ANTONIN LE PIEUX ET SON TEMPS

ESSAI SUR L'HISTOIRE DE L'EMPIRE ROMAIN AU MILIEU DU IIe SIÈCLE - 138-161

 

INTRODUCTION. — SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE DU SUJET.

 

 

§ I. Les sources anciennes.

 

On a l'habitude de déplorer[1] la fatalité qui nous a privés des documents historiques sur Antonin et qui, d'une manière générale, a réduit nos sources d'information à quelques pages de l'Histoire auguste. Est-ce que ces regrets ne seraient pas un peu hors de saison ? Sans doute, l'on ne possède pas pour le milieu du second siècle une œuvre d'histoire qui puisse soutenir la comparaison avec les grandes compositions de Tite-Live, de Tacite, ou avec les biographies si pleines de Suétone ; sans doute, l'ensemble de renseignements le plus important pour le règne d'Antonin a été rédigé, près d'un siècle et demi après cette époque et sur des documents de seconde main, par un compilateur des plus médiocres. Tout cela est vrai ; cependant la pauvreté dont on se plaint est beaucoup plus apparente que- réelle. L'histoire d'Antonin n'est pas toute dans la biographie de l'Histoire auguste ; elle est un peu partout. C'est un dossier composé de pièces éparses, dont l'ensemble finit par être encore important ; les contemporains et la postérité y ont travaillé. On pourrait même dire que rien n'y manque, documents officiels, correspondances intimes, appréciations historiques, tableaux de mœurs. Que d'époques dans l'histoire de l'antiquité où l'on est réduit à des indications bien autrement restreintes ! S'il faut exprimer un regret à l'égard des renseignements sur Antonin le Pieux et son temps, c'est moins la rareté qu'il convient d'en regretter, que l'infinie dispersion et l'émiettement de tous les côtés.

Parmi les sources de cette histoire, le premier rang par l'importance, c'est-à-dire par l'authenticité, revient à celles qui émanent des contemporains. Ceux qui ont connu l'empereur, qui ont été dans son intimité, ceux encore qui, sans avoir approché de la cour impériale, vivaient à ce moment à Rome ou dans les provinces, les uns comme les autres méritent d'être interrogés les premiers, s'ils ont consigné dans leurs écrits quelque chose des événements dont ils ont pu être les acteurs ou les témoins. Ce n'est qu'après eux ou à leur défaut que l'on pourra demander aux écrivains de l'époque postérieure le récit ou l'appréciation d'un événement.

On ne connaît aucun contemporain d'Antonin, qui ait songé à écrire une histoire spéciale du règne sous lequel il vivait. Si l'on étudiait alors l'histoire, c'était pour négliger le présent et remonter vers le passé. Cependant les écrivains qui se sont donnés vers cette époque aux études historiques n'ont pas laissé de faire allusion de temps à autre aux événements et au maître du jour. C'est ainsi que les œuvres d'Arrien, d'Appien et de Pausanias peuvent, à des titres divers, être consultées pour cette étude. Arrien a adressé, en 131 ou 132, à l'empereur Hadrien un rapport officiel sur l'état militaire des côtes de la mer Noire, sous le nom de Périple du Pont-Euxin. Les renseignements que renferme cet ouvrage s'appliquent à des faits qui ne changèrent pas de quelque temps. Aussi peut-on utiliser encore pour le règne d'Antonin le Périple de l'écrivain de Nicomédie.

Appien a rédigé vers le milieu du règne d'Antonin, de 146 à 180 environ, la préface de son Histoire romaine. Cette préface renferme un tableau remarquable, dessiné à grands traits, de la situation générale de l'Empire. Il y est question de la nature du pouvoir impérial, de la politique militaire suivie par Antonin, de la prospérité générale des provinces. Appien n'est pas un panégyriste officiel qui adresse à l'empereur l'éloge de son propre gouvernement ; il écrit en dehors de toute préoccupation politique et se borne a noter ce qui frappe son attention. Son témoignage est désintéressé, sincère, digne de toute confiance.

Pausanias a rencontré deux fois, dans son Voyage en Grèce, le souvenir d'Antonin : d'abord, à l'occasion du sanctuaire d'Esculape à Épidaure, qui avait été enrichi de divers édifices par Antonin, encore simple sénateur ; ensuite, et surtout, à l'occasion de la ville de Pallantium en Arcadie, à laquelle le nom d'Évandre avait valu plusieurs faveurs de la part de notre empereur. À ce propos, il interrompt pendant quelques instants son voyage pour s'arrêter sur la mémoire de cet excellent prince, qui aurait mérité, selon lui, le nom de père du genre humain ; il consacre ainsi tout un chapitre à parler des guerres d'Antonin contre les peuples barbares, de sa générosité inépuisable envers les cités grecques, de ses qualités morales, en particulier de son désintéressement et de sa piété[2]. Pausanias est loin d'être aussi explicite qu'on le souhaiterait ; il passe rapidement sur les relations d'Antonin avec les Grecs et les Barbares, parce que ces relations avaient été exposées dans le plus grand détail par d'autres écrivains ; mais ces indications, pour brèves qu'elles soient, n'en sont pas moins très utiles, à cause de la précision habituelle de l'auteur et de la très courte distance, quelques années à peine, qui sépare la rédaction de son livre du règne d'Antonin[3].

À côté des historiens de profession, il y a les littérateurs proprement dits et les écrivains moralistes, assez nombreux à l'époque automne. Leurs œuvres portent presque toujours le reflet des événements contemporains. Ainsi Fronton, Mare-Aurèle, Aulu-Gelle, Apulée, Aristide, Lucien feront plus pour la connaissance de la vie morale, de la physionomie véritable de cette période, et même de quelques faits matériels, que les indications de l'Histoire auguste, dénuées de vie et de couleur.

Fronton était un grand personnage, contemporain et ami de trois empereurs, Hadrien, Antonin, Marc-Aurèle. Il fut en vue surtout sous le règne d'Antonin : la faveur impériale avait fait alors de lui comme un précepteur du dauphin en lui confiant l'éducation de Marc-Aurèle ; elle l'avait appelé en 113 à l'honneur suprême du consulat. Dans cette haute position il avait eu souvent à prendre la parole, soit dans des fêtes solennelles pour prononcer l'éloge d'Antonin, soit dans des affaires débattues au Sénat pour plaider la cause des Bithyniens, des habitants de Ptolémaïs, ou de tout autre peuple qui avait recours à son talent d'avocat et à son influence auprès du prince[4]. Comme Fronton était, si l'on peut dire, la rhétorique faite homme, il est certain que la déclamation avait la première place dans ces discours d'apparat ou dans ces plaidoyers d'affaires ; n'aurait-on pu cependant découvrir encore, sous les flots de ces images si chères à Fronton, quelques traits du caractère impérial ou quelques détails de la vie provinciale ? Hélas ! tous ces discours sont perdus, ou réduits à des fragments à peu près insignifiants. L'on a heureusement autre chose de Fronton, sa correspondance. Fronton écrivait beaucoup ; il eut pour correspondants, sans parler d'un grand nombre d'amis aujourd'hui obscurs, l'empereur Antonin, Marc-Aurèle, son élève, et L. Verus, dont il dirigea aussi les éludes. Cette correspondance entre gens si haut placés dans l'Empire n'est pas, comme on pourrait s'y attendre, une correspondance politique ; les affaires du gouvernement n'y jouent à peu près aucun rôle. Cependant elle est loin de manquer d'intérêt historique, au moins pour l'histoire des mœurs et des idées. Dans cet échange de lettres, Antonin figure pour une lettre et un court billet[5]. C'est bien peu sans doute ; mais comment ne pas bénir le hasard qui a conservé intacte la pensée même du prince dans une question toute morale, ses relations avec sa femme Faustine ? La façon si affectueuse, si aimante, si tendre dont Antonin parle de sa femme à Fronton, dans une lettre intime qui ne vise ni la foule ni la postérité, est à l'avance une réponse victorieuse aux propos que la malignité devait colporter un jour sur l'impératrice. On apprend encore par cette correspondance quelle idée, vraiment digne d'un stoïcien, l'empereur se faisait du pouvoir suprême, lui qui se comparait à un soldat placé en faction. Quant aux lettres mêmes de Fronton, celles surtout, de beaucoup les plus nombreuses, qui sont adressées à Marc-Aurèle, elles sont trop souvent d'une lecture fatigante à cause de leur éternelle affectation ; le naturel et la simplicité sont choses inconnues à Fronton. Il faut en prendre son parti ; il faut se résigner aussi à l'entendre gémir sur ses malheureux rhumatismes, sur ses névralgies, sur sa goutte, matière inépuisable d'explications et de doléances. Une fois que l'on est fait aux travers du personnage, on reconnaît bien vite la valeur de sa correspondance pour la connaissance de la physionomie intellectuelle et morale de son époque ; en outre, ou se prend aisément de sympathie pour cet homme honnête, désintéressé, serviable, et pour ses illustres correspondants, à l'amitié si familière et si sûre.

Marc-Aurèle a ouvert ses Pensées par une sorte d'examen de conscience, dans lequel il passe en revue ce qu'il doit pour la formation de son âme et de son esprit à ses parents, à ses maitres, à ses amis. Sans doute, sous la double influence de la bonté de l'empereur philosophe et, il faut bien le reconnaître, de son orgueil stoïcien, cet examen tourne au panégyrique de tous ceux qu'il a approchés et de lui-même ; mais on peut admettre qu'une âme élevée et reconnaissante comme la sienne ait été disposée à voir tout en bien autour d'elle, sans récuser pour cela l'autorité d'un témoin dont la sincérité est à l'abri de tout soupçon. Marc-Aurèle a vécu durant vingt-trois ans, à un Age où l'on sait voir et juger, dans une intimité étroite et continue avec Antonin, côte à côte avec lui, si l'on peut dire, ne l'ayant presque jamais quitté, ni à Rome, ni à la campagne, ni dans ses voyages. Il a donc le droit, mieux que personne, de rendre témoignage pour notre empereur. Il a tracé deux grands portraits d'Antonin ; le plus remarquable figure dans cet examen de conscience dont on vient de parler. Antonin y est dépeint d'une manière vivante, avec ses qualités d'empereur, avec ses vertus d'homme, dans toute l'intimité et la simplicité de sa vie. Marc-Aurèle s'arrête encore à un autre endroit sur la douce figure de son père adoptif pour en tracer une nouvelle esquisse. Ce que l'on a de plus précis sur le caractère et sur les mœurs d'Antonin, ce sont sans contredit ces pages des Pensées[6].

Un autre écrivain de l'époque a laissé tin portrait d'Antonin et un tableau de l'Empire pendant son règne : c'est le rhéteur Aristide. Il avait à cette époque dans le monde grec la célébrité de Fronton dans le monde latin et il n'est pas sans quelque ressemblance avec lui pour son affectation, pour sa facilité malheureuse et pour l'état pitoyable de sa santé. C'est ici qu'il conviendrait de faire des réserves : Grec, rhéteur, panégyriste officiel, le témoignage d'Aristide doit être sujet à examen. S'il était unique, il ne mériterait qu'une confiance bien limitée. Heureusement pour la mémoire d'Aristide, d'autres que lui ont parlé d'Antonin, qui l'ont fait sans exagération ni flatterie ; ce qu'ils disent ne diffère pas sensiblement de ce que Aristide dit lui-même. Sa phraséologie verbeuse et emphatique cache plus de faits et plus de vérité qu'on n'aurait pu le croire a première vue. Parmi les nombreux morceaux d'apparat dus à la plume du rhéteur grec, deux ont une importance particulière pour l'histoire de notre époque. L'un est le discours qui a pour titre Au Roi ; ce roi n'est autre que l'empereur Antonin, dont Aristide prononce l'éloge dans une fête solennelle, probablement lors du rétablissement de la paix entre Rome et le roi des Parthes, Vologèse, en 155. L'autre est l'Éloge de Rome ; il a été prononcé à Rome même, en 145 ; l'orgueil national dut être singulièrement flatté de voir avec quelle admiration Aristide venait rendre hommage à la majesté de la paix romaine et à la grandeur de la capitale impériale. Il y aura beaucoup à prendre, a peu près tout, dans ces deux morceaux ; beaucoup aussi à glaner dans le reste des écrits d'Aristide. Il suffit, pour s'en convaincre, de se rappeler que son titre de sophiste fait de lui un grand personnage, qu'il est mêlé intimement à toute l'histoire de son temps, en particulier que rien ne se passe dans le inonde grec, sans qu'il n'y joue son rôle. Enfin, quel témoignage plus curieux pour l'histoire morale d'une époque pourrait-on souhaiter que cette singulière autobiographie des Discours sacrés, dans laquelle notre rhéteur trace au jour le jour, dans les moindres détails, l'état de son corps malade et de son âme plus malade encore[7] ?

Les autres écrivains de l'époque antonine Aulu-Gelle, Apulée, Lucien servent à la connaissance avant tout de l'état intellectuel et moral de leurs contemporains. Aulu-Gelle reste indifférent aux événements historiques au milieu desquels il vit, jeune homme sous le règne d'Antonin, homme fait sous le règne de Marc-Aurèle[8] ; l'excellent rhéteur est trop occupé par ses lectures, par ses futilités grammaticales et par ses discussions d'école. Évidemment, les causeries sur les événements du jour n'avaient pas droit de cité dans ce cénacle de littérateurs pédants et beaux-esprits, au milieu duquel l'auteur des Nuits attiques introduit ses lecteurs. C'est à peine si dans ces pages bourrées de notes et de minuties sur l'histoire littéraire le nom de l'empereur apparaît de loin en loin, à propos de la foule qui se pressait aux portes du palais à l'heure des réceptions. Mais, en se bornant a demandera Aulu-Gelle ce qu'il peut donner, on trouvera encore à cueillir dans son livre une ample moisson de renseignements ; il n'y a pas d'ouvrage qui puisse davantage être mis a contribution pour tout ce qui touche aux lettres et aux lettrés à l'époque d'Antonin. Quant aux écrits d'Apulée et de Lucien, on sait tout ce qu'ils peuvent fournir de traits à la peinture des mœurs. L'Apologie qu'Apulée prononça devant le proconsul d'Afrique vers le milieu du règne d'Antonin, les œuvres de jeunesse de Lucien rendent, d'une manière saisissante, tout un côté de la physionomie morale de cette époque. C'est grâce à ces pages que l'on pénètre le plus profondément dans la société antique au milieu du second siècle[9].

Les divers documents dont il a été question jusqu'ici peuvent être plus ou moins sujets à caution et demandent parfois a être interprétés avec une certaine réserve. Ceux dont on va parler ne peuvent être suspectés dans leur bonne foi, car on ne saurait les considérer autrement que connue des pièces d'archives authentiques. Sous ce nom de pièces d'archives, nous réunissons les fragments juridiques, les médailles et les inscriptions du règne d'Antonin.

On aura l'occasion de voir combien a été grande l'activité législative de notre empereur. Ce qui mieux que tout en rend témoignage, c'est la fréquence de son nom dans le Digeste et dans le Code. Il n'est à peu près pas un livre du Digeste qui ne renferme une constitution émanée d'Antonin, qu'il s'agisse d'un édit sur une question de droit, d'une instruction adressée à un fonctionnaire provincial sur les affaires de son ressort, d'une réponse à la requête d'un particulier, ou encore d'un jugement rendu par l'empereur en sa qualité déjuge suprême. Ce serait une erreur de croire que toutes ces dispositions se rapportent seulement au droit privé ; dans ce cas, elles ne présenteraient qu'un intérêt tout spécial. Il y en a un grand nombre qui ont un caractère purement politique et qui par là appartiennent à l'histoire générale. Quant à la valeur même de ces documents, il est inutile d'y insister ; on voit trop tout coque peuvent donner pour l'histoire de l'administration ou pour l'histoire des mœurs, dont le droit est toujours la fidèle image, ces pièces officielles de la chancellerie impériale, discutées dans le Conseil du prince, revêtues de sa signature, et dont il a inspiré l'esprit, sinon les termes eux-mêmes.

Il y aurait delà banalité à rappeler les services que l'épigraphie et la numismatique ont rendus à la connaissance de l'antiquité romaine. S'il est vrai que les médailles et les inscriptions ont le défaut de ne fournir souvent que des données incomplètes, il n'est pas moins vrai que ces données sont authentiques et qu'elles ont bien souvent jeté la clarté sur des questions obscures. Les monuments épigraphiques ou numismatiques ne sont certes pas la science ; mais ce sont les instruments de la science, instruments bien précieux aujourd'hui où une critique sévère a déjoué les efforts des faussaires et où un classement méthodique a permis de tirer parti île ces richesses trop longtemps méconnues, On possède plus de treize cents types monétaires à l'effigie d'Antonin ou des membres de sa famille ; les inscriptions qui se rapportent a ce règne atteignent huit cents numéros environ. C'est dire que les uns et les autres abondent, en particulier, le nombre et l'intérêt des inscriptions sont tels qu'il semble que chacun ait prévu le naufrage qui devait engloutir les livres écrits à celle époque, et se soit empressé de faire graver sur le marbre ou sur le bronze ses titres à l'attention de la postérité[10]. Il n'est pas une province, pas une ville un peu importante qui ne fournisse son contingent au recueil épigraphique du règne d'Antonin ; l'empereur aurait pu recevoir le même surnom que Trajan, la pariétaire, à cause de la fréquence de son nom sur les monuments. Combien nos sources d'investigation seraient appauvries, si l'on n'avait pas sous la main ces textes de pierre ou de métal[11] !

Voilà, d'une façon générale, ce que l'âge même d'Antonin a laissé pour la connaissance de sa propre histoire ; voyons à présent ce que les générations suivantes ont laissé pour ce sujet.

À l'époque où régnait Dioclétien, on conservait encore toute une série de poèmes qui remontaient à la jeunesse d'un de ses malheureux prédécesseurs, Gordien le père. L'Histoire auguste rapporte que Gordien avait écrit, étant encore jeune homme, un grand nombre de vers. Parmi ses productions poétiques figurait un poème épique en trente livres, intitulé l'Antoniniade : c'était l'épopée des Antonins. L'Enéide de Virgile, l'Achilléide de Stace lui avaient donné l'idée d'écrire un poème de longue haleine ; mais, au lieu d'aller chercher ses héros dans la légende des temps mythologiques, il avait pris deux souverains, qui personnifiaient pour lui l'idée la plus haute et la plus pure de la royauté, Antonin le Pieux et Mare-Aurèle. Gordien était né en 158, trop tard pour avoir pu connaître Antonin, mais assez tôt pour en avoir entendu parler par ceux qui avaient vécu sous ce règne ; lui-même avait grandi pendant le règne de Marc-Aurèle. Il avait pu ainsi consacrer trente chants d'une poésie pleine d'élégance, — le mot est de Capitolin, — à raconter dans le détail la vie, les guerres et tous les actes publics ou privés des deux Antonins[12]. Cette singulière épopée ne pouvait être qu'une couvre de rhétorique, rappelons-nous l'âge du poète et la longueur du poème : cependant la perte en inspirera de vifs regrets, car l'histoire aurait eu à glaner plus d'un détail dans cette poésie si abondante.

On peut diviser en deux groupes principaux les ouvrages historiques composés sur Antonin à partir du troisième siècle : tous ceux qui ont quelque importance procèdent soit de Dion Cassius, soit de Marius Maximus.

Rappeler les mérites historiques de Dion Cassius, rappeler qu'il a passé dix années à réunir les éléments de son livre, qu'il en a mis douze à le rédiger, que son témoignage a presque toujours la plus haute valeur, rappeler tout cela ne servirait qu'à augmenter nos regrets, car la fatalité a voulu que la partie de son histoire qui se rapporte à l'Empire n'ait été conservée que par un résumé, et que dans ce résumé même les chapitres relatifs à Antonin n'aient point été rédigés d'après le texte de Dion. Au onzième siècle, un écrivain byzantin, Jean Xiphilin, a composé un abrégé du grand ouvrage de Dion à partir de l'époque de Pompée. Xiphilin raconte avec quelques détails, dans les derniers chapitres du règne d'Hadrien, de quelle manière cet empereur fit choix d'Antonin pour lui succéder[13] ; mais, quand il arrive au règne même d'Antonin, il déclare qu'il a dit recourir pour ce règne a d'autres auteurs, dont il ne donne pas d'ailleurs les noms. Il faut savoir, dit-il, que l'histoire d'Antonin le Pieux ne se trouve pas dans les exemplaires de Dion ; il est vraisemblable qu'une partie de l'ouvrage s'est perdue. Aussi l'histoire presque entière d'Antonin demeure inconnue, sauf quelques détails... qui ont été conservés dans le texte de Dion — Antonin fait décerner à Hadrien les honneurs de l'apothéose, malgré la résistance du Sénat ; Antonin est surnommé le Pieux, et pourquoi —. Je parlerai donc brièvement de cette époque d'après d'autres ouvrages, et je reviendrai ensuite au texte de Dion[14]. Ces autres ouvrages ont seulement fourni à Xiphilin quelques lignes très brèves sur les qualités politiques et privées d'Antonin, sur ses rapports avec le christianisme, sur la sérénité de ses derniers moments, sur les tremblements de terre qui désolèrent alors les villes de l'Asie. Voilà ce que j'ai trouvé à dire de l'histoire d'Antonin[15].

Ce résumé si médiocre a eu l'honneur d'être reproduit à peu près textuellement, quelques années plus tard, par un autre écrivain byzantin, auteur d'un Abrégé de l'histoire universelle, Zonaras. Ce compilateur met surtout à profit pour son Abrégé le texte de Dion Cassius ; mais, quand il a fallu combler la lacune de son auteur entre les années 138 et 161, il n'a trouvé rien de mieux que de recourir à Xiphilin. Il répète, à peu de chose près, ce que celui-ci avait dit ; il se contente d'ajouter quelques détails sur la législation d'Antonin et sur la situation de l'Église chrétienne à son époque[16]. En somme, les documents qui appartiennent à cette première catégorie se réduisent à peu de chose : le texte de Dion Cassius s'était perdu de très bonne heure et ses abréviateurs n'y ont suppléé que d'une façon bien incomplète et bien insuffisante.

Les documents de la seconde catégorie émanent surtout de Marius Maximus. L'œuvre historique de Marius Maximus n'est connue que par les historiens postérieurs qui l'ont utilisée ; mais, comme elle est la source principale où puisèrent les écrivains de l'Histoire auguste, il importe de l'étudier rapidement elle-même. Marius Maximus a eu une haute situation dans l'Empire ; deux fois consul, préfet de la Ville à l'époque de Macrin en 217[17], il était à même d'être renseigné sur les hommes et sur les événements. Son ambition fut de continuer Suétone, tant dans son sujet que dans sa manière. Suétone avait fini avec Domitien ; Marius reprend avec Nerva et, comme son modèle, il écrit la vie de douze césars jusqu'à Élagabal. Comme son modèle encore, il laisse de côté les grands événements politiques, la situation des esprits, tout ce qui constitue l'âme et la vie d'une époque, pour recueillir les anecdotes, les menus faits, lés petits détails personnels au souverain. Même comprises de cette manière, ces biographies des Antonins seraient encore d'inestimables autorités. Marius Maximus aimait le détail précis et caractéristique qui révèle l'homme ; il s'entendait aux recherches généalogiques, à toutes ces particularités qui ne sont, dira-t-on, que la menue monnaie de l'histoire, mais monnaie bien précieuse quand l'autre fait défaut, il n'était pas éloigné des empereurs dont il racontait la vie ; contemporain des derniers, il avait connu dans sa jeunesse des romains qui avaient vécu sous Hadrien et sous Antonin. Malheureusement, on ne peut plus apercevoir ses biographies qu'à travers le miroir infidèle de l'Histoire auguste. Les annalistes du troisième siècle ont taillé presque au hasard dans ces vies impériales, découpant par ici, recousant par là, le tout avec une négligence et un manque d'art qui fait peu d'honneur à leur titre d'historiographes officiels. Le nom de Marius Maximus figure une seule fois dans la Vie d'Antonin, à propos d'un détail secondaire, dans lequel cependant on peut voir le soin que mettait Marius à s'enquérir des moindres choses[18]. Il y a encore bien d'autres passages où on l'a mis à profit, sans prendre la peiné de le citer, L'estime qu'il faut faire, malgré tout, de l'œuvre de Marius Maximus doit inspirer de la confiance en ceux qui l'ont suivie, alors même qu'ils l'ont fait avec maladresse et sans critique.

La Vie d'Antonin le Pieux occupé le troisième rang par ordre chronologique dans la collection des biographies impériales qui va d'Hadrien à Numérien, et que l'on appelle l'Histoire auguste. Cette vie aurait pour auteur, d'après les indications des manuscrits, Jules Capitolin, qui écrivit sous Constantin : cette attribution parait abandonnée à présent : l'on incline à croire que c'est Ælius Spartien qui aurait composé cette biographie, comme il a composé celle d'Hadrien[19]. La date en serait donc avancée de quelques années, puisque les biographies de Spartien se placent à l'époque de Dioclétien. D'ailleurs, la question est secondaire ; le changement de nom ne fera rien à la valeur de ce texte, et c'est de cette valeur seule qu'il importe de se rendre compte.

Nous voilà eu présence d'un document sur Antonin, qui est le plus important de tous par l'étendue et le seul que l'on possède dans son intégrité. Tout a été dit sur la manière sèche, froide, confuse, qui est le caractère de toutes ces biographies ; œuvres de seconde main, compilées de droite et de gauche, elles n'ont ni critique, ni méthode, ni style. Celle d'Antonin n'échappe pas aux reproches que l'on adresse à l'ensemble du recueil. Que dire du style, de ces phrases si brèves, composées avec quelques mots à peine, coulées dans un moule uniforme, chacune exprimant un acte différent de la vie de l'empereur ? Ces treize paragraphes si maigres, si courts, si secs, sont pour la forme d'une désespérante monotonie. Que dire de cette confusion qui réunit des choses sans rapports entre elles et qui disperse aux quatre coins de la biographie des choses identiques ? De même que les autres auteurs du recueil. Spartien était en mesure d'être renseigné mieux que personne ; historiographe officiel, rien ne lui eût été plus aisé que de prendre connaissance des documents des archives impériales ; mais il aurait fallu qu'il eût songé à faire œuvre personnelle. Or, puisque Marius Maximus avait déjà écrit les vies des empereurs du deuxième siècle, le mieux était d'abréger son œuvre ; on y ajouterait quelques détails pris autre part, et une compilation de ce genre ne serait pas indigne de la dédicace impériale. Ainsi fut faite la biographie d'Antonin. Ici, c'est évidemment Marius Maximus qui eu a fait à peu près tous les frais. Ce qui le prouve, c'est moins l'usage qui y est fait de son nom, — on a vu qu'il n'était cité qu'une fois, — que la disposition même du récit. Les biographies, composées d'après cet auteur, sont toujours découpées sur un plan uniforme ; en tête, une longue et confuse énumération des ascendants et des collatéraux qui tient lieu de tableau généalogique ; ensuite, des détails sur l'enfance de l'empereur, quelques lignes sur son caractère, l'énumération des présages qui lui réservaient le souverain pouvoir, un court exposé de sa carrière avant l'Empire. Telle est, en effet, la matière des trois premiers paragraphes de cette Vie. Plus loin, ce serait peine perdue que de vouloir indiquer un ordre. Quoi qu'il en soit, c'est sans contredit à Marius Maximus que revient la première place dans la biographie d'Antonin[20]. Aussi, malgré bien des omissions et des confusions, malgré l'absence à peu près complète de chronologie, cette biographie si décriée rend beaucoup plus de services qu'on ne serait porté à le supposer. Presque tous les faits qu'elle mentionne peuvent être contrôlés par un autre texte, par un monument épigraphique ou numismatique, et presque jamais ce contrôle n'est défavorable au biographe. C'est à peine si l'on relève une seule erreur au milieu de toutes ces indications que la brièveté même delà forme rend très nombreuses, erreur chronologique qui porte sur l'âge d'Antonin, et qu'il est aisé de corriger[21]. Ce document est celui qui sera de beaucoup le plus souvent cité au cours de cette élude ; il importe de savoir qu'il mérite à peu près toujours, en dépit des apparences, qu'on ait foi en lui.

Le destin des livres a détruit dans l'œuvre d'un véritable historien, Ammien Marcellin, toute la partie qui allait depuis Nerva jusqu'au milieu du quatrième- siècle[22] : mais il a respecté les abrégés informes d'Eutrope et d'Aurélius Victor. L'Abrégé de l'histoire romaine, que l'empereur Valens avait demandé à Eutrope, parut vers l'année 369. Vingt lignes au plus se rapportent à Antonin, et presque toutes sont empruntées à l'Histoire auguste. Quelques traits à peine appartiennent à Eutrope, sans qu'on sache où il les a pris[23]. Sous le nom de Sextus Aurelius Victor, on a deux recueils qui ne sont peut-être pas de lui, les Césars et l'Épitomé. Le premier renferme une douzaine de lignes presque insignifiantes sur Antonin. Le second est beaucoup plus développé, malgré son nom d'Abrégé ; mais il ne contient presque rien que l'on n'ait déjà vu dans l'Histoire auguste, sauf la mention d'une ambassade d'Indiens et d'autres peuples de l'Asie centrale, venue auprès d'Antonin.

D'autres auteurs peuvent encore être consultés : Julien, qui dans le Banquet des césars décoche à Antonin quelques traits satiriques ; le recueil appelé le Chronographe de l'année 351, précieux surtout pour la chronologie consulaire et pour quelques événements de l'histoire locale à Rome ; la Chronographie de Jean Malalas qui, en sa qualité d'oriental[24], a pu se procurer sur l'histoire de l'Orient quelques renseignements spéciaux ; enfin, les annales fi nombreuses des auteurs chrétiens, parmi lesquelles la place d'honneur revient à la Chronique de saint Jérôme[25].

 

§ II. — Les travaux modernes.

 

Si on laisse de côté, parmi les travaux modernes, ceux qui traitent l'histoire impériale dans son ensemble, depuis l'Histoire des empereurs de Tillemont, dont on ne louera jamais assez la patience de génie[26], jusqu'aux grands ouvrages qui ont paru de nos jours[27], l'histoire magistrale de V. Duruy et la synthèse puissante de Ranke[28], le compte sera vite fait des études spéciales qui se rapportent à Antonin le Pieux et à son temps. Encore toutes ne peuvent-elles prétendre à être des œuvres d'histoire, dignes de ce nom.

Le Hollandais H. Keuchen, jurisconsulte et professeur d'histoire, a fait paraître au XVIIe siècle des développements politiques sur la vie d'Antonin, qui ne sont qu'une amplification de rhétorique ; son but est de tracer, d'après ce que les historiens anciens ont laissé sur notre empereur, l'idéal du bon prince. L'ouvrage débute par un résumé de l'Histoire auguste ; puis chaque phrase de ce résumé sert de texte a un développement, on pourrait dire parfois à un sermon, tissu de phrases creuses et déclamatoires, où l'histoire n'a rien à faire[29].

Un siècle plus tard, on trouve une étude plus sérieuse : l'auteur, M. de Sibert, membre de l'Académie des Inscriptions, avait mis à profit les travaux de Tillemont. Son histoire d'Antonin est surtout un abrégé d'une portion de l'Histoire des empereurs, écrit d'un style moins concis et moins sévère[30]. D'ailleurs, de Sibert semble avoir voulu faire avant tout une œuvre d'édification ; il le déclare lui-même presque en propres termes dans sa dédicace au dauphin, le futur Louis XVI, et dans son avis au lecteur. J'ose me persuader, dit-il, que les gens de bien me sauront gré de l'excellence de mon choix et du motif qui m'a déterminé, qui est de faire germer les vertus dans les âmes nobles [31].

En 1820, un ancien membre de l'Institut d'Egypte a publié un ouvrage très étendu sur Mare-Aurèle[32]. Il suit la vie de l'empereur philosophe à partir de sa naissance ; il trouve ainsi l'occasion de parler avec quelques détails du règne d'Antonin, d'abord dans l'histoire même de la vie de Marc-Aurèle, puis dans deux appendices. L'un de ces appendices est un tableau chronologique du règne de notre empereur, avec la mention des principaux faits de l'histoire politique ou littéraire de 138 à 161 ; l'autre est une explication, d'ailleurs très aventureuse, des principaux types monétaires qui furent frappés durant cette période[33]. L'ouvrage est écrit sous une forme déclamatoire ; l'apostrophe y abonde. Cependant c'est un travail plein de conscience, dont quelques parties peuvent avoir encore delà valeur. En ce qui concerne Antonin même, il suffit de l'avoir signalé : l'histoire de ce prince n'était pas le sujet de l'auteur, il ne s'en est occupé qu'en passant.

Un article approfondi a été consacré à l'empereur Antonin le Pieux par N. des Vergers dans la Nouvelle biographie générale[34]. Cet article est autre chose qu'une notice de dictionnaire. N. des Vergers, à qui les études sur l'antiquité romaine étaient familières, avait fait des recherches personnelles, pour pouvoir fixer avec précision l'histoire d'Antonin. Il avait mis à profil, outre les textes, presque toutes les inscriptions que l'on connaissait alors ; il en avait en outre signalé un grand nombre ; il avait discuté plusieurs points de détail. Aussi peut-on dire que cet article, malgré ses proportions forcément restreintes, avait fait faire un pas à l'histoire impériale de Rome.

L'Allemagne a donné sur notre sujet quelques dissertations érudites, mais en petit nombre et d'importance médiocre. Les principales sont les études de Sievers, qu'il a réunies sous ce titre Antonin le Pieux[35]. Ces études, d'ailleurs très courtes, portent sur quelques points seulement de l'histoire d'Antonin. Elles ont été faites avec soin ; mais elles ont déjà beaucoup vieilli, et elles ne peuvent plus offrir, dans l'état actuel de la science, qu'une utilité secondaire. On peut citer aussi les petites dissertations de Bossart et Müller[36].

 

Deux conséquences peuvent se tirer de cette étude préliminaire : l'une, qu'il reste encore un assez grand nombre de documents de l'antiquité, malgré les pertes considérables et 1res sensibles qui ont été faites, pour qu'il soit possible de reconstruire avec tous ces matériaux l'histoire d'Antonin ; l'autre, que le nombre ou l'importance des études spéciales, consacrées déjà à ce sujet, n'est pas de nature à rendre ce travail inutile. H est donc encore permis de présenter un tableau d'ensemble delà vie d'Antonin le Pieux, de son règne et de la société antique à son époque : il est au moins permis d'essayer de le faire.

 

 

 



[1] Voyez par ex. de Champagny, Les Antonins, liv. IV, ch. 1.

[2] II, 27 ; VIII, 43.

[3] La Περιγησις τής Έλλάδος a dû être commencée avant 162 et terminée après 174 ; voyez Nicolai, II, p. 594.

[4] Voyez les titres de ces discours dans l'édition de Naber, pp. XXXI-XXXII.

[5] Fronton : ad Antoninum Pium, II et VI.

[6] I, 16 ; VI, 30. Il y a encore quelques mots sur Antonin dans un autre passage, I, 17.

[7] La chronologie des œuvres d'Aristide a été fixée par W. H. Waddington, Mémoire sur la chronologie de la vie du rhéteur Ælius Aristide, Paris, 1867 (Mém. de l'Académie des Inscriptions, XXVI). Ce beau travail a rendu a peu près inutiles les études antérieures sur Aristide, celle de Masson, reproduite en tête de l'édition Dindorf, et celle de A. G. Dareste, Quam utilitatem conferat ad historiam sui temporis illustrandam rhetor Aristides, Paris, 1843.

[8] Sur la chronologie d'Aulu-Gelle, voyez L. Friedlænder, III, pp. 470-476.

[9] Pour la chronologie d'Apulée, voyez Teuffel, § 366, 2 ; pour celle de Lucien, M. Croiset, Essai sur la vie et les œuvres de Lucien, Paris, 1882, 8°, chap. I et II.

[10] Borghesi cité par N. des Vergers, Essai sur Marc-Aurèle, Paris, 1860, p. XXIX.

[11] Nous avons renoncé à publier en appendice le corpus épigraphique du règne d'Antonin. Ce volume en aurait été considérablement grossi, et cela sans grand profit, puisque ces inscriptions sont extraites en grande majorité des Corpus inscriptionum de l'Académie de Berlin, ou d'autres grandes collections qu'il est facile de consulter.

[12] Capitolin, Gordiani tres, 3.

[13] LXIX, 20-21.

[14] LXX, 1-2.

[15] LXX, 4. Le seul écrivain que Xiphilin ait mentionné, parmi ceux qui lui ont servi à suppléer à la lacune du texte de Dion Cassius, est Asinius Quadratus. Cet historien doit avoir vécu entre Marc-Aurèle et Alexandre Sévère ; voyez Müller, Fragmenta historic. græcor. (Didot), t. III, p. 659 sqq. Xiphilin aurait emprunté sa citation à l'Histoire de mille ans (Χιλιετηρίς).

[16] C'est par erreur que Zonaras attribue à Antonin la vente au Forum du mobilier impérial pour subvenir aux frais d'une guerre ; ce fait appartient à l'histoire de Marc-Aurèle.

[17] La biographie de Marius Maximus a été très débattue ; voyez dans Teuffel, § 381, 5-6, ou dans Arn. Schaefer, Abrisz der Quellenkunde der... römischen Geschichte, 2e partie, Leipzig, 1881, § 76, l'indication des principales références.

[18] Pius, 11, 3. Il s'agit de l'attribution à Antonin de certains discours qui couraient sous son nom.

[19] Teuffel, § 392, 4.

[20] Voyez J. Mueller, Der Geschichtsschreiber Marius Maximus, dans le recueil de Büdinger, Untersuchungen zur röm. Kaisergesch., Leipzig, III, 1870 ; Rübel, De fontibus quatuor priorum hist. aug. scriptorum, Bonn, 1872 ; Dreinhoefer, De fontibus et auctoribus veterum quæ ferunbur Spartiani, Capitolini... Halle ; Plew, Marius Maximus als directe und indirecte Quelle der scriptors hist. aug., Strasbourg, 1878.

[21] Pius, 12, 4. Antonin avait 74 ans et non 70 au moment de sa mort.

[22] Le nom d'Antonin figure dans deux passants d'Ammien, comme type de clémence et de sérénité : XVI, 1, 4 ; XXX, 8, 12.

[23] VIII, 8. Ce passage d'Eutrope a été traduit à peu près littéralement au VIIe siècle par le moine byzantin Jean d'Antioche, dans sa chronique ; voyez Müller, Fragmenta historic. græc. (Didot). IV. p. 581, fragm. 113.

[24] Il est né à Antioche ; VIe siècle.

[25] Il faut faire une place à part dans les écrivains ecclésiastiques à saint Justin, qui vécut à l'époque d'Antonin. Ses écrits, si importants pour l'histoire du christianisme, fournissent aussi quelques traits à l'histoire profane.

[26] L'histoire de l'empereur Tite Antonin occupe quinze articles, plus onze notes du t. II (1691). Les articles, on le sait, sont faits par la réunion et l'interprétation des textes classiques, et ont conservé aujourd'hui encore une grande partie de leur valeur. Quant aux notés, elles roulent presque uniquement sur des questions de chronologie, que Tillemont essaie de résoudre à l'aide d'inscriptions et de médailles ; mais les documents dont il se sert n'avaient pas encore été l'objet d'une critique sérieuse ; aussi ses notes sont à peu près sans importance.

[27] Th. Mommsen a publié en 1885 le 5e vol. de sa Römische Geschichte (une traduction française par Cagnat et Toutain est en cours) ; il renferme l'histoire de l'Empire sur un plan nouveau : l'histoire des provinces de César à Dioclétien.

[28] V. Duruy : Histoire des Romains, édit. illustrée, V (1883), Hadrien, Antonin, Marc-Aurèle et la société romaine dans le Haut-Empire. — L. von Ranke : Weltgeschichte, 3e partie, Das altrömische Kaiserthum, Leipzig, 1883. — On doit citer encore Hermann Schiller : Geschichte der römischen Kaiserzeit (2e partie du 1er vol.), Gotha, 1883.

La période des Antonins a été étudiée dans son ensemble, pendant tout le second siècle, par Hegewisch : Essai sur l'époque de l'histoire romaine la plus heureuse pour le genre humain, traduit de l'allemand par Solvel, Paris, 1834, in-8° ; — de Champagny : Les Antonins, Paris, 1863, 3 vol. in-8° ; traduit en allemand par Doehler, Halle, 1876 et années suivantes ; — W. Capes : The roman empire of the second century or the age of the Antonines, Londres, 1880, 2e édit. (Nous n'avons pas eu cet ouvrage entre les mains.) Dans le t. VI des Origines du christianisme de E. Renan, L'Église chrétienne, Paris, 1879, il est question d'Antonin le Pieux.

[29] Roberti Keuchenii, j. e. et historie professoris, Antoninus Pius, sive in vitam Antonini Pii loni principii excursus politici, Amsterdam, 1667. in-16, 291 pp. À la fin du volume accedit comparatio cardinalium Richelii et Mazarini.

[30] Gautier de Sibert, de l'Académie royale des Inscriptions et Belles-Lettres, Vies des empereurs Tite-Antonin et Marc-Aurèle, Paris, 1769, in-12, XXVIII-448 pp. La vie d'Antonin occupe les pp. 1-118.

[31] Nous ne connaissons que par le titre un ouvrage hollandais sur la comparaison d'Antonin le Vieux et d'Henri IV : Meermann (Johann), Antonious Pius en Heidrik IV mit elkander vergeteken, La Haye, 1807, in-8°. Meermann a dû faire sur ce singulier thème quelques excursus politici à l'exemple de son compatriote Keuchen.

[32] (Ripault L. Madel.) Marc-Aurèle, ou histoire philosophique de l'empereur Marc-Antonin, ouvrage où l'on présente dans leur entier et selon un ordre nouveau les maximes de ce prince... en les rapportant aux actes de sa vie publique et privée, Paris, 1820, 4 vol. in-8°. En 1853, il fit paraître un abrégé de ce grand ouvrage, sous le titre : (Ripault L. M.) Tite Antonin le Pieux ; résumé historique. Marc-Aurèle Antonin, sommaire historique... (Paris), 1823, in-8°.

[33] T. I, liv. II-III ; t. IV, pp. 356-386 ; t. II, pp. 194-550.

[34] Firmin Didot ; t. II, paru en 1859. L'article occupe près de seize colonnes.

[35] G. R. Sievers, Antoninus Pius, Programm der Realschule des Johanneums, 1861 ; réimprimé dans ses Studien zur Geschichte der römischen Kaiser, Berlin, 1870, in-8° (pp. 171-224, huit paragraphes).

[36] X. Bossart et J. Müller, Zur Geschichte des Kaisers Antoninus Pius (I, l'adoption ; II, les noms et les titres ; III, les guerres), dans Büdinger : Untersuchungen zue römischen Kaisergeschichte, Leipzig, in-8°, 2e vol. (1868), pp. 290-320. — D'autres études de détail seront indiquées au courant des questions.