C'EST avec l'élection de Charles Quint à l'Empire, en 1519, que s'ouvre le véritable règne de François Ier, celui où il a mis quelque chose de lui-même. Entre 1520 et 1547, les grandes questions du temps, celles de la politique internationale, du régime gouvernemental, de la Renaissance et de la Réforme, se posèrent ou se précisèrent, et pendant ces vingt-cinq années si remplies d'événements graves à l'extérieur, notre pays accomplit une évolution politique, sociale, économique, intellectuelle et morale, qui aboutit à changer en partie ses destinées. De 1519 à 1530, ce fut la lutte ouverte contre Charles Quint et les revers éclatants restés dans toutes les mémoires ; ce fut aussi le premier essai d'organisation administrative, les hésitations à l'égard de la Réforme, la Renaissance laissée librement à elle-même : Louise de Savoie, avec son fils, préside au gouvernement. De 1530 à 1547, la lutte continua contre Charles Quint, mais avec des tentatives de rapprochement entre les deux princes ; les ressorts du gouvernement furent serrés à l'intérieur, la Réforme et la liberté de penser plus délibérément combattues, la Renaissance pourvue de son instrument pédagogique par l'institution ébauchée du Collège de France : Montmorency est pendant plus de dix ans l'homme de ce régime et de cette politique. Après cela, le règne d'Henri II fut la consécration de l'œuvre antérieure. Tandis que François Ier et beaucoup de gens de sa génération avaient surtout suivi leurs instincts ou avaient agi avec des hésitations et, par suite, avec des ménagements, Henri II et ses contemporains apparaissent comme des hommes tout d'une pièce, comme des esprits à principes. De là, une politique plus raisonnée contre la maison d'Autriche, mais aussi l'absolutisme du gouvernement développé à outrance, la Réforme érigée en dogme par les huguenots, mais aussi attaquée sans mesure par le gouvernement, la Renaissance tout entière tournée en doctrine vers l'antiquité. Faire le tableau des douze années du gouvernement d'Henri II, ce sera dégager du règne de François Ier tout le sens qu'il recélait et constater les résultats de l'évolution accomplie depuis le début du siècle. C'est mettre sous les yeux la France du XVIe siècle, telle que la conçurent les intelligences de ce temps, et telle qu'elle avait été préparée par tous les événements de la première moitié du siècle. |
[1] SOURCES POUR LE LIVRE III. Les documents officiels pour l'histoire du règne et surtout du gouvernement de François sont indiqués dans le Catalogue des actes de François Ier. Cette vaste publication, entreprise par l'Académie des Sciences morales et politiques, forme actuellement 10 volumes (1887-1908). 29.268 actes y sont mentionnés (Traités d'alliance ou de paix, Ordonnances, Lettres patentes, fragments de Comptes, etc.), avec indication de leur provenance. Les tomes VIII, IX et X contiennent une table générale, la bibliographie des grands recueils employés et des listes de personnages. Il n'existe pas pour l'histoire d'un règne ou d'une époque un instrument aussi précieux. — Voir aussi Isambert, Recueil général des anciennes lois françaises, t. XII, 1re et 2e parties (1514-1546). Mais les textes n'y sont pas toujours bien choisis et ils sont presque toujours mal reproduits.
Parmi les chroniqueurs, on peut citer, pour l'histoire intérieure, le Journal d'un bourgeois de Paris sous le règne de François Ier, 1515-1538, édité par V. L. Bourrilly, 1909. — Cronique du roy Françoys, premier de ce nom, éditée par G. Guiffrey, 1860. — Œuvres complètes de Pierre de Bourdeille, seigneur de Brantôme, publiées par L. Lalanne pour la Société de l'Hist. de France, 11 vol., 1864-1882. Le tome XI contient la table générale. Mais Brantôme, trop souvent donné comme une source pour la première moitié du siècle, ne doit être consulté sur cette période qu'avec réserve, car il se borne presque toujours à reproduire des fragments de chroniques ou des racontars. Né vers 1540, il n'a rien vu ni connu directement du temps de François Ier. — On peut consulter aussi, pour l'histoire intérieure, les Relations des ambassadeurs vénitiens sur les affaires de France, recueillies et traduites par M Tommaseo, t. I (1528-1581), 1838. L'édition d'Albert est bien préférable : Relazioni degli ambasciatori veneti al Senato, t. I, 1839.
OUVRAGES. Il n'y a pas de bonne histoire d'ensemble du règne. Gaillard, Histoire de François Ier, 2e édition, 1769, 8 vol., n'est pas à dédaigner entièrement. Michelet, t. VII de l'Histoire de France, est toujours pénétrant et lumineux, bien que discutable. L'ouvrage de Pantin Paris, Études sur François Ier roi de France, sur sa vie et sur son règne, 2 vol., 1885, est très curieux et doit être lu, mais à condition d'être perpétuellement contrôlé.
[2] SOURCES ET OUVRAGES PRINCIPAUX. Nous donnerons, pour l'époque de François Ier, au moment où la Renaissance française est dans son plein développement, une bibliographie plus complète de l'histoire de la littérature et des arts. Voici les indications essentielles pour ce chapitre.
1° Partie littéraire : Histoire de la langue et de la littérature française, publiée sous la direction de Petit de Julleville, t. III, 1897. Lanson, Histoire de la littérature française, 7e édit., 1902. Nous reviendrons sur ces ouvrages au livre V. Brunetière, Manuel de l'histoire de la littérature française, 1897. Darmesteter et Hatzfeld, Le XVIe siècle en France. Tableau de la littérature et de la langue, suivi d'un recueil de morceaux choisis, 2e édit. 1883. On remarquera que les histoires de La littérature française passent toujours fort rapidement sur l'époque de Charles VIII et de Louis XII. Cela tient sans doute à ce que leurs auteurs ne se placent pas au même point de vue que noue.
2° Partie artistique : Les archives de la Commission des monuments historiques comprennent les reproductions photographiques d'un très grand nombre de monuments d'architecture et même de sculpture. Beaucoup d'œuvres de sculptures out été moulées (elles sont réunies pour la plupart au Musée de sculpture comparée du Trocadéro). Les principaux ouvrages généraux sont André Michel, Histoire de l'art, t IV, II, La Renaissance (Voir les bibliographies à la fin des chapitres). L. Palustre, La Renaissance en France, trois volumes seulement ont paru de 1879 à 1885 L. Palustre, L'architecture de la Renaissance, 1892. Choisy, Histoire de l'architecture, t. II, 1899. Les ouvrages de Raymond Kœchlin et Marquet de Vasselot, La sculpture à Troyes et dans la Champagne méridionale au XVIe siècle, 1900 et de P. Vitry, Michel Colombe et la sculpture française de son temps, 1902, ont un intérêt général et contiennent, en outre, d'excellentes bibliographies.