Nous possédons sur les guerres de Clovis contre Gondebaud deux témoignages contemporains l’un de l’autre : celui de Grégoire de Tours (538-594) et celui de Marins d’Avenches (530-594). Les récits des deux chroniqueurs cadrent parfaitement pour le fond ; ils sont d’ailleurs puisés tous les deux à une même source, à savoir des Annales Burgondes rédigées au VIe siècle[1]. La seule différence entre Marius et Grégoire, c’est que ce dernier intercale dans son récit un long épisode inconnu de Marius. Cet épisode, qu’il n’a pas trouvé dans leur source commune, et qui est, de plus, en contradiction avec elle, a un ton épique des plus prononcés, et provient incontestablement d’une tradition populaire. On va en juger. D’après la version commune à Marius et à Grégoire, Clovis marche contre Gondebaud après s’être allié secrètement à Godegisil, frère du roi des Burgondes. Gondebaud est battu à Dijon, et Clovis, satisfait de sa victoire, rentre chez lui. Mais le vaincu, qui s’était réfugié à Avignon, aux extrémités de son royaume, revient après le départ de Clovis, s’empare de Vienne où il fait périr son frère, et se rend maître de tout le royaume de Godegisil[2]. C’est dans le récit de cette campagne, en somme stérile pour Clovis, que Grégoire de Tours intercale l’épisode que voici. Clovis a donné la chasse à Gondebaud jusque sous les murs d’Avignon, où il le tient assiégé. Gondebaud, effrayé, confie ses terreurs à cet ingénieux Aridius, que Grégoire mentionne ici pour la première fois, mais dont la légende conservée par Frédégaire nous a déjà, révélé le rôle remarquable dans l’histoire du mariage de Clotilde. Aridius répond à Gondebaud : Il faut adoucir la férocité de cet homme. Aie seulement soin de bien faire ce qu’il te demandera sur mon conseil. Là-dessus, Aridius vient trouver Clovis, se donne à lui comme une victime de Gondebaud, et lui offre ses services. Clovis les accepte sans défiance, car cet Aridius était un maître homme qui s’entendait à l’art de gagner les cœurs : il était jocundus in fabulis, strinuus in consiliis, justus in judiciis, et in commisso fidelis. Lorsqu’il se fut introduit dans la confiance de Clovis, il lui dit un jour : Pourquoi rester sous les murs de cette ville ? Tu ravages les champs, tu matages- les prés, tu coupes les vignobles et les oliviers, tu détruis toute la contrée, mais tu ne fais aucun mal à ton ennemi. Tu dois plutôt demander à Gondebaud de te payer un tribut annuel : de la sorte, le pays sera épargné, et tu resteras le maître. Clovis fait ce que lui conseille Aridius, et Gondebaud s’engage naturellement à payer le tribut demandé. Alors le roi des Francs s’éloigne, mais Gondebaud ne s’acquitte envers lui que la première année et ne le fait plus par la suite. Clovis était joué. Qui ne voit éclater les traits légendaires dans ce récit, inconnu de Marius ? Toutes les histoires du même genre appartiennent au domaine de la tradition orale, et aucune n’est garantie par une source digne de foi. Nous retrouvons ici les formes familières à l’imagination épique, et l’histoire de la ruse d’Aridius à Avignon sort du même moule que celle du stratagème de Zopyre à Babylone, ou de Sextus Tarquin à Gabies. Personne ne peut songer un seul instant à soutenir l’historicité d’un récit dans lequel on voit un vainqueur se laisser enlever avec tant de bonhomie les fruits de sa victoire, accueillir sans défiance le conseiller intime de son ennemi, prêter l’oreille à ses conseils les plus pernicieux, faire le premier des propositions transactionnelles au vaincu qui est à sa merci, enfin, licencier son armée avant même que l’ennemi ait souscrit aux conditions qui lui ont été posées. L’enfantillage épique est ici au comble[3]. Je rapprocherai volontiers, de cette histoire d’Aridius à Avignon, celle d’Aétius à Mauriac, rapportée par Frédégaire et déjà connue de Grégoire de Tours, qui, fidèle à son attitude de défiance vis à vis des sources populaires, n’en a reproduit que quelques traits. Aétius, selon son récit, doit sa victoire de Mauriac à la ruse, plus encore qu’à la stratégie et au courage. Après trois jours d’un combat sanglant, il va trouver Attila de nuit, lui persuade qu’il aurait bien voulu que le roi des Huns eût enlevé la Gaule aux Visigoths, dais que cela est devenu impossible, puisque les Visigoths vont recevoir un renfort considérable, et que c’est à grand’peine si Attila pourra échapper à leurs coups ! Attila lui donne dix mille sous d’or pour ce charitable avertissement, et afin qu’il l’aide à regagner la Pannonie. De là, le bon apôtre va trouver le roi des Visigoths, et lui apprend que cette nuit même Attila sera renforcé par une nombreuse armée venant de Pannonie ; au surplus, ajoute-t-il, ton frère Théodoric cherche à s’emparer de ton trône et de tes trésors, et si tu ne te hâtes de retourner, tu seras privé de ton royaume. Dix mille autres pièces d’or sont la récompense dont le roi des Goths paie cette preuve d’amitié. C’est ainsi qu’Aétius fait décamper les Goths qui auraient pu lui disputer l’honneur de la victoire, puis il donne la chasse aux Huns qu’il poursuit jusqu’en. Thuringe, faisant la nuit allumer par son armée des feux innombrables pour donner l’illusion d’une armée beaucoup plus forte qu’il n’en avait une. Voilà comment il délivra- la Gaule de ses ennemis[4]. Dans cette histoire si singulièrement défigurée, qui pourrait reconnaître le grandiose et tragique tableau tracé par Cassiodore, et qui nous reparaît avec des traits encore émouvants dans le résumé de Jordanès Qui retrouverait, dans ce nocturne intrigant qui extorque de l’argent à ses amis et à ses ennemis, le grand général dont l’énergie surhumaine est parvenue à armer contre le fléau de Dieu l’occident tout entier ? Il ne faut pas aller bien loin pour trouver l’explication d’un si étrange contraste. Frappé outre mesure par l’adroit conseil qu’Aétius donne à Thorismond après la victoire, l’esprit populaire n’a plus vu autre chose dans toute l’histoire de la bataille de Mauriac, et a tout expliqué par la ruse. Nul ne peut se refuser à méconnaître ici l’influence de l’esprit épique, intervenant pour expliquer le succès remporté par le madré Romain sur le brave barbare[5]. Au lecteur de développer ce parallèle, qui ne manquera pas d’être instructif ; pour moi, je me borne à éclairer par cet exemple le travail que les narrateurs francs ont fait subir à l’histoire de la campagne de Burgondie, et je pense qu`il aidera à reconnaître le vrai caractère de l’épisode d’Avignon. Quel est, au surplus, le héros de notre épisode ? C’est notre vieille connaissance Aridius, c’est-à-dire un personnage que nous ne rencontrons jamais sur le terrain des réalités historiques, mais qui nous a déjà apparu dans les nuages de la fiction. Aridius est l’être le plus épique possible. C’est le vrai type d’un héros de légende. Il est investi d’une pénétration d’esprit incroyable, et d’un ascendant sans limite sur son maître. On se souvient du flair merveilleux qu’il déploya lors du mariage de Clotilde, et du revirement subit que son seul retour détermina dans les dispositions de Gondebaud. Ici, il reste dans la donnée de son rôle poétique : il relève le moral de Gondebaud abattu, il dispose à son gré de la volonté de Clovis lui-même, il fait du vainqueur une dupe, et du vaincu le vainqueur de demain, en un mot, c’est le pendant d’Aurélien. Si les gens de son peuple avaient su peindre, je veux dire si les Burgondes avaient eu, comme les Francs, un chroniqueur ami des légendes, leur historien national eût pu mettre dans la bouche des Francs les paroles que le Liber Historiæ attribue aux seigneurs burgondes parlant d’Aurélien : Vive le roi qui a de tels leudes ! Quelle est l’origine de notre récit ? Est-il né parmi les Burgondes ou parmi les Francs ? A première vue, on serait tenté de lui attribuer sans hésitation une origine burgonde. Il est, en effet, à l’honneur du peuple de Gondebaud ; de plus, le héros principal est Burgonde, et cela explique pourquoi Frédégaire, qui appartient à la même nation, le fait intervenir à deux reprises, alors que Grégoire n’en parle qu’une fois. En outre, la mention des oliviers et des vignobles de la campagne d’Avignon dans le discours d’Aridius à Clovis (si toutefois ce n’est pas une simple amplification de Grégoire de Tours), servirait à confirmer l’hypothèse d’une origine méridionale, il est vrai que, d’autre part, on ne voit pas comment on aurait pu créer de toutes- pièces, dans le pays meure, l’histoire d’une guerre qui n’y serait jamais arrivée, et cette seule objection est assez forte pour faire écarter résolument l’hypothèse. Nous sommes donc obligés d’admettre que l’épisode est né dans un milieu franc. Les Francs étaient habitués à voir leur souverain triompher partout : il était pour eux, comme tout chef aimé d’un peuple militaire, un vainqueur invincible. De fait, cependant, la guerre de Burgondie n’avait pas été un triomphe. Quelle que fût la complaisance de l’imagination poétique, elle ne pouvait faire abstraction des faits qui restaient dans les mémoires, et qui laissaient au retour de Clovis les apparences d’un insuccès. En effet, les Francs étaient rentrés en Gaule sans rapporter aucun fruit de leur victoire de Dijon, et, peu de temps après, leur allié Godegisil avait péri sous les coups de son frère sans qu’ils l’eussent vengé[6]. Il y avait là quelque chose de choquant pour l’amour-propre national : il ne devait guère supporter que Clovis, partout ailleurs glorifié et vainqueur sans contcs6e, se fût contenté des maigres lauriers de sa campagne de Burgondie. La trahison seule pouvait expliquer un, pareil mécompte. Incontestablement, Gondebaud aurait succombé, Avignon aurait été pris, le pays des Burgondes aurait été en grande partie soumis, si, au moment décisif, une trahison n’avait mis obstacle au succès des invincibles armes des Francs. Telle était la donnée que suggérait spontanément le patriotisme, et c’est sur cette base que l’imagination se mit à édifier sa légende[7]. je ne crois donc pas à la réalité du siège d’Avignon. Ignoré de Marius d’Avenches, et en contradiction avec le récit de Grégoire lui-même, il a été imaginé pour mettre dans un plus grand lustre l’expédition de Burgondie, et pour expliquer comment Gondebaud resta en somme impuni. Au surplus 3e n’entends pas nier l’historicité du personnage d’Aridius. Sans doute, son rôle, ici et dans l’épisode du mariage de Clotilde, est très légendaire, mais ce rôle ne se concevrait pas s’il n’était le grossissement épique d’une réalité qui a d’abord frappé l’esprit des masses[8]. Pour quelles raisons et dans quelles circonstances l’imagination épique s’est-elle arrêtée sur lui ? C’est ce que nous ne pouvons pas démêler. Selon toute vraisemblance, c’était un des Romains de l’entourage de Gondebaud. Tous les rois barbares avaient des Romains à leur service dans les postes principaux. A Ravenne, c’était Cassiodore ; à Bordeaux, Léon de Narbonne ; Clovis lui-même avait près de lui un Aurélien et un Paternus, et l’histoire nous fait connaître un Laconius qui, comme Aridius lui-même, jouissait de toute la confiance de Gondebaud[9]. Il faut remarquer, au surplus, que, si le récit qui vient d’être analysé porte le caractère d’une tradition populaire, il a moins que tout autre celui d’un chant épique. On n’y remarque pas, comme dans plusieurs autres, le développement organique d’une donnée selon les lois de la logique populaire, et l’histoire ne semble pas élaborée de manière à présenter l’apparence d’un tout poétique. D’autre part, ses points de contact avec la réalité sont nombreux et évidents, et la partie finale, qui suit immédiatement l’épisode d’Aridius, a une couleur historique sur laquelle il me paraît difficile de se méprendre. Il s’agit du retour offensif de Gondebaud contre son frère et du siège de Vienne. Après cela, dit notre chroniqueur, Gondebaud, ayant repris des forces et dédaignant de payer encore à Clovis le tribut promis, dirigea son armée contre son frère Godegisil, et l’assiégea dans la ville de Vienne. Lorsque les aliments commencèrent à manquer, Godegisil, craignant que la famine ne le gagnât à son tour, fit chasser le petit peuple de la ville. Parmi les expulsés se trouvait l’ouvrier qui avait la garde de l’aqueduc. Indigné d’avoir été chassé avec les autres, il alla, dans sa fureur, trouver Gondebaud, et lui apprit de quelle manière il pouvait pénétrer dans la ville et se venger de son frère. Guidée par cet ouvrier, l’armée de Gondebaud s’engagea dans l’aqueduc, précédée de nombreux agents munis de leviers en fer, car l’ouverture de l’aqueduc au milieu de la ville était fermée par une grosse pierre. Sur les indications du traître, ils parvinrent à l’écarter avec leurs leviers, puis ils pénétrèrent dans la ville, et, pendant que les assiégés tiraient leurs flèches du haut des remparts, ils les surprirent par derrière. Au son de la trompette qui retentit au milieu des rues les assiégeants s’emparent des portes, qui s’ouvrent et leur livrent passage. Pris entre deux armées, et attaqué des deux côtés à la fois, Godegisil s’enfuit dans l’église hérétique, où il périt avec l’évêque arien[10]. Les Francs qui étaient à son service se réfugièrent dans une tour. Gondebaud défendit qu’on fît du tort à aucun d’eux ; mais il les envoya à Toulouse au roi Alaric, après avoir tué les sénateurs burgondes qui avaient tenu le parti de Godegisil. Il remit sous son autorité tout le pays qui s’appelle aujourd’hui la Burgondie. Il donna aux Burgondes des lois plus douces, pour les empêcher d’opprimer les Romains[11]. Je dis que nous sommes ici en présence d’un récit historique qui contient peut-être une erreur ou une inexactitude, mais qui, d’aucune manière, ne peut être considéré comme de provenance populaire. Malgré ce que l’épisode offre de dramatique, rien qui soit plus opposé au ton et aux procédés de la fiction épique. La réalité du siège et de la prise de Vienne nous est garantie par Marius d’Avenches, dont nul ne récusera ici le témoignage[12], et dont le récit s’achemine par les mêmes phases que celui de Grégoire : siège et prise de la ville, mort de Godegisil, punition des sénateurs ses partisans, restauration du pouvoir de Gondebaud sur toute la Burgondie. Grégoire, il est vrai, toujours plus abondant que l’aride Marius, a deux épisodes en plus : celui de l’aqueduc et celui des prisonniers francs ; mais ces deux épisodes, à supposer qu’ils ne fussent pas historiques, n’ont nul besoin d’être expliqués par l’hypothèse d’un chant épique. Qu’on relise l’histoire de la prise de Naples par Bélisaire[13], et l’on saura le rôle que jouaient les aqueducs dans la poliorcétique des anciens. Verra-t-on une trace de l’esprit épique dans ce que Grégoire de Tours raconte des Francs auxiliaires de Godegisil, qui, tombés au pouvoir de Gondebaud, furent par lui protégés et envoyés à Alaric ? Oui, s’il faut en croire Ranke, qui, entraîné par sa manie de trouver Frédégaire supérieur à Grégoire, soutient que ce dernier nous offre un récit altéré dont Frédégaire aurait conservé la forme authentique. Selon lui, la version primitive, c’est le massacre des Francs prisonniers, et c’est l’amour-propre national qui a transformé cette donnée[14]. Je n’en crois rien. A mon sens, si l’esprit épique avait passé par là, il se serait bien gardé de nous raconter que les Francs furent épargnés par un vainqueur généreux ; il nous les aurait montrés illustrant leur mort par une résistance héroïque, et périssant à la fin, comme : Roland, sur les cadavres de tous leurs ennemis. Rien, d’ailleurs, n’est plus conforme à ce que l’on sait du caractère perplexe, prudent, et, en somme, assez humain de Gondebaud, que d’avoir épargné des hommes contre lesquels il n’avait pas de griefs personnels, et dont il fallait se garder d’irriter le souverain. Il est, au contraire, facile de comprendre que Frédégaire, qui ne voyait cette histoire qu’en gros, ait complété son récit au moyen d’une conjecture qui se présentait d’elle-même à son esprit : Gondebaud, dans sa vengeance, immolant à la fois tous ses ennemis. La version de Frédégaire était et devait être la plus vraisemblable pour l’imagination des multitudes, celle de Grégoire l’est certainement plus aux yeux d’un lecteur réfléchi. Que Frédégaire ait d’ailleurs trouvé lui-même, dans la tradition où avait déjà puisé Grégoire de Tours, certains détails négligés par son prédécesseur ; comme le chiffre des Francs qu’il dit être de cinq mille, ou que ce chiffre appartienne à la fiction, il importe peu : ce qui est certain, c’est que l’épisode sur lequel portent ces variantes est historique et non épique, et que toute l’histoire de la guerre de Burgondie se présente à nous comme un récit à peine entamé par l’imagination populaire. L’inexactitude a pu déjà se glisser dans tel ou tel détail, mais l’ensemble garde son allure, et la part de la fiction se réduit au seul épisode d’Aridius. On le voit, le germe poétique n’est arrivé ici qu’à la première phase de son développement, et il est encore loin des caractères qui constituent la chanson épique[15]. |
[1] V. G. Kurth, Les Sources de l’histoire de Clovis dans Grégoire de Tours, p. 397-403, et les auteurs qui y sont cités.
[2] Marius Avent., Chronicon ; Grégoire de Tours, II, 37.
[3] Fauriel semble avoir déjà flairé le caractère fabuleux de l’épisode d’Aridius ; du moins, il trouve que la suite de l’histoire est singulière. (II, p. 44.) Luden, Hist. d’Allem., III, p. 79, Binding, p. 161, Junghans p. 72, Richter, p. 37, Monod, p. 99 et Rajna, p. 86, s’accordent à le regarder comme suspect. Le seul Jahn, II, p. 206 n., prétend sauver l’épisode : selon lui, l’authenticité en serait confirmée d’une manière splendide par une lettre de saint Avitus à Aridius (Epist. III, dans Baluze Miscell.) qui contiendrait une allusion manifeste au rôle que Grégoire attribue a ce : personnage pendant le siège d’Avignon. Hélas ! tout le monde peut se convaincre, en lisant le passage en question, que l’allusion n’existe que dans l’imagination de Jahn.
[4] Frédégaire, II, 53. — Grégoire de Tours, II, 7, rapporte déjà quelques-uns des traits les plus vraisemblables de cette légende ; mais, selon sa méthode ordinaire, il parait avoir laissé de côté ceux qui le choquaient le plus.
[5] Jordanès, c. 41.
[6] Grégoire de Tours, II, 33.
[7] G. Kurth, Les Sources de l’histoire de Clovis dans Grégoire de Tours, p. 430.
[8] Et c’est dans cette mesure que j’accorde à Jahn que le correspondant auquel saint Avitas s’adresse dans une lettre conservée par Baluze (Miscellan., I, p. 338, ep. II et non ep. III sans plus, comme je le lui ai fait dire à tort ci-dessus) est bien notre Aridius. Il en résulte que ce personnage a vécu, mais non que son histoire légendaire est authentique.
[9] Ennodius, Vita s. Epiphanii, p. 374 dans le Corp. Script. eccles. de Vienne, t. VI.
[10] Grégoire de Tours, II, 33.
[11] Godogisilus ad eclesiam hereticorum confugit, ibique cum episcopo arriano interfectus est. Grégoire de Tours, II, 33. C’est sans doute par distraction que Victor Duruy, Hist. de France, I, p. 87, écrit : Le roi des Francs était à peine éloigné, que Gondebaud surprenait (!) son frère dans Vienne et le poignardait dans une église où il s’était réfugié.
[12] Eo anno Gundobagaudus resumptis viribus Viennam cum exercitu circumdedit, captaque civitate fratrem suum interfecit, pluresque seniores ac Burgundiones qui cum ipso senserant, multis exquisitisque tormentis morte damnavit regnumque quod perdiderat cum eo quod Godegeselus habuerat receptum usque in diem mortis suæ féliciter gubernavit. Marius Avent., Chron.
[13] Procope, Bell. Gogh., I, 9, p. 330 (Bonn.)
[14] Ranke, o. c., IV, p. 354.
[15] Je n’ai pas à m’occuper ici d’une autre erreur de Ranke, soutenant que la fuite de Godegisil dans le temple arien et sa mort avec l’évêque de sa confession sont une invention de Grégoire. Où donc veut-il que Godegisil fugitif se soit réfugié, sinon dans l’endroit qui, à ses yeux comme aux yeux de ses vainqueurs, était l’asile le plus sacré ? Qu’il me soit permis de reproduire ici ce que j’écrivais à ce sujet Rev. des Quest. hist., janv. 1890 p. 93 : Se figurer que Grégoire a inventé ce trait parce qu’il donne satisfaction à ses préoccupations confessionnelles, c’est infliger un démenti à toute sa vie. Grégoire était incapable d’inventer quelque chose, dans quelque but que ce fût ; tous ses écrits en sont la preuve convaincante... Lorsque ailleurs, il nous montre dans ses récits les plus illustres sanctuaires catholiques pillés (II, 27), ou leur droit d’asile violé (IX, 10), et des évêques expirant de douleur, parce qu’ils n’ont pu le faire respecter (IX, 23) est-ce aussi à des préjugés confessionnels qu’il obéit ? Qu’on renonce donc une bonne fois à un argument qui n’est pas de mise ici, et qui ne suppose des préjugées confessionnels qu’à ceux qui en attribuent si généreusement à notre narrateur. Je ferai remarquer de plus que Binding lui-même, p. 162, n’ose pas révoquer en doute la mort de Godegesil dans l’église arienne avec l’évêque de sa confession, et ce n’est pas peu dire pour qui connaît la passion anticatholique de cet auteur.