LA PUCELLE DE FRANCE

HISTOIRE DE LA VIE ET DE LA MORT DE JEANNE D'ARC

 

APPENDICES.

 

 

APPENDICE A

PROPHÉTIES ATTRIBUÉES À BÈDE ET À MERLIN.

 

ON a souvent attribué les succès de la Pucelle à l'influence de soi-disant prophéties de Bède et de Merlin, inventées ou altérées par des prêtres du parti de Jeanne.

Nous avons dit assez au sujet des prophéties de Merlin. Nous avons en effet montré ces dictons obscurs attribués à Merlin et rapportés par Geoffrey de Monmouth (vers 1145), sur une vierge bienfaisante originaire du Nemus canutum que l'opinion publique rattacha au Bois chesnu de Domrémy. On s'attendait à ce que la dite vierge vînt du Bois chesnu, c'est-à-dire des marches de Lorraine. Dans la prophétie de Marie d'Avignon sous Charles VI, cette vierge devait sauver la France par les armes — après que ce pays aurait été ruiné par une autre femme, la femme du roi fou, ajoutait le peuple[1] —. Cela se disait couramment dans la vallée de la Meuse et était connu des paysans avant que Jeanne eût annoncé sa mission ; de sorte qu'un clerc avisé ne pouvait l'avoir composé dans l'intérêt de cette dernière. Un tel dicton peut l'avoir ou non encouragée ; ce qu'il y a de certain, c'est qu'elle s'en servit pour persuader Catherine Royer.

Les preuves de tout ceci ont été données. Mais la prophétie attribuée à Bède est une autre affaire. Nous ne devons point, comme M. Anatole France, confondre la prédiction de Bède avec celle de Merlin[2] ! Bède ne dit pas un mot du Bois chesnu.

Le dicton de Merlin — qui en somme s'appliquait tout naturellement à la Grande-Bretagne et non à la France — avait fait son chemin dans les légendes populaires. La prédiction de Bède était en latin et elle fut faite après que Jeanne eut levé son étendard.

La soi-disant prophétie de Bède ne se trouve pas dans les ouvrages de cet auteur : c'est un chronogramme, date fournie par les lettres numérales d'une phrase ou d'un vers servant, le plus souvent, d'inscription. En choisissant des lettres qui sont en même temps des chiffres romains, tels que i I, v V, l L, etc., et en J s additionnant, leur total donne l'année de l'évènement qu'on veut rappeler. Le chronogramme est un moyen mnémotechnique pour les dates.

Le chronogramme de la date de l'assassinat de Jean sans Peur est : Tolle, tolle, crucifige eum si vis, Prenez-le, prenez-le, crucifiez-le si vous voulez ! Pour en extraire la date, le chronogramme est écrit de la façon suivante :

ToLLe, toLLe, CrVCIfIge eVM sI VIs.

En réunissant la somme de tous les chiffres romains, M (mille) et ainsi de suite, on obtient 1419. Les quatre L donnent 200, les deux C 200 + M égalent 1400, les trois V font 15, les quatre I + 4 ; résultat total : 1419. On trouve plusieurs chronogrammes analogues, chacun représentant la figuration mnémotechnique d'une date, dans la Chronique de Saint-Michel[3].

Ces chronogrammes ne sauraient prétendre être prophétiques. Mais la soi-disant prophétie de Bède relative à la Pucelle fut donnée comme prophétique. Seule sur les trois lignes qu'elle comporte, la première est un chronogramme.

Nous en entendons parler pour la première fois dans une lettre italienne du 9 juillet 1429, écrite de Bruges à Venise[4]. L'écrivain dit[5] qu'à Paris... on a trouvé beaucoup de prophéties qui font mention de cette jeune fille (la Pucelle), parmi lesquelles il y en a une de Bède dans Alex(andro). Le chronogramme est donné, il reproduit la date de 1429[6].

Quand quelque événement remarquable se produisit, les savants fouillaient leurs collections d'oracles, fadaises qu'Onomacrite, dit-on, conservait et interpolait de façon analogue dans l'ancienne Athènes.

Il n'y a pas d'ouvrage de Bède In Alexandro. Mais Bède, ainsi que le montre M. Lefèvre-Pontalis, a été confondu avec Merlin, l'historien chrétien (672-735) avec le prophète païen celtique de la cour d'Arthur, Or, Geoffrey de Monmouth dédia sa brochure sur les prophéties de Merlin à Alexandre, évêque de Lincoln (1123-1148) par les mots : ad Alexandrum. Cette dédicace fut prise pour le titre In Alexandro, dans un livre intitulé Alexander. On ne fit qu'un de Bède et de Merlin, et les prophéties de ce dernier furent attribuées à Bède dans un livre de Bède qui n'existait point, In Alexandro.

Christine de Pisan, religieuse de son époque reculée, cite Bède avec Merlin, dans un poème sur la Pucelle, écrit le 31 juillet 1429, quand on attendait Charles VII aux portes de Paris[7].

Longtemps auparavant, Creton, le chroniqueur français de la mort de notre roi Richard II, montre que la confusion de Merlin avec Bède était déjà faite en Angleterre[8].

La soi-disant prophétie de Bède est donnée de façons différentes par le correspondant italien du 9 juillet 1429 ; par Jean Bréhal, grand inquisiteur[9], par Bower, le chroniqueur écossais[10] ; et par d'autres.

La première ligne des trois concorde avec la date 1429. Les deux autres sont : Les jeunes coqs français prépareront de nouvelles guerres, dans le signe du Taureau : voici les guerres qui commençant ; une Pucelle porte des étendards.

En donnant son opinion lors du procès pour la réhabilitation de Jeanne, Bréhal fait remarquer qu'on dit que Bède a annoncé la Pucelle dans ce chronogramme. Bréhal n'y ajoute pas beaucoup d'importance ; il est bien plus impressionné par une prophétie de Merlin, qui, suivant lui, est une bonne légende populaire[11]. Il interprète une des formes de la version donnée par Geoffrey de Monmouth, et il omet la partie concernant Londres dont il n'a pas besoin[12].

Il donne aussi et commente une longue prophétie attribuée à Engelida, fille du roi de Hongrie. Cette prophétie fut certainement composée après le 17 juillet 1429 et avant l'échec de Paris. Elle nous apprend que la Pucelle avait la voix douce, une petite tache rouge de naissance derrière l'oreille et un cou mince — collum modicum —, ce que Bréhal prend pour un cou court.

Il dit que beaucoup considèrent plutôt cette prophétie comme moins qu'authentique ! Encore doit-on essayer de l'interpréter dans un sens favorable.

La conclusion parait être :

1° Que Jeanne et ses compatriotes connaissaient une prophétie légendaire — infiltration de Merlin par l'intermédiaire de Marie d'Avignon, et qui était localisée au Bois chesnu — et que, d'autre part, les érudits connaissaient ce dicton sous une forme littéraire dans Geoffrey de Monmouth.

2° Un simple chronogramme, un nouveau jeu d'esprit sur les événements de 1429, fut en juillet de cette même année, à Paris, attribué à Bède — par suite de la vieille confusion de Bède avec Merlin —, et mis en circulation pour encourager le parti français par un témoignage sur des faits réels, — témoignage qui ne prédit point sa victoire. Paris fut la source de cette fausse prophétie, qui pouvait être due à l'habileté d'un carme attaché à son souverain légitime.

3° La prophétie d'Engelida a été fabriquée entre le 17 juillet et le 8 septembre 1429 ; mais Jeanne avait délivré Orléans du 1er au 8 mai, et je ne vois pas bien comment sans ces fraudes pieuses — le chronogramme et Engelida — les merveilles de la Pucelle ne se seraient pas produites[13].

Du 1er au 8 mai Engelida n'avait point encore vaticiné ; et si quelqu'un pense que Saint-Loup, Les Augustins, Les Tourelles et Jargeau furent enlevés par la vertu d'un chronogramme disant qu'une jeune fille porterait des étendards, chronogramme écrit certainement après que la Pucelle eut levé sa bannière victorieuse, je lui envie sa foi robuste, tout en désirant de la lui voir consacrer à des opinions plus vraisemblables.

 

— Je me suis basé sur l'érudition de M. Lefèvre-Pontalis dans Morosini, t. IV, annexe XVI, pour mes conclusions particulières —.

 

APPENDICE B

L'ATTAOUE DE PARIS.

 

DANS le texte j'ai fait ressortir que le récit de Jeanne de l'attaque de Paris (8 septembre 1429) est pleinement confirmé par celui d'un froid observateur, Fauquemberque, qui se trouvait parmi les assiégés.

La Pucelle dit que les nobles avaient l'intention de faire une escarmouche, une démonstration militaire[14]. Fauquemberque répète deux fois qu'ils espéraient faire plus par une sédition populaire que par la force extérieure des armes[15].

M. France dit que sans nul doute l'attaque était décidée par le conseil du roi. Assurément elle l'était, mais des huit citations qu'il fournit à l'appui, aucune ne prouve la chose et toute la responsabilité en fut rejetée sur Jeanne par l'accusateur[16].

La Pucelle n'était pas, à ce qu'il semble, informée des résolutions prises. e Les quatre citations destinées à étayer cette opinion sont muettes à ce sujet[17]. Tandis que les nobles ne voulaient faire qu'une démonstration, Jeanne était résolue à une attaque ferme, tout en sachant bien, conformément à l'assertion de Fauquemberque, que leur projet se bornait à une simple démonstration devant provoquer une sédition populaire.

S'ils avaient voulu poursuivre l'affaire sérieusement, comme le suppose M. France, d'après les grosses pertes qu'ils firent en matériel de siège, ils n'auraient point commencé l'attaque à deux heures de l'après-midi et disposé leurs canons un peu en arrière de la butte des Moulins, à l'abri des plombées et des pierres que commençait à cracher l'artillerie des remparts[18]. Ils étaient derrière la colline, en embuscade, dans l'espoir de pouvoir tomber à l'improviste sur toute sortie des troupes de la garnison[19].

Si leurs canons avaient été susceptibles de bombarder la ville, de l'endroit où ils se trouvaient derrière la colline qui masquait la présence du gros de l'armée, la canonnade eût révélé l'embuscade.

Quant au fait d'avoir laissé leur matériel de siège derrière eux, ils savaient que les assiégés ne feraient pas de sortie pour aller le chercher, et ils n'en firent point[20]. Le lendemain la Pucelle était debout à l'aube quoique blessée[21], et bien entendu c'était dans ses desseins de retourner et d'aller reprendre son matériel de siège ; mais le roi envoya deux princes du sang pour l'empêcher d'aller plus loin[22].

Par conséquent, le matériel du siège et 700 chariots tombèrent entre les mains du peuple et de la garnison de Paris, qui ne furent point inquiétés. C'est ainsi du moins que j'interprète le témoignage. Toute la faute retombe sur le roi.

 

APPENDICE C

FAITS RELEVÉS À LA CHARGE DE JEANNE.

 

Le signe donné au roi. - Le costume d'homme. - La question de la confession.

LES interrogatoires auxquels Jeanne fut soumise étaient fréquemment renouvelés et adroitement dirigés sur les différents points qui la concernaient. Mais aucun point n'eut plus d'importance dans l'esprit des juges, que le signe qu'elle était censée avoir donné au roi lors de sa première entrevue. En toute loyauté, comme nous l'avons vu, Jeanne ne pouvait révéler quel il était. L'eût-elle fait que les juges auraient triomphé en disant : Charles de Valois, roi comme il s'intitule lui-même, n'est pas convaincu de sa propre légitimité, et il poursuit son droit à la couronne de France en s'appuyant sur l'assurance d'une sorcière qui est inspirée du démon.

La Pucelle comprit parfaitement ces intentions, aussi disait-elle souvent qu'il y avait des questions auxquelles elle ne ferait pas de réponse ou une réponse qui ne serait point précise. En effet, dans ce long interrogatoire, elle cacha sous un voile léger de symbolisme, la vérité sur le signe donné au roi. Le signe, dit-elle à la fin, était une couronne mystérieuse apportée par un Ange, et ce symbolisme avait pour but de mêler sa propre entrevue à Chinon avec le couronnement à Reims. M. Quicherat prétend[23], et la plupart des chercheurs sont d'accord avec lui, que Jeanne basa son histoire sur les questions qui lui furent posées et la développa d'après la suite même de l'interrogatoire. M. Anatole France déclare cette théorie impossible. Les juges, dit-il, avaient appris par leurs informateurs, que Jeanne se vantait d'avoir donné un signe au roi, en la forme d'une couronne précieuse. Voilà la vérité sur ce point. Au sujet d'un détail de la légende de sainte Catherine d'Alexandrie — qui dit-on, avait reçu d'un ange une couronne de grâce céleste et l'avait mise sur la tête de l'impératrice romaine —, Jeanne, qui était nourrie de cette histoire, disait que semblable chose lui était advenue. En France — avant d'être captive —, elle avait fait plusieurs récits merveilleux de couronnes, et dans l'un de ces récits elle se représentait en la grande salle du château de Chinon, au milieu des seigneurs, recevant de la main d'un ange une couronne, pour la donner à son roi[24]. M. France présente une variante de sa légende. Parlant du couronnement, il ajoute : Dans un de ses rêves, elle avait donné naguère une couronne éblouissante à son roi ; elle s'attendait à ce que cette couronne fût apportée dans l'église par des messagers célestes. Pour cette fable, M. France cite le Procès, t. I, p. 108. La page indiquée ne contient pas un mot sur ce sujet[25]. Il n'y a pas un seul point dans les témoignages rapportés qui soit de nature à prouver que Jeanne ait jamais eu ce rêve, ni qu'elle ait raconté ces histoires à dormir debout, quand elle était en France et en liberté.

M. France qui regarde Jeanne[26] comme hors d'état de distinguer le vrai du faux par suite de ses hallucinations perpétuelles, pense que néanmoins elle eut des doutes sur la vérité matérielle de cette merveilleuse histoire ; peut-être la tint-elle vraie seulement dans le sens spirituel. Quoi qu'il en soit, à la façon dont les juges conduisaient l'interrogatoire, on voit bien qu'ils connaissaient toute cette histoire extraordinaire — que Jeanne, d'après le critique, aurait raconté couramment, alors qu'elle se trouvait libre dans son pays[27].

M. France renvoie pour son affirmation au chapitre et verset où Jeanne aurait raconté son histoire fabuleuse de couronne et d'Ange. C'en est assez pour le lecteur d'une façon générale, mais si l'on jette un coup d'œil sur l'indication donnée, on a la preuve que le soi-disant témoignage de M. France n'a aucune valeur pour ce qu'il cherche à établir[28]. Le passage cité renferme seulement une partie de l'histoire dite aux juges et n'établit point que le récit en ait été fait en France.

Tandis qu'il n'y a absolument aucune preuve que Jeanne ait jamais raconté en France une aussi sotte histoire, tous les témoignages contemporains de correspondants, tous ceux des témoins de 1450-1456, la représentent simplement connue faisant au roi une communication verbale qui le surprit et lui plut, ou bien qu'il tint secrète. Dans une note je cite des exemples[29].

Le témoignage déclare seulement que le signe fut transmis par une communication verbale. Si Jeanne avait colporté l'histoire d'un ange et d'une couronne, le fait serait signalé dans les lettres des correspondants italiens et allemands. De plus, Jeanne n'était point sotte. Sa première entrevue avec le roi eut comme témoins de nombreux courtisans et des ecclésiastiques qui ne virent ni couronne, ni ange. Si en France elle avait jasé sur un ange et une couronne, elle eût été contredite par des centaines de témoins oculaires et du coup aurait perdu tout crédit. Elle distingua parfaitement ce qui, pour elle, était réel dans ses Visions et ce qui était de sa propre initiative. Ce qu'elle fit à Rouen et qui avait pour point de départ les questions qui lui étaient posées, était résolument arrêté dans le but de cacher la vérité du secret du roi. Nous allons en citer les preuves d'après le témoignage des juges eux-mêmes, en la suivant maintenant à travers le labyrinthe des questions et des réponses.

Le 22 février elle dit : Avant de me mettre en œuvre, le roi a eu beaucoup d'apparitions et de belles révélations. Sur ce sujet elle refusa d'entrer dans le détail. On peut concevoir ce qu'elle voulait dire d'après un exemple contemporain. En février-mars 1858, M. J.-B. Estrade fut présent plusieurs fois quand Bernadette Soubirous, en extase à la grotte de Lourdes, vit l'apparition, qu'elle seule apercevait, de la Dame qui se présentait comme l'immaculée conception. En 1888, M. Estrade rencontra l'archevêque de Reims, qui lui dit : Il parait que vous avez été un des témoins favorisés des apparitions de la grotte. — Oui, monseigneur, indigne comme je le suis, la Vierge m'a fait cette grâce[30].

L'archevêque et M. Estrade tous les deux, dans un cas tout à fait semblable à celui de la Pucelle, parlèrent des apparitions dont M. Estrade fut le témoin, bien qu'en fait il n'ait vu qu'une chose : Bernadette en contemplation.

Jeanne se servit de la même forme de langage. Le roi avait eu d'elle beaucoup de révélations sur ses apparitions, et peut-être la vit-il quand elles se manifestaient.

Elle alla même plus loin : Le roi et plusieurs autres ont vu et entendu les Voix quand elle les a perçues ; Charles de Bourbon était présent avec deux ou trois autres[31].

Il y a des détails qui semblent indiquer, qu'avec la permission du roi, elle révéla à certains gentilshommes de la cour, sous serment d'en garder le secret, ce que les Voix lui communiquaient au sujet des doutes que le roi entretenait sur sa légitimité.

Le 27 février, elle dit : J'ai eu sur le roi des révélations que je ne vous dirai point.

La Voix le défend-elle ?

Je n'ai point pris conseil. Donnez-moi un délai de quinze jours et je vous répondrai... Je crains plus de déplaire à ces Voix, que d'avoir à vous répondre[32].

Jadis, dans une seule entrevue, elle avait dit à son roi ce qui lui avait été révélé[33].

Y avait-il un ange au-dessus de la tête de votre roi quand vous l'avez vu pour la première fois ?

Par notre Dame, je ne sais pas, je n'en vis point.

Les juges paraissent avoir entendu parler de cette légende d'après laquelle elle aurait reconnu le roi dans la foule, à la vue d'un ange planant au-dessus de lui. Le roi avait un bon signe pour croire en moi et per clerum — il avait l'assentiment des docteurs —. Les révélations que le roi avait eues, elle n'en parlerait point cette année, mais il avait eu un gage de factis suissur ses propres actes — avant d'avoir confiance en elle[34]. Si notre traduction de de factis suis est exacte, Jeanne a dit là toute la vérité, sauf qu'elle garde le silence sur la nature des facta, la prière secrète du roi.

Le 1er mars, on lui demanda quel signe elle donna à son roi. J'ai toujours répondu que vous n'entendriez pas cela de ma bouche. — Ne savez-vous pas quel était le signe ?Vous ne saurez point cela de moi. Je l'ai promis, dans telle place que je ne puis vous dire sans me parjurer, à sainte Catherine et à sainte Marguerite, sans qu'elles me l'aient demandé ; je l'ai fait parce qu'il y aurait eu trop de gens pour me presser de le dire, si je ne l'eusse promis à ces saintes. — Y avait-il quelque autre personne présente quand vous avez montré le signe à votre roi, en dehors de lui-même ?Je pense qu'il n'y avait personne autre, bien que beaucoup de gens aient été assez près.

Cela se rapporte à la première entrevue de Chinon. Avez-vous vu une couronne sur la tête de votre roi, quand vous lui avez montré le signe ?

Je ne puis vous dire cela sans parjure.

Ils semblent avoir entendu dire ou avoir supposé, qu'elle reconnut le roi soit par un ange au-dessus de lui, soit par une couronne imaginaire visible sur sa tête. Ce sont eux qui font figurer ici à la fois l'ange et la couronne.

Ils l'interrogèrent alors sur la couronne employée à Reims, et, comme nous l'avons déjà montré — dans le chapitre sur le couronnement —, elle dit qu'on se servit d'une couronne trouvée à Reims, mais que le roi aurait pu en avoir une beaucoup plus riche, s'il avait attendu. Cette couronne lui fut apportée plus tard[35]. Elle paraît avoir fait allusion, ainsi que nous l'avons vu, à une couronne actuellement encore existante, qui arriva trop tard pour la cérémonie. Si cette couronne était celle de saint Louis à Liège, ou une autre dans le même genre, elle était entourée de figures d'anges ciselés en argent.

Le 10 mars, on lui demanda : Quel est le signe qui vint à votre roi ? Elle répondit : Il est bel et honoré, et bien croyable, et est bon, et le plus riche qui soit au monde'[36].

Suivant l'opinion de Quicherat exprimée ci-dessus et que je partage, elle orienta dès lors ses réponses dans le sens que lui suggéraient les interrogatoires. Les juges avaient mis en avant l'histoire d'une couronne ou d'un ange au-dessus de la tête du roi. Le signe réel fut sa remarque relative à la prière secrète du roi, à ses doutes intimes sur sa propre légitimité, et à son droit d'engager le pays dans une guerre pour reconquérir la couronne. Dorénavant dans ses réponses, la Pucelle dit qu'elle lui a révélé son droit à la couronne, en parlant d'une couronne qu'elle lui a présentée et en symbolisant par là cette couronne impérissable qu'aucun orfèvre sur terre ne pourrait façonner, le pouvoir légitime ; elle se représente elle-même comme l'ange qui apporta la couronne. Ainsi que nous l'avons vu, l'archevêque d'Embrun avait parlé d'elle comme d'un ange[37]. L'allégorie est claire ; si les juges n'en comprirent point la portée générale, c'est qu'ils étaient très peu perspicaces.

On lui demanda pourquoi elle ne voulait pas montrer ce signe, comme elle-même avait désiré voir celui de Catherine de la Rochelle ; elle répondit qu'elle n'eût pas demandé mieux que le signe de Catherine fût montré comme le sien, devant l'archevêque de Reims et d'autres prélats, Charles de Bourbon, La Trémoïlle, d'Alençon et d'autres chevaliers, qui le virent et l'entendirent aussi distinctement qu'elle voyait ses juges.

A la demande si le signe existait encore, elle répliqua : Il durera jusques à mille ans et outre, et — revenant à la couronne de France — il est au trésor du roi. — Est-ce or, argent ou pierre précieuse, ou couronne ? Elle refusa de donner une réponse.

Ses Voix à Domrémy lui avaient dit : Va hardiment ; quand tu seras auprès du roi, il aura un bon signe pour lui persuader de croire en toi et te recevoir[38].

Un ange, de par Dieu et non de par autre, bailla le signe à mon roi... Les clercs cessèrent de m'arguer, quand ils eurent su ledit signe.

M. France écrit qu'elle semble oublier que l'entrevue de Chinon précéda les interrogatoires de Poitiers. Il y a peut-être intérêt à remarquer que frère Pasquerel, qui sait ces choses par elle, fait dans sa déposition la même méprise[39]. La réponse de Jeanne est claire ; il est vrai que les religieux commencèrent à l'importuner pour savoir ce qu'elle avait dit au roi, mais ils cessèrent quand ils surent quel langage elle avait tenu.

Jeanne dit que le roi se montra satisfait du signe, qu'elle se retira dans une petite chapelle et qu'elle ouït dire qu'après son départ plus de trois cents personnes avaient vu le signe. Il est fort improbable que tant de gens aient été admis à la connaissance du secret. Quand on lui demanda si elle-même et le roi avaient fait la révérence à l'ange, elle répliqua : Oui, pour ce qui est de moi. Je m'agenouillai et ôtai mon chaperon, — probablement pour sa prière dans la chapelle[40].

Les juges doivent alors avoir été suffisamment embarrassés ou avoir vu qu'elle voulait seulement les berner par une histoire.

Le 12 mars, ils n'obtiennent d'elle rien de plus, et néanmoins ils recommencent le 13. Je promets que je n'en parlerai plus à homme qui vive, dit-elle, et après cet avertissement elle affirma qu'un ange avait promis au roi son royaume par l'aide de Dieu et de son intervention à elle, et non autrement. L'ange mit-il la couronne sur la tête de votre roi ?Elle fut baillée à un archevêque, c'est à savoir celui de Reims, comme il me semble, en la présence du roi. Ledit archevêque la reçut et la bailla au roi ; et j'étais moi-même présente ; et elle est mise au trésor du roi.

Cela indique simplement le couronnement de Reims. Questionnée sur le moment où la couronne fut apportée, elle revint à la scène de Chinon ; c'était à une heure tardive en mars.

La couronne était de fin or... elle signifiait que le roi tiendrait le royaume de France.

Est-ce que vous la maniâtes ou la baisâtes ?

Non.

Interrogée sur la façon dont vint l'ange, elle répondit qu'il entra par l'huis de la chambre, qu'il s'inclina devant le roi et prononça les paroles déjà dites au sujet du signe, c est-à-dire que le roi serait couronné avec l'aide de Jeanne et tiendrait le royaume. Ici l'allégorie est vraiment transparente — tout le monde pouvait voir que ce n'était point un ange, mais elle-même qui avait fait la révérence à un roi mortel en s'inclinant devant lui !

Elle avança alors bien près de la révélation de la vérité du signe et du secret.

L'ange rappela au roi sa loyale résignation dans les grands troubles qui venaient de fondre sur lui. C'était sous le poids de ces troubles que Charles fit la prière résignée qu'a rapportée Pierre Sala sur l'autorité de Boisy, que le roi lui-même avait mis dans le secret :

Disant dedans son cœur, sans prononciation de parole, que si ainsi était qu'il fut vrai héritier descendit de la noble maison de France, et que le royaume justement lui dût appartenir, qu'il lui plût de lui garder et défendre, ou au pis lui donner grâce d'échapper sans mort ou prison, et qu'il se pût sauver en Espagne ou en Écosse, qui étaient de toute ancienneté frères d'armes et alliés des rois de France[41].

Telle était la loyale résignation dont l'ange, c'est-à-dire Jeanne elle-même, avait parlé à son roi. Devant ses juges, elle a été à deux doigts de révéler son secret.

De là elle se lança dans la description des compagnons célestes de l'ange, fit le récit du regret qu'elle éprouva à son départ ; il est à présumer qu'elle eut une de ses Visions ; peut-être elle les accommoda simplement à la circonstance[42].

Pour ce qui est de la couronne, quand on lui demanda où l'ange l'avait prise, elle dévia en pleine allégorie : Il n'est orfèvre au monde qui saurait en faire une aussi belle et aussi riche... elle sent bon et sentira bon toujours, pourvu qu'elle soit bien gardée ainsi qu'il convient. Ce qui veut dire que la couronne n'est point matérielle et qu'elle durera tant que les rois de France la maintiendront comme il faut. M. France considère qu'elle avait oublié tout l'endoctrinement sur l'exercice du pouvoir royal conformément à la volonté de Dieu, tel que des prêtres pieusement trompeurs le lui avaient inculqué[43]. Comme nous pouvons le constater, elle n'avait oublié aucune de ses idées. Enfin, le jour de son martyre, s'il faut en croire le document informe que les clercs refusèrent de signer, Jeanne avoua que l'histoire de la couronne était une fiction et que c'était elle l'ange[44]. C'était suffisamment manifeste, mais les tristes juges paraissent avoir été aveuglés. La confession prouve que Jeanne faisait la part des réalités et de l'imagination.

Ils ne découvrirent point le secret du roi, bien que Jeanne ait en quelque sorte voltigé sur ses confins.

Il n'existe nulle part d'insinuation relative à un on dit sur une couronne réelle ou quelque objet matériel avant trait au secret et incorporé avec lui, excepté dans les lettres italiennes de juillet 1429[45].

En répondant à ses juges, Jeanne n'a rien dit sur une couronne réelle ou symbolique, jusqu'à ce qu'ils aient provoqué eux-mêmes cette question à son cinquième interrogatoire (1er mars 1431) : Avez-vous vu une couronne sur la tête de votre roi quand vous lui avez montré le signe ? A Reims avait-il une couronne ?[46]

Dans le courant des interrogatoires elle montra comment elle appréciait la vérité du cas. On lui demanda si elle voulait s'en référer pour son histoire de la couronne à Charles de Bourbon, à La Trémoïlle, à La Hire et à Boussac, ou à d'autres dont elle avait parlé comme de témoins. Ils écriraient leur témoignage sous cachets. Elle répondit : Donnez-moi un messager et je leur écrirai tout sur ce procès. En cas de refus elle ne s'en rapporte pas à eux. Faites-les venir et alors je répondrai.

Voulez-vous vous en rapporter et vous soumettre à l'Église de Poitiers ?

Croyez-vous me prendre ainsi et m'amener à me trahir ? Ni clercs, ni courtisans, comme elle le savait, n'auraient pu témoigner sous serment de la présence d'une couronne ou d'un ange[47].

Du commencement à la fin, son esprit est parfaitement clair, sans être obscurci par des rêveries. Ce n'étaient point là les rêves incertains d'une enfant[48]. Dès le début, elle avait averti ses juges que sur certains points elle ne dirait pas toute la vérité ; elle en dit plus que la prudence ne l'exigeait.

 

LE COSTUME D'HOMME

Le port du costume d'homme était un point de la plus grande importance dans les esprits des juges. L'habit est peu de chose, moins que rien, disait-elle avec son gros bon sens[49]. Le 22 février, on lui demanda sur le conseil de qui elle portait le vêtement d'homme.

Elle refusa plusieurs fois de répondre, dit à la fin qu'elle ne l'avait pris sur le conseil de qui que ce soit et plusieurs fois varia dans ses réponses, qui ne sont pas textuellement rapportées[50]. Le 24 février, elle fit remarquer qu'elle n'avait pris ce vêtement sur le conseil d'aucun homme et qu'elle n'avait rien fait que par l'ordre de Dieu et des anges[51].

Nous avons déjà vu le témoignage de Jean de Novelonpont sur ce point. Il lui demanda si elle voulait s'en aller à Chinon avec les habits qu'elle portait et elle répondit qu'elle chevaucherait volontiers avec le costume d'homme[52]. Si c'est lui qui en suggéra l'idée, elle ne l'en rendit point responsable ; elle fut loyale jusqu'au plus petit point d'honneur, et nous devons supposer que les Voix donnèrent leur approbation à ce changement de vêtement. Mais il y a une preuve, comme nous l'avons vu, qu'elle avait pensé s'en aller en France et qu'elle fit cette première tentative avec le costume d'homme bien avant d'avoir eu un cheval et une escorte. Son parent Laxart ou Lassois a déposé ainsi : Quand la Pucelle vit que Robert de Baudricourt ne voulait pas l'emmener au dauphin, elle lui emprunta ses propres vêtements et dit qu'elle désirait partir, et il l'emmena à Saint-Nicolas, d'où, selon ce que déclare Catherine Royer, ils revinrent à Vaucouleurs, parce que, suivant ce qu'elle tenait de Jeanne elle-même, la Pucelle ne pouvait partir ainsi de façon honorable, c'est-à-dire à pied. Le Saint-Nicolas dont il est ainsi parlé, ne saurait être celui que Jeanne visita à Nancy, car il se trouve sur un chemin allant en sens contraire de celui de la France[53]. Ainsi l'idée de porter le costume d'homme était antérieure à celle qu'aurait pu avoir Jean de Novelonpont. Par la suite[54], dans diverses occasions, elle resta fermement attachée à sa résolution de porter le costume d'homme. Ce n'était point seulement la marque qu'elle n'avait point abandonné sa mission, mais seule avec des soldats dans sa cellule, comme à la guerre, c'était la sauvegarde de sa pudeur. Les docteurs de son parti l'avaient approuvée, et, comme elle le dit, c'était affaire de peu d'importance.

 

LA QUESTION DE LA CONFESSION

Pour ce qui est des Visions et des Voix, la Pucelle admit franchement qu'elle n'avait point révélé ces phénomènes à son curé ni à aucun homme d'Église[55]. Le motif de son silence n'était point un ordre de ses Voix, mais la crainte que les faits venant à être connus, les Bourguignons ou son père ne l'eussent empêchée de partir pour la France.

En 1428-29, ses voisins connaissaient son intention, mais ils ne savaient pas qu'elle était conseillée par des saints qu'elle voyait et entendait.

Cette abstention vis-à-vis des prêtres auxquels elle ne révéla ni ses Visions ni ses Voix, fut une des principales charges d'après lesquelles elle fut condamnée. Tu as cru à leurs enseignements du moment qu'elles sont venues à toi, sans demander conseil à ton curé ou à quelque autre homme d'Église. Et néanmoins tu crois que ces Voix viennent de Dieu aussi fermement que tu crois en la foi chrétienne, et que Notre-Seigneur Jésus-Christ a souffert passion[56]. Vraisemblablement ce simple manquement de ne pas mentionner ces phénomènes en confession n'était pas une grande faute ; la faute était d'accepter ces Voix et leurs avis, avant qu'un prêtre les dit déclarés orthodoxes. Cependant, les clercs de Poitiers avaient eu confiance et l'archevêque d'Embrun ainsi que Gerson les avaient reconnues orthodoxes.

Jeanne aurait pu avoir à attendre longtemps si elle avait consulté des confesseurs. Sainte Thérèse ne parla à personne, ou tout au moins cacha longtemps sa première vision de Notre-Seigneur[57]. Toutefois on doit reconnaître que cette vision ne fut le point de départ d'aucun acte, et ne forma point la base d'entreprises militaires apparemment irréalisables. Quand les visions devinrent plus fréquentes, un confesseur conseilla à sainte Thérèse de n'en parler à personne. La sainte fut charmée de cet avis. Mais Notre-Seigneur lui dit que le confesseur s'était trompé, qu'en confession elle devait toujours toute la vérité sur ses Visions[58].

Ce sont là sujets sur lesquels il est évident qu'il règne parmi les prêtres une grande variété d'opinions et Jeanne aurait pu perdre son temps au milieu des disputes des directeurs. Elle prit la chose en mains elle-même, et dès l'âge de treize ans garda son propre secret.

Les écrits de sainte Thérèse sur ses visions, ses remarques sur ce qu'elle voit avec les veux de l'esprit et dans un état presque de ravissement, si bien qu'elle s'asseyait pour se rendre compte qu'elle était maîtresse d'elle-même — parfois son corps se trouvait élevé au-dessus de la terre —, tout cela ne fait pas la même impression sur l'esprit que le récit de la Pucelle au sujet de ses propres visions. Celles de sainte Thérèse semblent moins externes et moins substantielles[59]. Toutefois elle était maîtresse d'elle-même quand, sur les ordres de son confesseur, elle faisait le signe de la croix — de même que Jeanne — et un geste de dédain contre la plus auguste apparition. Au moment de la sainte présence, on aurait pu me mettre en pièces sans m'amener à croire que c'était le démon, dit sainte Thérèse[60].

Jeanne avait également beaucoup de peine à être convaincue, par ses accusateurs et ses juges, que ses visions n'étaient pas saintes.

 

APPENDICE D

LES VOIX ET LES VISIONS DE JEANNE D'ARC.

 

ON n'ajoute rien à notre connaissance des Voix et des Visions en nous disant qu'elles étaient une illusion de son cœur. Cette phrase ne nous apprend quoi que ce soit[61]. A ce sujet j'avais écrit un long chapitre, mais je fus amené à reconnaître que mes études psychiques et mes déductions pouvaient paraître aussi prolixes et aussi futiles que la science céleste des docteurs contemporains de Jeanne. Personne de nos jours n'affirme que les manifestations psychiques dont elle fut l'objet aient été simulées, personne ne conteste qu'elle ne les ait éprouvées, personne, à l'instar des savants de l'Université de Paris, ne les attribue à Satan, Bélial et Béhémoth.

L'hypothèse scientifique la plus récente sur la psychologie de Jeanne est celle du docteur Georges Dumas, professeur à la Sorbonne et un éminent névropathologiste. Pratiquement et dans un véritable esprit scientifique, il se refuse à faire ce diagnostic rétrospectif. Si les Visions et les Voix avaient toujours eu lieu du même côté — ce qui, ainsi que nous l'avons vu, ne fut pas le cas —, Charcot eût regardé Jeanne comme hystérique, et soumise à des hallucinations unilatérales. Mais on ignore si elle fut hystérique ou éprouva de l'hémianesthésie — absence de sensation d'un côté du corps.

Bien plus, les neurologistes contemporains attachent moins d'importance que Charcot aux hallucinations unilatérales de la vue dans le diagnostic de l'hystérie.

D'Aulon répéta, en 1456, les commentaires de quelques femmes qui ne savaient, n'en ayant point fait l'observation personnelle, si la Pucelle éprouvait l'infirmité périodique de leur sexe[62]. Si elle ne l'éprouvait point, elle était alors atteinte d'une insuffisance de développement physique que l'on rencontre chez beaucoup de névropathes. Mais Quicherat regarde ce témoignage comme sans valeur et montre qu'il y aurait d'autres dépositions tout aussi bonnes, pour prouver que Jeanne était exempte des autres nécessités de la nature[63]. Elle avait un art merveilleux et en même temps une force inouïe de pudeur. Ainsi il n'y a pas de preuve de développement physique en retard, chez une fille d'une force physique et d'une endurance sans exemple.

Ses Visions et ses Voix, dit le docteur Dumas, sortirent brusquement de sa pensée obscure et inconsciente et furent souvent en désaccord avec sa pensée claire. Ses manifestations semblaient objectives, certaines, et cela nous fait penser encore à l'hystérie. Mais il est inutile de dire que les hallucinations survenant une ou deux fois dans le cours de l'existence, ne sont point des manifestations rares chez des gens parfaitement exempts d'hystérie[64]. Ces hallucinations, je puis l'affirmer d'après trois expériences, ne peuvent être distinguées des perceptions normales, qu'à l'aide d'un témoignage ultérieur — par exemple dans le cas de l'absence réelle d'une personne vue en apparence.

Voici les conclusions du docteur Dumas : Si l'hystérie est intervenue chez Jeanne, ce n'a été que pour permettre aux sentiments les plus secrets de son cœur de s'objectiver sous forme de visions et de voix célestes ; elle a été la porte ouverte par laquelle le divinou ce que Jeanne jugeait telest entré dans sa vie ; elle a fortifié sa foi, consacré sa mission, mais par son intelligence, par sa volonté Jeanne reste saine et droite, et c'est à peine si la pathologie nerveuse éclaire faiblement une partie de cette âme...[65]

Je suis entièrement d'accord avec ces conclusions du docteur Dumas. Il a été incapable de découvrir trace de troubles nerveux chez Jeanne — ou tout au moins, il ne propose l'hypothèse d'hystérie qu'avec des réserves —, et il admet ce point capital que sa volonté et son intelligence normales étaient absolument saines et droites. Ses Visions et ses Voix étaient — d'après une phrase moderne — de l'automatisme, manifestations qui lui auraient rendu sensibles les avertissements de sa pensée obscure. Ceux qui s'intéressent à ce problème complexe peuvent étudier un cas moderne, celui d'Hélène Smith, rapporté par le professeur Flournoy, de Genève, dans son livre : Des Indes à la planète Mars. Au lieu de saints, Hélène voyait un esprit nommé Léopold, qui lui donna des avis généralement bons, quoique transmis de façon excentrique. Elle croyait à l'existence objective de Léopold. Elle présentait le phénomène de la dissociation et était plus ou moins distraite et inconsciente de son ambiance au moment où apparaissait Léopold ; elle différait en cela de Jeanne d'Arc. Ces phénomènes eurent lieu à la suite d'une extase dans laquelle elle fut plongée, à la suite de séances de spiritisme, séances que Jeanne ne suivit point !

Mais que veut-on dire par pensée inconsciente ? Répondre à cette question me paraît en ce moment au-dessus des données de la science psychologique. On peut si l'on veut étudier le traité de F.-W.-H. Myers, Human Personality — la Personnalité humaine — et s'accommoder au petit bonheur de sa théorie du subliminal self — moi latent. Pour Myers, c'est, sous certains rapports, un esprit omniscient, exempt des conditions d'espace et de temps, et avec ce moi, l'être humain se trouve parfois en contact plus ou moins parfait. Les résultats sont, entre autres, des instants de télépathie, de divination et de clairvoyance.

Dans le cas de Jeanne, Quicherat, libre penseur, a choisi trois exemples de ces facultés : sa connaissance du secret du roi, sa prévision d'une blessure non mortelle par une flèche à Orléans, la découverte de l'épée cachée de Fierbois. Cela, dit-il, est assis sur des bases si solides qu'on ne peut le rejeter sans rejeter le fondement même de l'histoire[66]. — Je n'ai pas de conclusions à tirer, ajoute-t-il. Mais que la science y trouve ou non son compte, il n'en faudra pas moins admettre les Visions... et d'étranges perceptions d'esprit issues des Visions. Ces particularités de la vie de Jeanne semblent sortir du cercle des facultés humaines[67].

Là-dessus Myers reprend le sujet, présente une multitude considérable de témoignages modernes pour prouver que de telles facultés sont dans la sphère du pouvoir humain, et échafaude ce que Quicherat n'a point fait — une théorie de leur origine dans le subliminal self — moi latent. Dans son premier volume, Myers regarde les avertissements de Jeanne comme venant de son moi latent sans autre assistance. Dans son second volume, il classe Jeanne comme extatique, et dans sa définition de l'extase il admet l'intervention des esprits extérieurs. Là il se trouve d'accord avec le chanoine Dunand dans son gros volume : Les Voix et les Visions de Jeanne d'Arc. Malheureusement Myers n'a pas vécu assez pour procéder à une dernière révision de son livre Human Personality, et il n'était point familiarisé avec les petits détails de la vie de la Pucelle.

Ici je laisse ce sujet, non point parce qu'il manque d'intérêt, mais parce que c'est là une discussion impossible dans un livre d'histoire. Mon propre sentiment est assez évident. Je suis porté à croire que d'une façon qu'il n'est point facile à définir, Jeanne fut inspirée, et je suis convaincu qu'elle fut une personne d'un génie élevé et du plus noble caractère. Sans ce génie et sans ce caractère, ses Visions de choses cachées — en les supposant telles — n'auraient été d'aucune utilité dans cette grande tâche de sauver la France. Une autre personne pourrait avoir entendu les Voix donnant les avertissements, mais nul n'aurait pu montrer une aussi indomptable énergie et ce don d'encourager les autres, uni à une douceur d'âme et à une admirable et victorieuse ténacité.

 

APPENDICE E

LA PUCELLE DANS LES CHRONIQUES ANGLAISES CONTEMPORAINES.

 

QUICHERAT n'insère dans le Procès qu'un extrait d'une chronique anglaise concernant Jeanne, et on y trouve seulement : Et hoc anno, XXIII. die maii, quædam mulier, vocata Pucelle de Dieu, capta est ab Anglis apud villam de Compayne[68].

Quicherat ignorait que dans un ouvrage imprimé, A Chronicle of London — édité en 1827 par sir Harris Nicolas et E. Tyrrell —, il aurait trouvé plus de détails. Les éditeurs anglais avaient publié, d'après un manuscrit du British Museum, intitulé Cotton, Julius, B. I., une traduction de la lettre écrite par le duc de Bourgogne à Henri VI le 23 mai 142o. Cette lettre est identique, sauf dans quelques passages, à celle de la ville de Saint-Quentin, publiée par Quicherat dans le Procès, t. V. p. 166, 167. Il y a un document, peut-être antérieur de cinquante ans — Cotton, Vitellius, F. IX. —, qui donne aussi une traduction anglaise de la lettre du duc de Bourgogne. Le 20 avril 1909 dans ses Études, le P. Thurston, de la Société de Jésus, en a publié la copie. J'en reproduis le texte tel qu'il le donne en français :

La même année, le duc de Bourgogne campant avec son armée devant Compiègne, une sorcière, une femme en laquelle le dauphin et tous les adversaires du duc avaient grande confiance et qu'ils tenaient pour une prophétesse ou une déesse, sortit de ladite ville de Compiègne, bien armée, avec beaucoup de capitaines, de chevaliers et d'écuyers et d'autres, qui furent défaits. Et la sorcière qu'ils appelaient la s Pucelle de Dieu s fut prise. Et alors le duc de Bourgogne écrivit au Roi à Calais en la manière qui suit[69] :

A mon très-redouté Seigneur le Roi. Mon très redouté Seigneur, Je vous salue aussi respectueusement et aussi humblement que je puis. El qu'il vous plaise de savoir, mon très redouté Seigneur, que ce jour d'uy XXIIIe de may, environ six heures après midi, vos adversaires et les miens, qui estaient avec grande puissance en la ville de Compaigne, devant laquelle je suis logié avec mon armée et avec ceux que vous avez envoiez sous le gouvernement de messire John Montgommery et messire John Styward, sont sailliz avec grande puissance sur l'avant-garde qui estoit proche d'eux ; et avec eux vint celle qu'ils appellent la Pucelle, avecques plusieurs de leurs principaulx capitaines : à l'encontre desquelx alèrent mon cousin messire Jehan de Lucembourg et autres de vos gens et des miens qui ont fait tics grant et aspre resistence ; et en ma personne y arrivai, et trouvai que les diz adversaires estoient jà reboutez ; et par le plaisir de notre benoist Créateur la chose est ainsi avenue, et Dieu m'a fait tele grace, que icelle qu'ilz appellent la Pucelle a esté prinse, et avecques elle plusieurs capitaines, chevaliers et escuiers, et aultres prins et noiez et morts, dont à ceste heure je ne sais encore les noms.

 

J'y ajoute le reste des notes sur Jeanne, que j'ai recueillis dans les chroniques anglaises :

1° Manuscrit harléien n° 2256, f. 200.

. . . Un peu avant la Pentecôte, le susdit siège d'Orléans fut levé par le duc de Launson et son armée. Et tous les autres seigneurs et capitaines du même siège furent dispersés, c'est-à-dire le comte de Suffolk et son frère et lord Talbot, et lord Scales, avec beaucoup d'autres Anglais qui bientôt après étaient faits prisonniers avec grand dommage.

2° Ibid., f. 202.

Et la même année (c'est-à-dire 1430, d'Henri VI) le XVe jour de mai, eut lieu une rencontre en France auprès de la ville de Compiègne, dans laquelle furent tués, tant Français qu'Armagnacs et Écossais, 800 hommes d'élite, et l'on prit aussi à ces Français et à leur compagnie beaucoup de cottes d'armes. Et en cette même journée, fut prise la sorcière de France, appelée la Pucelle, qui fut prise toute armée comme un homme d'armes. Par la puissance de sa sorcellerie, tous les Français et leur compagnie avaient l'espoir de l'emporter sur le peuple anglais, mais Dieu fut Seigneur et Maitre de cette victoire et déconfiture, et ainsi elle fut prise et amenée et gardée en lieu sûr par le roi et son conseil, toujours en son pouvoir et à sa volonté.

3° Manuscrit Cotton, Julius, B. XI, f. 87.

La délivrance d'Orléans comme dans le manuscrit harléien n° 2256.

Ibid., f. 87, 88.

Anno octavo.

Et le 230 jour de mai vers la nuit devant la ville de Compiègne, fut prise sur le champ de bataille une femme avec beaucoup de nobles capitaines, qu'on appelait la Pucelle de Dieu, une mauvaise sorcière, par la puissance de laquelle le dauphin et tous nos adversaires croyaient fermement conquérir toute la France, et n'avoir jamais le dessous en aucun lieu où elle serait présente, car ils la regardaient entre eux comme une prophétesse et une grande déesse.

5° Manuscrit Cotton, Cléopatra, C. IV, f. 35 et f. 36.

La délivrance d'Orléans, et la prise de la Pucelle comme ci-dessus.

6° Manuscrit Cotton, Vitellius, A. XVI, f. 871.

(Anno septimo).

Et en jour de mai, le siège d'Orléans fut levé par la Pucelle et le bâtard de Bourbon et d'autres Armagnacs, et là furent tués lord Moleyns, l'écuyer Grassdale et beaucoup d'autres hommes de valeur. Et le Xe jour de juin le frère du comte de Suffolk et lord Ponyngs son fils et héritier furent tués dans un combat auprès d'Orléans. Et lord Talbot, lord Scales et sir Thomas Rampeston et beaucoup d'autres furent fait prisonniers. Et cela eut lieu à Jargeau et le 22 juin le cardinal partit pour un voyage en Bohême, vers la ville de Prague, mais il n'y arriva pas, car il resta toujours en France avec ses nombreux seigneurs.

Ibid., f. 92 (Anno VIIIe)

. . . Et le 23 mai, fut la Pucelle prise devant Compiègne par le duc de Bourgogne, sir John Lyffynbourne, sir John Steward et sir John Mongomery.

Ibid., f. 93 (Anno IXe).

Et le 23e jour[70] la Pucelle fut brûlée à Rouen, et c'était la veille du Corpus Christi.

On peut commenter un peu ces textes.

Extrait 1. — La Pucelle n'est pas mémé nommée dans le rapport de la délivrance d'Orléans, attribuée au duc d'Alençon — Duke of Launson — bien qu'il n'ait pas été présent.

Extrait 2. — La prise de Jeanne est datée du 15 mai, et 800 Français et Écossais avec beaucoup de cottes d'armes, c'est-à-dire beaucoup de chevaliers et d'écuyers, furent pris. Monstrelet évalue à 500 ou 600 la troupe de Jeanne, et il rapporte qu'un petit nombre fut capturé. Le passage ne dit rien de la mort de Jeanne sur le bûcher.

Extrait 6. — Le nom de Glasdale est donné comme Grassdale, ce qui est probablement correct.

Extrait 7. — Sir John Lyffynbourne signifie Jean de Luxembourg. Il est clair que les Anglais chez eux savaient peu de chose de la Pucelle, et ce peu de chose était faux.

 

APPENDICE F

LES ÉCOSSAIS À COMPIÈGNE.

 

AUCUN auteur français n'a mentionné que les Écossais étaient à Compiègne et qu'ils chevauchèrent aux côtés de Jeanne dans sa dernière charge, comme cela est affirmé dans l'extrait 2. Pour un Écossais, l'assertion du duc de Bourgogne et de l'extrait 7, que sir John Stewart et sir John Montgomery commandaient les Anglais qui coupèrent la retraite à la Pucelle, est pénible, étant donné que Stewart et Montgomery sont les noms de nobles maisons écossaises. Mais on ne trouve pas dans la généalogie des familles écossaises ces chevaliers sir John Stewart et sir John Montgomery. D'autre part, les Stywards ou Stewards étaient propriétaires dans les comtés de Cambridge, de Norfolk et de Suffolk, et de cette famille est descendue la mère d'Olivier Cromwell. Lors de l'avènement au trône anglais d'un Stuart (1603), ils se réclamèrent, en vertu d'un droit problématique, comme descendants des Stewarts écossais. On peut retrouver la trace des deux chevaliers comme appartenant à l'armée anglaise longtemps avant 1430. Les Montgomery possédaient des terres dans le Hampshire, l'Essex et le Hertfordshire, depuis le temps d'Édouard III. Ainsi les deux chevaliers sont Anglais et non Écossais. Je ne veux point fatiguer les lecteurs français avec le récit des preuves et documents réunis sur ce point. Monstrelet ne mentionne pas sir John Styward ou Steward, mais il appelle Montgomery Anglais.

 

 

 



[1] Procès, t. III, p. 33, 84.

[2] Anatole France, Vie de Jeanne d'Arc, t. I, p. 204, note 1, dans laquelle la prophétie de Bède d'après Morosini, t. IV, p. 324, est identifiée avec la prédiction de Merlin.

[3] Procès, t. IV, p. 313, 314.

[4] Morosini, t. III, p. 89.

[5] Morosini, t. III, p. 127.

[6] Morosini, t. III, p. 127. On l'interprète de différentes façons.

[7] Procès, t. V, p. 12.

[8] Creton (Webb), p. 168, 169, 371 ; Buchon, p. 412.

[9] Procès, t. III, p. 334-349 ; cf. 338-339.

[10] Procès, t. IV, p. 481.

[11] Procès, t. III, p. 338, 349.

[12] Procès, t. III, p. 341, 342.

[13] Anatole France, Vie de Jeanne d'Arc, t. I, p. 207.

[14] Procès, t. I, p. 146, 147.

[15] Procès, t. IV, p. 456-458.

[16] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 73, note 2.

[17] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 73, note 3.

[18] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 75.

[19] Chartier, Procès, t. IV, p. 87.

[20] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 80.

[21] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 82.

[22] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 82, 83.

[23] Aperçus nouveaux, p. 64.

[24] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 265, 266.

[25] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. I, p. 520.

[26] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. I, p. 111.

[27] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p, 265, note 5.

[28] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 266. Procès, t. I, p. 120-122.

[29] Rotselaer, 22 avril 1429. Procès, IV, 426. Alain Chartier, juillet 1424, Procès, V, 133. Pasquerel, Procès, III, 103. D'Aulon, Procès, III, 209. Morosini, III, 47, 48, note 1 : le sens en est obscur. Lettre de Bruges du 10 mai (?) 1429. Ayroles, La Vraie Jeanne d'Arc, III, 576. Morosini, III, 97, note 2. Lettre du 9 juillet 1429, Procès, V, 133.

[30] Les Apparitions de Lourdes, p. 9 ; 1906.

[31] Procès, t. I, p. 56, 57.

[32] Procès, t. I, p. 63. Antérieurement : Procès, t. I, p. 56.

[33] Procès, vol. I, p. 73.

[34] Procès, t. I, p. 75.

[35] Procès, t. I, p. 91.

[36] Procès, t. I, p. 119.

[37] Procès, t. III, p. 409.

[38] Procès, t. I, p. 120.

[39] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 301, note 1.

M. France a mal lu le passage, je pense, car Pasquerel parle de la réponse de Jeanne au roi : Je te dis, de la part de Messire, que tu es vrai héritier de France et fils de roi, comme venant après plusieurs questions posées par le roi et non par les ecclésiastiques à Poitiers. Lors de la première entrevue qu'elle eut avec le roi, celui-ci, déclare Pasquerel, dit à son entourage : Jeanne m'a révélé certains secrets que personne ne connaissait ni ne pouvait connaître que Dieu seul. (Procès, t. III, p. 103, note 1.)

D'Alençon n'assistait pas à cette entrevue, et Jeanne voulait dire que lui et les autres, avec l'archevêque et plusieurs évêques, étaient présents à la fin de la seconde enquête à Poitiers, et avaient été informés de ce qu'avait été le signe en réalité. Après cela les clercs cessèrent de discuter avec elle.

Tant que le roi vécut, la nature réelle du secret ne put être révélée, mais l'insistance avec laquelle Jeanne affirma qu'elle avait confié aux clercs de Poitiers beaucoup de détails que ceux-ci ne révélèrent certainement jamais, donne à penser qu'à cette époque les serments relatifs à un secret étaient scrupuleuse. ment gardés. L'opinion que le secret fut deux fois révélé, d'abord au roi, plus tard à son conseil et à quelques gens d'Église, semble plus probable que d'admettre que Jeanne ait oublié l'ordre des événements et placé sa première entrevue avec Charles après les enquêtes de Poitiers, et ait perdu si prématuré. ment le souvenir des faits, qu'elle en ait mal informé Pasquerel. Mais ce dernier fait simplement allusion plus tard aux interrogatoires de Poitiers et aux délais causés par tantis interrogationibus, tant d'interrogatoires.

[40] Procès, t. I, p. 122.

[41] Sala, Procès, t. IV, p. 250.

[42] Procès, t. I, p. 140-144.

[43] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 263, 264.

[44] Procès, t. I, p. 480, 481.

[45] Morosini, t. III, p. 161-163.

[46] Procès, t. I, p. 91.

[47] Procès, t. I, p. 396, 397.

[48] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 305-306.

[49] Procès, t. I, p. 74.

[50] Procès, t. I, p. 54.

[51] Procès, t. I, p. 74.

[52] Procès, t. II, p. 436, 437.

[53] Procès, t. II, p. 444 et note 1, p. 447.

[54] Procès, t. I, p. 133, 165, 166.

[55] Procès, t. I, p. 128.

[56] Procès, t. I, p. 430.

[57] Œuvres de sainte de Thérèse, t. I, p. 62 ; Paris, 1880.

[58] Œuvres de sainte de Thérèse, t. I, p. 271, 273, 280, 281.

[59] Œuvres de sainte de Thérèse, t. I, p. 391, 392.

[60] Œuvres de sainte de Thérèse, t. I, t. I, p. 315, 316.

[61] A. France, Vie de Jeanne d'Arc, t. I, p. LXV.

[62] Procès, t. III, p. 219.

[63] Aperçus nouveaux, p. 59, 60. Beaucroix, dans Procès, III, p. 118.

[64] William James, Principles of Psychology, t. II, p. 114-131.

[65] Dumas dans la Vie de Jeanne d'Arc, t. II, p. 459-465.

[66] Aperçus nouveaux, p. 61-66.

[67] Aperçus nouveaux, p. 46.

[68] Procès, t. IV, p. 475.

[69] Dans la traduction de cette lettre, nous reproduisons autant que possible le texte de la lettre aux habitants de Saint-Quentin, tel qu'il a été publié par Quicherat ; nous donnons en italiques les additions principales de la lettre à Henri VI.

[70] Le mois de juin est le dernier mentionné.