I. — CONDITION LÉGALE DE LA PROVINCE[2]. Durant les années des guerres cimbriques, les peuples gaulois et l’Empire romain avaient vécu de communes destinées : ils coururent des périls semblables, les défaites des légions livrèrent les Celtes à la ruine, et leurs victoires les sauvèrent de l’invasion. Après Verceil, l’histoire de Rome se sépare de celle de la Gaule, la Celtique indépendante et la Province du Midi vivent à part l’une de l’autre, et leurs intérêts deviennent chaque jour plus différents. Les Teutons vaincus, les Romains se retrouvaient maîtres dans leur province. A dire vrai, c’était la première fois, en l’an 101, qu’ils jouissaient en toute sécurité de leurs conquêtes transalpines[3]. Depuis un quart de siècle qu’ils avaient franchi les montagnes, ils avaient eu presque toujours des ennemis à combattre, indigènes ou germains. La victoire de Marius donna une dernière consécration à l’œuvre de Fabius et de Domitius : l’Italie pouvait enfin exploiter ses nouveaux domaines. L’autorité de Rome s’étendait sur les grandes peuplades gauloises du Midi[4] : à l’ouest du Rhône, les Volques du Languedoc et les Helviens du Vivarais ; à l’est, les Allobroges du Dauphiné, les Voconces de la Drôme, les Cavares du Comtat, les Tricores du Gapençais[5] et les Salyens de la Provence. Les tribus des Alpes et les Ligures du littoral[6] ne furent point, semble-t-il, annexés à l’Empire. Mais les communications avec l’Italie n’en étaient pas moins assurées[7] : sur le rivage, les indigènes avaient ordre de se tenir éloignés de la mer, le long de la Durance, des contrats ou une crainte salutaire laissaient libres les passages du Genèvre et du Cenis[8]. Rome, selon la coutume antique, ne supprima aucune des nations conquises : à toutes, elle laissa leurs noms, leurs limites, leur existence matérielle et sacrée, aussi bien aux Allobroges qu’elle avait pris de force, qu’aux Volques qui s’étaient soumis d’eux-mêmes. Les conditions du pays vaincu ne furent bouleversées qu’à Narbonne : là, il fallut exproprier en masse les indigènes, afin de créer une ville romaine, de la doter d’un territoire, d’assurer aux colons des terres de culture[9]. Ailleurs, par exemple à Toulouse[10], à Aix[11], à Vienne[12], on dut se borner à réserver un terrain à l’intérieur ou près de la ville gauloise, pour y installer les colons italiens et la garnison qui les protégeait. Les usages politiques de ces peuplades furent également respectés. Elles perdirent, cela va de soi, le droit de guerre[13] et de coalition, et des tributs furent imposés à la plupart d’entre elles[14]. Mais elles continuèrent d’obéir à leur sénat, à leurs rois ou à leurs magistrats[15], et de se gouverner suivant leurs lois et coutumes[16]. Il ne leur fut même pas interdit d’envoyer des ambassades à Rome pour y traiter de leurs affaires, et peut-être, chaque année, le proconsul réunissait-il à Narbonne les principaux de leurs chefs afin de résoudre ensemble les questions importantes[17]. Le peuple romain apparut d’abord à leur endroit plutôt comme un suzerain que comme un maître absolu : quelques-unes d’entre les nations- reçurent le titre de cités libres ou fédérées, qui supprimait toute formule de sujétion[18] ; et si ce titre fut spécialement conféré aux peuplades qui s’étaient rendues sans coup férir, telles que les Volques[19], les autres habitants de la Province étaient également appelés, non pas des vaincus et des sujets de Rome, mais des alliés et des auxiliaires de son empire[20]. Mais cela n’était que formules et mensonges. S’il fut peut-être rédigé une loi de la Province, définissant les droits et les devoirs réciproques du peuple romain et des cités gauloises[21], elle ne tarda pas à être violée impunément. En fait, toutes les nations étaient à la merci du peuple romain et du maître qui venait en son nom[22]. En temps de guerre importante, l’autorité appartenait à un des consuls de Rome, envoyé au delà des Alpes : ce fut, trois ans de suite, le cas de Marius[23]. En temps normal, le sénat confiait soit à un préteur en exercice[24], soit à un magistrat prorogé, proconsul[25] ou propréteur[26], le gouvernement de la Gaule Transalpine : tel était le nom officiel de la Province[27]. Quelle que frit sa dignité, le chef romain exerçait tous les droits qui appartenaient au peuple souverain, et il les exerçait seul et sans contrôle. La royauté, que Rome avait supprimée chez elle, reparaissait dans ses provinces[28]. Le gouverneur[29] commandait les armées, protégeait les frontières, réprimait les rebelles[30]. C’était lui qui fixait le contingent de soldats, de matelots et de chevaux que devait fournir chaque peuplade[31], la quantité de vivres, de corvées ou de logements dont elle devait s’acquitter[32]. Il avait le pouvoir, sinon d’imposer à volonté les provinciaux[33], du moins d’établir des taxes sur les routes et aux frontières[34]. Sa justice était souveraine sur les indigènes ; et s’il était tenu à une certaine procédure, ses sentences, même capitales, étaient sans appel[35]. Il avait sans doute aussi le droit d’inspecter et de contrôler les cultures des terres : car, pour assurer des débouchés au vin et à l’huile de l’Italie, le sénat interdit aux Gaulois de planter des vignes et des oliviers[36]. Ce qui leur montrait que tout serait réglé par Rome, la vie du sol comme la vie des hommes. Une telle autorité, absolue et multiple, pouvait, suivant les personnes, être mise au service du bien ou du mal. Le bien, pour la Gaule romaine, c’était la transformation des hommes et de la terre, les Celtes obligés à s’unir et à respecter les lois, leur activité tournée vers les travaux du sol et les œuvres de l’esprit, de nouvelles cultures enseignées et de grandes villes bâties, et les vaincus associés à une œuvre pacifique dirigée par une volonté supérieure. Le mal, c’était la Province livrée à tous les appétits des Italiens : prolétaires de Rome qui veulent des lots de colons[37], sénateurs et chevaliers qui rêvent d’immenses domaines, de terrains de chasse ou de bois de futaie[38] brasseurs d’affaires qui cherchent des entreprises de transport, de vente, de commission ou de fermage[39], collecteurs d’impôts qu’enrichit toute taxe nouvelle[40], banquiers et usuriers pour qui les indigènes sont une proie facile, prospecteurs de mines, maîtres carriers, marchands de vins, de bois et de bestiaux[41], exploiteurs de pacages et de labours[42], fournisseurs de marchés d’esclaves, ceux-ci, les plus dangereux des malfaiteurs[43], toute une foule d’aventuriers sans scrupule s’abattait sur la province[44]. Et si le gouverneur laissait faire, la curée commençait[45]. Or, non seulement il laissait faire, mais, presque toujours, il mettait son pouvoir à la disposition de ces hommes, c’est-à-dire qu’il le leur vendait pour une part dans les bénéfices. Confiscations de biens ou destructions de villes[46], exécutions sommaires[47], impôts arbitraires[48], extorsions d’argent[49], dénis de justice[50], les provinciaux étaient alors menacés dans leurs vies et leurs biens, et ils couraient chaque jour les mêmes dangers qu’à un soir de défaite. — Il est vrai qu’ils pouvaient se choisir à Rome un patron ou un défenseur[51] et, par son intermédiaire, accuser leur préteur de prévarication ou de rapine[52]. Mais les tribunaux étaient indulgents pour les méfaits de ce genre : tous les juges n’avaient pas la conscience nette[53]. D’ailleurs, quand il s’agissait de la Gaule, les gouverneurs et leurs avocats rappelaient aussitôt que c’était pays de Barbares et de Celtes, et que les Romains avaient toujours à venger la bataille de l’Allia, l’assaut du Capitole et le pillage de Delphes[54]. Avec de tels arguments, l’impunité était assurée aux pires exactions, les plus violents des proconsuls étaient les plus dignes du nom romain, et les Gaulois risquaient de devenir les ennemis éternels, pour lesquels le souverain n’abdique jamais le droit du vainqueur[55]. Le sort de la Gaule allait donc dépendre des hommes que le peuple et le sénat[56] lui donneraient pour maîtres. II. — LE GOUVERNEMENT DE LA GAULE AU TEMPS DE MARIUS ET DE SYLLA[57]. Ceux qu’elle eut après Marius nous sont à peu près inconnus[58]. Nous ignorons presque tout des commencements de la Gaule romaine, de ces années les plus critiques de sa vie, celles où se dessinent chez les maîtres les règles générales d’une politique et chez les sujets les premières habitudes du régime de l’obéissance. A de certains indices, on dirait que Rome veut se montrer libérale envers les vaincus et les amener peu à peu à la jouissance des droits souverains : des chefs helviens, en 83, reçurent le titre de citoyen romain[59]. Mais d’autres détails révèlent que toutes les peuplades n’ont point renoncé à l’espoir de l’indépendance : les Salyens se révoltent vers 90[60] d’autres en 83[61]. Comme les uns et les autres de ces faits peuvent mètre des exceptions, j’hésite à en rien conclure. Après tout, durant ces vingt ans (100-78), les révolutions furent trop fréquentes à Rome pour qu’on pût élaborer un plan suivi à l’égard des provinces. Marius, en l’an 100, fut pendant quelques semaines une manière de roi, grâce au prestige de ses victoires et à l’appui du peuple et des chevaliers. Puis, durant dix ans, les grands l’emportèrent, soutenus par la fortune continue de Sylla. Le parti populaire prit sa revanche après le départ de celui-ci pour la guerre de Mithridate (87), et, jusqu’à son retour, il gouverna l’Occident sans opposition. Quand Sylla revint, ce fut la conquête à main armée de l’Italie et de Rome, faite par le proconsul au profit de l’aristocratie (83-78). A chaque changement de régime, la Province voyait arriver de nouveaux chefs, et les acceptait passivement. Ils ne restaient pas assez longtemps pour se faire craindre ou pour se faire aimer. Leur situation était trop précaire pour qu’ils se compromissent par un excès de violences ou par des résolutions généreuses. Et c’est sans doute à cause de cela que les gouverneurs ne se sont signalés ni par leurs crimes ni par leurs bienfaits, et que la Gaule a si peu fait parler d’elle. Au temps des batailles entre Marius et Sylla, toutes les énergies se dépensaient à Rome et en Italie : les provinces de l’Occident se bornaient à suivre les mouvements qui venaient de la capitale. Mais, Sylla étant dictateur, elles entrèrent subitement en scène. III. — SERTORIUS[62]. En 80, il y a un demi-siècle, depuis Tiberius Gracchus, que dure la lutte des partis. Les deux dernières crises, celles des revanches de Marius et de Sylla, ont provoqué les plus ignobles scènes qui puissent déshonorer une nation. Tout sentiment de dignité et d’humanité avait disparu de Rome. Le Capitole, symbole de son empire, fut détruit dans un incendie (83). Les vaincus avaient le droit de ne plus respecter un tel peuple. Tour à tour, les sujets de ce peuple et les victimes du sénat exigeaient et obtenaient de nouveaux avantages. Tiberius donna une part des terres aux misérables, et Caïus une part de l’autorité aux chevaliers ; les affranchis luttaient pour renverser les barrières qui limitaient leurs pouvoirs d’électeurs[63] ; les Italiens entrèrent dans la cité, et même les Gaulois de la Cisalpine, Insubres et Cénomans, furent admis au nom latin (89)[64]. L’idée d’une égalité de droits et de titres entre vaincus et Romains se propageait en Occident. La province était amenée à moins craindre ses maîtres, et à leur réclamer ou son ancienne liberté ou une condition meilleure. Or, vers ce même temps, deux Romains de haut mérite, Sertorius et Pompée, s’inquiétèrent de la province autant que de Rome et de l’Italie. Ils comprirent quelles réserves de forces renfermait le monde barbare de l’Occident, et ils tentèrent, pour s’emparer du pouvoir, de l’attacher à leur fortune. Ces hommes n’appartenaient pas au même parti, ils se combattirent sur les champs de bataille, ils n’avaient pas le même degré d’intelligence ni la même valeur morale. Mais ils ont travaillé à une œuvre semblable. Sertorius apparut le premier. C’était un des chefs du parti équestre, que la victoire de Sylla chassa de l’Italie. Il passa les Alpes malgré l’hiver, traversa la Gaule (82 ?)[65], gagna l’Espagne, en fut expulsé[66] y revint, et, grâce à l’appui des Lusitans (80), s’y tailla une façon d’empire[67], la création la plus originale qu’ait jamais entreprise un général du peuple romain. Le nouveau maître de l’Espagne n’entendait pas la détacher des provinces : il la gouvernait pour le compte de son parti, mais au nom de Rome ; il avait près de lui un sénat, des chefs de corps, des officiers, tous Romains d’origine[68]. Il n’admit jamais les Barbares au partage de la souveraineté[69]. Mais en même temps, il leur commandait, non pas à la romaine, mais, pour ainsi dire, à l’espagnole. On sait quelle force avait, chez les indigènes de l’Occident, le lien sacré qui unissait l’homme à l’homme, cette religion militaire qui rapprochait les compagnons et le chef pour une éternelle amitié. Sertorius accepta cette nature d’obéissance, et il se fit des guerriers espagnols, Lusitans ou autres, autant de fidèles et de dévoués[70]. Il leur parlait comme une sorte de prophète : Diane, disait-il, lui envoyait sa biche pour l’inspirer[71], et sous ce nom latin de Diane, il invoquait sans doute cette grande Mère des forêts, des terres et des hommes que les Barbares adoraient par-dessus tous les dieux. Chez ces peuples toujours prêts à diviniser leurs chefs, Sertorius suscitait un enthousiasme sacré[72] : l’Espagne revenait au temps de Viriathe le Lusitan, où elle faillit être, comme la Gaule de Luern, un seul empire commandé par un roi divin[73]. — Mais Viriathe n’avait songé qu’à une royauté nationale, Sertorius voulut la fusion complète, droits et coutumes, du Latin et du Barbare. Aux chefs, il donnait l’habitude de la discipline et des armes savantes[74] ; à leurs fils, il faisait enseigner la langue et les lettres romaines et grecques, et il les réunit en école dans la ville de Huesca, sous la direction de maîtres qu’il paya et surveilla lui-même[75]. Huesca était une vieille et grande cité, la métropole célèbre de l’Espagne du nord, une des capitales du nom ibérique[76] : sous la domination de Sertorius, elle retrouvait sa gloire d’autrefois, embellie par la vie romaine. Cette politique libérale était indiquée sans doute par les circonstances : proscrit en Italie, Sertorius ne pouvait se créer des ressources en province qu’en s’adressant à la bonne volonté des indigènes[77]. Mais je crois qu’en toute circonstance il eût agi de la même manière. C’était un homme d’une intelligence très souple et très ouverte, d’un esprit politique fort clairvoyant, et, ce qui fut si rare chez les Romains, d’une nature conciliante et affectueuse, presque sentimentale, accessible aux émotions les plus douces du cœur humain[78]. Et sa bonté, autant que sa raison, l’amena, dès le début, à parler aux Barbares en homme et en ami. Ce n’était pas un inconnu pour les Gaulois. Il avait vécu et servi quatre ans dans leur pays, lors des campagnes contre les Cimbres et les Teutons (105-102) : il avait appris la langue celtique, te qui lui permit de rendre les plus grands services à l’armée de Marius. On n’ignorait pas, en Occident, son habileté, sa droiture et sa bienveillance. Quand Rome avait eu à réprimer la révolte des alliés italiens, Sertorius, questeur en Cisalpine (90), fit appel aux hommes de sa province, et il réussit à leur faire prendre les armes en faveur du sénat[79]. Maintenant qu’il le combat, il aura moins de peine encore à assembler des Gaulois autour de lui. Aussi, le bruit de ses victoires émut tous les Barbares de l’Occident. Des Pyrénées jusqu’aux Alpes, des mouvements se produisirent au delà et en deçà de la frontière romaine. Les Aquitains des Pyrénées et de la Gascogne prirent les armes, tandis que leurs voisins d’Espagne, Vascons et Cantabres, accouraient près de Sertorius[80]. En Languedoc, les Volques guettaient l’occasion de surprendre Narbonne[81] ; entre le Rhône et les Alpes, les Voconces s’insurgèrent[82], les Allobroges et d’autres étaient prêts à faire comme eux[83], et les tribus des montagnes fermaient les passages. Les proconsuls qui gouvernaient la Gaule Transalpine pour le compte du sénat, luttaient afin d’enrayer le mal. Des combats furent livrés, dont ils sortirent d’abord vainqueurs. L’un d’eux, Lucius Manlius[84], se crut même assez fort pour passer en Espagne, et venir au secours des généraux qui tenaient tête à Sertorius. Mais il fut alors battu, rejeté au delà des Pyrénées du côté de la Gascogne (par le col du Somport ?). C’était la première fois qu’une troupe romaine pénétrait chez les Aquitains. Manlius fut obligé de traverser leur pays pour regagner Toulouse ou Narbonne[85] : il fut assailli par les indigènes, l’armée se vit dépouiller de ses bagages, et le proconsul revint en Gaule deux fois vaincu (77 ?)[86]. Il était dès lors à craindre qu’une insurrection générale n’éclatât. Et si le Languedoc et la Provence faisaient défection, les routes de terre seraient coupées entre l’Italie et l’Espagne. Déjà, les routes de mer étaient menacées par les pirates : Sertorius s’entendit avec eux, et établit un poste sur le cap de La Nao, à Denia, d’où il put surveiller les eaux des Baléares[87]. L’Occident, terres et rivages, se groupait peu à peu sous ses ordres pour une nouvelle existence[88]. IV. — LE PASSAGE DE POMPÉE EN GAULE. L’arrivée de Pompée changea le cours des choses. Il ne valait assurément pas Sertorius, ni comme chef d’armée ni comme conducteur de peuples. Mais un bonheur insolent accompagnait ses entreprises. Et ce fut lui qui rétablit par tout l’Occident le pouvoir du sénat et l’unité de l’Empire romain[89]. Le sénat lui avait donné, presque contraint et forcé, le titre de proconsul, le gouvernement de l’Espagne citérieure[90], et peut-être une autorité souveraine sur la Gaule au delà des montagnes[91]. En quarante jours son armée fut prête[92], et Pompée se mit en marche vers les routes des Alpes. Une légende se forma bientôt sur le passage des Alpes par le jeune général. On parla de chemins nouveaux qu’il avait découverts, de périls sans nombre, de luttes sanglantes contre les montagnards, et il fut comparé à Hannibal[93]. Il faut sans doute en rabattre. Ambitieux et vaniteux, Pompée encourageait volontiers les légendes qui se forment au profit d’un chef, il savait qu’elles font la moitié de la gloire, et c’est peut-être lui qui, dans un rapport au sénat, a rappelé le premier le nom d’Hannibal. Cependant, sans avoir l’éclat héroïque de l’aventure carthaginoise, la marche du proconsul fut bien conduite, et ne manqua ni de dangers ni de profits La route ordinaire des marchands et des armées était par le littoral ou par les deux seuils qui partaient de Suse, le col du Cenis et le col du Genèvre. Pompée chercha un chemin nouveau, et le trouva, je crois, le long de la Doire Baltée et au Petit Saint-Bernard. En passant par là, il montrait les légions aux indigènes du val d’Aoste, les Salasses, dont les pilleries étaient la terreur des trafiquants et des colons de la plaine ; puis, il arrivait chez les Allobroges, alors en pleine effervescence, et, d’une frontière à l’autre de leur vaste pays, de Montmélian à Vienne, il leur faisait sentir le poids des légions. Cette route avait, sur les autres, l’avantage de conduire au cœur de la Gaule : elle était essentielle pour assurer au delà des Alpes la domination militaire de Rome. Et c’est ce que Pompée fit justement remarquer au sénat. En route, il ne cessa de livrer bataille. On rapporta qu’il n’arriva sur les bords du Rhône qu’à travers les monceaux des corps abattus par les légions. Il y eut là, j’imagine, une de ces exagérations dont se firent dès lors coutumiers les clients intéressés de Pompée. Mais on peut croire qu’il rencontra de fortes résistances, et qu’il en triompha[94]. Les Allobroges domptés, il restait à réprimer les Voconces et les Volques. Mais Sertorius gagnait du terrain en Espagne : Pompée laissa au gouverneur de la Gaule Transalpine le soin d’achever son œuvre. Il avait assez fait pour se vanter d’avoir rendu la Gaule au sénat[95], et, après cette triomphale apparition, il descendit en Espagne par le col du Pertus (77 ?)[96]. V. — LE GOUVERNEMENT DE FONTÉIUS EN GAULE[97]. Le nouveau gouverneur de la Gaule, Manius Fontéius[98], était un préteur à l’ancienne manière sénatoriale, violent et cupide, plein de mépris pour le Barbare, décidé à faire craindre le nom de Rome par tous les moyens et à réaliser une sérieuse fortune le plus vite possible : pendant les trois années de son règne (76-74 ?)[99], la Province fut livrée à une sorte de pillage légal. Mais il faut dire, à sa décharge, que le Temps n’était pas à la modération. Sans la peur d’un maître impitoyable, la Gaule pouvait échapper à Rome, et de son obéissance dépendait le sort des armées d’Espagne. D’ailleurs, elle venait par sa révolte de fournir au vainqueur le prétexte d’user de tous ses droits. Fontéius, pour se justifier de ses violences, n’avait qu’à invoquer les circonstances[100]. Il eut d’abord à faire campagne contre les Voconces[101] et contre les Volques, auxquels il imposa le respect de Narbonne[102] — Après la défaite, le châtiment. Pompée avait, ce semble, décrété lui-même les peines publiques qui seraient infligées aux cités coupables[103], le sénat les sanctionna ou en ajouta d’autres[104], et Fontéius les appliqua avec la dernière rigueur[105]. Les Volques perdirent une partie de leur territoire ; d’autres se virent imposer des charges nouvelles, tributs ou corvées, fournitures de vivres ou d’hommes[106]. Partout, les officiers du préteur visitaient les nations, s’établissaient chez elles, dirigeant l’exécution des ordres[107]. Fontéius sauvegarda les intérêts du peuple romain avec une âpre énergie. De Gaule, il expédiait des cavaliers et des fantassins indigènes aux armées de tout l’Empire[108]. Les légions d’Espagne recevaient de lui les blés nécessaires à leur subsistance[109] ; l’hiver, la campagne finie, elles se retiraient parfois au nord des Pyrénées, et elles trouvaient un réconfort dans les riches plaines du Languedoc[110]. Le gouverneur veillait soigneusement à l’entretien de la voie Domitienne, du Pertus au Rhône, voie si utile, en ce moment, à l’unité de l’Empire[111], et que parcouraient sans cesse les hommes et les équipages destinés aux troupes qui luttaient contre Sertorius. C’était la Gaule qui payait tout[112]. Les routes étaient chargées au moyen de charrois et de corvées commandées aux indigènes[113] ; le blé était réquisitionné dans leurs granges[114]. Pour avoir de l’argent, Fontéius imagina des taxes sur la denrée que les riches Gaulois recherchaient le plus et qu’ils achetaient le plus cher, les vins du Sud. A Toulouse, dans les marchés de la campagne, au voisinage de la frontière, des bureaux de douane ou de péage furent installés sous la direction de fonctionnaires romains. Cela rapporta de gros bénéfices à Fontéius. Il s’entendit avec les percepteurs, vendit des exemptions de corvées, ferma les yeux sur les méfaits des entrepreneurs, et sans doute inscrivit indûment des terrains sur les décrets de confiscation[115]. S’il ne pilla pas en brigand de grand chemin, comme Cépion, il s’enrichit en concussionnaire : ce qui lui permit d’acheter un beau domaine en Campanie, le rêve de tous les Romains[116]. Sous un tel chef, les hommes d’affaires eurent libre carrière. Guerres, pillages, tributs, expropriations, passages et séjours de soldats entraînaient les Gaulois à de terribles misères : ils ne purent vivre que d’emprunts. Alors, les usuriers d’Italie se trouvèrent à point nommé pour compléter leur ruine. Il ne se fit plus d’affaires, au delà des Alpes, sans l’intervention d’un banquier romain, de ses livres et de son courtage[117]. Et l’on sait à quel taux formidable s’élevait l’usure en ce temps-là[118]. Encore quelques années de cette vie, et toute propriété, argent ou terre, serait impossible aux indigènes. Mais par là Fontéius se faisait bien voir des colons, des Italiens et des Grecs de Marseille. Et les officiers qui traversaient la Gaule pour rejoindre l’armée d’Espagne, félicitaient le gouverneur du bon ordre qui régnait[119]. VI. — LA POLITIQUE DE POMPÉE EN OCCIDENT. Pompée, en Espagne, ne l’emporta que grâce à sa bonne fortune. Son adversaire périt dans un complot, victime des Romains de son entourage, qui ne lui pardonnaient pas de respecter les provinciaux (72)[120]. Après sa mort, le proconsul eut vite raison des troupes italiennes de Sertorius, épaves des anciennes guerres civiles[121] ; les indigènes lui donnèrent un peu plus de mal, surtout les Vascons de Navarre, demeurés fidèles aux cendres du grand chef auquel ils s’étaient dévoués, et beaucoup voulurent le suivre jusque dans la tombe[122]. Puis, tout rentra dans le silence et la soumission (71)[123]. Alors, une attitude nouvelle se dessina chez l’imperator romain. Jusque-là, il s’était montré aux provinciaux comme un général ardent et rude, qui ne s’émouvait pas devant des cadavres d’ennemis. Mais cette besogne de massacreur jurait avec ses vastes ambitions, sa nature accueillante, la bonté de son cœur, l’élégance suprême de son caractère et de sa vie[124] Il eut, assurément, l’amour du premier rang avec la même force que pas un[125], César excepté : il le tempéra par un profond désir de n’être point mal jugé, un impérieux besoin de plaire à tous[126]. L’étroite tyrannie d’un Marius et d’un Sylla, n’exerçant le pouvoir qu’au profit de leurs appétits vulgaires et de leurs bandes de complices, prêts à tous les crimes et disposés à tous les vices, le sanglant despotisme de ces deux derniers chefs, produit à la fois des basses jalousies du prolétariat et des cupides égoïsmes de l’aristocratie, toutes ces passions viles ou cruelles répugnaient à l’âme délicate et à la vanité généreuse de Pompée[127]. Et cette conquête de l’Espagne, qui, sous la génération antérieure, eût amené des tueries et des vilenies sans fin, allait faire du vainqueur le protecteur naturel de la nation soumise[128]. Dans ses mains, et pour la première fois depuis que le monde avait des maîtres latins, l’autorité souveraine sembla une lumière descendue des cieux[129]. Il pardonna d’abord à tous les Romains : ni les chevaliers ni les colons qui avaient suivi Sertorius ne furent inquiétés[130]. La guerre finie, les indigènes n’eurent plus à souffrir. Pompée resta en Espagne le temps qu’il jugea nécessaire pour les apaiser[131]. Il parcourut la vallée de l’Èbre, réglant la condition des villes et des tribus. Huesca garda son rang municipal[132]. A la descente du col de Roncevaux, il bâtit la ville de Pompée, Pampelune, qui ne tarda pas à devenir la bourgade importante des Vascons de la Navarre[133] : le nom de leur gouverneur, au lieu de rappeler des ruines, se fixait à des cités neuves. Le droit de bourgeoisie fut donné à des indigènes, qui entrèrent également dans la vie romaine sous le nom du proconsul, comme membres de la gens Pompeia[134]. Beaucoup de chefs et de nations recherchèrent sa clientèle[135]. Même après avoir quitté l’Espagne pour toujours, Pompée y commandait par les droits du patronage[136]. Ce n’était pas, sans doute, par pure sympathie envers les provinciaux que Pompée agissait ainsi. Il commençait par l’Espagne son ébauche d’un empire universel. Mais cette nouvelle manière de s’imposer à la province la tirait enfin de la misère et de la révolte où elle se débattait dès l’origine[137]. Comme les plébéiens de la Rome primitive, elle s’évadait de la servitude publique en acceptant le patronage d’un grand : et une fois entrée dans sa clientèle, elle liait davantage son sort au sort du peuple romain. Pompée éleva au sommet du Pertus, frontière de l’Espagne, les trophées de ses victoires[138]. Puis, il revint dans la Gaule, domptée par Fontéius[139]. Là, il continua, autant que le lui permirent ses pouvoirs, la politique inaugurée en Espagne. On le vit plein d’égards pour Marseille, à qui il assura les terres enlevées aux Volques de Nîmes[140], et qui par reconnaissance l’accepta pour patron. Quelques chefs reçurent son nom et le droit de cité, et il octroya l’un et l’autre même à des hommes de nation rebelle, comme à des Voconces[141]. Des terres occidentales, la Gaule Transalpine était celle qui confinait le plus à l’inconnu, qui ouvrait les plus larges perspectives de gloire et de conquêtes. Jeune, aventureux, déjà plein de la pensée d’Alexandre[142], il n’est pas impossible que Pompée ait rêvé de grandes entreprises dans le Couchant. Certains faits semblent prouver que pendant les journées qu’il passa en Gaule, il arrêta un instant son esprit sur les contrées d’au delà. Il avait ramené quelques bandes de montagnards, brigands ou bergers celtibères qui restaient de ses dernières guerres : il en fit une tribu ou une peuplade, et il l’établit dans la région du Comminges, autour du rocher de Saint-Bertrand (Lugdunum), où il plaça leur bourgade principale[143] : le pays fut rattaché à la Province, qui s’annexa ainsi toute la haute vallée de la Garonne[144]. Plus loin encore, dans la Celtique et l’Aquitaine, le sénat entretenait des amitiés utiles : peut-être Pompée obtint-il pour quelques chefs puissants, par exemple du Périgord, le titre de citoyens romains[145] Sa clientèle commençait à. déborder jusqu’en terre barbare. Des affaires plus précises le rappelèrent en Italie. Une guerre servile venait d’éclater : on le fit venir[146]. Au printemps, il franchit une seconde fois les Alpes avec son armée victorieuse (71)[147]. Une nouvelle chance l’attendait. Les esclaves et gladiateurs d’origine barbare, Illyriens, Cimbres, Teutons et Celtes, s’étaient insurgés sous les ordres de Spartacus le Thrace et de Crixus le Gaulois (73)[148]. Un instant, ils l’emportèrent sur les préteurs, et, avec l’apparence d’une révolte sociale, ils engagèrent en pleine Italie une guerre nationale, revanche d’Aix et de Verceil. Les plus sages de leurs chefs n’avaient qu’une ambition, rouvrir les chemins du Nord aux fils et petits-fils des grandes peuplades, et les renvoyer libres sur leurs terres transalpines[149]. Mais, gâtés par leur naissance servile ou trente années d’esclavage, la plupart préférèrent piller et se venger[150]. Au lieu de l’indépendance, ils allèrent à une nouvelle défaite, qui ne pouvait être suivie que des supplices réservés aux esclaves rebelles[151]. Crassus parvint à les vaincre avant le retour de Pompée[152]. Il laissa échapper une bande de cinq mille hommes, qui vinrent se heurter aux légions d’Espagne[153]. Le proconsul n’eut point de peine à les écharper, et il put se vanter d’avoir détruit les racines de la guerre et mis fin au péril barbare (71)[154]. A nome, Pompée se fit nommer consul, ayant Crassus pour collègue. Tous deux rétablirent les lois populaires, abolies par Sylla. Mais la nouvelle révolution se fit sans violence : aucune illégalité ne fut commise, pas une goutte de sang ne fut versée. Une génération plus humaine arrivait au pouvoir (70). Peu après, Pompée fut chargé de pacifier la Méditerranée dévastée par les pirates (67), et ensuite de mettre fin à la guerre de Mithridate (66). Sa tâche maritime fut assez facile du côté de l’Espagne et de la Gaule, où ses légats firent le nécessaire[155]. Lui-même se mit en route pour l’Orient, à la recherche de nouvelles gloires et de nouveaux clients. Il avait reçu du peuple des pouvoirs extraordinaires ; il se voyait choisir comme patron ou comme ami par les plus fameuses cités et par les plus grands rois[156]. A la faveur d’une délégation souveraine et d’un patronage universel, une monarchie militaire s’ébauchait, en dehors de l’Italie et de Rome, sur toutes les provinces de l’Empire[157]. VII. — LES DERNIÈRES RÉSISTANCES DES ALLOBROGES[158]. Mais jusqu’au jour où cette monarchie imposerait à Rome le respect des vaincus, la province devait connaître encore de longues années de misères. Le règne de Sertorius ne fut qu’une courte éclaircie pour l’Occident, et Pompée n’avait fait que passer, plongé dans ses rêves de grandeur et d’amitié. Après son départ, l’histoire de la Gaule romaine, pendant dix ans (71-61), fut la répétition banale des temps de Fontéius. Un instant, on put espérer que ce dernier serait puni. Les Allobroges envoyèrent à Rome une ambassade, qui chercha et trouva un accusateur[159], et une action fut intentée contre le gouverneur (69 ?)[160]. Il choisit Cicéron pour avocat. Cicéron avait accusé Verrès des mêmes crimes qu’on reprochait à Fontéius ; mais Verrès, en Sicile, avait persécuté des Italiens et des Grecs, les deux sortes d’hommes dont l’orateur se regardait comme le protecteur naturel. En Transalpine, Fontéius n’avait attaqué que des Gaulois. Cicéron, en le défendant, fit croire qu’il soutenait les droits des races supérieures et du monde civilisé, il parla de Narbonne et de Marseille, de Jupiter et d’Apollon, exposés aux menaces et aux sacrilèges de la Barbarie, du sang qui avait coulé à Delphes et sur l’Allia, et des victimes humaines que les Celtes immolaient[161]. Fontéius fut sans doute absous[162], et, en Gaule, les Italiens s’en donnèrent à cœur joie[163]. On vit l’ami d’un gouverneur, Publius Clodius, organiser une agence de crimes, qui se chargeait de fabriquer des testaments, de supprimer les orphelins et d’accaparer les héritages[164]. Ce même gouverneur, Lucius Murena, parvint, dit-on, à faire recouvrer aux Italiens toutes leurs créances sur la Gaule : ce fut, j’imagine, à l’aide d’extorsions et de confiscations nouvelles[165]. Quand toutes ces opérations furent faites, il ne restait plus aux Gaulois qu’à mourir de faim (64)[166]. Les Allobroges étaient demeurés le seul peuple gaulois qui eût du courage et de la persévérance. Ils furent, comme soldats ou négociateurs, les défenseurs attitrés de la Province ; ils y exerçaient une sorte de souveraineté morale, héritage de leur antique prééminence. — Après ces derniers outrages, ils envoyèrent à Rome une nouvelle mission (63)[167]. Elle trouva un patron, mais ce fut tout[168]. Cicéron, l’avocat de Fontéius, était alors consul, et il ne s’occupait que de Catilina. Le sénat ne voulut rien entendre[169]. Les malheureux Allobroges erraient sur le Forum, angoissés et parlant de mourir[170]. Dans leur désespoir, ils écoutèrent les propos des amis de Catilina, et ils faillirent promettre qu’ils décideraient leur peuple à prendre les armes et à s’unir aux insurgés[171]. Leur patron les détourna de cette aventure ; ils consentirent même, sur la demande de Cicéron, à tromper la confiance des conjurés et à lui livrer les documents qui établiraient le complot[172]. Ils espérèrent par là attirer sur leur sort l’attention reconnaissante du sénat. Mais il se borna à quelques récompenses et à de bonnes paroles[173], et l’on cessa de s’intéresser à eux. Alors, une dernière fois, les Allobroges tentèrent la fortune des armes, un an après l’affaire de Catilina (62-61)[174]. C’était trop tard[175]. A cette date, le sénat ne redoutait plus ni émeutes ni complots, l’Empire ne se connaissait plus d’ennemis. Pompée revenait d’Orient après avoir poussé jusqu’aux abords de la mer Caspienne[176] ; César, préteur en Espagne, désespérait de trouver de beaux champs de bataille. La Gaule indépendante, tiraillée par les discordes et menacée par les Germains, avait oublié ses frères du Midi ; la Province, bien surveillée par son propréteur Caïus Pomptinus, ne put faire cause commune avec les Allobroges. — Mais rien ne les empêcha, dans leur courageuse folie, de déclarer la guerre au peuple romain. Au début, les choses allèrent assez bien pour eux, grâce à l’activité de leur chef de guerre, Catugnat[177]. Les résidents italiens de Vienne eurent à peine le temps de s’enfuir : encore durent-ils s’échapper par le nord, et se réfugier chez les Éduens[178]. Débarrassés des étrangers, les Allobroges attaquèrent : des bandes franchirent l’Isère, pillèrent le pays[179], s’établirent à Valence[180]. Le gouverneur Pomptinus envoya d’abord contre eux un de ses légats[181]. On se battit vigoureusement autour de Valence et sur les bords de la rivière, et les Romains eurent d’abord l’avantage[182]. Mais Catugnat arriva alors avec toutes ses troupes, passa l’Isère malgré les embûches de l’ennemi, et faillit s’emparer du légat lui-même[183]. Ce ne pouvait être qu’une alerte. Une seconde armée romaine s’approchait, sous les ordres de deux autres légats[184]. Elle remonta le Rhône sur la rive droite, le franchit en territoire allobroge, dévasta les terres des insurgés, et mit le siège devant leur principale forteresse, Solonium[185]. Catugnat abandonna la ligne de l’Isère et vint au secours de sa ville. Mais derrière lui, d’autres Romains s’avancèrent : Valence fut reprise, Pomptinus rejoignit ses légats, et toutes les armées se trouvèrent groupées autour de la citadelle allobroge. De nouveaux combats s’engagèrent, Solonium succomba, Catugnat, presque seul, réussit à s’enfuir[186] Il semble que les Allobroges eussent concentré leurs forces et leurs espérances autour de leur cité, comme pour un jugement suprême. Solonium tombé, il fut facile à Pomptinus de s’emparer de tout leur pays[187] : ils ne tentèrent pas, dans les montagnes du Dauphiné, la résistance du désespoir. Il y avait plus d’un demi-siècle qu’ils n’avaient cessé de combattre ou de plaider contre leurs proconsuls. Le temps de la résignation leur parut arrivé[188]. Et avec eux, tous les peuples de la Gaule méridionale perdirent dès ce jour et à jamais le désir de l’indépendance. VIII. — HELLÉNISME ET LATINITÉ DANS LA PROVINCE ROMAINE. Malgré ses malheurs et ses colères, la Gaule s’accoutumait peu à peu aux usages de ses maîtres : la vie latine s’insinuait partout, au détriment des traditions indigènes et de l’influence hellénique. Marseille, résignée au voisinage des Romains, s’ingénia pour en tirer parti et garder l’air d’une puissance. La présence des légions la délivrait du souci de la police sur terre ; Pompée et ses légats lui épargnèrent les frais de la police maritime. Cependant, les Grecs furent assez sages pour ne point désarmer. Ils conservèrent leur flotte de guerre ; on ne cessa de travailler dans l’arsenal ; les remparts furent entretenus avec soin Marseille demeura à l’abri de toute surprise, presque aussi redoutable que Syracuse et Carthage. Comme elle unissait à sa force beaucoup d’adresse et d’orgueil, elle put faire illusion aux Italiens eux-mêmes, et s’imposer à la bienveillance des proconsuls les plus intraitables[189]. Jusqu’à l’arrivée des Romains, elle s’était refusée à conquérir sur terre : des domaines à l’intérieur, c’eût été des garnisons à entretenir et la brouille avec les Gaulois. Avec la création d’une province, ces craintes n’existaient plus. Les Marseillais ne se firent plus faute de solliciter ou d’accepter des terres ; et s’ils étaient si complaisants à l’endroit d’un proconsul[190], c’est qu’ils attendaient de lui quelque récompense de ce genre. Ils reçurent de Sextius des domaines le long du rivage, Marius leur abandonna son canal, Pompée les installa chez les Helviens de l’Ardèche et les Volques de Nîmes[191]. Marseille devenait le plus riche propriétaire de la Gaule romaine. Mais ces progrès nouveaux n’étaient que des gains d’affaires. Marseille n’en sentait pas moins peser sur elle l’irrémédiable lassitude de l’hellénisme. — Certes, elle était maintenant la plus intacte des gloires de la Grèce. L’une après l’autre, toutes les cités de l’Hellade avaient été violées par le Barbare de l’Italie, Tarente, Syracuse, Corinthe et Athènes elle-même, que Sylla venait de réduire. Seule, sur cette Méditerranée qui avait été une mer hellénique, Marseille montrait l’intégrité de ses lois, la pureté de son indépendance et la virginité de ses remparts. Elle se raidissait dans le culte de ses traditions et la ferveur de sa foi ionienne[192]. — Mais cette foi était désormais impuissante. Marseille avait assez d’énergie pour durer encore, elle n’en avait plus pour créer. De ce temps, elle ne nous a laissé que ses monnaies, qui sont surtout des monnaies de bronze[193] : et elle y répète éternellement les mêmes types, la tête d’Apollon et le taureau aux cornes baissées[194], la figure de Minerve et le trépied[195], et elle les répète lourdement, gauchement, comme des images consacrées auxquelles elle ne touchera plus. Son sénat a beau veiller sur ses coutumes avec une touchante piété[196] : mille usages nouveaux viennent corrompre les mœurs d’autrefois. Ces légions qui s’arrêtent, ces officiers qui débarquent[197], ces Italiens vulgaires et corrompus, apportent avec eux des tares de toutes sortes. On commence à parler latin à Marseille. Quelques Grecs y ont consenti à recevoir le droit de bourgeoisie romaine ; et, s’ils demeurent quand même citoyens de leur ville, ils n’en prennent pas moins des noms latins, ils n’en sont pas moins des membres de la gens Cornelia ou de la gens Pompeia. Les proscrits du forum ou du sénat se rendent volontiers dans la cité phocéenne : Milon y a résidé après avoir tué Clodius, et il s’y trouvait fort bien, se délectant des rougets du golfe, la gloire du pêcheur provençal[198]. Catilina voulut, dit-on, s’y réfugier[199]. Marseille risquait de devenir l’asile des malfaiteurs romains. Au delà de ses murailles, la force d’expansion de l’hellénisme se maintenait, par suite de la vitesse acquise, et parce que Marseille demeurait la ville la plus ancienne, la plus riche, la plus prestigieuse de toute la Gaule. C’est chez elle que s’arrêtaient les philosophes et les érudits de l’Orient, désireux de s’instruire sur ces contrées lointaines, et c’est de là qu’ils partaient pour la Gaule[200], sans doute sous l’escorte des marchands phocéens. La ville grecque restait toujours l’éducatrice des Barbares du Midi : ils continuaient à copier ses monnaies[201], ils se serviront bientôt de son alphabet pour graver des inscriptions en l’honneur de leurs dieux ou de leurs cités[202] ; quelques chefs gaulois, épris de la culture du Midi, font venir de Marseille des rhéteurs ou des grammairiens, afin de servir de précepteurs à leurs enfants[203]. Dans certaines bourgades celtiques, comme l’Entremont des Salyens, on commençait à bâtir de grands édifices de pierre, et on les ornait de vigoureuses sculptures qui rappelaient des batailles et des victoires[204] : il est probable que des praticiens grecs ont mis la main à ces œuvres. Et les plus anciennes figures des divinités gauloises rappellent parfois de si près les vieilles images grecques[205], qu’on peut songer à des modèles empruntés à la Marseille ionienne. Mais ces progrès de l’hellénisme dans le Midi de la Gaule ne seraient peut-être que les dernières vibrations d’un mouvement près de s’éteindre. De toutes parts l’esprit italien pénétrait au delà des Alpes[206]. Narbonne était devenue une grande ville[207], et s’était imposée, par ses résistances victorieuses, au respect des Gaulois[208]. Là affluaient les principales affaires, siégeaient les tribunaux, résidaient les gouverneurs[209] ; elle allait donner son nom à la Province[210]. Autour d’elle, jusqu’à Arles, Port-Vendres et Toulouse, c’était un va-et-vient continu d’officiers, de soldats, de fournisseurs et de convois. En cours de route, on laissait de l’argent, du vin, des mots et des usages venus d’Italie. Les deniers d’argent et les as de bronze se répandaient rapidement les taxes sur le vin se payaient avec de la monnaie romaine[211]. Déjà, les nations indigènes en copiaient les types[212], et l’alphabet latin faisait son apparition sur les pièces gauloises[213]. Soldats et valets d’armée révélaient aux Celtes les noms et les images des dieux italiotes, et leur donnaient la tentation de les adorer[214]. Les chefs qui viennent à Narbonne pour défendre leurs intérêts ceux qui vont à Rome pour se plaindre au sénat, ces cavaliers qui servent au delà des Alpes à côté des légionnaires, ces nobles helviens ou voconces qui ont reçu le droit de cité et portent des noms romains, ces grands seigneurs qui achètent du vin aux marchands[215] ou empruntent aux banquiers, tous s’habituaient à comprendre et à parler la langue de leurs vainqueurs, et, derrière les mots latins, bien des pensées étrangères arrivaient jusqu’à eux. Une sérieuse partie était donc engagée entre Marseille et Narbonne. A vrai dire, il s’agissait d’une chose plus grave que la concurrence entre deux villes de commerce. La question était si la Gaule se convertirait à la vie méditerranéenne sous sa forme hellénique ou sous sa forme latine : et c’est la question qui se posa dans le monde entier depuis la création de l’Italie romaine. Ceux qui réfléchissaient sur l’histoire des deux derniers siècles, pouvaient prédire l’avenir prochain. Chacune des grandes guerres de Rome avait coûté une de ses gloires à la patrie grecque. Tarente avait été brisée après la guerre de Pyrrhus, Syracuse pendant la guerre d’Hannibal, Athènes au temps de Mithridate. Si les dieux n’écartaient pas la loi fatale qui pesait sur l’hellénisme, la guerre des Gaules amènerait la chute de Marseille. |
[1] Des Ours de Mandajors, p. 122 et suiv. ; Histoire générale de Languedoc, 2e éd., I, p. 197 et suiv.
[2] Person, Essai sur l’administration des provinces romaines sous la République, 1877 ; Marquardt, Staatsverwaltung, I, 2e éd., 1881, p. 261 et suiv., etc. ; Mommsen, Staatsrecht, III, I, 1887, p. 615 et suiv. ; Bourgeois, Quomodo provinciarum Romanarum... conditio, etc., Paris, 1885 (thèse) ; Arnold, The Roman System of provincial administration, 2e éd., Oxford, 1906.
[3] C’est la seule chose qui justifierait l’hypothèse, faite en dehors de tous les textes, que la Gaule Transalpine n’aurait été organisée en province qu’en l’an 100, par Marius, consul pour la sixième fois (Zumpt, Studia Romana, p. 25).
[4] Cette extension résulte, entre autres, des textes de César, De b. G., I, 10, 5 ; VII, 8, 2 ; III, 20, 2.
[5] L’incorporation de ce pays à la Province n’est pas hors de doute ; il est fort possible que les Albici de Riez, peut-être vassaux ou clients de Marseille (cf. César, De b. c., I, 34, 4 : Albici, qui in eorum fide [des Marseillais] antiquitus erant), soient restés indépendants.
[6] Ces derniers furent placés peut-être dans la vassalité de Marseille.
[7] Marius, par exemple, parait avoir rencontré, en venant en Gaule par les Alpes (cf. Plutarque, Marius, 13 et 15), moins d’ennuis que César.
[8] Je doute, vu l’hostilité des Salasses, très insuffisamment soumis, que les cols du val d’Aoste, Petit et Grand Saint-Bernard, aient été fréquentés des Romains.
[9] C’est à cette mainmise sur terres indigènes au temps de la conquête, que fait allusion Cicéron (Pro Fonteio, 1, 2) : Ab senatu agris urbibusque multali sunt [à Narbonne en 118 ; puis à Toulouse en 106]. A voir, à Montlaurès, la disparition de débris indigènes et l’absence de ruines romaines, on peut croire qu’il y a eu expropriation des Barbares de la colline et des environs : Montlaurès est près de Narbonne.
[10] Au moins avant 106, cf. note précédente. Le texte de Dion (XXVII, 90) et l’inscription de 47 (C. I. L., XII, 5388) semblent montrer que des colons et une garnison étaient installés dans la ville gauloise même, à Vieille-Toulouse, et les trouvailles de monnaies confirment visiblement ce fait (Ponsan, Bull. de la Soc. arch. du Midi, in-8°, n° 20, 1897, p. 98 et suiv.). J’hésite cependant à croire qu’un castellum n’ait pas été installé, après 106, sur l’emplacement actuel de Toulouse. Cf., sur les origines de Toulouse : Audibert, Diss. sur les origines de Toulouse, Avignon, 1764 (a le premier signalé l’importance de Vieille-Toulouse) ; B[arry], Hist. gén. de Languedoc, n. éd., I, p. 167 et suiv.
[11] Le castellum romain est, ici, en dehors et au pied de la ville indigène.
[12] Dion Cassius, XLVI, 50, 4 : les colons semblent habiter dans la ville. — Malgré l’autorité des mss. β, je ne puis admettre Carcassonne (Carcasone, César, III, 20, 2 ; omis par les mss. α) comme une ville peuplée de citoyens romains en 56. — Si c’est de Valence, Valentin, qu’il est question pendant la révolte des Allobroges, les Romains auraient déjà fondé là une colonie ou tout au moins un castellum à nom latin.
[13] On dut leur laisser leurs oppida ac muros (chez les Helviens, César, VII, 65). Et il n’est pas probable qu’on ait procédé à un désarmement général de la population (cf. César, VII, 65, 2 et 3).
[14] Cela résulte, assez vaguement, de César, De b. G., VII, 77, 14-16. Les cités fédérées étaient immunes ; mais il est possible que l’immunité fut souvent suspendue (Cicéron, Pro Fonteio, 8, 16).
[15] Un ήγεμών chez les Volques Tectosages (Plutarque, Sylla, 4) ; un princeps civitatis chez les Helviens (César, De b. G., VII, 65, 2) ; chez les Allobroges, on mentionne un sénat, et le sénat et le peuple (Plutarque, Cicéron, 18 ; Cicéron, Catilina, III, 4, 10, 11), des principes (César, VII, 64, 7 ; Salluste, Catilina, 41, 2), un Induciomarus dux amplissimus Galliæ (Pro Font., 8, 17 ; 17, 36), un chef de guerre, Catugnatus, de toute la nation, un autre, Adbucillus, qui principatum in civitate multis annis obtinuerat (César, De b. c., III, 59, 1), d’autres qui gèrent amplissimos magistratus (id., 2). Βασιλεύς sur les monnaies de Βιτουκος et de Καιαντολος, peut-être antérieures à 121. Il ne serait pas impossible que la royauté ait été presque partout supprimée par Rome.
[16] Je ne suis pas sûr que les Romains aient aboli les sacrifices humains (Pro Fonteio, 10, 21). Pour le costume, on dit toujours des Gaulois, sagatos braccatosque (Pro Fonteio, 11, 23).
[17] Supposé d’après Salluste et la pratique de César en Gaule.
[18] Note suivante.
[19] Πρότερον μέν ένσπονδον, Dion, XXVII, 90. Le titre a dû leur être enlevé après 106.
[20] Plutarque, Marius, 16 : Συμμάχων (Salyens ou Cavares). — Cf. Mommsen, Staatsrecht, III, p. 716-728 ; c’est ce que Mommsen appelle tolerirte Autonomie.
[21] Je n’ai pu en trouver aucune trace. Sur ces lois de provinces, Marquardt, Staatsverwaltung, I, p. 300-2.
[22] César, De b. G., VII, 77, 16 : Gallia..., perpetua premitur servitute.
[23] De 104 à 100 ? ; Fulvius en 125, Sextius en 124, Domitius en 122, Fabius en 121 : ceux-ci, avant l’organisation de la province ; puis, les généraux des guerres cimbriques, Silanus en 109, Cassius en 107, Cépion en 106 et Mallius en 105. Il semble aussi que Pison en 67, Metellus en 60 et César en 59 aient gouverné la Gaule étant consuls.
[24] Pas après Sylla. Avant Sylla : peut-être C. Cecilius [?], préteur ou propréteur vers 90, peut-être Valerius Flaccus en 83.
[25] Fulvius en 124 ?, Sextius en 123-2, Domitius en 121 et 120 : tous trois, avant l’organisation de la province. Après, Cépion en 105, M. Emilius Lepidus, consul en 78, proconsul, en 77 de la Gaule Transalpine, où il ne se rendit pas (Appien, Civ., I, 107). De même, C. Calpurnius Pison en 66-65, Metellus en 59, et César à partir de 58. — On donna du reste de bonne heure ce titre de proconsul même à des prétoriens : pour la Gaule, L. Manlius en 77. D’après Willems (Sénat, II, p. 571-2), le titre de proconsule serait officiel, de 81 à 52, même pour les gouverneurs qui ont exercé leurs fonctions ex prætura.
[26] On l’appelait du reste couramment prætor (Cicéron, Pro Fonteio, 1, 1 ; 3, 6). Après Sylla : peut-être M. Porcius Caton, vers 78 ou avant (Aulu-Gelle, XIII, 20 [19], 12 ; cf. Willems, Sénat, I, p. 451 ; contra, Lebègue, p. 15) ; Manius Fontéius en 76-74 ; L. Licinius Murena en 64-63 ; C. Pomptinus en 62-61.
[27] Gallia Transalpina, Cicéron, Pro Murena, 41, 89 (en 63).
[28] Cicéron dit de Fontéius, imperare, 3, 6 et 7 : summo cum imperio, Pro Mur., 41, 89 ; imperator, Pro Quinctio, 7, 28 ; præesse, Pro Fonteio, 3, 6. — Il a des legati (au moins deux ?), quelquefois même de rang consulaire, qui l’aident dans l’administration (des routes, Pro Font., 4, 8 ; des impôts, 5, 9 ? ; des levées et de la défense militaire, César, De b. G., VII, 65, 1). — En sous-ordre sont des chevaliers ou des citoyens pour les negotia de détail (installation et direction de bureaux fiscaux), un prœfectus (Cicéron, De orat., II, 66, 265 ?). — Les légats peuvent être des proches parents du gouverneur (frère ; cousin : César, De b. G., VII, 65, 1 ; cf. Pro Fonteio, 4, 8).
[29] J’emploie ce mot, mais en faisant observer que la République n’en eut pas d’équivalent : ce n’est que sous l’Empire qu’apparaît l’expression de præses provinciæ.
[30] César, De b. G., VII, 7, 4-5.
[31] Hommes de guerre : César, De b. G., VII, 1, 1 ; Cicéron, Pro Fonteio, fr. 3, 8 ; de mer : César, III, 9, 1 ; chevaux : Cicéron, ibid., 8, 16.
[32] Vivres : Cicéron, Pro Fonteio, fr. 3, 8 ; 8, 16 ; corvées pour routes : Cicéron, 4, 7, 8 et 9 ; logements de troupes : Cicéron, 3, 6 ; 5, 10.
[33] Voyez cependant Cicéron, 8, 16.
[34] Cicéron, Pro Fonteio, fr. 3, 4 et 8 ; 5, 10 ; et surtout 5, 9 : Itaque Titurium Tolosæ quaternos denarios in singulas uini amphoras portori nomine exegisse; Croduni Porcium et Munium ternos victoriatum, Vulchalone Servæum binos et victoriatum ; atque in his locis secrodunt [Croduni] [Vulchalone] et ab eis portorium esse exactum si qui Cobiomago qui vicus inter Tolosam et Narbonem est, deverterentur neque Tolosam ire vellent; Elesioduluscantum [Elesio Duluscantum = un ou deux noms propres corrompus] senos denarios ab iis qui ad hostem portarent exegissent. — Sur les monnaies, Mommsen, G. d. R. M., p. 399. — Voici comment, sous réserves, j’interprète ce texte : il s’agit des droits payés par les vins arrivés à Narbonne et qui en sortent à destination de l’intérieur ; les droits s’échelonnent sur la route de Narbonne à Toulouse et au delà : 1° à Crodunum [Segodunum, Rodez, est impossible, le pays était indépendant ; il s’agit de la 1re étape après Narbonne], 3 victoriats (1 denier ½) ; 2° à Vulchalo [?], 2 victoriats : ces deux droits payés seulement pour les vins destinés à Cobiomachus [Hebromagus ? Bram, cf. Itinéraire de Jérusalem, p. 551, magus = marché], marché à gauche de la route, à mi-chemin de Narbonne à Toulouse ; 3° ceux pour Toulouse paient, à Toulouse même, 4 deniers ; 4° à Elesium [= Elusio, Itinéraire de Jérusalem, p. 551, Font d’Alzonne près de Castelnaudary, point de départ, sur la route de Narbonne à Toulouse, de la route vers les Butènes et le haut pays ? je crois bien que c’étaient les vins destinés aux Butènes qui étaient visés, cf. fr. 3, 4], douane de sortie, 6 deniers pour les vins destinés à la Gaule indépendante. — Sur ces noms de lieux, cf., en dernier lieu, Histoire de Languedoc, I, p. 134 et 210.
[35] Aucun texte précis pour la Gaule sur la juridiction criminelle du gouverneur. — Sur la justice civile, Cicéron, Pro Quinctio, 4, 15 ; 12, 41. — Sur la justice administrative, Hirtius, De b. G., VIII, 46, 5 (publicas controversias). — Il semble qu’il y eut dans la Gaule Transalpine des circonscriptions judiciaires, des lieux d’assises (conventus), où se rendait successivement le gouverneur (Hirtius, l. c.) : Narbonne, Toulouse, Vienne, Aix ? Mais pour certaines affaires civiles, on venait à. Narbonne, noème de l’autre bout de la Province (Cicéron, l. c.).
[36] Cicéron, De republica, III, 9, 16 : Nos vero justissimi homines, qui Transalpinas gentes oleam et vitem serere non sinimus, quo pluris sint nostra oliveta nostræque vineæ. La défense, sans doute, a été permanente sous la République. — Je crois que c’est par anachronisme que Cicéron place ces paroles dans la bouche de Scipion Émilien : car il est bien difficile de mettre la mesure avant 125 (comme le fait Mommsen. II, p. 160).
[37] Pro Fonteio, 1, 2 ; 2, 4 ; 3, 5 ; 11, 24 (coloni).
[38] Saltus : Pro Quinctio, 25, 79 ; 29, 90.
[39] Negotiatores : Pro Font., 1, 1 et 2 ; 3, 5 ; 10, 22 ; societas pour l’exploitation carum rerum quæ in Gallia comparantur, Pro Quinctio, 3, I1 ; de re Gallicana, id., 4, 15 ; 6. 23 ; 11, 38 ; 25, 79 ; 29, 90 ; 31, 98 (il s’agit en particulier de l’exploitation de domaines).
[40] Publicani : Pro Fonteio, 1, 2 ; 16, 36.
[41] Negotiatores : Pro Fonteio, 1, 1 et 2 ; 3, 5 ; 5, 9 et 10 ; 10, 22 ; 16, 36 ; Pro Murena, 20. 42 ; Salluste, Catilina, 40, 2.
[42] Aratores, pecuarii : Pro Fonteio, 1, 2 ; 16, 36 ; agricolæ, 16, 36.
[43] Pueros venales ex Gallia : Cicéron, Pro Quinctio, 6, 24.
[44] C’est tout ce monde que Cicéron appelle (Pro Fonteio, 1, 3) numerus civium Romanorum atque hominum honestissimorum [les non Romains] ; cf. 3, 5.
[45] Voyez le rôle de P. Clodius en Gaule.
[46] Cicéron, Pro Fonteio, 2, 2 ; 8, 16. La mention des villes supprimées (urbibus multati, 2, 2) est particulièrement intéressante : peut-être Toulouse.
[47] Supplicium injustum (Salluste, Catilina, 49, 2), injuriæ (Cicéron, Divin. in Cæcil., 20, 67).
[48] Cicéron, Pro Fonteio, fr. 3, 4 et 8 ; 2, 3 ; 5, 9 et 10 ; 4, 7 et 8.
[49] Cicéron, De orat., II, 66, 265 (en Transalpine ?).
[50] Cicéron, Pro Fonteio, 4, 7.
[51] Ces patrons sont d’ordinaire des Domitii ou des Fabii.
[52] Procès de Fontéius en 69 ; démarches des Allobroges en 63 ; procès de Silanus après 103 ; de Pison en 63 : peut-être le procès de Cépion après 106.
[53] Cf. Belot, Histoire des chevaliers romains, II, p. 293 et suiv.
[54] Cicéron, Pro Fonteio, 10, 20.
[55] Pro Fonteio, 1, 2 ; 2, 3, 4 et 5 ; 3, 5 et 7 ; 10, 22 ; 11, 23 ; 12, 26.
[56] Cf. Willems, Le Sénat romain, II, p. 562 et suiv.
[57] Zumpt, St. R., p. 26 et suiv. ; Herzog, p. 64 et suiv. ; Desjardins, II, p. 329 et suiv. ; Lebègue, p. 9 et suiv.
[58] Voici ceux dont nous connaissons les noms : Cecilius ? vers 90, Valerius Flaccus en 83, Caton en 78 ?, Lepidus en 77, Manlius en 77 ?, Fontéius en 76-74, Calpurnius Pison en 67-65, Murena en 64-63, Pomptinus en 62-61, Cecilius Metellus en 60-59, César à partir de 59.
[59] César, De b. G., I, 47, 4 ; VII, 65, 2. Vers le même temps, le Marseillais Ariston est fait citoyen par Sylla (Cicéron, Pro Balbo, 22, 50). Il est probable que cet octroi, par le gouverneur, du titre de citoyen romain (octroi de plus en plus fréquent depuis Marius) est la conséquence de services rendus à la guerre ; cf. Mommsen, Staatsrecht, III, p. 135 ; Bullettino della Commissione arch. comunale di Roma, 1909, p. 189 et suiv.
[60] Tite-Live, Ép., 73 : C. Cæcilius [var. Cælius] in Gallia Transalpina Saluvios rebellantes vicit.
[61] Granius Licinianus, p. 31, Flemisch : Valerius Flaccus ex Celtiberia et Gallia (triumphavit) en 80. Il s’agit de C. Valerius Flaccus, qui fut gouverneur (sans avoir été consul) en 83 (Cicéron, Pro Q., 6, 24 et 7, 28 ; César, De b. G., I, 47, 4). Herzog (p. 65) conclut d’un passage du Pro Quinctio (7, 29), qu’il partit avant septembre 83, peut-être pour combattre les Celtibères. — Il n’est pas impossible, comme l’a supposé Mommsen (II, p. 332), que ce soulèvement soit la conséquence du passage de Sertorius (si on place ce passage en 83). Il me paraît plus probable qu’il lui est antérieur, et que Sertorius, loin de favoriser la révolte des indigènes, eut plutôt à les contenir ; cf. Julius Exupérantius (éd. Bursian, Zurich, 1868) : Ei (Sertorius en 83) mandatum est ut transiens res in Gallia Transalpina componeret. La campagne de Flaccus se rapporte au même ordre de faits.
[62] Entre autres : von Bienkowski, Kritische Studien, etc., Wiener Studien, XIII, 1891 ; Stahl, De bello Sertoriano, Erlangen, 1907.
[63] Depuis 88, Tite-Live, Ép., 77 ; cf. Mommsen, Staatsrecht, III, p. 430 et suiv.
[64] Lex Pompeia (du père de Pompée), Asconius in Pisonianam, p. 3, Kiessling.
[65] Il ne semble avoir rencontré d’autre difficulté que l’obligation de payer tribut aux Barbares des montagnes (Alpes Cottiennes ?) pour s’assurer le passage (Plutarque, Sertorius, 6). — Sur la date, en dernier lieu, Stahl, p. 35-36.
[66] Sylla envoya contre lui, sans doute par la Gaule (en 82 ou 81 ?), C. Annius, proconsul en Espagne : Annius dut camper longtemps au pied des Pyrénées (à Elne ?) avant de pouvoir les forcer (Plutarque, Sertorius, 7).
[67] Plutarque, Sertorius, 10 et 11.
[68] Plutarque, Sertorius, 25 ; Appien, Iberica, 101.
[69] Cf. Plutarque, Sertorius, 22-24.
[70] Sertorius, 14.
[71] Sertorius, 11.
[72] Plutarque, Sertorius, 12 ; id., 20.
[73] Cf. Tite-Live, Ép., 52 et 54 ; Appien, Iberica, 61 et suiv.
[74] Sertorius, 14.
[75] Sertorius, 14.
[76] Πόλιν μεγάλην, Sertorius, 14.
[77] Cf. Plutarque, Sertorius, 22.
[78] Plutarque, Sertorius, 10, 11, 22.
[79] Plutarque, Sertorius, 4.
[80] César, De b. G., III, 23, 3-5 ; 26, 6.
[81] Cicéron, Pro Fonteio, 2, 4 ; 16, 36 (obsidione hostium).
[82] Cicéron, Pro Fonteio, 5, 10.
[83] Cela semble bien résulter du Pro Fonteio, 1, 2, où il est question de plusieurs peuples.
[84] Textes de la deuxième note ci-dessous. Il est dit proconsul, mais sans avoir été consul.
[85] Si, comme il semble d’après César, il a eu surtout affaire avec les Sotiates de Sos (III, 21, 1), Manlius a dû chercher à gagner Toulouse par la route d’Oloron, Aire, Sos et Agen ; mais tout cela est bien hypothétique.
[86] Sur sa campagne d’Espagne : Tite-Live, Ép., 90 ; Orose, V, 23, 4 (var. Manilius) ; Plutarque, Sertorius, 12 (Λόλλιον, vulg.) : il résulte bien de ces textes que sa défaite fut la cause de l’envoi de Pompée. Sur sa défaite en Gaule : César, De b. G., III, 20, 1 : In his locis [Aquitania]... ubi paucis ante annis L. Valerius Præconinus legatus, exercitu pulso, interfectus esset [impossible à dater, mais peut-être contemporain de la guerre de Sertorius], atque unde L. Manlius (var. Mallius) proconsul, impedimentis amissis, profugisset. — Herzog (p. 65) et Lebègue (p. 16) placent le proconsulat de Manlius en 77 ; Stahl (p. 48) préfère 78.
[87] Strabon, III, 4, 6.
[88] Cf. Cicéron, Pro lege Manilia, 4, 9-10.
[89] Voyez le Pro lege Manilia de Cicéron, 4, 10.
[90] Il était privatus ; Tite-Live, Ép., 91 ; Plutarque, Pompée, 17 ; Valère Maxime, VIII, 15, 8 ; Cicéron, Pro lege Manilia, 21, 62 ; Philippiques, XI, 8, 18.
[91] Cf., dans le Pro Fonteio, 2, 4, le ex decreto Pompeii.
[92] Salluste, Epist. Pompei, 4 (Hist., fr., II, 98, Maurenbrecher).
[93] Les textes sur le passage des Alpes par Pompée sont, outre ceux cités plus bas : Salluste, Epist. Pompei, 4, Hist., fr., II, 98, Maurenbrecher ; Appien, Civ., I, 109 ; Varron apud Servius ad Én., X, 13, p. 384, Thilo. Étant donné : 1° que le pas d’Hannibal était, semble-t-il, montré sur la route du Cenis ; 2° que la route de la vallée d’Aoste et du Petit Saint-Bernard était la plus septentrionale vers la Transalpine, partant la plus utile à l’Empire romain, comme le prouve la construction ultérieure de la grande route de Milan à Vienne et Lyon ; 3° que le chemin était en effet nouveau pour les marchands, habitués de longue date au Genèvre ; 4° qu’Appien n’aurait pas pensé aux sources du Rhône si Pompée était passé plus bas que le Cenis ; 5° que c’est surtout sur cette route que se trouvaient les nations belliqueuses, Salasses par exemple : j’incline à croire que Pompée est monté par la vallée d’Aoste et le Petit Saint-Bernard. L’expédition de Pompée a pu servir en partie à refouler les Salasses, mal contenus par la fondation d’Ivrée (Strabon, IV, 6, 7). — Cf. Mommsen, Rœm. G., III, p. 29 (Genèvre), Stahl, p. 56-60 (id.).
[94] Les Anciens ont toujours attaché une grande importance à la campagne de Pompée en Gaule : Cicéron, Pro lege Manilia, 11, 30 : Gallia, per quam legionibus nostris in Hispaniam iter Gallorum internecione patefactum est ; Lucain, VIII, 808 : Alpina bella ; Salluste, Ép. Pompei, 5 : Recepi Galliam ; Cicéron, ibid., 10, 28 : Transalpinum bellum ; Pline, III, 18 : DCCCLXVI oppida ab Alpibus ad fines Hispanie ulterioris in dicionem eb se redacta, portait le trophée des Pyrénées.
[95] Note précédente. — Il y a dans les fragments de Salluste (II, 22, Maurenbrecher) un texte énigmatique : Narbone per concilium Gallorum, d’où on a conclu (Maurenbrecher) que Pompée a hiverné à Narbonne en 77-6 et y a convoqué l’assemblée des chefs gaulois (peut-être en 74-3). Il est possible qu’il s’agisse de Fontéius ou de toute autre chose.
[96] Il y eut, semble-t-il, des combats dans la région du Pertus ; Salluste, Ép. P., 5 : Recepi... Pyrenæum, Lacetaniam, Indigetes.
[97] Ce qui suit, uniquement d’après le plaidoyer de Cicéron, Pro Fonteio. Voyez, en dernier lieu, l’édition de C. F. W. Müller, Leipzig, 1885 (cf. adnot., p. V-IX), les fragments publiés, avec commentaire, par Niebuhr, 1820, et Schneider, Questionum in Ciceronis pro M. Fonteio orationem capita quattuor, 1876 (thèse de Leipzig).
[98] Les manuscrits de Cicéron donnent M. ; Willems (Le Sénat, I, p. 452), après bien d’autres, corrige en M’ (Manias) et croit qu’il s’agit d’un Fonteius Capito et du M’ Fonteius C. f., questeur monétaire en 85.
[99] Fontéius gouverna la Gaule pendant trois ans (10, 22) ; l’une de ces années, Pompée y hiverna (3, 6), et l’on sait par Tite-Live que ce fut en 74-73 (Ép., 93). En quelle année se passe le reste du gouvernement de Fontéius ? Je crois qu’il suit de très peu le passage de Pompée (77-76), vu que Fontéius eut encore de nombreuses guerres à soutenir (2, 2 et 3), et qu’il dut procéder ex decreto Pompei (2, 4), c’est-à-dire exécuter des mesures édictées par Pompée lors de son passage ; et il est également probable que les envois de blé à l’armée d’Espagne (Pro Fonteio, 2, 3) sont ceux que Metellus reçut de Gaule en 76-5 (Salluste, Ép. P., 9). Dans le même sens, Herzog, p. 66, Stahl, p. 61-3. — Contra : Niebuhr, p. 43-5 (en 75-73), Willems (I, p. 452), Zumpt, p. 6 (en 73-71), Schneider (p. 18 et suiv.), celui-ci appuyant sur le fait que Cicéron ne parle pas de l’hivernage en Gaule de Metellus en 75-74.
[100] Cum ipso M. Fonteio ferrum ac manas contulerunt, 1, 2 ; 2, 3 ; 3, 4.
[101] Pro Fonteio, 5, 10.
[102] Pro Fonteio, 2, 4. Peut-être aussi contre les Helviens.
[103] Pro Fonteio, 2, 4. Il s’agit sans doute des terres des Helviens et des Volques Arécomiques attribuées aux Marseillais (César, De b. c., I, 35, 4) : ce n’est pas, évidemment, l’ensemble du territoire, mais quelques domaines publics confisqués aux cités (cf. César, De b. c., III, 59, 2).
[104] Pro Fonteio, 1, 2 ; 2, 3.
[105] Pro Fonteio, 1, 2 ; 2, 3 et 4.
[106] Pro Fonteio, 2, 3 ; fr. 3, 8 (Salyens et Cavares ?).
[107] Pro Fonteio, 1, 2 ; 2, 3 et 4.
[108] Pro Fonteio, fr. 3, 8 ; 2, 3.
[109] Pro Fonteio, fr. 3, 8 ; 2, 3 : sans doute en 76-75, cf. Salluste, Epist. Pompei, 9.
[110] En 75-4, hivernage de Metellus en Gaule (Plutarque, Sertorius, 21), et cela, malgré une année de disette (Salluste, Ép. P., 9) ; en 74-3, de Pompée (Tite-Live, Ép., 93), malgré la continuation de la disette (Salluste, Hist., fr., III, 46, Maurenbrecher).
[111] Pro Fonteio, 3, 6 ; 4, 7 et 8.
[112] Pro Fonteio, fr. 3, 4 et 8 ; 2, 3.
[113] Pro Fonteio, 4, 7 et 8.
[114] Pro Fonteio, fr. 3, 8 ; 2, 3.
[115] Pro Fonteio, 4, 7 ; 1, 1 ; 1, 2 et 2, 3 (?).
[116] Il achète une maison à Naples en 68, Cicéron, Ad Atticum, I, 6.
[117] Oppressam esse ære alieno Galliam.... Nemo Gallorurn sine cive Romano quidquam negotii gerit ; nummus in Gallia malus sine civium Romanorum tabulis commovetur. Pro Fonteio, 1, 1. Je ne serais pas étonné que Fontéius ait décidé que certains contrats se feraient par écrit, et suivant la loi romaine.
[118] Cf. Dictionnaire des Antiquités, II, p. 1226.
[119] Pro Fonteio, 2, 4 et 5 ; 3, 6 ; 10, 22.
[120] Plutarque, Sertorius, 25-6 ; Pompée, 20 ; Tite-Live, Ép., 96.
[121] Plutarque, Sertorius, 27 ; Tite-Live., Ép., 96.
[122] In fame nihil non experta Calagurris, Florus. II, 10 [III, 22], 9 ; Valère Maxime, VII, 6, ext., 3.
[123] Plutarque, Pompée, 20.
[124] Innocentia eximius, sanctitate prœcipuus, Velleius, II, 29 ; Cicéron, Pro lege Manilia, 23, 66 et suiv. ; 13, 36 et suiv.
[125] Velleius, II, 29.
[126] Lucain, I, 131 et suiv. ; Plutarque, Pompée, 1.
[127] Voyez le très beau portrait de Velleius, II, 29, comparable à ceux de Lucain (I, 125 et suiv., IX, 190 et suiv.).
[128] Surtout dans l’Espagne Citérieure.
[129] Pompeium... de cælo delapsum, Cicéron, Pro l. M., 14, 41.
[130] Plutarque, Sertorius, 27 ; Pompée, 20.
[131] Plutarque, Pompée, 21.
[132] Cf. César, De b. c., I, 60, 1.
[133] Πομπέλων, ώς άν Πομπηιόπολις, Strabon, III, 4, 10 ; les mss. ont plus haut Πομβιαίλωνα, qui rappelle de plus près Pompeiilo.
[134] D’après les Pompeii des inscriptions, C. I. L., II, p. 1069-70 (suppl.).
[135] Supposé d’après les textes de la note suivante.
[136] César, De b. c., I, 29, 3 (Hispania citerior) maximis beneficiis Pompei devincta ; I, 61, 3 : Civitates... magnis affecta beneficiis eum diligebant.
[137] Cicéron demande l’envoi de Pompée en Orient pour y appliquer une politique semblable à celle qu’il a inaugurée en Espagne (Pro lege Manilia, 22, 65 et 64) : Quanto in odio simus apud exteras nationes, etc. Tout ce passage est capital pour montrer quelle place à part on fit à Pompée parmi les maîtres de l’Empire : Nunc imperii vestri splendor illis gentibus lucet (14, 41) ; et il est très beau.
[138] Dion Cassius, XII, 24, 3 ; Salluste, H., fr., III, 89.
[139] Il est possible qu’une partie des actes de Pompée dont nous parlons ici datent de son hivernage en Gaule en 74-73.
[140] César, De b. c., I, 35, 4.
[141] Le grand-père de Trogue-Pompée, sans doute pour services rendus dans la guerre de Sertorius : Justin, XLIII, 5, 11. Autre Gaulois fait sans doute citoyen par Pompée : César, De b. G., V, 36, 1.
[142] Salluste, Hist., fr., III, 88, Maurenbrecher.
[143] Saint Jérôme, Adv. Vigilantium, 4, p. 389, Migne, P. L., XXIII, c. 342 : De latronum et convenarum natus est semine, quos Cn. Pompeius edomita Hispania et ad triumphum redire festinans in [vulg. de] Pyrenæi jugis deposuit et in unum oppidum congregavit, unde et Convenarum urbs nomen accepit... De Vectonibus, Arrebacis, Celtiberisque. — Le nom de Lugdunum (Strabon, IV, 2, 1), qui est gaulois, est peut-être antérieur, et il est possible que le pays, au moins jusqu’à Montrejeau et à l’entrée de la vallée de Luchon (Onesii), ait été enlevé aux Volques Tectosages. — Le nom de Convenæ, malgré son apparence latine et le rapport qui existe entre lui et l’origine de la peuplade, est peut-être un nom indigène, comme celui des Consoranni, Consuarani, du Conserans (Pline, IV, 108 ; III, 32). — Il n’est pas impossible que le passage de César, fugitivis ab saltu Pyrenæo prædonibusque (De b. c., III, 19, 2), se rapporte à ce fait et non pas, ce qui parait d’abord plus vraisemblable, à un épisode de la campagne de Lérida.
[144] Cf. Pline, III, 32. — Je ne puis dire si la vallée de la Neste a été ou non rattachée aussi à la Province.
[145] Cf. C. I. L., XIII, 939, 943, 1004-8 : peut-être quelque chef pétrocore servit-il comme auxiliaire près de lui, et reçut-il ensuite le droit de bourgeoisie.
[146] Appien, Civilia, I, 119 ; Plutarque, Crassus, 11.
[147] Cf. Rathke, De Romanorum bellis servilibus, Berlin, 1904, p. 88 et suiv.
[148] Plutarque, Crassus, 8 (parle de Gaulois), 9 (un corps de Germains) ; Orose, V, 24, 1 (Gaulois), 6 (Germains et Gaulois) ; Tite-Live, Ép., 97 (Gaulois et Germains) ; Frontin, II, 5, 34 (id.) ; Salluste, Hist., fr., III, 96 (id.). César (De b. G., I, 40, 5) fait entendre qu’il s’agit de Cimbres et de Teutons ; il pouvait du reste y avoir des Helvètes (cf. p. 64 et 91). L’hypothèse de Müllenhoff (II, p. 156-7), qu’il s’agit d’esclaves razziés par les marchands, me parait peu soutenable. — Comme noms gaulois ou germains : Crixus (Salluste ; Orose ; Florus, II, 8, 3 ; Tite-Live, Ép., 95 et 96 ; Ampelius, 45 ; Appien, I, 116) ; Castus (Frontin, Plutarque, 11) ; Gannicus, Cannieus, Καννίκιος (Frontin ; Tite-Live ; Plutarque, 11). Comparez les sacrificatrices de ces Germains de Castus (Plutarque, id. ; Salluste, H., fr., IV, 40) à celles des Cimbres.
[149] Plutarque, Crassus, 9.
[150] Plutarque, Crassus, 9 ; Orose, V, 24, 3.
[151] Appien, Civilia, I, 120.
[152] Plutarque, Crassus, 10-11 ; Florus, II, 8, 12 et suiv. ; Tite-Live, Ép., 97 ; Appien, Civ., I, 118-120.
[153] Plutarque, Crassus, 11 ; Pompée, 21.
[154] Plutarque, Crassus, 11 ; Pompée, 21.
[155] Plutarque, Pompée, 26 ; Cicéron, Pro lege Manilia, 12, 34-5.
[156] Plutarque, Pompée, 39, 42.
[157] Velleius, II, 31.
[158] É. Lacour, Ventia et Solonion, R. arch., 1860, II, p. 396 et suiv. ; Guillemaud, Ventia et Solonium, 1869 (extrait de la Revue militaire française) ; Ducis, Revue Savoisienne, XIII, 1872, p. 69 et suiv. ; Ed. Blanc, Vote sur Ventia, R. arch., 1876, I, p. 268 et suiv.
[159] L’accusateur fut M. Plætorius (12, 26 ; cf. Schneider, p. 28 et suiv.), qui fut aidé par M. Fabius, subscriptor de l’acte d’accusation (12, 26), sans doute un descendant de l’Allobrogique. Le chef de l’ambassade fut Indutiomarus (8, 17 et 19 ; 12, 26 ; 17, 36), dux Allobrogum ceterorumque Gallorum (17, 36) : je ne comprends pas pourquoi on supprime ce dernier passage (Bakius, Scholica Hypomnemata, V, 1862, p. 181, et d’autres), car il y avait d’autres envoyés que ceux des Allobroges (Pro Fonteio, 8, 16).
[160] La date semble résulter de ce que le procès eut lieu (Pro Fonteio, 12, 26) après la lex Aurelia judiciaria, qui est de 70 (Belot, II, p. 275 et suiv.), et d’un passage de Julius Victor, p. 400, Hahn. Cf. Schneider, p. 27 et suiv. L’action fut intentée en vertu de la lex Cornelia de repetundis.
[161] Pro Fonteio, 1, 2 ; 2, 3 et 4 ; 3, 5 ; 8, 16 ; 9 et 10, 20-22 ; 11, 23-4. — Cf. de La Ville de Mirmont, Cicéron et les Gaulois (Revue celtique, XXV, 1904), p. 163 et suiv.
[162] C’est ce qu’on conclut d’ordinaire du fait qu’il acheta une maison à Naples : mais il pouvait y être en exil, Naples étant sans doute encore ville libre et alliée (Cicéron, Pro Balbo, 8, 21).
[163] C’est vers ce temps-là qu’il faut placer le gouvernement de la Gaule par C. Calpurnius Piso. Il semble l’avoir exercé d’abord comme consul en 67 (Dion Cassius, XXXVI, 37, 2, Boissevain), et c’est alors qu’il eut des démêlés avec Pompée : celui-ci avait été investi en 67 de l’imperium maritime, avec M. Pomponius comme légat (Appien, Mithr., 95). Pison refusa aux légats de Pompée le droit de lever des troupes dans la Gaule Narbonnaise (Dion, l. c.). Il garda son gouvernement comme proconsul en 66 et sans doute en 65, et eut, semble-t-il, à pacifier les Allobroges (Cicéron, Ad Att., I, 1, 2 ; 13, 2). En 63, il fut accusé pour ses méfaits comme gouverneur, défendu par Cicéron, et acquitté (Salluste, Catilina, 49, 2 ; Cicéron, Pro Flacco, 39, 98).
[164] Mortuorum testamenta conscripsit, pupillos necavit, nefariasque cum multis scelerum pactiones societatesque conflavit ; il s’agit de P. Clodius, qui vint en Gaule avec L. Licinius Murena, préteur en 65, gouverneur en 64 (Cicéron, De haruspicum responsis, 20, 42). On a eu tort d’en faire le questeur de Murena. Cf. Drumann, n. éd., II, p. 175.
[165] Cicéron, Pro Mur., 20, 42 : In Gallia, ut nostri homines desperatas jam pecunias exigerent, æquitate diligentiaque perfecit ; 41, 89. En 63, il semble qu’il gouvernât encore la Gaule, où il laissa son frère C. Murena pour légat (Salluste, Catilina, 42, 3, où citerioris est peut-être à corriger en ulterioris, Pro Mur., 41, 89).
[166] Miseriis suis remedium mortem exspectare, Salluste, Catilina, 41, 3 ; les Allobroges, en 63, publice privatimque ære alieno oppressos, id., 40, 1 ; Plutarque, Cicéron, 18.
[167] L’envoi de cette mission parait avoir coïncidé avec des troubles dans la Province, provoqués sans doute par les agents de Catilina (Salluste, Catilina, 42). Plutarque (Cicéron, 18) parle de deux chefs.
[168] Il semble que ce fut un patron ordinaire de la cité, Q. Fabius Sanga, cujus patrocinium civitas plurimum utebatur (Salluste, Catilina, 41, 4). Il est possible que ce soit Q. Fabius Maximus, le petit-fils de l’Allobrogique (du Rieu, De gente Fabia, p. 422 et suiv. ; contra, Willems, I, p. 511) ; en tout cas, c’est un de ses descendants. Je me demande si Sanga n’est pas un nom celtique, tiré d’un lieu voconce ou allobroge (cf. Lucain, I, 432).
[169] Salluste, Catilina, 40, 3 : Senatum, quod in eo auxili nihil esset.
[170] Salluste, Catilina, 40, 3.
[171] Salluste, Catilina, 40-41 ; Dion, XXXVII, 34 ; Plutarque, Cicéron, 18 ; Cicéron, Catilina, III, 1, 4 ; 6, 11 ; 9, 22.
[172] Salluste, Catilina, 41, 44-45 ; Plutarque, Cicéron, 18 ; Cicéron, Catilina, III, 1, 4 ; 3, 8 ; 5, 10 et 11 ; etc.
[173] Salluste, Catilina, 50, 1 ; Cicéron, Catilina, IV, 3, 5. Cf. les justes remarques faites par de La Ville de Mirmont, p. 171-2.
[174] Tout ce qui suit est emprunté à Dion Cassius, la seule source que nous possédions sur la guerre de Pomptinus (XXXVII, 47-48). Des mentions très brèves ailleurs : Cicéron, De prov. cons., 13, 32 ; Scholia Bobiensia in Vat. (Cicéron, éd. Orelli, V, 11, p. 323 = p. 121, Hildebrandt) ; Tite-Live, Ép., 103 : César, De b. G., VII, 64, 7.
[175] La guerre est racontée par Dion à la date de 61. Elle semble être résultée de la conjuration : Cicéron, De prov. cons., 13, 32.
[176] Cf. Dion, XXXVII, 49 ; Plutarque, Pompée, 43.
[177] Dion, XXXVII, 47, 3.
[178] Dion Cassius, XLVI, 50, 4. Il ne peut s’agir que de la guerre de Pomptinus : 1° c’est la seule guerre allobrogique importante dont il soit question depuis 118 ; 2° cette guerre fut suivie presque immédiatement de l’arrivée de César dans le pays de Lyon, ce qui explique pourquoi les Romains ont préféré y rester ; 3° les mesures prises par César dans le Valais s’expliquent par la présence de marchands à Lyon. Dans le même sens, Zumpt, Commentationes, I, p. 370, etc. — Jullien (Le Fondateur de Lyon, 1892, p. 111-3) a supposé qu’il s’agissait de colons envoyés à Vienne par César. Mais (remarques de Hirschfeld, C. I. L., XIII, p. 249) il n’est nulle part question de colons de ce genre, et le ποτέ de Dion rappelle un fait ancien.
[179] Dion, XXXVII, 47, 1.
[180] Ούεντίαν, Dion, 47, 2 : la proximité de l’Isère, qui parait être au nord de la localité, fait songer à Valencia (Heller, Philologus, XXI, 1864, p. 150) plutôt qu’à Vienna. Valence appartenait aux Segovellauni, qui, sans doute, firent cause commune avec les Allobroges (cf. Dion). Il faut cependant reconnaître, contre l’hypothèse de Valence, que le nom est romain, et la position point très forte : s’agirait-il d’un poste romain établi là et enlevé par les révoltés ? — L’antique hypothèse de Vence doit être complètement abandonnée. — On a placé Ventia à Vinay (de Valois, p. 529), à Saint-Nazaire dans le Royans (Lacour, p. 405 ; Arnaud, Essai sur... l’ancien Dauphiné, Grenoble, 1905, p. 139), à Saint-Donat au nord de Romans (Guillemaud, p. 66 et suiv.), à Saint-Paul-lès-Romans, à Vence près de Grenoble (Walckenaer, I, p. 197), non loin de là, au rocher de Cornillon près de Saint-Egrève sur la Vence (Maté, Mém. lus à la Sorbonne en 1861, Hist., 1863, p. 294), etc.
[181] Pomptinus parait s’être installé dans un camp retranché, peut-être à Orange, pour de là, sans doute, surveiller tout le Midi.
[182] Le légat, Mallius Lentinus, assiégea Valence, qui fut délivrée par les gens de la campagne (autres que les Allobroges). Il se borna alors à piller le pays.
[183] Dion parle τοΰ πλήθους τών πλοίων qui servirent au passage. Le légat guettait les ennemis dans ύλώδους χωρίου qui dominait le fleuve à l’endroit de la traversée (à Châteauneuf-d’Isère ?).
[184] L. Marius et Servius Galba, Dion, XXXVII, 48, 1.
[185] Σολώνιον πόλιν, Dion, 48, 1 ; ad Solonem, Tite-Live, Ép., 103. C’est évidemment le principal lieu de refuge des Allobroges, Vienne étant surtout leur port. L’emplacement est absolument douteux : je ne crois pas cependant qu’il faille trop s’éloigner du Rhône. Il s’agit d’une ville forte dominée par une citadelle dont les Romains s’emparèrent d’abord ; la ville elle-même était bâtie en bois, elle brûla en partie pendant le siège. — Les deux hypothèses les plus plausibles, sur l’emplacement de Solonium, sont : 1° la hauteur de Salagnon dans Saint-Chef près Bourgoin (Guillemaud, p. 102 et s.) ; cf. les trouvailles de pièces au cavalier faites dans cette région, et peut-être enfouies lors de cette guerre (Blanchet, n° 125) ; 2° Montmiral près de Saint-Marcellin (Lacour, p. 411). — Je ne peux cependant exclure l’hypothèse d’une des collines (p. ex. le mont Salomon) dominant Vienne (comme Entremont domine Aix). — Autres : La Sône sur l’Isère (de Valois, p. 529), Saillans (Chorier, p. 284 ; Arnaud, p. 141), Scillonnaz dans l’Ain (Walckenaer, I, p. 108), Solaise (Maté, p. 293).
[186] Dion, XXXVII, 48.
[187] Τά λοιπά ράον, Dion.
[188] Cf. César, De b. G., VII, 65, 3.
[189] Cf. note suivante.
[190] Pro Fonteio, 2, 4 (honores amplissimi décernés à Fontéius lors de sa visite à la ville).
[191] César, De b. c., I, 35, 4 : Cn. Pompeium et C. Cæsarem, patronos civitatis, quorum alter agros Volcarum Arecomicorum et Helviorum publice iis concesserit, alter bello victos Sallyas attribuent vectigaliaque auxerit : il peut s’agir de domaines publics enlevés par Rome aux Salyens, soit vers 122, soit plutôt vers 90 ou 83, et attribués plus tard par César aux Marseillais ; il faut cependant remarquer que les mss. ne portent pas Sallyas, mais Gallias. — On a parfois rapporté à Pompée Sallyas et à César les autres concessions (en dernier lieu, Stahl, p. 60) : ce n’est pas impossible.
[192] Tite-Live, XXXVII, 54, 21-2 ; Cicéron, Pro Flacco, 26, 63 ; De rep., I, 27, 43.
[193] Un trésor de bronzes marseillais se trouve renfermer des monnaies de la République romaine (Blanchet, n° 23), ce qui ne se produit pas dans les trésors d’oboles ou de drachmes (n° 1, 2, 3, 59, 62, 101, 123, 249, 250, 251). Autres arguments présentés en faveur de l’âge récent du monnayage de bronze : 1° Fauris de Saint-Vincens parle d’une pièce [neuve ? Laugier l’affirme, Fauris ne le dit pas] trouvée dans un mausolée romain d’Aix (Notice, an VIII, p. 17) ; 2° Laugier (Les Monnaies massaliotes, p. 41-2) parle de monnaies trouvées à Carthage : je doute que les Marseillais y aient commercé avant 200 ; 3° Blanchet (p. 238) indique, pour des petits bronzes, des analogies avec des monnaies du 1er siècle ; 4° on signale des bronzes à fleur de coin dans des tombes du temps des Antonins (?) ; Fiessinger, Les Fouilles du Brusq et les petits bromes de Marseille, Toulon, 1898, p. 33.
[194] Laugier, p. 32 et suiv. ; Cabinet des Médailles, n° 1475 et suiv., 1922 et suiv. Ce type va depuis de grands bronzes (17 gr. 14) jusqu’à de très petits (1 gr.). — Types particuliers, plus récents, où le taureau est remplacé par un dauphin, une galère, un caducée (Laugier, p. 39 ; Cab., n° 2083 et suiv.).
[195] Laugier, p. 39 et suiv. ; Cab., n° 1883 et suiv. De 10 gr. 06 à 5 gr. 87. Les petits bronzes à la tête de Minerve... dénotent une décadence artistique considérable, ceux surtout qui ont l’aigle au revers [Cab. des Méd., n° 1970-2002] ; Laugier, p. 41 ; cf. de La Saussaye, p. 81 et s. Ce type est évidemment postérieur au précédent (Blanchet, p. 236). — Types particuliers, où le trépied est remplacé par la galère, le dauphin, le lion (Laugier, p. 42-3 ; Cab., n° 2003 et suiv., 2089 et suiv.).
[196] Strabon, IV, 1, 5.
[197] Par exemple : Cicéron, Pro Flacco, 26, 63 (L. Valerius Flaccus, questeur en Espagne vers 72, s’arrête à Marseille).
[198] Dion, XL, 54, 3 : Τρίγλας, les rougets.
[199] Salluste, Catilina, 34, 2 ; Cicéron, Catilina, II, 6, 14. Exil de L. Cornélius Scipion en 82 (exilio Massiliensi aut apud Slœchadas insulas), et visite que lui fait P. Sestius (Cicéron, Pro Sestio, 3, 7 ; Scholia Bobiensia, p. 84, Hildebrandt).
[200] Séjour à Marseille (Strabon, III, 4, 17) de Posidonius d’Apamée, peut-être entre 87 et 83 (cf. Müllenhoff, II, p. 128-9), d’où il a dû visiter la Ligurie, la Gaule, peut-être jusqu’en Auvergne, etc. ; sans doute d’Artémidore d’Éphèse, dont le voyage en Occident (Strabon, III, 1, 4), vers 100, a dû avoir Marseille pour étape.
[201] Imitation des oboles à la roue, Cab. des Méd., n° 2172-6. Pièces au nom de Αουε, Avignon ?, (Cab., n° 2509-23). Imitation des bronzes au taureau : Κρισσο (2223-4), Κιμενουλο ?, Cimiez ? (2225 ; Blanchet, p. 125), Αορα, Aéria ?, (2226), Λομ (2227), Λοσσ (2228), Αθευ ? (2229), Ηλικιοτ Μασσα (2230-43). Diane et lion : Σεγοβι, Ségobriges ?, (2244). Apollon et lion : Καινικητων, Cænicenses, (2245-6). Cérès et taureau : Γλανικων, habitants de Glanum, Saint-Remy, (2246). Diane et lion ou taureau : Τρικο, Tricorii ?, (2248-9). Apollon ou Cérès et taureau : Σαμναγητ, Samnagenses, (2235-2275). Sur ces monnaies, Blanchet, p. 238 et suiv. — Il faut remarquer à leur sujet que la plupart de ces monnaies ont été frappées, non par la peuplade (Salyens, Cavares, Volques), mais par la tribu, et que le nom de la tribu parait faire corps avec celui de la ville, chef-lieu du pagus.
[202] Note précédente ; Strabon, IV, 1, 5.
[203] Strabon dit des médecins et des rhéteurs, τούς μέν ίδία, τούς δέ κοινή (IV, 1, 3).
[204] Il s’agit des célèbres bas-reliefs (sépulcraux plutôt que triomphaux ?) d’Entremont (Espérandieu, I, n° 105), que je crois antérieurs à la colonisation d’Aix par Auguste, postérieurs à la fondation de cette ville, et rappelant quelque bataille à laquelle assistait un Salyen allié de Rome, peut-être celle d’Aix.
[205] Cf. Reinach, Cultes, Mythes et Religions, III, 1908, p. 168-170.
[206] Le recul de l’influence hellénique, du côté de Narbonne, nous apparaît bien dans l’histoire des monnaies de bronze à légendes grecques, de cette région : Καιαντολου βασιλέως (Cab. des Méd., 2416-28), Αμυτο βα (2431), Βιτουκος βασιλεύς (2406-8), Βιτουιο βασιλέως (2409-2415), Ριγαντικυς (2401-5), Βωκιος (2393-6), Λουκοτικνος (2368 et suiv.), Λογγοσταλητων (2350-99), Βηταρρατις (2432-43) ; cf. A. de Barthélemy, Rev. num., 1893, p. 300 ; Amardel, Les Monnaies, etc., 1893, dans le Bull. de la Comm. arch. de Narb., 1892-3, p. 328 et suiv. ; cf. 1894-1895, du même recueil ; Blanchet, p. 273 et suiv. Ces monnaies, certainement de chefs celtiques, commencent, dit-on, au nie siècle (peut-être seulement après 200), sont d’imitation marseillaise et peut-être même sicilienne (hypothèse de De Saulcy ; le commerce de cette région avec la Sicile serait à étudier de près) ; et elles semblent disparaître au temps de la colonisation de Narbonne, 118.
[207] La date de l’envoi d’une colonie à Narbonne, 118, est donnée par Eutrope, IV, 23, et Velleius, I, 15. Le nom que prit alors la ville, colonia Narbo Martius, est donné par Velleius et Cicéron (Pro Fonteio, 1, 3) : bien que l’on puisse songer à Q. Marcius Rex, alors consul (Zumpt, Commentationes, p. 313), il semble probable (Herzog, p. 50) que ce nom de Martius vienne de Mars, comme celui de Junonia à Carthage ; mais je crois possible que ce nom soit une allusion à une grande divinité gauloise transformée en Mars romain, comme Junonia à Carthage (Solin, XXVII, 11) rappelle Tanit (Audollent, Carthage romaine, p. 34). La colonie, de citoyens romains, fut décidée sans doute avant cette date ; le sénat s’y opposa par une rogatio que combattit le fameux orateur L. Licinius Crassus dans un discours célèbre : ce fut Crassus, alors jeune et à aspirations populaires, qui fut chargé de conduire la colonie (Cicéron, Pro Cluentio, 51, 140 ; De oratore, II, 55, 223 ; Brutus, 43, 160).
[208] Pro Fonteio, 1, 3 : Narbo Martius, colonia nostrorum civium, specula populi Romani ac propugnaculum istis ipsis nationibus oppositum et objectum.
[209] Cf. Cicéron, Pro Quinctio, 4, 13.
[210] Pas avant Auguste : car, chez Dion (XXXVII, 47, 1), l’expression de Gaule Narbonnaise paraît un anachronisme.
[211] Sur les trouvailles en Narbonnaise de monnaies romaines antérieures à 59, cf. Blanchet, p. 198-9.
[212] En particulier, les monnaies dites au cavalier (n° 5715-5944), qui sont des imitations de quinaires romains (chez les Allobroges et les Voconces ? en tout cas chez les peuples de la rive gauche) : tête de Rome et un Dioscure à cheval, légende en latin ; les plus anciennes de la série sont celles à la légende COMA, les plus récentes portent DVRNACOS et AVSCROCOS ; elles paraissent s’échelonner entre Domitius et César ; de Saulcy, Revue numismatique, 1860, p. 409 et suiv. ; de Barthélemy, id., 1884, p. 1 et suiv. ; Serrure, Annuaire de la Soc. de numismatique, XX, 1896 (beaucoup de réserves à faire) ; Blanchet, p. 261 et suiv.
[213] Note précédente.
[214] La première trace d’un culte italiote en Gaule serait le nom de Mars donné à Narbonne en 118, et c’est peut-être aussi le premier indice d’une transformation à la romaine d’un dieu gaulois. Cf. Reinach, Cultes, III, p. 168-170.
[215] Cf. Salluste, Catilina, 40, 2-4.