, comme toutes les nations barbares que l’invasion avaient mises en contact avec l’Empire romain, finirent par subir l’influence de ses idées, et un peu plus tard celle de sa politique, après avoir commencé par attaquer ses frontières et tout en continuant de travailler à sa ruine. Pendant qu’ils poursuivaient sur le Rhin l’interminable guerre dont César et Arioviste avaient donné le signal, et qu’ils préludaient à la conquête des Gaules en y promenant le ravage au retour de chaque printemps, ils étaient eux-mêmes conquis en quelque sorte par le spectacle qu’ils avaient sous les yeux, et se laissaient séduire à leur insu aux attraits de cette civilisation dont ils dispersaient les débris devant eux. Comme les Suèves du temps d’Auguste, comme les Marcomans du temps d’Adrien et de Marc-Aurèle, les Francs du IIIe siècle apprirent de bonne heure qu’il était encore plus commode de prendre l’argent des Romains que de le leur enlever, et acceptèrent sans scrupule la mission de le défendre contre ses autres ennemis tout en se réservent pour eux-mêmes la liberté de le piller. Ce fut là, nous l’avons vu[1], leur ambition et leur rôle pendant cent cinquante ans, depuis Gallien jusqu’à Théodose ; depuis leur première apparition sur le Rhin jusqu’au moment où un de leurs chefs, Arbogast, se crut assez fort pour pendre Valentinien. III dans son palais et placer sa créature sur le trône d’Occident. Durant ce long intervalle on les voit passer, dans leurs relations avec les Romains, par toutes les phases que les autres tribus de la Germanie avaient parcourues avant eux. Ceux qui obtenaient la permission de se fixer sur le territoire de l’Empire servaient dans les armées impériales, et ceux qui restaient sur la rive orientale du Rhin recevaient des rois de la main des empereurs[2]. Chargés d’abord par Gallien de la garde du fleuve, à titre de simples alliés[3], ils s’introduisent déjà, sous ce même Gallien, dans les armées romaines à titre d’auxiliaires[4]. Probus, Maximien-Hercule et Constance Chlore parsèment la Gaule de leurs colonies. Constantin leur livre les hautes charges de l’administration et de la milice, tout en continuant de les exterminer sur le Rhin et de les jeter à Rome aux bêtes de l’amphithéâtre. Il parut leur avoir livré l’Empire lui-même en mourant, et le règne de ses fils est déjà celui des Francs dont leur palais est rempli. A partir de ce moment, toutes les révolutions de l’Occident sont préparées par leurs intrigues et s’accomplissent par leurs Mains. Nous avons cité l’usurpation de Magnence, celle de Silvanus, l’avènement de Julien, celui de Maxime et la chute de Gratien, puis la mort de Maxime, puis celle de Valentinien II, et enfin le règne du franc Arbogast, sous le nom du rhéteur Eugène[5]. La postérité de Théodose, comme celle de Constantin, ne put se maintenir que par leur secours, et comme celle de Constantin, elle trouva bientôt une cause de ruine dans cette protection dangereuse. Le vandale Stilichon, chargé par Théodose de gouverner l’empire d’Occident sous le nom d’Honorius, se hâta de conclure la paix avec toutes les nations germaniques, depuis la source du Rhin jusqu’à son embouchure (395), en confiant de nouveau aux tribus franques la garde principale du fleuve[6]. Quelques années plus tard, en 398, Marcomir et Sunno, deux de leurs princes, ayant violé les traités, l’un d’eux fut livré aux Romains, qui l’exilèrent en Étrurie ; l’autre ayant voulu venger son frère, fut tué par les Francs eux-mêmes[7]. Stilichon choisit d’autres rois à leur place[8]. Mais en 406, le dernier jour de décembre, cette barrière du Rhin, tant de fois abattue et tant de fois relevée, fut renversée pour toujours par un dernier flot qui jeta en même temps sur la Gaule trois nations barbares, les Vandales, les Suèves et les Alains, suivis bientôt des Burgondes[9]. Les Francs se font d’abord tailler en pièces sur les rives du fleuve, en essayant de les défendre[10], et se joignent ensuite aux envahisseurs pour les aider à démembrer l’Empire. C’est ici l’un des points les plus délicats et les plus obscurs de leur histoire, et nous croyons devoir nous arrêter un moment pour l’éclaircir. Nous voyons par la Notice de l’Empire qu’au commencement du Ve siècle, c’est-à-dire au moment même où s’accomplissait la grande invasion de 406, il y avait dans les armées romaines jusqu’à neuf cohortes de Francs auxiliaires incorporés dans les légions, savoir : 1° DANS L’EMPIRE D’ORIENT.Sub dispositione viri spectabilis, ducis Thebaïdos. 1. Cohors undecima Chamavarum, Peamu (Panopolis ?) 2. Cahors septima Francorum, Diospolis. Et parmi les auxilia palatina, 1. Une cohorte de Salii. 2° DANS L’EMPIRE D’OCCIDENT.Dans la Gaule, 1. Salii seniores. 2. Bructeri. 3. Ampsivari. 4. Læti Franci, Rhedonas. En Espagne, 1. Salii juniores gallicani. Et parmi les auxilia palatina, Salii gallicani, Il y avait en outre trois régiments de cavalerie franque (alæ) dans l’empire d’Orient : 1° EN EGYPTE,Ala prima Francorum, Appollonos. 2° EN PHÉNICIE,Ala prima Francorum, Cumæ. 3° EN MÉSOPOTAMIE,Ala octava Flavia Francorum, Ripaltæ. Il faut sans doute ajouter à cela tous les corps de troupes désignés dans la Notice, sous le nom de Bataves, puisque nous savons que les Francs étaient établis dans l’île des anciens Bataves, avant le milieu du IVe siècle. Nous aurons de plus, par conséquent : 1° EN ORIENT,Sub dispositione viri Illustris Magistri militum præsentatis, 1. Equites Batavi juniores. 2° EN OCCIDENT,Inter auxilia palatina, 1. Batavi juniors, dans la Gaule. 2. Batavi, idem. Sub dispositione viri Illustris Comitis et Magistri equitum præsentatis. 1. Equites Batavi seniores, dans la Gaule. 2. Equites Batavi juniores, idem. Sub dispositione viri Spectabilis Comitis provinciæ Rheticæ primæ et secundæ. 1. Tribunus cohortis novæ Batavorum. Et dans la Gaule encore,1. Præfectus lætorum Batavorum Nemetacensium, Atrebatis Belgicæ secundæ. 2. Præfectus lœtorum Batavorum, Baiocas. 3. Præpositus lætorum Batavorum Contraginensium, Neviomago Belgicæ secundæ. Il faut y ajouter encore les nombreuses colonies de Lètes répandues sur la surface des Gaules, et sorties de celles des tribus transrhénanes qui faisaient partie de la confédération des Francs. Enfin, nous savons que Pile des Bataves avait été cédée à l’une de leurs tribus par Julien, et nous ne voyons pas qu’aucun de ses successeurs ait entreprit de les en chasser. Nous avons constaté, au contraire, que ce système d’alliances s’était étendu successivement à presque toutes les tribus franques de la rive orientale du Rhin, et que celles-ci avaient relevé, pour ainsi dire, tous les postes de confiance que la politique des empereurs avait autrefois cédés, sur cette li mite, aux anciennes tribus des Sicambres, des Ubii, des Suèves ; et saint Jérôme nous apprend qu’elles occupaient tout le pays compris entre celui des Saxons au nord, et celui des Allemane au midi[11]. En 406, elles occupaient encore les mêmes contrées, puisqu’elles se firent massacrer en les défendant ; et un peu plus tard, nous les trouvons au sein de la Gaule, promenant partout le fer et le feu, brûlant Trèves, brûlant Cologne, brûlant Mayence, et les ruinant de fond en comble[12]. D’un autre côté, nous trouvons dans la Notice de l’Empire une lacune considérable à l’endroit de la première et de la seconde Belgiques. Ainsi, le commandant de la seconde Belgique (dux Belgicæ secundo) n’avait sous son autorité que : 1° Une compagnie de Bataves Contraginenses, à Noyon ; 2° une cohorte de Lètes Nerviens (Lœtorum Nerviorum), à Fanomartis (Famars) ; 3° une compagnie de Lètes Bataves (Lœtorum Batavorum Nemetacensium), à Arras ; 4° une compagnie de Lètes Gentils (Lœtorum Gentitium), à Rheims et à Senlis ; 5° une compagnie de Sarmates Gentils (Sarmatorum Gentitum) ; à Rheims et Amiens. La Belgique première était gardée, 1° par une compagnie de Lètes Astures (Astorum), et 2° par une autre Compagnie de Lètes Lingons (Lœtorum Lingonensium), dispersés çà et là sur son territoire. Tous ces postes sont fort ‘éloignés du Rhin. On est donc autorisé, par cela même, à croire que les Romains avaient abandonné aux Francs tout l’espace compris entre le fleuve et les positions qu’ils occupaient encore, ou du moins que les Francs s’en étaient eux-mêmes emparés. Cela leur fut d’autant plus facile que Stilichon, pour protéger Rome contre les Goths d’Alaric, avait été obligé de dégarnir cette partie de la frontière, et notamment celle qui répondait au pays des Sicambres, des Cattes et des Chérusques, trois peuples qui, tous les trois, faisaient partie de la ligue des Francs[13]. Ce fut donc alors, selon toute apparence, que l’invasion s’accomplit. Elle s’étendit rapidement sur les deux Belgiques et la Germanie deuxième, pendant que les Burgondes s’emparaient de la Germanie première et de Mayence, qui en était la capitale. Nous voyons qu’en 409, l’année même de la prise de Rome par Alaric ils poursuivaient encore leur vieille querelle avec les Vandales, et venaient de leur tuer vingt mille hommes dans une bataille. Ils se préparaient à les exterminer, lorsque Resplendial, roi des Alains, accourut du Rhin au secours de ses alliés, et força les Francs à lâcher prise[14]. En 411, Trèves, capitale de la Belgique première, leur fut livrée par trahison[15] ; et dans la même année, on les voit proclamer Jovin à Mayence, de concert avec les Burgondes, les Allemans et les Alains[16]. Il semble que la trahison qui livra Trèves aux Barbares ne fut pas la seule ; et il paraîtrait, par un passage de Sidoine Apollinaire[17], que le comte Arbogast, qu’il appelle Potor Mosellœ, ait favorisé leur invasion. Vers la même époque, en 409, les provinces armoricaines proclamèrent leur indépendance, et se constituèrent en république. Voici en quels termes Zosime rend compte de cet événement, l’un de ceux qui ont exercé le plus d’influence sur l’histoire des premiers temps de la monarchie[18] : Après avoir réglé les affaires d’Espagne, Constant retourna auprès de son père Constantin (le tyran), .... laissant à Gérontius le commandement des troupes, avec ordre de garder, à la tète des légions de la Gaule, la route qui conduit de la Gaule en Espagne ; quoique les troupes espagnoles eussent demandé à en être chargées, selon l’usage, ne voulant point que la garde du pays fût confiée à des étrangers.... Cependant, Constant ayant été de nouveau envoyé en Espagne par son père, se fit accompagner par Justus, en qualité de général. Gérontius en fut offensé. Il fit entrer dans son parti les légions d’Espagne, et dans la Gaule il excita les Barbares contre Constantin. Constantin ne se trouva pas en mesure de leur résister, parce que la plus grande partie de ses forces se trouvait alors en Espagne. C’est pourquoi les Barbares d’outre-Rhin envahirent tout à leur fantaisie, et firent si bien, qu’ils réduisirent les habitants de l’île de Bretagne et quelques-uns des peuples de la Gaule à se séparer de l’Empire romain, à se soustraire au joug des lois romaines, et à vivre d’après leurs propres lois. Les Bretons donc prirent les armes ; et voyant qu’il y allait de leur salut, ils parvinrent à mettre leurs cités à l’abri des attaques des Barbares. Toute cette longue côte de l’Armorique et les autres cités de la Gaule suivirent l’exemple des Bretons, secouèrent comme eux le joug des magistrats romains, et se constituèrent en une espèce de république indépendante. On le voit, le voisinage des Francs fut pour beaucoup dans cette célèbre détermination ; l’exemple et le voisinage des Bretons furent encore plus influents ; et enfin les insurrections partielles qui éclatent à la même époque clans toute la Gaule, sous le nom de révoltes des Bagaudes, se rattachent au même besoin et à la même pensée[19]. Nous croyons aussi que la colonisation de l’Armorique par les Bretons de l’île voisine tient de très près aux événements de la Gaule, et ne peut guère s’expliquer que par eux. Nous y reviendrons dans une autre occasion. Quoi qu’il en soit, nous venons de voir que les Francs, après avoir essayé inutilement d’interdire le passage du Rhin’ aux Vandales, aux Alains et aux Suèves, venaient de le franchir à leur suite et de s’associer à leurs ravages. Mais quelles étaient ces tribus franques ? Si l’on peut accorder quelque confiance à l’auteur des Gesta Francorum, nous répondront que dans le nombre se trouvaient celles que commandaient Sunnon et Marcomir, qui, en 598, furent punis, l’un de l’exil, l’autre par la mort, pour avoir violé la paix faite avec les Romains[20]. Dans tous les cas, nous croyons pouvoir affirmer que celle qui devait prévaloir sur toutes les autres, celle qui eut successivement pour rois Chlodion, Mérovée, Childéric et Clovis, était encore de l’autre côté du Rhin. L’auteur des Gestes, Hincmar dans la vie de Saint-Rémy, et Aimoin, le disent positivement ; et nous espérons prouver que Grégoire de Tours et son épitomateur confirment leur témoignage loin de le renverser. L’auteur des Gestes dit[21] : Faramond étant mort, les Francs
élurent Chlodion, son fils.... Or, le roi Chlodion habitait dans le château
de Disbargum, sur les frontières des Thoringiens, au pays de Germanie...
Toutes les contrées qui se trouvent au-delà du Rhin
sont appelées de ce nom. Il s’agit bien dans ce passage d’une contrée transrhénane. Je lis dans la vie de saint Rémy[22] : Et ainsi plusieurs rois chevelus, selon l’usage de la nation, s’étant succédé dans la Thuringe, qui est une contrée de la Germanie, les Francs sortirent du château de Dispargum, dans lequel ils avaient longtemps habité, pour attaquer Tournay et Cambray dans la Belgique ; et de là ils s’emparèrent de tout le pays jusqu’à la Somme. Ici l’équivoque n’est pas possible. Hincmar, qui puisait à des sources contemporaines, n’écrit pas Thoringiam comme l’auteur des Gestes et Grégoire de Tours, mais Turingiam, ce qui ne peut signifier que la Thuringe d’outre-Rhin. Enfin je lis dans Aimoin[23] : A Faramond succéda son fils Chlodion le Chevelu. En ce temps-là les Francs avaient des rois chevelus. Ils attaquèrent donc leurs voisins, ravagèrent les frontières des Thoringiens, qui habitent la Germanie, et s’emparèrent d’un château nommé Disbargum. Et ce fut là que Chlodion fixa le siège de son royaume. Ces trois versions différentes, et pourtant si semblables, ne sont, sauf celle d’Hincmar, que des altérations maladroites de celle de Grégoire de Tours, qui, du reste, est pleine d’obscurité[24] : Plusieurs rapportent que les Francs sont sortis de la Pannonie ; qu’ils se fixèrent d’abord sur les rives du Rhin ; qu’ensuite, ayant franchi le Rhin, ils passèrent dans la Thoringie, et que là ils élurent par bourgades et par cantons des rois chevelus, sortis de la première, et pour ainsi dire, de la plus noble famille d’entre eux.... On rapporte que le roi des Francs était alors Chlogion, homme très vaillant et très illustre dans sa nation. Il habitait le château de Dispargum, qui est sur la frontière des Thoringiens. Ce passage offre des difficultés insurmontables. Et d’abord on a remarqué que, pour se rendre de la Pannonie dans la Thuringe, on n’a pas le Rhin à traverser. Adrien de Valois a donc substitué Mœno à Rheno, sans aucune apparence de raison. L’abbé Dubos, et avant lui le P. Pagi[25], ont trouvé un autre moyen de sortir d’embarras. Ils ont prétendu qu’il fallait lire Tungriam et Tungros au lieu de Thoringiam et Thoringos, contre la foi des manuscrits[26] ; et ils l’entendent du pays de Tongres, près Liège. Dubos, pour étayer ce sentiment, a cité un passage de Procope, par lequel il prétend prouver que les Tungri de la Gaule étaient une colonie des Thoringi d’Allemagne, établie par Auguste dans la Germanie IIe[27]. Mais il suffit de jeter les yeux sus le passage de Procope, pour s’assurer qu’il ne parle que des Toringi d’outre-Rhin[28] ; risquerons donc une autre explication. Remarquons d’abord que Grégoire de Tours dit que les Francs habitèrent d’abord les rivages du Rhin (littoria Rheni amnis). Je crois que c’est à tort qu’on a traduit les rives ou les bords du Rhin. Littus et ripa ne sont point synonymes, même dans la latinité de cette époque. Littora Rheni signifie l’embouchure du Rhin, la partie de la côte voisine de son embouchure. C’est là, en effet, dans le voisinage de l’île des Bataves, et plus tard dans l’île des Bataves elle-même, que nous avons vu les Francs s’établir. Le témoignage de Procope est formel[29]. A l’endroit où le Rhin se jette dans l’Océan se trouvent des marais au milieu desquels habitaient autrefois les Germains, appelés Francs de nos jours, nation barbare, et dans le principe peu considérable. C’est donc en remontant le cours du Rhin, qu’ils arrivèrent dans Pile des Bataves. Repoussés de la rive romaine par les, armées de l’Empire, ils se rejetèrent sur la rive germanique, et s’établirent dans la Thuringe. C’est alors, sana doute, que s’alluma entre eux et les Thuringiens cette guerre terrible dont le roi Thierry rappelle les affreux souvenirs dans Grégoire de Tours[30]. C’est dans ce sens que Grégoire de Tours lui-même a pu dire qu’ils passèrent le Rhin, pour aller se fixer dans la Thuringe ; et ainsi se trouve levée l’une des plus grandes difficultés d’un texte qui jusqu’ici était resté inexplicable. Il ne faut pas oublier que les Francs étaient pirates comme les Saxons, et qu’ils infestèrent longtemps ces parages avant de s’y fixer. Le nom de Mérovée, le plus illustre de leurs rois avant Clovis, en porte encore témoignage aujourd’hui[31]. Quoi qu’il en soit, il reste prouvé que la tribu de Chlodion n’était point une de celles qui étaient depuis longtemps établies dans la Gaule, et qu’elle venait d’outre-Rhin. Or, nous savons que la tribu des Saliens était fixée depuis 358 dans l’île des Bataves[32]. Est-ce à dire que celle de Chlodion n’avait rien de commun avec elle ? II n’existe à notre connaissance d’autre témoignage de leur parenté que la préface de la Loi Salique ; mais il nous parait concluant. Elles sortaient donc d’une même souche ; ce qui n’autorisé pas à les confondre[33]. Il est même probable qu’elles se réunirent, lorsque Chlodion franchit le Rhin. Chlogio, dit Grégoire de Tours[34], ayant envoyé des n éclaireurs jusqu’à la ville de Cambrai, et après avoir tout exploré, suivit lui-même ses éclaireurs, terrassa les Romains et s’empara de la cité. Il y resta peu de temps, et s’empara de tout le pays, jusqu’à la Somme. L’auteur des Gestes ajoute qu’il s’empara par la même occasion de Tournai, qui se trouve en effet sur la même ligne[35]. Quelque temps après, Aetius surprit les Francs au milieu de leur conquête, au moment où ils célébraient les noces d’un de leurs princes, et leur lit essuyer une défaite à Vicus Helenæ, non loin d’Arras[36]. Le P. Pétau[37] et le P. Sirmond[38] placent cet événement sous l’année 445, contrairement à l’opinion du P. Daniel, qui voudrait le faire remonter à l’année 428[39]. Il y eut, en effet, sous la date de 428, une autre expédition d’Aétius contre les Francs, que les chroniques de Prosper et de Cassiodore mentionnent en ces termes : Sous le consulat de Félix et de Taurus, la partie des Gaules voisina du Rhin, dont les Francs s’étaient emparés, fut recouvrée par les armes d’Aétius[40]. Sous le consulat de Felix et de Taurus, Aétius, après avoir massacré un grand nombre de Francs, recouvra la partie des Gaules dont ils s’étaient emparés dans le voisinage du Rhin[41]. Le. P. Daniel a confondu les deux expéditions. Mais Sirmond avait déjà montré l’invraisemblance de cette supposition, en faisant observer qu’au temps de l’expédition dont parle Sidoine, Majorien était encore fart jeune, puisque la femme d’Aétius l’appelle puer[42]. Dès lors, comment aurait-il pu se distinguer trente ans auparavant, en 428, sous le consulat de Félix et de Taurus ? D’ailleurs, et c’est ce qu’on n’a pas assez remarqué, la date de l’expédition de Majorien et d’Aétius, contre les Francs, est fixée par celle de la délivrance de Tours, puisque ces deux événements se suivirent à peu, de distance[43]. Or Dubos a fort bien prouvé que cette délivrance de Tours ne peut se placer que vers la fin de l’année 445[44]. Rien ne prouve que Mérovée ait été fils de Chlodion. Grégoire de Tours se contente de dire que quelques-uns le faisaient descendre, de sa race[45]. Frédégaire est, le premier qui affirme que l’un était le père de l’autre[46]. Mais la fable qui accompagne son récit lui ôte à bon droit toute croyance. D’ailleurs, si Chlodion avait été le père de Mérovée, pourquoi la première race aurait-elle porté le nom du fils et non celui du père ? Pourquoi encore les noms de tous les rois de la première race se trouvent-ils répétés plusieurs fois dans l’histoire de la dynastie, selon l’usage des peuples germaniques, excepté celui de Chlodion ? Il est probable que les deux princes étaient simplement de la même famille[47]. Il n’est pas plus certain que Mérovée ait combattu contre Attila à la journée de Chalons. Grégoire de Tours se contente de dire que les Francs s’y trouvaient[48]. Jornandès n’en dit pas davantage[49], Sidoine Apollinaire nous apprend qu’il y avait aussi des Francs dans l’armée d’Attila[50]. Nous voyons par la suite de son récit que c’étaient les Francs d’outre-Rhin. Nous savons par celui de Jornandès que les Francs de la Gaule combattaient pour les Romains. Il est donc probable que Mérovée, qui avait succédé à Chlodion vers 447, s’y trouvait ; mais ce n’est qu’une présomption. L’histoire de Childéric est connue. Nous y reviendrons d’ailleurs, lorsque nous traiterons la question de l’impôt public. Nous nous contenterons de faire observer ici, avec Dubos, que le fait de la substitution du comte Ægidius au roi Childéric, chassé par ses sujets irrités, n’a rien d’invraisemblable. Nous venons de voir que les Francs, qui sous Chlodion étaient en guerre contre l’Empire, avaient fait leur paix avec lui à l’approche des Huns d’Attila, puisqu’ils combattaient pour les Romains à Châlons. Ils se trouvaient donc placés à son égard dans la position dépendante que d’autres tribus de leur nation avaient autrefois acceptée. Ils étaient comptés parmi les fœderati, et avaient reçu sans doute à ce titre les terres dont ils s’étaient emparés. Ils recevaient des ordres en cette qualité des officiers de l’Empire, tout en conservant leurs propres rois. Dès lors qu’y a-t-il d’étonnant qu’après avoir chassé Childéric, dont ils étaient mécontents, ils se soient donnés à Ægidius ; que l’empereur Majorien avait nommé Maître de la milice dans les Gaules[51] ? On sait que Childéric, rappelé par les Francs, recouvra son autorité ; mais on n’a pas toujours bien expliqué lei moyens dont il se servit pour cela. On se contente le plus souvent de dire avec Grégoire de Tours que les Francs se repentirent de l’avoir chassé. L’auteur des Gestes nous donne une seconde explication, qui, sans détruire la première, en rend les effets plus vraisemblables. Nous le laissons parler[52] : En ce temps-là, les Francs s’emparèrent de la cité de Cologne, sur le Rhin, et y tuèrent beaucoup de Romains du parti d’1Egidius. Quant à Ægidius lui-même, il parvint à se sauver par la fuite. Puis ils se rendirent à Trèves, sur la Moselle, en ravageant tout sur leur passage, prirent la ville et la brûlèrent. En ce temps mourut Ægidius, général des Romains et tyran. Le retour de Childéric ne fut donc point un fait aussi simple qu’on le croit généralement. Il y eut lutte. Il fallut forcer le passage du Rhin à Cologne, défendu par Ægidius en personne : ce fut une autre invasion. Quels furent les auxiliaires de Childéric dans cette guerre ? Dubos conjecture, avec une grande vraisemblance[53], que ce furent les tribus franques restées encore en possession de la rive droite du Rhin, et entre autres celle que Sidonius place sur les bords du Necker ; puis celles qui étaient déjà fixées sur la rive gauche, sous le nom de Riparioli, dès le temps de l’invasion d’Attila[54]. L’auteur des Gestes nous apprend qu’ils s’avancèrent jusqu’à Trèves : d’où nous pouvons conclure qu’ils se rendirent maîtres de la partie orientale de la Germanie lie, dont Cologne était la capitale, et de la partie orientale de la Belgique IIe, qui avait pour capitale Trèves. Le reste de la Germanie IIe était au pouvoir des Francs Saliens, avec la partie de la Belgique IIe, qui s’étend au nord de la Somme[55]. Le reste de la Belgique lie resta aux Romains ; et nous voyons qu’en 486 ; Syagrius, fils d’Ægidius, était encore maître de Soissons. Ægidius, battu au nord, n’était pas moins embarrassé au midi. Créé maître de la milice dans les Gaules par Majorien, son ami, il avait refusé de reconnaître Severus, que Ricimer, meurtrier de Majorien, lui avait donné pour successeur[56]. Les Wisigoths, qui n’avaient consenti à reconnaître Majorien qu’après la perte d’une bataille[57], avaient vu sa mort avec plaisir, et venaient de faire alliance avec son meurtrier. On sait que Ricimer, fils d’un père Suève, était par sa mère petit-fils du roi goth Wallia[58]. Théodoric II, qui régnait alors à Toulouse, excité sans doute par Ricimer, envoya son frère Frédéric avec une armée vers la Loire, pour attaquer Ægidius et le forcer à se soumettre ; mais son armée fut taillée en pièces non loin d’Orléans, et son frère y périt[59]. Ce fut le dernier exploit d’Ægidius. Il mourut l’année suivante, par le poison ou par les embûches de ses ennemis[60]. Nous voyons, par un passage de Grégoire de Tours[61], que Childéric se trouvait à cette bataille. Mais à quel titre y était-il ? Comme allié des Romains ou comme leur ennemi ? Dubos est d’avis que c’était comme allié. C’est la conséquence de ce qu’il avait dit précédemment sur une prétendue réconciliation d’Ægidius et de Childéric, d’après un passage mal interprété de Grégoire de Tours[62]. Mais, outre que la réconciliation est tout à fait invraisemblable, on ne saurait rien conclure du texte de Grégoire de Tours où il est question de la guerre d’Orléans ; car il se borne à dire que Childéric y prit part[63]. Mais l’auteur des Gestes dit formellement qu’il s’y présenta en ennemis[64]. Autre différence : Grégoire de Tours ne mentionne la mort d’Ægidius qu’après la bataille d’Orléans ; l’auteur des Gestes la place avant : de telle sorte que les ravages exercés par Childéric autour d’Orléans sont présentés dans son récit comme une conséquence de cette mort, ce qui est bien plus vraisemblable. Quoi qu’il en soit, quelques années après la mort d’Ægidius, nous voyons que Childéric est rentré dans l’alliance romaine. C’est que les Goths de Toulouse venaient de reprendre leurs projets contre le nord de la Gaule. Euric, après avoir mis à mort son frère Théodoric II, l’avait remplacé sur le trône de Toulouse, dans l’année même que Ricimer et Léon Ier, empereur d’Orient, donnèrent le trône d’Occident à Anthémius, après la mort de Sévère. Euric, roi des Wisigoths, dit Jornandès[65], voyant la rapide succession des princes romains, essaya de ranger les Gaules sous ses lois. Il s’était déjà emparé de Pampelune, de Saragosse et de toute l’Espagne supérieure[66] ; en 470 il se mit en marche vers la Loire. Il comptait sur la trahison d’Arvendus, Préfet du prétoire des Gaules, qui l’exhortait à ne plus reconnaître pour empereur le Grec qui s’était assis sur le trône d’Occident (Anthémius), et à partager avec les Burgondes la souveraineté des Gaules[67]. Anthémius, dans la prévision de ce qui allait arriver, avait placé un corps de douze mille Bretons dans le Berri, pour garder les passagers de la Loire[68]. Euric les attaqua avant l’arrivée des Romains destinés à les soutenir, les tailla en pièces, et força leur roi Riothime à se sauver chez les Burgondes, encore alliés de l’Empire[69]. Le vainqueur fut arrêté tout à coup par les Francs de Childéric, unis aux Romains[70]. Childéric avait trop d’intérêt à empêcher les Goths de passer la Loire, pour ne point se rapprocher des Romains dans cette circonstance ; et ce fut sans doute alors qu’il fit sa paix avec l’Empire, et reconnut de nouveau l’autorité de l’empereur. La suite du récit confirme en effet cette supposition. Un parti de Saxons s’était établi sur la Loire, et avait pour roi un certain Adovagrius. Ils profitèrent du désordre qui régnait autour d’eux pour s’emparer d’Angers ; mais le lendemain Childéric arriva avec ses Francs, chassa les Saxons et resta maître de la ville au nom des Romains[71]. Ainsi s’explique encore un passage de la vie de Sainte-Geneviève, qui sans cela serait inexplicable[72]. Il y est dit que Childéric, se trouvant à Paris, qui appartenait alors aux Romains, se préparait à faire exécuter quelques prisonniers condamnés à mort, lorsque la sainte se présenta devant lui pour solliciter leur grâce et l’obtint. La preuve que Childéric était entré à Paris comme allié de l’Empire, et non comme son ennemi, c’est que Clovis, son fils, fut obligé d’en faire le siége en 497, sans qu’on mous dise comment les Francs l’auraient perdu dans l’intervalle. Ainsi, enfin, se trouve éclairci un passage de la préface de la Loi Salique, auquel personne, que je sache, n’a fait attention, et qui suppose que les Francs avaient porté autrefois le joug pesant des Romains, puisqu’ils se vantent de l’avoir secoué. Ils font sans doute allusion au temps où ils étaient au service de l’Empire, et soumis par conséquent aux ordres de l’empereur. Il nous semble que tous ces faits portent avec eux leur explication et leur commentaire. Ils prouvent en faveur de l’abbé Dubos et contre Montesquieu, 1° que les tribus franques établies dans la Gaule ne s’y étaient pas établies à d’autres conditions que les Goths et les Burgondes ; 2° que l’Empire, en leur donnant des terres ou en les laissant en possession de celles qu’ils avaient envahies, prétendait par cela même les prendre à son service, et les employait en effet en qualité d’auxiliaires contre ses ennemis ; 3° que leur présence sur le territoire des Gaules entrait dans les calculs, nous avons presque dit dans les besoins de la politique romaine, puisqu’ils servaient de contrepoids à la puissance toujours croissante des Goths de Toulouse, et qu’ils étaient entre les mains des Romains ce que les Huns avaient été autrefois dans celles d’Aétius, ce que les Burgondes étaient encore en ce moment, mais avec moins de puissance et d’éclat. Ils prouvent encore, et cette fois non moins contre l’abbé Dubos que contre Montesquieu, que l’établissement définitif des Francs dans l’Empire, reposa en même temps sur une concession volontaire et sur la violence, sur le droit et sur la force, sur le consentement des empereurs, qui croyaient les Fendre à leur service, et sur une avidité belliqueuse qui ne consultait dans la réalité que ses propres convenances. Comme les Wisigoths et les Burgondes, les Francs promirent sans doute de se renfermer fidèlement dans les limites des terres qui leur étaient accordées ; et comme eux aussi ils saisirent la première occasion favorable de les franchir impunément. C’est ainsi que des rives du Rhin et de la petite lie des Bataves, nous les voyons s’avancer par stations et par campements pour ainsi dire, d’abord jusqu’à la Toxandrie, puis jusqu’à Arras, puis jusqu’à la Somme, puis enfin jusqu’à Orléans, jusqu’à Angers et au cours de la Loire. Childéric, l’allié des empereurs, atteignit, au moins passagèrement, cette dernière limite ; pendant qu’une autre tribu, celle des Ripuaires, s’emparait de Mayence, de Cologne, d’une partie de la Germanie Ire, d’une portion de la Ire Belgique, et s’avançait victorieuse jusqu’à Trèves. Lorsque Clovis commença sa mémorable conquête, et vint compléter ces résultats en étendant l’Empire des Francs depuis le Rhin jusqu’aux Pyrénées, l’Empire d’Occident était déjà démembré, et un roi barbare siégeait à Ravenne sur le trône des descendants de Théodose. Et néanmoins (ceci est bien remarquable) le conquérant ne se crut définitivement et irrévocablement maître de sa conquête, que lorsque l’empereur d’Orient lui en eut en quelque sorte garanti la possession. On sait avec quelle satisfaction puérile il reçut le titre de Consul ou de Patrice, que l’empereur Anastase lui envoya en haine de Théodoric, roi des Goths d’Italie, dont’ le génie et le succès avaient trompé ses espérances. Le Barbare voulut en faire parade aux yeux des Francs et de son peuple des Gaules, et on le vit, couvert des attributs de sa nouvelle dignité, leur jeter de l’or à profusion devant l’église de Saint-Martin, à Tours[73]. Plus tard, ses successeurs reçurent avec le même empressement les lettres de cession par lesquelles Justinien leur abandonnait de nouveau la Gaule pour prix de leur neutralité dans la guerre des Goths[74]. Procope, qui nous a fourni ce curieux renseignement, ajoute que depuis ce jour-là, et seulement depuis ce jour, les rois francs se crurent en droit de présider les jeux du cirque à Arles, comme les anciens Préfets du prétoire des Gaules, et de faire frapper des monnaies d’or à leur effigie, comme les empereurs de Byzance[75]. Ce dernier trait du récit de Procope n’est, si l’on veut, qu’une forfanterie byzantine ; mais le fond de son assertion n’en est pas moins véritable, et nous en trouvons ailleurs la confirmation. L’auteur inconnu de la vie du moine Treverius, après avoir dit que la Gaule était encore dans la dépendance de l’Empire d’Orient, à la date de 524, ajoute[76] : Or, après que les rois des Gaulois et des Francs, délivrés du joug de l’Empire, eurent pris en main les rênes du gouvernement, et indépendants désormais du pouvoir impérial, ne dépendirent plus que d’eux-mêmes, il arriva que Théodebert, fils de Thierry, porta la guerre en Italie. L’expédition de Théodebert en Italie est de 539. La concession de Justinien, mentionnée dans Procope, est de 556. Ainsi, en 524, antérieurement à cette concession, la Gaule, dans l’opinion de l’auteur, était encore censée dépendre des empereurs de Byzance ; en 539, postérieurement à cette concession, elle n’en dépendait plus. Du reste (et nous l’avons déjà remarqué), nous rencontrons chez les autres rois barbares établis eu Occident les mêmes préoccupations, les mêmes craintes, pour ne pas dire les mêmes scrupules, sous l’empire des mêmes circonstances. Ainsi, nous avons vu que les Goths de Toulouse, les Vandales d’Afrique, les Suèves d’Espagne n’enlèvent pis à l’Empire une seule bourgade pendant la guerre, qu’ils ne se fassent céder de nouveau à la première paix. Ainsi, après la déposition de Romulus Augustule, nous voyons encore les Wisigoths d’Espagne, les Ostrogoths d’Italie redouter toujours un droit qui semble pourtant avoir péri sans retour, et préoccupés de l’idée que les empereurs d’Orient ont conservé des prétentions légitimes sur la terre dont la victoire les a définitivement rendus les martres, C’est que l’idée de l’unité de l’Empire et de l’indivisibilité du pouvoir avait survécu, et à son partage sous les fils de Théodose, et à son dernier démembrement par les peuples du Nord. D’ailleurs, depuis Constantin, Constantinople était devenue la véritable capitale du monde romain. Rome avait cessé de l’être ; et, quoiqu’elle ait plus tard recouvré ses empereurs, elle ne recouvra jamais dans la politique le rang dont elle venait de déchoir. Constantinople garda toujours une sorte de supériorité tacite, mal définie, et cependant très réelle ; et dans les partages qui suivirent, elle obtint constamment la préférence. Aussi, après la mort de Valentinien III, le dernier des descendants de Théodose en Occident-, les empereurs d’Orient s’arrogèrent-ils le droit de nommer ses successeurs ; et si parfois le caprice des Barbares élevait sur le trône d’autres candidats que les leurs, ces nouveaux maîtres de l’Italie ne se croyaient jamais dispensés d’obtenir l’unanimité de leurs collègues d’Orient. Il suffit de se rappeler que Anthémius et Julius Nepos reçurent la pourpre de Léon I, et que Avitus, Majorien, Sévère, Olybrius, Glycerius, qui la reçurent des Barbares, mirent un égal empressement à solliciter le suffrage de leurs collègues d’Orient. Après le dernier démembrement de l’Empire d’Occident par les peuples du Nord, les Barbares qui se l’étaient partagé se crurent placés dans les mêmes conditions, et agirent jusqu’à un certain point de la même manière. Ainsi nous ayons vu le hérule Odoacre solliciter et obtenir de l’empereur Zénon la confirmation de son titre ; Sigismond, roi des Burgondes, persister à reconnaître, longtemps après la chute de Rome, l’autorité des empereurs de Byzance ; les Vandales et les Goths entamer des négociations et conclure avec eux des traités où leur droit est proclamé alors même qu’ils l’abandonnent. Et pour montrer, par un témoignage irrécusable, quelle était sur ce point la mesure des prétentions byzantines et des égards qu’on y avait, nous transcrirons une lettre écrite au nom de Sigismond, fils du roi Gondebaud, par Avitus, évêque de Vienne, et adressée à Celer, l’un des membres les plus influents du sénat de Constantinople[77] : Mon devoir et mon inclination ne
me permettent pas de laisser passer, sans m’en prévaloir, aucune occasion de
donner des marques spéciales de mon dévoiement au prince que le monde entier
respecte.... C’est pourquoi, après avoir
souhaité préalablement à votre Magnificence tout honneur et toute prospérité,
je prends ta liberté de lui recommander le fils de Fillastre Laurentius,
votre serviteur, qu’un ordre vénérable de l’empereur appelle dans la partie
du monde qu’il gouverne.... Pour ce qui est
de vos fidèles, nous désirons toujours les
ordres que nous attendons, nous soupirons après le bonheur d’obéir.
Puissiez-vous, avec l’aide de Dieu, obtenir pour nous la faveur de connaître,
de la bouche auguste de l’empereur, et par un mot de réponse de votre part,
de quelle prospérité jouit, sous notre glorieux prince, cet Empire romain, au
faite duquel il nous est donné, à nous aussi, d’occuper une place si
honorable. Or, s’il est impossible de nier de pareils faits, il n’est pas facile d’échapper aux conséquences qui en résultent. Il est évident que les rois barbares qui, après tout, ne s’étaient établis dans l’Empire qu’avec la permission volontaire ou forcée des empereurs, qui n’y étaient restés qu’à la condition de le servir, et qui le servirent en effet jusqu’à sa chute, tout en n’épargnant rien pour la hâter, avaient cependant conservé (et les Francs ne font pas exception), au milieu de leurs violences, le souvenir du titre originaire en vertu duquel ils y étaient entrés, et sentaient le besoin d’invoquer un autre droit que celui, qu’ils avaient réussi à faire prévaloir à ses dépens. Il parait, du reste, que les Gallo-romains étaient à cet égard dans les mêmes idées que leur prince ; car malgré l’empressement avec lequel ils avaient couru d’eux-mêmes au-devant de la domination des, Francs, il résulte d’un passage très célèbre de Grégoire de Tours[78], que leur adhésion au gouvernement de Clovis ne fut complète qu’après qu’il eut reçu cette espèce de légimation dont nous venons de parler. Nous admettrons volontiers que les Francs n’attachaient pas une bien grande importance à cette confirmation impériale, et nous croyons, à vrai dire, qu’ils n’en tinrent aucun compte. Mais-nous ne saurions en dire autant de leurs rois, et surtout de leurs sujets gallo-romains pouvaient bien haïr et déserter une domination hérétique comme celle des Wisigoths et des Burgondes, mais chez lesquels la légitimité de l’Empire avait survécu, jusqu’à un certain point, à toutes les catastrophes qui semblaient devoir la ruiner. Nous savons bien que cette tardive et inutile investiture d’une terre que l’épée avait déjà conquise depuis plus de cinquante ans, n’était au fond qu’une vaine cérémonie et une prétention puérile ; que le véritable droit des Francs reposait sur leur force, sur l’impuissance de leurs ennemis, sur le consentement des peuples qui les avaient appelés de leurs vœux ; mais nous n’en sommes pas moins tenus de nous placer au point de vue de l’histoire contemporaine pour la comprendre, et d’accepter les faits qu’elle nous livre avec le même esprit qui les a inspirés. Il n’est pas indifférent de remarquer, dans l’intérêt de notre thèse, qu’il n’est point jusqu’aux titres officiels que se donnaient les rois francs, qui ne témoignent encore aujourd’hui de leur antique dépendance du pouvoir impérial, st du rang subordonné qu’ils occupaient, de leur aveu, dans la hiérarchie de l’Empire. La qualification d’homme illustre, qu’ils prennent dans leurs chartes et leurs diplômes avec une fierté si plaisante[79], rappelle l’administration impériale, et prouverait, à défaut d’autres preuves, que les rois barbares tenaient à honneur d’y figurer. Et, en effet ; les Grecs qui avaient survécu à l’Empire d’Occident, et qui en avaient fidèlement gardé le protocole et la morgue, -ne regardèrent jamais tous ces rois que comme des magistrats, des officiers, revêtus par délégation d’une partie de l’autorité dont la plénitude ne résidait que dans la personne sacrée de l’empereur. Nous l’avons déjà remarqué q, les historiens byzantins ne les appellent jamais que άρχηγους, αρχοντας, chefs, commandants, et quelquefois ρήγας, qui n’en est que l’équivalent. C’est qu’en effet le roi des Francs n’était dans la redite qu’un simple roi, c’est-à-dire un simple chef de guerre vis-à-vis de ses compagnons, et un prince fédéré dans ses relations avec l’Empire. Or, rien ne peut aujourd’hui nous donner une idée plus vraie de la différence qui existait alors entre les noms de roi et d’empereur, que la lettre des enfants de Gondebaud à l’empereur Anastase que nous avons déjà citée, et à laquelle nous pouvons ajouter tes paroles expressives adressées par Théodoric, roi d’Italie, à Hermanfred, roi des Thuringiens, à qui il venait d’accorder la main de sa nièce[80] : Désirant vous admettre dans notre parenté, nous vous accordons, à la grâce de Dieu, la main de notre chère et bien aimée nièce (Amalaberge) ; afin qu’issus par vous-même d’une race de rois, vous trouviez encore un bien plus grand surcroît de lustre et d’éclat dans une alliance qui vous rapproche du sang des empereurs[81]. Il ne faut pas croire que les rois francs fussent étrangers à ces idées, ou qu’ils négligeassent dans l’occasion de se conformer sur ce point aux exigences du préjugé et de l’étiquette impériale. Ainsi ce même Théodebert, qui voulait aller, nous dit-on, attaquer Justinien jusque sur le Bosphore, parce qu’il avait pris le surnom de Francique[82], n’en montre pas moins, dans ses relations avec lui, une déférence obséquieuse qui témoigne de la distance qui les sépare et qui veut la laisser paraître. Il suffira, pour s’en convaincre, de comparer la suscription de ses lettres adressées à l’empereur avec celle des réponses que l’empereur lui envoie. A son illustre et très excellent Seigneur et père, Justinien, empereur, Théodebert, roi[83]. Au nom de Dieu, notre Seigneur
Jésus-Christ, l’empereur César Flavius Maurice Tibère, fidèle dans le Christ,
clément, très grand, bienfaisant, pacifique, alamannique, gothique, antique, alanique, vandalique, hérulique,
gépidique, africain, pieux, heureux, glorieux, vainqueur, triomphant et
toujours auguste ; à Childebert, personnage glorieux, roi des Francs[84]. Il résulte de tout ce que nous venons de dire : 1° Que si en fait, les Francs s’établirent dans la Gaule par la conquête, ils finirent néanmoins par accepter la souveraineté de l’Empire en entrant dans l’organisation impériale, et qu’ils continuèrent de faire partie du système politique et gouvernemental des empereurs, jusqu’au dernier démembrement de l’Empire d’Occident ; 2° Qu’après le dernier démembrement de cet Empire et la déposition de Romulus Augustule, Clovis, sans se considérer comme lié envers les empereurs d’Orient, comme l’étaient, par exemple, les rois de Bourgogne, n’en était pas Moins sérieusement préoccupé de leurs prétentions, et ne négligeait rien pour fortifier le droit qu’il puisait en lui-même par celui que pouvaient y ajouter les concessions impériales ; 3° Que longtemps après qu’ils n’eurent plus rien à redouter de ces prétentions, les rois francs continuaient de se regarder, non pas comme dépendants, mais comme inférieurs ; et que leur conviction sur ce point n’était que la conséquence de la position qui leur avait été faite primitivement dans l’Empire, et qu’ils avaient acceptée. En jugeant la question de ce point de vue, nous dirons, Qu’il n’est point vrai, comme Boulainvilliers le prétend, que le droit des Francs reposait sur la conquête, et ne reposait que sur elle ; Qu’il est moins raisonnable encore de soutenir, avec Loyseau, que sous la première race toutes les terres faisaient partie du domaine des rois, et que le roi était par conséquent le seul propriétaire de son royaume ; Que Galland, qui a défendu la même thèse, non plus en théorie et dans l’intérêt de la science, mais pour égarer le pouvoir, a sacrifié la vérité à la politique, et la cause sacrée de la science au plaisir ou au besoin de flatter ; Que Chantereau Le Fèvre, qui a répété leurs assertions, y a ajouté une erreur de plus ; savoir, que l’origine des fiefs ne remonte en France qu’à l’avènement de la troisième race ; Que Montesquieu, qui a redressé tant d’erreurs, a eu le tort d’accréditer de t’autorité de son nom la plus considérable de toutes ; savoir, que les Francs entrés en conquérants sur la terre des Gaules, y prirent sans autre façon tout ce qui était à leur convenance, et ne firent de réglementa qu’entre eux[85] ; Que l’abbé Dubos lui-même n’est pas dans le vrai, lorsqu’il prétend que la conquête n’eut aucune part à l’établissement des Francs dans la Gaule, et que tout reposa sur les concessions des empereurs et le consentement des Gaulois ; Que tout ce que nos publicistes et nos jurisconsultes ont écrit sur le partage des terres opéré par les Francs après la conquête, à l’imitation de ce que les Wisigoths et les Burgondes avaient pratiqué avant eux, manque par la base ; puisque leurs premiers établissements dans l’Empire reposaient moins sur la conquête que sur une concession, quoique nous ne prétendions pas nier absolument (ce qui serait puéril) qu’ils n’enlevèrent rien aux vaincus ; Que Mérovée et Childéric servirent les empereurs en qualité de fœderati, et qu’à ce titre ils avaient dû en recevoir des terres pour leurs soldats, comme les Wisigoths et les Burgondes ; Que Clovis, qui ne commença à régner que lorsque l’Empire d’Orient était déjà renversé, n’en reconnut pas moins, comme les Wisigoths d’Espagne, comme les Ostrogoths d’Italie, comme les Burgondes de la Gaule, la supériorité, et jusqu’à un certain point la suzeraineté des empereurs d’Orient, dont l’autorité paraissait devoir s’étendre dès lors sur l’Orient et sur l’Occident à la fois ; Que les Gallo-romains partageaient à cet égard le préjugé vulgaire, et que leur soumission au gouvernement de Clovis devint plus complète. et plus volontaire, du jour où ils virent en lui un Patrice, un dignitaire de l’Empire ; Que par conséquent Montesquieu, qui traite si durement l’abbé Dubos, et Mably, qui appelle son histoire un roman, n’ont pas eu raison, le premier de le réfuter sang discuter suffisamment ses motifs, le second de le condamner sans les avoir compris. Il nous reste à examiner quelle fut la part du Christianisme, d’un côté, dans la dissolution dé l’Empire romain, de l’autre, dans l’établissement de la monarchie française. |
[1] Voir plus haut, chapitre IX.
[2] Libanius, Basilic.
[3] Zosime, Histor., I.
[4] Trébellius Pollion, in Gallien.
[5] Voir plus haut, chapitre IX.
[6] Claudian., in IV Consulat. Honor. A., V, 440. — Id., de Laudib. Stilich., I.
[7] Claudian., de Laudib. Stilich., I.
[8] Claudian., de Laudib. Stilich., I, in Eutrope.
[9] Orose, Histor., VII, 40.
[10] Orose, Histor., VII, 40.
[11] In vit. Hilarion.
[12] Salvian., de Gabernat. Dei.
[13] Claudian., de Bell. Getic., V, 419. — Il résulte en effet d’une lettre de Sidoine que, vers 470, les deux rives du Rhin, depuis la Meuse jusqu’à la mer, appartenaient aux Barbares (Sidon. Apollinaire, Epistol. 17, l. IV.)
[14] Renatus Frigeridus Profuturus, apud Greg. Turon., II, 9.
[15] Renatus Profuturus Frigeridus, apud Greg. Turon., II, 9. — Aimoin., de Gestis Francor., I, 3.
[16] Renatus Profuturus Frigeridus, apud Greg. Ter., II, 9. — Olympiodore, apud Photius, Biblioth., dit qu’il fut proclamé à Mayence.
[17] Sidon. Apollinaire, Epist. IV, 17.
[18] Zosime, Histor., VI, in initio.
[19] Prosper Aquit., Chronic.
[20] Gesta Francor., 4. — Malheureusement l’auteur des Gestes a oublié que l’un des deux frères avait été exilé dans la Toscane, et que l’autre avait été mis à mort. Mais rien n’empêche que ce ne fût la même tribu.
[21] Gesta Francor., 5.
[22] Vit. S. Remit. per Hincmar.
[23] Aimoin., de Gest. Franc., I, 4.
[24] Greg. Turon., Histor., II, 9.
[25] Pagi, Critic. in Annal. Baron. — Dubos, II, 7.
[26] Néanmoins celui de Royaumont porte Tungorum, et celui de Cluny Tungrorum. (V. D. Ruinart, Greg. Turon opera.)
[27] Histoire Critique, II, 7.
[28] Procope, de Bell. Goth., I, 12.
[29] Procope, de Bell. Goth., I, 12.
[30] Greg. Turon, Histor., III, 7.
[31] Mer-Wig, maritimus Bellator. De là l’origine de la table qui le fait fils de Neptune. (V. Frédégaire, Histor. Francor. Epitom.)
[32] Ammien Marcellin, XVII, 8.
[33] Voir la Dissertation de N. Biet, abbé de Saint-Léger de Soissons, sur la véritable époque de l’établissement fixe des Francs dans la Gaule, couronnée par l’Académie française de Soissons, en 1738 (dans le Recueil de M. Leber.) —C’est une victorieuse réponse à la dissertation paradoxale du père Daniel sur le même sujet, Paris, 1696.
[34] Greg. Turon, II, 9.
[35] Gesta Franc., 5.
[36] Sidon Apollin., Paneg. Marian. A.
[37] Not. temp., VI, 13.
[38] Not., in Sidon. Apollinaire.
[39] Histoire de France (préface historique)
[40] Prosper Aquit., Chronic., ad ann. 428.
[41] Cassiodore, Chronic., ad ann. 428.
[42] Sidon. Apollinaire, Paneg. Majorian. A., v.125-6.
[43] Sidon. Apollinaire, Paneg. Majorian. A., v.125-6.
[44] II, 14.
[45] Greg. Turon, II, 9.
[46] Hist. Franc. Epitom., 9.
[47] L’auteur des Gestes le donne assez à entendre, par la manière dont il s’exprime : Chlodione reg, defuncto, Meroveus in regno sublimatus est.
[48] Greg. Turon, Histor., 11, 7.
[49] Jornandès, de Reb. Get., 38.
[50] Sidon. Apollinaire, Paneg. Avit. A.
[51] Greg. Turon, II, 11.
[52] Gest. Franc., 8. — Frédégaire fait allusion aux mêmes faits sans les détailler. — Dubos (III, 6) essaie d’infirmer ces témoignages mais sans succès à notre avis.
[53] III, 7.
[54] Jornandès, de Reb. Getic., 36.
[55] Nous avons vu que Chlodion s’était avancé jusqu’à la Somme.
[56] Mar. Aventic., Chronic., ad ann. 461.
[57] Idatius, Chronic.
[58] Sidon., Paneg. Anthem. A.
[59] Idatius, Chronic. — Mar. Aventic., Chronic.
[60] Idatius, Chronic.
[61] Greg. Turon, II, 18.
[62] Après avoir raconté les circonstances du retour de Childéric, Grégoire de Tours dit, en parlant de Childéric et d’Ægidius : His ergo regnantibus simul ; ce qui a fait croire à Dubos qu’ils régnaient tous deux sur les Francs.
[63] Greg. Turon, II, 18.
[64] Gesta Franc., 8.
[65] Jornandès, de Reb. Getic.
[66] Isidore Hispal., Histor. Goth.
[67] Sidon. Apollinaire, Epist., I, 7.
[68] Jornandès, de Reb. Getic., 45.
[69] Jornandès, de Reb. Getic., 45.
[70] Greg. Turon, II.
[71] C’est l’un des endroits les plus obscurs et les plus controversés de notre histoire ; et l’abbé Dubos a consacré tout un chapitre (III. VI) à l’explication des deux lignes de Grégoire de Tours. Nous croyons qu’il a rencontré la vérité ; mais nous pensons qu’il est inutile de recourir à toutes les suppositions auxquelles il se livre pour la trouver. La phrase s’explique d’elle-même
Ventente vero Adovacrio Andegavis, Childericus rex sequenti die advenit imperemptoque Paulo comite, civitatem obtinuit.
Ce qui veut dire :
Adovacrius étant venu à Angers, Childéric y arriva aussi le lendemain ; et comme le comte Paulus avait été tué, il resta maître de la ville.
Interempto Paulo comite est une forme absolue, qui n’est pas plus régie par civitatem obtunuit, que Adovacrio veniente Andegavis ne l’est par Childericus rex advenit. En un mot, le latin signifie que, lorsque Childéric arriva à Angers, le comte Paulus était déjà tué, et qu’alors il s’empara de la ville sur les Saxons.
[72] Vita S. Genovef., 26.
[73] Greg. Turon, Histor., II, 38 : Igitur ab Anastasio imperatore codicillos de consulata. — Ceci rappelle les codicilli honorarii du Code, l. VI, t. 22, et en particulier les consulares codicilli du l. VI, tit. IV, l. 23. — On peut remarquer que la qualification de air baissier, que Clovis se donne dans ses diplômes, est précisément celle qui lui appartenait d’après les règles de l’étiquette impériale. — Ce récit est confirmé par Hincmar. (Vit. S. Remig.) — De quelque manière qu’on veuille l’interpréter ; qu’on ne veuille y voir avec Adrien de Valois, Rer. Francic., VI, que les attributs du patriciat, ou qu’on y trouve avec le P. Lecointe, Annal. ecclesiast., ad ann. 508, une preuve que Clovis fut associé à l’Empire par Anastase, le fait est également décisif en faveur de notre opinion. (V. Notit. dignit. utruisque imperii.)
[74] Procope, de Bell. Goth., III, 33. — M. Augustin Thierry a fait observer (Récits des temps méroving., préf., p. 70) qu’il ne s’agit que d’une partie des Gaules, la Provence actuelle. Mais la conséquence sera la même. Le droit de l’Empire n’existait pas plus pour la partie que pour le tout. — Déjà l’objection avait été faite, et déjà Dubos y avait répondu. V. Lettre de l’abbé Dubos à H. Jordan, au sujet de deux dissertations de M. le professeur Hoffmann (à la fin de l’Histoire critique, dans l’édition in-4°.)
[75] Procope, de Bell. Goth., III, 33.
[76] Vit. S. Treverii manach., ap. Bolland. 16 Jan. — Les mêmes expressions se retrouvent presque mot pour mot dans la vie de S. Jean de Réomay (ap. D. Bouq. ; III, p. 612).
[77] Alcim. Ecdicit Avit., Epist. 43.
[78] Greg. Turon, II, 38.
[79] V. Diplomat. regg. Francor. av. D. Rouq., t. II. — Et Mabillon, de Re Diplomatic.
[80] Cassiodore, Variar., IV, 1.
[81] On fait sans doute allusion à son adoption par l’empereur Zénon.
[82] Agathias Scholast., Histor., I.
[83] Apud Duchesn., t. I, p. 862-872.
[84] Apud Duchesn., t. I, p. 862-872.
[85] Esprit des Lois, XXX, 7 : On ne trouve dans les Lois Salique et Ripuaire aucune trace d’un tel partage des terres. Ils avalent conquis, ils prirent ce qu’ils voulurent, et ne tirent de règlements qu’entre eux.