HISTOIRE DE LA VIE BYZANTINE

TOME II – L’EMPIRE MOYEN DE CIVILISATION HELLÉNIQUE (641-1081)

 

CHAPITRE PREMIER. — LA DÉFENSIVE BYZANTINE APRÈS HÉRACLIUS.

 

 

I. — DÉCADENCE DES MŒURS ; ANARCHIE

 

La famille d'Héraclius était certainement en décadence.[1] La mort, dès 25 mai 641, de Héraclius Constantin, le premier successeur de son père comme fils d'Eudocie-Fabia,[2] fut attribuée au poison de sa marâtre qui était aussi sa cousine germaine[3] désignée comme régente, Martine, et les chalcédoniens lui donnèrent pour complice le patriarche Pyrrhus (automne 641).[4] Héracléonas, fils de Martine,[5] soutenu par le nouveau patriarche Paul, prit le pouvoir,[6] mais il eut le nez coupé — c'est la première fois qu'on rencontre cette mutilation hideuse, — par son propre neveu, vengeur de son père Héraclius Constantin, Constans, et à cette occasion Martine eut la langue coupée.[7] L'armée, un Valentin, un Domentianus, avait été de nouveau mêlée à la conspiration et au crime.[8]

Constans, dont le nom montre le courant qui maintenant, par dessus Justinien, veut se rattacher à la mémoire en fondateur de Constantinople, considéré surtout comme le bon chrétien, le saint de l'orthodoxie,[9] eut un règne presque aussi long qu'Héraclius. Il fit mettre à mort son frère Théodose. Constantin, fils de Constans, fut contraint d'abord de s'associer ses deux frères cadets, puis il les fit mutiler aussi par la « rhi-notmèse », en détruisant chez eux la cloison qui sépare les deux narines.

Enfin, à la suite de cette série dégoûtante de trahisons et de crimes inouïs, Justinien II, fils de Constantin (685-695, puis 705-711), est un vrai monstre. Conseillé par un eunuque perse et par un moine défroqué, il laisse le premier battre de verges sa propre mère Anastasie et il assiste tranquillement aux supplices des contribuables, que l'on force, en les enfumant, à déclarer où ils ont caché leur avoir ; il aurait eu même la fantaisie d'une nuit de « Saint-Barthélemy », d'un grand massacre des Constantinopolitains, en commençant par le patriarche. Mais, à son tour, il eut la langue et le nez coupés. Puis, lorsque, après l'usurpation de Léonce, de Tibère Apsimar, il revint cependant de son exil de Cherson, traînant après lui sa famille, et jusqu'au frère de sa femme[10] khazare,[11] Bousire Gliabare, il n'en fut que plus cruel. Des femmes enceintes furent tuées afin de détruire les enfants qu'elles portaient. Ordre fut donné à plusieurs reprises de ruiner de fond en comble cette ville de Cherson, encore florissante avec son autonomie, qui n'avait pas voulu soutenir ses projets de restauration. Des condamnés politiques furent jetés dans des sacs à la mer, des convives égorgés à la fin d'un festin. Puis Justinien « au nez coupé », le Rhinotmète, parut au Cirque, foulant aux pieds l'usurpateur Basilisque, qui avait pris sa place, tandis que la foule applaudissait « l'Élu de Dieu, qui avait marché sur le Serpent et le Basilic et avait écrasé le Lion et le Dragon ». Plusieurs fois la place des supplices, les Bous,[12] vit s'allumer les bûchers où étaient jetés les restes sanglants des vaincus. Le patriarche Callimaque fut aveuglé Le Pape Martin, défenseur du Concile de Chalcédoine, était allé mourir sur les bords déserts de la Chersonèse (653-5).[13] Le tyran sera tué lui-même par l'usurpateur Philippikos (711).

La décadence s'observe aussi dans l'esprit de la population byzantine. Les anciens partis du Cirque existent encore. Justinien fit bâtir une maison particulière, un « club » aux Bleus. Plus tard, l'usurpateur Philippikos (711-713) se réjouira grandement de la victoire des Verts. Le rôle révolutionnaire et militaire de ces associations est cependant très réduit. Les fauteurs de troubles se trouvent maintenant dans la plus basse plèbe, et on les voit se réunir aux Juifs pour profaner l'autel de Ste Sophie. La ville put tenir en effet pendant sept années entières contre les Arabes[14] mais elle montrait une indifférence absolue à l'égard des empereurs, acclamant le vainqueur et traînant aux Bous le cadavre du vaincu. Léonce l'usurpateur (695-698)[15] est imposé par les individus auxquels il a ouvert les portes des prisons, et surtout par les soldats qu'il en a délivrés, et la foule se rend docilement à son ordre : « Tous les chrétiens à Sainte-Sophie », et là on entend ce cri sauvage, qui parcourt les bancs : « qu'on déterre les os de Justinien ». L'armée prend part désormais à ces assemblées populaires.[16]

Les querelles théologiques n'intéressent plus les masses Constans fait mutiler le saint des chalcédoniens, Maxime ;[17] le Concile de deux cent quatre-vingt dix-neuf évêques rétablit le passé dans ses droits ; une autre assemblée, patronnée par Philippikos (711-713), reviendra au monothélisme, tout cela cependant n'émeut plus que les moines des couvents, qui couvrent d'anathèmes ou de bénédictions les empereurs, selon la manière dont ils comprennent l'orthodoxie.

Il est intéressant cependant de constater un certain rôle du Sénat, qui, on se le rappelle, avait écrit naguère au roi de Perse pour expliquer l'avènement d'Héraclius. C'est lui qui décida de l'éloignement d'Héracléonas et de sa mère ; c'est vers le Sénat que, plus tard, sont dirigés ces soldats d'Orient qui demandent à Constantin le couronnement de ses deux frères[18] pour que la conduite de l'Empire ressemble à la Sainte Trinité.

L'armée, composée des cavaliers des « thèmes », pareils aux spahis turcs, qui doivent le service militaire en échange de l'usufruit qu'on leur accorde sur les terres impériales, et de l'infanterie des « catalogues », est incapable de défendre les provinces envahies. Par contre, une partie des troupes se révolte, ainsi qu'il a été déjà dit, sous le commandement de Valentin, contre l'usurpation de Martine et de son fils. A plusieurs reprises les commandants d'Arménie déclarèrent l'empereur déchu et négocièrent avec les Arabes. Un des chefs de cette province, Sapor, devenu le Romain Sabarius, vint jusqu'à Andrinople, convoitant la possession de Constantinople et le titre d'empereur.[19]

L'armée d'Afrique se révolta plusieurs fois, et réduisit Constantinople à la famine.[20] Les soldats d'Orient vinrent, eux aussi, à Chrysopolis, avec cette prétention d'imposer à l'empereur ses frères comme collègues. Les troupes de Sicile, après l'assassinat de Constans (668), frappé à la tête dans les bains de Daphné à Syracuse, proclamèrent l'Arménien Mizirios (Mzhezh), « parce qu'elles le trouvaient gentil ».[21] Elles finirent par le tuer et envoyer sa tête à Constantinople. Les troupes battues en Afrique s'arrêtèrent à leur retour en Crète et y proclamèrent un empereur de leur choix.

La flotte envoyée contre Philippikos se rallia à ce révolté.

Une autre fois, les matelots mutinés contre Anastase-Artémius (713-715) recueillirent un simple agent du fisc et firent de lui, contre son gré, le misérable empereur Théodose. A tels moments il fallut employer contre l'ennemi des bandes de simples paysans ou des barbares dépaysés : des Slaves et Bulgares établis en Asie.[22] Les Mardaïtes du Mont Liban[23] et les chrétiens qui se joignaient à eux rendirent des services de beaucoup supérieurs à ceux des armées régulières. Et, lorsque les Byzantins cédèrent à la demande des Sarrasins de tirer de leurs repaires ces bandes redoutées, ce fut pour l'Empire une perte irréparable.

 

II. — DÉFENSE DE L'EMPIRE EN ORIENT.

 

Si cet Empire subsistait encore, il le devait à un concours de circonstances favorables.

Il est vrai que l'Egypte restait arabe, et Jean de Nikiou prétend que Constantin, fils d'Héraclius, avait admis que ses sujets, auxquels il avait imposé comme patriarche Cyrus, payent tribut aux occupants arabes. L'Egypte appartenait de fait à une « démocratie de partis » : Menas, chefs des Verts, et Cosmas, fils de Samuel, ou un Domentianus, en étaient les maîtres,[24] et ils se livraient à la même guerre de partisans que plus tard les beys mamelouks entre eux.[25]

Après avoir gagné le Caire, devenu la capitale de la province de Misr, Amr prit Alexandrie. Héracléonas aurait envoyé Cyrus dans cette capitale, « lui donnant plein pouvoir de conclure la paix avec les musulmans, de ne pas leur résister et de constituer une administration convenable ».[26] C'était le procédé employé depuis longtemps par l'Empire romain pour les provinces qu'il se sentait incapable de défendre : sans rien céder aux ennemis et se réservant l'heure de la revanche, il laissait aussi bien la conduite que la responsabilité au principal chef religieux, que les envahisseurs avaient la coutume de respecter. Or, « les habitants, les gouverneurs et Domentianus, qui était en faveur auprès de l'impératrice Martine, se réunirent et délibérèrent avec le patriarche Cyrus pour conclure la paix ».[27] Comme aussi un nouveau changement dynastique était intervenu à Constantinople et les soldats étaient en pleine révolte, Cyrus dut aller dire au chef des Arabes que « Dieu lui a donné le pays » ; une trêve de onze mois fut conclue et la garnison d'Alexandrie obtint le droit de s'embarquer, pour ne jamais revenir (643).[28] La population, d'abord indignée, finit par accepter le nouvel état de choses.

Du reste, des administrateurs indigènes, comme ce Domentianus et un Philoxène, furent maintenus, dans la Basse Egypte et dans le Fayoum, par le calife, ce qui équivalait à la reconnaissance d'une certaine autonomie locale. Un préfet impérial fut même conservé pendant quelque temps à Alexandrie.[29] L'ancien patriarche monophysite Benjamin regagna après treize ans son siège.[30]

Une expédition byzantine, conduite par l'eunuque Manuel, put se saisir momentanément, en 646, après la perte de Tripolis, d'Alexandrie, mais elle n'eut pas de suites.[31] Sous le poids des impôts, qui forcèrent tels bourgeois d'Alexandrie à chercher pendant dix mois un refuge dans les îles[32] et les pauvres gens à vendre leurs enfants, et celui des corvées pour les travaux publics, il y eut beaucoup de renégats, même parmi les moines, et ils en devinrent des persécuteurs.[33]

Sous la domination arabe, Eutychius, patriarche d'Alexandrie, qui compila dans la langue du pays une Histoire Universelle, commençant avec les données de l'Ancien Testament pour passer à des annales de Rome, dans lesquelles Trajan est confondu dans la même personnalité avec Adrien et présenté comme tué dans un duel avec le rebelle « Babeli », il y a une nouvelle conception de tout ce passé troublé et sanglant.

Les guerres contre les Perses sont vues du côté de l'Orient, avec la mention continuelle des souverains qui régnèrent sur la Perse, alors qu'Hélène, mère de Constantin, est présentée comme une jolie femme originaire de Rohas-Edesse et son fils aurait été élevé dans cette même ville : toute l'histoire du fondateur de Constantinople est au pair. A celle de ses successeurs de bizarres légendes s'ajoutent et des explications théologiques occupent une grande partie de ces « annales ». A partir de Léon Ier, les empereurs sont considérés comme « jacobites ». Bien entendu la place est occupée surtout par la série des patriarches de l'Orient. La Perse continuera à passer, comme histoire politique, avant la Rome byzantine. Anastase lui aussi est qualifié de jacobite, né à Hama ; il serait mort, frappé par une tempête, courant d'une maison à l'autre. Un fils de l'empereur Maurice se sauve au Mont Sinaï ; son gendre perse, Chosroès, fils de Hormisdas, veut le venger : c'est de l'histoire, mais le siège de Constantinople aurait duré quatorze ans. Héraclius est un Thessalonicien, qui aurait fait son propre éloge pour être admis comme empereur. Arrivant enfin au conflit avec les Arabes, il est exposé d'une façon originale, pour passer ensuite aux discussions entre Cyrus, le « maronite », et son adversaire Sophronius, devenu chef de l'Église de Jérusalem. Maintenant la conquête de la Syrie et de l'Egypte est, malgré la légende qui s'y mêle, du plus haut intérêt. Désormais l'histoire de l'Église et du monde sera rangée d'après le règne des califes, Byzance n'intéressant que sous le rapport des querelles religieuses, A peine si la succession des empereurs aux noms estropiés à l'arabe sera-t-elle conservée.[34]

Les « Sarrasins », plus terribles que les Perses, plus légers aussi, trouvant partout de quoi satisfaire leurs besoins minimes, avaient passé bientôt les gorges du Liban pour s'engouffrer dans les vallées de l'Asie Mineure. Chypre (648), Rhodes (654), dont un Juif d'Édesse acheta le Colosse comme vieille ferraille,[35] l'île d'Arados, près de la côte syrienne, et, une vingtaine d'années plus tard (649), Éphèse, Smyrne, Chalcédoine, Cyzique reçurent bientôt des garnisons arabes.

Constantinople avait subi un long siège (c. 668).[36] L'Afrique romaine fut attaquée et eut elle aussi, sous le successeur des Héraclides, Léon, une occupation arabe que tous les efforts des Byzantins ne purent chasser ; on vit même la flotte des califes paraître sur les côtes de la Sicile, que Constans accourut défendre.

Les armées arabes comprenaient aussi des contingents syriens ; elles amenaient avec elles des Juifs, pour leur vendre les dépouilles, des évêques pour négocier avec les Romains ; on employait encore la langue grecque dans l'administration, et les notaires chrétiens rédigeaient les actes publics jusque sous le règne de Valid (705-715).[37] Ce n'était pas absolument une guerre contre les barbares, et les « Sarrasins » respectaient sans doute beaucoup plus que les Perses la vie et les biens des vaincus.[38]

On en arriva à considérer ces autres barbares comme des « amis du très doux basileus », « amis chéris », d'autant plus qu'ils s'intitulaient parfois eux-mêmes sujets de « notre empereur », ou « son peuple », les « serviteurs très fidèles de son autocratie » ; tel émir, comme celui de la « Grande Arménie », est appelé « fils spirituel » du basileus.[39]

Heureusement pour l'Empire, les Arabes avaient aussi de graves difficultés à surmonter. Les provinciaux ne restaient pas toujours fidèles à leur égard. Les cas de trahison n'étaient pas rares, et le secret du « feu grec » qui brûlait dans l'eau et pouvait consumer les flottes des ennemis du Christ fut communiqué aux Impériaux par un déserteur syrien, Callinique d'Héliopolis.[40]

Chez eux l'hérésie des kharoudjites[41] résista aux persécutions ; l'esprit grec se montrait tout aussi inventif, subtil et révolutionnaire dans cette nouvelle religion simple, qu'elle imprégnait lentement.

En outre, la succession des califes était déterminée seulement par la recommandation des mourants et les acclamations du peuple, c'est-à-dire qu'elle était très incertaine et dangereuse pour le bien de l'État. Enfin, la rivalité, très ancienne, entre les provinces ne pouvait pas disparaître. La Syrie haïssait la Perse, et Moaviah, qui fixa à Damas le siège d'un califat aux allures impériales et réduisit les salaires des guerriers établis au-delà de l'Euphrate, ne fit rien pour apaiser ces sentiments de discorde.

La Perse combattit pour Ali et contre Moaviah ; elle suscita l'usurpation de Moukhar,[42] et une seconde après quelques années. Il y eut même des conflits entre les Arabes de la Palestine ou de la Phénicie et ceux qui entouraient le successeur de Mohammed dans les oasis syriennes. N'oublions pas enfin que les Arabes étaient un peuple de marchands, et pas d'agriculteurs comme les Perses, et qu'ils avaient besoin de la paix avec Byzance pour leurs intérêts commerciaux.

Il arriva donc que tels des conquérants continuèrent à payer un tribut de ducats d'or byzantins,[43] de captifs et de chevaux de race ;[44] ils cédèrent même, après la mort de Yézid (681), une partie des revenus de Chypre, de l'Arménie et de l’Ibérie.[45] Pendant qu'Abd el-Malek combattait contre ses rivaux,[46] les régions du Caucase, l'Ibérie, l'Albanie, l'ancienne Médie rentrèrent sous la domination romaine.

Léon, qui établira à Constantinople en 717 une nouvelle dynastie, était un préfet d'Orient soutenu par le stratège d'Arménie : une armée sarrasine qui opérait en Asie Mineure le laissa poursuivre ses buts. Si la Syrie, l'Egypte, l'Afrique n'étaient plus romaines, l'Asie Mineure ne devait pas devenir de sitôt sarrasine.

 

III. — DÉFENSE DE L'EMPIRE EN OCCIDENT.

 

De temps à autre les Byzantins risquaient une razzia contre les pillards slaves du Danube ou de la Dalmatie. Mais ce peuple avait trouvé déjà son assiette et n'était plus aussi dangereux qu'auparavant.

Les Avars étaient très affaiblis ; bientôt on ne parlera guère plus d'eux. Mais il y eut quelque émotion à Constantinople quand on apprit, sous Constantin, qu'un autre peuple des steppes, les Bulgares du Volga, étaient venus se loger au dessus des bouches du Danube.[47] L'empereur partit en personne contre ces intrus, qui pénétraient aussi dans la Scythie Mineure, mettant en mouvement les villages slaves.[48] Ils passèrent donc en Mœsie et s'y établirent.[49] Mais l'armée que l'on avait au VIIe siècle n'était pas de force à nettoyer une province envahie par des barbares aussi hardis ; l'Empire les accepta donc et dans les premiers temps ils se tinrent assez tranquilles, occupés à donner de nouvelles habitations à leurs sujets slaves, à reconnaître et à organiser ce nouveau pays de Mœsie. Leur situation était de fait entre les fédérés et les mercenaires, et on a prétendu que Koubrat avait été nommé patrice par Héraclius. Ils ramenèrent même à Constantinople, où apparaîtra leur chef, Tervel.[50] Justinien, qui s'était enfui de Cherson, et ne se firent pas payer trop cher pour ce grand service.[51] En attendant le baptême, ils empruntaient à Byzance la langue grecque pour les inscriptions.[52] A Thessalonique et aux Balkans s'arrêtaient maintenant les frontières de l'Empire.

Alors qu'une longue série de personnages impériaux, atroces ou nuls, se déroule, sans compter les usurpateurs d'un jour, qui se laissent enfermer dans des cloîtres, qui perdent la vue ou la tête pour prix de leur gloire éphémère, seul, parmi ces empereurs, Constans (642-668) osa combattre : on le vit à la tête de la flotte qui fut battue par les Arabes à Phoiniké.[53] Mais son nom même paraissait lui indiquer un devoir envers l'Occident. On a vu que déjà Maurice avait pensé à un partage de l'Empire qui aurait donné de nouveau un monarque à l'Italie : alors qu'un de ses fils, Théodose, aurait retenu l'Orient, ou ce qui en restait, l'autre aurait eu pour sa part Rome et les îles.[54] Constans pensa même à abandonner cette Byzance souillée de crimes. Aussi pour, empêcher la conquête arabe, par la Sicile, de ces régions occidentales, il résida pendant sept années entières dans l'île, à Syracuse, d'où, au milieu des plaisirs, il dirigeait la défense contre ces mêmes ennemis musulmans qui venaient de l'Afrique et des îles,[55] Quant à l'Italie, malgré l'ambition croissante des Papes, malgré le rôle qu'ils s'étaient gagnés par dessus l'autorité de l'exarque, qui pouvait les arrêter, les embarquer, les déporter au loin, sur les tristes rivages de la Mer Noire, elle avait retenu sans interruption le culte de l'empereur, plus que cela : le sens des droits de l'Empire, de façon que l'historien de l'Église de Ravenne, Agnello, qui connaît aussi les rivalités sanglantes entre Bleus et Verts, considère les Perses comme les « adversaires de la République », à laquelle donc on tient encore.[56] On n'a pas prêté attention à la signification italienne, occidentale de l'usurpation de Phokas. Cet incident « romain » dans, l'acception ancienne du mot, eut, du reste, une suite, qui est restée presque inobservée. Envoyé contre les Lombards, qui, sous le roi Agilulfe, avaient assiégé Rome, l'exarque Éleuthérius avait dû accepter que les Romains se rachètent plus loin aussi par un tribut de cinq centenaires d'or, mais, se sentant humilié par une politique générale de l'Empire qui lui imposait de pareilles concessions, il se fit proclamer empereur contre Héraclius et on l'invitait vivement à se faire couronner à Rome, « où est le Siège de l'Empire :[57] en chemin, il fut assassiné.

L'Italie s'intéressa donc beaucoup plus que Byzance, qui dut regarder l'empereur absent, échappé à sa pression, à ses tumultes et à ses caprices, comme un déserteur, à cette tentative, unique et curieuse, de faire revenir la capitale dans les régions de l'Occident de la part de celui qui préférait, comme il le disait, « la mère à la fille ». Romuald de Salerne, chroniqueur italien d'un moyen âge beaucoup plus avancé, nous présente, en 663, l'Auguste descendant de ses dromons, à ce moment maîtres de la Mer, à Tarente, pour qu'il arrache au duc lombard de Bénévent, où l'évêque portait le vieux nom latin de Barbatus, Ortona, Luceria et autres places voisines. Les provinciaux cependant ne veulent pas de l'impérial intrus, qui, provoqué à un combat singulier par tel prince germano-italien, se retire à Naples. A Rome même il paraît en cette même année, mené à Saint Pierre par le Pape, entre les rangs de la « milice » romaine, le pallium d'or porté en procession. Il fait ses devoirs dans l'église et visite aussi le palais du Latran.[58] On se demande si ce ne serait pas la sienne cette statue impériale, au vêtement romain, à l'attitude dans laquelle est représenté Trajan, qu'on voit encore à Barletta.[59] Mais tout cela, malheureusement pour son prestige, finit par l'ordre impérial de piller en partant la ville vénérable.

Un autre des historiens médiévaux de l'Occident avancé, Geoffroy de Viterbe, cherche même à expliquer pourquoi celui qui se considérait encore comme le seul maître légitime de tout le monde chrétien, avait tourné le dos à la cité de Constantin : « Il pensait à transporter l'Empire à Rome parce qu'il en était arrivé à haïr comme fauteurs des hérétiques les Constantinopolitains, qui lui avaient conseillé le sacrilège contre le Pape Martin ».[60]

Le nom même de l'assassin arménien sera conservé en Occident, sous la forme de Mitius,[61] et le Pape Grégoire, dans sa lettre à l'empereur Léon, parlera de ce Nézevxios, qui aurait tué dans l'église même un empereur que les évêques de Sicile avaient déclaré hérétique.

Répétons que cet essai si intéressant de rénovation occidentale a dû être aussi en rapport avec le désir de sauver ce qui restait encore de la domination « romaine » en Afrique, où s'était révolté tout dernièrement, pour établir un gouvernement local ou pour partir vers la Capitale comme contre empereur, le patrice Grégoire.[62]

Enfin, comme on venait, contrairement aux décisions d'Héraclius,[63] qui avait provoqué ainsi la séparation de la Syrie et de l'Egypte, d'ordonner par le « type de la foi », dû au patriarche Paul, successeur de Pyrrhus, qu'on n'ose plus discuter les questions de théologie concernant la « volonté » ou les « volontés » des hypostases de la Trinité, indifférentisme officiel qui provoqua les foudres de Rome et mena aux mesures de persécution et d'exil contre le Pape Martin (653-654),[64] Constans aurait pu désirer s'entendre directement, à Rome même, avec ceux qui dirigeaient l'Église d'Occident. Cette œuvre de réconciliation fut poursuivie, du reste, par Constantin IV, le frère proclamé et retenu à Byzance,[65] de Constans, mort le 15 juillet 668,[66] qui réunit, en 680, un sixième concile général à Constantinople et se soumit, malgré l'opposition des Églises divergentes d'Asie, à la décision inébranlable de la Papauté,[67] anathématisant toute une série d'œcuméniques, et, en plus, Cyrus l'Égyptien.

Plus tard cependant, ces mesures de pacification religieuse, de fait le terme final de l'action que l'énergie de Constans avait osé entreprendre, brisant le cercle d'emprisonnement de la tyrannique Byzance, furent entravées par les caprices du fils et successeur de Constantin, Justinien II. Le Pape Serge ne voulut pas reconnaître les décisions d'un nouveau Concile, celui in Trullo (691),[68] et fut sur le point de faire, lui aussi, le voyage d'exil en Crimée. Mais, pendant son second règne, le même Justinien fit venir à Constantinople pour la réconciliation le nouveau Pape Constantin, après 711.[69] Si l'usurpateur Philippikos annulera tout simplement la sentence du Concile de 680 et réhabilitera, en 711, la mémoire du patriarche Serge,[70] sa chute amènera, entre 712 et 715, la réconciliation avec Rome.

 

IV. — CRISE DE L’AUTORITÉ IMPÉRIALE.

 

Ce qui manquait à une société habituée depuis longtemps au gouvernement autocratique c'était l'autocrate lui-même. Il vaut la peine de revenir sur la succession de ces souverains pour évidencier encore mieux la carence du pouvoir.

Le règne du second Justinien, âgé, à son avènement, de seize ans et soumis encore aux influences de sa mère, sous tous les rapports, de ce jeune prince indigne du nom de celui qu'il voulut imiter jusque dans le nouveau nom de sa femme,[71] fut, a partir de 695, une honte et une série presque ininterrompue de troubles. Venu au trône, comme fils de Constantin IV, dans la série des empereurs qui entendaient se rattacher à l'époque latine de l'Empire, en 685, pour un premier règne de dix ans, au moment même où s'établissaient les bandes bulgares d'Ispérich, il arriva, il est vrai, à enrayer leur avance, imposant à ces envahisseurs encore faibles le lendemain d'une dislocation un régime de quasi-fédérés.[72] Nous avons vu quelle fut sous lui l'attitude de l'Empire à l'égard des Arabes ; on lui attribue le déplacement, au profit de ces voisins redoutés, des Mardaïtes du Liban,[73] au nombre de douze mille.

La révolte de la capitale contre cet homme de peu de moyens est attribuée à des mécontentements d'origine fiscale, dus à de vils favoris, comme Théodote et Etienne,[74] qui seront brûlés vifs.[75] On ne tua pas, d'après l'ordre d'un officier du nom de Léonce, dont l'origine est inconnue, l'empereur déchu, se bornant à le rendre inapte au gouvernement en lui coupant le nez et en l'exilant à Cherson, qui avait vu dépérir des Papes persécutés et où il gagna l'amitié des Khazars et épousa la fille de leur khan. Pendant ce temps, qui correspond à la conquête de Carthage encore romaine, par les Arabes (697-8), Léonce vit son usurpation disputée par le commandant de la flotte, Tibère, au beau nom latin, qui recouvrait celui d'Apsimar : mutilé comme Justinien, il se retira dans le couvent du Dalmate.[76] De Cherson, le Rhinotmète descendit donc chez les Bulgares, dont le khan Tervel lui créa un noyau d'armée pour sa restauration. Les sources italiennes parlent cependant d'un séjour de Justinien dans la péninsule, où il aurait attendu son heure. Se promenant, malade, sur le rivage de Ravenne, avant de trouver ce concours bulgare, et se préparant au retour, il se serait rendu convenable en se faisant faire un faux nez.[77] Une autre source, plus digne de foi, le montre passant par Tomi, qui végétait encore.[78]

En tout cas il eut de nouveau les ovations de la populace constantinopolitaine, qui avait acclamé tour à tour les deux usurpateurs étrangers à la dynastie d'Héraclius, dont ce malheureux, presque barbarisé par son mariage, était le dernier héritier. Un historien italien du bas moyen âge le présente, lui aussi, foulant aux pieds leurs tètes et donnant les ordres de mort à l'exécuteur chaque fois que le sang coulait, dans sa colère, des narines coupées.[79]

Ayant pu se défaire ainsi des deux ennemis de ses droits, Justinien commença ensuite un règne de sanglantes revanches auxquelles n'échappa ni le patriarche Callinique, qui avait accepté les deux empereurs illégitimes. A sa place fut établi un abbé du Pont « qui l'avait nourri dans l'exil », et Tibère, fils de Cyrus, aurait été désigné comme futur empereur.[80] Assis sur son trône d'or et d'émeraudes, la tête ceinte de la couronne royale, d'or et de perles, que lui avait fabriquée sa femme, il décréta la punition exemplaire de Ravenne, qui n'avait pas voulu lui donner les moyens de revenir.[81] Nous avons dit que Cherson, où on avait voulu le trahir, eut le même sort.[82]

On lui répondit par de nouvelles révoltes. Elles soulevèrent d'abord l'usurpateur Bardais ou Bardanès, qui se fit appeler Philippikos (711-713) : il se trouvait à Cherson, que Justinien avait si cruellement persécutée.[83] « Constantinople ayant été prise après un siège formel, Justinien fut assassiné dans son refuge asiatique,[84] en décembre 711,[85] avec en fils d'adoption, Tibère.

Aussitôt le nouveau patriarche Cyrus fut renvoyé à son monastère dans le Pont,[86] et les décisions du sixième Concile annulées. Mais Philippikos, finit bientôt, aveuglé après son somme de midi. Un Artémius-Anastase, un Théodose III parurent ainsi.

Considéré comme responsable de l'invasion des Bulgares, dont les privilèges avaient été violés en Thrace, Philippikos avait dû sa chute à une révolte de soldats. Artémius ou Philartémius, qui prit le nom d'Anastase (713-716), eut un règne très court. Lorsque la flotte qui devait attaquer Alexandrie se révolta et, dans une bataille sanglante contre l'empereur réfugié à Nicée, gagna la victoire,[87] Anastase, résigné, et épargné, entra dans les ordres. Un historien que nous avons employé plus haut cite quelqu'un qui a vu le corps intact de ce saint homme. Un Asiatique, d'Adramytion, Théodose, fils de Nicéphore de Pergame, régna jusqu'en 718.[88] Après un empereur militaire, deux fonctionnaires civils étaient montés donc sur le trône par la volonté d'une armée en état de presque continuelle révolte, mais Anastase avait été proclamé par la volonté du Sénat et du peuple, ainsi que du clergé orthodoxe, le patriarche Jean en tête.

Sur cette poussière sanglante de faux empereurs s'éleva par une victoire de purification le trône de Léon III, « l'Isaurien » ou « le Syrien ».

 

V. — L'ŒUVRE GUERRIÈRE DES EMPEREURS ISAURIENS.

 

Le règne de Léon n'est pas isolé. Il est impossible de le séparer de ceux qui suivirent, jusqu'après le commencement du neuvième siècle et l'époque des grandes guerres du Danube suscitées par les Bulgares. Ce chapitre de l'histoire byzantine ne dura par moins de cent ans. Il est sans doute, malgré les proportions réduites de l'Empire, beaucoup plus brillant que celui qui précède, et parmi les empereurs qui se succédèrent dans ce laps de temps, il y eut certainement des personnalités d'une énergie et d'une activité, d'un talent de régner même, peu ordinaires.

Des écrivains qui pesaient tout à la balance de l'orthodoxie ont, il est vrai, fort malmené ces hérétiques qui osèrent toucher aux images sacrées et abolir leur culte.[89] Mais il est assez facile de dégager, par comparaison avec le septième et avec le dixième siècle, la véritable importance de ces restaurateurs de l'Etat, bien que les efforts de la nouvelle dynastie furent favorisés par la décadence rapide des ennemis que Byzance avait craints jusqu'alors, car depuis longtemps les Romains d'Orient n'avaient pas eu de voisins si faibles, des frontières moins menacées.

Une vie de saint, s'occupant de Léon, parle de son origine asiatique, de Germanika, mais sous Justinien II il passa à Mésembrie et fournit à l'armée de l'empereur, qui revenait avec les Bulgares, cinquante brebis : il fut récompensé par le titre de spathaire, de la garde impériale, bien que plus tard l'empereur dût payer des « Alains » du Danube pour le tuer.[90] Il était donc, malgré ce mélange ethnique fréquemment créé par les colonisations impériales, plutôt Thrace, comme la plupart de ses prédécesseurs. Pendant toute sa vie, il s'appuya principalement sur les soldats de ce thème d'Europe, et, lorsque son gendre Artavasde (741-742) combattit pour la couronne contre Constantin, fils de Léon, ce dernier trouva des défenseurs parmi les mêmes Thraces, pendant que les troupes d'Arménie soutenaient le contre empereur, leur congénère.[91] Le nouvel empereur, fondateur d'une dynastie,[92] l'usurpateur heureux,[93] qui avait été «acclamé par le Sénat »[94] ne doit pas être donc considéré comme un Asiatique, bien qu'il fût né en Asie, de parents « isauriens ». Depuis quelque temps on avait adopté, comme pour les Bulgares même, la coutume de transporter des populations entières d'une province dans, une autre, pour les besoins de défense de l'Empire. Les antécesseurs de Léon devinrent ainsi des habitants de la Thrace.

Le principal danger s'était manifesté jusqu'ici en Asie, de la part des Arabes. Léon lui-même prit le pouvoir à un moment où de grandes forces sarrasines, de terre et de mer, se dirigeaient contre Constantinople. Le « feu grec » cependant eut bientôt raison de cette belle flotte de Syrie et d'Egypte ; les cent jours de neige que compta cet hiver de 716 à 717 remplirent d'effroi les guerriers légers du désert, pendant que les paysans des environs apportaient comme de coutume leurs denrées au marché constantinopolitain et les Bulgares « amis » venaient à la rescousse ; enfin la mort du Vizir Soliman acheva de mettre fin à ces grands projets de conquête dont l'heure était maintenant passée. Jamais plus Constantinople ne vit les drapeaux sacrés et les mâtures touffues des Arabes.[95]

Les attaques des détachements syriens ne cessèrent pas pour cela ; des généraux, des fils d'émirs même, commandaient souvent des « courses », des razzias contre la « Romanie »,[96] ce qui voulait dire à cette époque l'Asie Mineure. Quelques milliers de pillards dévastaient quelque temps en Cappadoce, en Paphlagonie ; les cités mêmes étaient assiégées. Des mosquées éphémères s'élevaient dans quelque place plus importante qu'une surprise avait donnée aux guerriers du calife.

L'Arménie fut infestée souvent dans les mêmes conditions. Les Arabes essayèrent même une fois d'inventer un prétendant au trône de Byzance, un faux Tibère, qu'ils promenèrent à travers la Syrie, attendant l'heure où ils pourraient se servir de lui ailleurs.[97] Une attaque contre l'île de Crète fut tentée sans aucun succès. Il arriva même que des bourgades d'Asie Mineure purent rejeter les bandes errantes des émirs.

Pour s'expliquer cette résistance, il faut tenir compte d'abord que les Arabes avaient encore leurs rivaux dans la steppe, les Turcs Khazars, avec lesquels l'empereur entretenait les meilleures relations. Constantin, fils de Léon, avait épousé une fille de leur khagan.[98] Il y avait ensuite depuis longtemps une lente croissance de branches parasites sur le tronc solide de l'Islam ; et nous avons fait observer déjà que les hérétiques de la nouvelle religion ne le cédaient pas en opiniâtreté et en fanatisme propagandiste à ceux de la vieille loi chrétienne. Les « hiérakites » brûlèrent Damas,[99] et les païens du Hauran résistaient à tous les efforts ; certains musulmans de la Perse croyaient trouver le salut en se jetant du haut des murs ; d'autres attendaient un Messie de leur race, empruntant ainsi aux Juifs leur idéal national.

Enfin, l'antagonisme entre les provinces du califat était devenu si aigu, que l'Empire musulman paraissait devoir se dissoudre.[100]

Le stratège arabe d'Arménie, reconnu par les Mésopotamiens, osa même combattre contre l'émir reconnu successivement par la Syrie, l'Egypte et la Perse. Quelques années plus tard, le calife Moaviah, pressé par les révoltes des villes de la Syrie, les démantela toutes, ne laissant que des ruines à Antioche, dont il voulait se faire un abri. Et bientôt la Perse se leva contre lui, avec des sultans qui combattaient au nom d'Ali, le gendre martyr du Prophète, contre l'engeance illégitime, usurpatrice et criminelle des califes qui avait pris la place sanglante du héros ; les « bandes noires » du Khorasan ne se lassèrent pas avant d'avoir mis fin au règne et à la vie de Moaviah.

Après 750, la nouvelle dynastie d'Aboul Abbas, les Abbassides, présida à une division plus ou moins prononcée de l'Empire.[101] Tendant qu'un fuyard de la dynastie vaincue des Omeyyades établissait en Espagne un califat de séparation, qui glorifiait avant tout son origine légitimiste, l'Egypte, la Syrie prenaient des allures d'indépendance à l'égard des nouveaux chefs, établis en Perse, Persans peut-être plus que Musulmans. De plus, avec un Empire arabe dont le centre était au-delà de l’Euphrate, Byzance avait bien moins à craindre que lorsque les maîtres de Damas éprouvaient sans cesse la tentation de passer en Asie Mineure et de se donner, en prenant Constantinople, la plus belle capitale du monde.

Les chrétiens de Syrie aimaient maintenant beaucoup moins la domination des Infidèles. Les Omeyyades même ne les avaient pas épargnés : qu'on pense seulement qu'ils ne permirent pas, pendant quarante ans, l'élection d'un patriarche d'Antioche et qu'ils en imposèrent un à la fin.[102] Les prisonniers chrétiens durent choisir, sous Hécham, entre renier ou périr. Le métropolite de Damas eut la langue coupée parce qu'il avait osé prêcher contre l'Islam.[103] Un mourant qui avait condamné la religion de Mohammed fut pour ce fait jugé digne d'être assassiné. Les écrivains grecs furent éloignés des offices publics. Tel émir entra dans l'église pendant la célébration de la fête de Pâques et menaça le prélat qui officiait. On accusait déjà les musulmans de ne pas tenir leur parole d'être tolérants, qu'ils avaient donnée au moment de la conquête. Quant aux Abbassides, ils défendirent de construire de nouvelles églises, de faire paraître la croix, d'enseigner les lettres grecques. Ils confisquèrent les trésors des églises et soumirent à l'impôt les membres du clergé. Des Juifs achetaient les biens d'églises célèbres.

Aussi les désertions n'étaient-elles pas rares et lors du siège de Constantinople les chrétiens d'Afrique quittèrent en masse les vaisseaux de leurs maîtres. Les habitants du Mont Liban et leurs voisins menaient une guerre acharnée à l'abri de leur refuge inexpugnable.[104]

Déjà Léon avait remporté des victoires sur les Sarrasins venus en Asie Mineure. Son fils, Constantin V (741-775), fut bon guerrier. Il sut, pendant un règne de plus de trente ans, guetter l'heure propice pour les attaquer. Il soumit même une fois l'Arménie en prenant ses forteresses.[105]

Ordinairement, il se bornait à amener avec lui, pour les établir à Constantinople ou en Thrace, des milliers de chrétiens de Syrie. S'ils étaient Jacobites, Manichéens, Pauliciens, s'ils croyaient à Satan comme à Dieu lui-même et employaient tout aussi bien pour se purifier l'âme les jeûnes du bon principe et les orgies de l'autre, cela l'intéressait peu.

Du côté du Danube, les Avars n'étaient plus rien, et les Slaves de la Mœsie vivaient sous le joug des Bulgares dont ils prirent bientôt le nom. Les vrais Bulgares étaient peu nombreux, et ils n'eurent jamais la féroce énergie de leurs prédécesseurs avars. Leur importance militaire commença plutôt au moment où ils s'approprièrent en partie l'héritage des Byzantins. Sous Constantin ils demandèrent impérieusement la rénovation des anciens traités de frontières, prétendant obtenir la confirmation de la possession des cités et des bourgs de la Mœsie Supérieure qu'ils s'étaient lentement annexés.[106] Lorsque Constantin transporta en Thrace des Syriens et des Arméniens de Mélitène et de Théodosiopolis, le khan bulgare s'en offusqua, demanda un nouveau tribut et, ne l'ayant pas obtenu, les siens pillèrent la province,[107] et, comme l'empereur ne jugea pas qu'il devait satisfaire à des exigences aussi insolentes, il y eut la guerre.

La chronique du patriarche Nicéphore la raconte. Les barbares, qui vivaient encore sous le chef à nom latin Sabinus, amateur de paix, avaient gardé toute leur énergie touranienne. Leurs chefs, de la lignée d'Oukil et de celle d'Ougaine, s'appellent Oumar, Tervel, Kormisoch, Téletz, Vénekh, Baïan, Toktou, Télérig, Kardam ; au nom de Paganus est attaché dans la source byzantine elle-même le titre de khan.[108] Ils avaient beaucoup d'avantages : à côté de leurs « esclaves » (douloi), les Slaves de toutes les « généalogies » marchaient déjà derrière les « tougs » à queue de cheval, comme alliés, non encore confondus avec les maîtres dans la même race.[109] Ils avaient leurs anciennes places de refuge « dans les forêts de la rivière du Danube ». De son côté, l'Empire pouvait profiter de leurs tueries entre eux ; il avait l'avantage d'envoyer par mer, car Varna appartenait aux ennemis, dans le Danube une flottille de cinq à huit cents embarcations (773),[110] qu'on trouve, augmentée, jusqu'au chiffre de mille six cents, du côté d'Anchiale et de Mésembrie, un peu plus tard, mais la tempête l'arrêta en chemin.[111]

Appliquant dans les Balkans le système de colonisation habituel en Asie, Constantin fixa dans la Thrace, par villages entiers, de ces Slaves qui étaient soumis à son pouvoir. On vit des rivaux au trône des barbares, tous les deux portant néanmoins des noms qui paraissent appartenir à l'ancienne population de cette province : Sabinus et Paganus — car on a cru qu'il n'est pas lui aussi un Baïan, à l'avare —, se présenter devant l'empereur, s'en remettant à son jugement. Les expéditions byzantines en Bulgarie ne s'arrêtèrent pas ici. Malgré les désastres éventuels de la flotte[112] et à côté des conventions de bon voisinage conclues avec les vaincus, les armées de Byzance obtinrent des succès très honorables. Constantin eut à repousser une grande attaque des barbares qui demandaient qu'on leur livre telles cités de frontière ; à Anchiale[113] l'empereur vainquit l'usurpateur bulgare Téletz (Télésin, Télésos) et il revint à Constantinople en triomphateur, acclamé par les dèmes.

Mais la guerre devait être reprise encore une fois, pour amener de nouvelles victoires, à Roustchouk, à Varna, et le baptême, par l'empereur lui-même, du khan, auquel fut donnée une épouse byzantine. Après la bataille indécise de Provato, un nouveau monarque de ces mauvais voisins, qui avaient mis en mouvement toute la masse des Slaves, sujets fidèles jusque là, Kardam demandera qu'on lui serve sa pension, sans quoi il marchera contre Constantinople, de fait imprenable (774).[114] La Cour byzantine hébergea un « kyris », un « seigneur » fugitif des Bulgares, et par deux fois Constantin célébra dans sa capitale de nouveaux et brillants triomphes remportés sur cette nation. La mort le saisit à un âge assez avancé, au cours de la nouvelle campagne de ce côté. Et, ici, comme partout ailleurs, cette mort, arrivée en 775, fut le signal d'une décadence rapide.

 

 

 



[1] Voyez Bréhier, La transformation de l'Empire byzantin sous les Héraclides, dans le Journal des Savants, 1917 ; Brooks, The successors of Héraclius to 717, dans la Cambridge mediaeval history, II ; The brothers of the emperor Constantine IV, dans la English historical Review, XXX (1915) ; Kästnet, De imperio Constantini III (641-668), thèse de Iena, Leipzig 1907 ; Brooks, Who was Constantine Pogonatus, dans la Byz. Zeitschrift, XVII.

[2] Chron. Paschale, année 612. Sur sa mort, Pernice, op. cit. Mais Jean de Nikiou parle d'une mort naturelle, par un vomissement de sang (p. 565).

[3] Pernice, op. cit.

[4] Il avait épousé Grégoria, fille de Nicétas ; Zonaras, éd. Migne, c. 1288.

[5] Il avait eu deux frères, Fabius (Martin) et David.

[6] Chron. Paschale, année 613.

[7] Théophane et Zonaras. Les deux autres fils furent exilés à Rhodes ; Jean de Nikiou. Le patriarche Pyrrhus fut déposé sans une sentence synodale et mené à Tripolis ; ibid.

[8] Nicéphore le Patriarche ; Jean de Nikiou.

[9] Il eut comme fils un autre Constans et aussi un Héraclius, un Tibère ; Zonaras, c. 1292.

[10] Enarratio Chronicorum, dans Migne, Patr.Gr., CLVII, c. 677, 680.— Sur ces régions voyez aussi Les origines de l'Église de Gotie, dans les Analecta Bollandiana, XXXIII.

[11] Sur les rapports avec ces maîtres de la steppe russe, appelés par Byzance contre les Perses, Gelzer, Kulter ; H. von Kutschera, Die Cbazaren, 2e éd., Vienne 1910 ; V. Mosin, Les Khazares et les Byzantins d'après l'anonyme de Cambridge, dans le Byzantion, VII. Pour Cherson, Hermann Schneiderwirth, Zur Geschichte von Cherson, Berlin 1897.

[12] Sur la localité voyez Bury, History, 1923, I.

[13] Cf. A. Crivellini, La Chiesa di Roma e l'hnpero nella questions monotelitka, dans les Studii istorici, IX (1900) ; Gelzer, Kultur ; Caspar, Die Lateran synode von 639, dans la Zeitschrift für Kirchengeschicht», LI (1932) ; Brooks, dans la English historical Review, janvier 1916 ; H. Grisar, Una vittima del despotismo bizantino, Papa S. S Lirtino I, dans la Civiltà Cattolica, 1907, pp. 272-285, 656-666 ; F. Görres, Justinian II. und das romische Papsttum, dans la Byz. Zeitschrift, XVII. Cf. Dölger, Regesten. Pour une donation de Justinien II, Pierre N. Papagéorgiou, Un édit de l'empereur Justinien II en faveur de la basilique de S. Démétrius à Salonique, Leipzig 1900.

[14] Sébéos. Voyez Brooks, The Arabs in Asia Minor (641-750), from Arabic sources, dans le Journal of hellenic studies, VIIIa (1898) ; Canard, Les expéditions des Arabes contre Constantinople, dans le Journal asiatique, 208 (1926) ; Loparev, dans le Viz. Vrémennik, XII (la « didascalie » de Dorothée, Métropolite de Mitylène, sur l'attaque des « Agarènes » à Constantinople). Sur l'emploi du « feu grégeois » pour la défense de la ville, C. Zenghelis, dans le Byzantion, VII.

[15] Sur son sceau, Mordtmann, dans la Byz. Zeitschrift, XV.

[16] Dès 669, par ses délégués ; Gelzer, Kultur.

[17] Ibid.

[18] Voyez plus haut l'article cité de M. Brooks.

[19] Théophylacte Simokatta.

[20] Cf. Chronique de Nicéphore, éd. Migne.

[21] Zonaras, c. 1292. Cf. Brooks, dans la Byz. Zeitschrift, XVII.

[22] Colonisés en Arménie et en Lazique ; Vailhé, dans les Échos d'Orient, XIV.

[23] Théophane.

[24] Jean de Nikiou.

[25] Ibid.

[26] Voyez ibid. : « Menas enrôla beaucoup de gens de la faction verte... Domentianus envoya contre eux les partisans de la faction bleue ».

[27] Ibid.

[28] Ibid.

[29] Ibid.

[30] Ibid. Cf. Gaston Wiet, dans le Précis de l'Histoire de l'Egypte. Sur les derniers chefs religieux des melkites, Pargoire, op. cit.

[31] Cf. Jean de Nikiou, p. 565, note 1. Cf. Eutychius, dans Migne, Patr. Gr., CXI, c. 1112. Voyez aussi Diehl, dans Hanotaux, HiSt de la nation égyptienne, III ;. Gaston Wiet, loc. cit. Cf. Migne, Patr. Gr., XC, c. 112.

[32] Ibid.

[33] Ibid.

[34] Migne, Patr. Gr., CXI, c. 1137. Un paragraphe est réservé à la querelle des images sous Théophile et quelques lignes au meurtre de Michel l'Ivrogne, au conflit entre Léon le Sage et le patriarche Nicolas.

[35] Théophane. Cf. Eutychius, dans Migne, Patr. Gr., CXI, c. 1112, 1117.

[36] Ibid., CVI, c. 1345. Cf. Mommsen, Chron. Minora, II.

[37] Théophane.

[38] Voyez Henri Lammens, Etudes sur le règne du calife omaiyade Moâvia Ier, dans les Mélanges de la Faculté de Beyrouth, I-III ; Wellhausen, Die Kämpfe der Araber mit den Romäern in der Zeit der Umaijden, dans les Nachrichten de Göttingen, 1901 ; J. Mann, The struggle between the Omayade Caliphate and Byzantium for the possession of Constantinople and the messianic hopes entertaïned by the Oriental Jews, dans la Journal of the Americal oriental society, XLVII (1927). Sur les alliances arabo-byzantines, Zimolo, dans l'Annuario del r. Liceo-Ginnasio Manzoni, 1928-1929 ; cf. Byz. Zeitschrift, XXXIX (1929).

[39] Constantin Porphyrogénète, De administrando imperio.

[40] Théophane.

[41] Ibid.

[42] Ibid.

[43] 3.000 (avec huit captifs et huit chevaux pendant la trêve de trente ans) Zonaras, c. 1296.

[44] Théophane.

[45] Ibid.

[46] Ibid.

[47] Voyez sur leur arrivée Théophane ; 559-560 (aussi la notice dans la Chronique latine de Cava. Muratori VII, c. 918), les souvenirs de Théophylacte (Migne, Patr. Gr., CXXVI, c. 190 et suiv. ; la chronique de Nicéphore ; Zonaras, c. 1296-1927 ; Vie de St Démètre, dans Migne, Patr. Gr., CXVI, c. 930 et suiv. — Il y eut à cette époque des transports de population à la frontière avare, pour la garder ; ibid., c. 933.—On trouve dans Jean de Nikiou un curieux passage sur un Koubrat ou Kourt, « chef des Huns, neveu d'Organâ », qui s'était fait jadis chrétien (pp. 579-580).— Des détails dans notre études, Notes d'un historien, « Bulletin de la section historique de l'Académie Roumaine, I.

[48] Pour les Slaves de ces régions, Filov, dans la Byz. Zeitschrift, XXX. Sur la population romane, cf. Vailhé, dans les Échos d'Orient, XII, et Fehér, dans le Bulletin de l'institut archéologique bulgare, V.

[49] Sur la date du passage d'Ispéric ou Asparouc, fils de Koubrat ou Kourt (d'après Nicéphore le Patriarche), 659 ou 660, Brooks, dans l'English hislorical Review, 1916. Pour la chronologie bulgare Byz. Zeitschrift, XIX. Cf. avec les nombreux renseignements l'analyse attentive de Bury, Later Empire, et le livre récent de M. Runciman.

[50] Enarratio Chronicorum, Migne, Patr. Gr., CLVII, c. 680.

[51] Voyez nos Notes d'un historien, loc. cit. D'après Vailhé, dans les Echos d'Orient, XIV ; le khan Tervel aurait reçu pourtant pour ses services le titre de César, ce qui paraît très douteux.

[52] Voyez Skorpil, dans les Byzantino-slavica, III (1931) ; III (1932) ; ibid (article de M. Miiatev).

[53] Zonaras, c. 1289.

[54] Théophylacte Simokatta.

[55] Zonaras, c. 1292 ; Migne, Patr. Gr., XCVIII (œuvres du patriarche Germain), c. 73. — Son frère adoptif, Sévère, Patria, loc. cit., c. 585, 587.—Voyez aussi Battifol, L'abbaye de Rossano, pp. III, IX ; Brooks, dans la Byz. Zeitschrift, XVII.

[56] Éd. Muratori. Cf. notre étude L'interpénétration de l'Orient et de l'Occident au moyen-âge, dans le Bulletin de la section historique de l'Académie Roumaine, XV

[57] « Ibi ubi imperii solium maneret, coronam sumeret » ; Mommsen, Chron. Minora, I

[58] Liber pontificalis.

[59] Bréhier, L'art byzantin. Cf. pour celle de Justinien II à genoux, Patria, loc. cit., c. 500.

[60] « Cogitabat autem imperium ad urbem transferre eo quod Constantinopolitanos, qui ei de sacrilegio in Martinum Papam commisso consilium dederant, tanquam hereticorum fautores, exosos haberet » ; Muratori, VII, c. 392.

[61] Cf. Mommsen, Chron. Minora, II.

[62] Théophane. Sur la date de la mort de Constans, Brooks, dans l'English historical Review, 1916.

[63] Voyez Migne, Patr. Gr., XCI, c. 112.

[64] Voyez ses lettres dans Migne, Patr. Lat., LXXXVII. Cf. Pargoire, op. cit. Sur les souffrances de son adepte, Maxime de Chrysopolis, Migne, Patr. Gr., XC, c. 112.

[65] Cf. Zonaras, c. 1293, pour les sanctions contre les assassins de Constans.

[66] Brooks, dans la Byz. Zeitschrift, XVII.

[67] Théophane. Cf. Salaville, dans les Échos d’Orient, XX.

[68] Sur le couvent, Migne, Patr. Gr., CXXII, c. 1309. Sur le Concile, Pargoire, op. cit.

[69] Pargoire, loc. cité. Surtout Gorres, Justinian II, und das römische Papsitum, dans la Byzantinische Zeitschrift, XVII.

[70] Théophane. Pargoire, op. cit.

[71] Zonaras, c. 1530.

[72] Théophane.

[73] Voyez Bury, Later Empire.

[74] Il avait osé, nous l'avons déjà dit, frapper Anastasie, la mère de l'empereur ; Zonaras, c. 1301.

[75] Théophane.

[76] Migne, Patr. Gr., CXXII, c. 1265.

[77] Liber pontificum ravennatum (Muratori, II, c. 160) : « A suis militibus cum aliquibus civibus Ravennae... Asserens se totum Imperium esse oblitum... His itaque gestis, dum aeger spatiabatur in litore, consilio inito cum Bulgaris, in sua restauratus est sede et potitus Imperionares sibi ex obrizo fecit ».

[78] Chronique de Nicéphore. Sur le rivage septentrional du Pont, Acta Sanctorum, juin, c. 942. Cf. Bury, Later Empire ; il cite l'expression pittoresque et cruelle de la chronique contemporaine. Sur les deux usurpateurs aussi Mommsen, Chron. Minora, II. Sur Philippikos, ibid. Sur les Khazars, ibid.

[79] Geoffroy de Viterbe. Les passages concernant Byzance ont été pré sentés dans notre étude sur l'Interdépendance entre l'Orient et l'Occident au moyen-âge, pp. 27-30. — Tibère Apsimar avait fortifié Constantinople ; Migne, Patr. Gr., CXXII, c. 1273, 1300 ; Patria, loc. cit., c. 596. (Justinien fit bâtir le triclinium qui porte sur nom.) Son frère, Héraclius, fut aussi tué ; Zonaras, c. 1604 et suiv. Continuant les emprises de Justinien II en !bérie et Albanie, il avait combattu les Arabes en Arménie, jadis trahie par le patrice Sabatius, et en Cilicie (ibid.).

[80] « Qui erat in Ponto abbas eumque alebat exulem » ; Romuald de Salerne

[81] « In smaragdina aurea sedentem et limbo cinctum caput, quam illi sua ex auro et margaritis discreverat regia conjux ; Liber pontificum ravennatum, loc. cit.

[82] Théophane.

[83] Théophane ; Nicéphore ; Vie du Pape Constantin ; déclaration du diacre Agathon, dans Mansi, Concilia, XII, c. 189 et suiv. Cf. Gelzer, Pergamon.

[84] Ibid. et Geoffroy de Viterbe.

[85] Cf. aussi Théophane.

[86] « Ad gubernandum abbatis jure monasterium in Ponto » ; Romuald de Salerne.

[87] Vie du Pape Grégoire II.

[88] Sources citées plus haut.

[89] Voy. Heinr. Montz, Die Zunamen bei den byzantinischen Historikern und Chronisten, « Programm », Landshut 1897.

[90] Vies de martyrs, dans les Acta Sanctorum, août, II. Cf. Aussi la Vie de Saint Paul le Nouveau, ibid., juin, II. On l'accusa d'avoir fui, comme chef du « premier catalogue des thèmes », devant les Bulgares ; Vie de St Nicéphore.

[91] Théophane, éd. de Bonn ; cf. éd. de Boor.

[92] Voyez Fr. Chr. Schlosser, Geschichte der bilderstùrmenden Kaiser, Francfort, 1812 ; Diehl, Leo III and the Isaurian dynasty, dans la Cambridge mediaeval History, III ; J. Martin, History of thc iconoclastic controversy, Londres 1931. Aussi Bury, Later Empire.

[93] Voyez Vie de St Théodore le Stoudite, Migne, Patr. Gr., XCIX, c. 169 ; St Jean Damascène, ibid., XCV, c. 368 et suiv. Sur sa femme, Anne, Patria, loc. cit., c. 585.

[94] « Rei publicae adclamante senatu » ; Mommsen, Chron. Minora, II.

[95] Théophane. Cf. Migne, Patr. Gr., CVI, c. 1348 ; Mommsen, Chron. Minora, II. Les chrétiens d'Egypte sympathisaient avec Byzance ; Théophane.

[96] Rwmania ; ibid.

[97] Ibid.

[98] Voyez Dölger, Regesten, nos 295-296.

[99] Théophane, loc. cit.

[100] Pour tout cela, voyez, du côté byzantin, ibid.

[101] Paix avec Aboul Abbas, en 750-1, voyez Dölger, Regesten, no 311. Confirmation en 756 ; ibid., n° 317. Suivent les nouveaux traités de 771-772 et 781 ; un autre traité en 797, après l'attaque contre les îles de Crète et : de Chypre. Avec A. A. Vasiliev, op. cit., Brooks, Byzantines and Arabs in tbe time of tbe early Abbassids, dans l'English Historical Review, XV (1900) ; XVI (1901) ; The Arabs in Asia Minor jrom Arabic sources, dans le Journal of hellenic studies, XVIII ; The struggle with tbe Saracens (717-867), dans la Cambridge medieval bistory, II. Cf. aussi Léonce d'Arménie (Ghévond), Histoire des guerres et des conquêtes des Arabes en Arménie, trad. V. Chahnazarian, Paris 1856.

[102] Théophane.

[103] Ibid. Sur des révoltes à Emèse, Heliopolis, Damas, Jérusalem, ibid.

[104] Schenk, Kaiser Léo III, Halle 1880 ; Enrico Besta, Un sigillo inedito di Leone l'Isaurico, dans les Studi in onore di Carlo Fadda, Naples 1900.

[105] Théophane.

[106] Ibid. Pour tous ces événements voyez nos Notes d'un historien, loc. cit.

[107] Chronique de Nicéphore.

[108] Bury, Later Empire, p. 472, note 4, observe « It is noteworthy that Nicephorus distinguishes Baian and Kampaganus ». Il ne rejette pas l'origine latine de Sabinus et Paganus et va jusqu'à les mettre en rapport avec les Vlaques.

[109] Nicéphore. Des Slaves rebelles à Imbros, Ténédos, Samothrace ; ibid. La « Scythie » de la Vie de St Etienne le Jeune est cette Bulgarie (loc. cit., c. 1128).

[110] Ibid.

[111] Ibid. Sur les discordes bulgares à l'époque de Sabinus—cf. Acta Sanctorum, novembre, II2—, les boïars. Sur la bataille perdue à Anchiale, sur l'établissement des Sarrasins en Thrace, voyez l'éloge du patriarche Nicéphore à la fin de sa Vie. Sur l'ensemble, Runciman, A history of the jirst Bulgarian empire, Londres 1930, et nos Notes d'un historien, dans le « Bulletin de la section historique de l'Académie Roumaine », I.

[112] Théophane.

[113] Sur la bataille de Markellai, Chronique de Nicéphore ; Acta Sanctorum, novembre, II 2.

[114] Théophane. Sur les guerres de Constantin voyez Acta Sanctorum, novembre, II2.