I. — MADAME DE POMPADOUR. LOUIS XV n'ayant jamais gouverné, les périodes de son règne sont marquées par les noms des personnes qui successivement conduisirent la politique du royaume. Après celles du Régent, du duc de Bourbon et du cardinal Fleury, ce fut la période de Mme de Pompadour. La favorite dont le règne devait durer vingt ans, naquit
en 1721. Son père, le sieur Poisson, était commissaire aux vivres ; sa mère, belle à miracle, avait eu, entre autres amants,
dit-on, le fermier général Le Normant de Tournehem. Le Normant maria
Jeanne-Antoinette Poisson à un sous-traitant, son neveu, du même nom que lui,
auquel il donna le château d'Étioles. La jeune dame d'Étioles était, dit le lieutenant
des chasses Leroy, d'une taille au-dessus de
l'ordinaire, svelte, aisée, souple, élégante ; son visage était d'un ovale
parfait, ses cheveux plutôt châtain clair que blonds ; ses yeux avaient un charme particulier, qu'ils devaient
peut-être à l'incertitude de leur couleur ; c'étaient des yeux gris.
Elle avait le nez parfaitement bien formé, la bouche
charmante, les dents très belles, un sourire
délicieux, la plus belle peau du monde.
Le plus célèbre portrait qui reste d'elle est un pastel de Mme d'Étioles entreprit de devenir la maîtresse du Roi ;
elle lui fit dire qu'elle l'aimait, voltigea autour de lui, vêtue de rose, en
phaéton bleu, et inquiéta beaucoup Mme de
Châteauroux. A la mort de celle-ci, les coteries se disputèrent l'honneur et
le profit de fournir une maîtresse à Louis XV. Ce fut au moment du mariage du
Dauphin, en mars i745, que Mme d'Étioles assura sa victoire. Le mois d'après,
elle prenait à Versailles l'appartement autrefois occupé par Mme de Mailly.
Retirée à Étioles, pendant la campagne de Fontenoy, elle reçut du Roi, en
quelques semaines, jusqu'à quatre-vingts lettres. Déclarée marquise de Pompadour,
elle fut officiellement présentée à C'était justement une des puissances de Mme de Pompadour
que d'être une financière. La finance, enrichie dans la misère publique, toute
brillante de luxe, courtisant les gens d'esprit et courtisée par eux,
prévalait sur la noblesse ruinée ; elle avait soutenu Mme d'Étioles, dans sa
campagne d'amour. Pâris du Verney, qui avait employé Poisson dans ses
bureaux, s'était toujours intéressé à sa fille. Or, il était sorti de
disgrâce ; la guerre de la succession d'Autriche avait fait de lui l'homme
nécessaire. Il était munitionnaire, vivrier ;
mais il prétendait être, et il était en effet tout autre chose ; en ordonnant
la marche des convois, il déterminait celle des armées ; il voulait des
généraux qui fussent à sa discrétion. Ce général des
farines, comme on l'appelait, était secondé par son frère, Pâris de
Montmartel, l'un des grands banquiers de l'Europe, qui fournissait des fonds
aux armées. Quand Du Verney rencontrait quelque résistance à ses vues, il se
retirait à son château de Plaisance, auprès de Charenton ; la caisse de
Montmartel se fermait aussitôt, et le contrôleur général ne savait plus
comment subvenir aux dépenses des troupes. Vers la fin de la guerre de La marquise se fit la surintendante des plaisirs du Roi.
Pour amuser ce perpétuel ennuyé, elle installa dans une galerie de Versailles
un théâtre où elle appela des acteurs et des chanteurs de La première pièce jouée sur le théâtre des cabinets fut Le Mariage fait et rompu, de Dufresny,
le duc de Nivernais, dans un rôle de Gascon, eut l'honneur très rare de faire
rire le Roi. On représenta ensuite le
Méchant de Gresset, le Préjugé à la
mode de Une des façons qu'avait Louis XV de se distraire était de
se promener de château en château. La marquise l'accompagnait dans les
résidences royales et dans les siennes. Elle s'était fait donner le château
de Crécy, près de Dreux, où elle avait aménagé un cabinet
d'assemblée de cinquante pieds de long sur vingt-six de large, tout
décoré de panneaux sculptés et de glaces. Les invités portaient l'uniforme de
Crécy, l'habit vert à boutonnières d'or, costume dessiné par le Roi lui-même.
Elle avait acheté La plus belle demeure de la marquise fut celle que le Roi
lui fit bâtir, le château de Bellevue. Construit sur un terrain sablonneux
qu'il fallut défoncer jusqu'à cent vingt pieds pour poser les fondations, il
coûta au moins deux millions et demi, et le public parla même de six
millions. L'appartement du Roi était décoré par Van Loo, celui de la marquise
par Boucher, celui du Dauphin et de Les continuelles allées et venues de Louis XV
déconcertaient les ministres, et le public s'irritait des dépenses qu'elles occasionnaient.
Le bien ne serait-il pas, disait le marquis
d'Argenson, que nos rois résidassent à Paris, et ne
découchassent que pour aller seuls, et sans suite, dans quelques maisons de
chasse ? Le Roi ne se souciait pas d'aller habiter dans le tumulte de
Paris, et la royauté était trop royalement installée à Versailles pour qu'il
en pût déménager ; mais, à Versailles, il s'ennuyait plus qu'ailleurs. Obligé
d'y séjourner durant le carême et de s'y trouver pour certaines cérémonies,
comme pour les réceptions d'ambassadeurs, il s'en absenta le plus qu'il put.
En fuyant Versailles, il fuyait l'étiquette, le travail, les ministres et la
société de Par tous ces moyens, La marquise devint comme un premier ministre et se débarrassa de ceux qui la gênaient. Orry, pour avoir refusé sa signature à des marchés de fournitures conclus par les Pâris, fut renvoyé en 1745. En 1749 ce fut le tour de Maurepas, pour avoir touché quelques mots au Roi du rôle politique de la marquise. Louis XV répéta la chose à sa maîtresse, qui feignit la crainte d'être empoisonnée par ses ennemis, comme on disait que l'avait été Mme de Châteauroux. Maurepas, d'ailleurs, était soupçonné de composer quelques-unes de ces chansons qui, répandues à Versailles et à Paris, atteignaient Mme de Pompadour au plus intime de sa vanité ou de ses faiblesses, jusque dans les secrets de son corps, de sa santé, de son tempérament. Au ministère restait un ami de Maurepas, le comte d'Argenson, qui avait la confiance du Roi, et aussi l'appui des dévots ; la marquise lia partie avec le successeur d'Orry au contrôle général, Machault. Dans toutes les affaires du règne, on la retrouvera. Elle eut grande part aux affaires étrangères ; elle tint pour la magistrature contre le clergé, pour les Philosophes contre les Jésuites, et contre les Jésuites encore pour les Jansénistes. Elle était l'ennemie de l'Église, qui lui tenait rigueur. Ce fut sans doute pour participer à leur popularité,
autant que par penchant naturel, qu'elle se fit l'amie des gens de lettres et
des artistes. Voltaire qui, en 1745, célébra ses amours avec Louis XV, fut,
par sa protection, choisi pour écrire et faire jouer à Montesquieu invoqua la protection de la marquise contre
une : réfutation de l'Esprit des Lois
que publiait le fermier général Dupin ; elle fit en sorte que l'ouvrage de Dupin
fût supprimé. Elle prit en amitié Jean-Jacques Rousseau pour son Devin de village, qu'elle fit représenter
sur le théâtre de Mme de Pompadour n'a pas eu sur les arts l'influence qu'on
lui a quelquefois attribuée ; le style Pompadour
était en plein épanouissement avant qu'elle devint la maîtresse du Roi. Mais
elle accueillait' avec une grâce particulière les artistes, et, bâtisseuse
comme elle était, éprise du joli luxe des intérieurs. elle enrichissait les
peintres et les décorateurs par des commandes. Ainsi fit elle à l'égard de
Boucher, de Cochin le fils. Elle admit dans son intimité le graveur Guay qui
exécutait sur pierres fines des gravures dont elle donnait le sujet, et Outre Crécy, Mme de Pompadour fut très vite impopulaire. On lui
reprocha ses dépenses qui furent énormes en effet : sept ou huit millions
pour ses bâtiments, quatre millions pour le théâtre et les fêtes, un million
pour un seul de ses voyages, celui du Havre où elle alla mettre la première
cheville du vaisseau Le Gracieux. Elle avait une maison de quarante
personnes, un service de bouche, vaisselle d'argent et d'or, écuries pleines.
Elle faisait des pensions à des parents et à des courtisans, dotait des
filles pauvres et jouait gros jeu. On l'accusait de trafiquer des places et
des grâces, par exemple d'avoir reçu de Dupleix cinquante mille livres pour
le cordon qui lui fut donné. Dans une visite à Paris, en 1750, menacée par la
foule, elle fut obligée de s'enfuir. Quand le Dauphin et Son règne ne fut jamais tranquille ; elle avait à se
défendre contre les dames de haut vol qui voulaient lui prendre le Roi, Mmes
de Dans son extraordinaire fortune, cette femme ne fut pas heureuse. Cette vie de fêtes, de voyages, d'intrigues de toutes sortes, dont le champ s'étendait à l'Europe entière, et la nécessité d'amuser toujours le Roi, qui ne lui permettait pas même d'être malade, l'épuisaient. Déjà en 1749 elle écrivait : La vie que je mène est terrible.
A peine ai-je une minute à moi : répétitions et représentations ; et deux
fois la semaine voyages continuels, tant au Petit-Château qu'à Avec quelques variantes, c'est ce qu'avait dit Mme de Maintenon. II. — LE COMTE D'ARGENSON[4]. PENDANT le gouvernement de Mme de Pompadour un secrétaire
d'État, le comte d'Argenson, garda son indépendance. La disgrâce de Maurepas,
loin de l'affaiblir dans le Conseil, l'y fortifia ; grâce à la faveur royale
dont il jouit pleinement, personne ne semblait pouvoir lui disputer la
prééminence. Le secrétariat d'État de Le comte d'Argenson était digne de la confiance du Roi.
Entré au secrétariat d'État de Après la paix d'Aix-la-Chapelle, par un édit de janvier
1751, le comte d'Argenson a créé l'École militaire, où 500 jeunes
gentilshommes furent élevés gratuitement. En 1755, à la mort du prince de
Dombes, fils du duc du Maine, et colonel-général des Suisses et Grisons, le
comte d'Eu, son frère, lui succéda dans cette charge, mais en renonçant à la
grande maîtrise de l'artillerie dont il était titulaire. Le secrétaire d'État
de En raison des circonstances où il devint secrétaire d'État
de En 1755, au régiment de Flandre-Infanterie, il y avait six
capitaines d'origine roturière et autant au régiment d'infanterie
Royal-Roussillon. Dans la cavalerie, l'invasion roturière était moindre, mais
encore appréciable ; on y voyait, à côté de fils de magistrats de parlements,
de conseillers des chambres des comptes, de conseillers de présidiaux, des
fils de négociants. Le comte de Saint-Germain, futur ministre de Comme Ministre de Paris,
d'Argenson entreprit de moraliser la ville. Il fit enlever des filles dans de
mauvais lieux, des servantes sans place, des ouvrières, des gens sans aveu
qui vivaient dans de petites auberges, des pauvres errants et aussi de petits gueux, fils d'artisans ; il voulait envoyer
tout ce monde aux colonies. Ce fut un soulèvement général. De grands
rassemblements se firent rue de Cléry, à Mme de Pompadour avait pour d'Argenson une haine publique ; elle lui reprochait d'essayer de
la confiner dans la direction des plaisirs du Roi. D'Argenson, pour se
défendre, s'appuya sur les amis de III. — L'ADMINISTRATION FINANCIÈRE DE MACHAULT (1745-1754). DE grandes réformes fiscales et sociales furent entreprises par Machault d'Arnouville. Machault naquit en 1701 d'une famille de robe. Il devint maître des requêtes en 1728, et, en 1743, intendant de Hainaut, fonction que la guerre et le voisinage de la frontière rendait difficile, et dont il s'acquitta bien. En 1745, il fut appelé au Contrôle général. Bien qu'il ne fût pas courtisan le moins du monde, mais très froid, sans agrément et sans grâce, et droit et probe, il sacrifia aux nécessités du moment et rechercha la faveur de Mme de Pompadour. Havait des vues arrêtées et précises et une énergie tranquille à l'égard des préjugés. Machault, dit le marquis d'Argenson, s'avance au travers de tout, comme les élagueurs d'allées ; il ne va qu'à grands coups de faux ; il est entêté comme une tête de fer. Nullement théoricien, très pratique, il pense qu'il faut diminuer les exempts (de tailles), soulager les taillables de quelques millions ; que les pays d'États rendent moins au Roi que ceux d'élections ; qu'il faut connaître les produits d'affaires par régie avant de les affermer à forfait ; qu'il faut mépriser les financiers ; que le Clergé est trop riche. En 1749, comme le bail général des fermes devait être
renouvelé l'année d'après, il se préoccupa d'en tirer pour le Roi le meilleur
revenu possible. Les fermiers généraux, au nombre de quarante, mettaient en
commun un capital de 60 millions, afin d'être en état d'assurer toujours au
Roi son revenu et de lui faire des avances. L'apport de chacun était de Chaque renouvellement de bail mettait en mouvement une
foule de solliciteurs. Les places de fermiers généraux étaient très
convoitées ; elles étaient peu nombreuses, et, d'ordinaire, les titulaires
les conservaient ; mais les sous-fermiers se multipliaient indéfiniment, et
les parts d'intérêt plus encore. Les solliciteurs allaient à En 1745, les revenus ordinaires étaient inférieurs aux
dépenses d'environ 100 millions. Machault fit face aux nécessités de la
guerre par les expédients d'usage, emprunts, anticipations, affaires
extraordinaires. La paix de 1748 ne le tira pas d'embarras, car elle
l'obligea de supprimer le dixième, qui seul aurait permis d'acquitter les
dettes de l'État, mais que le Roi avait promis d'abolir sitôt la guerre
finie. Le Contrôleur usa d'un stratagème ; il abolit le dixième et prépara
l'établissement du vingtième, qu'il entendait
faire peser équitablement sur tous. Le régime des impôts lui semblait
injuste, parce qu'il n'était supporté que par le troisième ordre, et, dans
cet ordre même, par les pays d'élections plus que par les pays d'États. De la
capitation, on avait fait une taxe additionnelle de la taille ; le Clergé
s'en était racheté à bon compte. Le dixième avait été léger aux riches et aux
gentilshommes. En 1734, le roi des vins du
Bordelais, le président de Ségur, dont le revenu s'élevait à Dans les premiers jours de mai 1749, deux édits furent
signés à Marly : le premier ordonnait un emprunt pour l'acquittement des
dettes de guerre — émission de Nous avons reconnu qu'indépendamment de l'obligation dans laquelle nous nous trouvons de payer encore aujourd'hui les arrérages des dettes que la nécessité des circonstances a accumulées pendant les guerres dont le règne du feu roi, notre très honoré seigneur et bisaïeul, a été presque continuellement agité, ces dettes se sont très considérablement accrues pendant les deux dernières guerres que nous avons eues à soutenir depuis l'année MS, et qu'elles sont d'autant plus augmentées que, pour satisfaire aux différents besoins qui se sont succédé, nous avons préféré la voie des emprunts, à d'autres qui auraient pu étre plus onéreuses à nos peuples ; nous avons également reconnu qu'il était indispensable de pourvoir au paiement de ce qui reste dû des dépenses de la guerre et de celles dont elle a occasionné le retardement. Indépendamment de toutes ces charges, tant anciennes que nouvelles, la nécessité où nous sommes de mettre notre marine en état de favoriser le commerce de nos sujets et de conserver un nombre de troupes suffisant pour assurer la tranquillité de nos frontières, et maintenir la paix, nous oblige encore à des dépenses extraordinaires, qu'exige de nous la protection que nous devons à nos sujets. Comme au temps d'Orry, l'administration vérifia les déclarations des contribuables par des contrôleurs qui interrogèrent les personnes en état de leur fournir des indications sur les biens-fonds — notaires, décimateurs, syndics, collecteurs, principaux habitants des paroisses ; — mais plus encore qu'autrefois les contrôleurs eurent affaire aux dissimulations. Au reste, la contribution fut surtout supportée par les propriétaires, le développement de la richesse foncière étant de beaucoup supérieur à celui de la richesse mobilière. Et l'État admit toutes sortes de tempéraments à l'égard des profits du commerce et de l'industrie. La grande nouveauté du vingtième c'est qu'il était, non pas un expédient limité à la durée d'une guerre, mais un impôt définitif. On lui reprocha moins sa lourdeur que son universalité ; on l'eût trouvé sans doute plus supportable, s'il eût été moins juste. Le Parlement avait refusé d'enregistrer l'édit sur le vingtième ; il avait rappelé la promesse de supprimer le dixième, déploré la misère du peuple, et laissé voir la crainte que le vingtième ne devint une imposition irrévocable et progressive. L'imposition du dixième. avait-il déclaré, si elle ne subsistait pas dans toute son étendue, subsisterait du moins dans son essence, et il serait toujours vrai de dire que tous les biens se trouveraient encore chargés d'une imposition fixe et déterminée, dont l'augmentation serait toujours à craindre, et qui pourrait devenir insensiblement un tribut irrévocable. Toutefois, sur l'ordre du Roi de procéder à l'enregistrement toute affaire cessante, le Parlement avait cédé. Les premières grandes protestations vinrent des assemblées des pays d'États. Quand Machault réclama des États de Languedoc les rôles du
dixième pour permettre à l'intendant d'établir ceux du vingtième, les États
invoquèrent le testament du dernier comte de Toulouse, Raymond VII,
instituant pour son héritière universelle sa fille Jeanne, mariée à Alphonse
de Poitiers, frère de Saint Louis ; puis les décisions des États généraux de
1355 et divers édits royaux, le tout afin d'établir le privilège qu'avait la
province de consentir l'impôt. Mais Machault n'admettait pas qu'un texte
quelconque permit à des sujets de discuter d'égal à égal avec le Roi leur
maitre. Il déclina même la requête de l'archevêque de Toulouse, de Les Bretons établissaient leur droit de consentir l'impôt
sur le pacte conclu en 1532 avec François Ier au moment où leur province fut
réunie à Plus puissant qu'on ne l'avait cru, Machault fit exiler les meneurs de la résistance bretonne. Il songea même à réduire la représentation des nobles à quarante-six membres, ce qui était le chiffre de celle du Tiers ; mais il renonça à une mesure qui aurait peut-être provoqué de grands troubles, et il préféra faire accepter, grâce à quelques ménagements, l'établissement du vingtième. Le duc d'Aiguillon, auquel le duc de Chaulnes, découragé depuis la turbulente session de 1752, vendit sa charge de lieutenant général en 1753, s'y employa ; mais quand Machault quittera le contrôle général, en 1754, son successeur, de Séchelles, reprendra en Bretagne et en Languedoc le système des concessions, c'est-à-dire des abonnements ; Louis XV cédera devant la coalition des privilégiés. Avec le Clergé, Machault eut affaire à plus forte partie
encore. Il était résolu à obliger ce corps, dont il estimait les revenus à
250 millions, à contribuer très largement aux charges publiques. Des 250
millions, il convenait de soustraire 30 millions appartenant au Clergé étranger, c'est-à-dire au clergé des provinces
réunies à D'autre part, Machault, par un édit d'août 1749, renouvela l'effort tant de fois fait pour arrêter l'accroissement des biens de mainmorte. Dans le préambule de l'Édit, il fit valoir l'intérêt des familles frustrées par des donations au Clergé des héritages naturellement destinés à leur subsistance et à leur conservation ; puis l'intérêt de l'État, que le droit payé au moment des amortissements n'indemnisait qu'insuffisamment de la perte des droits sur la translation des propriétés. Par l'Édit même, il interdit aux gens de mainmorte d'acquérir quoi que ce fût par achat, legs, échange, ou donation sans s'être pourvus de lettres patentes, et il subordonna la délivrance de ces lettres à des enquêtes conduites non seulement par les évêques, mais par les juges royaux et les officiers municipaux du pays où devait se faire la fondation. Il fit ordonner aux procureurs généraux de dresser des états de tous les établissements de mainmorte de leurs ressorts avec des observations sur l'utilité desdits établissements. Il voulut enfin que les héritiers des donateurs pussent revendiquer les biens irrégulièrement transmis au Clergé. Pour diviser la résistance au vingtième qu'il savait certaine, Machault s'adressa d'abord au Clergé étranger dont il espérait venir à bout assez aisément. S'il obtenait de lui des déclarations de biens et le payement du vingtième, un précédent était créé ; mais les agents du Clergé de France excitèrent leurs confrères à protester. L'évêque de Verdun invoqua l'exemple de saint Thomas de Cantorbéry, martyr pour avoir défendu contre un roi d'Angleterre les libertés et immunités le l'Église : Ne mettez point, disait-il, en opposition l'obéissance que nous devons au Roi et celle que nous devons à notre conscience ; car, dans l'incompatibilité de ces deux devoirs, le Roi lui-même a trop de religion pour ne pas sentir lequel des deux doit avoir la préférence. Au mois de mai 1750 se réunit l'assemblée quinquennale du
Clergé. Avant que rien lui eût été communiqué sur le nouvel impôt, elle
décida d'adresser au Roi des représentations où elle rappellerait que les
secours donnés par l'Église à l'État avaient toujours été volontaires. Par
prudence, le Gouvernement ne parla pas de vingtième ; mais, le 17 août, les
commissaires du Roi annoncèrent que, pour le paiement des dettes de l'État,
il serait levé sur le Clergé, en sus du don gratuit, une contribution de 7
millions 500 mille livres, payable en cinq ans, par portions égales de L'Assemblée refusa de faire la répartition de la contribution, et, le 10 septembre, elle vota des remontrances. Elle parla du péril que les progrès de la philosophie faisaient courir à la religion, et demanda au Roi de ne point attenter aux vieux droits de l'Église. Les ministres de la religion, dit-elle au Roi, ne vous demandent que la conservation des immunités dans lesquelles plus de soixante de vos prédécesseurs les ont constamment maintenus. Ils ne vous demandent que d'être traités par le Fils aine de l'Eglise comme ils l'ont toujours été par tous les princes de l'univers catholique. Ils ne vous demandent que l'exécution des engagements que Votre Majesté a pris au jour de sa consécration. Ils ne vous demandent que la grâce de revoir leurs églises sans la douleur de les avoir trahies. Le Roi répondit à l'Assemblée par la mise en demeure de
prendre une délibération positive sur la demande de ses commissaires. Comme
elle tergiversait, le secrétaire d'État Saint-Florentin fit remettre au
cardinal-président une lettre de cachet fixant la dissolution de l'Assemblée
au 20 septembre, et ordonnant à ses membres de retourner dans leurs diocèses
pour y assurer l'exécution de Une vive polémique était engagée. L'avocat Bargeton, au
moment où se réunissait l'Assemblée du Clergé, avait publié des Lettres, avec l'épigraphe Ne repugnate bono
vestro, — Ne refusez pas votre bien.
— Il disait que les prêtres étaient la partie la moins utile de L'Antéchrist est venu ; il a envoyé plusieurs lettres circulaires à des évêques de France, dans lesquelles il a eu l'audace de les traiter de Français et de sujets du Roi. Satan.... a débité un livre digne de lui.... Il s'efforce d'y prouver que les ecclésiastiques font partie du corps de l'État, au lieu d'avouer qu'ils en sont essentiellement les maîtres ; il avance que ceux qui ont le tiers du revenu de l'État doivent au moins le tiers en contribution, ne se souvenant plus que nos frères sont faits pour tout avoir et ne rien donner. Le susdit livre en outre est notoirement rempli de maximes impies.... de préjugés pernicieux tendant méchamment à affermir l'autorité royale, à faire circuler plus d'espèces dans le royaume de France, à soulager les pauvres ecclésiastiques, jusqu'à présent saintement opprimés par les riches A ces causes, il a semblé bon au Saint-Esprit et à nous de faire brûler le dit livre, en attendant que nous puissions en faire autant de l'éditeur. Libelles impertinents, traités sérieux et documentés se
succédaient : Cependant IV. — LES BILLETS DE CONFESSION ET LE REFUS DES SACREMENTS (1731-1758)[6]. PENDANT que se déroulait cette crise, la querelle entre Molinistes et Jansénistes se ranima et devint furieuse. Des évêques constitutionnaires prescrivaient à leur clergé
de refuser les sacrements aux suspects de jansénisme, qui ne présentaient pas
un billet attestant qu'ils s'étaient confessés à un prêtre soumis à Divers incidents firent alors grand bruit. Bouettin, curé de Saint-Étienne-du-Mont, avait eu affaire déjà deux fois au Parlement pour refus de sacrement, quand, en 1752, il refusa la communion à un vieux prêtre janséniste, Lemère. Le Parlement condamna le curé à l'amende, et le somma d'administrer les sacrements à Lemère sous peine de saisie de son temporel. Le Conseil du Roi cassa l'arrêt ; le Parlement supplia le Roi de faire donner la communion au mourant ; mais le vieillard mourut sans sacrements. Dix mille personnes suivirent son cercueil, et le Parlement rendit un décret de prise de corps contre Bouettin, qui s'enfuit. Le curé de Saint-Médard refusa les sacrements à deux religieuses de la communauté janséniste de Sainte-Agathe ; il en mourut une. Le clergé de la paroisse, inquiet des suites qu'il prévoyait, se sauva. Le Parlement mit en cause l'archevêque lui-même, le menaça de saisir son temporel et le somma de faire administrer la religieuse survivante ; mais la religieuse guérit. Pour éviter de nouveaux troubles, Louis XV ordonna que la communauté de Sainte-Agathe se séparât. La querelle du Clergé et de la magistrature tournait au
grotesque. Des porte-Dieu, prêtres chargés de
porter le viatique aux malades, étaient sommés par huissier d'avoir à
délivrer la communion ; quand ils s'y refusaient, le Parlement les mandait au
Palais et les admonestait. Un huissier, signifiant à un prêtre un arrêt de La haine de l'Église et de la religion se répandait dans la foule. D'Argenson disait : La perte de la religion ne doit pas être attribuée à la philosophie anglaise, qui n'a gagné à Paris qu'une centaine de philosophes, mais à la haine contre les prêtres, qui va au dernier excès. A peine osent-ils se montrer dans les rues sans être hués. Les esprits se tournent au mécontentement et à la désobéissance, et tout chemine à une grande révolution dans la religion et dans le gouvernement. La réforme de la religion, disait-il encore, sera bien autre chose que cette réforme grossière, mêlée de superstition et de liberté, qui nous arriva d'Allemagne au seizième siècle.... Comme notre nation et notre siècle sont bien autrement éclairés, on ira jusqu'où l'on doit aller, l'on bannira tout prêtre, tout sacerdoce, toute révélation, tout mystère.... Il notait en 1753 : On n'ose plus parler pour le Clergé, dans les bonnes compagnies ; on est honni et regardé comme des familiers de l'Inquisition. Les prêtres ont remarqué cette année une diminution de plus d'un tiers dans le nombre des communiants. Le collège des Jésuites devient désert ; cent vingt pensionnaires ont été retirés à ces moines si tarés. On a observé aussi pendant le Carnaval, à Paris. que jamais on n'avait vu tant de masques, au bal, contrefaisant les ecclésiastiques, en évêques, abbés, moines, religieuses ; enfin la haine contre le sacerdoce et l'épiscopat est portée au dernier excès. Le Roi, si indifférent qu'il fût, se préoccupait de ce grand désordre. L'audace des Parlementaires croissait toujours ; le plus grand nombre des magistrats, et, parmi eux, l'abbé de Chauvelin, Pasquier, le président de Meinières, Rolland d'Erceville, Robert de Saint-Vincent, étaient des hommes d'opposition à tout propos. Le Roi disait un jour à un courtisan, le duc de Gontaut : Ces Grandes Robes et le Clergé sont toujours aux couteaux tirés ; ils me désolent par leurs querelles, mais je déteste bien plus les Grandes Robes. Mon Clergé, au fond, m'est attaché et fidèle, les autres voudraient me mettre en tutelle... Robert de Saint-Vincent est un boutefeu que je voudrais pouvoir exiler ; mais ce sera un train terrible... Le Régent a eu bien tort de leur rendre le droit de remontrances, ils finiront par perdre l'État ! Comme de Gontaut avait interrompu pour dire que de petits robins n'étaient pas de force à ébranler l'État, le Roi reprit : Vous ne savez pas ce qu'ils font et ce qu'ils pensent, c'est une assemblée de républicains. En voilà, au reste, assez : les choses, comme elles sont, dureront autant que moi. Le 22 février 1753, Louis XV adressa au Parlement de Paris des lettres patentes par lesquelles il évoquait au Conseil toutes les affaires concernant les sacrements. Le Parlement ne les enregistra pas, et, le 9 avril, il fit des remontrances où il essaya de justifier sa résistance : Pouvions-nous, dit-il, sans cesser d'être fidèles, consentir à une surséance dont l'effet ne serait qu'un déni de justice préjudiciable à l'ordre et au repos public ? Condamnant une fois de plus les doctrines ultramontaines, il faisait au Roi cette déclaration : Si ceux qui abusent de votre nom prétendent nous réduire à la cruelle alternative d'encourir la disgrâce de Votre Majesté. ou de trahir les devoirs que nous impose un zèle inviolable pour votre service, qu'elles sachent que ce zèle ne connaît point de bornes, et que nous sommes résolus à vous demeurer fidèles, jusqu'à devenir les victimes de notre fidélité. Ordre fut donné aux Chambres assemblées d'enregistrer les lettres
d'évocation ; les Chambres refusèrent. Dans la nuit du 8 au 9 mai, des
mousquetaires portèrent aux présidents et conseillers aux Requêtes et aux
Enquêtes des lettres de cachet leur ordonnant de se rendre soit dans leurs
terres, soit dans des villes éloignées les unes des autres, qui leur étaient assignées
pour lieux d'exil. Quatre furent conduits au Mont-Saint-Michel, au château de
Ham, à Pierre-Encise, aux îles Sainte-Marguerite. Le Châtelet, les Cours des Aides, les Cours des Comptes
félicitèrent Le Gouvernement ne résista pas longtemps ; après avoir
transféré Nous avons reconnu dans tous les temps, disait-il, que le silence est le moyen le plus efficace pour rétablir l'ordre et la tranquillité publique... A ces causes... ordonnons que le silence imposé sur les matières qui ont fait l'objet des dernières divisions soit inviolablement observé... Enjoignons à notre Cour de Parlement de procéder contre les contrevenants conformément aux Ordonnances... Mais le silence ne se fit pas. Une vieille fille de la
paroisse de Saint-Étienne-du-Mont n'ayant pu fournir à un porte-Dieu ni billet de confession, ni
renseignements sur son confesseur, les sacrements lui furent refusés ; le
Parlement dénonça le fait au Roi. Louis XV, tout en invitant les
Parlementaires à la plus grande circonspection
relativement aux choses spirituelles, exila l'archevêque de Paris à
Conflans. Ce fut le signal de toutes sortes de procédures contre l'épiscopat.
En Le Parlement triomphait. Il se croyait maître de la
discipline ecclésiastique, et même de la foi ; il citait à sa barre des
membres du Clergé, pour tous les actes de leur ministère, pour des
mandements, des sermons, des catéchismes ; il examinait des thèses de
Sorbonne. Enfin, à propos de poursuites engagées contre le chapitre
d'Orléans, pour refus de sacrements, il déclara, par un arrêt du 18 mars
1755, que Louis XV ne pouvait laisser passer ce désaveu quasi
officiel de Sur ces entrefaites, l'Assemblée du Clergé se réunit, et
le Roi obtint d'elle, par un vote unanime, un
don gratuit de 16 millions. Il invita alors tes évêques à rechercher tes
moyens de ramener la paix dans les esprits. L'Assemblée se divisait en deux
partis à peu près égaux : les feuillants, ainsi appelés de ce qu'ils se
groupaient autour du cardinal-président de Une querelle survenue entre le Parlement de Paris et le Grand
Conseil devait donner d'ailleurs quelque répit au Clergé. Commission
administrative, instituée plutôt pour exécuter les volontés du Roi que pour
maintenir la stricte exécution des lois, prononçant sur les arrêts
contradictoires rendus par les Parlements, le Grand Conseil, dont les arrêts
étaient exécutoires dans toute L'ambassadeur de France à Rome obtint du Pape, en octobre
1756, une encyclique destinée à rétablir la paix religieuse. Le Pape
confirmait l'obligation d'obéir à Sont réfractaires, disait le
Pape, tous ceux qui, par sentence rendue par un juge compétent, ont été
reconnus coupables d'avoir refusé à Le 7 décembre 1756, le Parlement de Paris supprima cette sage encyclique, pour la raison qu'elle avait été publiée sans permis d'imprimer et sans nom d'imprimeur, et il défendit aux évêques de la citer et de la publier. Tous les Parlements du royaume firent cause commune avec lui. C'était d'ailleurs une théorie de la magistrature que les divers Parlements n'étaient que des parties d'un même tout, des classes d'un seul et unique Parlement réparties entre les provinces pour la commodité des justiciables. Le Parlement de Bordeaux entrait en guerre avec l'intendant De Tourny ; le Parlement de Rouen faisait des remontrances contre le Grand Conseil, et le commandant de la province, duc de Luxembourg, étant allé les biffer sur les registres, il menaçait de suspendre la justice et de donner sa démission en masse. Cependant la guerre, déjà engagée sur mer avec les
Anglais, allait commencer sur le continent. Le Gouvernement avait besoin de
faire enregistrer des édits bursaux ; il résolut de prendre des précautions
contre la magistrature. Le 13 décembre 1756, le Roi tint un lit de justice,
où il fit lire trois déclarations. Par la première, il ordonnait de respecter Les Enquêtes et les Requêtes n'en demeurèrent pas moins
réunies et donnèrent leurs démissions en bloc Dégradés
et privés de nos fonctions essentielles,
disaient les démissionnaires, nous sommes devenus incapables d'être à l'avenir d'aucune utilité pour le service du Roi et le
bien du Royaume. Seize membres de Les démissionnaires avisèrent alors le Premier Président que, consternés par l'attentat, ils étaient prêts à donner au Roi des marques de leur fidélité. Mme de Pompadour se mit à négocier avec les principaux meneurs ; le 26 janvier, elle reçut le président de Meinières, qui avait rédigé un projet d'accommodement où il prétendait ménager l'autorité du Roi et les intérêts de sa Compagnie ; elle ne décida rien avec lui, mais le pria de remettre son projet à l'abbé de Bernis, qui venait d'être fait ministre. Bernis conseilla la clémence envers les magistrats, et, une fois de plus, Louis XV se départit de sa rigueur ; il fit rendre aux démissionnaires leurs démissions, et rappela les exilés. La lutte entre V. — L'ATTENTAT DE DAMIENS ET CE fut le 5 janvier 1757, à six heures du soir, que le
Roi, montant en carrosse au château de Versailles pour aller souper à
Trianon, fut frappé au flanc d'un coup de couteau. La blessure était légère,
mais on craignit que l'arme ne fût empoisonnée ; Louis XV se mit ail lit et
se confessa. L'archevêque de Paris ordonna des prières de quarante heures ;
les théâtres furent fermés ; mais le public se montra surtout curieux des
détails de l'attentat. Le temps était loin où la crainte de perdre le Roi
consternait L'assassin, Damiens, ayant été garçon de salle chez les Jésuites, ceux-ci furent mis en cause dans des libelles. Le bruit courut ensuite qu'il avait servi des Jansénistes, des magistrats notamment, et ce fut le tour des Jansénistes et du Parlement d'être accusés de complicité. Damiens n'était qu'un déséquilibré ; il n'avait pas voulu tuer le Roi, mais seulement le rappeler à ses devoirs. Le Gouvernement crut cependant à une conspiration, fit arrêter des ecclésiastiques, poursuivit des détenteurs d'écrits séditieux et des imprimeurs, envoya aux galères des libraires et des colporteurs et bannit quelques écrivains. L'assassin subit le supplice de Ravaillac, le 28 mars 1757. On lui brûla la main droite, on le tenailla ; on versa du plomb fondu dans ses plaies ; on l'écartela. Pendant cinq quarts d'heure, il demeura vivant, très courageux, sous les regards d'une foule immense qui emplissait la place de Grève et garnissait les fenêtres, les lucarnes et les toits. Le Roi, se croyant frappé à mort, avait ordonné au Dauphin
de présider le Conseil ; il avait demandé à Les circonstances présentes
m'obligent de vous redemander mes sceaux et la démission de votre charge de
secrétaire d'État de Louis XV ne se séparait qu'à regret de Machault, qu'il aimait pour son intelligence et sa capacité. Ils ont tant fait, écrivait-il le même jour, qu'ils m'ont forcé à renvoyer Machault, l'homme selon mon cœur ; je ne m'en consolerai jamais. En terne temps que Machault, tomba le comte d'Argenson. La disgrâce de Machault faisait de lui le ministre prépondérant. Il voulut, pour être tout puissant, substituer auprès dut Roi à la marquise, dont il était l'ennemi, la comtesse d'Esparbès. L'indécis est enfin décidé, aurait il écrit à cette dame, le Garde des sceaux et renvoyé ; vous allez revenir, ma chère amie, et nous serons les maîtres du tripot. Il a nié l'authenticité de cette lettre ; et peut-être fut-elle fabriquée ; mais, après que Mme de Pompadour l'eut montrée au Roi, d'Argenson fut relégué à sa terre des Ormes. Peut-être bien, d'ailleurs, la principale raison du renvoi de deux ministres fut-elle que le Roi Louis XV, épouvanté de l'attentat de Damiens, crut bon d'éloigner du ministère les hommes qui avaient attiré sur eux le plus de haines : Machault, comme auteur du projet du vingtième, le comte d'Argenson comme chef du parti dévot. L'année 1757 vit encore, en juillet, le renvoi du
secrétaire de l'État des Affaires étrangères, Rouillé. Louis XV ne donna pas
de successeur à Machault comme Garde des sceaux, et tint lui-même les sceaux
jusqu'en octobre 1761 ; mais, à |
[1] SOURCES. D'Argenson,
Barbier, de Luynes, Moufle d'Angerville, Hénault, Dufort de Cheverny, du
Hausset, Choiseul, Sénac de Meilhan, déjà cités. Bernis (de), Mémoires et lettres (1715-1758), p. p.
Fr. Masson, Paris, 1878, 2 vol. in-8°. Pompadour (Marquise de), Correspondance... avec son père, M. Poisson,
et son frère, M. de Vandières, Paris, 1878, in-8°. Mémoires du maréchal duc de Richelieu, Londres et Paris, 1760-1793,
2e éd., 9 vol. in-8°. Prince de Ligne, Mémoires,
Bruxelles, 1860, in-12°. Soulavie, Mémoires
historiques et anecdotes de
OUVRAGES
A CONSULTER. Jobez (t. III et IV), de Carné (La monarchie française
au XVIIIe siècle), Taine (L'ancien régime), Desnoiresterres (Voltaire
et
[2] Voir plus loin, le chapitre III du livre III.
[3] Il s'agit ici des
trois filles aînées, non mariées, de Louis XV, et de la duchesse de Parme et de
sa fille. Mmes Henriette, Adélaïde et Victoire avaient alors, la première
vingt-deux ans, la seconde dix-sept ans, la troisième seize ans. La duchesse de
Parme était Mme Louise-Elisabeth, sœur jumelle de Mme Henriette ; les mémoires
de Luynes la désignent toujours sous le nom de Mme infante, et désignent sa
fille Isabelle sous celui de : la petite Infante. La mère et la fille étaient à
[4] SOURCES. Recueil
général des anciennes lois françaises (Isambert), t. XXII. Remontrances
du Parlement de Paris au XVIIIe siècle (Flammermont), t. II. D'Argenson, de
Luynes, Moufle d’Angerville (t. II et III), Hénault, Dufort de Cheverny, du
Hausset, Sénac de Meilhan, Soulavie (Mém. hist. et anecdotes), déjà
cités. Voltaire, Lettre à l'occasion de l'impôt du vingtième ; Extrait du
décret de
OUVRAGES A CONSULTER. Jobez (t. IV), de Carné (La monarchie française) ; Rocqualo, Clamageran (t. III), de Luçay, Picot (Mémoires pour servir à l'histoire ecclésiastique, t. III). Houques-Fourcade, Clément (Portraits hist.). Campardon (Mme de Pompadour), de Goncourt (Mme de Pompadour), Delahante (t. I), Gébelin, déjà cités. Tuetey (Louis), Les officiers sous l'ancien régime ; Nobles et roturiers, Paris, 1908. Crouzas-Cretet (de), L'Église et l'État, ou les deux puissances au XVIIIe siècle (1715-1789), Paris, 1893. Marion, Machault d'Arnouville ; Étude sur l'histoire du Contrôle général des Finances de 1749 à 1754, Paris, 1891. Id., L'impôt sur le revenu au XVIIIe siècle, principalement en Guyenne, Paris, 1901. Fournier de Flaix, La réforme de l'impôt en France, Paris, 1885, t. I. Caron, L'Administration des États de Bretagne, de 1493 à 1790, Paris, 1872. Maury (Alfred), Les Assemblées de Clergé de France (Rev. des Deux Mondes, 15 fév., 1er avril et 15 sept. 1879 et 1er août 1880). Roschach, Histoire de Languedoc (Continuation de l'Histoire de Dom Vaissète), t. XIII et XIV.
[5] Sous le nom de dons gratuits le Clergé des Trois-Évêchés, de l'Alsace,
de
[6] SOURCES. Remontrances du Parlement de Paris (p. p. Flammermont), D'Argenson (t. VIII), Barbier (t. III et IV), de Luynes (t. II), Moufle d'Angerville (t. II), du Hausset, Voltaire (Précis du siècle de Louis XV), déjà cités.
OUVRAGES
A CONSULTER. Jobez (t. IV), de Carné, Bocquain, déjà cités. Aubertin,
Crousaz-Cretel, Maury (Les Assemblées du clergé), Marion, de Goncourt, déjà
cités. Maury, De la civilisation en France, depuis le XVIIe siècle jusqu'à
nos Jours : Mouvement des idées au XVIIIe siècle. Des parlements (Revue des
cours littéraires, t IV, 1863. Laboulaye, De l'Administration française sous
Louis XVI (Revue des cours littéraires, t. II, III et IV, 1864-1867) ;
Picot, Mémoires pour servir à l'histoire ecclésiastique pendant le XVIIIe
siècle, Paris, 1863-1867, 7 vol. (t. III et IV). Glasson, Les Conflits
du Parlement et de
[7] SOURCES. D'Argenson
(t. V), du Hausset, Hénault, Moufle d'Angerville (t. III), déjà cités. Lettres
Inédites du poète Robbé de Beauveset, p. p. G. d'Heilly, 1876. Pièces
originales du procès Damiens, Paris, 1737. Ravaisson, Archives de
OUVRAGES
A CONSULTER. Campardon, de Goncourt (Mme de Pompadour), déjà
cités. D'Heilly, le Parlement,