I. — LE ROYAUME FRANC SOUS LES RÈGNES DE CLOTAIRE II ET DE DAGOBERT Ier (613-639)[1]. APRÈS la défaite de Brunehaut, le fils de Chilpéric et de Frédégonde, Clotaire II, âgé de trente ans, était maître de la monarchie franque, des Pyrénées à l'embouchure du Rhin ; au delà du fleuve, les populations germaniques, jusqu'à l'Elbe, étaient tributaires. Mais Clotaire n'avait été qu'un instrument de l'aristocratie ; il dut payer le prix de la victoire, d'abord en faisant aux seigneurs de graves concessions, puis en reconnaissant une sorte d'indépendance à l'Austrasie et à la Bourgogne. Le 10 octobre 614, un concile composé de 79 évêques se réunit à Paris dans la basilique de Saint-Pierre et prit une série de décisions importantes. A la même date, les grands laïques exposèrent leurs réclamations. Le tout fut soumis au roi. Sur quelques points importants, Clotaire fit des réserves ; sur le fond même des demandes il céda. Le célèbre édit du 18 octobre proclame la liberté des élections épiscopales avec quelques restrictions. La compétence des tribunaux ecclésiastiques est étendue ; le roi s'engage à ne prendre sous sa protection spéciale aucun clerc, sans l'aveu de son évêque, à respecter les testaments des particuliers en faveur des églises. Il supprime les taxes injustes, promet de ne lever aucun autre droit de douane que ceux qui furent en usage du temps de Gontran, Chilpéric et Sigebert. Les comtes doivent être choisis dans le pays même qu'ils sont appelés à administrer ; et nous verrons plus loin quelles furent les conséquences de cette mesure. Nous reviendrons aussi sur l'article par lequel tous les biens qui ont été accordés par les rois aux grands leur sont confirmés. Personne ne devra être condamné à l'avenir sans avoir été entendu. Le roi se reconnaît soumis à la loi : Si quelqu'un nous avait arraché subrepticement, et en nous trompant, une concession qui fût contraire à la loi, que celte concession n'ait aucune valeur. Sans doute la puissance royale reste encore très grande ; le roi garde la plénitude de son pouvoir législatif ; et, s'il limite son autorité, c'est de lui-même et volontairement : il n'en est pas moins vrai que la monarchie n'est plus absolue comme au temps de Chilpéric. Au même moment, l'unité du royaume achevait de disparaître. Les longues guerres civiles ont décidément créé des régions politiques : à l'Austrasie et à la Bourgogne s'oppose désormais le pays nommé Neusler, qui deviendra plus tard la Neustrie[2]. A chacun de ces trois pays Clotaire dut donner un maire du palais spécial, chef des fonctionnaires et des grands. Landri fut maire du palais de la Neustrie, Radon de l'Austrasie, Warnachaire de la Bourgogne, et même à celui-ci le roi jura que jamais cette charge ne lui serait enlevée. Il y eut, sous un seul roi, trois royaumes. Quant à l'Aquitaine, exploitée en commun par les Francs, elle est près de se révolter. Bientôt l'Austrasie, qui, depuis 561, avait toujours eu un roi à elle, en réclama un. Les grands savaient bien que leurs chances d'obtenir dignités et richesses augmenteraient avec un souverain qu'ils auraient sous la main. Clotaire leur envoya en 623 son jeune fils, Dagobert, pour régner sur le pays entre les Ardennes et les Faucilles. Mais ni les Austrasiens ni Dagobert ne se contentèrent de ce tronçon de royaume. En se, Clotaire fut obligé de ressusciter l'ancien royaume d'Austrasie en toute son étendue avec la Champagne ; il ne garda que les annexes austrasiennes de l'Aquitaine et de la Provence. Au nom de Dagobert deux hommes exercèrent l'autorité en Austrasie, un laïque et un prélat. Le premier, Pépin, sur l'origine duquel nous n'avons aucun renseignement, devint maire du palais à la place de Radon ; le second, Arnoul, était évêque de Metz[3] Il était né d'une famille illustre ; mais toutes les généalogies postérieures qui le rattachent soit aux prélats de Metz, ses prédécesseurs, soit aux saints illustres de l'Aquitaine, sont controuvées ; on ignore aussi le lieu de sa naissance : la tradition qui le fait naître à Lay-Saint-Christophe, près de Nancy, n'a aucune autorité. Jeune encore, il entra au palais du roi Childebert II et fut recommandé au maire Gondulf ; à la cour, il acheva son éducation et apprit le métier des armes. Puis il se maria, eut deux fils : Clodoald, qui devint évêque de Metz après lui ; et Ansegisèle que, plus tard, quand la légende de Troie se sera répandue, on appellera Anchise. Il quitta ensuite la cour pour exercer, dans six comtés, les fonctions d'administrateur des domaines royaux[4]. A ce moment, le siège de Metz devint vacant : le roi Théodebert y appela Arnoul, qui, en un seul jour, prit tous les degrés de la cléricature (612). Avec Pépin, Arnoul fut l'auteur de la révolution qui précipita Brunehaut ; et, avec lui, il est, sous le nom de Dagobert, le maître de l'Austrasie. Mais, en 627, il se retira auprès de son ami Romaric, qui, sur la montagne de Habendum, dominant la Moselle, avait fondé un monastère[5], et il fut remplacé comme conseiller du roi par l'évêque de Cologne Cunibert. Peu après sa mort, en 641, il fut honoré comme un saint. Le fils d'Arnoul, Ansegisèle, épousa une fille de Pépin, que des documents postérieurs nomment Begga ; de ce mariage sortira la famille Carolingienne. Au début du règne de Clotaire, des révoltes éclatèrent en Bourgogne, dans le pays au delà du Jura. Les seigneurs ne voulurent pas reconnaître le duc Herpon, que Clotaire leur imposait ; ils se soulevèrent et le tuèrent. Le roi manda quelques-uns des chefs rebelles en sa villa de Marlenheim en Alsace et les fit mettre à mort. D'autres, attirés dans la villa de Malay-le-Roy[6] près de Sens, furent également exécutés. Mais le roi comprit que, pour garder son autorité en Bourgogne, il fallait faire des concessions. Il reçut à Bonneuil-sur-Marne[7] les évêques et les seigneurs de la région qui formèrent une assemblée, distincte de celle des Austrasiens et des Neustriens ; il écouta leurs réclamations auxquelles il fit droit. En 627, le maire du palais Warnachaire mourut. Son fils Godin essaya-t-il d'usurper sa charge et de rendre cette dignité héréditaire dans sa famille ? Clotaire l'attira dans un guet-apens et le fit tuer. Les grands de Bourgogne, réunis à Troyes, déclarèrent alors qu'ils n'avaient plus besoin de maire du palais, qu'ils préféraient traiter directement avec le roi (627). C'est que le maire du palais est encore un organe d'autorité, et les seigneurs veulent devenir indépendants ; déjà ils commandent à des bandes armées, composées de leurs serviteurs et des personnes qui se sont recommandées à eux. Un jour, à Saint-Ouen-sur-Seine, Clotaire a réuni les évêques et les grands de Neustrie et de Bourgogne ; un meurtre est commis dans l'assemblée. Le meurtrier fait appel aux siens et se retire sur la colline de Montmartre ; les parents et les amis de la victime viennent l'y assiéger. Il fallut toute l'énergie du roi pour ramener la paix. Ainsi pendant que le royaume se subdivise en trois — tria regna, — chacun des nouveaux États commence à se morceler en seigneuries. Clotaire II mourut le 18 octobre 629 ; il fut enterré à l'église Saint-Vincent ; on y a retrouvé son épitaphe. Dagobert, qui, à la mort de son père, avait environ vingt-six ans, entreprit de rétablir l'unité. Il fit des chevauchées en Neustrie et en Bourgogne, dans les années 629-630. Chaque jour, il siégeait à son tribunal, faisant sévère justice, sans égard aux personnes. Il ne dormait presque pas, mangeait à peine. On le vit successivement à Langres, Dijon, Saint-Jean-de-Losne, Chalon-sur-Saône, Autun, Auxerre, Sens. Puis il établit sa résidence à Paris. En Austrasie, Pépin, mal vu de Dagobert, perdit toute autorité ; il se réfugia en Aquitaine. A ce moment, il n'y eut plus, ce semble, qu'un seul maire du palais, Ega, pour les trois parties du royaume. Dagobert avait un frère, Caribert, avec qui il aurait dit, selon les usages francs, partager ses États. Mais, comme jadis Brunehaut, il rompit avec la coutume et demeura roi unique. Pourtant, un peu plus tard, il se décida à employer ce frère dans le Midi. L'Aquitaine[8] avait conservé dans le royaume franc un caractère à part. Les Wisigoths avaient été absorbés par les Gallo-Romains, et les Francs ne se sont jamais établis par masses compactes au sud de la Loire ; ils se sont partagé ce pays comme un butin. Les Aquitains, encore pénétrés de culture latine, et qui formaient une sorte de nationalité, supportaient malaisément la domination des Francs, dont ils détestaient la brutalité et la grossièreté. Ils ont appuyé la révolte de Chramne et celle de Gondovald. Ce fut sans doute à la fois pour leur donner en une certaine mesure satisfaction, et pour les maintenir dans l'obéissance que Dagobert envoya dans leur pays son frère Caribert. Il lui donna à administrer les comtés de Toulouse, de Cahors, d'Agen, de Périgueux et de Saintes ; il créa ainsi en face des Basques toujours redoutables[9] une véritable marche. Caribert établit sa résidence à Toulouse, défit les Basques et étendit sa domination jusqu'aux Pyrénées ; mais il mourut en 632. Il laissait un enfant en bas âge, Chilpéric, qui ne vécut pas. Le bruit courut qu'il fut tué par la faction de Dagobert. Le roi remit sous sa domination directe ces pays du Sud. Jusque vers l'année 670, l'Aquitaine demeura soumise à l'empire franc ; à cette date elle brisa les liens qui l'attachaient à l'empire franc et ses seigneurs y créèrent des dynasties locales[10]. L'unité du royaume était rétablie, et les seigneurs et les évêques furent obligés d'obéir au roi. Dagobert ordonna une enquête sur les biens du fisc qui avaient été donnés aux églises et aux seigneurs, et, contrairement à l'édit de 614, en reprit un grand nombre. Pour empêcher le développement des biens de mainmorte, il confisqua une série de domaines qui avaient été légués par des particuliers aux évêchés et aux abbayes. Le fisc s'enrichit de la sorte, et la cour devint luxueuse. Dagobert aimait les arts, en particulier les travaux d'orfèvrerie finement ciselés. Il donna à l'abbaye de Saint-Denis de beaux ornements en or fabriqués par son trésorier Éloi, qui plus tard devint évêque de Noyon. Cette cour brillante fut, il est vrai, un lieu de scandale. Le roi répudia sa femme Gomatrude, pour épouser une jeune fille de basse naissance, Nantechilde ; deux autres femmes furent traitées en reines, et innombrables furent ses concubines : ce n'est pas seulement par sa stricte administration de la justice que Dagobert mérita d'être comparé à Salomon. Pour ces excès, l'Église blâmait le roi ; mais elle reconnaissait ses grands services. Les évêques qu'il choisit illustrèrent leur siège : ainsi Éloi, Noyon ; le référendaire Ouen, Rouen ; le trésorier Didier, Cahors. Les monastères s'enrichissent : de nouveaux sont créés en grand nombre. Saint-Denis, où le roi a marqué sa sépulture, reçoit d'importants privilèges. Ouen fonde en Champagne l'abbaye de Rebais et son frère Adon celle de Jouarre, pour les femmes ; Éloi crée dans le centre le monastère de Solignac. En Austrasie, Remiremont est élevé sur le modèle de Luxeuil ; et, dans la forêt des Ardennes, sortent du sol les deux maisons jumelles de Stavelot et de Malmédy. L'œuvre de la mission chrétienne est reprise ; et c'est l'époque où saint Amand porta la religion de Jésus dans les Flandres et. chez les Basques. L'Église honore beaucoup de saints qui vivaient au temps de Dagobert. Dagobert maintint par la politique et les armes l'empire des Francs ; en 637, il envoie contre les Basques révoltés une armée qui réunit onze ducs et un grand nombre de comtes. Elle pénètre dans les gorges des Pyrénées, brûle les maisons, emmène les troupeaux. Le duc des Basques vint à la cour jurer fidélité. Le chef des Bretons du Domnoné[11], Judicaël, parut de même à la villa royale de Saint-Ouen pour s'excuser des dommages faits aux Francs et promettre obéissance. Dagobert intervint dans les affaires d'Espagne ; il substitua un roi des Wisigoths à un autre, et se fit payer, pour prix de son concours, deux cent mille sous d'or. Il obtint du roi des Lombards Crotaire qu'il reprît sa femme Gondeberge, qui était une princesse franque. Il est comme un roi supérieur dans l'Europe d'alors. Sur la frontière Est du royaume venait de se constituer un grand État. Les Slaves s'étaient avancés jusqu'à l'Elbe et à la Saale, avaient fondé des colonies dans le bassin du Main, occupé la Bohème, la Styrie, la Carinthie, la Carniole. Ces populations étaient partagées en un grand nombre de tribus : Croates et Slovènes dans les Alpes ; Tchèques en Bohème ; Sorabes, Wiltzes et Obodrites le long de la Saale et de l'Elbe. Beaucoup avaient du reste reconnu la domination de peuples voisins de race différente : Ostrogoths ou Bavarois germains, Avares de race mongolique. Or, à la fin du VIe siècle, un Franc, du nom de Samo[12], alla chez ces Slaves — ou Wendes, comme on les appelait encore — pour faire du commerce : il les aida dans leur lutte contre les Avares ; il les délivra de leur domination, et les Wendes le nommèrent roi. Ce fut une chose extraordinaire que cette élévation d'un simple homme libre. Samo fonda un royaume dont le centre était en Bohême et qui s'étendait de la Havel aux Alpes de Styrie. Il offrit son alliance à Dagobert, qui eut le tort de ne pas l'accepter. a Il n'est pas possible, aurait dit son ambassadeur en ces pays, que des chrétiens et des serviteurs de Dieu s'unissent avec des chiens. » Samo jeta l'ambassadeur en prison, et Dagobert envoya une armée qui fut battue sur les bords de l'Egra (632). Pour tenir les Slaves en respect, Dagobert créa le duché de Thuringe, sorte de marche d'avant-garde, et les fit attaquer par les Saxons. Alors commença la lutte entre les Germains et les Slaves, qui remplit toute l'histoire de ces contrées et, sous des formes appropriées à notre civilisation, se poursuit encore aujourd'hui. Samo finit par être contraint à la paix ; mais, jusqu'à sa mort (658), il garda son royaume. Il avait sans doute abjuré le christianisme et adopté la religion des Slaves. Il prit douze femmes, qui lui donnèrent vingt-deux fils et quinze filles. Après lui, son royaume s'effondra. Charlemagne se trouvera en présence de tribus slaves très divisées. Dagobert fut en rapport avec les Bulgares, population de race hunnique qui plus tard devait prendre les mœurs et même la langue des Slaves. Sortis des plaines de la Russie, ils avaient attaqué les Avares et ils avaient été battus. Neuf mille d'entre eux demandèrent asile dans le royaume franc à Dagobert, qui leur permit de passer l'hiver en Bavière ; ils se dispersèrent à travers le pays ; mais les Bavarois se conjurèrent contre eux, et, une nuit, à un signal donné, les massacrèrent, à l'exception de quelques centaines, qui se réfugièrent chez les Slaves. Bulgares, Avares, peuples hunniques ou peuples slaves menaçaient l'empire byzantin comme le royaume franc. Il était naturel que les souverains des deux pays s'entendissent. A ce moment régnait à Constantinople Héraclius, qui venait de battre les Perses et de recouvrer les lieux saints, et dont la gloire s'était répandue jusqu'en Occident : le chroniqueur à qui on donne le nom de Frédégaire parle d'Héraclius en de longs chapitres où la fable se mêle à l'histoire. En 631, l'empereur et le roi des Francs conclurent une paix perpétuelle. Probablement, ils arrêtèrent des dispositions communes contre les populations barbares du Danube. Peut-être aussi s'entendirent-ils pour prendre des mesures contre les Juifs. Une prédiction venait d'annoncer que l'empire byzantin était menacé par des nations circoncises et les Arabes commençaient leurs premières incursions. Il y eut à cette époque dans l'Europe chrétienne une explosion de haines contre la race sémitique. Cependant, sous l'éclatante apparence de la royauté mérovingienne, les causes qui en préparaient la décadence continuaient d'agir. Les Austrasiens, irrités de ce que le roi eût transporté sur les rives de la Seine le siège du royaume, demandaient un roi à eux. Dagobert fut obligé de leur donner satisfaction. En 634, à Metz, il proclama roi d'Austrasie son fils Sigebert. Le gouvernement fut exercé au nom de cet enfant par l'évêque de Cologne Cunibert et par le maire du palais Ansegisèle, fils d'Arnoul. Ce fut au tour des Neustriens de redouter qu'un jour ils ne fussent dominés par les Austrasiens. En 634-635, un fils, Clovis, était né à Dagobert. Les Neustriens le réclamèrent comme roi. Dagobert fit un partage anticipé de ses États : à sa mort, Sigebert devait garder 1'Austrasie avec ses dépendances de l'Aquitaine et de la Provence, Clovis régner sur la Neustrie et la Bourgogne réunies. Les grands de tout le royaume jurèrent.. d'observer ce pacte. Au début de l'année 639, le roi se trouvait en sa villa d'Épinay sur la Seine, lorsqu'il tomba malade. Il mourut le 19 janvier, et fut enterré dans l'église de l'abbaye de Saint-Denis. Dagobert n'avait point réussi à empêcher le démembrement du royaume des Francs ; mais il eut le mérite de l'avoir essayé. Ses victoires sur l'Elbe, la soumission des Bretons et des Basques, l'expansion de l'Église sous son règne, le luxe de la cour, ses constructions et ses travaux législatifs — il fit réviser la loi salique, — et surtout la comparaison qui s'établit entre son temps et l'époque suivante, remplie de guerres et de misères, ont donné à ce roi une sorte de gloire, que, d'une façon singulière, a consacré la chanson. II. — LES MAIRES DU PALAIS EN NEUSTRIE, EN AUSTRASIE ET EN BOURGOGNE JUSQU'A LA BATAILLE DE TERTRY (639-687)[13]. AU début de la vie de Charlemagne, l'historien Éginard fera en ces termes le portrait des successeurs de Dagobert : La race mérovingienne depuis longtemps n'avait plus ni vigueur ni autorité, ni rien que le vain titre de roi. Les ressources du royaume et toute la puissance étaient entre les mains des maires du palais. Il ne restait au roi que le vain simulacre du pouvoir. Orné d'une abondante chevelure, la barbe longue, il prenait place sur le trône et figurait le souverain ; il écoutait les ambassadeurs venus de toutes parts et leur rendait, à leur départ, les réponses qu'on lui avait dictées. Outre l'inutile nom de roi et l'argent que le maire lui assurait selon son bon plaisir, il n'avait rien en propre qu'une seule villa et encore d'un petit revenu : il y vivait avec des domestiques, en petit nombre, qui lui rendaient les services nécessaires. Là où il lui fallait aller, il se rendait sur un char, tiré à la manière rustique par des bœufs que poussait un bouvier. Ainsi il allait au palais, ainsi à l'assemblée du peuple, qui était convoquée chaque année pour les affaires du royaume : ainsi il rentrait dans sa demeure. Mais toute l'administration royale, toutes les affaires, tant intérieures qu'extérieures, étaient gérées par le maire du palais. Il y a dans ce passage célèbre de l'imagination : on se figure mal avec une longue barbe ces derniers rois qui, presque tous, moururent adolescents, et l'auteur a un peu exagéré leur faiblesse ; mais il est vrai que la royauté et la race sont bien déchues. Presque tous ces princes disparaissent à 23, à 24, à 25 ans tout au plus. Ils sont usés par de précoces débauches, pères à 15, même à 14 ans. D'autres s'endorment dans la vie religieuse, comme Sigebert, saint Sigisbert, dont les reliques sont gardées à la cathédrale de Nancy ; comme Dagobert II, saint Dagobert, dont les reliques, à Stenay, sont honorées encore par des pèlerinages. Les maires du palais sont devenus les ministres tout-puissants. En 639, à la mort de Dagobert Ier, Ega continue de régir la Neustrie avec Clovis II ; Pépin quitte son exil d'Aquitaine et redevient, à la place de son gendre Ansegisèle, maire du palais en Austrasie, sous Sigebert. Les Bourguignons, qui n'ont pas de roi à eux, veulent au moins avoir leur maire et on leur donne Flaochat. A Ega succéda Erkinoald ; à Pépin, mort en 640, d'abord un seigneur du nom d'Otton, puis, après l'assassinat de ce dernier, le fils même de Pépin, Grimoald. Le maire du palais est, dans chaque royaume, le chef des grands. Il doit maintenir leurs privilèges. Quand Flaochat eut été nommé maire de Bourgogne, il promit à tous les seigneurs et à tous les évêques du royaume, par lettres et par serment, qu'il conserverait à chacun ses honneurs et ses dignités. Mais le maire du palais est aussi le représentant du roi ; il doit garder intactes les prérogatives royales, lever les impôts dus au fisc, exiger le service militaire. Il y a donc une contradiction dans ses fonctions. Quelques maires gouvernent selon l'esprit des grands. Tel paraît avoir été Erkinoald : C'était un homme patient, plein de bonté, montrant sa bienveillance envers les prêtres, répondant avec douceur, non gonflé d'orgueil, sage et simple ; il n'avait que des richesses modérées ; voilà pourquoi il était aimé de tous. D'autres, au contraire, sont dévoués à la royauté et exigent l'obéissance de tous. Tel fut, ce semble, le maire du palais d'Austrasie, Otton. Lorsque Rodolphe, duc de Thuringe, se révolte contre les Francs et se proclame indépendant, les seigneurs austrasiens, envoyés contre lui, refusent de marcher, en haine d'Otton ; Sigebert est battu, et la souveraineté sur la Thuringe perdue par les Francs (641). Peu après Otton est assassiné par Leutharis, duc des Alamans, avec qui les grands d'Austrasie semblent avoir été de connivence. L'Alamanie comme la Thuringe fut perdue par les Francs, et la limite du royaume, qui, en 639, était l'Elbe, a reculé jusqu'au Rhin en 643. Le maire Grimoald osa se déclarer et contre les grands et contre le roi. Puisque, en fait il détenait le pouvoir, il devait être tenté de prendre le titre de roi. Quand, en 656, Sigebert, roi d'Austrasie, fut mort, Grimoald relégua en Irlande le jeune fils qu'il laissait, Dagobert, et proclama roi son propre fils Childebert. Mais les temps n'étaient pas mûrs pour cette révolution. Les grands d'Austrasie renversèrent Grimoald et le livrèrent au roi de Neustrie Clovis II, qui le mit à mort. Il faudra encore près de cent années de politique patiente, et aussi de grands services rendus au royaume et à l'Église, avant que la famille de Grimoald puisse tenter de nouveau pareille aventure. Au dehors, le maire du palais doit assurer la prééminence du royaume qu'il gouverne. Neustrie, Austrasie, Bourgogne veulent être indépendantes : mais chacune d'elles aspire à dominer les deux autres. Aussi chaque maire du palais entreprend sur les royaumes voisins ; les grands le poussent, dans l'espoir d'y mettre la main sur les dignités et les biens du fisc : et c'est une des raisons par lesquelles s'expliquent le mieux les guerres civiles. Les trois royaumes ne représentent point, comme on le croit d'ordinaire, des principes différents ; c'est encore moins la haine de races qui jette les Austrasiens sur les Neustriens : les guerres civiles, ce sont des appétits en lutte les uns contre les autres. Après la mort de Sigebert et la tentative manquée de Grimoald, il n'y eut plus qu'un seul roi, Clovis II. A sa mort (657), Clotaire III, un enfant, garda toute la monarchie. Sa mère Bathilde, une Bretonne, ancienne esclave, exerça la régence. Au même moment, il n'y eut plus qu'un seul maire du palais, Ébroïn. La Neustrie l'emporte sur les autres royaumes : Bourgogne et Austrasie, sans roi et sans maire, sont tombées en anarchie. Ébroïn (656-681) parait avoir voulu, comme Brunehaut, rétablir dans toute son intégrité l'autorité royale, parce qu'il y voyait l'unique moyen de salut d'une société qui se décomposait. Toute sa vie fut un combat. Au début, l'âpreté de la lutte fut adoucie par la reine Bathilde ; mais, quand celle-ci se fut retirée au monastère de Chelles qu'elle avait fondé aux portes de Paris, Ébroïn ne garda plus de ménagement et brisa toutes les résistances avec une terrible énergie. Il voulut aussi imposer la reconnaissance de l'autorité de la Neustrie à l'Austrasie et à la Bourgogne ; mais, comprenant qu'il ne viendrait jamais à bout de l'Austrasie, il consentit à lui donner un roi, Childéric II, frère de Clotaire III, et un maire du palais, Wulfoald, qui lui était tout dévoué. Il entendait du moins maintenir l'union de la Bourgogne et de la Neustrie. Les grands de Bourgogne résistèrent, dirigés par l'évêque d'Autun, Leodegarius, saint Léger. D'origine illustre, Léger avait été élevé au palais de Clotaire II. Entré dans les ordres, il devint archidiacre de l'église de Poitiers, abbé de Saint-Maixent, évêque d'Autun. Il rétablit la tranquillité dans ce diocèse troublé ; il répara l'église de sa ville épiscopale, acquit des ornements précieux pour le culte, fit une translation des reliques de saint Symphorien, se montra généreux envers les pauvres et acquit bientôt une grande réputation. Il fut un redoutable adversaire pour Ébroïn. Celui-ci ayant défendu qu'aucun grand de Bourgogne vint à la cour sans y avoir été appelé, Léger protesta plus haut que les autres. A la mort de Clotaire III (673), lorsque Ébroïn eut élevé sur le trône Thierry III, sans avoir pris l'avis des Bourguignons, l'évêque organisa la révolte et fit appel au roi des Austrasiens, Childéric II. Ébroïn vaincu est obligé de chercher un refuge dans l'abbaye de Luxeuil ; on coupe les cheveux de son roi, qui est enfermé à Saint-Denis. Léger proclame que chaque royaume conservera ses lois et ses coutumes : on n'enverra pas de fonctionnaires d'un royaume dans l'autre ; personne ne tentera à l'avenir d'assumer la tyrannie, à l'exemple d'Ébroïn, et la dignité de maire du palais pourra être occupée tour à tour par chacun des grands. Mais, devenu le personnage le plus considérable du royaume, Léger favorise les Bourguignons. Le maire du palais d'Austrasie, Wulfoad, et son roi Childéric II se soulèvent contre lui et l'obligent à se réfugier dans l'abbaye de Luxeuil, où Ébroïn avait été enfermé. C'est à présent l'Austrasie qui l'emporte. Mais Childéric II est assassiné par un noble franc qu'il avait fait attacher à une potence et fustiger. La confusion est alors à son comble. Les exilés sortent de leurs retraites, comme, au printemps, les serpents quittent leurs cavernes. Ébroïn et Léger, qui se sont réconciliés à Luxeuil, s'échappent du monastère ; une comète apparaît dans le ciel, signe que le règne de l'Antéchrist est venu. La lutte reprend entre les deux rivaux. Léger a fait nommer maire du palais Leudésius, fils d'Erkinoald, et s'appuie sur l'ancien roi d'Ébroïn, Thierry III. Ébroïn invente un Mérovingien qu'il proclame roi, marche contre Leudésius, le bat et le tue ; puis il abandonne son Mérovingien, reprend Thierry III et se fait donner la mairie du palais sur la Neustrie et la Bourgogne. Une armée envoyée par lui assiège Léger dans Autun. Le prélat distribue au peuple ses trésors, organise des processions ; mais il doit se rendre et on lui crève les yeux. Peu après, on l'accuse d'avoir fait assassiner le roi Childéric ; un concile, réuni sur l'ordre d'Ébroïn à Villeroy[14], le reconnaît coupable, le dépouille de la prêtrise ; après avoir subi toutes sortes de tourments, l'ancien évêque d'Autun est mis à mort (9 octobre 678). Son frère Garin est lapidé, et des seigneurs, ses anciens partisans, se réfugient jusque dans la lointaine Gascogne, chez les Basques. Les souffrances endurées par Léger, lui ont, plus que ses mérites, valu d'être mis au rang des saints. De bonne heure, il fut considéré comme un martyr. Dès le début du vine siècle, ses reliques furent répandues dans toute la Gaule ; le grand monastère de l'Alsace, Murbach, fut placé sous son vocable ; les églises de nombreux villages lui furent consacrées, et ces localités quittaient leur nom pour prendre le sien. Son culte contrebalança celui de saint Martin[15]. Après la mort de Léger, Ébroïn régnait en maître absolu. Les seigneurs de l'Austrasie s'inquiétèrent, mais se défendirent mal ; d'ailleurs leur roi Dagobert II fut assassiné. Alors reparaît sur la scène la famille carolingienne avec Pépin II[16], fils d'Ansegisèle et de la fille de Pépin Ier. On ne sait si celui-ci prit le titre de maire du palais ; il est probable qu'en l'absence de tout souverain il se contenta de celui de duc. Il partagea l'autorité avec un certain Martin. Ces deux hommes étaient en 678 à la tête de l'Austrasie, qui n'avait plus de roi. Ils avaient la clientèle des fidèles qui leur étaient liés par la recommandation. Mais Ébroïn prétendit faire reconnaître les droits et l'autorité du roi de Neustrie Thierry III. Les Austrasiens refusèrent et envahirent la Neustrie ; ils furent battus à Bois-du-Fay[17] (Lucofao) près de Laon. Pépin put regagner l'Austrasie ; Martin se sauva dans Laon. Ébroïn lui ayant juré de lui laisser la vie sauve, il se rendit. Mais aussitôt il fut mis à mort : il est vrai qu'Ébroïn avait eu la précaution de jurer sur un reliquaire vide (680). L'an d'après (681), Ébroïn est assassiné. Il mourait pour avoir essayé de réduire à l'obéissance des hommes qui voulaient vivre en pleine indépendance et en anarchie. Après ce meurtre, une réaction se produisit en Neustrie. Waratton, nommé maire du palais, se réconcilie avec Pépin, qui reconnaît le roi Thierry HI. Mais il est emporté par une révolte que dirige son propre fils Gislemar. Entre celui-ci et Pépin, la guerre éclate aussitôt. Pépin est de nouveau vaincu à Namur (683) ; mais Gislemar meurt, et son père Waratton reprend le pouvoir. Tant que vécut Waratton, les relations entre la Neustrie et l'Austrasie restèrent amicales ; mais, à sa mort (686), les grands neustriens se divisèrent. Les uns proclamèrent comme maire du palais Berthaire, partisan de la politique suivie par Ébroïn et Gislemar ; les autres se tournèrent vers Pépin, lui donnèrent des otages, se déclarèrent ses hommes. Pépin marcha contre la Neustrie. Un grand combat fut livré dans le voisinage de Saint-Quentin, au petit bourg de Tertry sur l'Omignon[18]. Berthaire fut vaincu et tué. Pépin, qui reconnut Thierry III comme souverain de toute la monarchie franque, prit le titre de maire du palais, et regagna l'Austrasie. Tertry n'est pas une victoire des Germains de l'Est sur les Romans de l'Ouest, car Pépin a eu des complices parmi les seigneurs neustriens. En apparence c'est plutôt une victoire de l'aristocratie sur la royauté. Les maires du palais comme Ébroïn et Berthaire, qui voulaient réduire les grands, ont été abattus. Avec eux la royauté semblait vaincue. Mais, en fait, une seule famille de grands allait profiter de ce triomphe, celle de Pépin. Elle va reconstituer ce pouvoir contre lequel elle s'est insurgée. Elle régnera sur la Neustrie et la Bourgogne comme sur l'Austrasie, sauvant l'unité du royaume franc. Elle rendra à son profit la charge de maire du palais héréditaire ; bientôt elle pourra aspirer plus haut. La bataille de Tertry annonce la fin de la dynastie mérovingienne et l'avènement des Carolingiens. III. — LE PRINCIPAT DE PÉPIN II (687-714). Pépin II, maître de la Gaule, y maintint pourtant toujours un roi. On vit se succéder sur le trône une série de princes dont il est même inutile de donner les noms, qui ne servent qu'à dater les diplômes. En réalité, le vrai souverain est Pépin. Il fit d'abord une concession à la Neustrie en lui donnant, pour la gouverner, un grand nommé Norbert. Celui-ci mourut peu de temps après. Alors se dévoilèrent les vraies intentions du maire. Il avait deux fils, Drogon et Grimoald : il avait donné à l'aîné Drogon le duché de Champagne et lui réservait la succession de la mairie d'Austrasie ; il investit le cadet Grimoald de la mairie de Neustrie. Il agissait comme un roi qui partage son royaume. Mais Drogon mourut en 708 ; Grimoald fut assassiné par un païen en 714 dans la basilique de Saint-Lambert de Liège. Pépin fit alors nommer maire de Neustrie le fils de Grimoald, Théodebald, un petit enfant. Drogon, de son côté, avait laissé deux fils : Arnoul et Hugues. Pépin espérait qu'ils lui succéderaient en Austrasie, et, en effet, quand, le 16 décembre 714, il eut rendu le dernier soupir en sa villa de Jupille sur la Meuse, Arnoul et Hugues furent proclamés maires du palais : leur grand'mère, Plectrude, prit la régence. Mais un troisième fils de Pépin, né d'une autre femme que Plectrude, s'empara de l'héritage paternel. Son nom était Charles, qui signifie vaillant et brave ; et, comme dit le continuateur de Frédégaire, le nom était approprié à la personne. Avec lui commencera pour la famille d'Austrasie la grande histoire. Le principat de Pépin II n'avait pas été sans gloire. Il imposa de nouveau la suzeraineté du royaume franc aux populations germaniques. Au Nord, entre l'Ems et la Meuse, vivaient les Frisons, partagés en un grand nombre de tribus ; Radbod, avec le titre de duc, réunit quelques-unes de ces tribus sous son autorité. Pépin II l'attaqua en 689 et les années suivantes ; il lui prit, une partie de son territoire. Les Frisons étaient encore païens : les Francs tentèrent de les convertir au christianisme. Willibrod commença l'œuvre de mission et construisit l'église d'Utrecht. Une fille de Radbod épousa Grimoald, fils de Pépin, et cette alliance acheva de rattacher la Frise au royaume franc[19]. Pépin fit aussi la guerre aux Alamans, autour du lac de Constance, battit le duc Willari et soumit le pays. Les Bavarois reconnurent de nouveau la domination franque, et c'était le roi franc qui choisissait leur duc dans la race des Agilolfingiens. Un missionnaire, Rupert, parcourait le pays, annonçait l'Évangile et fondait l'Église de Salzbourg. Vers la même date, Kilian prêchait en Franconie et subissait le martyre aux environs de Wurzbourg. Ces région s étaient peu à peu pénétrées par le christianisme ; seuls, dans la plain e du Nord, les Saxons restaient fidèles à leurs idoles . Il ne semble pas qu'il ait existé, depuis la mort de Dagobert Ier, de rapports entre eux et l'empire franc. Ainsi derrière les guerriers de Pépin II marchaient les missionnaires, et la religion fut pour lui un instrument de règne. Dans l'intérieur du royaume, il protégea les églises ; il fit de nombreuses donations aux monastères. A l'abbaye des Saints-Apôtres devant Metz , où reposait son ancêtre Arnoul — ce sera plus tard l'abbaye de Saint -Arnoul, — il conféra le village de Norroy-en-Woëvre ; il fut le bienfaiteur de Saint-Vanne de Verdun, de Saint-Trond près de Liège, de Saint-Wandrille dans la province de Rouen. Dans l'Eiffel, il construisit le monastère d'Echternach, dont il confia la direction à Willibrod ; il l'enrichit de biens nombreux et le prit sous sa protection spéciale. Il fonda encore le monastère de Suestern, non loin de la Meuse. Il a eu l'intention de réunir en Gaule des conciles, pour réformer l'Église. Sur tous les points il a été un précurseur, il a jeté la semence des moissons que récolteront ses descendants : Charles Martel, Pépin le Bref et le grand Charles. |
[1]
SOURCES.
La principale source est toujours la chronique dite de Frédégaire. On
consultera aussi les Gesta Dagoberti I
regis Francorum, édités par Krusch dans les Scriptores rerum merovingicarum, t. II,
p. 396. L'œuvre, comme Krusch l'a démontré dans les Forschungen zur deutschen Geschichte, t. XXVI, p. 163, est
antérieure à 832 et a une certaine valeur historique. Les biographies de saint
Eloi (Eligius), de
saint Ouen (Audœnus),
surtout celle d'Arnoul (Arnulfus)
nous apportent quelques renseignements. Sur toutes ces vies de saints, voir
Auguste Monnier, Les sources de l'histoire
de France, Paris, 1902.
OUVRAGES À CONSULTER. Les histoires générales de
l'époque mérovingienne citées. Albers,
König
Dagobert in Geschichte, Legende und Sage,
[2] Cf. J. Servais, La Neustrie sous les Mérovingiens, Turin, 1889. Le sens du mot Francia est encore bien vague à l'époque mérovingienne : il s'applique soit à l'ensemble du royaume franc, soit à l'une de ses régions ; il désigne indifféremment la Neustrie ou l'Austrasie. Voir Bourquelot, Sens des mots France et Neustrie sous le régime mérovingien, dans la Bibliothèque de l'École des Chartes, 1865, p. 567 et suiv.
[3] Voir l'ouvrage de Bonnell, Die Anfänge des karolingischen Hauses, Berlin, 1866 ; et surtout Die Regesten des Kaiserreichs unter den Karolingern, ancien travail de Bhömer complètement remanié par Mülhbacher, 2e édition, Innsbruck, 1899, où tous les textes sur les Carolingiens sont rassemblés. Cf. Mülhbacher, Deutsche Geschichte unter den Karolingern, Stuttgart, 1896. Fustel de Coulanges, Histoire des institutions politiques de l'ancienne France, t. VI : Les transformations de la royauté pendant l'époque carolingienne.
[4] Il porta le titre de domesticus.
[5] Ce monastère s'appela plus tard Remiremont, Romarici mons, du nom de son fondateur.
[6] Canton et arrondissement de Sens (Yonne).
[7] Canton de Charenton-le-Pont (Seine).
[8] Voir Fauriel, Histoire de la Gaule méridionale sous la domination des conquérants germains, Paris, 1836. 4 vol. in-8°. Perroud, Les origines du premier duché d'Aquitaine, Paris, 1883. Bladé, La Vasconie cispyrénéenne jusqu'à la mort de Dagobert Ier, Le Puy, 1891, in-8° ; du même, L'Aquitaine et la Vasconie cispyrénéenne depuis la mort de Dagobert Ier jusqu'à l'époque du duc Eudes, Le Puy, 1891, in-8°.
[9] Les populations de l'Aquitaine paraissent avoir fait cause commune avec les Basques. En 626-627, un certain Palladius et son fils Senoc, évêque d'Eauze, furent exilés parce que le duc Egina leur reprochait d'avoir été complices d'une révolte des Vascons.
[10] Au XVIIe siècle, un érudit espagnol, don Juan Tamagno de Salazar, voulut rattacher la maison d'Aragon à ces dynasties et ces derniers eux-mêmes aux Mérovingiens ; il inventa de toutes pièces un diplôme de Charles le Chauve daté d'Alaon dans lequel, pour les besoins de cette généalogie, il attribue trois fils à Caribert. Ce faux a trompé les savants et jeté longtemps une véritable confusion sur l'histoire du Midi pendant la période mérovingienne. Cf. Rabanis, Les Mérovingiens d'Aquitaine. Essai historique et critique sur la charte d'Alaon, Paris, 1856. Bladé, La charte d'Alaon et ses neuf confirmations, 1891, in-8°.
[11] La Bretagne se divisa en trois parties. Nous avons parlé plus haut du Bro-Waroch. A l'Ouest s'étaient établis les Cornovii, venus sans doute de la Cornouaille ; au Nord, depuis le Couesnon jusqu'à la rade de Brest, s'étendait la Domnonée, dont les habitants semblent être originaires du pays de Devon.
[12] Voir, sur Samo, Palacky, Jahrbücher des böhmischen Museum, I (1827), 387-413. Pelzel, dans les Abhandlungen einer Privat-Gesellschaft in Böhmen, de Edler von Born, Prague, 1875.
[13]
SOURCES.
La chronique attribuée à Frédégaire s'arrête en l'année 642. A partir de cette
date, nous n'avons comme guide qu'une chronique assez insignifiante, écrite en
Neustrie par un anonyme et qui nous conduit jusqu'en l'année 727. On l'appelait
autrefois Gesta Francorum ; le
nouvel éditeur, Krusch, lui a donné le nom de Liber
historia Francorum. L'édition a paru dans les Scriptores rerum merovingicarum, t. II,
p. 215. Les diverses biographies de saint Léger (Leodegarius), bien que très
partiales, fournissent des renseignements intéressants. Voir sur elles
Molinier, p. 138.
OUVRAGES À CONSULTER. Drapeyron, Essai sur l'origine, le développement et les résultats de la lutte entre la Neustrie et l'Austrasie. Ébroïn et Saint Léger dans les Mémoires lus à la Sorbonne, 1867-1868 ; du même, De Burgundias historia et ratione politica Merovingicorum ætate, Paris, 1869. Spee, Der Majordomus Ebruin, programme de Cologne, 1874. Friedrich, Zur Geschichte des Hausmeiers Ebruin dans les Sitzungsberichte de Munich, 1887, pp. 41-61. Dom Pitra, Histoire de saint Léger, Paris, 1846. Du Moulin-Eckhart, Leudegar, Bischof von Autun, Breslau, 1890 (L'auteur rabaisse trop le rôle de Léger).
[14] Canton de Cheroy, arrondissement de Sens (Yonne).
[15] Kurth, Glossaire toponymique de la commune de Saint-Léger, dans les Comptes rendus du Congrès archéologique de Namur de 1886, p. 302.
[16] On appelait autrefois Pépin Ier Pépin de Landen, Pépin II Pépin d'Héristal : mais ces dénominations sont arbitraires. On ne sait à quelle époque les villas de Landen et d'Héristal ont été acquises par la famille carolingienne.
[17] Commune de Sévigny-Waleppe, canton de Château-Porcien (Ardennes).
[18] Canton de Ham, arrondissement de Péronne (Somme).
[19]
Grimoald fut assassiné par un Frison. Les païens cherchaient à arrêter les
progrès constants du christianisme. Cf. Gehrke, Die Kriege der Franken mit den deutschen Stämmen in der
Zeit der späteren Merovingern, Rudolstadt, 1874.