HISTOIRE DE FRANCE

 

LIVRE PREMIER. — LE GOUVERNEMENT D'HENRI IV (1598-1610).

CHAPITRE V. — L'ORDRE INTELLECTUEL ET MORAL[1].

 

 

I. — LA POLITIQUE RELIGIEUSE DU ROI.

À la faveur de l'ordre et de la sécurité, le pays refaisait ses forces, toutes ses forces. La vie intellectuelle, religieuse, recommençait.

Il n'est pas douteux qu'Henri IV souhaitait, comme tous les hommes de son temps, l'unité de foi dans son royaume. Et cette unité ne pouvait se faire qu'au profit du catholicisme, qui avait pour lui l'avantage du nombre et de la possession. Henri IV a donc favorisé les protestants qui, à son exemple, revenaient à l'Église traditionnelle. Mais il maintint résolument la paix religieuse. Quand il faisait grand bruit à Rome de la conversion de Fresne-Canaye, son conseiller, ou de Guy de Laval, un très grand seigneur, et plus encore de celle de quelques pasteurs, c'était pour conclure que la persécution était aussi inutile que dangereuse et que l'hérésie s'éteindrait d'elle-même. Mais les chefs protestants, restés fidèles à leur foi, se refusaient, sauf Sully, à comprendre que le nouveau converti eût besoin de crier son orthodoxie pour sauvegarder sa pratique de tolérance. La Trémoille brocardait[2], D'Aubigné tonnait, Bouillon intriguait, Du Plessis-Mornay boudait.

La masse des protestants n'avait pas à se plaindre. La France était, à cette époque, le pays d'Europe où la minorité dissidente était le mieux traitée. Si Henri IV s'attachait à convaincre les catholiques de la sincérité de sa conversion, il ne négligeait pas d'affirmer sa volonté de maintenir l'édit de Nantes, son édit. Toutes les fois que la politique ou les circonstances l'obligeaient à favoriser une des deux Églises, il offrait ou laissait prendre à l'autre quelque compensation. Par exemple, s'il rappela les Jésuites, il prolongea le privilège, octroyé aux protestants, des places de sûreté et souffrit que les Rochelais augmentassent les fortifications de leur ville. Ses délégués, Du Perron et D'Ossat, avaient promis, lors de, son absolution, le rétablissement du catholicisme dans le Béarn. Après l'édit de Nantes, il autorisa la liberté du culte catholique dans douze villes, nomma deux évêques à Lescar et à Oloron, et leur permit même d'entrer au Conseil souverain du Béarn, mais il refusa de leur restituer les biens ecclésiastiques que Jeanne d'Albret, sa mère, avait confisqués au profit de l'État et de l'Église réformée[3].

Il en voulait à ceux qui troublaient son œuvre d'assoupissement. Du Plessis-Mornay, retiré dans son gouvernement de Saumur, engagea contre le catholicisme une guerre d'érudition. L'année même de l'Édit de Nantes, il publia un Traité de l'Institution de l'Eucharistie pour démontrer que le sacrifice de la messe, l'invocation des saints, le purgatoire étaient des inventions assez récentes de l'Église catholique romaine. Le livre fit scandale ; il attaquait la présence réelle, la croyance la plus chère aux catholiques, et il identifiait le pape avec l'Antéchrist.

Le Roi, qui avait beaucoup de peine à justifier en Cour de Rome la publication de l'Édit, fut très irrité de cet éclat.

Du Plessis-Mornay avait recueilli ou fait recueillir, sans trop de soin ni de critique, dans le Nouveau Testament, les Pères et même les scolastiques, tous les témoignages qui pouvaient étayer sa thèse. Parmi les cinq mille textes dont il tirait vanité, les docteurs catholiques en relevèrent sans peine d'inexacts, de tronqués, de mal interprétés. Avec l'autorité que lui donnaient son talent et son rang dans l'Église de France, le négociateur de l'absolution pontificale, Du Perron, évêque d'Évreux, se fit fort de montrer cinq cents erreurs dans le Traité de l'Institution de l'Eucharistie. Du Plessis se crut obligé de relever la provocation. Du Perron en prit occasion de transformer en controverse publique une simple vérification de textes.

Le Roi voulut assister à la dispute et lui donner la plus grande solennité. II nomma juges du débat, sous la présidence du Chancelier, deux catholiques, Pithou, avocat au Parlement de Paris, et l'historien De Thou, et deux réformés, Fresne-Canaye et le savant Casaubon, à qui il adjoignit le sieur Martin, son médecin, homme très singulier en toutes sortes de sciences et particulièrement ès langues latine, grecque, hébraïque et arabique.

Du Plessis-Mornay commençait à s'étonner de tout ce bruit et à s'inquiéter. Il s'avisa un peu tard de demander que Du Perron lui communiquât d'avance les cinq cents textes incriminés. Sur le refus de Du Perron, il se disposa à quitter Fontainebleau, mais le Roi menaçait de faire, après son départ, examiner le livre, et il fut convenu que Du Perron indiquerait chaque jour à Du Plessis-Mornay soixante textes et qu'il lui laisserait quelques heures pour les vérifier.

La conférence eut lieu, le 4 mai, à Fontainebleau, en présence du Roi, des princes, des grands seigneurs, des officiers de la Couronne, des secrétaires d'État, de plusieurs évêques et de quelques centaines de spectateurs. Le Chancelier protesta que Sa Majesté avait permis cette conférence entre deux hommes doctes non pour entrer en dispute des poincts qui concernent la doctrine et le fait de la religion, mais seulement pour s'éclaircir de vérité littérale ou fausseté des dites allégations. Il affirma en même temps la résolution très ferme et très certaine du Roi, à l'observation de son édict de Nantes.

Du Plessis n'avait eu le temps de vérifier que dix-neuf des passages incriminés. Il avait passé une partie de la nuit au travail et se présentait harassé de fatigue devant un adversaire confiant en lui-même, sir des sympathies du Roi. La discussion tourna contre lui : ici, il avait pris pour le sentiment de Duns Scot une opinion que le docteur scolastique réfutait ; là, il empruntait à saint Jean Chrysostome quelques phrases oratoires, qui se prêtaient à toutes les interprétations ; en un autre endroit, il avait cité, au lieu du texte d'une loi, la version d'un certain Crinitus, auteur récent et de nulle autorité ; ailleurs encore il avait fondu ensemble deux passages de saint Bernard. D'une réponse de Cyrille, patriarche de Constantinople, qui raillait les chrétiens, contempteurs du culte des anciles (boucliers sacrés), d'avoir embrassé celui de la croix, Du Plessis-Mornay avait conclu qu'en ce temps-là la croix n'était pas adorée. Le Roi intervint : Il n'est pas vraysemblable, dit-il, que Julian l'apostat eust reproché aux chrestiens qu'ils adoroient la croix, s'ils ne l'eussent vrayement adorée, autrement, il se Fust faict moquer de luy.

Du Plessis-Mornay déserta la lutte. Le Roi écrivit au duc d'Épernon une lettre destinée à la France catholique : Mon amy, le diocèse d'Évreux a gagné celui de Saumur. Ce porteur y estoit qui vous contera comme j'y ai faict merveilles. Préoccupé avant tout de satisfaire le pape et les catholiques, il ne sentit pas ce qu'il y avait d'odieux à publier la défaite de son vieux et fidèle serviteur.

 

II. — LE CLERGÉ ET L'ÉGLISE CATHOLIQUE.

LE Clergé catholique s'était instruit ; il lui restait à se réformer. Les rois, depuis le Concordat, avaient rempli l'Église d'évêques bien plus remarquables par leur mérite ou leur naissance que par leurs vertus cléricales. La plupart de ces prélats étaient gens de Cour et vivaient loin de leurs diocèses. Les revenus des évêchés, si grands qu'ils fussent, ne suffisant pas à entretenir leur train de grands seigneurs, ils se faisaient donner par le roi d'autres bénéfices. Le cardinal de Joyeuse, archevêque de Toulouse, puis de Rouen, mort en 1646, jouissait de six abbayes : Fécamp, Saint-Martin de Pontoise, Mont-Saint-Michel, Notre-Dame de Chambons, Laulne et Juilly.

Les abbayes payèrent toutes sortes de services, services de guerre et services de Cour. Au lieu d'être réservées aux meilleurs des moines, elles avaient été données non seulement à des évêques, mais encore à des gentilshommes, à des femmes, à des enfants comme supplément de revenus, comme récompense, comme faveur. Le poète Desportes avait eu d'Henri III un riche bénéfice pour des vers d'amour. Pierre de Bourdeille, hardi capitaine et plus hardi historien des Dames galantes, est surtout connu sous le nom de Brantôme, qui était celui de son abbaye. Les clercs et les laïques qui tenaient, comme on disait, les bénéfices en commende, se réservaient la plus grosse part des revenus, et laissaient seulement aux religieux de quoi jeûner plus souvent qu'ils n'eussent voulu. Ils exploitaient de la même façon les cures, touchant les rentes et se procurant au rabais un prêtre pour dire la messe et administrer les sacrements. Les évêchés se donnaient comme les abbayes ; et quand le donataire n'était pas clerc ou était déjà pourvu d'un autre diocèse, il prenait un remplaçant confidentiaire ou gardien, qui faisait son office et lui versait une part, quelquefois la meilleure part des revenus.

La Noblesse s'habituait à considérer les biens ecclésiastiques comme la récompense de la valeur ou de la faveur. L'Église était une carrière et une ressource ; les cadets visaient les abbayes et les évêchés ; les filles non mariées, une retraite honorable et la vie du monde sans les devoirs de famille. La haute bourgeoisie avait mêmes idées et, pour ses enfants, mêmes ambitions.

Puis les guerres civiles étaient survenues. Des couvents avaient été ruinés, d'autres sécularisés par les gentilshommes du voisinage ou par des capitaines. Les laïques possesseurs de bénéfices à vie, cherchaient à les rendre héréditaires. Le Roi avait donné des abbayes même à des protestants. En bien des endroits, le service religieux avait disparu. De l'avènement d'Henri IV à l'absolution pontificale, beaucoup d'évêques étaient morts, qui n'avaient pas été remplacés. Les moines avaient pris les armes, vagabondé par les places et les rues, et s'étaient déshabitués, s'ils ne l'étaient déjà, de la vie claustrale, des prières en commun et des obligations de la règle.

Le cardinal de Florence, Alexandre de Médicis, venu en France pour négocier la paix de Vervins, écrivait à Rome, le 8 septembre 1597 : Les revenus de plusieurs évêchés vacants appartiennent à des soldats, à des femmes, à des princes... On n'observe plus la règle dans les couvents, sauf chez les Chartreux... Les réformés de Saint-Bernard ont une bonne conduite... Les Capucins sont bien vus ici... Les Célestins se conduisent bien, ainsi que les moines noirs de Saint-Benoît. Les autres sont mauvais, font grand scandale et donnent lieu à beaucoup de plaintes. La plupart des religieuses... ne gardent plus la clôture, restent des mois entiers chez leurs parents et portent des habits immodestes ; les abbesses font figure d'héritières.

L'évêque du Mans, Claude d'Angennes de Rambouillet, au nom de l'Assemblée générale du Clergé, avait, l'année précédente, signalé au Roi ces désordres (1596). La plupart des abbayes, disait-il, appartiennent à des laïques. Une enquête, faite dans 25 diocèses seulement, avait révélé qu'il y avait 120 abbayes sans abbés (légitimes). De 14 archevêchés, six ou sept sont du tout sans pasteurs, et s'en peut remarquer tel auquel, depuis quarante ou cinquante ans, il n'en a été veu aucun ; d'environ 100 éveschés, on estime y en avoir de trente ou quarante du tout despourveus de titulaires et, à la tête de quelques autres, on découvrirait, en cherchant bien, des clercs confidentiaires et gardiens. Ces bergeries estant ainsy dépourvues de vrays pasteurs... les ouailles de Dieu sont dispersées et les troupeaux gantés et ruynés.

Les mœurs du bas Clergé, avant les guerres de religion, étaient déjà si mauvaises qu'il est difficile qu'elles aient pu devenir pires. En tout cas, elles apparaissent plus violentes et plus cyniques. Le bas Clergé de ce temps n'est pas une sorte de bourgeoisie, distinguée de la masse des rustres, où elle se recrute, par la régularité au moins apparente de la vie. Il boit, mange, s'amuse, avec eux et comme eux. Dans la description des plaisirs rustiques de Noël du Fail, cet observateur si précis, le curé Jacquinot, après s'être fait un peu prier (mais si peu), se mêle aux danses des villageois et fait tourner les vigoureuses commères jusqu'à leur faire perdre haleine. Les prêtres et les moines sont peuple et très peuple.

Il y avait dans le haut Clergé des prélats rigides, comme François de La Rochefoucauld, évêque de Clermont, des prélats assagis, comme Du Perron, évêque d'Évreux, et il y en avait beaucoup de peu zélés (accurati), mais tous sentaient, pour lutter contre le protestantisme, la nécessité d'une réforme. L'Assemblée du Clergé de 1596 appelait l'attention du Roi sur la nomination de gens indignes ou d'enfants aux abbayes, aux évêchés et autres bénéfices à charges d'âmes ainsi que sur la dilapidation des biens d'Église.

Henri IV accueillit bien cette remontrance et répondit : Qu'il ne vouloit plus nommer aux éveschés que personnes capables qui sussent prescher et s'acquitter de leurs charges, comme aussi il vouloit aviser de pourvoir dignement aux autres bénéfices. Par lettres patentes (vérifiées au Parlement en mai 1596), il admonestait les évêques, les archevêques et chefs d'Ordres de vacquer soigneusement à la réformation des monastères et enjoignait à ses procureurs généraux de tenir la main aux ordonnances qui seront faictes par les dits prélats.

Il nomma évêques quelques gens de bien, comme D'Ossat. Il essaya d'attirer en France François de Sales, évêque d'Annecy, célèbre déjà comme controversiste, prédicateur et directeur d'âmes. Pourtant l'Assemblée du Clergé, en 1603, tout en le louant de son zèle, se plaignit de la persistance des abus. Le Roi triompha des éloges : Quant aux eslections, vous voyez comme j'y procedde. Je suis glorieux de voir ceux que j'ay establis estre bien différons de ceux du passé, le récit que vous en avez faict me redouble encore le courage de mieux faire à l'advenir. Mais il releva avec humeur les doléances : Pour ce qui est des simonies et confidences, commencés à vous guérir vous mesmes et exciter les autres par vos bons examples à bien faire.

Cependant, il publia, en décembre 1606, un Édit sur les plaintes et remontrances du Clergé. Il promettait une fois encore de pourvoir les prélatures, abbayes et autres bénéfices à sa nomination, de personnes de mérite, qualité et suffisance requise, et de ne nommer abbesses que des religieuses ayant fait dix ans auparavant leurs vœux ou ayant exercé pendant six ans un office claustral. Mais, avant comme après l'édit, il consulta le plus souvent dans ses choix ses passions et son intérêt. En 1604, il avait nommé évêque de Lodève, Charles de Lévis, fils du duc de Ventadour, petit-fils du Connétable — et qui était âgé de quatre ans. Il s'en amusait dans une lettre à Marie de Médicis (24 oct. 1605) : Je feray la Toussaint où je me trouveray. M. de Lodève est mon confesseur. Jugeay si j'auroi l'absolution à bon marché. A la mort du cardinal Charles de Lorraine, évêque de Metz (1607), il pria le chapitre de cette ville de postuler pour évêque son bâtard, Henri de Verneuil, qui avait alors six ans[4]. L'enfant fut élu. Le pape refusa de le nommer, mais il lui assigna, pour ne pas irriter le Roi, une pension de 10.000 écus sur les revenus de l'évêché et lui donna des lettres d'accession, en vertu desquelles, à la première vacance du siège de Metz, il en serait pourvu sans qu'il fût besoin d'une autre élection. Les chanoines élurent le cardinal de Givry (Anne de Peyrusse des Cars), âgé de soixante-deux ans. Il mourut le 19 avril 1612, et Henri de Verneuil fut évêque à dix ans et demi.

Le Roi n'observait pas mieux la promesse qu'il avait faite de ne nommer abbesses que des religieuses. Il avait eu de Mademoiselle de La Haye une fille, Jeanne de France, mais il se dégoûta vite de cette maîtresse — et l'envoya à Fontevrault attendre la vacance d'une abbaye qu'il lui destinait (mars 1603). Il donna deux abbayes au protestant Sully pour le décider à payer à Henriette d'Entragues le prix de ses premières faveurs.

On imagine ce que pouvaient être les maisons religieuses, sous le gouvernement d'abbés commendataires ou d'abbesses d'alcôve. L'évêque de Belley, Camus, conte agréablement qu'un abbé de son voisinage, gouverneur d'une ville, marié et huguenot, installa un haras dans les bâtiments de son abbaye, y compris les lieux destinés à la régularité. Il amassa quantité de cavales et jumens qui sont fort grandes et fort belles en Bresse, fit venir des étalons d'Espagne et d'Allemagne, et de grands asnes d'Auvergne, qui sont énormes en hauteur, pour former des mulets ; il resserra les foins, pailles et autres fourrages dans l'église, où à peine restait-il libre une partie du chœur autour du grand autel pour les offices des religieux. Dans la maison abbatiale, logeaient plusieurs soldats huguenots, qui chantaient leurs psaumes, et, au demeurant, menaient joyeuse vie. Quant aux moines, l'abbé les traitait bien, les caressait, leur faisait chère d'abbé et de capitaine. Ce couvent devint une église militante ; car vous ne voyiez que moines à la chasse avec les soldats, tous l'arquebuze sur l'espaule ; les moines ne sortoient point que montés sur de grands chevaux et des meilleurs, en cet équipage roulant par le pays toujours bien armés, avec l'espée et le pistolet. Camus dit que ceci se passait au moment où il devint évêque de Belley, c'est-à-dire vers 1609.

Tel était l'état de certains monastères vers la fin du règne d'Henri IV. Il y avait de pires désordres, même dans le clergé séculier. J'ai horreur, disait un évêque à Vincent De Paul, quand je pense que dans mon diocèse il y a presque sept mille prêtres ivrognes ou impudiques, qui montent tous les jours à l'autel et qui n'ont aucune vocation.

Cependant, un mouvement de rénovation religieuse s'annonçait. La réforme des ordres monastiques commence spontanément. Des évêques, Antoine de Sansac, archevêque de Bordeaux, mort en 1591, Côme Clausse de Marchaumont, évêque de Châlons-sur-Marne de 1575 à 1624, se distinguent par leur piété.

Dans beaucoup de maisons ligueuses ou semi-ligueuses, la passion a tourné en piété active et fournit quelques-uns des bons ouvriers de la restauration catholique : Madame de Sainte-Beuve, sœur des Hannequin, les évêques ligueurs, qui fut la protectrice des Jésuites et la fondatrice des Ursulines ; Bérulle, dont la mère était une Séguier, et qui fonda l'Oratoire ; Sénault, fils du greffier de l'Union, second général de l'Oratoire ; Marillac, l'adversaire des Semonneux, le futur garde des sceaux de Louis XIII ; Bernard, le pauvre prêtre, l'émule de saint Vincent De Paul, fils d'Étienne Bernard, député aux États généraux de 1588 et 1593 ; Picoté, un célèbre Directeur de conscience, parent ou descendant d'un agent du duc de Savoie et de Biron. Mais Madame Accarie, femme d'un des fondateurs de la Ligue, est la plus éminente en œuvres et en prières. Elle introduit en France le culte de sainte Thérèse et l'ordre des Carmélites. Elle a des visions et. des extases. Elle réunit des hommes qui, comme elle, s'exaltent par les exercices spirituels, cherchent Dieu, le sentent, le voient, le touchent : Jacques Gallemant, curé d'Aumale, André Du Val, docteur en Sorbonne, Bérulle, Jacques de Brétigny, le traducteur des Œuvres de sainte Thérèse. Quand saint François de Sales vint à Paris en 1602[5], il trouva chez Madame Accarie un groupe de mystiques, vivant hors du monde dans le monde, en état d'agir à la fois sur le Clergé et la société.

Le haut Clergé, sentant que l'opinion lui revenait, se montrait plus arrogant ; la lutte entre l'épiscopat et la magistrature recommençait. Le Concile de Trente avait revendiqué pour l'Église le droit de juger les clercs, d'administrer les hôpitaux, de surveiller les livres, de faire et défaire les mariages, d'annuler et de dénaturer les dispositions testamentaires ; il avait interdit l'appel comme d'abus. C'étaient autant de prétentions odieuses aux parlements.

Le parlement d'Aix ayant jugé et condamné à mort un prêtre coupable de mœurs abominables, l'archevêque, Paul Hurault de l'Hôpital, protesta que les tribunaux ecclésiastiques seuls avaient juridiction sur les clercs. Il refusa de dégrader le coupable, comme il était d'usage avant de livrer un ecclésiastique au bourreau. L'arrêt n'en fut pas moins exécuté. L'archevêque menaça d'excommunier le Parlement ; le Parlement, de saisir le temporel de l'archevêque.

A Bordeaux, François d'Escoubleau de Sourdis, cardinal à vingt-quatre ans, archevêque de Bordeaux à vingt-cinq, était violent et autoritaire et très infatué des droits de l'Église et de la prélature. Il y avait dans l'église cathédrale de Saint-André deux autels où, les jours de fête, le peuple, irrespectueusement, s'asseyait ; Sourdis ordonna de les démolir. Le Chapitre, qui, en vertu d'une bulle de Pie II, prétendait avoir la police de la cathédrale, fit emprisonner les ouvriers. L'Archevêque força les portes des prisons et les délivra. Le Parlement informa. L'archevêque excommunia les conseillers-enquêteurs et leur dit des injures atroces. Le Roi donna raison au Parlement (1602).

Quatre ans après, nouvelle querelle, et plus vive. Un prêtre excommunié par l'archevêque en appela comme d'abus au Parlement, qui enjoignit à l'archevêque de l'absoudre à condition (ad cautelam), sous peine de 4.000 livres d'amende. Sourdis dit à l'huissier porteur de la sentence : qu'elle avait été donnée par des ministres du diable ; qu'il n'aurait jamais cru que Satan aurait la présomption de commander à Dieu. Il défendit à ses curés d'admettre à la communion les conseillers et les présidents qui avaient rendu l'arrêt. Le Parlement le condamna à 15000 livres d'amende. On pouvait craindre des troubles. Le gouverneur de Guyenne, D'Ornano, revint précipitamment à Bordeaux. L'affaire se termina en 1607 par un compromis. Mais en 1608, il y eut de nouvelles difficultés.

Henri IV n'aimait pas les discussions sur les rapports des deux pouvoirs, spirituel et temporel ; il lui en avait trop conté. Il agissait en prince indépendant du pape, mais se gardait de le proclamer. Il faisait taire les théologiens quand il pouvait ; sinon, il jugeait plus habile de ne pas entendre que de réprimer. La Sorbonne se tint tranquille sous son règne.

Ancien hérétique et relaps, il ne pouvait se montrer aussi rigoureusement gallican que ses prédécesseurs, les rois très chrétiens et très orthodoxes. Aussi n'était-il pas éloigné de publier le Concile de Trente. Des prélats politiques (comme D'Ossat et Du Perron) le pressaient de donner ce contentement au pape. Ils convenaient que certains décrets étaient attentatoires à la Couronne, mais ils comptaient les rendre inoffensifs moyennant les réserves d'usage : Sauf les droits du roi et les libertés de l'Église gallicane. Henri IV aurait peut être consenti, s'il n'avait craint de provoquer les réformés et d'irriter les parlementaires.

Mais il rappela les Jésuites. Il se flattait de contenir leur zèle ultramontain, convaincu non sans raison que, pendant la Ligue, ils n'avaient pas fait pis que les autres ordres religieux. D'ailleurs, malgré le bannissement dont les avait frappés le Parlement de Paris, ils n'avaient pas quitté le royaume. Les parlements de Bordeaux et de Toulouse les avaient maintenus à Toulouse, à Auch, à Agen, à Rodez, à Bordeaux, à Périgueux, à Limoges, et même le parlement de Paris n'avait pu les déloger de Tournon, ville en dehors de son ressort, mais si voisine de Lyon, qui en faisait partie. La France se trouvait divisée en deux régions, dont l'une servait de refuge à l'Ordre contre les arrêts et les colères des magistrats parisiens. Toujours embarrassé de son passé hérétique, Henri IV jugeait dangereux de s'acharner contre les défenseurs de Rome, puisqu'il était obligé de les souffrir, et il voyait beaucoup d'avantages à s'entendre avec eux. Lors de son voyage à Metz en 1603, il accueillit bien le P. Ignace Armand, Provincial de France, et trois autres Jésuites, qui venaient lui demander à genoux le rétablissement de leur Ordre (avril 1903). Le P. Coton, controversiste habile, prédicateur fleuri, homme doux et insinuant, alla le trouver à Fontainebleau. Le Roi consulta pour la forme une commission extraordinaire de membres du Parlement et du Conseil d'État, qui, très partagée, conclut de s'en remettre à sa décision. Un édit daté de Rouen (sept. 1603) autorisa les Jésuites à demeurer dans tous les lieux où ils étaient établis et à fonder par surcroît des collèges à Lyon, à Dijon, et dans la maison royale de La Flèche en Anjou.

La concession n'allait pas sans réserves : tous les Jésuites établis en France devaient être Français naturels. Ils ne pourraient prêcher et administrer les sacrements hors de leurs maisons qu'avec l'autorisation des évêques et même des parlements. Ils s'engageraient à ne rien entreprendre, tant au spirituel que au temporel, au préjudice des évêques, chapitres, curés et universitez. Ils prêteraient serment devant les officiers du roi de ne rien faire contre le service du roi, la paix publique et le repos du royaume, sans aucune exception ni réservation. Pour répondre des promesses et des actes, ils entretiendraient près du roi, avec le titre de prédicateur, un membre de la Compagnie qui serait Français et suffisamment authorisé parmi eux. Bien que quelques-unes de ces conditions fussent gênantes, l'important, comme les Jésuites le comprirent, était d'avoir en France le droit d'exister ; avec le temps, ils lèveraient ou tourneraient les défenses. L'Édit ne disait mot de leur retour à Paris, mais, deux ans après, ils obtinrent de rentrer dans leur collège de Clermont et, en 1609, d'y enseigner publiquement la théologie. Et, prodige d'habileté, leur répondant, cette sorte d'otage, se transforma en confesseur du roi.

Avec la célèbre Compagnie se fixèrent et, se répandirent dans le royaume les doctrines ultramontaines. Assurément, à toutes les époques, la supériorité des papes sur les Conciles et leur droit d'intervention dans les affaires temporelles avaient eu des partisans en France, parmi les séculiers et surtout parmi les réguliers. Mais la masse du Clergé et de la nation restait attachée aux traditions gallicanes. On avait bien vu, après la conversion d'Henri IV, que les ligueurs n'étaient pas, à proprement parler, des ultramontains ; ils n'attendirent pas l'absolution de Clément VIII pour se soumettre. Pourtant la France catholique était, depuis les dernières épreuves, plus fortement attachée au Saint-Siège et plus convaincue du danger des divisions en face de l'hérésie reconnue. C'est de cette inquiétude que la Cour romaine pensait profiter pour ruiner le gallicanisme.

Ses meilleurs auxiliaires furent les Jésuites. Ils fondèrent, dans les grandes villes et dans toutes les provinces, des collèges, décentralisèrent l'enseignement, ruinèrent l'autorité théologique de la Sorbonne et l'autorité morale des universités. Leurs maisons d'instruction furent des centres de propagande ultramontaine. Des congrégations et des associations unirent en vue de l'action romaine les jeunes gens et les hommes faits. L'Église et la nation furent coupées en deux ; et, pendant tout l'ancien régime, ces divisions ne cesseront plus. C'est aux Jésuites que revient l'honneur ou la responsabilité d'avoir travaillé, avec un remarquable esprit de suite, à faire prévaloir la doctrine de la suprématie pontificale, au spirituel et au temporel.

 

III. — L'ENSEIGNEMENT.

LEUR enseignement eut dans tout le monde catholique un grand succès. Ordre nouveau grandi au milieu des systèmes et des essais de la Renaissance, les Jésuites pouvaient faire leur profit des expériences et donner satisfaction aux goûts et aux besoins de leur temps. Or, il leur importait tant de former la jeunesse ! Déjà Ignace de Loyola, dans le quatrième livre des Constitutions, avait indiqué les idées directrices de cet enseignement tendancieux.

En 1584, le général Aquaviva chargea six Jésuites, représentant les six grandes nations catholiques, de rédiger un programme complet d'éducation et d'instruction. Il devait être d'une application universelle et, contre la diversité des gouvernements et des races, maintenir l'unité religieuse et morale du catholicisme. Ce fut le fameux règlement des études (Ratio studiorum) qui ne fut arrêté, dans sa forme définitive, qu'en 1598.

Comme l'avait déjà tenté l'Université en plusieurs de ses collèges, les Jésuites abandonnèrent les compilations du moyen âge, en leur latin barbare, pour les grands écrivains de l'antiquité. Ils substituèrent Cicéron et Virgile aux grammairiens et aux commentateurs. Mais les anciens ne devaient pas être étudiés pour eux-mêmes comme interprètes d'une civilisation, d'un monde, d'un génie différents. Cette curiosité était vaine et risquait d'être dangereuse. Il fallait uniquement s'attacher à imiter les modèles admirables dans l'art d'écrire offerts par l'antiquité. La culture de l'esprit devait être purement littéraire et formelle. Point d'érudition. L'histoire serait réduite à un cours de morale en action.

Mais l'originalité des Jésuites est surtout dans leur système d'éducation. Laissant à d'autres les écoles du peuple, ils se proposèrent d'élever les enfants de l'aristocratie, de la noblesse et. de la bourgeoisie, appelés un jour à gouverner l'État. Leurs élèves, triés avec soin, étaient dressés aux habitudes du monde, façonnés aux bonnes manières, instruits à se présenter, à saluer, à parler. Les fêtes scolaires, avec leurs représentations théâtrales, étaient moins une distraction pour les écoliers qu'une occasion de paraître et de déclamer en public. La mémoire était ornée de beaux vers, de citations élégantes, d'une riche réserve de mots et de traits.

Quoique les collèges fussent bien clos, ils n'avaient de la prison que les grilles. Sur la population choisie qui les habitait, la discipline s'exerçait vigilante, inquisitoriale, mais avec des démonstrations de sollicitude et d'affection paternelle. Ignace avait défendu aux régents de châtier eux-mêmes leurs élèves ; le fouet était confié à un domestique. Le maitre devait, avant tout, gagner le cœur des enfants. Il se mêlait à leurs jeux, à leurs conversations ; il entrait dans leurs confidences. Il avait une intimité particulière avec ceux qu'il avait distingués. C'était entre les professeurs et les élèves une communion de tendresse, qui consolait de la famille absente, et qui, au besoin, en tenait lieu. Sur ces cœurs conquis, l'action du maitre et de l'ami s'exerçait efficace. Il avait peu de peine à manier un naturel qu'il connaissait si bien. Il s'attachait à refouler les passions, à briser l'esprit d'indépendance et d'orgueil, à comprimer la personnalité et les libres initiatives, à rendre ce jeune homme capable de recevoir sans révolte et même avec joie la direction de la Compagnie et les enseignements de Rome.

Quelle différence avec les Universités de France, et, pour choisir, avec l'Université de Paris, le grand corps enseignant du royaume. Les collèges avaient servi de caserne aux régiments étrangers et d'asile aux paysans de l'Île-de-France. Il n'y avait plus de clôture, plus de discipline. Le Quartier latin, ou, comme on disait, l'Académie, était rempli de spadassins, de musiciens et d'histrions.

La ruine des études et des mœurs exigeait une réforme, qui parut plus nécessaire que jamais après l'expulsion des Jésuites. Henri IV en chargea les personnages les plus considérables de la magistrature et de l'Église : Renaud de Beaune, archevêque de Bourges, grand aumônier de France ; Achille de Harlay, Premier Président du Parlement de Paris ; Jacques de La Guesle, Procureur général ; De Thou ; Séguier, lieutenant civil, et François de Riz, Premier Président du Parlement de Rennes. Ces commissaires, avant de dresser un règlement, commencèrent une enquête, qui dura trois ans (1595-1598).

Le pape n'avait pas été consulté ; les universités étaient pourtant des fondations pontificales. Encore sous Charles VII, lors de la réforme qui suivit les désordres de la guerre de Cent Ans, les nouveaux statuts avaient été publiés par le cardinal d'Estouteville, légat du pape.

Maintenant, la royauté s'arrogeait le droit pontifical d'organiser l'enseignement. Elle y procédait, comme l'exposait De Thou, en vertu de son autorité spirituelle.... Aussi est-il certain que le soing du prince doit embrasser tous les ordres de son Estat. Aussi voyons-nous que les empereurs, par leurs constitutions, ont réglé l'ordre et la police ecclésiastique.... Pareillement, les roys de France qui ont succédé aux empereurs, et sont estimez empereurs en leur royaume, ont eu pareil soing de la discipline ecclésiastique et de l'instruction de la jeunesse qui en fait partie, et d'autant plus qu'ils sont oingts et sacrez et participent en quelque manière au sacerdoce. Le pape ne protesta pas ; il n'avait aucun intérêt à restaurer l'Université, puisqu'il pensait obtenir le rappel des Jésuites.

D'ailleurs, le corps enseignant ne fut pas plus consulté que le pape. Les commissaires prirent l'avis de quelques-uns de ses maîtres, mais ils imposèrent leur programme.

La corruption et le désordre étaient si grands que les candidats, sans subir d'épreuves, se faisaient inscrire, en payant bedeaux et greffiers, sur le registre des gradués, et gagnaient, à force d'argent, leurs diplômes. Les commissaires réglèrent soigneusement la forme et le contrôle des examens. Ils chassèrent du Quartier latin la tourbe des amuseurs et des corrupteurs. Ils obligèrent la jeunesse à une tenue plus décente, recommandèrent l'usage du bonnet, abandonné pour le chapeau, proscrivirent les allures débraillées et la tunique flottante sans ceinture. Ils interdirent les banquets, où les maîtres fraternisaient avec leurs élèves sans les édifier toujours.

Ils réorganisèrent l'enseignement dans los collèges, pour préparer aux Facultés supérieures de meilleurs élèves. Convaincus par l'exemple et le succès de quelques régents, ils substituèrent définitivement l'étude des œuvres classiques à celle des productions du moyen âge et de la basse latinité. En commençant, les écoliers devaient traduire par parties les pièces de Térence, les Lettres familières de Cicéron, les Bucoliques de Virgile ; dans les classes plus élevées, et toujours partiellement, Salluste, les Commentaires de César, Virgile et Ovide, le De Officiis de Cicéron et les plus faciles de ses Discours ; en seconde et en première, les autres Discours, les traités philosophiques, le De Oratore, le Brutus, les Topiques, Quintilien et enfin les poètes : Virgile, Horace, Catulle, Tibulle, Properce, Perse, Juvénal, avec, de temps à autre, un peu de Plaute.

Par une innovation heureuse, qu'avait inspirée l'esprit de la Renaissance, les écrivains grecs s'ajoutèrent aux latins. Après des études grammaticales élémentaires, les élèves liraient successivement, au cours de leurs classes, des morceaux de l'Iliade et de l'Odyssée, des œuvres et des Jours d'Hésiode, des Idylles de Théocrite, puis quelques dialogues de Platon, quelques discours de Démosthène et d'Isocrate et les hymnes de Pindare.

Les études seules furent rigoureusement uniformes. Les collèges avaient plusieurs sortes d'élèves : boursiers, internes payants, externes libres, jeunes gens riches logés à part avec des précepteurs et mangeant à part, qu'on ne pouvait pas astreindre au même régime de vie. Mais la prière, après chaque repas, devait réunir tous les internes, de quelque catégorie qu'ils fussent. Avec une clientèle généralement pauvre, une grande simplicité de vie s'imposait. Elle plaisait à des maîtres qui vivaient hors du monde et ne songeaient pas à y préparer leurs élèves[6]. Les chambres devaient être balayées tous les matins ; les nappes, changées deux fois la semaine ; la vaisselle de cuivre, écurée tous les mois.

Les leçons d'escrime étaient interdites ; les représentations thés-traies permises, pourvu que les tragédies ne corrompissent pas les mœurs et que les comédies n'outrageassent pas les personnes. Les principaux des collèges inspecteraient les livres des maîtres et des élèves et feraient disparaître les ouvrages dangereux.

Mais les réformateurs n'avaient pas voulu tout réglementer. Ils laissèrent au principal le soin de régler les détails de l'enseignement et de la discipline intérieure. Combien l'organisation des collèges des Jésuites, la même partout, était plus minutieuse et plus précise ! C'est que les Jésuites tendaient à d'autres fins que l'Université : ils prenaient l'enfant, le façonnaient, le pétrissaient, lui faisaient une seconde nature, et, pour se l'attacher définitivement, ils lui rendaient le devoir facile, la religion aimable et le collège attrayant.

Si Henri IV a rappelé les Jésuites, ce n'est pas par préférence pour leur système d'enseignement ; il voulait pacifier l'Église comme l'État et faisait tour à tour aux ultramontains et aux gallicans les concessions qu'il jugeait nécessaires. Il croyait avoir réussi.

Le monde religieux était en apparence calme. Les deux pouvoirs, spirituel et temporel, s'accordaient dans un parti pris de silence et de mystère. Les catholiques et les protestants se supportaient. Mais la trêve qu'il avait imposée dura juste autant que lui.

 

 

 



[1] SOURCES : Berger de Xivrey et Guadet, Lettres missives, IV-VII et IX. Halphen, Lettres inédites du roi Henri IV à M. de Sillery, ambassadeur à Rome, 1er avril-27 juin 1600, 1866. Dussieux, Lettres intimes de Henri IV, 1876. Palma Cayet, Chronologie novenaire et septenaire. Mercure François, I. Du Perron, Discours véritable de la conférence tenue à Fontainebleau, 1600. Du Plessis-Mornay, Response à rescrit publié par le sieur évesque d'Évreux Du Perron sur la conférence de Fontainebleau, 1600. Agrippa d'Aubigné, Sa vie à ses enfants, Œuvres complètes (éd. Reaume et de Caussade), I, 1873. L'Estoile, Mémoires-journaux, VII-X. Collection des procès-verbaux des Assemblées générales du Clergé de France depuis 1560, 1767, 1. Fontanon, Les Edicts, etc., IV. L. Abelly, La vie de saint Vincent de Paul, instituteur de la Congrégation de la Mission, 1664.

OUVRAGES À CONSULTER : Strowski, Saint François de Sales. Introduction à l'histoire da sentiment religieux en France au XVIIe siècle, 1898. Abbé Houssaye, M. de Bérulle et les Carmélites de France (1575-1611), 1872. Le P. Prat, Recherches historiques et critiques sur la Compagnie de Jésus en France du temps du P. Coton, 1876, I-III. Picot, Essai historique sur l'influence de la religion en France pendant le XVIIe siècle, 1824, 2 vol. Robiou, Essai sur l'histoire de la littérature et des mœurs pendant la première moitié du XVIIe siècle, 1858, t. I (le seul publié). Ch. Urbain, Nicolas Coëffeteau... (1574-1623), 1883. Abbé Féret, Le cardinal Du Perron, 1877 ; du même, Henri IV et l'Église, 1875 ; du même, La Faculté de théologie de Paris et ses docteurs les plus célèbres, t. I, XVIe siècle, 1900. Jourdain, Histoire de l'Université de Paris au XVIIe et au XVIIIe siècle, 1862-1866. Douarche, L'Université de Paris et les Jésuites, 1888. J. Delfour, Les Jésuites à Poitiers, 1604-1762, 1902. Massip, Le Collège de Tournon en Vivarais, 1890. Gabriel Compayré, Histoire critique des doctrines de l'éducation en France depuis le XVIe siècle, 2e éd., 1880, I.

[2] Il mourut en 1602.

[3] L'édit de Fontainebleau du 15 avril 1599 pour le rétablissement du catholicisme dans le Béarn a été publié dans le Bulletin de la société du protestantisme français, XLVII, 1898, p. 382 et suiv.

[4] Les Trois Évêchés n'étaient pas soumis au Concordat. Le Roi n'y avait pas la nomination. Le pape nommait sur la présentation du chapitre.

[5] Rebelliau, Hist. littéraire, III, p. 360.

[6] Targe, Professeurs et régents de collige dans l'ancienne Université de Paris, p. 247 et suiv. : Les Régents et le monde.