HISTOIRE DE LA RÉGENCE PENDANT LA MINORITÉ DE LOUIS XV

TOME DEUXIÈME

 

CHAPITRE XXXI. — La conspiration de Cellamare (9 décembre 1718).

 

 

Le prince de Cellamare, conspirateur involontaire. — La duchesse du Maine. — Le comte de Laval. — L’aventurier Walef. — La demoiselle de Launay. —La duchesse s’abouche avec Cellamare. — Premiers mémoires. — « Conspiration de grammairiens. » — Alberoni et Bentivoglio. — Modération de Cellamare. — Deuxième entrevue à l’Arsenal. — Projets. — Rédactions. — Conspirateurs imaginaires. — Conspirateurs par désœuvrement. — Troisième phase de la conspiration. — Le copiste Buvat. — Dubois et le complot. — Premières arrestations. — Les pièces saisies. — Cellamare pris au piège. — Saisie de ses papiers. — Impression produite. — Arrestation des complices. — L’opinion publique. — Renvoi de Cellamare. — La guerre contre l’Espagne devient possible.

 

Le prince de Cellamare, conspirateur involontaire

Philippe V était représenté à Paris par le prince de Cellamare, aimable vieillard encore qu’un peu gourmé et sur qui la solennité de ses fonctions officielles avait répandu quelque chose de mécanique. Il ne dédaignait pas d’insinuer qu’il était fin et pénétrant et prenait soin de recueillir lui-même les bouffées de ce qu’il nommait son éloquence. Diplomate insignifiant, courtisan adroit, mondain raffiné, ce napolitain voluptueux jouissait délicieusement de tous les plaisirs du Paris de la Régence qui lui rappelaient, avec plus de choix et moins d’impudeur, toutes les corruptions de sa patrie. Envoyé à Paris avec des instructions détaillées et des pouvoirs en règle pour faire obstacle à une régence du duc d’Orléans, l’ambassadeur n’en avait pas fait usage et persuada son maître que c’était pour le mieux. Lié avec le parti « vieille Cour » et tout ce qui se rattachait aux princes légitimés, Cellamare recueillait de toutes parts anecdotes et couplets, satires et pamphlets dirigés contre le Régent, et les expédiait à Madrid où le ménage royal s’émoustillait au remuement de cette fange[1]. Voyant la solidité du gouvernement auprès duquel il était accrédité. Cellamare, en « homme sage » qu’il était[2], vécut en excellents termes avec tout le monde, même il trouva le secret de complaire aux ducs et aux magistrats, aux légitimés et aux roués, aux appelants et aux constitutionnaires. La politique étrangère du Régent fut l’écueil où ce pilote toucha. Cellamare fit des représentations qui furent dédaignées et s’embarqua dans des prosopopées qui firent sourire[3] ; quand Alberoni envoya une flotte conquérir la Sardaigne, l’ambassadeur présenta sa justification, car les événements semblaient s’acharner à l’entraîner vers la politique.

 

Conspirateur involontaire

Son seul titre d’ambassadeur d’Espagne ralliait autour de lui les représentants de ce parti espagnol qui avait combattu le système des nouvelles alliances jusqu’à la dernière minute. L’un d’entre eux plutôt que le premier parmi eux, Cellamare, frondait, critiquait, mais ne conspirait point encore. Son hôtel de la rue Neuve des Petits-Champs[4] était le rendez-vous discret où les mécontents, tous ceux qui croyaient avoir à se plaindre de leur médiocrité et de leur indigence, venaient comploter les moyens, valant très peu, de se vendre très cher. Parmi les plus turbulents s’agitait un marquis de Pompadour, esprit au-dessous du médiocre, sans talents, sans moyens, sans crédit et ruiné à ne rien faire[5] ; Saint-Geniès, brave, débauché, hâbleur, cherchant à se tirer de misère ; d’Aydie, cherchant à n’y pas retomber et ne faisant que d’en sortir. A ces recrues s’en joignirent d’autres non moins choisies. La mort de la veuve de Jacques II avait dispersé quelques rongeurs vivant de ses libéralités, certains se réfugièrent à l’ambassade d’Espagne, entre autres Foucault de Magny chassé de l’Intendance de Caen, obligé ensuite de vendre sa charge d’introducteur des ambassadeurs et un certain abbé Brigault, aventurier sans feu ni lieu, auteur d’une réfutation des Lettres de Filtz-Moritz dans laquelle tout ne venait pas de lui[6]. Cellamare, sur l’ordre de sa Cour, avait fait imprimer ce libelle en Hollande. Ce fut le seul acte hostile qu’il se permit avant que la signature de la Quadruple-Alliance et le désastre de Passaro ne l’eussent persuadé que la modération ne sauverait plus une paix tellement compromise.

 

La duchesse du Maine

En réalité, le centre le plus actif du mécontentement n’était pas à l’ambassade d’Espagne, mais au château de Sceaux où tenait sa Cour la duchesse du Maine. Bénédicte de Bourbon, petite-fille du Grand-Condé, belle-fille de Louis XIV était née pour régner sur le royaume de Lilliput. Sa stature était celle d’une enfant de dix ans, son visage donnait l’idée d’une poupée à condition qu’elle gardât le silence ; alors on n’osait pas dire qu’elle fut laide. Ouvrait-elle la bouche, on ne voyait plus que de vilaines dents mal rangées et on n’entendait plus qu’ordres, contre-ordres, désordre. Elle passait les heures de la journée à jouer aux cartes, vers le soir les colères et les extravagances commençaient ; mari, enfants, serviteurs, invités devenaient la proie de cette fée plutôt fantasque que malfaisante. Elle pétillait d’esprit, de caprices et de vanité, s’endettait pour satisfaire aux dépenses de fêtes nocturnes plus magnifiques qu’amusantes[7], cherchait en toutes choses la bizarrerie et le « ragoût » capables de stimuler une imagination flétrie. Après avoir été mère, cette naine avait eu des amants, elle en conservait un auprès d’elle, le cardinal de Polignac, comme favori et souffre-douleurs. Après les amants elle eut des commis et après les commis des conjurés. C’est que l’affaire des légitimés avait désorienté sa vie et changé cette princesse d’opérette en bouture d’homme d’État. Il parut alors une multitude de libelles contradictoires, mais la matière fut traitée à fond dans le grand mémoire des légitimés rédigé sous les yeux de Mme du Maine qui y employa « la plus grande partie des nuits » se plongea, s’ensevelit sous les infolios, fréquenta des savants, des savantasses, abbés, comtesses, moines, tous « gens plus de l’autre monde que de celui-ci[8] ». Elle prit l’habitude de traiter avec ces compagnies, d’en attendre quelque chose. La douleur où l’avait jetée l’édit contre les bâtards la disposait aux pires sottises, elle parlait de tuer le Régent[9] ; évidemment, en comparaison, conspirer n’était rien pour elle, à condition de savoir comment s’y prendre.

 

Le comte de Laval

Elle n’avait rien à attendre de son mari peu enclin à braver les périls et absorbé par la composition de sentences morales, de méditations ascétiques et de vers latins. Dans l’entourage intime Polignac n’était qu’un allié d’apparat et Malézieu un régisseur d’opéras, tous deux assez imprudents pour se laisser compromettre, mais trop médiocres pour être jamais ni utiles ni compromettants. Ce fut encore parmi les alliés que lui avait attiré l’affaire des légitimés que la princesse rencontra l’homme capable de la servir, le comte de Laval. Celui-ci était de bonne maison, le savait et s’était activement mêlé aux mouvements de la noblesse de province en faveur des légitimés. De ce jour la duchesse compta entièrement sur lui et cette liaison précéda pour elle toutes les autres[10]. Laval amena Pompadour et le prince de Cellamare a écrit avec raison qu’« eux trois et eux trois seulement, ont été la clé, ou, si l’on veut le premier moteur de cette grande négociation. Eux seuls ont connu le fond du secret[11]. » Cellamare lui-même ne pouvait y être tout à fait étranger mais il était trop ami de son repos pour courir au devant de personne, dit-il et n’a jamais excité ni compromis qui que ce fut[12]. Deux des conspirateurs les plus sérieusement compromis se plaindront d’ailleurs de sa réserve excessive[13]. Pour n’avoir pas à encourir de trop vifs reproches de la Cour, Cellamare simulait l’agitation, énonçait de grands desseins auxquels il était le premier à ne pas croire, son bon sens l’en gardait. Il allait donc corrompre l’armée, l’acheter ! « C’est ici le point décisif, dit-il, mais il ne se peut exécuter qu’avec de l’argent. Il faut donc faire fonds de cent mille francs par bataillon et par escadron, en pure gratification..., ensuite la solde ordinaire et des récompenses aux commandants qu’on leur fera espérer[14]. Ainsi il se flattait, à l’en croire, de réunir trente mille hommes environ « disciplinés aguerris et pleins de zèle[15] ». Paroles en l’air. Dans un rapport postérieur à l’événement et où il aurait eu intérêt à se faire valoir, Cellamare avoue sans détours que son rôle s’est borné « à écouter avec attention et bienveillance », puis à transmettre à son souverain les propositions et les offres qui lui paraissaient utiles. Loin de se prodiguer, il « allait en fort peu d’endroits » sachant que « dans bien des maisons on n’était pas trop aise de le voir, et on regardait ses visites comme suspectes[16] ».

Dès l’été de 1718, l’ambassadeur d’Espagne se résignait à suivre l’impulsion donnée par la duchesse du Maine, mais avec tant d’apathie que toutes ses démarches étaient connues, tous ses mouvements signalés à l’abbé Dubois, qui n’eût pu, disait-il, sans se boucher les yeux ignorer des conspirateurs si téméraires[17], les dénonçait au Régent[18] et le priait de faire entendre au prince de Cellamare un grave avertissement. Si sa conduite séditieuse continuait à troubler le repos public, ce serait le terme de la patience sur l’indiscrétion de ses discours et le signal d’une plainte au roi Catholique et de l’envoi à la Bastille de ses auditeurs[19]. » C’était plus qu’il n’en fallait pour rappeler Cellamare à la prudence ; il se contenta donc d’abord d’encourager discrètement les résistances. Mais ses lenteurs ne pouvaient rien pour contenir l’ardeur de la duchesse du Maine, « L’affliction que me causa le jugement du procès de M. le duc du Maine, a-t-elle écrit, m’ayant absolument renversé l’esprit, d’autant plus que je ne croyais n’avoir plus aucun lieu de me flatter de la protection de M. le duc d’Orléans, je fus assez malheureuse pour me laisser séduire par les discours de plusieurs personnes mal intentionnées qui sollicitèrent de rechercher la protection du roi d’Espagne[20]. »

 

L'aventurier Walef

La dévotion de ce prince, dirigé par un jésuite, suggéra la pensée de former quelque relation avec ce religieux par l’entremise d’un de ses confrères, le Père Tournemine, lequel faisait parfois sa cour à la princesse. Une femme de chambre, Mlle de Launay, s'aboucha avec le jésuite journaliste qui saisit vivement l’affaire et se trouva avoir sous la main le courtier nécessaire. C’était, dit-il, un homme de condition, liégeois d’origine, que ses affaires personnelles conduisaient en Espagne ; digne de confiance, capable des négociations les plus délicates et prêt à se mettre en chemin s’il était agréé. L’individu avait nom Walef et se disait baron[21].

Il avait fait la guerre en Flandre, avait intrigué parmi les subalternes à la petite Cour de Saint-Germain, composé des poésies qu’il débitait, sans se faire assez prier, eu égard à leur mérite. Présenté à Sceaux sur le pied d’un bel esprit, il obtint de la duchesse quelques entretiens particuliers, fut chargé d’instructions avec ordre de ne pas les dépasser. Sa mission consistait à assurer Philippe V de l’attachement des légitimés et de la confiance qu’ils mettaient en lui. Alberoni ferait connaître ce qu’on pouvait attendre du roi d’Espagne et quels desseins il formait à l’égard de ceux que le Régent traitait si mal. On croyait Walef parti quand il reparut soudain et se fit donner pour son voyage, cent louis et une lettre de créance, sans aucune adresse, accréditant celui qui en était porteur. Toute cette intrigue avait été conduite dans le plus complet mystère. La princesse croyait son protégé à Madrid quand elle reçut de lui une lettre datée de Rome. Aussitôt elle gronda, enjoignit de passer en Espagne, et de n’y répéter rien de plus que ce qu’elle lui avait dit. Walef obéit, pénétra jusqu’à Alberoni qui donna l’assurance que Philippe V compatissait aux infortunes des légitimés. Walef, pour se rendre nécessaire, improvisa un projet de partage des royaumes de France, d’Espagne et de Sicile en cas de décès de Louis XV et poussa l'impudence jusqu’à réclamer de la princesse les pouvoirs nécessaires à la conclusion d’un traité. Une telle extravagance alarma Mme du Maine qui cessa toute correspondance avec Walef et fit prier Philippe V de le retenir en l’occupant par un emploi[22]. Cette intrigue finit là ; « depuis son commerce lié avec l’ambassadeur, la duchesse n’avait plus besoin de Walef[23] ».

 

La demoiselle de Launay

Une deuxième intrigue, plus chétive encore, fut nouée par la duchesse du Maine. L’union entre les maisons d’Orléans et de Condé n’était pas encore, comme elle fut, à l’époque du lit de justice un fait accompli. La duchesse imagina de dresser l’une contre l’autre ces deux familles en brouillant le Régent et le duc de Bourbon. Pour y réussir, on se proposait de corrompre un certain abbé de Veyrac, de la domesticité du duc de Bourbon, afin d’en obtenir contre le Régent une satire qu’on ferait passer pour l’ouvrage du duc de Bourbon. Les acteurs n’étaient pas moins ignobles que la pièce ; c’étaient un abbé Le Camus, ex-capucin, écrivain mercenaire ; une dame Dupuy, aventurière effrontée ; une vieille comtesse de Chauvigny, vivant d’industrie ; Avranches et Despavots, laquais de la duchesse travestis en seigneurs allemands sous les noms de prince de Listenai et de chevalier de la Roche ; enfin la célèbre Mlle de Launay qui fut l’historien de cette comédie où la Dupuy, espionnait au compte du Régent et prolongeait une situation sans issue dans le seul but de compromettre plus à fond ceux qui s’y étaient fourvoyés. Cependant la lenteur de cette intrigue, et peut-être aussi la bassesse de cette société répugnaient à Mme du Maine, la qualité de ces gens ne permettait pas d’en attendre grand’chose, pas plus que de l’aventurier Walef.

Impatiente d’atteindre à d’autres résultats, la duchesse ne trouvait conseil et soutien que chez le comte de Laval. Cependant la crainte qu’il lui inspirait avait retenu longtemps sur ses lèvres la confidence de la mission donnée à Walef. Lorsque celui-ci se montra si entreprenant qu’il put la compromettre, Mme du Maine songea à avertir l’ambassadeur d’Espagne, mais elle ne connaissait que de vue le prince de Cellamare[24], alors elle s’en ouvrit à Laval et ce mot fut comme l’étincelle qui embrasa tout.

 

La duchesse s'abouche avec Cellamare

Vers le mois d’avril 1718, convaincus qu’ils n’avaient plus de ménagements à garder avec le Régent, la duchesse du Maine et le comte de Laval se ressouvinrent que M. de Pompadour avait accès auprès de Cellamare parce qu’il était lié avec M. de Chalais son neveu. Laval avait été l’ami de Pompadour et pouvait aisément renouer avec lui ; il l’alla visiter et, a la seconde visite, les deux hommes tombèrent d’accord. Pompadour promit de tenter une démarche auprès de l’ambassadeur, la fit, en fut bien accueilli et, au mois de mai 1718, Cellamare entra dans le complot qui porte son nom. Pompadour avait été facilement conquis. Laval l’avait présenté à la duchesse qui lui avoua en confidence le chagrin quelle ressentait des traitements infligés à son mari et que la mort du Roi, dont la santé paraissait si frêle, pouvait rendre irréparables. Flatté de se voir l’objet de cette confiance, Pompadour interroge sur le roi d’Espagne montra tout l’attachement qu’il lui portait. Du roi on passa à l’ambassadeur et la duchesse se plaignit doucement de son excessive réserve, lis éprouvaient la même appréhension au sujet de la Quadruple-Alliance et n’y découvraient qu’un préjudice pour le roi d’Espagne. A la fin de mai, Cellamare fut prié de venir un soir à l’Arsenal, résidence de la princesse. L’ambassadeur s’y rendit et s’entretint avec elle et avec Pompadour. Toutes les conversations, à Paris, roulaient alors sur le traité avec l’Angleterre et avec l’Empereur. Cellamare ne dissimula point la répugnance de son maître pour le traité et sa ferme résolution de ne pas le signer. Mise en confiance, la duchesse montra un écrit de sa façon qui ne contenait que des considérations de politique étrangère.

 

Premiers mémoires

La cabale qu’inspirait Mlle de Launay et l’intrigue que conduisait la duchesse du Maine fusionnèrent et prirent une activité nouvelle, ou plutôt sortirent de leur léthargie. L’abbé Brigault s’empara du rôle le plus actif ; bien qu’il ne fut admis que deux fois devant la princesse, il sut se rendre maître de son secret et jusqu’au bout accapara sa confiance. Les entrevues avaient lieu à l’Arsenal, où Laval, assis sur le siège du cocher, conduisait l’ambassadeur vers la voiture de M. de Pompadour. Ce dernier avait dans ses attributions les rapports avec l’Espagne, Laval devait entretenir les germes de mécontentement dans l'intérieur du royaume ; l’abbé les faisait causer et se chargeait des rédactions. On rédigea quatre pièces principales : 1° une requête des Français à Philippe V, sollicitant la convocation des États-généraux ; 2° une lettre au Roi mineur ; 3° une autre àtous les Parlements du royaume ; 4° un manifeste du même monarque prescrivant la convocation des États-généraux[25].

 

Conspiration de grammairiens

Il serait presque vrai de dire que ces écrits furent le principal effort des conspirateurs ; ils y attachaient une importance singulière. « Les conjurés, nous apprend Lémontey, se divisèrent pour la composition de ces ouvrages, en deux espèces de comités qui échangeaient et révisaient mutuellement leur travail. Brigault, Laval et Pompadour formaient l’un, la duchesse du Maine présidait l’autre, où étaient entrés le cardinal de Polignac par complaisance et Malézieu par soumission. Mais ce qui n’étonnera personne, c’est que chacun de ces bureaux était pénétré d’un profond mépris pour les productions de l’autre. Le triumvirat des gentilshommes ne voyait dans les écrits de la duchesse qu’un jargon pâle, sans nerf et sans méthode, tandis que de son côté le comité académique de Sceaux traitait les diatribes des gentilshommes d’ébauches barbares, ténébreuses et d’une incorrection désolante. On put dès lors présumer que la régence ne périrait pas dans cette conspiration de grammairiens[26] », qui ne laissa pas d’avoir ses moments de gaieté. C’est la moindre des choses, lorsqu’on destine des royaumes qu’on dispose des ministères, la duchesse du Maine n’évita pas ce ridicule, Pompadour fut son ministre des affaires étrangères et Laval son ministre du dedans du royaume[27].

 

Alberoni et Bentivoglio

Le 25 mai, à la suite d’une visite à l’Arsenal, le prince de Cellamare se chargea de faire parvenir au cardinal Alberoni les deux premiers écrits de la cabale ; dans un billet chiffré il les désignait comme l’ouvrage de la duchesse du Maine et du marquis de Pompadour[28]. Alberoni reçut ces ouvertures avec enthousiasme, approuva la conduite de l’ambassadeur, prodigua les promesses à la princesse au nom du roi et de la reine d’Espagne. L’imagination du ministre s’enflammant, il transformait l’entrevue de l’Arsenal en complot, et n’était pas éloigné de croire que cette Providence, à laquelle il croyait fort peu, allait enfin s’occuper de ses propres affaires. Ne lui avait-il pas ordonné quelques jours auparavant de répandre la réponse à Filtz-Moritz ? Ne l’avait-il pas entretenu du mécontentement existant dans plusieurs provinces, dans les Parlements et dans l’armée[29] ? Et voici qu’une recrue inespérée venait grossir les rangs de a petite phalange, le nonce du pape en personne. Ce Bentivoglio, ignorant et débauché, acheta d’un docteur de Sorbonne un recueil de traits historiques qu’il accommoda à sa façon. C’était un songe allégorique dirigé contre le Régent, empoisonneur et méditant de se défaire du Roi. Tout ceci mettait en joie le cardinal Alberoni qui croyait toucher déjà les résultats.

 

Modération de Cellamare

Plus réservé, Cellamare s’embarrassait dans des métaphores destinées à faire prendre patience. « Je continue, disait-il, à cultiver notre vigne, mais je ne veux pas tendre la main pour cueillir les fruits avant leur maturité. Les premières grappes qui doivent rafraîchir la bouche de ceux qui sont destinés à boire le vin, se vendent déjà publiquement, et chaque jour on en portera au marché d’autres qui sont sur la paille[30]. » Si cette rhétorique n’était pas le plus pur verbiage, peut-être voulait-elle dire qu’on signalait quelque émotion parmi la noblesse bretonne dont les députés avaient été mandés à Paris où Cellamare leur faisait dire de se tenir cois. Cette modération s’expliquait sans trop de peine. Cellamare était diplomate, septuagénaire et italien, trois motifs, d’être paresseux, l’abbé Brigault venait travailler chez lui, avec lui et pour lui, trois motifs de ne pas se hâter enfin le but des conjurés était vague et les moyens d’y atteindre incertains. La duchesse souhaitait le rétablissement des légitimés, l’ambassadeur désirait une politique moins hostile à l’Espagne, le marquis, le comte, l'abbé voulaient tirer de cette affaire pied ou aile à leur convenance.

 

Deuxième entrevue à l’Arsenal

La conclusion de la Quadruple-Alliance ouvrit la deuxième phase de la conspiration[31]. Cet événement nuisait fort à la réputation d’Alberoni qui n’avait pu l’empêcher, il était possible que son crédit n’y résistât pas, c’est pourquoi, afin d’occuper chez eux ses adversaires, il conspirait en France et en Angleterre. Croyant, avant la bataille de Passaro, n’avoir plus à menacer personne, il stimulait Cellamare dont les lenteurs lui devenaient presque suspectes tellement que celui-ci pensa ne pouvoir faire moins que d’agir sur l’opinion française et sollicita une nouvelle entrevue à l’Arsenal.

La duchesse l’y attendit et l’y reçut, flanquée de Laval et de Pompadour. L’ambassadeur déclara « que le roi son maître était plus résolu que jamais de ne point signer le traité, qu’il avait fort goûté le mémoire de Mme du Maine et qu’il avait fait tout ce qui lui avait été possible pour se lier avec la France, ainsi que Mme du Maine le proposait ; mais que les arrangements que M. le Régent avait pris avec l’Empereur et l’Angleterre avaient été un obstacle invincible sur ce point[32] ». Il ajouta que le roi d’Espagne était résolu de ne point faire la guerre à la France et de mettre tout en usage pour l’éviter. On tomba d’accord sur ce point que Philippe V devait manifester son intention par des écrits qu’on répandrait dans le royaume. Cellamare répondit que « tel était bien le désir du roi d’Espagne, et qu’en attendant, il lui avait ordonné de dire à tous les Français qu’il regardait toujours l’honneur de la France comme le sien propre, et qu’il verserait jusqu’à la dernière goutte de son sang pour le soutenir, et qu’il croyait que l’intérêt de sa patrie était aussi blessé que le sien propre dans le traité qu’on voulait l’engager de signer[33] ».

 

Projets

Dans quelques autres conférences qui suivirent celle-ci, Mme du Maine parla des moyens à employer pour soulever une opposition efficace contre ces traités préjudiciables au roi d’Espagne et proposa d’exploiter la querelle entre le Régent et le Parlement par une proposition en règle de convocation des Etats-Généraux. L’idée était habile autant qu’ingénieuse en ce qu’elle pouvait conduire à donner une nouvelle forme à la régence qu’on retirerait au duc d’Orléans, à moins qu’il ne consentît à se détacher de l’alliance anglaise ; de plus le tour était joli et d’une ruse bien féminine pendant que le moyen pouvait paraître légal[34]. On convint que Philippe V s’adresserait au Roi et au Parlement pour obtenir cet acte de raison et de justice. Aussitôt les écrivassiers se jetèrent sur le thème. Quelques jours suffirent au marquis de Pompadour qui apporta à l’Arsenal un premier mémoire de sa composition, contenant un récit de tout ce qui se passait dans le gouvernement présent, et plusieurs réflexions sur l’intérêt que le roi d’Espagne avait de faire promptement quelques démarches du côté de la France. Mme du Maine trouva ce mémoire « très-mal écrit » n’en osa rien dire à l’auteur de qui elle obtint quelques changements « qu’il fit tant bien que mal ». Alors cette reine du purisme comprit le-péril qu’on lui faisait courir et elle chercha d’autres rédacteurs.

 

Rédactions

Justement la grande affaire était de faire parler le roi d’Espagne dans un manifeste, dans une lettre au Roi et dans une autre au Parlement, alors la princesse s’adressa à des amis dont le style et la grammaire ne lui inspiraient pas moins de confiance que le dévouement, le cardinal de Polignac et M. de Malézieu. Ils ignoraient tout, elle les mit au courant de ses démarches auprès de l’ambassadeur, « pour s’assurer, dit-elle, la protection du roi d’Espagne, sans leur dire entièrement le détail. » Ils se récrièrent et parurent assez effrayés. Embarrassée par sa demi-confidence, Mme du Maine l’était encore plus par la proposition qu’elle avait à leur faire de lui venir en aide pour les écrits projetés. Enfin, elle se risqua. Le cardinal de Polignac refusa tout net, et Malézieu aussi. Ce dernier tint bon trois jours mais, à la fin, il dut céder sous peine de perdre sa situation. Il fit deux brouillons de lettres pour le Roi et le Parlement et supplia sa tyrannique maîtresse de n'en pas user. Vite elle les montra au cardinal qui arrangea quelques termes peu corrects. Pour composer le manifeste les deux amis furent irréductibles, alors la duchesse prit une plume et le rédigea, le lut à haute voix et arracha encore quelques corrections. Cela fait, Laval recopia le manifeste et les lettres et les porta à Pompadour qui les remit entre les mains de Cellamare qui, le 1er août, les glissa entre les cuirs de la selle d’un courrier[35].

A ces écrits, l’ambassadeur joignait une dépêche assez décourageante. Où pouvait conduire, demandait-il, toute cette agitation ? Au renversement du Régent ? Qui le remplacerait ? le roi d’Espagne ! Mais il était malade et trop éloigné. Le duc de Bourbon ? Il était incapable. Le prince de Conti ? Méprisé. Les bâtards ? Impossibles. Devrait-on recourir à un conseil de princes et de grands seigneurs inspirés par Philippe V ? Et puis ces conjurés manquaient de tout. Avait-on une armée espagnole à leur donner ? Sinon le mieux était de les amuser (lusingare) jusqu’au jour où peut-être, on les utiliserait[36]. Ces raisonnements frappèrent Alberoni qui répondit le 20 août que Philippe V se reconnaissait incapable d’exercer la Régence et avouait l’incapacité des princes français à l’exercer en son nom. Mieux valait s’en tenir à la simple convocation des États-Généraux. L’armée espagnole n’était pas disponible, engagée en Sicile contre les troupes impériales, menacée par l’Autriche, l’Angleterre et la Savoie, elle ne serait utilisable que l’année suivante jusqu’à laquelle il fallait temporiser con il remedio della più fina dissimulazione[37]. Pour prolonger ce jeu perfide, Alberoni renvoya, transcrites et signées de la main de Philippe V les lettres adressées au Roi mineur et au Parlement ; Cellamare les montra aux principaux conjurés[38] ; c’était ce qu’il appelait « faire voir les perles de la Reine » ; mais il se gardait de s’en dessaisir : « elles ne sont point sorties de mes mains..., je les garde sous double clé[39]. »

 

Conspirateurs imaginaires

Si Cellamare avait finalement cessé d’être un conspirateur involontaire, d’autres demeuraient conspirateurs imaginaires. Pas un prince du sang n'entrait dans le complot ; le duc du Maine en ignorait tout, de l’aveu de sa femme. « Je dois, a-t-elle écrit, une justification authentique à M. le duc du Maine, et qui nie tient infiniment plus à cœur que ma liberté et que ma propre vie ; c’est qu’il n’a jamais su le moindre mot de toutes ces intrigues, que me suis cachée de lui plus que de personne au monde, que je lui ai toujours dit que mon commerce avec M. de Laval n’avait été fondé que sur les affaires qui regardent son rang... J’avoue que j’ai dit témérairement à l’ambassadeur d’Espagne que le roi son maître pouvait être assuré de M. du Maine, mais je déclare que je l’ai dit de moi-même, et sans qu’il m’en ait jamais parlé[40]. » Lorsque, pour obéir à son ministre, Cellamare récapitulait les noms de tous ceux qui avaient été mêlés au complot, il ne nommait pas le duc du Maine. L’ambassadeur n’avait pas eu d’accointances plus compromettantes avec les maréchaux de Villars et de Tessé. Le premier était trop hâbleur pour qu’on pût attendre de lui un mot réfléchi, trop rusé pour en arracher un engagement ferme ; l’autre protesta de son dévouement au monarque sans même s’enquérir à quelles fins on le pressentait[41].

 

Conspirateurs par désœuvrement

Faute de princes et faute de maréchaux, les conjurés-amateurs se contentèrent de gens de moindre état. Alberoni voulait connaître les noms des grands personnages qui devaient souscrire la requête au roi d’Espagne. Mais qui nommer ? Tout au plus de minces gentillâtres, comme ce nommé Boisdavy, réduit à l’indigence et qui avait « tant de honte de sa mission, a-t-il avoué, qu’il n’osa pas s’en ouvrir à sa famille[42]. » On a dit ce que pouvaient valoir Saint-Geniès et d’Aydie qui amenèrent parfois à l’ambassade d’Espagne un visiteur aussitôt disparu qu’arrivé. Ce racolage exigeait des ménagements et un très fin doigté. Quelles sornettes pouvait-on débiter au chevalier de Folard et au chef d’escadron de Forbin qui, à cette époque, offrirent leurs services à Cellamare[43]. Parmi ceux dont le nom ne pouvait prêter à l’ombre d’un soupçon, se trouvaient le chevalier de Rohan, au nom prédestiné pour de semblables aventures[44] ; le duc de Richelieu dont la conduite à l’armée de Berwick serait critiquée ; le duc de Villeroy, fils aîné du maréchal. Le lieutenant-colonel de Bonrepos s’était engagé à créer à Philippe V des intelligences dans les différentes places et a faire passer au service de l’Espagne nombre d’officiers de distinction. Pour faire montre de zèle, Cellamare recommandait chaudement à sa Cour ces transfuges qui se rendaient en Espagne à leurs frais, en nombre assez élevé toutefois pour attirer l’attention de M. de Saint-Aignan qui crut devoir en informer le Régent. Alberoni leur faisait mauvais accueil, ne se trouvant pas assez riche pour entretenir ces avides auxiliaires. « Sa Majesté, écrivait-il, les recevra quand ils viendront avec des soldats pour former un corps de Français au service d’Espagne. Sa Majesté prendra jusqu’à dix mille hommes. Mais pour recevoir seulement des officiers, cela ne convient point, à moins qu’ils ne soient d’une grande distinction, vu le nombre considérable de réformés que nous avons à placer. » En définitive, une quarantaine d’officiers, de grade plus ou moins haut, offrirent leurs services au roi d’Espagne[45] sans qu’eux-mêmes ni personne alors ne vit dans ce changement de maître une défection. La plupart d’entre eux étaient de braves gens, ennuyés d’une existence besogneuse et d’un emploi sans avenir : colonels, capitaines, lieutenants, ingénieurs, marins, jusqu’à un récollet, le frère Siméon « qui a un secret pour brûler les vaisseaux ». Pauvres diables qui essaient de se faire valoir, de faire acheter leurs armes, leurs inventions, leurs recrues ; dans le nombre se trouvait un Sabran qui n’ayant rien à vendre, trafiquait néanmoins son parent saint Elzéar qui, du paradis, ne pouvait manquer de protéger le monarque qui donnerait un emploi à un membre de la famille[46] !

 

Troisième phase de la conspiration

Les événements du mois d’août firent entrer la conspiration dans une troisième phase. Le lit de justice du 26 août et la nouvelle de la catastrophe de Passaro accablèrent la duchesse du Maine. Ce fut, dit sa femme de chambre, « un accablement semblable à l’entière privation de la vie et comme un sommeil léthargique dont on ne sort que par des mouvements convulsifs[47] » enfin « après avoir été quelque temps dans cet état qui suspend toute idée et interdit tout mouvement, elle commença à se ranimer et revint à elle-même[48] ». Le cardinal de Polignac et M. de Malézieu lui avaient si fortement représenté qu’elle devait cesser de se mêler de rien et renoncer à tout commerce avec MM. de Pompadour et de Laval que, n’osant les recevoir, curieuse cependant de savoir où ils en étaient, elle envoya Mlle de Launay, en grand mystère, à Paris, chez Laval. Le tête-à-tête dura trois heures, étalage de toutes les chimères imaginables fondées sur la ligue du Nord et la restauration du Prétendant. Tout ceci frisait le pur galimatias et néanmoins la duchesse « ne laissait pas d’y entrevoir des espérances[49] ».

Cellamare avait perdu toutes celles qu’il avait pu avoir. « J’ai fait entendre à nos amis, écrivait-il, qu’en cas qu’on employât la force contre moi, je ne manquerai pas d’un endroit voisin d’où je pourrai continuer notre correspondance[50]. » Il conservait sa correspondance avec Alberoni à qui il racontait cent sornettes. A l’en croire, il avait peine à contenir l’ardeur des conjurés[51], il les modérait et pour y réussir leur montrait les perles de la Reine[52]. En temps voulu il se mettrait à l’ouvrage et la Reine serait bien servie[53]. Mais une inquiétude étreint ces braves, le roi d’Espagne ne se laissera-t-il pas circonvenir[54]. Et les dépêches se poursuivent sur ce ton, laissant entrevoir la fine ironie du Napolitain qui prend sa revanche du Parmesan et le joue à son aise avec le fantôme de complot.

 

Le copiste Buvat

Lui-même était joué, dénoncé, épié par un pauvre hère aux services duquel il recourait depuis plusieurs mois. Les conspirateurs continuaient à écrire tant et tant qu’il leur fallut recourir à la plume d’un copiste à gages. L’abbé Brigault, chargé de la correspondance, entretenait des relations confiantes avec l’abbé Bignon, bibliothécaire du Roi[55] qui lui recommanda peut-être le sieur Buvat, à qui le talent calligraphique n’avait pas épargné les mécomptes et qu’il laissait plongé dans la misère[56]. Buvat fut mandé à l’hôtel de l’ambassade et se rendit chaque jour rue Neuve-des-Petits-Champs, où il transcrivit pendant des heures entières les pièces qu’on lui confiait. Il eut bientôt compris de quoi il s’agissait, mais il fallait vivre et faire vivre sa famille, il garda le silence ; cependant Buvat s’était trahi par sa belle écriture. Depuis le mois de juillet, l’attention de Dubois avait été mise en éveil par les informations venues du cabinet de Saint-James[57]. Le 16 juillet, Dubois écrivait a l’abbé de Targny, le supérieur de Buvat, et lui recommandait d’interroger avec précaution son commis : « Le prince de Cellamare a envoyé ici un mémoire que je n’ai qu’entrevu, mais dans lequel j’ai reconnu au premier coup d’œil l’écriture de votre écrivain de la Bibliothèque du Roi. Il n’est point blâmable d’avoir fait cette écriture, mais il pourrait être important de savoir qui lui a procuré la pratique de l’ambassade d’Espagne, et ensuite d’observer si on pourrait faire quelque usage de lui pour avoir des copies de ce qu’il écrit pour cet ambassadeur, ou du moins pour être averti de tout ce qu’il écrit, et en savoir le sujet et ce qu’il pourra en retenir. Si honnête garçon que soit votre écrivain, comme il s’agit du service de l’État, il ne doit pas se faire scrupule de donner toutes les lumières qu’il pourra. Il manquerait tout au contraire au devoir de fidèle sujet du Roi, s’il ne contribuait pas en tout ce qu’il pourra à ce qui peut être de son service. Je vous supplie, Monsieur, de suivre cela avec votre sagesse ordinaire et de vouloir bien m’en instruire[58]. »

Buvat ne se hâta guère de parler et Dubois était néanmoins suffisamment tenu au courant de tout ce qu’il lui fallait savoir pour avancer, dès le 25 octobre, « qu’il n’était point de brigue ni de voie souterraine que le prince de Cellamare n’eut employée pour préparer et exciter du trouble en France[59]. » Des informations venues de l’ambassade de France à Madrid, confirmaient celles fournies par le cabinet de Saint-James. « Les Espagnols bien intentionnés, écrivait le duc de Saint-Aignan, croient que S.A.R. doit se garder plus que jamais des intrigues du cardinal Alberoni, qui, disent-ils, n’a aujourd’hui d’autre objet que de porter le feu d’une guerre civile dans le royaume et de persuader au roi d’Espagne de prétendre la régence, à l’exclusion de S.A.R., comme devant lui appartenir de droit. » Saint-Aignan croyait même que Philippe V était prêt à passer en France, qu’il y comptait sur un parti nombreux, qu’il emmènerait avec lui le prince des Asturies, laissant les autres Infants et le gouvernement de l’Espagne à une junte présidée par le duc de l’Infantado[60].

On voit à quoi se réduisent les révélations de Buvat et de l’entremetteuse Fillion[61] dans la découverte du complot. Suggéré ou commandé par l’abbé de Targny, Buvat vint dire tout ce qu’il savait au secrétaire de l’abbé Dubois, qui le lui fit répéter devant son maître qui parut n’y attacher aucune importance et congédia le copiste en lui ordonnant de continuer ses transcriptions et de venir chaque jour lui rendre compte de tout ce qu’il aurait vu et entendu[62]. « Dès ce moment on peut regarder la conspiration de Cellamare comme finie, et il faudrait l’appeler la conspiration de Dubois, puisque ce rusé ministre pouvant la dissoudre d’un mot, la laissa continuer autant pour les intérêts de sa politique que pour le plaisir malicieux de jouer avec sa proie avant de la déchirer[63].

 

Dubois et le complot

« L’abbé Dubois, écrit Saint-Simon, avait appris en Angleterre l’art de faire paraître une conspiration prête à éclater, pour tirer du Parlement plus de subsides » ; en France, il s’agissait d’agir sur l’opinion publique pour lui persuader que la guerre « était devenue nécessaire pour arrêter les desseins du ministre d’Espagne[64] ». L’arrestation et la saisie des papiers de Gyllenborg avaient convaincu un instant le Parlement anglais, l’arrestation et la saisie des papiers de Cellamare entraîneraient le Conseil de Régence. Le 28 novembre, Craggs sommait Dubois au nom du gouvernement anglais, de tenir ses promesses et de rompre avec Philippe V ; Dubois n’avait plus de raison pour invoquer de nouveaux retards, il suivait attentivement le complot qui aboutissait à des écritures et menaçait de s’y dissoudre. Leprince de Cellamare se faisait l’expéditeur de cette paperasse qu’il ne jugeait digne ni des frais d’un courrier ni de l’embarras d’un chiffre. Il la confia, d’après les ordres de Madrid, à deux jeunes gens, l’abbé de Portocarrero, neveu du cardinal de ce nom, et le fils du marquis de Montéleon, ambassadeur d’Espagne en Angleterre, tous deux uniquement occupés des plaisirs de leur âge et voyageant avec un certain chevalier de Mira, débiteur fugitif, impatient de dresser une frontière entre ses créanciers et lui. On leur remit des dépêches pour Alberoni sans leur en laisser soupçonner le contenu. Buvat rapprit. et, à onze heures du soir, alla en faire part à Dubois qui était au lit[65]. Cette fois l’occasion semblait propice de compromettre avec éclat « le boutefeu Cellamare » ; après un conseil tenu entre le Régent, Dubois et Le Blanc, un officier nomme Dumesnil, fut lancé à la poursuite des voyageurs avec ordre de se saisir des papiers du chevalier Mira et de ses compagnons de route.

 

Premières arrestations

Le 5 décembre Dumesnil les joignit à Poitiers comme ils soupaient dans une hôtellerie. Un exempt suivi de plusieurs archers s’adressa à Mira ce qui donna l’alarme aux deux autres qui ne purent déguiser leur inquiétude surtout pour le paquet de l’ambassadeur. L’abbé le cacha sous le chevet de son lit, l’exempt se jeta dessus et l’enleva, l’abbé soutint que le paquet appartenait à Mira ; il fallut rompre la première enveloppe sous laquelle on trouva l’adresse du cardinal Alberoni, ce qui parut mériter d’être expédié au Régent sans aucun retard[66]. Au milieu de ces émotions, l’abbé eut la présence d’esprit d’expédier à Cellamare un courrier qui arriva à Paris le 8 décembre, quelques heures avant Dumesnil[67].

Cellamare ne songea à tirer parti de ce délai inespéré que pour fournir à ses complices le moyen de se dérober. Cela fait, il se rendit chez Dubois et réclama ses dépêches. Une telle démarche annonçait le plein succès de l’expédition dont, à ce moment, l’abbé ignorait encore l’issue ; il en fut transporté, laissa paraître sa joie dans un redoublement d’excuses, se montra caressant, séduisant, et si sincèrement contrarié que Cellamare rentré chez lui, ayant entre les mains toutes les preuves de la conspiration ne songea pas à en détruire, ou à en dissimuler une seule[68].

 

Les pièces saisies

Pendant ce temps, Dumesnil apportait à Dubois la capture faite à Poitiers[69] et l’abbé se hâtait d’en prendre connaissance. Le Régent avait donné l’ordre qu’à quelque heure que M. Le Blanc et l’abbé Dubois vinssent pendant la nuit, on les fît entrer et qu’on l’éveillât[70]. Ils ne vinrent qu’à six heures et demie du matin et demeurèrent avec lui jusqu’à onze heures et demie[71]. Le contenu du paquet dépassait probablement en gravité tout ce que l’imagination de Dubois avait pu espérer. Un bordereau d’envoi contenait l’inventaire du courrier et avait rendu impossible la soustraction d’aucune pièce[72]. On trouva donc des copies corrigées des quatre écrits dont il a été parlé ; deux projets de manifeste l’un par Pompadour, l’autre par Brigault et des observations de ce dernier sur les deux projets ; un mémoire du comte de Laval sur les moyens à prendre pour soulever quelques provinces à l’approche de l’armée d’Espagne ; un catalogue des noms et qualités des officiers français sollicitant un emploi de leur grade en Espagne ; une lettre de Cellamare à Alberoni dont il courut des copies portant ces mots, ou quelque chose d’approchant, adressés à Philippe V : « Gardez-vous bien, Sire, de renoncer à la couronne de France. Si vous le faites, le jeune Roi ne sera pas en vie dans trois mois[73]. »

 

Cellamare pris au piège

Pendant le conseil tenu par le Régent, Buvat était venu rendre compte à Dubois de ce qui se passait à l’ambassade ; Cellamare lui-même s’était rendu au Palais-Royal, où la consigne donnée écartait tous les importuns : le Régent, disait-on, était au chevet de sa femme et « on ne pouvait lui parler ». Quelques moments plus tard, l’ambassadeur rentrait chez lui où le secrétaire de l’ambassade, don Fernand Figuerroa, lui remit un billet qui l’engageait à se rendre à une heure précise au Palais-Royal avec son secrétaire[74]. Il s’y rendit donc, comme pour s’inscrire chez la duchesse d’Orléans, trouva le Régent qui descendait de chez elle et le gracieusa de son mieux, mais au premier mot du courrier détroussé s’excusa sur la maladie de sa femme de parler d’affaires[75] et l’adressa à l’abbé Dubois. Cet abbé avait fait tenir son carrosse tout prêt, dans la rue de Richelieu, à la petite porte du Palais-Royal. Le prince de Cellamare étant allé trouver l’abbé Dubois, cet abbé lui dit : « Allons dîner chez M. Le Blanc, si vous le trouvez bon — Je le veux bien », dit le prince. Etant arrivés à la porte de M. Le Blanc, le suisse dit qu’il était sorti, et qu’il ne savait pas s’il reviendrait pour dîner. Sur quoi, l’abbé faisant l’étonné, dit : « J’aurai donc l’honneur de dîner chez vous, monsieur, si vous voulez bien me le permettre. » A quoi le prince ayant dit : « Volontiers » le cocher tourna bride et se dirigea vers la rue Neuve-des-Petits-Champs[76].

Vers une heure et demie de l’après-midi, un détachement de vingt mousquetaires commandés par le chevalier de Terlon, arriva sans ordre, en habits bourgeois et ayant seulement l’épée au côté, il se répandit dans les cabarets et les cafés d’alentour. A peine étaient-ils installés que le carrosse de M. Le Blanc entra dans la cour de l’hôtel et les mousquetaires, surgissant de partout, y entrèrent immédiatement à sa suite et se répandirent quatre à quatre dans les appartements[77]. C’est ce qu’aperçut d’un coup d’œil le prince de Cellamare en arrivant chez lui. Vers deux heures, les deux secrétaires d’État, l’ambassadeur, don Fernand, deux sous-secrétaires, un écuyer, un sous-intendant suivis par le chevalier de Terlon, une douzaine de mousquetaires et le commis Pecquet, pénétrèrent dans la secrétairerie où le scribe Buvat exécutait une septième copie d’un pamphlet en forme de dialogue[78]. Copies, minutes, originaux, papiers de toute sorte furent saisis et enfermés dans une armoire fermée et scellée. Pendant que Pecquet posait les scellés, Cellamare dit à l’abbé Dubois : « Vous pouvez maintenant m’imposer la loi ; s’il faut rester dans ma maison j’y resterai, ou s’il me sera permis d’en sortir ? » L’abbé répliqua que le chevalier de Terlon lui ferait connaître l’ordre du Roi et Le Blanc ajouta qu’il ne lui serait fait aucun tort et que tout Hui serait rendu fidèlement[79].

 

Saisie de ses papiers

Pendant qu’on enfermait dans quatre grands coffres qui furent transportés au vieux Louvre tous les papiers qu’une inspection rapide avait fait retirer de la masse mise sous scellés[80], Cellamare protestait « devant Dieu et les souverains » contre le traitement qu’on lui infligeait[81], Dubois, rebelle à la grandiloquence, perdit patience et dit : « On a trouvé dans vos papiers le dessein de bouleverser tout l’ordre du gouvernement et du royaume ;aussi le Roy est-il résolu à prendre les mesures nécessaires pour assurer la paix publique, à mettre sous bonne garde vos papiers et à vous renvoyer de même à la frontière. — Vous n’avez trouvé dans ces papiers, répliqua Cellamare, que des doléances de vos Français et les critiques d’un gouvernement détesté qu’ils supplient mon maître de supprimer. Par ordre de souverain, j’ai écouté leurs doléances et transmis à la Cour d’Espagne leurs projets destinés à préserver la vie du Roi, à protéger son royaume, lui épargner le mal que lui font vos traités et vos ligues[82]. » Pour mettre fin à cette scène, Le Blanc montra à Cellamare la lettre trouvée dans la valise et lui demanda s’il la reconnaissait. L’aveu coupa court aux récriminations.

Vers trois heures, Dubois et Le Blanc se retirèrent pour aller dîner ; ils revinrent à quatre heures et commirent la garde de l’hôtel à M. de Terlon et aux mousquetaires pendant que M. du Libois, le même qui avait été attaché à la personne du Tsar, eut ordre de garder à vue l’ambassadeur dont la porte fut gardée jour et nuit par un officier des mousquetaires[83].

 

Impression produite

A cinq heures, le duc d’Orléans fit assembler le Conseil de Régence auquel il lut deux lettres de Cellamare à Alberoni[84], montra la liste des conspirateurs mais ne donna pas leurs noms pour leur laisser une chance de se repentir[85]. Ces conspirateurs étaient en complet désarroi. Laval avait pris la fuite ; l’abbé Brigault nanti daine somme de cent louis envoyés par Cellamare avec l’ordre de fuir à l’instant, alla trouver le chevalier de Menil et, sous prétexte de voyage, lui fit accepter la garde d’une cassette contenant son testament et des papiers de famille, puis encore d’un gros paquet cacheté. Chez la duchesse du Maine le trouble était profond et on était réduit aux rumeurs courant dans le public. Enfin la princesse et ses complices apprirent dans la soirée la saisie des papiers qu’emportait en Espagne l’abbé de Portocarrero, « alors, dit Mlle de Launay, nous nous vîmes plongés dans l’abîme, dont il n’y avait point moyen de se tirer[86] ». A la Cour l’émotion n’était pas moins grande. Dès la première nouvelle de l’arrestation de Cellamare, le duc d’Aumont s’alla cacher au couvent des Carmes déchaussés[87] ; Villeroy, Villars, d’Huxelles ne savaient quelle contenance prendre, « la morgue était déposée, ils étaient devenus polis, caressants, ils mangeaient dans la main[88] ».

 

Arrestation des complices

Le lendemain, on sut que Pompadour et Saint-Geniès venaient Arrestation d’être conduits à la Bastille[89], Foucault de Magny, D’Aydie complices étaient en fuite[90], quant à l’abbé Brigault, on ne savait rien sur son compte, mais cette ignorance dura peu de temps. Le dimanche 11, comme Mme du Maine jouait au biribi, à son ordinaire, un M. de Châtillon, qui tenait la banque, homme froid, qui ne s’avisait jamais de parler, dit :

— « Vraiment il y a une nouvelle fort plaisante : on a arrêté et mis à la Bastille, pour cette affaire de l’ambassadeur d’Espagne, un certain abbé Bri... Bri... »

Il ne pouvait retrouver son nom. Ceux qui le savaient n’avaient pas envie de l’aider. Enfin il acheva et ajouta :

— « Ce qui en fait le plaisant, c’est qu’il a tout dit ; et voilà bien des gens fort embarrassés ».

Alors il éclata de rire pour la première fois de sa vie. Mme la duchesse du Maine, qui n’en avait pas la moindre envie, dit :

— « Oui, cela est fort plaisant.

— « Oh ! cela est à faire mourir de rire, reprit-il. Figurez-vous ces gens qui croyaient leur affaire bien secrète ; en voilà un qui dit plus qu’on ne lui en demande, et nomme chacun par son nom. »

Et tandis que la princesse et sa femme de chambre attendaient le sort qu’elles nt pouvaient plus éviter[91], Paris commençait, lui aussi, « à mourir de rire » au récit des incidents de cette conspiration. Le premier jour, le public fut consterné au point de ne s’entretenir de la nouvelle qu’à voix basse[92], le lendemain on entrevit la guerre imminente[93] ; trois jours après on se réjouit de cette belle découverte qui allait empêcher l’Espagne, incapable de lutter contre la Quadruple-Alliance, de soutenir cette guerre, et l’obliger à prévenir une désastreuse campagne en signant un traité[94]. Enfin, le 13, (l’arrestation remontait au 9), certains commençaient à dire que cette conspiration n’avait rien de réel, misérable prétexte à une querelle d’allemand faite à l’Espagne pour l’attirer dans une guerre[95]. On parle bien différemment de cette affaire, écrit l’avocat Barbier ; sait-on ce qu’on en eût dit si Brigault ne se fut fait arrêter aux portes de Montargis d’où on le ramena à la Bastille[96].

Il avait mis trois jours à se rendre à Montargis et, pendant ce temps, son ami le chevalier du Menil soupçonnant la vérité, avait ouvert adroitement la cassette et trouve le testament et les papiers de famille ; quant il eut ouvert le paquet cacheté il se trouva devant tout ce qui avait été fait avec l’Espagne, vit beaucoup de noms propres et jeta le paquet au feu. Lorsque Brigault fut prisonnier, d’Argenson et Le Blanc vinrent l’interroger[97].

Pour entamer la conversation, ils lui dirent que sa servante était à la Bastille et que le chevalier de Menil leur avait remis ce qu’il lui avait confié.

« Eh bien, dit-il, puisque vous avez ces papiers-là, vous savez tout car il n’y a rien qui n’y soit »

Or Menil avait livré la cassette à Dubois sans rien dire du paquet jeté dans les flammes, il ne put nier sa conduite et s’en alla, lui aussi, à la Bastille[98].

 

L’opinion publique

L’intérêt de cette affaire, déchue d’un ambassadeur à un entremetteur, semblait épuisé en quelques jours et le Régent paraissait embarrassé de sa conspiration. Le mardi 13, les ministres étrangers eurent leur audience hebdomadaire[99] et on leur remit à chacun les deux lettres de Cellamare à Alberoni imprimées « afin, disait la brochure, que le public soit instruit sur quels fondements Sa Majesté a pris la résolution, le 9 du présent mois, de renvoyer le prince Cellamare[100] ; mais, au dire de l’avocat Barbier, le public « ne croit pas tout cela bien sincère ». A peine sont-elles entre les mains des ambassadeurs que ces lettres sont rendues publiques. « Enfin, dit-on, voici les lettres. Il n’y a [ici] ni conspiration contre la vie du Régent ni contre l’État. Tout le monde pense que M. le Régent a très mal fait de les produire, et encore plus mal fait de s’être obligé à une justification, par la démarche qu’il a faite de faire arrêter la personne sacrée d'un ambassadeur. Ces lettres sont un manifeste donné par le roi d’Espagne à la nation française. Elles sont pleines d’esprit et de bons sentiments pour le Roi et pour la nation... Des personnes poussent la politique jusqu’à dire que c’est un tour du cardinal Alberoni, d’avoir fait donner avis sous main, par les menées de l’ambassadeur, que le neveu de Portecarrero portait des lettres secrètes pour rendre publics tous les mécontentements qu’on a contre l’administration présente, et que le Régent a donné dans le panneau. Il faut, conclut Barbier, attendre l’événement de tout ceci[101]. »

 

Renvoi de Cellamare

Un premier soin à prendre consistait à rendre Cellamare à son souverain. On n’avait pas même songé à retarder le voyage de Portocarrero et de Montéleon[102], l’ambassadeur prit le même chemin, protestant toujours d’avoir trempé dans une conspiration, traitant celle qu’on lui reprochait de simple badinage. Quelques papiers à lui adressés lui avaient suggéré la lettre saisie à Poitiers[103]. On le laissait jaser, et l’indulgence l’enhardit à écrire au roi mineur une lettre d’une grande audace[104]. Le 13 décembre, on le fit monter en voiture et il reprit la route d’Espagne sous la conduite de M. du Libois et sous l’escorte d’un détachement de mousquetaires. Il devait demeurer à Blois jusqu'à ce qu’on sût que M. de Saint-Aignan avait franchi la frontière de France[105] et le Régent voulut qu’on lui rendit tous les honneurs dus au caractère dont il avait si indignement abusé[106]. Alberoni, ce jour-là même 13 décembre, faisait chasser de Madrid ainsi qu’un malfaiteur M. de Saint-Aignan et sa femme. Le lendemain, ignorant tout encore de la mésaventure où succombait Cellamare, il lui écrivait ce billet célèbre que le maréchal de Berwick surprit à Bordeaux : « Ne quittez Paris que lorsque vous y serez contraint par la force, et partez pas avant d’avoir mis le feu à toutes les mines. » Quand cette lettre lui fut communiquée, Cellamare eut un geste de mépris : « Mines sans poudre », dit-il[107].

 

La guerre contre l’Espagne devient possible

Si piteux que fut le défilé des conspirateurs, il suffisait au dessein de Dubois. L’opinion publique lui permettait de tenir la parole engagée à l’Angleterre et de déchaîner la guerre contre le pays qui avait projeté de l’apporter en France. Le 8 décembre, quelques heures avant la capture de Poitiers, Dubois se montrait très ferme, très vigoureux avec l’ambassadeur des Provinces-Unies. « Il ne fallait pas, lui disait-il, que la République se flattât de la médiation, la France n’y consentirait jamais, pas plus qu’à commercer avec l’Espagne pendant la durée de la guerre[108]. » Le Régent ne parlait plus de retarder la déclaration de guerre que jusqu’à la fin du mois[109] et, le 14 décembre, Dubois écrivait à Destouches : « Je vous prie d’assurer M. Craggs et milord Stanhope que tous les soupçons qu’ils ont eus sur les délais de la déclaration de guerre, n’ont point eu d’autres raisons que celles que je leur ai écrites, et particulièrement la découverte que nous avons faite ces jours-cide la trame et des intrigues de l’ambassadeur d’Espagne. Nous espérions avec raison les découvrir bientôt, et nous sentions bien qu’après un tel éclat, les opposants nous laisseraient le champ libre. S.A.R. a été et est toujours dans la même résolution. Elle n’a point eu dessein de temporiser pour voir si l’Espagne changerait et n’a rien ajouté aux ordres envoyés au duc de Saint-Aignan. Son intention est de ne rien proposer de douteux au Conseil de Régence, mais de bien prendre ses mesures, afin que les résolutions qu’elle y proposerait touchant la guerre fussent unanimes, et ne fussent accompagnées d’aucun mauvais discours[110]. »

Avant d’en venir là, le Régent et Dubois estimèrent utile d’exploiter à fond la chance que leur livrait la conspiration si péniblement échafaudée.

 

Insignifiance des complices

Le prince de Cellamare hors d'atteinte, les conspirateurs fugitifs ou embastillés, cette conspiration parut soudain si peu de chose qu’elle sembla une rêverie, presque une imposture. Afin de réagir contre cette opinion, le gouvernement multiplia les arrestations. La Bastille, Vincennes et la Conciergerie reçurent un grand nombre d’hôtes car « la conspiration était un réseau qu’on pouvait étendre ou resserrer à son gré, et dans lequel on enveloppait des hommes inconnus entre eux et des accusations disparates, telles que le procès des légitimés, la séduction de l’abbé de Veyrac et le simple désir de passer au service d’Espagne. Celte confusion mystérieuse avait l’avantage de grossir, aux yeux du public, l’énormité du complot[111]. » De fausses rumeurs entretenaient cette impression, ainsi parlait-on de commissaires nommés pour interroger les prisonniers[112], des visites du garde des sceaux à la Bastille[113] et les arrestations ainsi que les commentaires allaient leur train sans que le public pût prendre tout cela au sérieux. « Que dites-vous, écrit-on de Paris, du choix que l’ambassadeur d’Espagne avait fait de ses conjurés ? Jamais je n’en ai vu de si ridicules... Jamais je n’ai vu une si belle séquelle de sots, de fous et de canailles[114]. » Le parti vieille Cour, rassuré, relevait la tête sachant qu’on ne trouverait rien de bien compromettant et les partisans du Régent ressentaient quelque embarras pour colorer l’arrestation d’un ambassadeur[115], l’ambassadeur impérial et lord Stair ne se cachaient pas de dire qu’on avait violé le droit des gens à l’égard de leur collègue Cellamare, et la lettre explicative de Dubois était assez mal reçue, du public[116].

Celui-ci attendait plus et mieux d’une affaire entamée avec un tel fracas. Le duc du Maine, se disait-on, ne pouvait pas n’avoir pas trempé dans celte conspiration qui devait le délivrer du Régent son redoutable ennemi[117], et on le verrait sans doute aller prendre logement au château de Vincennes[118] ; au lieu de cela, le duc du Maine louait douze mille livres l’hôtel que venait de quitter Cellamare[119]. Ainsi, une fois encore, les grands sortiraient indemnes de l’aventure, tandis qu’on assurait qu’il y avait quinze cents personnes compromises[120]. Le Blanc interrogeait les prisonniers sans en tirer beaucoup d’éclaircissements ; « chacun d’eux se désavoue d’avoir pris engagement avec la Cour d’Espagne, hormis celui des simples services, en quoi il ne croit pas avoir péché[121] ». L’abbé Brigault passa pour avoir fait l’aveu de tout ce qu’il savait[122] ; peut-être le dépouillement des papiers de Cellamare apportés au Louvre apprit-il tout ce qu’on voulait savoir.

 

Le pape et les jésuites mêlés à la conspiration

Dès le 15 décembre, le Régent était éclairé et s’en ouvrit à lord Stair. Il avait la preuve entre les mains que le pape Clément XI et la Compagnie de Jésus avaient pris part à la conspiration. Dès le début de son gouvernement, Philippe d’Orléans avait témoigné confiance et estime au cardinal de Noailles, chef du parti appelant, il lui avait remis la conduite des affaires ecclésiastiques et le Saint-Père n’avait cessé, dès lors de ruser avec lui, de contrecarrer sa politique, de faire échec à ses projets de pacification ; le nonce Bentivoglio avait, on l’a dit, lancé contre le Régent un pamphlet venimeux. Il semble que le rôle du P. de Tournemine au début de la conspiration ait été une imprudence personnelle et isolée, mais il est malaisé de suppléer à un silence calculé qu’aucune indiscrétion depuis n’a permis d’apprécier à sa juste valeur.

Le public n’ignore pas que Brigault a eu quelques accointances avec les Jésuites[123] et qu’ils sont engagés dans le parti, mais « ils ne sonnent mot, ils ne s’écrivent même aucune nouvelle d’une province à une autre, parce que depuis longtemps toutes leurs lettres sont décachetées[124] ». Un d’entre eux cependant se hasarda à écrire à son frère également affilié à la Compagnie : « Les Jésuites sont l’âme de tout ce qu’on a découvert[125] » et le Régent n'y contredisait point. « Ce parti, disait-il avec une amertume dont il n’était pas coutumier, avait taché de le perdre du temps du feu Roi, de l’exclure de la Régence, lui avait toujours été hostile, le serait toujours ; ce qui venait d'arriver mettait toute cette affaire dans son vrai jour, et il allait prendre ses mesures pour mettre ce parti hors d’état de lui nuire[126]. » Quelques Jésuites furent arrêtés[127], mais le silence se fit et recouvrit tout.

 

Le Régent décide l’arrestation de M. et Mme du Maine

Cependant le dépouillement des papiers de Cellamare se poursuivait et laissait planer l’inquiétude. Le 24 décembre, on remarqua que le Régent pria le duc de Bourbon de surseoir à son voyage à Chantilly[128] et le jour de Noël, sur les quatre heures après-dîner il tint chez lui un conseil auquel prirent part M. le Duc, les ducs de Saint-Simon et d’Antin, d’Argenson, Torcy et Dubois ; à l’issue de ce conseil M. le Duc et Saint-Simon demeurèrent dans le cabinet et tout cela, dit Dangeau, « fit fort discourir[129] ». Saint-Simon n’a pas manqué de faire le récit de ce conciliabule[130]. La révélation qu’on lui faisait de la culpabilité du duc du Maine comblait ses vœux, dépassait ses espérances, peut-être aussi, comme on l’a pu dire, intéressait son avidité. M. du Maine n’était pas seulement un ennemi détesté, c’était une riche proie et Saint-Simon l’eut volontiers laissé décapiter afin de se faire attribuer à titre de dépouille la grande maîtrise de l'artillerie[131] ; toutefois il n’osa parler que de réclusion. M. le Duc n’était ni moins vindicatif ni moins cupide que Saint-Simon, mais il était beaucoup plus borné. Le Régent s’amusa à flatter sa haine publique pour la duchesse du Maine en lui proposant de l’en faire le geôlier. La « poupée de sang », ainsi qu’on l’appelait, était Condé et exigeait des égards particuliers et des précautions minutieuses, étant, au dire de Saint-Simon « propre à tout entreprendre pour se sauver ». Le château de Dijon pouvait la recevoir, mais Dijon se trouvait être la capitale du gouvernement de Bourgogne, apanage de M. le Duc. A cette mesure, qui flattait sa haine en déshonorant son caractère, M. le Duc n’opposa qu’une résistance de pure, forme tempérée par un sourire[132], et Saint-Simon n’essaya pas de cacher qu’il « trouvait la rocambole plaisante... de voir cette femme qui avait tant ose assurer qu’elle renverserait l’Etat, et mettrait le feu partout pour conserver ses avantages.... de la voir, dit-il, rager entre quatre murailles de la dition de M. le Duc[133] ».

 

Arrestation du duc du Maine

De tout cela rien n’avait transpiré, mais le 27 on apprit que les mousquetaires avaient ordre de se tenir prêts et de coucher toujours à tour hôtel, en sorte qu’on ne douta plus d’arrestations imminentes. Le 28, dans l’après-dînée, le duc du Maine vin visiter sa sœur, la duchesse d’Orléans, et retourna a Sceaux ; il paraissait fort tranquille malgré les fâcheuses rumeurs répandues à son sujet[134]. La nuit suivante, les mousquetaires montèrent à cheval et la Billarderie, lieutenant des gardes du corps, se transporta à Sceaux accompagné de vingt gardes et de vingt mousquetaires et, à huit heures du matin, arrêta le duc du Maine au nom du Roi. « Je m’attendais depuis quelques jours à ce compliment », dit le prince qui n’eut qu’à monter dans sa chaise qu’on tenait prête pour aller à la chasse. M. de Trudaine, prévôt des marchands et conseiller d’État, mit le scellé sur tous ses paniers[135], utile précaution qui procura de nouvelles lumières. On découvrit un premier brouillon de la lettre de Philippe V au Roi, composé par Malézieu et corrigé par le cardinal de Polignac. On trouva aussi les lettres de plusieurs gentilshommes suite procès des légitimés et on en distingua plusieurs à cause de jour vivacité. Pendant ce temps la Billarderie avec son escorte menait le prisonnier grand train et l’enfermait dans la forteresse de Doullens en Picardie. Ému, inquiet, ignorant la menace qui planait sur sa tête, le prince parla peu, pria beaucoup, cherchant un réconfort à la vue des églises de campagne et des croix de grand chemin. Écroué dans celle citadelle[136] que l’on disait tomber en ruine et où les chambres étaient si ouvertes de crevasses qu’à peine les chandelles y pouvaient rester allumées[137], « le duc du Maine s’y adonna aux exercices de piété qui prirent dès lors dans sa vie une place presque exclusive[138]. Je jouis maintenant, écrivait-il, d’un repos que je regarde comme une grâce de Dieu... Je me console de ma séquestration, à la pensée que mes fils ne sont pas enfermés ici avec moi ». Ces deux jeunes gens devaient être conduits l’un à Blois, l’autre à Limoges, mais on les confia à la garde du comte de Toulouse qui les appela à Rambouillet[139].

 

Et de la duchesse

Le même jour et à l’heure même où on arrêtait le duc du Maine, le marquis d’Ancenis, fils du duc de Charost, capitaine des gardes du corps à la tête de vingt gardes et vingt mousquetaires, arrêtait la duchesse dans sa maison de la rue Saint-Honoré, près de l’hôtel de Noailles. M. Fagon mit le scellé sur ses papiers d’la princesse fut menée jusqu’à Essonnes par le capitaine des gardes et, de là, à Dijon[140]. Pendant ce temps on mettait Mlle de Launay en état d’arrestation, M. de Malézieu, son fils et bien d’autres ; Dadvisar et Barjeton qui avaient travaillé aux mémoires sur les rangs des légitimés, le chevalier de Gavaudun, Mlle de Montauban eurent le même sort. Deux valets de chambre de la princesse, quatre de ses valets de pied, deux frotteuses de. son appartement, pris d’un seul coup de filet, furent amenés le même jour à la Bastille[141]. Le cardinal de Polignac ne pouvant être emprisonne sur des indices trop vagues, on l’envoya en exil dans son abbaye d’Anchin[142] en Flandre.

Ces arrestations provoquèrent une extrême surprise[143], et les rumeurs les plus ridicules puisqu’on prétendit que le très pacifique Malézieu avait fait un amas d’armes suffisant pour trente-cinq  mille hommes[144], d’autres racontaient qu’on avait mis au cachot un valet de pied du duc du Maine, à son service depuis vingt-huit ans et qui devait être le principal instrument de la tragédie[145], car il ne s’agissait de rien moins que d’assassiner le duc d'Orléans, le duc de Chartres et la duchesse de Berry[146]. On peut dire qu’à partir de ce moment, la conspiration de Cellamare et la cabale du Maine sont si complètement dissipées qu'il n’en resta pas même souvenir dans le public ; heureusement Mlle de Launay leur consacrerait une centaine de pages impérissables.

 

Le cri public

A l’étranger, l’algarade de l’ambassadeur d’Espagne provoqua quelques réflexions imprévues. Alberoni se lamenta. « Nous sommes, dit-il, dans un temps où il n’y a plus entre les princes ni foi ni loi, on viole le droit des gens et on foule aux pieds ce qui est le plus sacré même aux nations barbares[147]. » Mais Alberoni fui seul à gémir, les autres applaudissaient sans réserve. Victor-Amédée pouvait à peine contenir sa joie, il trouvait que « toutes sortes d'égards, de bienséances et de modération avaient été observées[148] », d’autres allaient jusqu’à blâmer l’excès de ménagements et de courtoisie[149], frémiraient d’une indignation qu’on voudrait croire sincère[150], comparaient la politesse du traitement fait à Cellamare et l’indigne brutalité avec laquelle le duc de Saint-Aignan avait été chassé de Madrid, et ensuite obligé avec sa femme, une femme de chambre et trois valets de gagner Saint-Jean-Pied-de-Port à des de mulet, d’où, pendant qu’on arrêtait, le carrosse à Pampelune et y maltraitait les domestiques qui jouaient le rôle d’ambassadeur et d’ambassadrice, le duc et la duchesse mandaient du secours et une voiture de Bayonne où ils se rendirent en grande hâte[151].

Tous ces faits répandus, grossis, commentés, réalisaient complètement le dessein de Dubois pendant les six mois où il avait couvé la conspiration dans l’attente des services qu’en retirerait sa politique. Le double coup qui venait de frapper un ambassadeur déloyal et un bâtard ambitieux atteignait le parti de la « vieille Cour » et la petite noblesse provinciale qui avait lié sa cause à celle du duc du Maine. « Les fugitifs trouvèrent jusqu’au fond des provinces les plus éloignées l’horreur de leur complot et les pères même refusèrent asile à leurs enfants[152]. Cellamare put lire l’indignation dans les honneurs forcés qu’on lui rendait ; il fallut des précautions pour lui faire traverser en sûreté la ville d’Orléans[153]. Mais à Poitiers deux gentilshommes de l’ambassade furent grièvement insultés par les étudiants[154]. » Qu’eût-on vu s’il avait traversé Bordeaux ? Le maréchal de Berwick ne badinait pas et mettait en œuvre ce qu’on appellerait de nos jours une « campagne de presse ». « J’ai reçu ce matin, écrit-il à Dubois, les lettres imprimées du prince de Chelamar ; je les fais réimprimer ici pour en envoyer des exemplaires dans toute la province, rien n’étant plus propre à prévenir les peuples contre les insinuations des brouillons et à faire voir que la conduite d’Alberoni ne tend qu’à mettre le royaume en confusion[155]. » Berwick réclamait des exemples. « Dans cette occasion, Son Altesse Royale doit se roidir contre sa bonté ordinaire. Il ne s’agit pas seulement de ses propres intérêts, il est question de l’État, et si j’ose le dire, il ne lui est pas permis de ne pas sévir contre les coupables ou du moins contre les chefs. Il est absolument nécessaire de quelque exemple, sans quoi les brouillons seront encouragés à faire de nouveaux complots. De plus, l’impunité confirmera l’opinion que l’on tâche de répandre dans le monde, que tout ceci est une invention faite exprès pour avoir un prétexte de déclarer la guerre à l’Espagne[156]. »

Berwick, Saint-Simon n’étaient pas seuls partisans d’une répression sévère et même sanglante. On rencontrait dans le public des esprits non moins outranciers. « Quand on a la force en main, il faut s’en servir coup sur coup et violemment, écrit l’avocat Barbier, c’est le moyen d’abattre, d’étourdir et de dissiper un parti qui n’a pas encore levé la tête, et qui n’est pas encore au point d’opposer la force à la force[157]. »

L’épisode auquel l’imprévoyance et la nonchalance de Cellamare attachèrent son nom se traîna misérablement en interrogatoires, aveux, déclarations ; on renvoya d’abord les subalternes, la captivité des chefs fut adoucie. Le duc du Maine priait Dieu, la duchesse enrageait, Polignac relisait et corrigeait le manuscrit de l’Anti-Lucrèce, Malézieu se livrait à des expériences où la prestidigitation tenait autant de place que la physique, l’abbé Brigault avouait tout ce qu’on désirait savoir, Pompadour fléchit le genou et tendit la main, il retira de son essai de trahison une récompense de quarante mille livres, Laval, Menil, Boisdavy sortirent discrètement de la Bastille, songeant qu’on leur avait fait beaucoup d’honneur de ne les pas loger aux Petites-Maisons[158]. Mlle de Launay s’attarda en prison dix-huit mois, ce furent les plus aimables de sa vie, les seuls où elle connut la joie d’être aimée.

Pendant qu’Alberoni perdait la partie en France, il la perdait aussi dans le Nord.

Les Hollandais continuaient à manifester leur antipathie pour la Quadruple-Alliance par le recours a tous les délais qui leur permettaient de retarder leur accession. M. de Morville, successeur de Châteauneuf depuis le mois d’août 1718, ne négligeait rien pour hâter une décision, mais son impétuosité s’émoussait sur la lente et lourde machine de la république. Les Hollandais voulaient rentrer dans leurs déboursés et il fallut leur donner satisfaction. Une convention signée à la Haye leur donna gain de cause sur l’Empereur au sujet de l’exécution du traité de la Barrière (22 décembre 1718). Alors ils ne furent que plus déterminés à obtenir l’engagement de la France à ne faire ni traite ni convention avec aucune puissance du Nord. Dubois, après avoir résisté, céda devant l’insistance des Anglais[159], Ceux-ci s’inquiétaient de voir durer cette alliance si ancienne entre la France et la Suède, où les principaux avantages allaient à la Suède sous forme de subsides. Nonobstant notre fidélité onéreuse à des engagements qui touchaient à leur fin, Charles XII avait écouté le tentateur Alberoni et conclu un accord avec Philippe V, accord aux termes duquel il devait s’emparer de Trondheim en Norvège, passer de là en Écosse, se déclarer pour le Prétendant et s’intituler protecteur de la Religion protestante. C'est ainsi que le cardinal entendait occuper Georges Ier dans son île et le détourner des affaires d’Espagne. Seulement il arriva que doux jours après l’arrestation de Cellamare et l’écroulement de ses projets sur la France, Charles XII tombait, frappé d’un coup de fauconneau devant Frederikshall et c’était l’effondrement de ses projets sur l’Angleterre (11 décembre 1718).

 

 

 



[1] P.-E. Lémontey, Histoire de la Régence, in-8°, Paris, 1832, t. I, p. 198 ; Alberoni à Cellamare, 15 mars 1717 : « La Reine a fort agréé la satire que vous savez. Leurs Majestés s’en sont diverties deux jours entiers. » J. Vatout, La conspiration de Cellamare, 2e édit. in-12, Paris, 1832, ne compte pas ; mais il a publié en appendice des documents tous connus par d’autres publications généralement plus correctes.

[2] Bibl. nat., ms. franç. 10670-10672 : Torcy, Mémoires inédits, t. II, p. 786-787 ; t. III, p. 419, 420.

[3] Lémontey, op. cit., t. I, p. 198-199.

[4] Il habitait l’ancien hôtel Colbert.

[5] Sur ces Pompadour, voir G. Clément-Simon, Le vicomte de Pompadour, lieutenant du Roi en Limousin, et Marie Fabry, dans Revue des Questions historiques, 1897, t. LXI, p. 364 suivantes. Jean, marquis de Pompadour, dernier du nom eut pour héritière Marie-Françoise, mariée an marquis d’Hautefort, décédée en 1727 ; elle institua pour légataire universelle Augustine-Françoise de Choiseul, avec substitution, pour la terre de Pompadour, en faveur du prince de Conti. Cette substitution eut son effet et, en 1745, le château et la terre de Pompadour furent vendus par Louis-François de Bourbon-Conti à Antoinette Poisson. Celle-ci le revendit en 1760 à Joseph de Laborde, qui le revendit on 1761 au duc de Choiseul qui le céda au Roi la même année.

[6] Lettres de M. Filtz-Moritz sur les affaires du temps et principalement sur celles d'Espagne sous Philippe V et les intrigues de la princesse des Ursins, traduites par M. de Caronac [Guillaume Plantavit de la Pause de Margon], in-12, Amsterdam 1718 ; à la fin de la 2e édition on trouve la Réponse de Brigault ; du môme, Conférence d'un Anglais et d'un Allemand sur les lettres de Filtz-Moritz, in-12, Cambrai 1722. Voici le jugement que porte la mère du Régent sur cet abbé Brigault : « Je le connais bien, Mme de Ventadour l’a tenu avec le premier Dauphin sur les fonts de baptême où il a reçu le nom de Philippe. Il a de l’esprit, mais c’est un drôle d’intrigant et un vaurien ; il a longtemps fait le dévot et il voulait se faire père de l’Oratoire. Il s’est ensuite fatigué de cette vie et il s’est fait maquereau ; il a attiré auprès de lui des jeunes filles qu’il vendait en secret, puis il est devenu le factotum de Mme du Maine dont il a été serviteur, et il a pris part à tous les libelles, vers et chansons dirigés contre mon fils ». Madame à la raugrave Louise, Paris, 13 décembre 1718, dans Correspondance, édit. G. Brunet, t. II, p. 41. Buvat, Journal, t. I, p. 342.

[7] A.-D. Jullien, Les grandes nuits de Sceaux. Le Théâtre de la duchesse du Maine, in-4°, Paris, 1876.

[8] Mme de Staal de Launay, Mémoires, in-12, Paris, 1890, t. I, p. 167.

[9] Madame à la raugrave Louise, dans Correspondance, édit. G. Brunet, t. I, p. 470.

[10] Déclaration de la duchesse du Maine, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 423.

[11] Arch. de Simancas, Estado, l. 4331 : Copia de carta original del señor principe de Chelamar al sentir marques de Grimaldo ; fecha en Madrid a 13 de Agosto 1720, dans A. Baudrillart, Philippe V et la Cour de France, t. II. p. 579-582.

[12] Ibid.

[13] Déclaration de l’abbé Brigault, dans Lémontey, op. cit., t. II, p. 400 ; lettre du marquis de Pompadour à M. Le Blanc, dans Lémontey, op. cit., t. II, p. 403.

[14] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 293, fol. 82.

[15] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 298, fol. 84 : voir Alberoni à Cellamare, 21 novembre 1718, citée par Capefigue, Philippe d'Orléans, régent de France, in-8°, Paris, 1838, t. II, p. 50.

[16] Marquis de Pompadour à M. Le Blanc, dans Lémontey, op. cit., t. II, p. 403.

[17] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 319, fol. 197 : Dubois au Régent, Londres, 16 juin 1718.

[18] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 219, fol. 202 : Dubois au Régent, Londres, 20 juin 1718.

[19] Arch. des Aff. Etrang., Angleterre, t. 320, fol. 128 : Dubois au Régent, Londres, 7 juillet 1718.

[20] Déclaration de la duchesse du Maine, dans Lémontey, op. cit., t. II, p. 420.

[21] Daunau, Blaise-Henri de Corte, baron de Walef, dans Biographie universelle, t. XLIV, p. 247-248.

[22] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 161-163.

[23] Déclaration de la duchesse du Maine, dans P.-E. Lémontey, op. cit., t. II, p. 420.

[24] Ibid., t. II, p. 424.

[25] Requête présentée au Roy catholique au nom des Trois Etats de la France. (Vatout, op. cit., t. II, p. 293-302) ; Copie d’une lettre du Roy catholique, écrite de sa main, et que le prince de Cellamare son ambassadeur, avait ordre de présenter au Roy très Chrétien, datée du 3 septembre 1718 ; Copie d’une lettre circulaire du Roy d’Espagne, que le prince de Cellamare, son ambassadeur, avait ordre d’envoyer à tous les Parlements de France datée du 4 septembre 1718 (Vatout, op. cit., t. II, p. 292-293) ; Manifeste du Roy catholique adressé aux Trois Etats de la France, daté du 6 septembre 1718 (Vatout, op. cit., t. I, p. 395-402).

[26] Lémontey, op. cit., t. I, p. 207-208.

[27] Ibid., t. I, p. 207, et p. 406 : Lettre de M. de Pompadour à M. Le Blanc.

[28] Ibid., t. I, p. 208.

[29] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, Mémoires et Documents, t. 135, Dépêches des 14 et 20 mai 1718.

[30] Cellamare à Alberoni, 4 juillet 1718, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 209.

[31] Déclaration de la duchesse du Maine, dans op. cit., t. II, p. 425.

[32] Ibid., p. 425.

[33] Ibid., p. 426.

[34] Lémontey, op. cit., t. II, p. 406 : Lettre de M. de Pompadour à M. Le Blanc.

[35] Ibid., t. II, p. 426-427 : Déclaration de la duchesse du Maine.

[36] Ibid., t. I, p. 210 : Cellamare à Alberoni, 20 juillet 1718 ; Brit. Mus., Cellamare, Memorie, t. II, fol. 263.

[37] Ibid., t. I, p. 211 : Alberoni à Cellamare, 20 août 1718.

[38] Ibid., t. II, p. 407 : M. de Pompadour à M. Le Blanc.

[39] Ibid., t. I, p. 211 : Alberoni à Cellamare, 20 août 1718.

[40] Ibid., t. II, p. 455 : Déclaration de la duchesse du Maine.

[41] Arch. de Simancas, Est., l. 4331 : Copia di carta original, du 13 agosto 1713, Vatout, op. cit., t. II, p. 303-306 a publié l’« Extrait d’un plan des conjurés envoyé par Cellamare à Alberoni », élucubration ridicule.

[42] Déclaration donnée à la Bastille par Boisdavy, le 14 mai 1719, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 212.

[43] Folard fut refusé comme radoteur ; Forbin retira sa demande au bout de huit jours pour raison de santé.

[44] Alberoni à Cellamare, 21 novembre, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 214, note 2.

[45] Ibid., t. I, p. 224-225 : Lista de les oficiales de las tropas de Francia que pretenden ser empleados en las de España, Vatout, op. cit., t. II, p. 306-307.

[46] Mémoires de Sabran, cités par Lémontey, op. cit., t. I, p. 226.

[47] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 179.

[48] Ibid., t. I, p. 180.

[49] Ibid., t. I, p. 180-181 ; Déclaration de la duchesse du Maine, dans Lémontey, op. cit., t. II, p. 428, 430-431.

[50] Cellamare à Alberoni, 7 novembre 1718, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 215.

[51] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 283, fol. 169 : Cellamare à Alberoni, 26 septembre 1718.

[52] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 283, fol. 169 : Cellamare à Alberoni, 26 septembre 1718.

[53] Arch. Aff. Etrang., Espagne, t. 283, fol. 70 : Cellamare à Alberoni, 3 octobre 1718.

[54] Arch. Aff. Etrang., Espagne, t. 283, fol. 70 : Cellamare à Alberoni, 24 octobre 1718

[55] Bignon pourrait avoir été mêlé à la conspiration ; voir sa lettre à l’abbé Brigault, du 3 août 1718, aux Arch. des Aff. Etrang., Espagne, p. 279. fol. 53. dans A. Baudrillart, op. cit., t. II, p. 579. Pour Lémontey, op. cit., t. I, p. 216, c'est Bignon qui fournit Buvat à Brigault.

[56] Voir J. Buvat, Journal de la Régence, édit. Campardon, t. I, introd., p. 6-7 ; Ch. Aubertin, L’esprit public au XVIIIe siècle.

[57] Mahon, History of England, t. I, p. 336.

[58] L'abbé Dubois à l’abbé de Targny, 16 juillet 1718, dans Ch. Aubertin, op. cit., p. 116-117.

[59] Dubois à Nancré, 25 octobre 1718, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 215, note 2.

[60] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 247, fol. 40 : Saint-Aignan à Dubois, 25 novembre 1718.

[61] M. Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, dans op. cit., t. I, p. 390-391.

[62] Lenglet-Dufresnoy, Mémoires de la Régence, t. V : Notice sur la Conspiration de Cellamare, p. 178.

[63] Lémontey, op. cit., t. I, p. 216.

[64] Saint-Simon, Mémoires, édit. Chéruel, t. XVIII, p. 385.

[65] Requête du sieur Buvat, adressée le 27 décembre 1727 au cardinal de Fleury ; J. Buvat, Journal, t. I, p. 8.

[66] Gazette de la Régence, p. 294-295 ; N... à Mme de Balleroy, 23 décembre 1718, dans Les Correspondants, t. I, p. 395-396.

[67] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 183 ; Madame la raugrave Louise, 6 janvier 1719, dans Correspondance, t. II, p. 48-49.

[68] Brit. Mus., ms. Cellamare, Memorie, t. II, p. 309.

[69] Gazette de la Régence, p. 385 : « il arriva jeudi soir ».

[70] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 183-184, dit exactement le contraire.

[71] M. Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, 10 décembre, dans Les correspondants de Mme de Balleroy, t. I, p. 388.

[72] Lémontey, op. cit., t. I, p.219, note 1.

[73] Barbier, Journal, t. I, p. 20 ; Madame à la raugrave Louise, 11 décembre 1718, dans Correspondance, t. I, p. 39.

[74] J. Buvat, Journal, t. I, p. 341.

[75] M. Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, 9 décembre, dans op. cit., t. I, p. 341.

[76] Buvat, Journal, t. I, p. 341 ; cette version d’un témoin oculaire diffère de celle de Dangeau, Journal, t. XVII, p. 434 et de Barbier, Journal, t. I, p. 21, quant à Lémontey, op. cit., p. 220, il adopte cette deuxième version que voici : Le Régent envoie chercher Cellamare et lui dit d’aller chercher Le Blanc pour affaires (B) : il s’y rend à une heure après-midi redemander un paquet de lettre» (D) ; Le Blanc, assisté de Dubois et du maréchal de Bezons (B) lui dit que le paquet avait été vu, qu’il y avait des choses importantes et que om de lui rendre le paquet il avait ordre de le ramener à son hôtel (D), il le fait monter dans son carrosse et, à leur arrivée, un détachement de mousquetaires s’empare des portes de l’hôtel (D). D’après (B), Le Blanc fait avouer l’authenticité d'une lettre compromettante et autographe, puis l’arrête aussitôt, sort de l'hôtel de la guerre par une porte de derrière, monte dans le carrosse de Le Blanc qui le conduit, rue Neuve-des-Petits-Champs, où dès leur arrivée, les mousquetaires s’emparent des portes.

[77] Ibid., t. I, p. 337 ; M. Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, 10 décembre, dans op. cit., t. I, p. 388.

[78] J. Buvat, Journal, t. I, p. 337-338 ; Buvat n’omet pas d’en donner le titre intégral.

[79] J. Buvat, Journal, t. I, p. 338-339.

[80] Ces papiers se trouvent encore aux Arch. des Aff. Etrang., Espagne, année1715, t. 277, 278 ; années 1716 à juillet 1718, t. 277, 278 ; année 1718 juillet à décembre, t. 279-281. L’inventaire des liasses saisies chez l’ambassadeur, t. 282, 283. Ce ne fut que le 12 décembre que fut fait ce tri de papiers et l’envoi des coffres au vieux Louvre, d’après J. Buvat, op. cit., t. I, p. 339-340.

[81] Lémontey, op. cit., t. I, p. 227 ; Barbier, Journal, t. I, p. 24, dit que Cellamare traita Dubois « comme un maraud ».

[82] Brit. Mus., ms. Cellamare, Memorie, t. II, fol. 312, 316 ; voir Gazette de la Régence, p. 297 ; 19 décembre 1718.

[83] J. Buvat, Journal, t. I, p. 339 ; Dangeau, Journal, t. XVII, p. 434 ; 9 décembre 1718 ; Gazette de la Régence, p. 296.

[84] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 434, 9 décembre ; Mercure, n° de décembre 1718, p. 129-134.

[85] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 434 ; Barbier, Journal, t. I, p. 22 ; Gazette de la Régence, p. 296.

[86] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 186.

[87] Gazette de la Régence, p. 299 ; 23 décembre 1718.

[88] Saint-Simon, Mémoires, édit. Chéruel, t. XVI, p. 176.

[89] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 434-435 ; 10 décembre 1718 ; Gazette de la Régence, p. 296 ; Mme Staal, Mémoires, t. I, p. 186.

[90] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 435 ; 11 décembre 1718.

[91] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 187.

[92] Gazette de la Régence, p. 297 ; 12 décembre 1718.

[93] M. de Caumartin à Mme de Balleroy, 10 décembre 1718 ; dans op. cit., t. I, p. 389.

[94] Gazette de la Régence, p. 297 ; 12 décembre 1718.

[95] Barbier, Journal, t. I, p. 23.

[96] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 189 ; Dangeau, Journal, t. XVII, p. 435, 11 décembre 1718 ; Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, dans op. cit., t. I, p. 392.

[97] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 190 ; Buvat, Journal, t. I, p. 343.

[98] Mme de Staal, Mémoires, t. I, p. 191-192 ; J. Buvat, op. cit., t. I, p. 342-343 ; Dangeau, Journal, t. XVII, p. 438 ; 17 décembre.

[99] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 436 ; 13 décembre.

[100] Copie et traduction française de deux lettres du prince de Cellamare, ambassadeur du roi d'Espagne en France, faisant foi de ses projets de conjuration, adressées au cardinal Alberoni, publiées par ordre du Roi et précédées d’une note expliquant le renvoi de l’ambassadeur, in-fol., Paris 1718, M. Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, 17 décembre, op. cit., t. I, p. 393-394.

[101] Barbier, Journal, t. I, p. 24.

[102] Lémontey, Histoire de la Régence, t. I, p. 218, note 1.

[103] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 286, fol. 105 : M. du Libois à Dubois, 15 décembre 1718.

[104] Lémontey, op. cit., t. I, p. 221. Cellamare écrivit aux ambassadeurs (Vatout, op. cit., t. II, p. 308-309) et Dubois également, le 13 décembre (Ibid., t. II, p. 310-311).

[105] J. Buvat, Journal, t. I, p. 340 ; Dangeau, Journal, t. XVII, p. 436 ; 13 décembre 1718.

[106] Lémontey, op. cit., t. I, p. 221.

[107] Bibl. Mazar., ms. 2354, [Le Dran] Vie de Dubois, fol. 137 : Alberoni à Cellamare, 14 décembre 1718.

[108] Public Record Office, France, vol. 352 : lord Stair à Craggs, Paris, 10 décembre 1718.

[109] Public Record Office, France, vol. 352 : lord Stair à Craggs, Paris, 11 décembre 1718.

[110] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, Mém. et docum., t. 142 : Dubois à Destouches, 14 décembre 1718.

[111] Lémontey, op. cit., t. I, p. 223.

[112] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 439 ; 19 décembre 1718.

[113] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 438 ; 17 décembre ; p. 440 ; 20 décembre 1718.

[114] M. Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, 18 décembre, dans Les correspondants de la Marquise de Balleroy, t. I, p. 394.

[115] Gazette de la Régence, p. 298-300 ; 23 décembre 1718.

[116] Lettre à Mme de Balleroy, 23 décembre 1718, dans op. cit., t. I, p. 397.

[117] Barbier, Journal, t. I, p. 23 ; Gazette de la Régence, p. 300 ; Caumartin de Boissy à Mme de Balleroy, dans op. cit., t. I, p. 391.

[118] Gazette de la Régence, p. 299 ; 23 décembre 1718.

[119] Lettre à Mme de Balleroy, 23 décembre 1718, dans op. cit., t. I, p. 398 ; il venait d’acheter l’hôtel de Conti, Saint-Simon, Mémoires, t. XI, p. 35-36.

[120] J. Buvat, Journal, t. I, p. 343.

[121] Gazette de la Régence, p. 300 ; 23 décembre 1718.

[122] Barbier, Journal, t. I, p. 26 ; Gazette de la Régence, p. 300, 305 ; Madame à la raugrave Louise, 27 décembre, dans Correspondance, t. II, p. 44.

[123] Buvat, Journal, t. I, p. 342.

[124] Barbier, Journal, t. I, p. 29 ; janvier 1719.

[125] Lafitau à son frère, Paris, 11 février 1719, dans C. de Sévelinges, Mémoires et correspondance du cardinal Dubois, in-8°, Paris 1815, t. I, p. 272.

[126] Public Record Office, France, vol. 352 ; lord Stair à lord Stanhope, Paris, 15 décembre 1718.

[127] Gazette de la Régence, p. 308 ; 6 janvier 1719 ; Madame à la raugrave Louise, 30 décembre 1718, op. cit., t. II, p. 46, dit que Foucault De Magny se cachait chez eux.

[128] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 442 ; 24 décembre 1718.

[129] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 443 ; 25 décembre 1718.

[130] Saint-Simon, Mémoires, (1905), t. XI, p. 56-58.

[131] D’Argenson, Mémoires, édit. 1825, t. I, p. 178.

[132] Lémontey, Histoire de la Régence, t. I, p. 222.

[133] Saint-Simon, Mémoires (1905), t. XI, p. 58-59.

[134] Dangeau, Journal, t. XVII, p. 444 ; 28 décembre 1718.

[135] Barbier, Journal, t. I, p. 27 ; janvier 1718.

[136] Bibl. nat., mss. fonds Clérambault, 1217 : Ordre de recevoir et de tenir sous bonne garde mon oncle le duc du Maine, 29 décembre 1718.

[137] J. Buvat, Journal, t. I, p. 344.

[138] Méditations sur le sermon de Notre-Seigneur sur la Montagne par le duc du Maine, publiées pour la première fois, d’après un manuscrit authentique et publiées d’une notice historique par A. Mellier, in-8°, Paris, 1884, p. cxxxvi-cli ; travail consciencieux, bien que l’auteur ait ignoré l’existence de la Déclaration de la duchesse du Maine, publiée par Lémontey, op. cit., t. II, p. 420-438 et par Vatout, La conspiration de Cellamare, 1832, t. II, p. 327-366.

[139] Gazette de la Régence, p. 307, 6 janvier 1719 ; J. Buvat, Journal, t. I, p. 344, Dangeau, Journal, t. XVII, p. 445, 447.

[140] Barbier, Journal, t. I, p. 27 ; de Piépape, Une petite-fille du Grand Condé, la duchesse du Maine, reine de Sceaux et conspiratrice 1676-1753, in-8°, Paris.

[141] Mme de Staal, Mémoires, t. II, Dangeau, Journal, t. XVII, p. 445 ; 29 décembre 1718 ; Buvat, Journal, t. II, p. 344-345 ; Barbier, Journal, t. I, p. 28 ; Saint-Simon, Mémoires, (1905), t. XI, p. 61 ; Madame à la raugrave Louise, janvier, dans op. cit., édit, G. Brunet, t. II, p. 46-47 ; Voir Bibl. de l'Arsenal, Arch. de la Bastille, ms. 10677-10678.

[142] Lettre à Mme de Balleroy, 31 décembre 1718, dans op. cit., t, I, p. 240 ; Buvat, Journal, t. I, p. 345 ; Gazette de la Régence, p. 305.

[143] Gazette de la Régence, p. 302 ; 2 janvier 1719. Saint-Simon écrit : « Commotion de la découverte... »

[144] Buvat, Journal, t. I, p. 344.

[145] Gazette de la Régence, p. 306 ; 2 janvier 1719.

[146] Gazette de la Régence, p. 306 ; 2 janvier 1719 ; Madame à la raugrave Louise, 6 janvier 1719, dans op. cit., édit. Brunet, t. II, p. 49.

[147] Alberoni à Rocca, 16 décembre 1718, dans Lettres intimes, édit. Bourgeois, p. 619.

[148] Arch. des Aff. Etrang., Turin, t. 133, fol. 310 : De Prye à Dubois, 24 décembre 1718.

[149] Arch. des Aff. Etrang., Vienne, t. 133, fol. 7 : Bonneval à Dubois, 1er janvier 1719.

[150] Arch. des Aff. Etrang., Hollande, t. 335 (non folioté) : Morville à Dubois, 14 janvier 1719 ; ibid., t. 331, fol. 187 : Basnage à Dubois, 20 décembre ; fol. 199, Basnage à Dubois, 23 décembre ; Angleterre, t. 311, fol. 178, 203 ; Destouches à Dubois, 19 et 20 décembre 1718.

[151] Saint-Simon, Additions au Journal de Dangeau, t. XVII, p. 44 ; Mémoires (1905), t. XI, p. 63.

[152] Mémoires de Ferrette, cités par Lémontey, op. cit., t. I, p. 228.

[153] Lettre de Du Libois, 16 décembre 1718, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 228.

[154] Autre lettre du même, 5 mars 1719, dans Lémontey, op. cit., t. I, p. 228.

[155] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 286, fol. 167 : Berwick à Dubois, 18 décembre 1718.

[156] Arch. des Aff. Etrang., Espagne, t. 286, fol. 186-187 : Berwick à Dubois, 25 décembre 1718.

[157] Barbier, Journal, t. I, p. 28.

[158] Lémontey, op. cit., t. I, p. 212.

[159] Public Record Office, France, vol. 352 : lord Stair à Craggs, Paris, 31 décembre 1718.