HISTOIRE DE LA GAULE

TOME II. — LA GAULE INDÉPENDANTE.

CHAPITRE VI. — L’ÉTAT DE GUERRE[1].

 

 

I. — COMBATIVITÉ DES GAULOIS.

Pour le moment, c’était l’état de guerre qui dominait chez les Gaulois. La paix n’était pas descendue sur eux. Les druides faisaient de leur dieu national un arbitre intelligent et pacifique : plus d’un peuple le regardait encore comme un héraut de batailles.

Sans doute, les temps des guerres lointaines avaient pris fin, et, depuis davantage, ceux des conflits entre Celtes et indigènes. Mais les luttes civiles duraient toujours, et d’autant plus fréquentes qu’elles étaient seules possibles, maintenant que Rome avait fermé le Midi aux Gaulois.

Il ne se passait presque pas d’année où tribus et familles d’une cité ne fussent convoquées contre une cité voisine[2] : chaque printemps ramenait les prises d’armes et les assemblées de combattants, et la guerre se réveillait comme la nature entière. L’élection à une magistrature[3], la vacance d’un titre de roi[4], le jugement d’un coupable puissant[5], pouvaient être, dans une cité même, l’occasion de vraies batailles. Quand Hannibal arriva chez les Allobroges, la royauté y était disputée par deux frères, et ils étaient campés en face l’un de l’autre, chacun avec son armée[6]. Ce détail est le premier que l’Antiquité nous ait transmis sur la vie intérieure des peuplades gauloises : cette terre sera longtemps celle de frères ennemis[7].

La cause principale de cette extrême combativité était le caractère celtique. Jamais, disaient les écrivains du monde classique, on n’avait vu de plus incorrigibles batailleurs, de plus obstinés combattants à meurtre et à mort. De même qu’ils n’avaient nul souci de leur propre vie, ils se riaient de la vie des autres. Quand ce n’étaient pas guerres publiques, c’étaient combats singuliers[8]. Un festin, heure de réunion pour l’amitié, se terminait parfois par l’entr’égorgement de ceux qui s’étaient enivrés ensemble[9]. Tout était prétexte à batteries et à tueries : l’ivresse, la colère, l’amour-propre, la victoire et la défaite, la jalousie, le droit et le hasard, la justice et le culte[10]. Deux prêtres qui briguaient le sacerdoce suprême, deux convives qui convoitaient un morceau de choix, marchaient l’un contre l’autre le fer à la main[11]. Ne disons pas que c’était la religion qui imposait la plupart de ces meurtres et qui en faisait des sacrifices : elle n’était que le reflet et la sanction de l’état politique et des habitudes de tous[12].

Qu’on se garde toutefois, en cela comme en bien d’autres choses, de placer les Gaulois à part dans l’histoire, et de voir en eux la race des batailles interminables. Il ne faudrait pas prendre à la lettre les déclarations des Anciens sur leur humeur guerrière. Ils n’étaient ni les plus belliqueux ni les plus agressifs de tous les Barbares : ce qu’on a répété d’eux, on l’a dit aussi des Thraces, des Germains, des Espagnols, des Ligures, des Samnites, et ces sortes de populations se sont en effet ressemblées à ce point de vue[13]. Mais même les peuples les plus civilisés du bassin méditerranéen, Étrusques, Grecs et autres, ont aimé surtout à se battre dans la première période de leur vie : quant aux Romains, leur principale force est venue de ce qu’ils n’ont jamais eu le goût de faire autre chose. La guerre a été pour tous les groupes politiques la première et la plus durable des raisons sociales, et l’épopée militaire de l’Iliade peut servir d’image à la condition périodique et aux pensées essentielles des multitudes et des chefs de la Gaule même[14].

Elle en est, en effet, à un moment assez analogue à celui de la Grèce homérique. Les combats ne sont pas le propre des jeunes gens ; ils sont la nature même de l’homme, tout au moins du noble et du citoyen. Être armé, c’est être en tenue d’homme. Le Gaulois se fait enterrer avec ses armes[15], se suicide avec elles, les porte au conseil[16] : il ne parait point sans elles devant ses dieux ou devant l’assemblée qui représente sa cité. Un jeune homme ne peut se montrer en public avec son père que lorsqu’il sait tenir une épée[17]. On ignore si dans la langue gauloise, le terme qui signifiait citoyen signifiait aussi celui qui porte une arme, comme cela s’est rencontré dans certaines langues[18] : mais, si le mot ne le disait pas, les deux idées étaient inséparables. Les prêtres furent dispensés du service militaire[19], et il a pu y avoir un temps où la guerre leur était interdite : toutefois, à l’époque de César, ceux que nous connaissons, semblables aux pontifes de Rome, formaient de bons combattants[20]. Le vieillard mettait son honneur à tenir les armes tant qu’il lui restait la force de les manier[21]. Ce ne furent pas les seuls jeunes gens qu’on choisit pour chefs de guerre : Camulogène l’Aulerque, un des plus vaillants collaborateurs de Vercingétorix, était fort âgé quand il commanda, par l’accord de tous, les peuples confédérés livrant bataille à Paris[22] ; et l’on vit une fois un vieux chef des Rèmes se faire presque porter à cheval pour se battre et mourir[23]. Les peuples pas plus que les hommes ne faisaient fi du renom de sagesse ; mais c’était encore celui de vaillance à la guerre que les uns et les autres préféraient[24]. Le meilleur ferment de courage qu’on eût trouvé fut l’exemple de ceux qui avaient péri en combattant : sans doute une place d’honneur leur était réservée dans l’autre vie[25] ; en tout cas, les druides célébraient leur sort, les bardes chantaient leur gloire, les vainqueurs leur offraient des têtes d’ennemis, la postérité pensait à eux[26]. La guerre faisait la puissance sur les hommes, le mérite devant les dieux, la durée du nom en ce monde, et la prééminence dans l’autre.

 

II. — CHARS DE GUERRE, CAVALERIE, INFANTERIE[27].

De toutes les façons de combattre, les Gaulois préféraient maintenant celle de combattre à cheval. Mais ce n’était pas celle qu’ils avaient le plus anciennement pratiquée.

Comme les Grecs et les Latins, les Celtes et les Belges avaient débuté dans l’art de la guerre par la bataille sur un char[28]. Le contact des armées méditerranéennes amena ceux d’Italie et d’Orient à renoncer à ce vieil usage[29]. Il disparut moins vite de la Gaule et de la Bretagne, où certaines nations conservèrent obstinément l’arme de leurs ancêtres[30] : car chaque peuple, en dehors des coutumes générales, gardait ou choisissait librement ses goûts, ses rites, ses signes de ralliement[31]. Dans la Celtique propre, celle des Arvernes et des Éduens, le char de guerre n’était plus, à la fin du second siècle, qu’un attirail d’honneur, un véhicule de parade et de triomphe[32], ce qu’il était devenu et demeuré dans la Rome des consuls[33]. Chez les Belges, au contraire, plus récemment formés, plus éloignés des armées civilisées, il fut plus longtemps l’équipage habituel du combattant, et il y eut des peuples parmi eux, les Rèmes, je crois, qui y tenaient comme à l’attribut distinctif de leur nom[34]. Mais dans la première moitié du dernier siècle, le char fut supprimé presque partout pour les combats, et César ne le trouvera contre lui que chez les Bretons de la grande île voisine, les derniers-nés du monde gaulois, les plus fidèles aux antiques habitudes[35]. — Ce n’était pas d’ailleurs une mauvaise façon de combattre : les chars, à deux roues[36], portaient un conducteur et un soldat[37]. Fort légers, ils arrivaient sur l’ennemi très rapidement : debout, ayant l’avantage de la hauteur, assez près pour ne pas manquer le but, le combattant lançait sa pique ou son javelot, puis s’éloignait en toute hâte, ou, s’il le préférait, descendait pour se servir de l’épée[38]. Une telle manœuvre exigeait de l’adresse et du sang-froid, la mobilité du cheval et la solidité du fantassin ; elle apportait le double avantage d’une infanterie montée et d’une école de tirailleurs ; et, ce qui importait fort dans une guerre contre l’étranger, elle habituait les hommes à quitter en temps utile le champ de bataille[39].

Mais le noble gaulois, au temps de César, se bat de préférence à cheval. Il fut sans doute une époque où la bête servait au combattant, non pas de monture, mais de véhicule, je veux dire qu’elle était un moyen de gagner plus vite le lieu de la mêlée, et d’y faire plus tôt office de fantassin : l’équitation ne faisait alors que simplifier le rôle du char de guerre[40]. Mais le cheval de guerre est devenu, si je puis dire, un organe de combat. Les mots de chevalerie et d’aristocratie, de cavalier et de noble, passaient, non peut-être pour synonymes, en tout cas pour inséparables[41]. Quand les monnayeurs veulent symboliser la marche à l’ennemi, c’est presque toujours un cheval qu’ils représentent : le coursier galopant, conduit par une force divine, à demi dieu lui-même, voilà l’image de la Gaule en état de guerre[42].

Cette prééminence militaire de la cavalerie se constate, à très peu d’exceptions près, chez tous les peuples du monde gaulois[43], aussi bien chez les Nitiobroges de l’Agenais que chez les Éduens et chez les Trévires[44]. On vantait surtout l’excellence des cavaliers de cette dernière nation, plus braves au combat, disait-on, que tous les autres[45] ; et cette supériorité venait de ce que, sans cesse aux prises avec les Germains, ils étaient soumis à une plus rude école. En dehors même des hommes gaulois, il y avait de fort bons cavaliers : les Aquitains du pays de Sos et des régions gasconnes savaient tirer parti des belles bêtes du Bigorre et de l’Armagnac[46].

Nulle population de l’Antiquité n’a mieux compris quelle force, à la fois brutale et réfléchie, est constituée par l’accord intime du cheval et du cavalier. La valeur de la cavalerie celtique, hommes et montures, venait d’habitudes jalousement gardées, d’exercices continus et d’habiles sélections. Les chevaux étaient de superbes animaux[47], harnachés et bridés avec une science compliquée[48], ornés parfois comme des idoles, et que les riches montaient sans doute avec des selles de luxe[49]. On se plaisait à les former pour des conversions, des voltes et des passes élégantes et régulières[50] : l’art de les dresser et de les manœuvrer fut poussé si loin, que plus tard l’armée romaine empruntera à la langue celtique quelques termes de l’école du cavalier[51]. Le cheval gaulois semble une bête intelligente, de manège et de parade autant que de combat. — Mais, par là même, il ne rendra pas sur le champ de bataille tous les services qu’on pourrait lui demander. Il a, comme son maître, de l’élan, de la tenue et de la forme[52] ; il manque un peu de fond, tout comme lui ; il ne possède pas cette force de résistance, cet entêtement solide des chevaux germains ou transrhénans[53] : bêtes laides et disgracieuses, qui auront souvent raison des escadrons gaulois dans les rencontres de la frontière[54].

Le cavalier celte, lui aussi, a son infériorité propre. Il a perdu l’habitude de combattre à pied. Ce fut une chose fâcheuse pour lui que l’abandon du char de guerre : séparé de son cheval, il ne semble que la moitié de lui-même, comme s’il ne savait plus manier une arme quand il se tient sur ses jarrets. Et ce sera là une des principales causes de sa faiblesse devant le Germain ou le Romain. Le combattant breton lui-même, solidement planté sur son char, est un soldat de ressources supérieures à l’écuyer gaulois[55].

Certes, il y a en Gaule un nombre considérable de fantassins. La cavalerie, chez tous les peuples, n’est que la portion numériquement la plus faible. Lors de la campagne d’Alésia (été de 52), les Gaulois arriveront à réunir 23 000 cavaliers et 330 000 gens de pied[56]. Parmi les hommes capables de manier une arme dans une tribu, on trouvait tout au plus un cavalier contre dix autres.

Mais ces fantassins n’étaient souvent qu’une multitude confuse de soldats pitoyables. Il est vraisemblable qu’ils furent fournis par les hommes de peu ou de rien, serviteurs libres, clients, plébéiens, et que les descendants des indigènes en formaient la majorité. Notons que parmi les cavaliers, il y avait déjà un certain nombre de salariés, gardes d’un chef ou mercenaires publics[57] : à plus forte raison, l’infanterie devait abonder en non-valeurs sociales. L’armement de ces piétons était médiocre, leur inexpérience absolue, leur courage fort intermittent : une bonne partie d’entre eux ne tenaient qu’une place de figurants. Sur les 250.000 qui vinrent devant Alésia, il n’y en eut que 80.000 qui surent se battre dans la journée décisive : des autres, César ne daigne même pas parler[58].

Il se présentait, il est vrai, d’assez nombreuses exceptions. Chez beaucoup de peuples, à ce que je crois, un certain nombre de fantassins étaient préparés pour combattre, légèrement armés, à travers les rangs des chevaux, de manière à soutenir ou à protéger les manœuvres du guerrier monté[59]. D’autres cités avaient su se constituer une très bonne infanterie[60]. C’étaient d’ordinaire les nations de la frontière, où l’élément et les usages celtiques étaient moins prépondérants[61], et où la rencontre avec l’étranger obligeait à une surveillance plus soutenue des ressources militaires. Nous ne parlons pas seulement des tribus extérieures au nom gaulois, Ligures des Alpes, Aquitains des Landes et des Pyrénées, qui donnaient toujours d’admirables piétons, coureurs, grimpeurs, marcheurs et combattants hors de pair[62]. Mais on voyait aussi, chez les Belges de la Moselle et de la Meuse, des fantassins de premier ordre, de même origine peut-être que ces Germains dont la vélocité, au dire des Anciens, était incroyable[63]. Les Nerviens de la Salubre, notamment, ne possédaient aucune force équestre, mais leur armée, toute de gens de pied, n’en fut pas moins remarquable par la rapidité de ses mouvements, la souplesse de ses évolutions, la ténacité de sa résistance[64]. Ce fut contre eux que César livra la plus acharnée de ses batailles de Gaule ; et cela aurait dû montrer aux Celtes que le cheval, sur de certains terrains et contre de certains ennemis, n’est plus qu’un luxe encombrant.

 

III. — ARMES[65].

Une époque de guerres civiles est pour les peuples un temps d’arrêt dans l’art militaire : car l’armement s’améliore surtout dans la crainte d’un ennemi étranger et par le contact d’engins nouveaux.

Les Gaulois contemporains de Paul-Émile, de Marius et de César n’étaient pas mieux armés que ceux d’avant Hannibal. Polybe et Posidonius ne décrivent pas en termes différents les instruments de guerre des uns et des autres. Et si l’on peut saisir quelque divergence, elle est à l’avantage des plus anciens. Les Gaulois avaient plutôt désappris que profité en matière militaire[66].

Ils négligeaient ou méprisaient de plus en plus les armes de jet ou de hast[67] ; elles partageaient le discrédit du char de guerre, dont elles semblaient d’ailleurs inséparables. — Non pas que l’emploi de l’arc et de la fronde ne demeure courant[68] chez les Gaulois, lesquels étaient en majorité des Ligures sous un autre nom : mais la bataille entre hommes ne le comportait pas, c’était surtout usage de paysans, de chasseurs et de veneurs. Les peuples plus arriérés sont seuls à mettre en ligne, en temps de guerre, des frondeurs et des tireurs de l’arc : Éburons et Nerviens des forêts du Nord, Rutènes des plateaux du Rouergue, hommes des terres de grandes chasses[69].

Les Gaulois connaissaient des sortes très différentes de javelots, de javelines, de traits à main[70] : le dard de bois, aussi rapide qu’une flèche[71] ; la massive matara[72] ; le léger verutum[73] ; la tragula, plus petite encore, mais pourvue d’une courroie, et qui, bien envoyée, franchissait de longues distances[74] ; d’autres au fer en spirale, qui élargissait les plaies[75] ; d’autres qui portaient des matières inflammables[76] ; l’étrange cateia, au bois flexible planté de clous de métal, arme d’approche lourde et meurtrière, qui, lancée d’un geste habile, revenait, disait-on, rejoindre le guerrier après avoir frappé l’ennemi[77] ; et surtout, plus répandu que tous les autres engins, le long gæsum, perçant et robuste, qu’on disait tout en fer[78], la pique-javelot traditionnelle des Belges d’autrefois, l’arme préférée des combattants à char[79]. Mais de ces armes encore, on se servait surtout dans les chasses aux oiseaux ou bêtes fauves, et on ne constate de vraiment experts au lancement du dard ou de la pique sur le champ de bataille que les demi-sauvages des Ardennes, Nerviens et Éburons, et les rudes montagnards des Alpes[80]. — De la même manière, la large lance gauloise, au fer d’une coudée, à la hampe plus longue[81], n’apparaîtra plus guère, au temps de César, que chez les Belges du Nord, Atrébates et Suessions[82]. — Quant au poignard et au couteau de chasse, que les Gaulois employaient souvent, il n’en est jamais question comme d’une arme de guerre[83].

Toutes les armes, surtout dans les milieux celtiques, semblent[84] subordonnées à l’arme noble, l’épée, l’arme du proche contact : de même que, de toutes les attitudes de combat, on préfère la parade à cheval. — Le vrai guerrier celte, c’est donc un cavalier de choc et de mêlée, qui charge et qui sabre.

Mais, même comme tel, il est incomplet. Il sabre, et il ne pointe pas : ce qui lui enlève, et dans la charge et dans la mêlée, une partie de ses moyens. — Ses forgeurs d’épées[85] sont devenus, à coup sûr, de bons ouvriers[86], et beaucoup d’armes valent mieux, comme métal et comme trempe, que celles dont se moquaient les Romains dans les combats de la Cisalpine. Mais l’épée gauloise n’en demeure pas moins, sur le champ de bataille, un instrument imparfait. Sauf peut-être chez les Belges, fidèles aux armes de pointe[87], c’est la latte à deux tranchants, que sa pointe émoussée rend impropre à l’attaque d’estoc[88]. Pour ce qui est de l’ajustement, les Gaulois ne sont certes pas demeurés en arrière : l’arme est ornée de clous de corail ou à tête émaillée[89] ; suspendue le long du flanc droit[90], elle est retenue à la ceinture par une chaînette de fer ou de cuivre[91] ; le fourreau et le ceinturon sont plaqués ou incrustés d’or ou d’argent[92]. — Mais l’épée n’en est pas rendue plus utile : au moment du combat, le maniement de cette masse, longue, lourde, faite pour la taille[93], qui coupe et ne perce pas, exige à la fois trop d’effort et de champ ; c’est une arme de rencontre plus que de duel, de heurt méthodique plus que de mêlée intelligente. Elle ne se prête à aucune de ces variétés infinies d’attaque, de croisement et de parade que permet l’escrime de la courte épée d’estoc : une épée sans pointe manque des facultés maîtresses de l’épée[94]. — Le mal n’était pas grand tant que la Gaulois n’avait que des Gaulois en face de lui. Mais au moment où il abandonnait les armes de pointe et de garantie, voilà que s’approchaient les hommes du Midi, et avec eux les deux armes les plus sûres et les plus pénétrantes de l’ancien monde, le javelot romain et le glaive ibérique[95].

Encore si les Gaulois s’étaient résignés à l’emploi des armes défensives ! Mais la plupart des guerriers, par point d’honneur, ne savaient pas renoncer à une glorieuse nudité, c’est-à-dire recourir à une autre protection que celle de leurs vêtements et de leur force[96]. Les cuirasses de bronze, les cottes de mailles de fer ne sont toujours, je crois, qu’une parure des grands chefs[97]. — On s’en tenait encore au long bouclier de bois ou de clayon, rehaussé, chez les plus riches, d’ornements de bronze en haut-relief[98]. Ce bouclier, sans doute, était capable d’abriter toute la taille d’un homme ; mais ce qui fait la valeur d’un abri de ce genre, c’est sa mobilité et sa résistance, et on devait voir plus tard (en 58) une seule décharge de javelots romains transpercer et attacher ensemble plusieurs de ces engins incommodes, si bien que les combattants gaulois, ayant leur bras gauche retenu par la lanière du bouclier, se trouvaient réduits à une demi-impuissance par les armes mêmes qui devaient les protéger[99]. — Ce n’était point une meilleure défense que leur casque de métal, réservé d’ailleurs aux principaux chefs[100] : il laissait à découvert une trop grande partie du visage[101]. En revanche, il était surmonté d’ornements étranges qui formaient cimier ou panache : rouelles mystérieuses, masques d’oiseaux, mufles, trompes et cornes fantastiques ; et cela rehaussait encore la haute taille du guerrier, et lui donnait un air superbe et farouche[102]. Mais ces figures monstrueuses n’étaient que des épouvantails, dont se rira un ennemi sérieux[103].

 

IV. — ENSEIGNES ET ANIMAUX DE GUERRE.

Ces armes étaient les moyens humains de combattre : mais la guerre n’allait pas aussi sans un attirail de valeur religieuse et de portée morale.

Le principal instrument du culte militaire demeurait l’enseigne. Chaque tribu conserva sans doute les siennes[104] : elles étaient l’image visible, le symbole permanent de la famille politique à laquelle elles appartenaient ; elles signifiaient la levée et le mouvement de cette famille en état de guerre. Immobiles en des sanctuaires dans les temps de paix, elles sortaient au jour de la guerre, marchaient, campaient et combattaient avec les leurs[105]. Quand des tribus s’associaient, leurs enseignes se rapprochaient[106]. Lorsque les nations se confédéraient contre un ennemi commun, tous les signes militaires étaient d’abord unis ensemble, et c’était sur ce faisceau solennel que les chefs juraient leur accord pour la guerre commune[107]. Ces enseignes semblaient à la fois l’âme collective des armées et l’esprit divin qui les conduisait. Un chef les brandissait lui-même[108]. On les figurait sur les monnaies conduisant le cheval des batailles[109] et lui montrant sa route.

Le plus souvent, une enseigne représentait un sanglier debout, en métal[110]. Le sanglier était l’hôte principal des forêts, l’ennemi traditionnel de l’homme et du cheval dans ces jours de chasse qui étaient l’image des jours de guerre[111]. En le figurant par l’enseigne, on le mêlait à la marche et au combat ; on le transformait, d’adversaire du peuple au repos, en protecteur du peuple au combat ; il communiquait sa force et sa puissance à ceux qui se groupaient autour de lui ; une mystérieuse communion s’opérait entre l’homme et la bête, rivaux jadis, fédérés maintenant[112].

Ce désir d’appliquer aux luttes humaines la vigueur propre des animaux se marquait de plusieurs autres manières. La trompette de guerre, ou carnyx[113], se composait d’un long tube, terminé par un pavillon en forme de bête monstrueuse, et de sa gueule ouverte sortaient des sons stridents[114]. On a vu que des figures semblables ornaient les boucliers ou surmontaient les casques. Enfin, les chefs se faisaient accompagner sur le champ de bataille par leurs meutes de chiens, bêtes formidables, dressées à la chasse à l’homme[115]. Et quand, pendant le combat, retentissaient au milieu des clameurs humaines les hurlements des bêtes et les longs sifflements des mufles d’airain, quand les figures viriles s’entremêlaient aux masques d’animaux, il semblait que toutes les forces de la nature vivante se fussent levées pour prendre part à la lutte.

 

V. — RITES ET TÊTES COUPÉES.

La guerre provoquait donc une sorte d’évocation de toutes les puissances humaines et surhumaines ; elle mobilisait les divinités autant que les hommes ; elle était un épisode de l’existence religieuse d’un peuple et de la vie terrestre de son dieu.

Il a été montré ailleurs[116] comment les dieux ont présidé aux expéditions et aux luttes que les Gaulois firent jadis dans le monde. La religion militaire n’avait rien perdu de son prestige quelques générations plus tard, dans la Gaule indépendante. C’était toujours la divinité qui réglait le départ[117]. Les victimes humaines tombaient plus nombreuses avant l’entrée en campagne[118]. Des serments plus solennels étaient jurés pour la guerre et pour la bataille[119]. Les fétiches nationaux intervenaient pour guider la marche[120]. Avant la mêlée décisive, les combattants juraient de s’éloigner de leur toit, de leur femme, de leurs enfants, s’ils n’avaient pas accompli un exploit souhaité[121]. Par des signes certains, les dieux annonçaient qu’ils envoyaient la défaite et qu’ils voulaient la soumission à l’ennemi[122]. La guerre exaspérait la piété d’une nation ; elle exaltait l’activité des hommes et la tyrannie de leurs dieux. Les dévotions traditionnelles, les talismans antiques, les rites et les formules d’autrefois reparaissaient : le réveil de la religion militaire marquait un renouveau du passé.

Aussi, les bénéfices de toute guerre, la mort de l’ennemi, la récolte du butin, étaient presque toujours partagés avec les dieux, et quand ils ne l’étaient pas, c’est que les dieux prenaient tout pour eux : ils avaient vaincu, on leur devait les profits de la victoire[123]. Ces Gaulois, qu’on disait si avides d’or, en offraient d’abord le plus possible à leur dieu, et ils considéraient comme le pire des sacrilèges, comme le plus dangereux pour le salut de la nation, de le léser dans son droit, de le priver de la part qui lui était due. Et des ennemis, vaincus ou faits prisonniers, ils donnaient à ce même dieu la vie en sacrifice, et ne gardaient pour eux que la tête.

Car l’usage persista en Gaule, même dans le cours du premier siècle, de couper les têtes des ennemis sur le champ de bataille[124], et, suspendues aux cous des chevaux, de les rapporter au son des hymnes de triomphe[125]. Ces têtes, c’étaient, à dire vrai, le signe de la victoire d’un homme, la mesure de la force propre du combattant. Les chefs qui voulurent se faire figurer sur les monnaies ou les sculptures y apparaissaient parfois dans l’attitude d’un vainqueur, agitant ou brandissant d’une main la trompette de guerre et l’enseigne, et tenant de l’autre la tête de l’ennemi abattu[126]. On représentera plus tard ces têtes comme trophées de victoire sur les sculptures des monuments triomphaux[127]. Mais elles étaient autre chose que des souvenirs de succès. Souvent, plantées sur des hampes, elles servaient d’enseignes pour de nouvelles guerres[128], et c’était le sort, j’imagine, des têtes des plus illustres vaincus : tout comme les sangliers des autres enseignes, elles conduisaient à la bataille ceux-là mêmes qu’elles avaient autrefois combattus[129]. Une tête d’ennemi était un talisman de premier ordre. Les Gaulois aimaient à garder dans leurs demeures ces sanglantes preuves de leur courage, plus parlantes dans leur mutisme que des armes et des bijoux : on les fixait sur les parois des vestibules, on les embaumait dans l’huile de cèdre pour les conserver au fond des coffres. Leur possesseur tirait d’elles sa vanité de soldat, et les montrait volontiers aux étrangers[130]. Puis, elles gardaient et protégeaient son toit et son foyer, comme si la force de l’homme vaincu avait été mise au service de son vainqueur. Ces têtes coupées devenaient de bons fétiches domestiques. Et le maître du lieu se tournait vers elles avec orgueil et gratitude[131].

Les étrangers s’en détournaient avec horreur. Posidonius le Grec avoue qu’il mit longtemps à s’habituer à cette vue[132]. De nos jours, on prend quelquefois acte de cette chose pour accuser les Gaulois de mœurs sauvages[133]. Au fond, elle n’a qu’une importance minime, et, quelle que soit la nature du trophée de guerre, il est toujours un indice de barbarie.

 

VI. — ASSEMBLÉES ET CHEFS MILITAIRES[134].

L’état de guerre amenait dans la vie politique de la cité les mêmes effets que dans sa vie religieuse. Il était un ferment d’archaïsmes : le peuple en armes recouvrait quelques-unes de ses plus lointaines institutions. La guerre ressuscitait son passé.

Le commandement militaire confié en principe à un chef différent du magistrat, ce chef choisi sans doute parmi les guerriers les plus braves ou les plus influents des tribus associées, l’assemblée entière des citoyens armés prenant part à l’élection de son conducteur de guerre, mais celui-ci constamment obligé de chercher ensuite l’avis de ceux qu’il commande : — c’était une démocratie tumultuaire qui remplaçait le gouvernement normal par le sénat et les princes de la cité[135].

De l’organisation militaire d’une peuplade, nous savons fort peu de chose. Sous ses ordres, le commandant en chef avait un ou plusieurs maîtres de la cavalerie, un ou plusieurs maîtres de l’infanterie, des capitaines de places fortes[136]. Les hommes étaient groupés par tribus[137], peut-être aussi par villages, chaque groupe précédé de ses chefs distincts, princes ou sénateurs[138].

En cas de guerre entreprise par plusieurs nations confédérées, l’habitude était également que le commandement supérieur fût confié à un seul homme, élu, lui aussi, par le plus grand nombre[139]. Le partage de l’autorité entre deux[140] ou quatre[141] chefs a été l’exception. On demeurait attaché, comme à un principe religieux, à l’unité de la souveraineté militaire : il ne paraissait pas bon que plusieurs dirigeassent une même société de peuples en armes, ni possible qu’ils reçussent ensemble les ordres des dieux. Certes, dans ces désignations des maîtres d’armées, la passion eut plus de part que le raisonnement, l’enthousiasme que le calcul. Cependant, lés Gaulois se sont rarement mépris sur la valeur de leurs chefs : et les suffrages, lors des guerres contre César, sont allés aux plus dignes, Comm, Correus, Camulogène, Vercingétorix.

Choisi par les nations, né d’un vote populaire, le chef d’une guerre fédérale ne ressemblait en rien à un dictateur tout-puissant et irresponsable. Vercingétorix a pu désirer le devenir, mais il ne l’a pas été tout d’abord, et il ne le restera pas jusqu’à la fin[142]. Un général réunissait en conseil les autres chefs pour les décisions importantes ; que de fois en outre, en dehors et autour de ce conseil, la foule grondait et hurlait, et finissait par avoir le dernier mot ! En 56, le chef unelle Viridovix commandait contre les Romains les cités du Nord-Ouest : il différait d’engager le combat, par prudence ou par timidité, et le groupe des chefs, comme lui, reculaient devant une action décisive ; mais un jour, l’armée entoura Viridovix et son conseil, et ne les laissa partir qu’après en avoir reçu l’ordre de courir à la bataille[143]. Plus d’une fois Vercingétorix fut obligé de persuader non pas son conseil seul, mais toute la multitude, d’expliquer ses actes et de relever les espérances[144], et il n’était vraiment star de ses troupes que lorsque son discours s’achevait au milieu des acclamations et des cliquetis d’armes entrechoquées[145]. — Ces temps de guerre, qui auraient dû inaugurer une période d’attention et de discipline, étaient ceux où les Gaulois montraient le plus leur étourderie et leur mobilité habituelles[146]. Ils réveillaient l’état de nature.

 

VII. — MARCHE, CAMPEMENT, BATAILLE.

Aussi, malgré leurs courses à travers le monde méditerranéen, les Gaulois n’avaient point commencé l’expérience de la guerre savante.

Ils s’assemblaient et partaient dans l’ignorance des nécessités d’une campagne. Ce sont moins des armées qu’ils forment, que des cohues où se traînent des femmes, des enfants et des vieillards : ils s’encombrent toujours, même lorsqu’ils se disent marcher à la légère, de bagages et de chariots de toute espèce[147]. On dirait qu’ils se croient encore au temps où la sortie en armes se faisait pour fondez des foyers nouveaux. Et cependant, parmi ces charges dont ils s’embarrassent, il manque souvent les approvisionnements nécessaires : la pénurie de vivres obligera des armées gauloises à renoncer à une expédition ou à se battre prématurément[148].

La marche d’une armée demeurait d’une simplicité enfantine. Chaque tribu ou chaque cité formait un corps séparé ; et les intervalles entre les différentes troupes étaient parfois assez distants pour que l’ennemi pût s’insérer à travers les tribus d’une même peuplade[149]. La seule précaution qu’on prenait, d’ailleurs élémentaire, était de placer de la cavalerie à l’arrière-garde[150]. L’usage des éclaireurs, des avant-postes et des flanc-gardes ne s’est répandu que dans les dernières années de la guerre contre César[151] ; les Gaulois ne savent ni se garder dans les passages difficiles, ni dissimuler un mouvement de leurs troupes[152]. Ils ne reconnaissent pas le terrain[153]. A plus forte raison, ils ne parviennent pas à dresser une embuscade sérieuse ou à tomber sur l’ennemi dans une opération délicate[154]. Vercingétorix et Camulogène se laisseront prendre aux stratagèmes des traversées et des marches feintes[155], et Hannibal trompa les Volques de la même manière : et ces stratagèmes n’étaient, pour des chefs avertis, que des ruses d’enfants. Mais le guerrier gaulois n’est qu’un grand enfant, incapable d’inventer et de deviner ; il voit dans la guerre un jeu de force et non de calcul[156].

A l’heure du campement, les tribus et les cités rapprochent leurs tentes, où s’abritent hommes et chevaux[157]. Tout autour du camp ou derrière lui, s’entassent les chariots, et sur ce rempart improvisé les combattants vaincus essaient une dernière résistance[158]. Mais, cette sorte de défense mise à part, les Gaulois n’utilisent, pour établir et protéger leurs positions, ni les ressources du travail humain ni celles de la nature. Ils ne campent pas sur les hauteurs ; ils préfèrent les terrains bas, voisins de sources, de rivières et de lieux de culture[159]. Sans doute, ils se fussent indignés à la pensée d’imiter les légionnaires, de faire besogne de terrassiers, et d’entourer leurs tentes de levées et de fossés[160].

De même qu’ils marchent et campent en ordre ramassé, sans troupes d’avant-garde ou sans stations d’avant-poste, de même ils ne comprennent la rencontre que sous la forme d’un engagement général. La stratégie la plus élémentaire leur fait défaut. Partager une armée en plusieurs détachements, assigner à chacun son rôle, se diviser et se reconcentrer suivant les besoins, opérer une diversion et reparaître ensuite avec l’avantage du nombre : nous ne trouvons rien de semblable, du côté des Celtes, avant l’arrivée de Vercingétorix. La rencontre leur apparaît comme une obligation, collective, immédiate et impérieuse, et non pas comme une série de subterfuges[161]. Ce que les chefs intelligents ont le plus de peine à obtenir d’eux, c’est de refuser ce combat, de suivre ou de flanquer l’ennemi sans lé heurter, de le harceler sans le combattre, de l’attaquer par petites troupes, au lieu de lui présenter la franche bataille de toute l’armée[162].

La bataille elle-même était, comme par le passé, encombrée de préliminaires solennels et émouvants (du moins quand il s’agissait d’ennemis autres que les Romains). On n’avait pas laissé tomber en désuétude la coutume des combats singuliers : quand les troupes sont disposées en ordre, il arrive que quelques-uns se présentent au delà du front, agitent leurs armes et provoquent les ennemis ; et si l’on répond à leur défi, le duel ne s’engage pas sans que les combattants n’aient chanté leurs ancêtres et leur propre gloire, et adressé à leurs adversaires les railleries et les insolences coutumières[163]. Une armée ne marchait pas sans ses bardes : et souvent, avant le contact décisif, on les voyait s’avancer entre les épées opposées pour chanter des paroles de concorde et arrêter une lutte fratricide[164].

L’ordre préféré des Gaulois, pour l’infanterie, était une sorte de phalange, aux rangs à tel point pressés, que les boucliers se touchaient et s’entrecroisaient même : les rangs antérieurs tenaient ces armes devant eux, les rangs postérieurs les portaient au-dessus des têtes ; ce qui faisait ressembler l’armée à une colossale tortue, abritée sous une carapace continue[165]. — Ce n’était pas une mauvaise disposition pour la défensive ; du moins quand il s’agissait de parer à des salves de projectiles médiocres ou de repousser des chocs maladroits : on verra qu’elle ne valut jamais rien contre le javelot et l’épée du légionnaire ; et, une fois disloquée par une attaque un peu vive, la phalange ne pouvait plus se reformer, et ses membres épars et impuissants tombaient à la merci des cohortes assaillantes[166]. — Dans l’offensive, un tel ordre n’était plus possible : les Gaulois chargeaient alors au pas de course, et toujours en rangs très pressés[167], de manière à enfoncer l’ennemi autant par la force et la rapidité du choc que par le contact des armes mêmes[168]. Mais le danger était alors que le désordre ne se mît dans les lignes avant la rencontre, et surtout, que les assaillants n’arrivassent à leurs adversaires déjà épuisés et essoufflés par la course. Et c’est cette première fatigue des Gaulois qui livrait la victoire à César[169]. Il est vrai que, parfois, l’incroyable rapidité de leur élan jetait d’abord le trouble chez les légionnaires[170].

De l’ordre de bataille usité dans la cavalerie gauloise, nous ne pouvons rien dire de certain : mais tout porte à croire qu’elle combattait surtout, elle aussi, par le choc, chargeant sur les lignes opposées en très grandes masses toujours compactes. Les Gaulois étaient de plus en plus convaincus, comme le sont aujourd’hui encore quelques tacticiens d’outre-Rhin, que seul l’emploi d’énormes troupes de cavalerie peut amener un résultat décisif sur un champ de bataille[171] ; ils mirent toujours en ligne, à la fois une quantité étonnante d’escadrons, jusqu’à huit mille et quinze mille chevaux d’un coup[172]. Et contre cette formidable poussée, l’infanterie légionnaire elle-même dut parfois, malgré son sang-froid et la solidité de sa tenue de position, reculer ou se moutonner[173].

Une bataille gauloise, quelle que fût l’arme engagée, n’offrait donc rien qui ressemblât à une manœuvre. Elle était le heurt des deux masses ennemies, suivi d’une infinité de combats singuliers. Cavaliers ou fantassins s’en remettaient à leur force et à leur courage, et n’attendaient le succès que d’une supériorité physique, ou d’un hasard qui fût le jugement des dieux[174].

A certains égards (et c’était la conséquence de la valeur de leur infanterie et de leur expérience des armes de jet) les peuples autres que les Celtes du Centre, Alpins des montagnes, Aquitains au sud de la Garonne, Éburons et Nerviens de la Belgique, usèrent, au moins contre les gens de César, d’une tactique plus habile. Les Aquitains savaient reconnaître et choisir le terrain, et fortifier leurs camps à la manière romaine ; les Nerviens, en 54, furent les premiers du nom gaulois à imiter la castramétation de leurs adversaires[175]. En campagne, tous ces hommes évitaient le plus possible de marcher à découvert et d’engager le combat ; ils coupaient les vivres à l’ennemi, lui fermaient les routes, le tracassaient de loin avec les frondes et les javelots, s’enfuyaient s’il tentait de résister, et lorsque quelque détachement se laissait attirer loin de l’armée, revenant subitement, ils l’entouraient et l’écharpaient à coup sûr[176]. Et ces manœuvres de fuites et de retours, de ruses et de dérobées, faisaient toujours infiniment plus de mal à César que les belles batailles à la face du ciel que les Celtes étaient toujours prêts à lui offrir solennellement.

 

VIII. — VAISSEAUX DE GUERRE.

Un des traits que nous avons notés autrefois chez les Celtes de l’extérieur, fils et petits-fils des Celtes de la Gaule centrale, c’est leur incapacité à devenir des marins : dès qu’ils s’approchent du rivage, on dirait que leur élan s’arrête et que leur ardeur s’éteint[177].

Il n’en fut pas de même des Gaulois de l’Océan. Soit qu’ils aient hérité des aptitudes des anciens Ligures, soit que les migrations belges aient amené dans leur pays de hardis marins du Jutland ou de la Frise, ces peuples n’ont point négligé les éléments de puissance qu’étaient les voies et les abris de leurs fleuves et de leurs mers.

Dans presque toutes les campagnes contre César, les belligérants ont utilisé, sur les rivières navigables, des flottilles de barques et de radeaux, et il fallait qu’elles fussent considérables, puisqu’il s’agissait de transporter des hommes par dizaines et centaines de mille : c’est de cette manière que les Helvètes voulurent franchir le Rhône à Genève, et qu’ils passèrent la Saône en aval de Mâcon[178]. Pour s’assurer la traversée de la Seine à Melun, Labienus s’empara d’abord d’une cinquantaine de navires qu’il y trouva[179], et on a vu qu’Hannibal en put saisir un très grand nombre entre Arles et Avignon.

Mais une véritable flotte de guerre n’existait que sur l’Océan. Les Ligures méditerranéens n’étaient que des pirates ; ni Arles sous la domination des Salyens ni Narbonne sous celle des Volques ne devinrent des arsenaux ou des ports de marine militaire. Marseille dut s’arranger pour détourner les Gaulois de la mer. Sur l’Océan, au contraire, ils étaient les seuls maîtres des rades et des routes : les Santons avaient leurs escadres dans les ports et les îles de la mer de Saintonge[180], les Pictons le long des côtes de la Vendée[181], les Morins à Boulogne et sur les estuaires d’où l’on partait pour l’Angleterre[182] ; et c’étaient sans aucun doute des armées navales qui faisaient la force de la fédération armoricaine des cités de la mer.

Les Vénètes, notamment, avaient réussi à constituer une puissante marine de guerre. Tout avait contribué à sa prééminence : les habitudes immémoriales des indigènes[183], de constantes relations avec les îles Britanniques[184], l’antique gloire sacrée de ces régions[185], l’abondance des bois de chênes dans l’arrière-pays[186], l’existence enfin, au beau milieu de la presqu’île armoricaine, de la petite mer du Morbihan. Avec ses grandes profondeurs, ses détroits qui dissimulent de larges baies, ses caps propres à exercer aux audacieux virages, l’étonnante force de ses courants, ses replis de terre tour à tour marécageux et recouverts par le flot, ses promontoires et ses îlots qui peuvent si bien cacher une barque à l’affût, — le Morbihan était le plus merveilleux champ d’éducation et d’expériences que l’Océan pût offrir à une marine antique[187].

Les vaisseaux vénètes, comme sans doute tous ceux de l’Armorique, étaient construits en effet pour lutter contre cet Océan du Nord, aux rudes secousses, aux courants violents, aux vents en rafales, aux échouements imprévus[188]. Ils étaient faits en entier de bois de chêne, et en matériaux d’une résistance à toute épreuve. Pour l’amarrage, les ancres tenaient à des chaînes de fer, autrement solides et puissantes que les câbles des marines méditerranéennes[189]. La coque était à fond plus plat que celle des vaisseaux romains[190], de manière à ce que le navire, en cas de bas-fond ou de marée basse, pût s’échouer doucement et sans perdre de son équilibre : au moment d’une bataille, les incertitudes du fond n’apportaient ainsi aucun trouble parmi les combattants. La proue et la poupe s’élevaient fort haut, plus haut même que les tours ordinaires des navires romains[191], de manière à dominer les tempêtes et les lames du large ; les baux ou poutres de traverse[192] tenaient au bordage par des clous de fer gros comme le pouce ; et ainsi, cette masse lourde et compacte paraissait une sorte de muraille blindée, qui défiait par son épaisseur et son élévation les paquets de mer, l’éperon, les grappins, les traits et le feu des ennemis[193]. Enfin, les voiles (car ces navires ne marchaient que par elles) étaient faites, non pas de tissu végétal, mais de peaux ou de lanières de cuir cousues au petit point[194], ce qui leur donnait une extrême résistance et contre les violences du vent et contre les charges qu’elles entraînaient.

Ces robustes machines n’avaient sans doute pas la vitesse des longs et minces navires de guerre en usage chez les Romains. C’étaient de larges citadelles flottantes, bâties pour repousser les assauts des hommes sans avoir à redouter les dangers de la mer. — Ce sont ces dangers, en effet, qui feront le plus de mal aux escadres de César. Mais survienne un calme plat, et la flotte immobile des Vénètes sera rapidement bloquée par les navires romains, et il ne restera plus aux légionnaires qu’à l’assiéger comme de vulgaires redoutes[195].

 

IX. — FORTERESSES ET SIÈGES[196].

Ainsi, sur mer comme sur terre, les Gaulois procédaient surtout par masses trop lourdes. Ils oubliaient de plus en plus que la souplesse et la rapidité sont, dans toutes les sortes de combats, les facultés essentielles. Les mêmes défauts se retrouvaient dans leur manière de bâtir et d’attaquer les places fortes.

L’aspect humain de la Gaule reflétait l’état de guerre qui s’attardait sur elle. Il n’y avait pas de groupements importants d’hommes et de demeures qui ne fussent prêts à se défendre et entourés de remparts.

Ce n’est pas que le nombre des lieux fortifiés fût infini, et comparable à celui dont se hérissa la France du Moyen Age[197]. L’État des Suessions, qu’on disait très riche et très étendu, ne possédait que douze villages murés ou oppida[198]. Il ne parait pas que les Parisiens aient eu d’autres villes fermées que Lutèce[199]. Les Helvètes de Suisse en possèdent douze, et pas davantage[200]. Sur la route de Sens à Bourges, par le détour d’Orléans, César ne rencontrera que trois sièges à faire[201]. Il passa pour avoir enlevé plus de huit cents places dans la Gaule indépendante[202] ; et, en dépit de l’apparence, ce n’était pas un chiffre énorme, vu l’étendue du pays et les habitudes de l’Antiquité. Les villages ouverts abondaient bien davantage : les Helvètes en avouaient quatre cents[203] ; chez eux, sans doute aussi chez les Bituriges[204], peut-être chez tous les autres peuples gaulois, les forteresses étaient une petite minorité des lieux habités.

Il va de soi que les Celtes fortifiaient surtout les plus grosses bourgades, oppida. Toutes les places fortes dont parle César avec quelque détail pouvaient contenir des centaines et des milliers de défenseurs[205]. Toutes également étaient des villes ou des villages, je veux dire des lieux d’habitation, pourvus de foyers permanents et de familles domiciliées[206]. — Il est très rare de rencontrer dans leurs pays de ces abris fortifiés ou castella, tours de guette ou redoutes, comme il en existait un si grand nombre chez les Ligures et chez les peuples des hautes terres espagnoles[207] : j’entends par ces mots des refuges temporaires, qui ne servaient qu’en cas de guerre, où l’on gardait les réserves d’armes et de provisions, et où les combattants s’enfermaient la nuit et se dissimulaient le jour. Mention n’en est faite, au temps de César, que chez les habitants des vallées alpestres[208] et chez ces Belges voisins de la frontière qui ont conservé tant d’usages semblables à ceux des pays ligures[209]. Peut-être les Gaulois craignaient-ils, s’ils multipliaient les abris de ce genre, d’être contraints à éparpiller leurs forces militaires, ou de fournir à leurs soldats trop d’occasions de refuser le combat en rase campagne[210].

Quelle que fût leur situation, les villes principales, centres de fait ou de droit de leur cité ou de leur tribu, étaient entourées de remparts : Bibracte, Gergovie, Besançon, Alésia, Poitiers, sur la plate-forme de leur montagne solitaire[211], Paris, dans son île[212], Avaricum, sur son promontoire flanqué de marécages[213], Orléans, tête de pont sur le bord plat d’une rivière[214], sont toutes de bonnes places fortes. A côté de ces localités, dont le rôle est aussi important comme villes que comme citadelles, les tribus ou les familles gauloises gardaient des enceintes militaires sur les points les plus forts de leur pays, les plus commodes à défendre, les plus voisins des champs qu’ils exploitaient[215] : chez les Vénètes, les promontoires ou les langues de sol qui s’avancent entre les lais et relais de la mer portaient presque tous leur oppidum, protégé par le flot de marée haute contre une attaque de terre, par les bas-fonds du reflux contre un siège maritime[216] ; d’autres forteresses s’élevaient sur les hauteurs isolées qui commandent les vallées ou les campagnes d’en bas, telles que les puys qui bordent la Limagne[217], les monts qui émergent des champs de blés du Soissonnais[218]. Enfin, le long des routes qui traversaient le pays, aux principaux carrefours ou passages de rivières, et souvent à l’entrée même de leur territoire, les nations avaient construit des places fortes, villes neuves ou châteaux neufs, qui servaient de garde et de refuge[219].

En tout cela, les Gaulois ont fait preuve d’une étude intelligente de leur contrée, d’un emploi judicieux de ses ressources militaires. Ce qui apparaîtra bien dans les guerres de César, qui eut plus de villes à prendre que de combats à livrer, et à qui les sièges seuls purent faire perdre du temps, des hommes, et parfois même jusqu’à l’espérance[220].

Ce qui fit la force de résistance de ces villes, c’était d’abord l’excellence de leur situation[221]. Sauf celles qui jalonnaient les bords des rivières ou les routes de plaine, comme Orléans ou Nevers, elles s’entouraient d’obstacles naturels très difficiles à franchir : César échoua à vouloir escalader les flancs basaltiques de Gergovie[222], il n’essaya pas de l’assaut contre les monts d’Alésia et d’Uxellodunum[223], et je ne vois pas de villes situées sur des hauteurs qu’il ait pu prendre de vive force. Dans le bas pays, les marécages ou les rivières remplaçaient l’escarpement des rochers comme ligne de défense naturelle : Lutèce et Melun étaient entourés de tous côtés par les eaux de la Seine[224] ; les marais qui enceignaient Avaricum parurent plus impraticables à César que les sentiers de chèvres qui menaient à Gergovie[225].

Derrière ce premier abri, les villes avaient celui du rempart. — César nous a décrit le mode de construction des enceintes fortes de la Gaule[226]. Elles étaient constituées par un appareillage régulier de bois et de pierres. Les bois servaient d’armature : c’étaient des damiers d’énormes poutres, dont les unes, posées dans le sens de la profondeur, s’allongeaient, à deux pieds l’une de l’autre, de la façade au derrière de la muraille, dont les autres, perpendiculaires à celles-ci, étaient placées en entier dans l’œuvre intérieur[227]. Cette charpente, du reste, n’était pas continue du bas au faite de l’édifice ; les damiers de poutres ne se superposaient pas directement l’un à l’autre, mais étaient séparés par un étage de matériaux lapidaires d’une hauteur égale à l’intervalle entre deux poutres[228]. Sur les faces, on employait, à la fois comme parement de la muraille et comme assises pour les poutres de charpente, des blocs de très grand appareil, dont il n’y avait à craindre ni glissement ni éclatement ; la masse intérieure, seule, était formée de terres ou de moellons. Au surplus, la construction était faite avec art : les extrémités des poutres, soigneusement équarries, alternaient à l’extérieur avec les faces des grands blocs ; les lignes de jointure correspondaient l’une à l’autre ; les intervalles étaient réguliers, et les teintes sombres du bois formaient avec les teintes blanches de la pierre un jeu de figures géométriques que César ne trouvait pas déplaisant. Mais il admira plus encore l’extraordinaire force de résistance de ce blocage armé : le roc protégeait contre le feu, le bois amortissait le bélier[229], et d’ailleurs la longueur des poutres transversales, qui atteignait quarante pieds, était telle qu’il n’y avait ni profit à les rompre ni chance de les arracher. — C’est à propos de Bourges que César parle ainsi des murailles des cités gauloises : et on a pu constater, par l’étude des ruines, que ce système de construction fut appliqué chez les Cadurques, au mont Beuvray, un peu partout dans la Celtique propre. Il n’est pas certain qu’il se soit beaucoup propagé en dehors de cette région centrale[230]. Ailleurs, on demeurait fidèle aux bâtisses toutes de pierre, dont les ruines de Nages près de Nîmes et de Sainte-Odile dans les Vosges nous fournissent de beaux spécimens, murailles faites de blocs énormes et inégaux, aux faces mal dégrossies et aux jointures imparfaites, qui rappellent les cités pélasgiques de l’Étrurie et du Péloponnèse : les indigènes de ces régions n’éprouvaient pas le besoin de refaire leurs forteresses ou de modifier leurs habitudes de bâtir[231].

Très compactes, très solides, profondes de douze mètres et davantage[232], les enceintes gauloises n’en demeuraient pas moins d’une grande simplicité. Elles se développent sur une ligne continue, sans retours ni saillies, sans ouvrage avancé ni artifice d’ingénieur[233]. La hauteur, très variable, ne dépasse pas quelquefois cinq à six mètres[234] : les Gaulois ignoraient qu’on pût se servir, pour l’escalade, de très longues échelles et de tours mobiles. Peut-être même était-il rare que les murailles fussent précédées de fossés[235], flanquées de tours ou couronnées de parapets à merlins et créneaux[236]. Une chaussée haute et large, aplanie au sommet et percée de quelques portes[237], voilà ce qu’était l’enceinte, et rien de plus : elle ne valait que par sa masse inébranlable, et par la vaste plate-forme que son chemin de ronde offrait aux défenseurs[238].

Si l’organe de défense est si simple, c’est que les moyens de l’attaque le sont plus encore[239]. Les assiégeants commencent par entourer et isoler la forteresse, formant autour d’elle une muraille ininterrompue d’ennemis : car dans les cas de sièges, il semble qu’on appelle d’immenses multitudes. Puis, par une décharge générale de traits et de pierres, ils rendent impraticable le chemin de ronde, en tiennent éloignés les défenseurs[240]. Alors, prenant rapidement l’ordre en tortue, mis ainsi à l’abri, ils s’ébranlent tous à la fois, et précipitent leur élan contre les portes et la muraille pour démolir ou escalader l’une, briser ou incendier les autres. Ce n’est pas un siège, c’est à peine un assaut régulier : on dirait plutôt une pesée ou une poussée de tous contre tous, assez semblable au heurt des phalanges sur les champs de bataille.

Aussi la place forte ne sera-t-elle que rarement, dans une guerre gauloise, un élément de combinaisons stratégiques. Elle ne jouera pas le rôle des redoutes ligures[241] ou des tours espagnoles[242], lieux de retraite toujours prêts, nids d’embuscades, points d’appui d’escarmouches, qui brisent l’effort d’un adversaire, morcellent ses troupes, l’obligent à d’énervantes inquiétudes[243]. Dans la guerre de sièges comme dans la guerre de marches, les Gaulois n’aiment rien tant que les rencontres de masses et les luttes par forces concentrées. La forteresse gauloise, c’est surtout le vaste enclos où, à l’approche d’un ennemi trop puissant, se réfugient une armée entière et tout son peuple, femmes, enfants, vieillards et biens, pour une résistance désespérée et un suprême jugement des dieux[244]. Et par là même, la chute d’une place forte, plus encore que la perte d’une bataille, signifie l’irrémédiable désastre, et la défaite de la nation[245].

 

 

 



[1] Cf. t. I, ch. IX, § IV. — Ramus, De moribus vet. Gall., p. 32-74 (très réfléchi) ; [Bourdon de Sigrais], Considérations sur l’esprit militaire des Gaulois, 1774, p. 89-168 ; de Belloguet, III, p. 428-455 ; d’Arbois de Jubainville, La Civilisation des Celtes et celle de l’époque homérique, p. 327-395.

[2] Tacite, Hist., IV, 73-14 ; Strabon, IV, 1, 5 ; IV, 4, 2 ; César, VI, 15, 1 (fere... quotannis) ; III, 8, 3 ; 10, 3 ; 19, 6.

[3] César, VII, 32, 5.

[4] Tite-Live, XXI, 31, 6-7 ; Polybe, III, 49, 8-10.

[5] César, I, 4, 2-3.

[6] Tite-Live, XXI, 31, 8-7 ; Polybe, III, 49, 8-10.

[7] Cf. César, I, 20, 2 ; V, 50, 3 ; VI, 11, 2.

[8] Φιλόνεικοι, Strabon, IV, 4, 6 ; μαχηταί, IV, 4, 2 ; ταχύ πρός μάχην, id.

[9] Diodore, V, 28, 5 ; Posidonius ap. Athénée, IV, 40, p. 154.

[10] Diodore, V, 28, 5 ; César, VI, 13, 9 ; Posidonius ap. Athénée, IV, 40, p. 154.

[11] César, VI, 13, 9 ; Posidonius ap. Athénée, IV, 40, p. 154.

[12] T. I, ch. IX, § V ; t. II, ch. V, § XVIII.

[13] Platon, De legibus, I, 9, p. 637 ; Tacite, Germanie, 14 ; César, VI, 22, 3 ; Florus, II, 33, 47 ; Tite-Live. XXXIX, 1 ; Florus, I, 11, 7 ; Tite-Live, XLII, 59.

[14] Cf. d’Arbois de Jubainville, p. 395.

[15] César, VI, 19, 4.

[16] César, V, 50, 2 ; Tite-Live, XXI, 20, 1 ; Nicolas de Damas ap. Stobée, XLIV, 41 (fr. 105).

[17] César, VI, 18, 3.

[18] Mommsen, Staatsrecht, III, p. 5 (chez les Sabins ou les Romains ?). Comparez cependant les Gésates, t. I, ch. VIII, § VIII, en note, ch. IX, § I, note 7.

[19] César, VI, 14, 1.

[20] Diviciac ; peut-être le gutuater des Carnutes ; les druides, VI, 13, 6. Les dédicants de l’autel de Paris (C. I. L., XIII, 3026), sans doute les Nautes, ont le costume militaire (archaïque, je crois), lance et bouclier, bien qu’ils semblent en fonction religieuse. Diviciac a de même porté le bouclier.

[21] Hirtius, VIII, 12, 5 ; cf. Ammien, XV, 12, 3.

[22] Prope confectus ætate, VII, 57, 3 ; 62, 5 et 7.

[23] Cum vix equo propter ætatem posset uti, VIII, 12, 5 ; cf. 4.

[24] Cf. César, V, 54. 2 (?) ; VI, 24, 3 ; II, 4, 5.

[25] Fortes umbræ, Silius, V, 652 ; fortes animæ, Lucain, I, 417 ; cf. αί μεγάλαι ψυχαί, Plutarque, De def. orac., 18, p. 419.

[26] César, VI, 14, 5 ; VII, 76,13 ; Ælien, Hist. var., XII, 23.

[27] Cf. t. I, ch. IX, § IV.

[28] Covinnus en celtique (Holder, I, c. 1152).

[29] T. I, ch. IX, § IV.

[30] Strabon, IV, 5, 2 ; Diodore, V, 29, 1.

[31] Ce n’est pas par fantaisie de poète, je crois, que Lucain a donné à chacun des peuples gaulois dont il parle une caractéristique (Pharsale, I, 397-443). César lui-même rappelle quelques-unes des habitudes militaires propres de certains peuples (De bello Gallico, II, 17, 4 ; III, 13 ; De bello civili, I, 51, 1). Remarquez aussi chez Diodore (V, 29, 2) et Strabon (IV, 5,2) l’emploi d’expressions restrictives. Enfin, voyez chez les Germains les grandes différences d’armement de peuple à peuple ; Tacite, Germanie, 30, 32, 43.

[32] Bituit le roi des Arvernes semble avoir encore combattu sur son char : Florus, I, 37, 5 ; Babelon, Vercingétorix, p. 3-4 et 13, fig. 1-4 (Rev. num., 1902) ; cf. Athénée, IV, 37. Mais peut-être ce mode de combat était-il dés lors, chez ces peuples, réservé au roi.

[33] Cf. Helbig, Sur les attributs des Saliens, 1905 (Mém. de l’Acad. des Inscr., XXXVII, IIe p., p. 64 et s.) ; le même, Mélanges Perrot, 1903, p. 167 et s.

[34] Lucain (I, 426) cite le char de guerre (covinnus) comme propre à une nation qu’il appelle spécialement belge : je songe aux Rèmes, chez lesquels abondent les sépultures à chars (Reinach, Catalogue, VII, 3, 5, p. 174-175) ; monstrati me semble à conserver : Lucain veut dire que le covinnus est, selon lui, d’importation étrangère, bretonne. Si César n’eut pas à le combattre, c’est que les Rèmes furent ses alliés constants, et d’ailleurs n’oublions pas que César ne parle presque jamais des armes indigènes. Il a pu être répandu aussi chez les Suessions, proches parents des Rèmes, et chez les Lingons. Chez les Turons ? (Cab. des Méd., 6992-95, peut-être imitation de denier). On a trouvé des chars de guerre ou de parade à peu prés partout dans les tombes, mais surtout celles du Nord-Est, et je crois fermement que toutes ces sépultures sont postérieures à 300 et contemporaines de la civilisation belge. Mazard, Essai sur les chars gaulois de la Marne, Rev. arch., 1877, I ; et, en dernier lieu, Hubert, Congrès international d’Anthropologie, XII, Paris, 1900, p. 410-7 ; une nouvelle monographie de la question est à écrire.

[35] César, IV, 24, 1.

[36] Je doute que les chars à quatre roues, trouvés dans les fouilles, soient des chars de guerre.

[37] Babelon, fig. 16-19 (chars bretons) ; Diodore, V, 29, 1 ; César, IV, 33, 1-2 ; Mazard, p. 161, 225 et s.

[38] Diodore, V, 29, 1 ; César, IV, 33, 1-2 ; 16, 2.

[39] Cf. en Bretagne, César, IV, 24, 1 et 3 ; 33, 3 ; V, 10, 2 ; V, 19, 1. César s’est très bien rendu compte de l’avantage de cette arme (mobilitatem equitum, stabilitalem peditum, IV, 33, 3).

[40] C’est le cas chez les Germains, César, IV, 2, 2.

[41] César, I, 31, 6 ; VII, 38, 2.

[42] De La Tour, table du Catalogue du Cabinet des Médailles, p. 270-275.

[43] Strabon, IV, 4, 2.

[44] César, VII, 31, 5 ; I, 31, 6 ; VII, 38, 2 ; V, 3, 1.

[45] V, 3, 1.

[46] César, VII, 31, 5 ; III, 20, 3.

[47] Cf. César, IV, 2, 2. Cf., pour ce qui suit, ici, ch. VIII, § VI.

[48] Freins spéciaux aux Celtes, Arrien, Indica, 16, 10 ; cf. Horace, Odes, I, 8, 6.

[49] César, IV, 2, 4-5 ; Plutarque, César, 27. — On a trouvé traces d’éperons à La Tène ; Grass, p. 31-2. — Ici se pose la question si controversée de la ferrure des chevaux gaulois : on admet d’ordinaire aujourd’hui, et avec beaucoup de vraisemblance, que l’usage de la ferrure a pris naissance en Gaule ; cf., dans des sens divers : Nicard, Les Anciens ont-ils connu la ferrure à clous ?, Mém. de la Soc. des Ant. de Fr., XXIX, 1866, p. 64 et s. ; Duplessis, Ét. sur l’origine de la ferrure du cheval chez les Gaulois, Mém. lus à la Sorbonne en 1866, Arch., 1867 ; Quicherat, Rev. des soc. sav., Ve s., VI, a. 1873, II, p. 250 et s. ; de Saint-Venant, Anciens fers à chevaux, Bourges, 1902 (Mém. de la Soc. des Ant. du Centre, XXV) ; etc.

[50] Lucain, I, 425 (si le vers n’est pas interpolé) ; Arrien, Tactique, 33, 1 ; 37, 4 ; 42, 4 ; 43, 2 ; 44, 1 ; cf. Tacite, Germanie, 6.

[51] Arrien, Tactique, 37, 4 (petrinos) ; 42, 4 (xynema) ; 43, 2 (toloutegon ?) : ces mots désignent des manières de lancer le javelot à cheval.

[52] Ce qui reste vrai de la cavalerie française : Je n’estime point, disait Montaigne, qu’en suffisance et en grâce à cheval nulle nation nous emporte (I, 48).

[53] Tacite, Germanie, 6 ; César, IV, 2, 2.

[54] Cela me parait résulter de César, IV, 2, 2, et de l’attitude de la cavalerie gauloise en face de la cavalerie germaine, César, V, 12, 1 ; VII, 13, 1-2 ; 67, 5 ; 70, 1-4 ; 80, 6-7.

[55] César, IV, 33, 3.

[56] César, VII, 64, 1 (15.000 cav.) ; 71, 3 et 77, 8 (80.000 fant.) ; 76, 3 (8.000 cav. et 250.000 fant.).

[57] César, I, 18, 5 ; VII, 31, 5.

[58] VII, 83, 4 ; cf. 54, 1-2 ; 4, 8.

[59] César, VII, 80, 3 ; 18, 1 ; cf. I, 48, 5-7 (chez les Germains).

[60] II, 17, 4 (Nerviens) ; V, 3, 1 (Trévires).

[61] Chez les Salyens de Provence, il y a de bonnes forces de cavalerie (chevaux de Camargue ?) et d’infanterie, Strabon, IV, 6, 3.

[62] De Bello Gallico, III, 20, 4 ; 21, 1 ; Strabon, IV, 6, 2 ; cf. De Bello civili, I, 39, 2. Cf. t. I, ch. IV, § V.

[63] César, VII, 80, 3 ; 18, 1 ; cf. I, 48, 5-7 (chez les Germains) ; cf. Hirtius, VIII, 36, 2 ; Tacite, Germanie, 46.

[64] César, II, 17-28.

[65] Cf. t. I, ch. IX, § IV ; de Lagoy, Recherches numismatiques sur l’armement et les instruments de guerre des Gaulois, Aix, 1849 ; Fallue, De l’Armement... des Celtes, Recueil des publ. de la Soc. Havraise, a. 1864-5 (1866), p. 277 et s. (superficiel) ; Gross, La Tène, 1886, p. 20.29 ; Verchère de Reffye, Les Armes d’Alise (Rev. arch., 1864, II).

[66] Même remarque pour la Bretagne entre César et Claude ; cf. Tacite, Agricola, 36.

[67] Cf. la remarque de Dion Cassius à propos des Vénètes, XXXIX, 42, 4.

[68] Strabon, IV, 4, 3 (ένιοι) ; IV, 4, 6 ; César, II, 6, 2 ; VII, 31, 4 ; 41, 3 ; 81, 2.

[69] César, V, 35, 8 ; 43, 2 ; De b. c., I, 51, 1. Remarquez l’absence presque complète d’arcs et de flèches sur les monnaies gauloises, qui portent si souvent l’image d’armes de guerre. De même dans les tombes, qui renferment d’ordinaire l’attirail de guerre.

[70] Sur le lancement du javelot à char, à cheval, voir plus haut ; Blanchet, Monnaies, p. 158. Les tombes ont livré un grand nombre de fers de lances ou de javelots, qui mériteraient une étude spéciale : Saint-Germain, VII, 22, p. 108 (à bords ondulés, genre pertuisane, cf. Desor, Palafittes, p. 80-81 ; Grogs, p. 25, 25, 27, 30, p. 109 (énorme pointe à feuille de laurier) ; etc.

[71] Strabon, IV, 4, 3.

[72] Ou mataris. César, I, 28, 3 (les Helvètes ne s’en servent que pour défendre leur campement) ; Strabon, IV, 4, 3 ; Hesychius, s. v. μαδάρεις ; Nonnius, p. 550. On peut supposer que c’était un javelot à fer large et lourd. Mais on a songé aussi à un couteau de jet (Lindenschmit, Handbuch der deutschen Alterthumskunde, I, 1880, p. 207). Le mot est sans doute celtique ; cf. Holder, I, c. 458.

[73] César, V, 44, 7, 10 (javelot de piéton, utilisé dans la mêlée, Nerviens) ; cf. Silius Italicus, III, 363 ; Nonnius, p. 551 ; Végèce, II, 15 ; III, 14 ; IV, 29. A pointe triangulaire ? cf. Blanchet, Monnaies, p. 158 = Dict. arch. de la Gaule, monnaies, n° 294 (javelot de cavalier). Le mot ne paraît pas celtique. Tela, Tite-Live, XXI, 28, 1.

[74] César, I, 20, 3 (Helvètes, dans la défense de leur campement) ; V, 35, 6 (Éburons) ; V, 48, 5 (Nerviens). C’est sans doute un petit dard de chasse et de piéton. Je doute que le mot soit celtique ; cf. Holder, II, c. 1902 et aussi c. 1024 (sparum, pas davantage gaulois, je crois).

[75] Diodore, V, 30, 4, qui semble dire que le javelot est tout entier en spirale ; peut-être s’agit-il de fers de lances à bords découpés.

[76] César, V, 43, 1 (Nerviens).

[77] Virgile, Én., VII, 741 ; Servius ad Æn., VII, 741 (qui parle de lanières pour la ramener) ; Isidore de Séville, XVIII, 7, 7 ; Silius, III, 277 ; Valerius Flaccus, VI, 83 ; peut-être Quadrigarius ap. Aulu-Gelle, IX, 11, 5 (telum reciprocans). Attribuée surtout aux Teutons ; sans doute peu usitée en Gaule, notamment en Celtique. Il semblerait, d’après les textes, que ce fût une sorte de hasta ou de lancea (textes cités par Holder, I, c. 840). Cependant beaucoup y voient une massue ou une hache de jet : Annalen der Physik und Chemik, de Poggendorff, XLV, 1838, p. 474 et s. (comparaison avec le boumerang australien) ; Wex, Zeitschrift für die Allerthumswissenschaft, 18.39, c. 1153 et s. ; Bormans, Essai de solution philologique d’une question d’archéologie, Bruxelles, 1873 ; Bertrand, Rev. arch., 1884, I, p. 105-8 ; Reinach, Les Celles... du Pô, p. 194 et s. (qui songe à la francisque).

[78] Hesychius, s. v. γαΐσος ; cf. Pollux, VII, 33, 156. C’est au gæsum que pense Diodore, V, 30, 4. Textes chez Holder, I, c. 1517 et suiv. Le mot, d’origine celtique, est entré dans le grec et le latin.

[79] Properce, V, 10, 42 (Belge) ; cf. Diodore, V, 29, 1. César, III, 4, 1 (Alpins du Valais) ; Virgile, Én., VIII, 661-2 (Alpina gæsa). Bituit est encore armé du javelot (Babelon, Vercingétorix, fig. 1-4). Cf. Reinach, Dict. des Ant., s. v. ; Blanchet, Monnaies, p. 202 (Cab. des Méd., n° 6992-5).

[80] Strabon, IV, 4, 3 ; les textes de César, III, 4, 1, et V, 44, 7, 10 ; I, 20, 3 ; V, 35, 6 ; V, 48, 5 ; V, 43, 1.

[81] Diodore, V, 30, 4 : il donne au fer (à ce qu’il me semble) prés de 2 palmes, 0,15 de large (cf. les fers cités plus haut en note) ; V. 31, 5 ; Strabon, IV, 4. 3. Le mot lancia, lancea a été emprunté par les Latins à la langue celtique (έκεΐνοι λαγκίας καλοΰσι, Diodore), Holder, II, c. 131 et suiv.

[82] Je crois bien que c’était surtout une arme de cavaliers, Hirtius, VIII, 48, 5 ; Lucain, I, 423. Posidonius vit encore, à la cour des chefs gaulois, des porte-lances, δορυφόροι (Athénée, IV, 36 ; cf. Appien, Celtica, 12). On la trouve aussi chez les Salyens et leurs voisins (bas-reliefs d’Entremont, Gibert, Le Musée d’Aix, 305-7 = Espérandieu, I, p. 83-5 ; monument de Biot, Rev. des Ét. anc., 1907, p. 65). Lance des monnaies de Vepotal. (n° 4483-94). Lances chez les Nautes parisiens (Musée de Cluny), sur l’arc d’Orange, etc.

[83] Saint-Germain, VI, 9, Catalogue, p. 150 ; 8 ; 20, p. 154 ; 31, p. 158. VII, 32, p. 169. Il semble qu’on doive distinguer, entre autres armes courtes : 1° le poignard suspendu au ceinturon par deux courroies, véritable arme de guerre, qu’on portait parfois à droite, au lieu et place de l’épée (Pro Alesia, I, p. 113 et pl. 17 ; Rev. arch., 1902, II, p. 184 = Saint-Germain, XI, 1) ; 2° une sorte de petit couteau de table, de chasse ou de guerre (Posidonius ap. Athénée, IV, 36, p. 152), que les Gaulois portaient dans une gaine spéciale à côté du fourreau de leur épée (Blanchet, Rev. des Ét. anc., 1907, p. 181 et s.) ; 3° le grand coutelas de chasse, dont un très beau spécimen, celui de Sept-Saulx (Marne), atteint 0 m. 48 (Nicaise, L’Époque gauloise, p. 15 ; cf. S.-G., IX, 3 n, p. 172). Cf. Ardant, Poignards gaulois, Bull. de la Soc. arch. du Limousin, IX, 1859, p. 132-6 (très court).

[84] Je tiens à dire semblent, parce que le fait ne me parait pas rigoureusement prouvé.

[85] Cf. t. I, ch. IX, § IV et § VIII (bibliographie de la question des épées), t. II, ch. VIII, § XII. Il n’est pas prouvé que le raccourcissement constaté dans les épées gauloises ne soit pas le résultat du contact arec Rome (cf. Saint-Germain, Catalogue, p. 160, 112, 168). Les épées qui servaient aux suicides ou aux meurtres rituels étaient peut-être d’autres épées que la latte de guerre, des épées à pointu (Athénée, IV, 40, p. t54 ; Strabon, IV, 4, 5 ; Parthénius, 8). Les courtes épées figurées isolément sur les monnaies (Cab. des Méd., p. 281, n° 6926-33, 6937-8, 6941-5) sont, semble-t-il, des poignards ou des épées sacrées (de bronze ?), et non les armes habituelles des guerriers. Au contraire, l’épée du guerrier (type Dubnoreix, n° 5037-48) est bien la longue épée de combat.

[86] Plus loin, ch. VIII, § XII.

[87] Car il semble, d’après les fouilles faites dans leurs sépultures, que les Belges et notamment les Rèmes aient conservé ou adopté l’épée à pointe, plus courte (ce qu’on appelle le type marnien ; Reinach, Cat., p. 162-3, etc.). D’une manière générale, les Belges s’attardaient aux vieux usages, et, comme ces usages, char de guerre, armes de jet, qui sont toutes aussi de pointe, avaient à certains égards plus de valeur militaire que les nouvelles armes, cela aide à expliquer la supériorité de ces peuples parmi les Gaulois. — Il faut cependant rappeler cette réserve que l’archéologie funéraire ne donne pas toujours l’état réel de la vie contemporaine d’un pays.

[88] Diodore, V, 30, 3 et 4 : il déclare la pointe des javelots bien supérieure à celle de l’épée ; Strabon, IV, 4, 3 ; César, V, 42, 3 ; bas-reliefs d’Entremont, n° 305 = Espérandieu, p. 83 ; Musée de Saint-Germain, VI, 6, p. 150, type ancien ; VI, 26, p. 157 ; 36, p. 160 ; IX, 1, p. 171 ; XIII, 26-27, p. 111-2 ; contemporains de César ; Desor, Palafittes, p. 81-6 ; de Saint-Venant, Bull. arch., a. 1897, en particulier p. 514-516 (très important, signale une épée de 0 m. 97 pour la lame seulement).

[89] Pline, XXXII, 23. Cf. le discoloribus armis de Bituit, Florus, I, 37, 5 ; armis pictis des Lingons, Lucain, I, 398.

[90] Strabon, IV, 4, 3 ; Diodore, V, 30, 3.

[91] Diodore, V, 30, 3 ; Saint-Germain, VII, 28, p. 168.

[92] Diodore, V, 30, 3 (ne parle que de ceinturons).

[93] Cf. Servius, ad Æn., IX, 746 [749] : Alte consurgit in ensem : genus feriendi Gallicanum.

[94] Tout cela a été bien vu par Tacite, parlant de l’épée des Bretons (Agricola, 36) : Enormes gladios..., sine mucrone, complexum armorum et in aperto pugnam non tolerabant.

[95] Cf. t. I, ch. IX, § IV.

[96] Diodore, V, 30, 3 (γυμνοί, parle d’une partie des Gaulois et peut-être simplement de l’absence de cuirasses) ; V, 29, 2 (parle, je crois, de quelques possédés ou exaltés qui combattent le torse réellement nu).

[97] Diodore, V, 30, 3 ; V, 27, 3 ; cf. Plutarque, César, 27. Les ruines n’ont presque rien livré qui rappelle une cuirasse, et je ne vois à alléguer ici que le buste de Grézan (Espérandieu, I, p. 295). Cuirasse des monnaies de Vepotal. (n° 4483-94), remarquable par les pièces d’ajoutage qui protègent les épaules, mais déjà la civilisation romaine a pénétré en Gaule ; sur celles de Litavic. ? (n° 5057-79). Cf. Laurent et Dugas, Rev. des Ét. anc., 1907, p. 63-4.

[98] Un umbo ou une bosse renforçait parfois la partie centrale de l’arme, et protégeait le milieu du corps du soldat ; c’était l’umbo qui portait les ornements. Posidonius ap. Athénée, IV, 40 ; César, I, 25, 3 ; II, 33, 2 (ces derniers en écorces ou en baguettes, recouverts de peau, mais improvisés) ; Strabon, IV, 4, 3 ; Diodore, V, 30, 2 ; Pan. vet., 8, 4 ; Plutarque, César, 27 ; bouclier long sur les monnaies Vepotal. (n° 4483-94) ; Saint-Germain, Cat., VII, 26, p. 168 (umbones ou bosses) ; XIII, 26 a, p. 111. Laurent et Dugas, p. 64-5. — Les boucliers arrondis des amazones nues sur les monnaies des Redons (n° 6756-64), des cavaliers sur celles des Pictons (n° 4427-4470), me paraissent des boucliers d’espèce religieuse et non militaire. De même, ceux des Nautes parisiens (Musée de Cluny). Et dans ces cas-là, c’est sans doute l’armement primitif qui a été conservé pour reparaître dans les scènes religieuses, comme chez les Saliens de Rome. — Cf. ch. VIII, § XIV (ornements en corail).

[99] César, I, 25, 3.

[100] Diodore, V, 30, 2, et d’après le petit nombre trouvé en Gaule : Saint-Germain, VI, 2, Catalogue, p. 149 (Amfreville) ; IX, 2, p. 172 (La Gorge-Meillet ; cf. Fourdrignier, Double Sépulture, p. 7 et s.) ; IX, 10, p. 174 (Berru ; cf. Bertrand, Archéologie, p. 356 et s.) ; Nicaise, L’Époque gauloise, p. 12 (Sept-Saulx) ; du Chatellier, Habitation gauloise (Bull. arch., 1896), p. 4 (Tronoën, Finistère) ; le casque à crinière du guerrier de Grézan (Espérandieu, I, p. 295) ; etc. Au surplus, il n’est pas prouvé (sauf pour ce dernier) que ce soient des casques, et que ce ne soient pas plutôt des coiffures de parade ou de cérémonie religieuse, à forme archaïque : ce qui est aussi le cas des coiffures (casques ?, bonnets ou turbans ?) des Nautes parisiens. Le vrai casque gaulois semble apparaître sur deux monnaies de Vercingétorix (collection Changarnier et Cab. des Méd., n° 3375).

[101] Dictionnaire des Antiquités, s. v. Galea (Reinach), p. 1438-9, fig. 3431-3 ; Rœssler, Celtica, II, p. 83 et s. ; Laurent et Dugas, p. 60-3 ; ici, ch. VIII, § XII.

[102] Diodore, V, 30, 2 ; Dict. des Ant., l. c. ; cf. chez les Samnites, Tite-Live, IX, 40, 3 ; chez les Cimbres, Plutarque, Marius, 25. Cf. p. ch. VIII, § XIV (ornements en corail).

[103] Je ne peux admettre l’hypothèse courante, que les textes dont nous nous servons ici, et qui proviennent en dernière analyse de Posidonius, se rapportent non aux Gaulois mais aux Cimbres et aux Teutons. C’est, vraiment, faire trop bon marché de la tradition écrite, et c’est prêter gratuitement à Strabon ou à Posidonius de singulières et constantes étourderies.

[104] César en 52 prit beaucoup plus d’enseignes qu’il ne combattit de cités (VII, 88, 4). Cf. Revue des Études anciennes, 1901, p. 82 ; 1904, p. 48 et suiv. ; ici, ch. I, § III.

[105] Cf. Polybe, II, 32, 6 ; Tacite, Hist., IV, 22.

[106] Cf. Polybe, II, 32, 6.

[107] César, VII, 2, 2.

[108] Cabinet des Médailles, n° 5026-48 (Dumnorix ?), 5057-79 (Litavic.), 4483-94 (Vepotal.).

[109] Cabinet des Médailles, n° 4367-9 (Lucter ?), 8513 ?.

[110] Outre les n° des deux notes précédentes : Cab. des Méd., p. 303 et suiv. ; arc d’Orange ; monument de Biot ; cf. Reinach, Bronzes, p. 255 et s. ; Laurent et Dugas, l. c., p. 64.

[111] Arrien, Cynégétique, 36, 4.

[112] Cf. Tacite, Hist., IV, 22 : Depromptæ silvis lacisve ferarum imagines.

[113] Le nom est celtique, Eustathe à Homère, Iliade, Σ, 219, p. 1139, 57.

[114] Όξύφωνος, Eustathe, ibid. ; Diodore, V, 30, 3 ; arc d’Orange ; monument de Biot ; Cab. des Méd., n° 5037-48 (Dumnorix). Cf. Laurent et Dugas, l. c., p. 58-60 et pl. 6.

[115] Orose, V, 14, 1 ; Appien, Celtica, 12 ; Strabon, IV, 5, 2 (notamment les dogues importés d’Angleterre).

[116] T. I, ch. VIII, § I ; ch. IX, § V.

[117] César, V, 6, 3.

[118] César, VI, 16, 2, à rapprocher de VII, 4, 9-10, et de Lucain, I, 450-1.

[119] César, VII, 2, 2-3 ; 68, 7.

[120] D’après les monnaies qui figurent un cheval conduit par une épée (Cab. des Méd., n° 6922), un maillet (n° 6931), une tête (n° 6504 et suiv.), etc.

[121] César, VII, 66, 7.

[122] Hirtius, VIII, 43, 5 ; cf. II, 31, 2.

[123] Les trophées ou monceaux d’armes, élevés après la victoire (Ælien, Hist. var., XII, 23), étaient évidemment consacrés aux dieux ; je doute qu’ils fussent, comme l’a interprété Ælien, des monuments de souvenir.

[124] Cf. t. I, ch. IX, § V. Peut-être, dans certains cas ou chez certains peuples, se bornait-on à scalper la tête et garder la chevelure : voir les sculptures de l’arc d’Orange, Espérandieu, I, p. 197 ; cf. de Belloguet, II, p. 119 ; III, p. 101.

[125] Diodore, V, 29, 4 ; Strabon, IV, 4, 5.

[126] Cabinet des Médailles, n° 5037-48 (réserves de Rœssler, Celtica, II, p. 84). A cheval et la tête au cou de la bête, bas-relief d’Entremont, n° 305 A = Espérandieu, I, p. 83.

[127] Bas-reliefs d’Entremont, n° 305-7 = Espérandieu, I, p. 83-6 ; arc d’Orange.

[128] Les têtes dites fort à tort d’Ogmios (Cab, des Méd., p. 293) sont, je crois, des têtes-enseignes, flanquées souvent d’autres têtes coupées. L’idée de voir en elles des têtes coupées vient de P.-Ch. Robert (C. r. de l’Acad. des Inscr., 1883, p. 272-3). Cf. plus loin, ch. VIII, § XIX.

[129] Cabinet des Méd., n° 6304 et suiv. ; cf. Hucher, L’Art gaulois, I, p. 38, qui, tout en pensant à Ogmios, songe aussi à une tête élément de la pompe triomphale.

[130] Diodore, V, 20, 4-5 ; Strabon, IV, 4, 3 : tous deux d’après Posidonius.

[131] Cela parait résulter du rôle des têtes coupées chez certains peuples anciens (Hérodote, IV, 103) et contemporains (L’Anthropologie, 1903, p. 96).

[132] Strabon, IV, 4, 3.

[133] Cf. de Belloguet, p. 98 et suiv.

[134] Cf. ch. II, §§ I, II et VI.

[135] Ch. II, § VI.

[136] César, VII, 37, 1 (cf. 34, 1) ; 66, 3 ; 67, 7 ; I, 18, 10 ; VIII, 12, 4 ; II, 6, 4.

[137] Ch. II, § I.

[138] Cf. ch. II, § VI.

[139] Vercingétorix 2 fois (VII, 4, 6 ; 63, 6) ; Camulogène (VII, 57, 3) ; Viridovix (III, 17, 2) (en Belgique).

[140] VIII, 6, 2.

[141] VII, 76, 3.

[142] César, VII, 4, 9-10 ; 14 et 15 ; 20 et 21 ; 29 et 30 ; 30, 34 ; 64 ; 66 ; 71 ; 77-78 ; 89.

[143] III, 18, 7.

[144] César, VII, 4, 9-10 ; 14 et 15 ; 20 et 21 ; 29 et 30 ; 30, 34 ; 64 ; 66 ; 71 ; 77-78 ; 89 ; cf. ch. X, § II.

[145] VII, 21, 1.

[146] Cf. Strabon, IV, 4, 2.

[147] César, De bello civili, I, 51, 1 ; De bello Gallico, VII, 18, 3 ; VIII, 14, 2 ; 29, 2. Avec les réserves faites ch. XI, § IX.

[148] II, 10, 4 ; III, 18, 6.

[149] I, 12, 2-7 (pars = pagus).

[150] I, 15, 2.

[151] V, 49, 1 ; VII, 16, 2 ; 18, 3 ; 61, 1 ; 83, 4 ; VIII, 12, 1. Et il reste encore même beaucoup de négligence sous Vercingétorix, VII, 44, 1, rapproché de 46, 5.

[152] I, 12, 3 ; 13, 2 ; II, 10, 2 ; VIII, 30, 3 ; Strabon, IV, 4, 2. Exception en 51, VIII, 15, 5-3.

[153] César, I, 15, 2 ; VII, 82, 1 ; Strabon, IV, 4, 2.

[154] On verra des exceptions plus bas, § VIII, et chez les Belges dans la dernière année de la guerre des Gaules, VIII, 12, 1 ; 17, 1.

[155] VII, 35 ; VII, 45, 8 ; 60 et 61.

[156] Strabon, IV, 4, 2.

[157] Mais chaque cité et sans doute chaque pages a son campement propre : VII, 28, 6 ; 19, 2 (generatim = per pagos ; il faut laisser in civitates dans le texte) ; 36, 2, cf. 46, 3.

[158] I, 24, 4 ; 26, 3-4 ; VII, 18, 3.

[159] VIII, 36, 3 ; cf. note suivante.

[160] Cf. V, 42 ; VII, 29, 7 ; 30, 4. On verra l’éducation militaire des Gaulois, Celtes et Belges, se former à ce point de vue en 54-51 : ibid., et VIII, 7, 4 ; 11, 1 ; 16, 3.

[161] César, I, 24, 8 ; III, 4, 1 ; 18, 7. Comme type de bataille où les Gaulois risquent toutes leurs forces, la bataille navale des Vénètes (III, 18).

[162] VII, 14, 2 ; 84, 2.

[163] Diodore, V, 29, 2-3 (Posidonius).

[164] Diodore, V, 31, 5.

[165] Bataille contre les Helvètes en 58 : I, 24, 4 ; I, 25, 2-4 (confertimima acie, qui est à maintenir dans le texte, phalange facta) : la disposition n’est pas nettement indiquée par César, mais me semble résulter du récit, et de ce qu’il dit pour les Gaulois, II, 6, 2 (testudine facto), VII, 85, 5 (id.), et pour les Germains, I, 52, 4 et 5 ; chez les Cisalpins, t. I, ch. IX, § IV. L’expression de cuneatim (défense d’Avaricum en 52, VII, 28, 1) doit désigner une tortue tout aussi massive, mais moins considérable et se présentant en pointe ou en coin. Je n’arrive pas toujours à différencier phalange, testudo et cuneus (cf. Tite-Live, X, 29, 5-7, 12).

[166] I, 25 (bataille contre les Helvètes) ; cf. I, 52, 4-6 (la phalange germaine, qui est de même nature, résiste bien mieux) ; cf. t. I, ch. IX, § IV, note 126 (bataille de Sentinum en 295, Tite-Live, X, 29, 6 et s.).

[167] Confertissimo agmine, II, 23, 4.

[168] C’est sans doute au moment de cette course, et avant le contact, que les Gaulois lançaient leurs javelots ou leurs flèches, quand ils en lançaient. Car il me semble qu’ils avaient toujours hâte d’en arriver à la main armée. Mais aucun texte ne permet de préciser.

[169] II, 19, 7 et 8 ; 23, 1 (défaite des Atrébates) ; III, 19, 1-3 (défaite des Unelles et autres).

[170] II, 19, 7 et 8 ; 23, 4, 5 (bataille contre les Nerviens).

[171] Cf. Le Spectateur militaire, LVI, 1er août 1904, p. 199 et suiv. Il est bien probable que les Gaulois ont réfléchi et discuté sur ces choses, tout comme les théoriciens de maintenant ; cf. César, VII, 4, 8 ; VII, 64, 1 et 2.

[172] VII, 64, 15 ; 76, 3 ; cf. VII, 4, 8.

[173] VII, 67, 4 ; cf. t. I, ch. XI, § IV. La cavalerie romaine sera d’ordinaire inférieure à la cavalerie gauloise, I, 24, 5 ; VII, 13, 1 ; 70, 2-6 ; 80, 6 ; mais celle-ci le sera à la cavalerie germaine, dont les rangs sont plus serrés, et arrivent, je crois, moins en désordre ; cf. I, 15, 3 ; IV, 12 ; VII, 13, 1 ; 70, 2-6 ; 80, 6.

[174] I, 25 et 26 ; II, 10 ; III, 18 et 19 ; V, 58 ; VII, 67, 70, 80 ; cf. t. I, ch. IX, § IV. — La question importante, en ce qui concerne une bataille gauloise, est celle de l’emploi respectif de l’épée, de la lance et de l’arme de jet. J’avoue ne pouvoir arriver à la résoudre d’une manière satisfaisante, ni pour un combat d’infanterie ni pour un combat de cavalerie. Les Gaulois se servent du javelot dans une attaque à distance (Éburons, V, 35, 2 et 4) ; mais il n’est nulle part attesté qu’ils le lancent avant d’en venir aux mains. En revanche, ils s’en servent parfois au cours de la mêlée (V. 44, 6, 7, 10 ; II, 25, 1 ; 27, 4) : mais il s’agit dans ces cas des Nerviens et des Éburons. Tout cela semble bien indiquer que les armes de jet, au moins dans la Celtique propre, étaient surtout réservés pour les sièges ou les défenses des places (c’est le cas : I, 26, 3 ; II, 6, 3 ; V, 2, 4 ; 5, 3 : 43, 4 ; 51, 2 ; 57, 3 ; 58, 2 ; VII, 41, 3 ; 72, 2 ; 82, 2 ; 85, 4 ; 86, 5 ; VIII, 9, 4 ; 42, 5). Le rôle de la lance est encore plus obscur ; elle n’apparaît qu’une seule fois, dans une poursuite faite par des cavaliers gaulois (VIII, 38, 5). On peut conjecturer, d’après un texte de Diodore (V, 31, 5), qu’un engagement à la lance précédait la bataille à l’épée. Il est à noter que César ne parle pas davantage d’épées gauloises (nommées deux fois, et en dehors d’une bataille, V, 42, 3 ; VIII, 23, 6). Tout cela fait que ce récit de huit années de guerres nous renseigne fort mal sur la manière dont se battaient les Gaulois : horum Cæsar præcipue nihil indicavit, dit justement Ramus (p. 38).

[175] César, III, 23, 8 ; 25, 1 (Aquitains) ; V, 42 (Nerviens en 54).

[176] II, 19 (Nerviens) ; III, 4 (Alpins) ; III, 20, 4 ; 23 et 24 (Aquitains) ; V, 32-33 (Éburons). De même les Bretons (V, 19). De même les Bellovaques en 51, VIII, 7, 7.

[177] T. I, ch. VIII, § XI.

[178] César, I, 8, 4 ; 12, 1.

[179] VII, 58, 4 ; autres à Paris, VII, 60, 4.

[180] III, 11, 5.

[181] III, 11, 5.

[182] IV, 22, 3 ; V, 2, 2.

[183] T. I, ch. IV, § VI. Scientia atque usu nauticarum rerum reliquos antecedunt, César, III, 8, 1.

[184] III, 8, 1.

[185] T. I, ch. IV, §§ VIII et XI.

[186] Strabon, IV, 4, 1.

[187] Cf. t. I, ch. I, § IX, t. II, ch. XIV, § IX.

[188] Ce qui suit, d’après César, III, 13, Dion, Cassius, XXXIX, 41, et Strabon, IV, 4, 1 ; ces deux derniers ajoutent ou changent quelque chose à la description de César : ce qui me fait croire à l’existence d’un autre récit de la guerre vénète.

[189] La réintroduction de ce genre de câbles [en fer] ne remonte pas à plus d’une quarantaine d’années, et constitue une des améliorations capitales de la marine moderne ; Bornet, Bull. de la Soc. nivernaise, IIe s., II, 1867, p. 61.

[190] Strabon ajoute que des interstices étaient laissés entre les planches (de la cale ?) et calfatés d’algues, pour empêcher le chêne de se dessécher lorsque le navire est tiré à terre ; Pline (XVI, 158) parle de calfatage à l’aide de roseaux chez les Belges, et il désigne peut-être par là les Armoricains.

[191] César, III, 13, 2 ; 14, 4.

[192] Transtra (III, 13, 4) : elles étaient fixées à des ceintures d’un pied de large (trabibus), qui renforçaient le bordage aux environs de la flottaison ; cela, d’après Serre (Les Marines de guerre de l’Antiquité, 1891, p. 336). On accepte d’ordinaire que trabibus est un qualificatif de transtra.

[193] III, 13, 8.

[194] Explication donnée par Serre (p. 313) de tenuiter confectæ (III, 13, 6) ; on traduit généralement par travaillées de façon à être amincies.

[195] III, 13, 7-9 ; 14 et 15 ; Dion, XXXIX, 41 et 42. Les monnaies gauloises présentent quelques figures de vaisseaux (n° 8535-9, 8607-17, 9444-9, toutes bien douteuses) ; la seule un peu nette (n° 6926-9, Unelles, Blanchet, p. 309, aurige tenant le vaisseau), présente un grand mât en forme de croix, et deux têtes fantastiques ornant l’avant et l’arrière. L’arc d’Orange offre des figures de proues, de poupes, de mâts, et de toutes les parties de l’équipement d’un navire.

[196] Fallue, Diss. sur les oppida gaulois, Rev. arch., XIIe a., IIe p., 1836, p. 445 et s. Keller, Lieux de refuge des anciens Helvètes, Mém. de la Soc... des Ant., XXXII, 1871, p. 133 et s. ; de La Noë, Principes de la fortification antique, 1888, p. 33 et suiv. ; Bertrand, Druides, p. 247-251 ; Rœssler, Celtica, II, 1903, p. 51 et s., et, pour les découvertes archéologiques : à Mursens (comm. de Cras), à L’Impernal et au puy d’Issolu, Lot : fouilles célèbres de Castagne, Rev. arch., 1868, I, p. 249 et s. ; le même, Mém. sur la découverte d’un oppidum à Mursens, Cahors, 18681 ; le même, Mém. sur les ouvrages de fortification des oppidum gaulois, Tours, 1875 (Congrès... de la Soc. d’Arch., Toulouse, 1874) : à Boviolles (Meuse) : Maxe-Werly, Notice sur l’oppidum de Boviolles, Mém. de la Soc... des Ant., XXXVIII, 1877, p. 276 et s. ; au mont Beuvray : Bulliot, Fouilles, I, p. 18 et suiv. : chez les Volques Arécomiques : de Saint-Venant : 1° Bull. arch., a. 1897, p. 506 et s. ; 2° Antiques enceintes fortifiées du Midi de la France, dans les C.-R. du Congrès intern. d’Anthrop., XII, Paris, 1900, p. 428 et s. (très bien fait). A titre de comparaison, Schulten, Numantia, 1903, p. 16 et s.

[197] Le Bordelais et le Bazadais renfermaient, au XIIIe siècle, une vingtaine de communautés urbaines fortifiées, sans parler des châteaux forts. Je ne crois pas qu’à l’époque gauloise le mime pays comprît plus d’une demi-douzaine d’oppida.

[198] César, II, 4, 6-7. Cet État suession devait comprendre, en 58-57, les futurs peuples ou pays de Soissons, Meaux, Senlis, Noyon, plus peut-être.

[199] VII, 58, 6.

[200] I, 5, 2.

[201] VII, 11 et 12.

[202] Plutarque, César, 13. Ce chiffre est assez en rapport avec celui de 12 par État donné plus haut, et il doit résulter de la multiplication par 12 des chiffres des cités de la Gaule (plus de 64).

[203] César, I, 5, 2.

[204] VII, 15, 1 : urbes désigne ici, semble-t-il, des vici plutôt que des oppida.

[205] II, 6, 1 et 7, 1 ; 12, 4 ; 13, 2 ; 29, 2 ; III, 12 ; VII, 11, 2 ; 11, 9 ; 12, 3.

[206] II, 29, 2 ; III, 12, 3 ; VII, 12, 5 ; VII, 58, 4 ; VIII, 32, 2 ; 40, 1. Les plus petites bourgades fortes étudiées par de Saint-Venant (2e mém., p. 430) ont encore au moins un hectare.

[207] T. I, ch. IV, § XV : ce sont les πύργα (= briga ?) des Celtibères.

[208] César, III, 1, 4 (Valais).

[209] II, 29, 2 (Aduatiques) ; VI, 32, 4 (Éburons). Il est du reste possible que César donne parfois à ce mot de castellum le sens de petit oppidum ; cf. de La Noë, p. 85. — Les vrais grands abris ou refuges de la population étaient formés, dans ces pays, par des forêts ou des marécages : II, 16, 5 (Nerviens) ; III, 28, 2 ; IV, 38, 2 et 3 (Morins et Ménapes) ; V, 3, 4 (Trévires).

[210] Cf. César, II, 29, 2 ; VII, 14, 9 (ne suis sint ad detrectandam militiam receptacula).

[211] I, 23, 1 ; VII, 36, 1 ; I, 38, 1 ; VII, 69, 1 ; VIII, 32, 2 ; VIII, 26, 1-2.

[212] VII, 58, 3.

[213] VII, 17, 1 ; 15, 5.

[214] VII, 11, 6. Ajoutez Noviodanum des Suessions, Bratuspantium des Bellovaques (II, 12, 4 ; 13, 2), sans doute Sens (VI, 44, 3 ; VII, 10, 4 ; 57, 1 ; 59, 4 ; 62, 10).

[215] Voyez Nages dans le Gard, commandant la plaine de la Vaunage ; Sainte-Odile dans l’Alsace. Dans le même cas, Melun dans son île (VII, 58, 3), Vellaunodunum, Montargis ? (VII, I1, 1), Uxellodunum chez les Cadurques (VIII, 32-44). Au surplus, tous peut-être chefs-lieux de pagi.

[216] César, III, 12.

[217] Puy de Corent.

[218] César, II, 4, 7 ; cf. 6. De même, les oppida disséminés dans les campagnes Carnutes, VIII, 5, 1.

[219] Nevers, p. ex., César, VII, 55, 1 ; autres, VII, 12, 2 ; II, 6, 1 ; ici, Ch. II, § VII.

[220] VII, 17 ; 43 et 49 ; 74 ; etc.

[221] Voyez de La Noë, p. 93 et suiv.

[222] VII, 48.

[223] VII, 69 ; VIII, 40.

[224] VII, 58, 3 ; 51, 1.

[225] VII, 15, 5 ; 17, 1.

[226] Ce qui suit, d’après César, VII, 23. Cf. Musée de Saint-Germain, XIII, 11, Cat., p. 105 (Mursens).

[227] Les tiges de fer qui fixaient les poutres avaient de 20 à 32 centimètres de long, 8 à 20 millimètres de côté ; le diamètre des poutres varie de 20 à 35 centimètres (de La Noë, p. 67).

[228] César, VII, 23, 3 : le passage n’est pas très clair ; nous l’interprétons comme si chaque damier de poutres était complètement séparé du damier supérieur ou inférieur par une couche de pierres ; mais il serait possible que les poutres de sens contraire vinssent se toucher d’un étage à l’autre, et que César ait voulu seulement dire que les poutres de même direction fussent séparées par un lit de pierres. A Bibracte, en effet, les damiers adhérent l’un à l’autre en un échafaudage continu, et sont encore renforcés par des poutres diagonales allant de bas en haut. Même adhérence, semble-t-il, à Boviolles (Maxe-Werly, p. 284-5). Il y a trace, semble-t-il, des deux systèmes à Mursens (1er Mém., p. 6 et s.).

[229] A l’Impernal, les poutres... dépassaient de 15 à 20 centimètres la face extérieure du mur, et les bouts en étaient arrondis de façon à donner moins de prise au bélier (Castagné, Mém. du Congrès, p. 484).

[230] Boviolles est chez les Leuques, assez voisins de la Celtique. César ajoute du reste (VII, 23, 1) l’expression de fere, qui est toujours chez lui assez fortement restrictive.

[231] Cf. t. I, ch. IV, § XII ; de Saint-Venant, p. 429. — Les retranchements de Pommiers (s’ils sont bien gaulois) se composaient d’un fossé profond par endroits de 5 mètres, large par endroits de plus de 17 mètres, et d’une levée formée avec les rejets de ce fossé (Vauvillé, Congrès archéologique de France, LIVe s., Soissons, 1887, p. 154 et s.).

[232] César, VII, 23, 5 : Perpetuis trabibus pedum quadragenum plerumque. A Bibracte, la profondeur varie de 4 m. 80 à 7 m. 30 (Bulliot, 1, 28) ; à Mursens, de 5 à 10 mètres ; à Boviolles, de 13 à 14 mètres. — De Saint-Venant, p. 430, parle de deux murs indépendants et à parements tout à fait distincts juxtaposés dans cinq forteresses du Midi.

[233] Cf. de La Noë, p. 51 et suiv. ; de Saint-Venant, p. 429-30.

[234] Par exemple à Gergovie, César, VII, 47, 7 (courte échelle de 4 hommes) : il est vrai qu’il s’agit d’une forteresse sur escarpement. En revanche altissimo mura (II, 29, 3), mais sur un point mal défendu par la nature, et sur ce point il y a un mur double, duplici mura, c’est-à-dire, sans doute, en avant du rempart, u ne muraille avancée (cf. VII, 46, 3 ; 69, 5 ; contra, de Saint-Venant, p. 431). A Mursens, 4 à 5 m. en moyenne, plus de 10 m. sur les points faibles, et, en revanche, un simple amoncellement de terre sur quelques points de difficile accès (Rev. arch., 1868, I, p. 251 ; 1er Mém., p. 12). Les remparts de Bourges devaient, sur les côtés accessibles de l’enceinte, s’élever à 30 ou 40 pieds (VII, 24, 1). Altitudo muri à Noviodunum du Soissonnais (II, 12, 2).

[235] Le fossé de Bibracte n’est pas continu (Bulliot, p. 36 et suiv.) ; celui de l’oppidum des Aduatiques non plus peut-être (II, 32, 4), et peut n’avoir existé que devant la partie accessible de l’enceinte. Il n’y en a ni à Gergovie (VII, 46), ni à Bourges (VII, 17, 1 ; 18, 1), ni sans doute dans les oppida vénètes (III, 12), ni dans ceux des Volques (de Saint-Venant, p. 429). Latitudinem fosses à Noviodunum du Soissonnais (II, 12, 2 ; cf. à Pommiers, en note plus haut). On en a creusé un devant la muraille avancée d’Alésia (VII, 69, 5). Tout cela devait dépendre de la nature des lieux : on ne recourait pas aux fossés si les remparts longeaient un escarpement ou des marécages.

[236] Cf. de La Noë, p. 78-80. De Saint-Venant croit pouvoir signaler des tours ou en tout cas des massifs faisant saillie (p. 430).

[237] César n’en indique pas le nombre : II, 6, 2 ; 32, 4 ; III, 17, 3 ; VII, 11, 8 ; 24, 3 ; 50, 4 (le pluriel dans le sens du singulier) ; 70, 7 ; 73, 1.

[238] Voyez avec quelle aisance on circule sur les remparts, VII, 47, 5 ; 48, 2 et 3 ; la quantité de choses qu’on y dispose, 11, 29, 3. — Jusqu’à plus ample informé, je crois que les Gaulois n’élevaient un second rempart extérieur qu’au moment d’un siège, à titre provisoire, et seulement sur les points faibles. Contra, Schulten, p. 36.

[239] Ce qui suit d’après César, II, 6, 2-3.

[240] La défense consiste à jeter des rochers ou des poutres aiguisées dont les assiégés ont fait provision sur la terrasse (II, 29, 3).

[241] Cf. Tite-Live, XXI, 33, 3.

[242] Cf. Strabon, III, 4, 13. Schulten, p. 45-6.

[243] Seuls, pendant les campagnes de César, les Vénètes morcelèrent la défense dans leurs différents oppida, et César dut vite avouer qu’il n’aurait pas le dessus dans cette épuisante guerre de places fortes (III, 14, 1).

[244] César, II, 12, 4 ; 13, 2 ; 29, 2 ; VII, 11, 4 ; 13, 6 ; 36, 1 ; 68, 1.

[245] VII, 89 ; VIII, 43.