1815

LIVRE III. — LES CENT JOURS

 

CHAPITRE III. — L'EMPIRE LIBÉRAL.

 

 

I

En débarquant de l'île d'Elbe, Napoléon s'était présenté aux Français non comme le vieil empereur venu pour reprendre le souverain pouvoir et l'appareil monarchique, mais comme le Premier Consul, le soldat de la Révolution, l'homme du peuple. Ses proclamations aux habitants des Basses-Alpes, des Hautes-Alpes, de l'Isère, commencent par ce mot : citoyens. Sur toute sa route, il parle en tribun, dénonçant aux passions populaires les émigrés qui prétendent annuler les ventes des biens nationaux, les nobles qui veulent rétablir les privilèges et les servitudes féodales. A Grenoble, il déclare que ses droits ne sont autres que les droits du peuple et qu'il ne les reprend que pour arracher les Français au servage dont ils sont menacés : — Je veux être moins le souverain de la France que le premier de ses citoyens. A Lyon, il annonce qu'il reparait pour défendre les intérêts de la Révolution ; il pro leste que le trône est fait pour la nation et non la nation pour le trône ; il rend des décrets révolutionnaires, abolit les titres de noblesse, dissout la Chambre des pairs, bannit les émigrés, séquestre les biens des Bourbons. A Avallon, à Autun, à Auxerre, partout, ce sont les mêmes déclarations : — Je viens pour délivrer la France des émigrés. — Je suis issu de la Révolution. — Je suis venu pour tirer les Français de l'esclavage où les prêtres et les nobles voulaient les plonger... Qu'ils prennent garde. Je les lanternerai[1]. Du golfe Jouan à Paris, Napoléon se donne comme le chef de la Révolution, et c'est comme le chef de la Révolution qu'il est acclamé sur ce parcours de deux-cent-vingt lieues. Aux Vive l'empereur ! se mêlent les cris : Vive la liberté ! Vive la nation ? A bas les nobles ! A bas les prêtres ! Mort aux royalistes ![2]

A la rentrée de Napoléon aux Tuileries, à la réapparition des trois couleurs sur tous les clochers, l'effervescence révolutionnaire s'étend et s'accroit. La Marseillaise retentit des Alpes Cottiennes au cap Finistère. Des fédérations et des clubs s'organisent pour défendre la liberté, combattre l'inquisition des moines et la tyrannie des nobles, maintenir les droits de l'homme menacés par la noblesse héréditaire, honte de la civilisation, épouvanter les trahisons, déjouer les complots et terrasser la contre-révolution[3]. C'est la rhétorique de 93. Parmi ces fédérés, il y a beaucoup de vrais patriotes ; il y a aussi des néo-septembriseurs. Les fédérés de Toulouse promènent un buste de l'empereur en criant : Les aristocrates à la broche ! Un fédéré lyonnais harangue ainsi ses camarades : — Nous savons où sont les royalistes. Nous avons des baïonnettes, sachons nous en servir[4]. Molé dit à l'empereur : — J'ai peur de la révolution menaçante, prête à vomir encore une fois sur la France la terreur et la proscription[5].

A Bourg, à Nantes, à Rouen, à Lunéville, à Brest à Bourges, à Rennes, à Dijon, on insulte, on menace, on maltraite les nobles et les prêtres. A Paris même, on chante la Marseillaise et le Ça ira ; il y a des bonnets rouges. Un jour, l'empereur traversant à cheval le faubourg Saint-Germain se voit entouré par une foule furieuse qui lui montre de ses poings levés les hôtels aristocratiques. Une seule parole imprudente, dit-il plus tard à Las Cases, ou même une expression seulement équivoque de mon visage, et tout était saccagé. Le 11 avril, des bandes de populaire parcourent Saint-Brieuc aux cris de : Vive l'empereur ! les aristocrates à la lanterne ! Des femmes ont éprouvé des accidents, rapporte le commissaire de police sans préciser davantage. Le 25 avril, le bruit de l'assassinat de l'empereur s'étant répandu à Tarbes, cinq cents tanneurs et dinandiers s'assemblent pour attendre le courrier de Paris avec l'intention de faire justice des royalistes si la nouvelle se confirme. Après l'arrivée du courrier, le rassemblement se dissipe en criant : Nobles, vous l'avez échappé belle, mais gare à vous ! A Bordeaux, en Bourgogne et dans le Dauphiné, les nobles redoutent d'être égorgés quand le premier coup de canon tonnera aux frontières. Une nuit, à Strasbourg, on pend à des lanternes trois mannequins avec cocarde blanche au chapeau et décoration du Lys sur la poitrine. Dans l'Isère, le château de Lissy est incendié, dans Seine-et-Oise, le château de Rosny. On brûle un peu partout, écrit Montlosier. Dans une commune de la Corrèze, les paysans démolissent le banc seigneurial de l'église, rétabli six mois auparavant, et en brûlent les débris sur la place publique. Le colonel Cuc écrit de Rodez : On ne saurait comparer la journée du 5 avril qu'à celles qui ont signalé l'aurore de la Révolution. — Il faut que le peuple fasse sentir sa force, dit-on à Grenoble. A Dôle, les clubistes réclament la création de papier-monnaie et l'extermination des nobles et des prêtres[6].

On exprime les mêmes vœux et on requiert les mêmes actes dans des brochures rédigées en style de sans-culotte : Abandonnez votre modérantisme désorganisateur. Comment prétendre à la tranquillité si vous conservez les ennemis de l'intérieur ! Il faut les extirper de votre sein comme un chancre rongeur. — Puisque c'est la guerre de la noblesse contre le peuple, il faut que le peuple se lève comme en 92 et écrase ses ennemis de sa masse. Mais il ne faut pas que le peuple fasse cette guerre à ses dépens. C'est à ceux qui ont intenté le procès de faire les avances de la procédure. — Les nobles insolents appellent à grands cris les armées étrangères pour nous enchaîner, pour nous égorger. Prononçons leur bannissement perpétuel. Emparons-nous de leurs biens. Qu'ils soient le domaine inaliénable de la nation[7].

Le Journal de l'Empire ayant inséré, le 11 avril, un avis invitant les bons citoyens à faire un noble usage de leurs loisirs en faisant parvenir la vérité à ceux qui environnent le monarque, voici quels conseils arrivent aux Tuileries et aux cabinets des ministres : Il faut exclure les nobles de toute charge et de tout emploi publics et les mettre sous une surveillance sérieuse. — En 93, la situation était pire, mais la Providence amena le 31 mai, et quatorze armées sortirent du sein de la France. — Pas de faiblesse ! elle nous a perdus l'an dernier. Qu'on agisse comme le comité de Salut public. — Il ne faut pas se borner à comprimer les nobles, il faut les opprimer. Il faut confisquer leurs biens et les partager entre les paysans et les ouvriers qui seront, de cette façon, intéressés au maintien des confiscations. — Il n'y a qu'un moyen de sauver la France, c'est de sacrifier la classe des nobles et de s'emparer de leurs propriétés. La moitié sera déclarée biens communaux, l'autre donnée à l'armée. Ainsi la masse du peuple sera intéressée à soutenir la cause nationale. — Ne craignez pas les jacobins. Votre Majesté a besoin de la massue populaire pour écraser les conspirateurs[8].

Parmi ceux qui réclament une nouvelle Terreur, il y a des conseillers de préfecture, des officiers, des maires, des employés des douanes, des agents des droits réunis. Il y a le général Maranthon qui écrit d'Auch : Je proposerai la confiscation des biens des réfractaires royalistes, dont moitié serait donnée au fisc et moitié aux gardes nationaux partant pour la frontière. Il y a l'officier d'ordonnance de l'empereur Lannoy qui écrit de Lyon : Le peuple éclaterait avec enthousiasme s'il avait une forte impulsion. Il y a le général Ameil qui écrit de Mézières : Puisque la patrie est en danger et que notre situation est à peu près la même qu'en 1793, pourquoi ne pas employer les moyens qui nous sauvèrent alors ? Tous les citoyens invoquent les grandes mesures de salin public et s'étonnent qu'on n'en prenne aucune. L'empereur ne prend que des demi-mesures... S'il ménage les royalistes tout est perdu[9].

Chez les autorités civiles et militaires, ces sentiments étaient cependant l'exception. Les préfets et les généraux se montraient fort effrayés, et loin de désirer, comme Ameil, que l'on profitât du mouvement révolutionnaire, ils conseillaient de le modérer. C'est de la frénésie, écrit le sous-préfet de Lunéville. On menace les prêtres et les nobles. En 1793, les esprits n'étaient pas aussi montés qu'aujourd'hui. — Les partisans de l'empereur, écrit le préfet de Vaucluse, tiennent des propos qui nous épouvantent. — Si l'on n'y prend garde, écrit le préfet des Côtes-du-Nord, on reverra les scènes sanglantes de 92. — Si l'administration ne protégeait pas les nobles et les prêtres, écrit le préfet de la Meurthe, la tranquillité serait troublée. — Les fonctionnaires, écrit d'Angoulême l'officier d'ordonnance Résigny, ont besoin d'employer leur autorité pour protéger les ex-nobles, sans quoi, ils ne seraient pas en sûreté. — L'exaltation pour l'empire est si forte, écrit le sous-préfet de Barbezieux, qu'il est prudent de la calmer[10].

 

II

Napoléon connaissait l'esprit du peuple. — Je retrouve la haine des prêtres et de la noblesse aussi universelle et aussi violente qu'au commencement de la Révolution, dit-il le 20 mars à Molé[11]. C'était sous l'influence des sentiments révolutionnaires, qui se manifestaient autour de lui, qu'il avait rendu les décrets de Lyon. Mais tout en voyant très bien le terrible parti qu'il pourrait tirer de l'exaltation populaire, il avait à la fois le scrupule et la crainte de s'en servir[12]. Napoléon n'aimait pas la canaille, comme il disait, et déjà à Lyon et à Châlon, il avait été frayé et dégoûté par les vociférations de la populace. — C'est de la rage ! s'écriait-il[13].

Le cheval de bois de 92 n'est pas brûlé, écrivait le général Hugo. Nous saurons le retrouver pour le service de l'empereur[14]. Mais ce formidable cheval de bois, l'empereur répugnait à l'employer. Après avoir ameuté l'Europe entière contre la France, il recula devant les moyens révolutionnaires, les seuls, dit Jomini, qu'il eût peut-être de sauver la patrie[15]. A Sainte-Hélène, l'empereur en eut parfois le regret, jamais le remords. De ses nombreux entretiens sur ce sujet, il ressort que faire la Terreur comme en 93 était le salut, mais qu'il n'eut pas le courage de se jeter dans une dictature de sang.

L'empire, dit-il, était devenu légitime. Un gouvernement régulier ne peut se charger ni des mêmes fureurs ni du même odieux que la multitude. Je ne voulais pas être un Roi de la Jacquerie. Une révolution est le plus grand des fléaux. Tous les avantages qu'elle procure ne sauraient égaler le trouble dont elle remplit la vie de ceux qui en sont les auteurs[16].

L'ancien personnel impérial que Napoléon retrouva aux Tuileries avait encore plus de répulsion que lui-même pour les moyens à la Danton. Si grande était chez quelques-uns la haine de la Révolution que Molé, d'Hauterive et Chauvelin refusèrent de signer la déclaration du 26 mars de leurs collègues du conseil d'Etat sous prétexte qu'elle portait : La souveraineté réside dans le peuple ; il est la seule source légitime du pouvoir[17]. Les serviteurs les plus fidèles et les plus zélés de Napoléon, les Bassano, les Caulaincourt, les Mollien, les Daru, les Regnaud, les Boulay, n'eussent point voulu s'associer à une dictature jacobine, et les jacobins eux-mêmes, comme Carnot et Fouché, étaient devenus des libéraux.

Au reste, il ne fallait pas beaucoup d'efforts pour détourner l'empereur de recourir à des mesures renouvelées du comité de Salut public. Les décrets de Lyon pouvaient faire croire qu'il en avait eu la velléité, mais à Paris Napoléon n'est déjà plus le soldat de la Révolution qu'ont acclamé le Dauphiné, le Lyonnais et la Bourgogne. Il se croit redevenu le tout puissant empereur de 1811, le souverain légitimé par les victoires et les traités. Il a des préfets du palais et des maîtres des cérémonies, des chambellans, des pages, des hérauts d'armes, des contrôleurs de la bouche, des quartiers-maîtres des écuries. L'étiquette monarchique règne de nouveau aux Tuileries où il y a messe en musique chaque dimanche et où chaque semaine la Comédie-Française, l'Opéra-Comique, le Théâtre de l'Impératrice viennent jouer pour la cour. Non-seulement il repousse le décret portant suppression des dénominations de sujet et de monseigneur, que lui présente Carnot, mais il impose un titre de comte à l'ancien conventionnel. Il réunit autour de son trône sa nombreuse famille, donne comme résidence l'Elysée à Joseph et le Palais-Royal à Lucien, veut que l'un et l'autre se forment une maison avec une écurie de quarante chevaux et imagine d'affubler ses frères, pour les grandes cérémonies, de costumes blancs de candidats à l'Empire[18]. Maintenant que Napoléon a ressaisi le sceptre, il se résignerait aisément à oublier dans l'appareil de la souveraineté et dans l'exercice du pouvoir absolu ses proclamations démagogiques et ses paroles de liberté.

Mais des milliers de voix s'élèvent pour les lui rappeler. Si les colères révolutionnaires grondent chez le peuple qui, peu soucieux de la responsabilité ministérielle et de la liberté de la presse, veut surtout la suppression des droits réunis et l'écrasement de la noblesse, dont il a souffert la morgue et appréhendé les revendications, dans les classes dirigeantes, les idées libérales, déjà très prononcées sous le gouvernement de Louis XVIII, ont acquis une nouvelle force. On avait craint que le roi ne reprit peu à peu et une à une les libertés publiques ; désormais on redoute que l'empereur, qui pendant dix ans a personnifié l'absolutisme, ne les supprime toutes et d'un seul trait de plume. Je trouvais, dit La Fayette, de meilleures chances pour la liberté dans la maladroite et pusillanime malveillance des Bourbons que dans la vigoureuse et profonde perversité de leur antagoniste[19]. Patriotes, jacobins, bonapartistes étaient devenus aussi libéraux que les constitutionnels. Les chefs de l'armée eux-mêmes raisonnaient sur l'équilibre des pouvoirs, les garanties nécessaires et le vote de l'impôt comme Comte et Benjamin Constant. Dans un banquet donné à Metz pour célébrer le retour de l’empereur, le général Maurin porta ce toast : A la nation française ! Puisse-t-elle, par la constitution libérale qu'elle va se donner, être constamment libre, heureuse et respectée au dehors. Le capitaine de frégate Baudin écrivit à Carnot : Tout gouvernement qui ne sera pas assis sur des constitutions libérales sera promptement renversé[20]. Dès Grenoble, La Bédoyère avait dit à l'empereur qu'il faudrait renoncer au gouvernement absolu. A Auxerre, Ney lui avait donné de pareils avis[21]. A Paris, les ministres, les hauts fonctionnaires, les généraux, les magistrats, les conseillers d'Etat lui font entendre les mêmes paroles dans des conversations particulières et dans des Adresses officielles : ... Point d'actes arbitraires, disent les ministres : sûreté des personnes, libre circulation de la pensée, tels sont les principes que vous avez consacrés. — L'empereur ne veut régner, dit la Cour de cassation, que par une constitution faite et acceptée dans l'intérêt et par la volonté de la nation. — Sire, dit le conseil municipal de Paris, vos premières paroles sur le sol français renferment la promesse d'une constitution digne de vous et de vos peuples. — L'empereur, dit le conseil d'Etat, a pris l'engagement de garantir les principes libéraux, la liberté individuelle, la liberté de la presse et l'abolition de la censure, le vote des contributions et des lois par les représentants de la nation, la responsabilité des ministres et de tous les agents du pouvoir[22].

L'empereur n'avait point précisé tant de choses, mais il s'était livré, et on lui faisait dire tout ce qu'on voulait. Les circonstances, le sentiment public et surtout l'opposition des gens dont il avait formé son gouvernement empêchaient Napoléon de reprendre le pouvoir absolu. S'il avait voulu déchaîner la révolution, il aurait pu éviter de donner la liberté[23]. Mais il lui répugnait de se faire roi d'une Jacquerie[24]. Ne pouvant plus être empereur et ne voulant point être dictateur populaire, il fut réduit à prendre le rôle effacé de monarque constitutionnel. Dès les premiers jours d'avril, il s'occupa de donner au pays des institutions libérales. C'était une niaiserie, a dit madame de Staël. Du moment qu'on reprenait Bonaparte, il fallait lui déférer la dictature. Autrement, la terreur qu'il inspirait, la puissance qui résultait de cette terreur n'existaient plus. C'était un ours muselé qu'on entendait murmurer encore, mais que ses conducteurs faisaient danser à leur façon[25].

Naturellement, l'empereur en se désarmant ne désarma point ceux qui l'y avaient contraint. Il avait beau se résigner plus ou moins sincèrement au libéralisme, on ne lui en savait aucun gré et les défiances et les suspicions persistaient[26]. Avant qu'il eût promulgué la nouvelle constitution, c'est-à-dire quand il régnait encore sous l'empire de la constitution de l'an VIII et des sénatus-consultes de l'an X et de l'an XII, on entravait ses volontés, on discutait ses ordres, on éludait ses instructions. Par une métamorphose inattendue, les régicides de la Convention et les séides de l'empire étaient devenus des casuistes de légalité. Carnot qui avait signé, sans même perdre son temps à les lire, tant de listes d'envois au Tribunal révolutionnaire, prenait la peine d'écrire à l'empereur pour lui représenter que le général Morand, chargé d'une mission extraordinaire avec pleins pouvoirs, avait empiété sur l'ordre civil en faisant arrêter comme fauteur de troubles le sous-préfet d'Argentan[27]. Fouché, qui en 93 avait institué à Lyon le comité des sept juges parce que les tribunaux révolutionnaires embarrassés dans les formes ne faisaient point assez prompte justice, recommandait dans une circulaire aux préfets d'abandonner les errements de la police d'attaque et de se renfermer dans les limites d'une police libérale. Il s'abstenait de faire arrêter les suspects que l'empereur lui désignait ; il donnait des permis de séjour ou des sauf-conduits à tous les agents royalistes qui lui faisaient la faveur d'en demander. Il écrivait à Benjamin Constant : Les mesures violentes, loin de vaincre les résistances, en font naître de nouvelles et leur donnent plus de force. En pleine insurrection vendéenne, il infligea un blâme au lieutenant de police de Nantes pour son ordonnance mettant sous le séquestre les biens des nobles dont l'absence ne serait pas justifiée[28]. Regnaud et Bassano, qui avaient eu dans l'impeccabilité de Napoléon la foi du charbonnier, qui l'avaient adoré et servi comme un dieu, s'opposaient à ses moindres velléités d'arbitraire[29]. Le procureur général Legoux évitait de poursuivre les délits de presse[30]. Le 23 mai, le conseil d'Etat refusa de donner son adhésion au décret rappelant les conscrits de 1815, sous prétexte qu'aux termes de la nouvelle constitution— qui n'était pas encore votée — les levées appartenaient au pouvoir législatif[31]. L'empereur avait nommé vingt-deux commissaires extraordinaires mais il aurait pu appliquer à tous, ou à presque tous, son mot sur l'un d'entre eux : La présence de Pontécoulant à Toulouse n'a fait qu'augmenter le mal[32]. Rœderer maintenait comme maire de Marseille un royaliste déclaré. Costaz faisait mettre en liberté des conspirateurs arrêtés par Vandamme. Boissy d'Anglas laissait tout dans l'état à Bordeaux. — Si Napoléon est vainqueur, disait-il, tout ira bien sans prendre de mesures, et s'il est vaincu tout ce que l'on aura pu faire ne servira à rien[33].

Les décrets de Lyon et le décret du 25 mars concernant les ex-ministres et les militaires de la Maison du roi furent amendés dans un sens moins rigoureux. Leurs dispositions, en ce qu'elles avaient d'abusif et de vexatoire, restèrent lettre morte à Paris et dans la plus grande partie de la France. Les biens nationaux restitués depuis le 1er avril 1814 ne furent mis sous séquestre que dans un petit nombre de provinces, et ceux qui appliquèrent cette mesure comme ceux qui eurent à la subir y virent seulement une formalité temporaire. Aux émigrés rentrés sous Louis XVIII, il suffit d'un simple acte de soumission pour être autorisés à demeurer en France. Au lieu d'annuler les nominations faites dans la Légion d'honneur, ou institua une commission pour les réviser. Les ex-gardes du corps et officiers de la Maison militaire furent en général dispensés du serment qui leur était prescrit ; tous ceux qui demandèrent à servir turent replacés dans la cavalerie avec le grade qu'ils avaient antérieurement au 11 avril 1814. Ferrand resta fort tranquillement dans sa terre de l'Orléanais. Dandré, l'ancien directeur de la police, Lainé, qui dans une protestation datée de Bordeaux, 28 mars, avait, en qualité de président de la Chambre des députés et au nom de la nation française, dispensé tout propriétaire de payer des contributions aux agents de Buonaparte et tout individu de satisfaire au recrutement, ne furent pas inquiétés. S'ils émigrèrent dans le courant d'avril, ce fut de leur plein gré[34]. Malgré les conseils et les instructions de Davout, qui seul dans le gouvernement voulait la répression[35], aucune poursuite ne fut commencée contre les instigateurs de l'insurrection vendéenne. Les préfets et les officiers généraux qui avaient fomenté et mené la guerre civile dans le Midi en furent quittes pour la destitution. Le comte Boulay écrivait à Davout : L'intention bien prononcée de l'empereur est d'empêcher toute réaction politique[36].

Dans la soirée du 22 mars, Napoléon, justement irrité de la Déclaration des puissances où on le traitait en galérien évadé, dicta un décret exceptant de l'amnistie et déférant aux tribunaux, comme coupables de connivence avec l'ennemi en 4814, Talleyrand, Marmont, Lynch, Vitrolles, La Rochejaquelein, Alexis de Noailles, Sosthène de La Rochefoucauld, Bourrienne, Bellart, Beurnonville, Jaucourt, Dalberg et Montesquiou. Cette mesure n'était dans l'idée de l'empereur qu'un arrêt comminatoire destiné à imposer aux séditieux. Aucun ordre ne fut donné pal lui pour arrêter ceux des treize proscrits qui se trouvaient encore en France[37]. L'empereur, voulant rattacher ce décret à ceux qu'il avait rendus à Lyon, l'antidata de Lyon, 12 mars, et demanda à Bertrand de le contresigner comme les précédents. Le grand-maréchal s'y refusa nettement ; il déclara qu'il ne pouvait s'associer à un acte arbitraire. L'empereur s'adressa alors au duc de Bassano qui, après lui avoir fait les mêmes objections et opposé le même refus, n'obéit qu'à un ordre formel. Encore ce décret parut-il au Bulletin des Lois avec cette formule inusitée : Par l'Empereur, pour expédition conforme. Devant l'opposition de ses plus dévoués serviteurs, Napoléon avait hésité, au reste, à publier le décret qui, rédigé le 22 mars, ne fut rendu public que le 6 avril[38]. Il y eut une clameur chez les libéraux, des murmures jusque dans les Tuileries. La Bédoyère dit assez haut pour être entendu de l'empereur : — Si le régime des proscriptions recommence, tout sera bientôt fini[39].

La Bédoyère se rappela-t-il ces paroles quand, quatre mois plus tard, il tomba sous les balles du peloton d'exécution ? Les proscriptions avaient profité à la Révolution et le gouvernement de Louis XVIII n'allait pas hésiter à s'en servir.

 

III

L'administration était inerte ou hostile. Le roi avait conservé la moitié des préfets et des sous-préfets de l'empire ; mais leur zèle pour Napoléon, qui avait faibli dès 1813, ne s'était pas ranimé au retour de l'île d'Elbe. Quant aux fonctionnaires nommés par Louis XVIII, quelques-uns seulement remirent leur démission après le 20 mars ; les autres, quoique restant à leur poste, étaient plus disposés à trahir qu'à bien servir le gouvernement usurpateur. Dans toutes les provinces s'élevaient contre eux les plaintes et les accusations. Les généraux employés dans les différentes divisions militaires réclamèrent le remplacement immédiat de tous les préfets et sous-préfets[40]. Et ce n'était pas là un complot des traîneurs de sabre contre l'autorité civile, puisque de simples particuliers firent parvenir aux Tuileries et au ministère de l'intérieur les mêmes avis et les mêmes doléances. Les administrations civiles sont gangrenées, lit-on dans une lettre de Bonanay à Carnot. Tous les mérites de l'empereur, l'enthousiasme des citoyens, son retour glorieux dans la capitale après un trajet rapide de deux-cent-vingt lieues où il a été suivi par les acclamations de la multitude, rien ne fera si l'on ne change les préfets, les secrétaires généraux, les sous-préfets, les maires, les adjoints, les commis, les employés de toute sorte[41].

L'empereur, qui dans le parcours de Cannes à Paris avait déjà prononcé plusieurs révocations, pressait son ministre de l'intérieur de faire une exécution générale. Carnot comprenait aussi bien que Napoléon la nécessité d'un changement complet, mais il voulait y procéder graduellement de peur d'arrêter le mécanisme administratif[42]. Le 6 avril seulement, la liste des préfets fut définitivement arrêtée. Des 87 préfets que le précédent gouvernement avait nommés ou conservés, 61 furent révoqués, 22 maintenus ou déplacés[43]. Gamot resta à Auxerre, Plancy à Melun, Girardin à Rouen ; Rambuteau passa de la Loire dans l'Allier, Lameth de la Somme dans la Haute-Garonne, Bessières de l'Aveyron dans l'Ardèche. De nombreuses nominations de sous-préfets suivirent celles des préfets. Mais parmi ces nouveaux fonctionnaires, plusieurs mirent peu d'empressement à rejoindre leur poste. Les plus zélés eux-mêmes, comme Harel nommé préfet des Landes, durent compter avec la lenteur des moyens de locomotion. La plupart d'entre eux n'entrèrent vraiment en fonctions que du 10 au 20 avril[44]. Ainsi, pendant près d'un mois, l'administration était restée aux mains d'un personnel secrètement ou ouvertement hostile à l'empire. En outre, les choix de Carnot ne furent pas tous bons. On nomma des incapables, des maladroits, des gens sans expérience. On destitua des préfets que l'on aurait pu conserver et l'on en garda qu'il eût fallu révoquer, nommément le préfet d'Ille-et-Vilaine qui avait quitté Rennes le 22 mars pour ne pas assister à la proclamation de l'empire, et le préfet du Tarn qui, sur les ordres de Vitrolles, venait de dresser une liste de proscription contre les bonapartistes[45].

Parmi les fonctionnaires nommés ou maintenus par Carnot, les préfets de Lyon et de Marseille n'ont ni énergie, ni fermeté. Le préfet de Niort fréquente les royalistes sous prétexte qu'il veut les faire causer ; le préfet de Bordeaux fait obstacle à tout ce qu'ordonne Clausel ; le préfet de Caen entrave l'organisation des fédérés. Le sous-préfet de Senlis refuse de signer l'Adresse des habitants à l'empereur ; celui de Lisieux donne l'ordre d'enlever du clocher le drapeau tricolore, dans la crainte d'exciter des troubles ; celui de Rocroi, place frontière, montre de telles dispositions que Vandamme le destitue de sa propre autorité ; celui de Nogent-le-Rotrou fait afficher sous le porche de l'église une proclamation de Louis XVIII[46]. Pendant tout le règne, ce furent de nouvelles destitutions, de nouveaux changements, un chassé-croisé incessant de préfets et de sous-préfet[47]. Et le 18 juin encore, le jour de Waterloo, un habitant de l'Aisne écrivait à Carnot : Le gouvernement veut-il se maintenir ou veut-il remettre les rênes de l'Etat à Louis XVIII ? S'il veut se maintenir pourquoi l'administration continue-t-elle à être dans les mains des agents des Bourbons ?[48]

Les préfets étaient mauvais. Les maires étaient pires. Sauf dans l'Est de la France, presque tous étaient d'anciens seigneurs de village émigrés que l'empereur, toujours trop jaloux de rallier à lui la vieille noblesse, avait nommés de 1809 à 1811[49]. Le retour miraculeux des Bourbons, auxquels ils ne pensaient plus guère, avait ranimé leur foi royaliste en même temps qu'il leur avait donné de douces espérances de biens restitués et de privilèges reconquis. La restauration de l'empereur les réveillait de ce rêve. Le dépit et la colère les enflammèrent contre cet intrus, et ils le combattirent sourdement ou ouvertement avec les armes redoutables que lui-même leur avait jadis si légèrement confiées. Les divers rapports des départements, écrit le 30 mars Fouché à Carnot, s'accordent à me signaler les maires, qui sont la plupart des anciens seigneurs, comme un des principaux obstacles au retour de l'ordre. Le 15 avril, il écrit de nouveau : Il m'arrive d'une infinité de points des plaintes graves contre le mauvais esprit des maires. Ils terrifient les bons citoyens, arrêtent l'élan des Français et accréditent les nouvelles désastreuses et les bruits sinistres. Le 20 avril, Davout s'adresse à l'empereur lui-même : Tous les rapports expriment la même opinion sur la tiédeur et le mauvais esprit des maires, la plupart pris dans la classe des anciens nobles[50].

Dès le 27 mars, Carnot avait autorisé les préfets à suspendre les maires mal intentionnés[51]. Les préfets de Louis XVIII étaient encore, pour la plupart, à la tête des départements. Ils s'abstinrent naturellement d'user des pouvoirs que leur conférait le ministre. Dans la seconde quinzaine d'avril seulement, leurs remplaçants prononcèrent quelques suspensions. Il 'allait une mesure générale. Aux termes d'un décret, rendu le 20 avril, tous les maires et adjoints durent cesser leurs fonctions à l'arrivée, dans les départements, des commissaires extraordinaires chargés de procéder au renouvellement des municipalités[52]. Mais sous l'influence des idées libérales régnantes, l'empereur se ravisa. On lui avait persuadé que l'opinion publique réclamait l'élection des maires par les communes. Le 30 avril donc, nouveau décret qui annule le précédent et porte que dans toutes les communes au-dessous de 5.000 âmes, les maires seront élus par les citoyens actifs composant les assemblées primaires[53]. A peine le décret est-il publié qu'arrivent de tous côtés les observations les mieux fondées et les prédictions les plus alarmantes. On représente que les maires en fonctions, qui depuis cinq ou six ans se sont fait de nombreuses créatures et qui ont pour eux les fermiers, les employés, les fournisseurs, seront réélus en grande majorité, d'autant que beaucoup des plus ardents partisans de l'empereur, ouvriers et tâcherons, ne seront point admis à voter faute d'être portés au rôle. On demande l'annulation du décret du 30 avril, on propose que du moins les ci-devant nobles soient déclarés inéligibles ou encore que la possession de domaines nationaux devienne une condition d'éligibilité[54]. Ces objections sont trop tardives. L'empereur a pu rapporter une mesure autoritaire, il n'ose point revenir sur une mesure démocratique[55].

Les élections municipales eurent lieu au mois de mai et donnèrent les résultats prédits. Les deux tiers des anciens maires que le gouvernement espérait voir remplacés furent réélus. Or, comme l'écrivait le général Lucotte, commandant à Périgueux, tout dépendait des maires : contributions, départ des rappelés, organisation des gardes nationales, élections, esprit public[56]. Pour se faire élire, quelques-uns avaient promis qu'aucun habitant de la commune n'aurait à payer un sou d'imposition ni à rejoindre l'armée. Ils tinrent parole. Forts des suffrages de leurs concitoyens, ils bravaient préfets, généraux, commandants de gendarmerie. Celui-ci ordonnait au bedeau de jeter bas, la nuit, le drapeau tricolore ; celui-là suspendait les poursuites contre les contribuables ; un troisième faisait arracher les affiches administratives aussitôt après les avoir fait poser. D'autres entravaient la mobilisation des gardes nationales, opposaient aux engagements volontaires des formalités insurmontables, refusaient le logement aux détachements de passage, cachaient chez eux les réfractaires, répandaient le bruit de l'assassinat de Napoléon. Un maire du Pas-de-Calais disait qu'il vaudrait bien mieux marcher contre l'infâme tyran que contre les Alliés, et un maire d'Ille-et-Vilaine s'écriait en pleine place publique qu'au retour des Bourbons il n'aurait plus besoin de chevaux, car il ferait traîner sa voiture par des bonapartistes[57].

Le roi émigré avait aussi des auxiliaires parmi les magistrats, les prêtres, les professeurs, les agents du fisc, les juges de paix, les employés subalternes de toutes les administrations[58]. Le premier président et neuf conseillers de la cour de Rennes, la cour d'Aix tout entière, les tribunaux de Marmande, de Périgueux de Libourne, de Loudéac refusèrent le serment. La cour de Bordeaux se posa ce cas de conscience : Pouvons-nous condamner ceux qui crient : Vive le roi ! nous qui avons condamné, il y a un mois, ceux qui criaient : Vive l'empereur ! Des juges de paix de l'Ouest se faisaient agents de guerre civil[59]. Le 27 avril, un conseiller à la cour de Nîmes entraîna les habitants de Saint-Gilles à une révolte qu'il fallut de l'infanterie et de la cavalerie pour maîtriser. Des fonctionnaires se montraient sans cocarde tricolore au chapeau. On négligeait de rétablir les aigles sur les bâtiments de l'Etat ; d'où ces réflexions des paysans et des ouvriers : Il faut que l'administration elle-même ait bien peu de confiance dans la durée de l'empire ![60] Le proviseur de Lyon défendait aux élèves de crier : Vive l'empereur ! dans la cour du lycée. M. de Wailly agit de même au lycée Napoléon ; il y eut de sévères punitions qui provoquèrent une révolte générale, et le grand-maître de l'Université donna raison au proviseur ! Un rapport du préfet de l'Hérault mentionne qu'un instituteur de Lodève a pris la fuite après avoir imprimé au fer rouge une fleur de lys sur le bras de plusieurs de ses écoliers[61]. Ce bourreau d'enfants était bien digne du nom de convulsionnaire royaliste que les patriotes lorrains donnaient à leurs adversaires[62].

Dans une lettre pastorale, l'évêque d'Agen enjoint à son clergé d'exhorter les bons catholiques à n'obéir qu'au roi légitime. L'évêque de Vannes déclare que jamais il ne chantera un Te Deum pour le tyran. L'évêque de Soissons écrit au ministre des cultes qu'il ne reconnaît d'autre souverain que S. M. Louis XVIII[63]. Le curé d'Haineville met le village en interdit comme en plein moyen-âge ; il m'y a plus ni office divin ni sacrements. Le curé de Villeneuve-d'Agen annonce qu'il va fermer l'église. Le clergé tout entier du département du Nord, jusqu'aux religieuses du couvent d'Esquermes qui font copier à leurs élèves les proclamations de Louis XVIII, se croise pour les Bourbons. En Alsace, les prêtres menacent de damnation éternelle les paysans qui obéiront au décret sur la garde nationale. Un curé de l'Ain dit au prône que les enfants des individus qui ont dansé quand on a arboré le drapeau tricolore ne seront plus admis à communier. A Brest, un vicaire refuse l'absolution à la servante d'un bonapartiste. Le jour de la Fête-Dieu, à Saugues, un prêtre se détache de la procession et abat, d'un coup de poing, le shako décoré de l'aigle d'un soldat en permission. Les séminaristes bretons attendent dans une pieuse veillée des armes le premier coup de fusil, pour prendre part à la guerre civile. Dans la moitié de la France, les prêtres se refusent à chanter le Domine salvum. Quelques-uns font des compromis. Ils disent : Domine, servum fac imperatorem, ou bien ils psalmodient les paroles sur le ton du De Profundis[64]. Le clergé est animé du plus mauvais esprit, écrit d'ordonnance Lannoy en mission dans le Midi. Il n'y a pas de moyens que les prêtres n'emploient pour égarer l'esprit public. Ils font beaucoup de mal. — Mes soldats provençaux, écrit le colonel du 57e, reçoivent des lettres de leurs parents où il est dit que le curé les menace de l'enfer s'ils ne désertent pas. — Il faut gagner le clergé en Bretagne et ailleurs si l'on veut éviter la guerre civile, dit Davout à l'empereur. — Si l'on pouvait gagner le clergé ! écrit le général Delaborde. Mais c'est chose impossible[65].

 

IV

Napoléon avait, dit : l'empire, c'est la Révolution. Il avait dit aussi : l'empire c'est la paix. Il répugnait à refaire la Révolution et il ne pouvait pas maintenir la paix. Ceux qui s'étaient déclarés pour lui avec le plus d'élan se trouvaient ainsi déçus dans leurs espérances tandis que la foule immense des indifférents se voyait menacée dans son repos et dans ses intérêts.

L'empereur s'efforça d'abord de cacher les dispositions hostiles des puissances. La guerre n'est plus à craindre, dit le Journal de l'Empire. Tout répond de la tranquillité extérieure, déclare le Nain Jaune. Pendant trois semaines, les journaux officieux parlent sur le même ton, reproduisant les articles pacifiques du Morning Chronicle, annonçant l'envoi de courriers diplomatiques à Vienne, publiant des correspondances, vraies ou fausses, d'Augsbourg et de Bruxelles qui concluent au maintien de la paix[66]. Nombre d'exemplaires de la furieuse Déclaration du 13 mars avaient pénétré en France. Napoléon assemble les présidents de section du conseil d'Etat ; le 2 avril, ils rédigent un rapport où ils démontrent par les meilleures raisons du monde que cc manifeste est l'œuvre des seuls ministres de Louis XVIII, et que les plénipotentiaires des puissances étrangères n'ont pu le signer[67]. Mais en vain la paix est le vœu unanime, en vain on écrit du Nord comme du Midi que la certitude de la paix ferait cesser toute opposition[68], la guerre est inévitable et imminente. Il faut bien que l'empereur s'y prépare. Les décrets appelant sous les drapeaux les hommes en congé[69] et mobilisant une partie des gardes nationales[70], la publication dans le Moniteur du 13 avril du rapport de Caulaincourt, où l'état des relations diplomatiques est exposé sans réticences et qui fait baisser la rente de huit francs en deux jours[71], viennent démentir les assurances de paix et donner raison aux alarmistes et aux malveillants. Ils ont le triomphe gai. Les uns chantent :

Ah ! dis donc, Napoléon,

A n'vient pas ta Marie-Louise !

D'autres affichent cette annonce : Deux millions de récompense à qui retrouvera la paix perdue le 20 mars. D'autres placardent ce décret : Napoléon, par la grâce du diable et les constitutions de l'enfer, empereur des Français, avons décrété et décrétons ce qui suit : Art. Ier. Il me sera fourni 300.000 victimes par an. — Art. II. Selon les circonstances, je ferai monter ce nombre jusqu'à trois millions. — Art. III. Toutes ces victimes seront conduites en poste à la boucherie[72].

Le rappel des militaires en congé, la mobilisation des gardes nationales, la certitude d'une guerre effroyable, la crainte d'une seconde invasion, la faiblesse du pouvoir, l'inertie des préfets, l'hostilité des maires, les menées du clergé, tout conspire à altérer l'opinion dans le centre et dans l'Est de la France, à la perdre au Midi et à l'Ouest. L'enthousiasme s'éteint, la confiance s'évanouit. Le mot d'ordre des Mécontents : Ça ne durera pas ! s'impose à la masse. Des trois quarts des départements arrivent des rapports identiques sur l'affaiblissement de l'esprit public, et de partout s'élèvent des plaintes et des accusations contre l'apathie ou la complicité des fonctionnaires[73].

Restés d'abord comme écrasés par les événements, les royalistes reprennent leurs sens, se comptent, s'enhardissent, correspondent avec Gand, colportent les proclamations royales, répandent des nouvelles sinistres, intriguent, conspirent, prêchent l'insoumission, conseillent la désertion, persuadent les simples, soudoient les gueux, suscitent des troubles et des rébellions. L'action du gouvernement, écrit l'officier d'ordonnance Planat en mission dans le Midi, est tout à fait nulle, dominée qu'elle est par les menaces et l'insolence des royalistes. Ils annoncent l'entrée des Bourbons et les vengeances qu'ils exerceront contre tous ceux qui serviraient la cause de V. M. Ces nouvelles absurdes jettent la crainte chez les bons citoyens et encouragent la désobéissance chez les autres. — Tout s'en va en dissolution et en anarchie, écrit le commissaire central de Lille. Ce sont les royalistes qui ont le ton le plus élevé et qui tiennent le haut bout. Ce ne sont plus eux qui sont notés, ce sont eux qui notent les autres. Il faudrait à Lille des officiers généraux d'une énergie un peu sabrante. — Une bonne mesure, écrit d'Amiens l'officier d'ordonnance Chiappe, serait d'obliger tous les seigneurs châtelains à habiter leurs maisons de ville. Les paysans n'ayant personne pour les exciter seraient tranquilles et soumis. — Il y a des embauchages pour la désertion dans tous les gîtes d'étape, écrit Fouché à Davout. La faute en est aux habitants. La preuve, c'est qu'il n'y a guère de désertions dans les villages bonapartistes[74].

Pendant le mois d'avril, un millier de drapeaux tricolores sont jetés bas dans le Nord, l'Ouest et le Midi[75]. A Cette, on arrache les armes impériales qui décorent le poste de la place ; à Poitiers, on brise le buste de l'empereur ; à Boulogne, on plante un drapeau blanc sur les glacis ; dans l'Eure, dans l'Orne, dans le Bas-Rhin, dans le Lot-et-Garonne, on abat des arbres de la liberté. A Aix, on danse des farandoles en criant : Vive le roi La nuit à Toulouse, à Rouen, à la Rochelle, à Versailles, à Bayonne, en plein jour à Amiens et à Marseille, on lacère les affiches du gouvernement et on les remplace par l'ordonnance de Louis XVIII défendant de payer l'impôt, l'appel du comte d'Artois aux gardes nationales de France et cette prétendue proclamation du czar : Parisiens, vous nous livrerez ce cannibale mort ou vif ou votre ville sera rasée. On dira : Ici était Paris[76].

A Alençon, au Mans, à Beauvais, à Abbeville, à Agen, à Béziers, à Armentières, à Montpellier, il y a des séditions, des émeutes. A Lille, on crie en même temps : Vive le roi ! et : Vivent les Anglais ! Pendant une revue de la garde nationale de Saint-Omer, un milicien saisit le drapeau, en arrache la soie et la foule aux pieds ; le commandant d'armes, qui craint une révolte, se contente d'infliger au garde douze heures de salle de police. Les royalistes de Dunkerque s'entendent avec des émissaires de Gand pour leur livrer la ville. A Calais, à Saint-Omer, à Lille, à Valenciennes où l'on est contraint de licencier la garde nationale, au Havre où le 10 mai 6.000 individus se portent à la mairie en criant : Vive le roi ! les mêmes complots s'ourdissent ; les commandants de place déclarent qu'ils ne répondent pas de ces villes si on en retire les bataillons de guerre. A Bordeaux, les menées des bourbonistes nécessitent la mise en état de défense du Château-Trompette. Le 5 mai, le poste des Chartrons doit faire usage de ses armes contre deux cents émeutiers ; le sang coule, un homme est tué, deux sont blessés. A Agde, l'installation de la nouvelle municipalisé, nommée par le général Gilly, suscite une émeute. On crie : A bas les Aigles ! A la potence Napoléon ! Au bleu ! au bleu ! On brise les vitres de l'Hôtel de Ville, on maltraite les gendarmes. Il faut deux bataillons du 13e de ligne pour rétablir l'ordre. Les bonapartistes ne passent pas sans danger, la nuit, dans les rues désertes. Un charpentier de Toulouse est à demi assommé, un épicier de Marmande blessé d'un coup de pistolet, un habitant de Sainte-Livrade poignardé. Le préfet de l'Ariège redoutant que les habitants de la vallée d'Ax ne facilitent une invasion espagnole fait enlever les fusils dans les villages. A la fin d'avril, la population de Montagnac (Hérault), de Saint-Gilles (Gard), de l'Argentière (Ardèche) reprend la cocarde blanche. Près de Mende, 400 royalistes en armes tiennent la campagne[77]. Dans les dix départements de l'Ouest, des insurrections partielles préludent à un soulèvement général[78].

Dans certaines villes, une extrême animosité règne contre la garnison. Les membres du conseil d'administration du 14e de ligne demandent que le dépôt de ce corps quitte au plus vite Orléans où il s'est attiré la haine des habitants par ses sentiments enthousiastes pour l'empereur. A Avignon, les soldats sont insultés journellement dans les rues. A Libourne, on jette dans le jardin du major du 5e chasseurs le dessin d'un pendu avec cette légende : Voici le sort qui t'attend. A Lisieux, un colonel est cravaché en plein visage. Dans un faubourg de Montauban, la foule s'amasse autour d'un soldat en permission, qui n'a pour toute arme que son briquet, et le veut contraindre à jeter la cocarde tricolore. Il refuse, on l'assomme à coups de bâton[79].

Marseille est occupée mais non soumise. La révolte menace, des troubles éclatent chaque jour dans cette population de 96.000 âmes mal contenue par 2.000 soldais. La municipalité, l'administration, la barde nationale sont royalistes. L'arrêt subit dans le mouvement du port a affamé le bas-peuple. La misère est grande, écrit le général Verdier, il est facile d'exciter les pauvres gens. Les bourboniens n'y manquent point et recrutent leurs agents parmi les vagabonds, les ruffians, les repris de justice et même les anciens septembriseurs. — Le plus fougueux royaliste est un nommé Mollin qui se vantait jadis d'avoir mangé du foie de la Lamballe —. Les manifestes de Louis XVIII sont affichés sous la protection de portefaix armés de hâtons. Les officiers et les soldats ne peuvent sortir seuls sans être insultés, menacés, maltraités. Un capitaine qui regagne le fort Jean est assassiné. La gendarmerie hésite à arrêter les perturbateurs, et la garde nationale les protège ouvertement. Le maréchal Brune, commandant le corps d'observation du Var et gouverneur de la 8e division militaire, reçoit des lettres ainsi conçues : Coquin, si tu as le malheur de te rendre à la revue des Allées, ton affaire est faite. Ta tête doit être placée au haut du clocher des Accoules. Un soir, une patrouille de gardes nationaux tire sur des officiers qui crient : Vive l'empereur ! ce cri étant considéré à Marseille comme une provocation. Un autre soir, la populace assiège à coups de pierres le café des officiers, place Necker. Le 5 mai, le poste du 83e prend les armes et fait feu sur une bande d'émeutiers qui entourent la caserne en criant : Enfonçons la porte ! Vive le roi ! Mort aux bonapartistes ![80]

Les soldats qui sont sous les drapeaux restent aussi enthousiastes et aussi résolus qu'ils l'étaient le 20 mars, mais les mêmes sentiments n'animent pas tous les hommes en congé. Dans l'Ouest et dans le Midi, où d'ailleurs il y a toujours eu de la répugnance pour le service, et dans plusieurs départements du Nord, ils subissent l'influence de l'esprit de révolte. Ils écoutent les conseils des parents et des amis, se rendent aux raisons des orateurs de cabaret, se laissent gagner par la prime à la désertion qui leur est offerte sous forme d'argent, de refuge, de promesses. La désertion, écrit-on de Lille, perd chaque jour son caractère de gravité. Dans la langue de ce pays, déserter c'est faire preuve de loyauté et de fidélité. Aux revues d'appel, il se présente seulement la moitié ou le quart des inscrits. A Bordeaux, le 11 mai, les rappelés se ruent sur les membres du conseil de révision en criant : Vive le roi ! Il faut les baïonnettes du 62e pour maîtriser ces furieux. Dans le Languedoc, la Provence, la Normandie, l'Artois, la Flandre, ce sont les mêmes tumultes[81]. L'empereur donne l'ordre de suspendre les levées dans les départements de l'Ouest, espérant par cette mesure empêcher l'insurrection vendéenne[82]. Les marins de La Bastide et Berck, rappelés en vertu de l'inscription maritime, déclarent qu'ils ne partiront pas. Ceux de Dieppe montent en barques pour déserter en Angleterre ; deux coups de canon tirés de la batterie du goulet arrêtent à la sortie du port leur petite flottille[83]. Dans la moitié de la France, les gardes nationaux mobilisés ne sont pas moins récalcitrants. A Dunkerque, dix-huit partent sur deux cent quatre ; à Alençon, cent sept sur deux mille cent soixante. Les bataillons de Rouen et de Beauvais sont exclusivement formés de remplaçants[84].

Mis en route par petits détachements, les rappelés et les gardes nationaux mobilisés ont à subir des tentatives d'embauchage dans les gîtes d'étape. Le 2 mai, les habitants du village de Saint-Bonnet (Gard) parlent si bien que tous les hommes d'un détachement, dirigé sur Nîmes, rebroussent chemin et rentrent chez eux. Le 12 mai, une châtelaine des environs de Montbrison fait déserter trente-huit soldats en leur lisant le Journal du Lys et en donnant 30 francs à chacun d'eux[85]. La gendarmerie étant impuissante à faire rejoindre la foule des insoumis et des déserteurs et à réprimer les séditions, il est formé des colonnes mobiles dans cinquante-deux départements[86].

 

V

Dans la France agitée, Paris reste calme. On est aussi tranquille que si ce singulier changement de scène ne s'était pas produit, écrit le comte de Montlosier. On est tranquille mais on est triste. L'argent devient rare. La rente, qui avait atteint le cours de 78 au commencement de mars, tombe à 68, à 57, à 54[87]. Les recettes des théâtres baissent de plus d'un tiers[88]. Le commerce souffre. Dans les boutiques désachalandées, on maudit tout bas le retour de Napoléon. Les dames de la Halle, qui se piquent de royalisme, chantent :

Dieu ! rends-nous notre père de Gand.

La bourgeoisie est soucieuse, plutôt hésitante et défiante que franchement hostile. L'empereur y compte même des partisans. Il faudrait changer d'opinion selon chaque personne à qui l'on parle, dit Barry. Il faudrait d'autant plus changer d'opinion selon chaque personne à qui l'on parle que bien des gens ont deux opinions (ou paraissent en avoir deux), témoin Royer-Collard, doyen de la Faculté des Lettres, qui prête solennellement, devant ses collègues de la Sorbonne, le serment à l'empereur et envoie Guizot comme émissaire à Gand. L'impression dominante est le sentiment du provisoire. On se réserve, on attend les événements pour se déclarer. Aura-t-on n'aura-t-on pas la guerre ? Voilà la question. Et, si puissant est le désir de la paix, que jusqu'au 15 mai des gens raisonnables en conservent encore l'espérance[89]. Les partisans des Bourbons se bornent à annoncer que le gouvernement va réquisitionner l'argenterie chez les particuliers, à pronostiquer la victoire des Alliés, à parier dix louis contre un que Wellington sera à Paris avant un mois, à faire ces jeux de mots : Les soldats de l'île d'Elbe sont revenus avec leur cartouche. Bonaparte finira avec un boulet ! et à afficher des placards comme celui-ci : Aujourd'hui, grande représentation au théâtre de l'Ambition, place du Carrousel, au bénéfice d'une famille indigente de Corse. On donnera L'empereur malgré tout le monde, farce tragi-comique ; Les princes et princesses sans le savoir, folie burlesque ; et le ballet des Esclaves. On terminera par une Entrée de Cosaques[90]. Les royalistes font une guerre d'épigrammes et de fausses nouvelles. Ils ne cherchent pas, comme à Marseille, à Bordeaux, en Vendée, à fomenter des troubles, car il leur manque l'appui de l'élément populaire.

Le peuple de Paris, ils le savent bien, est tout à Napoléon. Les travaux se ralentissent et menacent de s'arrêter ; les ouvriers n'en exaltent pas moins celui qu'ils appellent leur père. Ils fraternisent avec les soldats, chantent la Marseillaise, encouragent les camelots qui crient dans les rues : Achetez des cocardes tricolores. Elles sont moins salissantes que les blanches. Elles dureront plus longtemps. Les ouvriers disent : L'empereur ne nous laissera toujours pas mourir de faim. Nous comptons sur lui et il peut compter sur nous. L'an dernier, on n'a pas voulu nous donner des armes. Mais si l'ennemi revient devant Paris, il faudra bien nous en donner et on verra comme nous nous en servirons[91]. Et ce n'étaient pas là des paroles après boire. Les faubourgs présentèrent une Adresse à l'empereur pour demander des armes, et on forma avec cette population vingt-quatre bataillons de tirailleurs[92]. Au reste, malgré ses embarras financiers, Napoléon s'était préoccupé de la détresse de la classe ouvrière. On reprit les travaux du Louvre, de la fontaine de l'Eléphant, du nouveau marché Saint-Germain. Dès le 28 mars, quinze cents terrassiers, maçons, menuisiers et peintres y étaient employés ; à la fin d'avril, leur nombre s'élevait à trois mille. A la même époque, deux mille armuriers, forgerons, serruriers, taillandiers, dinandiers, ébénistes étaient organisés en ateliers pour la réparation des fusils. Dans le courant de mai, quatre mille ouvriers travaillèrent aux ouvrages de défense de Montmartre, de Belleville et du Mont-Louis[93].

A Paris, si l'ordre est quelquefois troublé, c'est par les manifestations bonapartistes : promenades triomphales à travers les Tuileries et le Palais-Royal du buste de Napoléon couronné de violettes et de lauriers, pèlerinages diurnes et nocturnes à la colonne de la Grande-Armée, feux de joie à la barrière d'Italie et à la barrière du Trône où les faubouriens chantent la Marseillaise, brûlent des drapeaux blancs et des proclamations de Louis XVIII[94]. Le 2 avril, la garde impériale donne un immense banquet aux garnisons de Grenoble et de Lyon et aux gardes nationaux qui ont été de service le 20 mars. Quinze mille soldats et miliciens s'attablent dans le Champ de Mars[95] ; mille officiers dînent ensuite sous les galeries de l'Ecole militaire. Les toasts se succèdent : à l'empereur ! à l'impératrice ! au prince impérial ! Puis tous les officiers tirent soudain leurs épées, les croisent au-dessus des tables et jurent de mourir pour la patrie. Une voix crie : A la colonne ! On prend un buste de l'empereur. Les tambours battent, la musique joue la Marseillaise, un long et tumultueux cortège se met en route vers la place Vendôme. Quelques officiers montent le buste au faîte du monument tandis que les habitants s'empressent d'allumer lampions et chandelles. Ceux qui tardent un peu à faire cette illumination spontanée reçoivent comme premier avertissement une volée de cailloux dans leurs fenêtres. Le 18 avril, la milice parisienne rend à la garde impériale, dans la grande salle du Conservatoire des Arts et Métiers, le banquet du Champ de Mars. Ce sont encore des Vive l'empereur ! des Vive la liberté ! des chants patriotiques[96].

Chaque soir à l'Opéra, aux Français, à Feydeau, le parterre réclame la Marseillaise et Veillons au salut de l'Empire ; le public des loges subit ces auditions le plus souvent à contre-cœur, quelquefois en murmurant et en protestant[97]. Les royalistes et les modérés s'indignent des motions faites à la Société libre des Amis de la patrie et de l'humanité, nouvellement fondée sous la présidence honoraire de Carnot, et dénoncent les soirées du théâtre Montansier, transformé en café-concert, comme des saturnales odieuses. C'est un véritable club, à la différence qu'on y chante au lieu d'y parler. Des sous-officiers de la garde font le service d'ordre, le programme se compose non seulement de la Marseillaise, du Ça ira, du Chant du Départ, de saynètes contre les émigrés, d'hymnes napoléonistes, mais aussi de chants qui appellent tous les peuples de l'Europe à la liberté et à la révolution[98].

Il ne se passait guère de jour que des gens du peuple ne vinssent crier : Vive l'empereur ! sous les fenêtres des Tuileries. Les royalistes prétendirent que ces rassemblements étaient payés par la police, qui enrôlait à cent sous la séance tous les commissionnaires et tous les décrotteurs de Paris. On a si beau jeu dans notre pays à mettre la police en cause ! Il semble certain, au contraire, que l'empereur, heureux tout d'abord de ces acclamations, en fut vite importuné. Dans les premiers jours, il s'était montré à la foule dans un dessein de popularité. Il se créa ainsi une sorte de servitude envers les enthousiastes et même envers les simples curieux. On conte que des individus se firent une industrie de cette exhibition. Pour quelques pièces de monnaie, ils criaient : Vive l'empereur ! jusqu'à ce que le souverain eût paru au balcon. Une des causes qui engagèrent Napoléon, au milieu d'avril, à quitter les Tuileries pour l'Elysée fut vraisemblablement le désir de se dérober à ces ovations tyranniques. Le charme, en cette saison, du beau jardin de l'Elysée, où il pouvait se promener et converser à l'abri des regards, le détermina aussi à changer de résidence[99].

Les malveillants ne manquèrent pas d'attribuer l'abandon des Tuileries à certains scrupules et à la peur des assassins. Comme si Napoléon s'était fait jadis un cas de conscience de souiller la demeure des rois et comme s'il s'enfermait à l'Elysée pour n'en jamais bouger ! Presque chaque jour, il passe en revue, au Carrousel ou aux Champs-Elysées, des régiments qui partent pour les frontières. Le dimanche, il va entendre la messe dans la chapelle des Tuileries ; à l'issue du service, il y a audience publique. Puis c'est un déjeuner à la Malmaison avec la princesse Hortense, Molé, Denon et La Bédoyère, ou une excursion à la maison de la Légion d'honneur de Saint-Denis. Ce sont des visites aux Invalides, à l'Ecole polytechnique, au Muséum d'histoire naturelle, aux galeries du Louvre, chez le peintre David, à qui l'empereur remet la croix de commandeur devant le tableau des Thermopyles, aux travaux du Champ de Mars, aux ouvrages de Montmartre et de Charonne, aux ateliers d'armes, à la filature de Richard Lenoir. Napoléon fait ces promenades sans escorte, accompagné seulement d'un ou deux aides de camp : Drouot, Flahaut, Corbineau, La Bédoyère. Dans les quartiers populeux, il descend de voiture, marche au milieu de la foule, s'arrête pour causer avec les ouvriers et les femmes du peuple[100].

L'empereur voulut se montrer une fois à l'Opéra et une fois à la Comédie-Française. A l'Opéra, il arriva à l'improviste, au commencement du ballet de Psyché. Mais aux Français, sa présence était en quelque sorte annoncée par le choix du spectacle. L'affiche portait : La Mort d'Hector, et l'on savait que l'empereur aimait particulièrement cette tragédie de Luce de Lancival. La salle était comble : 4.953 francs de recettes ! Avant le lever du rideau, on demanda la Marseillaise et le Chant du Départ. On était au milieu de la troisième scène, raconte Hobhouse, quand Napoléon entra ; tout le monde se leva en jetant des cris qui retentissent encore à mes oreilles. Les vivats continuèrent jusqu'à ce que l'empereur, après avoir salué à droite et à gauche, se fut assis ; alors on recommença la pièce. Tous les vers qui pouvaient paraître faire quelque allusion à la situation présente — ils étaient très nombreux[101] — furent applaudis avec enthousiasme. A ces mots :

C'était Achille !

Il reparaît enfin ! . . .

le parterre se leva et interrompit Talma par une immense acclamation. L'empereur, dit Hobhouse, était très attentif. Il ne parlait à personne de ceux qui étaient derrière lui et paraissait insensible aux vivats. Il se retira si précipitamment à la fin de la pièce que la multitude n'eut pas le temps de le saluer[102].

On avait dissuadé à Napoléon de passer en revue la garde nationale. Composée en majorité de commerçants, presque tous hostiles à l'empire par besoin de la paix, la milice parisienne pouvait, disait-on, faire quelque manifestation qui produirait une impression funeste en France et à l'étranger. D'autres personnes redoutaient, non sans raison, une tentative d'assassinat[103]. Napoléon goûta peu ces conseils. La revue eut lieu le dimanche 16 avril. Les quarante-huit bataillons de grenadiers et de chasseurs des douze légions parisiennes (les fusiliers n'étaient pas habillés) se massèrent dans la cour des Tuileries et sur la place du Carrousel. Napoléon, suivi de ses seuls aides de camp, pour témoigner à la garde nationale son entière confiance en elle, passa devant le front de chaque compagnie. Les 1re, 2e, 3e, 10e et 11e légions (arrondissements du centre) gardèrent un froid silence, mais d'assez nombreux Vive l'empereur ! se firent entendre chez les autres miliciens qui mirent leurs chapeaux au bout des baïonnettes, et, après la revue, la harangue de Napoléon aux officiers fut chaudement accueillie[104]. Pour le défilé, l'empereur se plaça devant le pavillon Médicis, très en avale de son état-major, et ayant à sa droite le général Lobau et à sa gauche un grenadier sans aimes, chargé de prendre les pétitions. C'était sa seule protection contre un flot de peuple que l'on avait laissé pénétrer dans la cour des Tuileries et qui s'agitait à dix pas de lui. Il aurait été bien facile, dit un Anglais témoin de la scène, de faire feu sur Napoléon et même de le poignarder. J'admirais sa sérénité. Son visage est très pâle, ses mâchoires pendantes, mais pas autant que je l'avais entendu dire. Il n'est pas bien gros, mais son ventre est si saillant que l'on voit son linge passer au-dessous de son gilet. Il tenait ses mains jointes par devant ou par derrière, mais quelquefois il les séparait pour se frotter le nez, prendre plusieurs prises de tabac et regarder à sa montre. Il poussait souvent des soupirs, avalant sa salive et paraissant souffrir quelque douleur dans la poitrine. Il regardait tout ce qui se passait autour de lui en fronçant les sourcils et en les rapprochant l'un de l'autre, comme pour voir plus distinctement. Le défilé dura deux heures. Il passa par toute cette ennuyeuse cérémonie avec une impatience paisible[105].

 

VI

Dès le 21 mars, Napoléon avait inauguré l'empire libéral en abolissant la censure[106]. — Je ne crains pas de donner la liberté de la presse, dit-il : depuis un an on a tout dit sur moi. Mais au grand étonnement des royalistes, la plupart des journaux usèrent de cette liberté avec beaucoup de discrétion. Il y avait des raisons. Le 20 mars, les publicistes qui depuis quinze jours traitaient Napoléon de tigre altéré de sang et autres gentillesses étaient peu rassurés sur la façon dont le susdit tigre allait apprécier ce langage. Ils craignaient la suppression ou la confiscation de leur journal, la prison pour eux-mêmes[107]. Dans cet état d'esprit, ils souscrivirent sans difficulté à la proposition que leur fit faire Fouché d'accepter le contrôle officieux d'un rédacteur-censeur, désigné par le gouvernement. Ils redoutaient bien davantage ! Jouy fut placé à la Gazette de France, Dupaty au Journal Général, Lacoste à la Quotidienne qui, le 1er avril, devint la Feuille du Jour[108]. Le Journal Royal avait de lui-même cessé de paraître. Quant au Journal de Paris, rédigé par Jay, au Nain Jaune, bonapartiste de la veille, et au Journal des Débats, abandonné par les Bertin et repris par Etienne, il n'était pas nécessaire de les soumettre à un examen.

Cinq jours après que cet arrangement eut été convenu parut le décret abolissant la censure. Les journaux auraient pu s'en autoriser pour remercier leur censeur. Ils trouvèrent sans doute plus avantageux de le conserver. Tout en déclarant la presse libre, le gouvernement n'abandonnait pas ses droits de poursuites devant les tribunaux et, en outre, les gazettes restaient soumises au bon plaisir de la poste qui pouvait refuser de les transporter en province[109]. La tutelle acceptée par les journaux les garantissait contre les actions en justice et contre l'arbitraire de la poste. Au reste, le censeur se montrait bon diable. Il savait ne pas insister pour faire passer un article communiqué[110] et se bornait à mettre son veto sur les entrefilets trop franchement hostiles. Encore, s'il empêchait les insultes à l'empereur, les fausses nouvelles, la discussion de la forme même du gouvernement, il autorisait le blâme des actes du souverain et de ses ministres et la libre critique de la nouvelle constitution impériale. Souvent même, soit insouciance, soit légèreté, il laissait publier des articles A. des nouvelles tout à fait nuisibles à la cause de l'empereur. Les journaux les plus dévoués, le Nain Jaune lui-même, provoquaient parfois l'indignation des bonapartistes et des patriotes. Je viens de lire le Nain Jaune, écrivait le 20 mai le général Hugo à Davout. Est-il possible d'outrager aussi horriblement le grand homme ![111]

L'empereur, dit-on, aurait voulu s'assurer l'appui ou du moins la neutralité du Censeur. Des ouvertures Curent faites par Fouché à Comte et à Dunoyer. Il leur proposa la rédaction du Moniteur ou telles places qui leur conviendraient. Ils refusèrent tout. Fouché aurait dû comprendre que de pareils hommes seraient incorruptibles. Mais il avait des autres la même opinion que de lui-même, c'est-à-dire la plus mauvaise. Au commencement d'avril parut le numéro V du Censeur. Comte y niait les droits de Napoléon à l'empire et y déclarait que le gouvernement n'était que provisoire. La livraison fut saisie chez les libraires et chez l'imprimeur par un agent subalterne. L'opinion s'émut justement. Quelle confiance avoir dans les déclarations libérales de Napoléon qui faisait saisir un journal par mesure administrative quinze jours après avoir supprimé la censure ! Comte réclama à la préfecture de police et à la police générale. On a le droit de me poursuivre, disait-ii, mais on n'a pas le droit de saisir le Censeur. Fouché, qui d'ailleurs était partisan de la mesure, et Réal se retranchèrent derrière de prétendus ordres de Napoléon. Regnaud et Benjamin Constant intervinrent auprès de l'empereur. Les exemplaires furent rendus[112]. Comte s'empressa d'ajouter à la livraison une demi-feuille remplie d'outrageantes plaisanteries contre l'armée : Il faut remplacer l'ordre de l'éteignoir par l'ordre du sabre... Reste à démontrer l'influence de la moustache sur le raisonnement... Qu'est-ce que la gloire ? Un lion qui fait trembler tous les animaux a-t-il de la gloire ?... La bravoure est-elle estimable en soi ? Celui qui brave les voyageurs pour leur enlever leur bourse est-il estimable ![113] Des poursuites judiciaires furent alors demandées au procureur général Legoux qui déclara qu'il ne croyait pas devoir en ordonner[114].

Au commencement du mois de mai parurent trois nouveaux journaux quotidiens : L'Indépendant (inspiré, dit-on, par Fouché), très hostile aux Bourbons mais non moins hostile au pouvoir absolu et écrit pour les braves chargés de la défense de la patrie et de la liberté ; L'Aristarque, se donnant également comme dynastique libéral ; Le Patriote de 89, bonapartiste jacobin. Il était rédigé par le septembriseur Méhée et on le surnomma le Journal de la Lanterne et le Sans-Culotte de 93. D'autres feuilles hebdomadaires ou bimensuelles vinrent faire concurrence au Censeur et au Nain Jaune : Le Censeur des Censeurs et Le Nain Vert, tous deux royalistes masqués, et L'Ami du peuple, sorte de Père Duchêne bonapartiste, beaucoup moins grossier, toutefois, et beaucoup moins violent que le journal d'Hébert. C'était un Père Duchêne toujours de bonne humeur, parlant le langage familier sans emprunts au dictionnaire poissard, dénonçant les émigrés et les fonctionnaires qui bourbonisent l'opinion, sans réclamer contre eux d'autres mesures que de sévères avertissements, et appelant tous les citoyens à la fraternité et à la défense de la patrie.

Il y eut aussi le Journal du Lys. Cette petite gazette, qui portait à la première page une tige de lys avec cette épigraphe : Sa douceur guérit la piqûre de l'abeille, était imprimée clandestinement, paraissait à des intervalles irréguliers et n'avait point d'abonnés. On en jetait des numéros, la nuit, sous les portes cochères[115]. Le Journal du Lys publiait les ordonnances du roi émigré, les déclarations des puissances, des extraits des gazettes gallophobes d'Outre-Rhin, des nouvelles des départements où l'on annonçait la victoire décisive des vendéens et l'insurrection générale du Midi. Le tout était agréablement entremêlé d'injures contre Napoléon et ses partisans : Le monstre qui nous gouverne n'a pour lui que la canailleBonaparte est rentré à la tête d'une troupe de misérables... Il est poursuivi par la haine et le mépris de tous les Français[116]. Le Lys, selon les royalistes, tirait à quatre mille exemplaires[117]. C'est fort douteux, mais les journaux du gouvernement prêtaient leur grande publicité à cette feuille en en citant de nombreux extraits. Tout ce que nous pourrions écrire pour la liberté, disait le Journal de l'Empire, servirait moins sa cause que les pages de messieurs du Lys en faveur de la servitude[118]. Ce principe, fort discutable, que la publicité donnée aux mensonges et aux calomnies est le meilleur moyen d'en affaiblir l'importance[119], était à l'ordre du jour. Le Journal de l'Empire, l'Aristarque, l'Indépendant, le Journal de Paris reproduisaient les manifestes de Gand, les proclamations des souverains alliés, les articles des gazettes allemandes et anglaises les plus nuisibles à la cause impériale. C'était Fouché, qui avait préconisé cette méthode de polémique[120]. C'est assez dire que l'empereur aurait pu s'en défier.

Plus ou moins soumises à des censeurs officieux ou intimidées par la crainte des poursuites, les gazettes, sauf le Lys et le Censeur, usaient de la liberté avec une grande mesure. Mais à côté des journaux, il y avait les brochures qui s'exprimaient franchement et librement. Du 25 mars au 20 juin, on en publia près de huit cents[121]. Chacun voulait voir imprimer ses idées sur la chose publique. A lire cette multitude d'écrits, il semble que même chez les politiciens l'opinion en faveur de l'empire était plus générale qu'on ne le croirait. Il n'y a pas de brochures ouvertement orléanistes, il y a fort peu de brochures nettement républicaines, et quant aux pamphlets royalistes, d'ailleurs très véhéments et très injurieux[122], ils comptent seulement pour un sixième dans le total des publications des Cent Jours. Les cinq autres sixièmes ont pour auteurs des libéraux sans cocarde et des napoléonistes de toute nuance[123].

Les impérialistes purs, les ultras du parti exultent à la seule vue de leur idole. Qu'il règne longtemps et que sans s'inquiéter des criailleries des libéraux et des écrivassiers, il rende la France glorieuse comme en 1811, à cela se bornent leurs vœux : Le premier règne de Napoléon est plus rassurant que les constitutions faites ou à faire, car il a garanti les fortunes, la liberté et l'égalité des droits. — J'écrirais des volumes s'il me fallait dire jusqu'où il a porté ses bienfaits !Napoléon revient sur les ailes de l'amour. Peuple abusé, reconnais ton prince, ton libérateur et ton Dieu... On ne peut point aimer l'empereur, on ne peut que l'adorer[124].

Les jacobins conseillent à l'empereur de prendre la dictature populaire et de renoncer à l'appareil gothique et aux vaines pompes renouvelées de la royauté. Ils réclament des mesures révolutionnaires, la mise hors la loi des nobles et des traîtres, leur bannissement perpétuel, la confiscation de leurs biens : C'est dans les hommes de la Révolution et dans le peuple magnanime, qualifié de vile populace, que Napoléon, environné des traîtres qui l'ont perdu l'année dernière, trouvera son meilleur appui. — Ce sont les ennemis de l'intérieur qui sont les plus à craindre. Sévissez, la loi à la main, contre ces scélérats. — Que Bonaparte ne s'entoure plus de l'appareil des trônes vulgaires. Ses malheurs lui sont venus d'avoir oublié la Révolution. — La noblesse est et fut toujours l'ennemie de la nation. Les nobles conspirent encore. Frappons-les de la foudre exterminatrice[125].

Mais c'est le libéralisme qui domine chez ces polémistes par occasion. A elles seules, les brochures d'opinion libérale égalent le nombre total des écrits royalistes, démagogiques et napoléonistes purs. Les libéraux de toute nuance, bonapartistes modérés, ex-orléanistes, anciens royalistes-constitutionnels résignés au fait accompli, républicains ralliés à l'empire acceptent Napoléon mais en lui posant des conditions. Il devra abdiquer le pouvoir absolu, bannir toute idée de conquête, donner les libertés nécessaires, soumettre sa volonté à celle des représentants de la nation : Ô Napoléon, ton sort va dépendre du système que tu suivras ! Fais des efforts pour restreindre ton pouvoir. Tout est perdu si tu songes à t'imiter toi-même. — Il nous faut des garanties. Vos anciennes constitutions sont avilies, dégradées, méprisées... Mes conseils sont le sine qua non de la conservation du trône impérial. — Vous ne pouvez rétablir le régime de 1805. La France veut être libre. Vous auriez demain des rebelles au lieu de sujets si vous ne donniez pas la liberté[126].

 

 

 



[1] Décrets de Lyon, 13 mars (Journal du Rhône, 13 mars, et Moniteur, 22 mars). Napoléon, Correspondance, 21.685. Relation du Moniteur, 23 mars. Lieutenant-colonel Laborde, Relation, 94, 109. Berriat-Saint-Prix, Napoléon à Grenoble, 80. Fleury de Chaboulon, Mémoires, I, 185, 214, 221, 241. Fabry, Itinéraire de Buonaparte, 98.

[2] Relation du Moniteur, 23 mars. Laborde, 105, 109. F. de Chaboulon, I, 304, 212-213, 226. Fabry, 64, 80-82, 91-92. Rey, Adresse à l'Empereur, 9. Guerres, Campagne de Lyon en 1814-1815, 194-195. Déposition du préfet Capelis (Procès de Ney, II, 149).

[3] Expressions des Adresses pour la formation des fédérations et des préambules des pactes fédératifs de la Bourgogne, de la Bretagne, du Lyonnais, du Languedoc, du Périgord, etc.

Ce furent les Périgourdins et non, comme tout le monde l'a dit, les Bretons qui proposèrent les premiers de se former en fédération. Préfet de la Dordogne à Davout, 30 mars. Arch. Guerre. Mais la fédération bretonne fut formée dès le 25 avril et la confédération périgourdine seulement le 24 mai.

[4] Extraits de la correspondance de police générale, 17 mai, 5 juin. (Arch. nat. F. 7. 3774). Les crimes des fédérés, 5, 20, 38, etc. Cf. Tableau des événements de Lyon, 109 : Il y eut des motions féroces. Il n'a pas tenu à quelques orateurs des clubs de Saint-Pierre que nous ne revissions les jours affreux de 93.

[5] Fragment des Mémoires de Molé. (Revue de la Révolution, XI, 95.)

[6] Extraits de la correspondance des préfets et de la correspondance de la police générale, avril à juin. Correspondance du ministre de l'intérieur, 2 avril. Bulletin de Real, 8 avril. Rapport de Lemarois, Rouen. 16 mai. (Arch. nat., F. 7, 3740, F 7, 3774, AF. IV, 1935, AF. IV, 1034, AF. IV, 1937, F1e, I, 26.) Lettres de généraux et commandants de place, rapports de gendarmerie, etc., du 24 mars au 6 juin. (Correspondance générale, Arch. Guerre.) Montlosier à Barante, 11 et 14 avril (Barante, Mém., II, 133-134). Las Cases, Mém., VI, 388-389. Fragment des Mémoires de Molé, précité.

Cf. Benjamin Constant, Mémoires, II, 2, 3, 13, 105-115 : Les mots de servage et de glèbe avaient échauffe les esprits... La haine universelle contre la noblesse prêtait à Bonaparte un appui redoutable.... Il en aurait pu tirer un avantage prodigieux. — Montlosier à Barante, 14 avril (Barante, Mém., II, 133) : Avec un homme aussi entreprenant et un mouvement de canaille sous le nom de souveraineté du peuple, tous les châteaux frémiront. — Notes manuscrites de Rousselin (Collection Régis) : Il est certain qu'au moment du retour de l'île d'Elbe, il y avait un mouvement national dans toute la France pour faire justice de tous les nobles et tous les prêtres. — Salvandy, Mémoire à l'empereur, 14 : Nous pouvons en un instant voir se renouveler tout 93.

[7] Du modérantisme mal interprété. De la noblesse et du peuple français. Conspiration de la noblesse féodale contre la liberté des Français. — D'autres brochures dont on trouvera les titres à la fin de ce chapitre tenaient le même langage.

[8] Et encore : Il faut non-seulement empêcher les nobles de porter leurs titres, mais leur faire reprendre leurs noms patronymiques (Capet pour Bourbon. Bouchart pour Montmorency, etc.), conformément au décret de la Convention. — Tous les nobles conspirent. Il faut les destituer tous. — Il faut s'inspirer de 92. — Il faut confisquer les biens rendus aux émigrés. — Il faut des mesures révolutionnaires. — Pas de pitié pour les conspirateurs. — Il faut décréter la Terreur pour sauver la patrie. — La patrie est en danger, il faut savoir la défendre par des moyens révolutionnaires, etc., etc., etc.

Lettres à l'empereur et aux ministres, avril à juin (Arch. nat., F1e, I, 26. F. 7, 3646, et AF. IV, 1634). — Un grand nombre de ces lettres sont signées.

[9] Maranthon à Davout, Auch, 15 mai. Ameil à Grundler, Mézières, 24 avril. De Lannoy à Napoléon, Lyon, 1er juin. (Arch. Guerre.)

[10] Extraits de la correspondance des préfets, mars-avril, et rapports d'officiers d'ordonnance en mission. (Arch. nat., F. 7, 3740, F. 7, 3774. AF. IV, 1934, AF. IV, 1935.) Cf. Commandant de gendarmerie à Davout, Nevers, 26 mars. Général Vaux à Davout, Dijon, 24 avril. (Arch. Guerre.)

[11] Fragment des Mémoires de Molé (Revue de la Révolution, XI, 89).

[12] Cf. Benjamin Constant (Mémoire sur les Cent Jours, 3, 23, 105) : Ils me regardent comme leur soutien, leur sauveur contre les nobles... Je n'ai qu'à faire un signe, ou plutôt à détourner les yeux, les nobles seront massacrés dans toutes les provinces... Mais je ne veux pas être le roi d'une jacquerie. — Napoléon aurait pu tirer un parti terrible de cette fermentation. Il s'en effraya pour sa propre autorité, et c'est à sa terreur que la France et l'Europe doivent peut-être d'avoir échappé à une jacquerie. — Fleury de Chaboulon (Mémoires, I, 368-370) : Leurs imprécations firent craindre à l'empereur d'avoir ressuscité l'anarchie... Il fit la faute d'arrêter les mouvements populaires... Dans l'état de crise où il se trouvait et dans lequel il avait entraîné la France, il ne devait dédaigner aucun moyen de salut, et le plus efficace était de lier le peuple à son sort... Le peuple aurait mieux senti alors que ce ne n'était plus seulement la cause personnelle de Napoléon qu'il avait à défendre, et la crainte du châtiment lui aurait rendu cette ancienne exaltation si fatale à la première coalition. — Montholon (Récits, II, 224) : Il fallait faire la terreur comme en 93. C'est la mort de Louis XVI qui a sauvé la Révolution parce que les juges étaient trop compromis pour ne pas dire : Vaincre ou mourir. — Mémoires de Molé, précités : Soyez tranquille, me dit l'empereur, je suis là pour arrêter les Jacobins. Ils ne me feront pas aller plus loin que je ne voudrai. — Villemain, Souvenirs, 173-174. L'effervescence de la rue déplaisait mortellement à Bonaparte. Il avait dégoût et crainte de tout ce qui était émotion tumultuaire. — Mme de Staël (Considérations sur la Révolution, III, 141-143) : Le jacobinisme militaire était la seule ressource de Bonaparte. — Hobhouse (Lettres, II, 29) : Les actes de son dernier règne prouvent qu'il avait horreur de répandre le sang, mais il n'y avait que ce moyen pour réussir. Quand il fut trop tard, il avoua son erreur, mais je ne crois pas qu'il ait regretté de ne l'avoir pas fait. — Rousselin (Notes manuscrites, collection Bégis) : Napoléon fit donner les ordres les plus sévères pour observer la modération. Il y réussit, mais la nation en émoi, en ardeur et disposée à tous les sacrifices fut refroidie et glacée.

[13] Fabry, Itinéraire de Bonaparte, 91-92.

[14] Général Hugo à Davout, Thionville, 18 avril (Arch. Guerre). — Le général Hugo était, comme on sait, le père de Victor Hugo, et le grand poète n'eut pas désavoué cette image : le cheval de bois de 92.

[15] ... Mon système de défense ne valait plus rien parce que les moyens de résistance étaient trop au-dessous du danger. Il fallait recommencer une révolution pour me donner toutes les ressources qu'elle crée ; il fallait remuer toutes les passions pour profiter de leur aveuglement : sans cela, je ne pouvais plus sauver la France. Jomini, Vie politique et militaire de Napoléon, II, 413 (édit. de Bruxelles).

[16] Las Cases, Mémoires, VI, 93-95. Montholon, Récits, II, 150, 180, 204, 224.

[17] Fragment des Mémoires de Molé. (Revue de la Révolution, XI, 95.)

[18] Napoléon à Joseph, 25 mars (Arch. nat., AF. IV, 907). La Fayette à Mme d'Hénin, 15 mai (Mém., V, 499). Moniteur et Journal de l'Empire, 27, D. 29 mars, 10, 11, 13 avril, 9 et 22 mai, etc. Notes de Lucien Bonaparte (Arch. Aff. étr., 1815). Mém. sur Carnot, II, 439-440. Miot de Mélito, Mémoires, III. 432. Arch. nat. 02 36. Arch. de la Comédie-Française.

Joseph, arrivé le 23 ou le 24 mars, habita d'abord l'Elysée, puis le Palais-Royal et enfin l'hôtel du Prince de Condé ou le Luxembourg. — Jérôme arriva à Paris le 27 mai. Madame mère et le cardinal Fesch arrivèrent le 1er juin. — Lucien vint une première fois le 10 avril, repartit le 12 avec une mission pour le pape qu'il ne put remplir, le gouvernement suisse lui ayant refusé le passage, et rappelé par une lettre de Joseph, il revint à Paris le 7 mai.

[19] La Fayette, Mémoires, V, 405.

[20] Lanusse à Davout, Metz, 9 avril. (Arch. Guerre.) Lettre de Baudin, 17 mars (citée dans les Mémoires sur Carnot, II, 413-414).

[21] Fleury de Chaboulon, Mémoires, I, 183, 241. Mlle Cochelet, Mémoires, III, 14.

[22] Moniteur, 27 et 28 mars.

[23] Si Bonaparte eût voulu encourager la vengeance, un peuple nombreux eût pris volontiers la vengeance pour la liberté. Benjamin Constant, Mémoires, II, 3. — La violence était la route la plus sûre, on pouvait combiner les ressources encore immenses de l'esprit militaire avec les moyens désespérés des fureurs démagogiques. C'est en repoussant ces puissants et terribles auxiliaires que le gouvernement impérial se créait des dangers. Id., ibid., 100. — Le Jacobinisme militaire était l'unique ressource de Bonaparte. Il devait prendre la liberté comme arme et non comme entrave. Mme de Staël, Considérations sur la Révolution, III, 133. La résolution que Napoléon adopta en cette circonstance fut honorable et non point politique. Fleury de Chaboulon, Mémoires, I, 370. — Au lieu de m'occuper de constitution, j'aurais dû me saisir de la dictature jusqu'à la paix générale. Je le pouvais sans danger en faisant appel aux masses populaires. Montholon, Récits, II, 204.

[24] Benjamin Constant, Mémoires, II, 23. Cf. Las Cases, Mémoires, V, 94.

[25] Mme de Staël, Considérations sur la Révolution, III, 141.

[26] Benjamin Constant, Mém., II, 18 La Fayette, Mém., V, 401, 415. Mme de Staël, Considérations sur la Révolution, III, 141. Villemain, Souvenirs, II, 177-178.

[27] Carnot, Correspondance pendant les Cent Jours, 55-57. Cf. 82-84.

[28] Circulaire du duc d'Otrante, 31 mars. Napoléon à Fouché, 27 mars, 14, 29, 30 avril, 3, 5, 15, 16, 24 mai. (Arch. nat., AF. IV, 907, et AF. IV*, 60.) Napoléon, Correspondance, 21.902, 21.921, 21.923. Résigny à Napoléon, Angoulême, 2 juin (Portefeuille de Bonaparte, 110-111). Benjamin Constant, Mémoires, II, 90-91. Cf. Mémoires de Fouché, II, 325-327.

Un correspondant de Wellington lui écrivait très justement de Paris, le 8 avril : L'empereur n'est qu'un instrument des jacobins, mais ce ne sont plus les jacobins de 93. Ils sont plus libéraux que révolutionnaires (Supplément à la Correspondance de Wellington, X, 101).

[29] Benjamin Constant, Lettres, II, 98. Fleury de Chaboulon, Mémoires, I, 322-323. Ernouf, Maret, duc de Bassano, 645-651.

[30] Legoux à Réal, 24 avril. (Arch. nat., F. 7, 3688 24.)

[31] Miot de Mélito, Mémoires, III, 430-431. — Napoléon passe outre à cette opposition. La classe de 1815 fut rappelée avant la réunion des chambres.

[32] Napoléon à Fouché, 20 mai. (Arch. nat., AF. IV, 967.)

[33] Vandamme à Davout, Mézières, 30 avril. (Arch. Guerre, armée du nord.) Rapports de Lannoy et de Résigny à l'empereur, Marseille, 8 juin, et Bordeaux, 7 juin. (Portefeuille de Buonaparte, 88-89 et 32.) — Nous dirons, une fois pour toutes, que la majeure partie des pièces du Portefeuille de Buonaparte (ouvrage mentionné comme apocryphe dans le catalogue de la Bibliothèque nationale) sont parfaitement authentiques. Plusieurs ont été reproduites dans la Correspondance de Napoléon, d'autres se trouvent aux Archives nationales (AF. IV, 908 et 1035 et aux Archives de la Guerre). Enfin l'empereur qui vit cette publication à Sainte-Hélène reconnut nombre de pièces renfermées dans le portefeuille qui avait été perdu sur le champ de bataille de Waterloo. (Las Cases, III, 93.)

[34] Observations des présidents de section du conseil d'Etat, 25 mars. Extrait de la correspondance des préfets et des rapports de police, du 24 mars au 5 avril (Arch. nat. AF. IV, 1934, F. 7, 3044a, F. 3147, F. 7, 3774). Délibération du conseil de préfecture du Morbihan, 30 mars. (Arch. Guerre.) Napoléon, Correspondance, 21.791, et L'île d'Elbe et les Cent Jours (Correspondance, XXXI, 105). Benjamin Constant, Mémoires, II, 90-91, F. de Chaboulon, I, 297-298. Davout, Correspondance, 1547-1553. Circulaire de Davout, 26 mai (Arch. Guerre). Mém. de Fouché, II, 326-327. Thibaudeau, X, 268-270.

[35] Davout, Correspondance, 150, 1520, 1524, 1537, 1546, 1548, 1581, etc. : A Napoléon, 27 mars : Le colonel Noireau fera arrêter les nobles. A Gilty, 30 mars : Je vous autorise à nommer des commissions militaires. A Grouchy, 3 avril. La retraite des insurgés sera coupée. Il sera fait une bonne justice des chefs. A Morand, 5 avril : Qu'on arrête tous les chefs vendéens. A Solignac, 6 avril : Prendre des mesures pour empêcher les chefs des soulèvements de se sauver. A Grouchy, 13 avril : Il faut mettre en jugement les officiers du 10e de ligne. A Napoléon, 7 avril : J'ai donné l'ordre à Suchet de faire fusiller le colonel d'Ambrugeac et les autres traîtres, s'ils sont coupables de la trahison du pont. (Arch. nat., AF. IV, 1930.)

[36] Laulay à Davout, 24 avril (Arch. Guerre). — Cf. Thibaudeau, X, 268 : Il n'y eut ni réaction, ni justice. Menacé par une effroyable tempête, le gouvernement manœuvra comme dans un temps calme.

[37] Vitrolles seul fut incarcéré, mais pour son rôle à Toulouse, et quoi qu'il se glorifie emphatiquement d'avoir risqué de subir le sort du duc d'Enghien (Mém., III, 5-2) il ne semble pas que l'empereur ait jamais songé sérieusement à le faire traduire devant une commission militaire. Vitrolles le reconnut d'ailleurs (III, 23). Cf. Pozzo, Correspondance, 101-103. Napoléon, Œuvres de Sainte-Hélène (Correspondance, XXXI, 105). Benjamin Constant, Mém., II, 37-38, et Mémoires sur Carnot, II, 454.

[38] F. de Chaboulon, Mémoires, I, 385-392. Note de Montholon (citée par Ernouf, Maret, 883-646). Bulletin des Lois, 6 avril. Cf. Napoléon (Notes sur l'ouvrage de Chaboulon, Mém., II, 299, 342) qui à travers ses contradictions et ses dénégations laisse percer la vérité.

[39] Villemain, Souvenirs, II, 172. Guizot, Mémoires, I, 75.

[40] Correspondance générale, du 31 mars au 17 juin (Arch. Guerre) et notamment : Davout à Carnot, 31 mars, 7 et 28 avril, 6 juin. Carnot à Davout, 14 et 27 avril, 21 mai. Lettres à Davout : de Brouard, Nantes, 8 avril ; de Lemarrois, Rouen, 8 avril ; de Lepic, Bourges, 12 avril ; de Lucotte, Périgueux, 8 mai ; de Vandamme, Rocroi, 12 mai ; de Vedel, Caen, 17 mai, etc., etc. Rapports des commandants militaires et envoyés en mission, avril. (Arch. nat., F1e, I, 26.)

[41] Bonanay à Carnot, 13 avril. (Arch. nat., F1e, I, 26.) Cf. Lettres diverses au même, avril-juin, F1e, I, 23, et F. 7, 3647. Note du ministère remise à l'empereur, 22 mai (AF. IV, 1985).

[42] Napoléon, Correspondance, 21728. Napoléon à Carnot, 26 mars. (Arch. nat., AF., IV, 907.) Carnot, Correspondance avec Napoléon, 36-39.

[43] Bulletin des Lois, 9 avril. — Plusieurs préfets nommés par décrets des 25, 28 et 30 mars ne furent pas maintenus dans le grand mouvement du 6 avril.

Parmi les 61 préfets révoqués, une vingtaine, les plus compromis, étaient en fuite ou avaient envoyé leur démission.

[44] Napoléon, Correspondance avec Carnot, 26, 31, 56, 76. — Les copies (d'après les minutes) de plusieurs lettres de ce volume se trouvent aux Archives nationales, AF. IV, 907.

[45] Caffarelli à Davout, Rennes. 24 mars. (Arch. Guerre.) Merlin à Carnot, 20 avril. (Arch. nat., F1e, I, 26) — Cf. sur les mauvais choix de préfets, Napoléon, Correspondance avec Carnot, 41, 52, 53, 61, 70, 89, etc.

[46] Lannoy à Napoléon, Lyon, 1er juin. (Arch. Guerre.) Rey à Napoléon, Marseille, 8 juin. Resigny à Napoléon, Niort, 28 mai, et Bordeaux, 30 juin (Portefeuille de Buonaparte, 81, 83, 108.) Vandamme à Davout, 12 mai. Lemarrois à Davout, Rouen, 16 mai. (Arch. Guerre.) Bassano à Carnot, 6 mai (Arch. nat., AF. IV, 202). Vedel à Davout, Caen, 11 mai. (Arch. Guerre.) Napoléon à Fouché, 16 mai. (Arch. nat., AF. IV, 907.)

[47] Napoléon, Correspondance avec Carnot, 41, 52, 53, 61, 73, 89, etc. Carnot à Davout. 29 avril et 25 mai. Bulletin des Lois du 13 avril au 16 juin.

[48] Lettre à Carnot, 18 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1931.)

[49] Rapport de Saulnier, inspecteur général de gendarmerie, 13 avril. (Arch. Guerre.) Fouché à Davout, 30 mars. Davout à Napoléon, 20 avril. (Arch. nat., F1e, I, 26, et AF. IV, 1937.)

[50] Fouché à Carnot, 30 mars et 15 avril. Davout à Napoléon, 20 avril. Arch. nat., F1e, I, 26, et AF. IV, 1937.) Cf. Correspondance générale, du 25 mars au 20 juin. (Arch. Guerre.) Correspondance des préfets, avril-juin, et lettres diverses, avril-juin. (Arch. nat., F. 7, 3774 ; F1e, I, 26.)

[51] Circulaire de Carnot, 27 mars (Arch. nat., F1a, 31).

[52] Bulletin des Lois, 23 avril. Circulaire de Carnot, 22 avril (Arch. nat., F1a, 31). Carnot à Davout, 29 avril. (Arch. Guerre.)

[53] Bulletin des Lois, 1er mai.

[54] Lettres diverses, mai. Cf. Correspondance des préfets, mai. (Arch. nat., F1e, I, 26, F. 7, 3044a, et F. 7, 3774.)

[55] Sur les représentations qui lui furent adressées, Carnot ajourna cependant dans plusieurs départements l'exécution du décret du 30 avril. (Note du ministère de l'intérieur, 19 mai. Arch. nat., F. 7, 3044a.)

[56] Lucotte à Davout, Périgueux, 2 juin (Arch. Guerre). — Lemarrois exprimait ces mêmes idées (à Davout, Rouen, 11 avril, Arch. Guerre).

[57] Note du ministère de l'intérieur, 19 mai. Lettres et rapports divers, avril-mai. Correspondance des préfets, mai-juin (Arch. nat. F. 7, 3044a, F1e, I, 26, F. 7, 3774.) Rapports à l'empereur des officiers d'ordonnance Résigny et Planat (Portefeuille de Buonaparte, 110, 116). Correspondance générale, mai-juin (Arch. Guerre).

[58] Napoléon à Fouché, 11 avril ; à Mollien et à Gaudin, 17 avril et 19 mai ; Carnot, 30 avril et 8 mai ; à Cambacérès, 22 mai. (Arch. nat., AF. IV, 60, AF. IV, 907.) Rapport général sur le clergé, 26 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1935.) Cf. Carnot, Correspondance, 36, 62-63, 111-114. Correspondance générale, avril-juin (Arch. Guerre), et correspondance des préfets, avril-juin. (Arch. nat., F. 7, 3774.)

[59] Caffarelli à Davout, Rennes, 20 avril. Lucotte au même, Périgueux, 23 avril. Ambert à Davout, Nîmes, 29 avril. Davout à Cambacérès, 7 juin. Cambacérès à Davout, 17 juin. (Arch. Guerre.) Rapports des préfets des Côtes-du-Nord, 23 avril ; du Lot-et-Garonne, 1er juin ; de la Gironde, 3 et 12 juin, etc., etc. (Arch. nat., F. 7, 3740, F. 7, 3774, F1e, I, 24.)

[60] Note de Huss, Paris, 22 mars. Rapport général, 30 mai. (Arch. nat. F. 7, 32004, F. 7, 3740.)

[61] Rapports du préfet de Lyon, 8 juin et du préfet de l'Hérault, 20 mai. Napoléon à Carnot, 8 mai. (Arch. nat., F. 7, 3774, AF. IV, 907.) Barry, Cahier d'un Rhétoricien de 1815, 113-134.

[62] Major Aurange à Davout, Montmédy, 15 mai. (Arch. Guerre.)

[63] Caffarelli à Davout, Rennes, 31 mars. Circulaire de l'évêque d'Agen, 31 mars (Arch. Guerre). Rapport du préfet du Morbihan, 26 mars. Bigot de Préameneu à Napoléon, 23 mai. (Arch. nat., F. 7, 3774, AF. IV, 1935.)

[64] Rapports des préfets de la Manche, 9 avril ; du Nord, 15 avril et 24 mai ; de l'Ain, 2 mai ; du Finistère, 16 avril ; de la Haute-Vienne, 10 avril de la Nièvre, 4 juin, etc., etc. Rapport général sur le clergé, 26 mai. (Arch. nat., F. 7, 3774, AF. IV, 1935.) Lettres de Lucotte, Périgueux, 9 avril ; à Caffarelli, Rennes, 9 avril ; du chef d'escadron de gendarmerie de Quimper, 9 avril ; de Dubois, Chantilly, 11 avril ; de d'Erlon, Lille, 16 avril ; à Gency, Évreux, 17 avril ; de Lemarrois, Rouen, 26 avril ; de Carnot, 2 mai ; de Rapp, Strasbourg, 15 mai ; de Lannoy, Lyon, 1er juin ; de Bigot de Préameneu, 10 juin. (Arch. Guerre.)

[65] Lannoy à l'empereur, Montélimar, 4 juin, et Avignon, 5 juin. (Portefeuille de Buonaparte, 39, 62) Colonel Brun à Davout, 8 mai. Davout à Napoléon, 15 avril. Delaborde à Davout, Angers, 5 mai. (Arch. Guerre.)

Le rapport de Carnot à Napoléon du 25 avril (Arch. nat., AF. IV, 1935), où il est dit que 30 évêques (30 sur 87, c'est peu) lui affirment que l'esprit de leurs desservants est bon, ne saurait prévaloir contre les centaines de témoignages contraires des préfets et des généraux ni contre le rapport général sur le clergé du 26 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1935.) Carnot lui-même dans plusieurs lettres conservées aux Archives de la Guerre et dans sa correspondance publiée (111-114, 117-119) reconnait les mauvaises dispositions du clergé.

Au reste, nous parlons, ici comme toujours, d'une façon générale. Il est clair qu'il y avait des prêtres patriotes et même anti-bourboniens : l'évêque Lecoz ; les deux curés de Salins qui criaient. Vive le Père la Violette ! le curé de Cosne qui prononça en chaire, le jour de Pâques, un sermon sur le retour de Napoléon le Grand ; l'évêque de Valence qui rappela dans une lettre pastorale que c'était l'empereur qui avait jadis rouvert les temples et relevé les autels ; et ce spirituel évêque de Langres, qui, raconte Réal dans son rapport du 21 mai, disait aux cures de Paris : — Si vous prêtez serment vous serez blâmés par trois sortes de gens : 1° les mères de l'Eglise ; 2° les théologiens de salon, qui ne croient pas en Dieu ; 3° les défroqués comme Talleyrand et le baron Louis.

[66] Moniteur, Journal de l'Empire, Journal de Paris, du 21 mars au 15 avril. Le Nain Jaune, 30 mars.

[67] Rapports des présidents du conseil d'Etat du 2 avril (Moniteur du 13 avril). — Il est singulier que ce rapport, rédige le 2 avril pour calmer les craintes de guerre, n'ait été publié dans le Moniteur que le 13 avril, précisément le jour où parut dans le même journal le très véridique et très alarmant rapport de Caulaincourt sur la situation extérieure. A la vérité, le rapport du conseil d'Etat ne portait pas seulement sur la déclaration du congrès. C'était aussi une sorte de mémorandum rappelant les violations du traité de Fontainebleau et exposant les droits de Napoléon à quitter l'ile d'Elbe pour venir délivrer la France de la domination d'une poignée de nobles.

[68] Si la paix est pas troublée, toute la France sera contente. Lemarrois à Davout, Rouen, 31 mars. — Le paix assurée ferait bientôt succéder dans toute la Provence le cri de : Vive l'empereur ! au cri de : Vive le roi ! Corsin à Davout, Antibes, 20 avril (Arch. Guerre). Cf. Correspondance générale, mars-mai (ibid.), et Correspondance des préfets, mars-mai (Arch. nat., F. 7, 3774).

[69] Décret du 28 mars. (Moniteur, 9 avril.)

[70] Décret du 10 avril. (Moniteur, 11 avril.)

[71] Le 12 avril : 66 fr. 25. Le 14 avril : 53 fr. 50. — Cette publication, qui porta l'alarme dans le pays, paraît à première vue inopportune et maladroite. Mais il fallait bien cependant donner les motifs des décrets de mobilisation et démontrer que c'était l'Europe et non l'empereur qui voulait la guerre.

[72] Note de police, 5 mai. Placard affiché à Fontainebleau, 25 mars. (Arch. nat. F. 7, 32004, F. 7, 3774.) Chanson manuscrite distribuée à Bourges 11 mai. Placard affiché à Orléans, 23 mai. (Arch. Guerre.)

Une autre chanson où il était question aussi de la paix et de Marie-Louise avait ce refrain :

Ah ! non, ça ne prend pas,

Nicolas !

[73] Les craintes de guerre altèrent l'esprit public. Rouen, 25 mars. — L'enthousiasme pour l'empereur était grand, mais il s'affaiblit. Strasbourg, 6 avril. — L'enthousiasme diminue, et cela parce qu'on a maintenu les fonctionnaires bourboniens. Mâcon, 28 avril. — L'élan qu'avait produit le retour de S. M. s'affaiblit chaque jour. Le Puy, 29 avril. — Il n'y a pas à se dissimuler que l'esprit public s'affaiblit. Lyon, 2 mai. — Le royalisme fait des progrès effrayants par la faute des fonctionnaires. Moulins, 15 mai, etc., etc. (Correspondance des préfets et des commissaires de police, Arch. nat. F. 7, 3774.) — Il y a de l'agitation dans la 21e division militaire, par suite de l'hostilité déguisée de l'administration. Lepic à Davout, Bourges, 6 avril. — Cinq bataillons de garde nationale partiront ces jours-ci malgré l'insouciance des autorités et la malveillance du clergé. Général Loison à Davout, Sainte-Menehould, 5 mai. — La population ne cesse de provoquer les autorités impuissantes ou complices. Commandant d'armes de Cette, 9 mai. — C'est la guerre qui indispose les habitants, car ils redoutaient la dîme et la féodalité. Davout à Fouché, 12 mai, etc. etc. (Arch. Guerre.)

[74] Planat et Chiappe à Napoléon, Montauban, 3 juin, et Amiens, 10 juin. (Portefeuille de Buonaparte, 15-17, 79-80.) Rapport du Commissaire central de Lille, 17 mai. Fouché à Davout, 6 juin (Arch. Guerre). Cf. Résigny à Napoléon, Niort, 28 mai : Les nobles et les prêtres sont ici comme partout les pires ennemis du gouvernement. — Lannoy à Napoléon, Lyon, 1er juin : L'esprit public est travaillé par les prêtres et les nobles ; ils emploient l'embauchage, les fausses nouvelles, les écrits corrupteurs. — Rapp à Davout, Strasbourg, 15 mai : J'ai fait arrêter les maires et les curés de plusieurs communes qui s'opposaient au départ de la garde nationale, etc., etc., etc. (Arch. Guerre). Cf. Correspondance des préfets, avril-juin. (Arch. nat. F. 7, 3774.)

[75] 6 dans le Calvados, le 1er avril ; 15 dans le Nord, les 5 et 7 avril ; 10 dans la Mayenne, le 18 avril. — Dans une partie de l'arrondissement de Domfront, le drapeau tricolore ne flotte plus sur les églises. Commandant de gendarmerie de l'Orne, 26 avril. — Il n'y a plus un drapeau tricolore dans tout le département. Préfet de Nantes, 1er mai.

[76] Général Corsin à Davout, Antibes, 20 avril. Général Rémond au même, Poitiers, 30 avril. Placards divers. (Arch. Guerre.) Correspondance des préfets et Rapport de police, du 15 avril au 15 mai (Arch. nat., F. 7, 3774, F. 7, 3044e).

[77] Davout à divers, 9 avril. Lettres et rapp. à Davout, de Clausel, d'Erlon. Charrière, Dellard, Ambert, Aymard, Curial, Lapoype, d'Armagnac, Lemarrois, Allier, 10, 16, 17, 24, 26, 27 avril, 3, 5, 7 et 15 mai. Préfet du Nord au même, 3 mai. Arrêté du préfet de l'Ariège, 7 mai (Arch. Guerre). Rapport du sous-préfet de Béziers, 30 mai (Dossier de Gilly, Arch. Guerre). Correspondance des préfets, avril-mai. Rapp. de Davout à l'empereur, 29 avril et 11 mai (Arch. nat., F. 7, 3740, F. 7, 3774, F. 7, 3044a, et AF. IV, 1937).

[78] Correspondance générale, du 10 avril au 10 mai. (Arch. Guerre.)

[79] Lettres à Davout du conseil d'administration du 14e de ligue, 11 mai ; du colonel du 6e de ligne, 21 avril ; de Fouché, 18 mai ; de Lemarrois, 18 mai (Arch. Guerre). Rapport du préfet de Montauban, 9 mai. (Arch. nat. F. 7, 3044a.)

[80] Verdier à Davout, 27, 29, 30 avril, 8, 14, 21, 26 mai. Brune et Rœderer à Davout, 30 avril, 4, 8, 14, 18, 21 mai. Fouché à Davout, 11 mai. Ordre de Brune, Marseille, 13 mai. (Arch. Guerre, Correspondance générale et Corps d'observation du Var.) Durand, Marseille et Nîmes en 1815, I, 13-14, 30. Rapport de police, Marseille, 30 avril. Rapport de Rey à Napoléon, Marseille, 4 et 7 mai. (Arch. nat., F. 7, 3784, et AF. IV, 908.)

[81] Correspondance générale, avril-juin (Arch. Guerre). Extrait de la Correspondance des préfets, avril-juin, et rapports à l'empereur et à Fouché, mai-juin (Arch. nat., F. 7, 3774, et AF. IV, 1934, AF. IV, 1937, AF. IV, 1939).

[82] Rapport de Davout à Napoléon, 11 mai. (Arch. nat. AF. IV, 1936.)

[83] Géraud, Journal intime, 222. Rapport de Berck, 11 juin. (Arch. nat., F. 7. 3774.) Lemarrois à Davout, Rouen, 12 mai (Arch. Guerre).

[84] Extrait de la Correspondance des préfets, mai-juin. (Arch. nat., F. 7, 3774.) Cf. Rapport général à l'empereur, 31 mai (Arch. nat. AF. IV, 1935) et Etat des gardes nationales d'élite (AF. IV, 1936).

[85] Rapport du lt de police, Montpellier, 4 mai (Arch. nat., IV, 1937). Général Beurret à Davout, Montbrison, 12 mai. (Arch. Guerre.) Cf. Circulaire de Davout, du 20 mai, sur les mesures à prendre contre les embaucheurs, et la lettre de Fouché à Davout, 6 juin (Arch. Guerre).

[86] Etat des colonnes mobiles, à la date du 5 juin. (Arch. Guerre.)

[87] De 78 fr. 75, cours du 4 mars, la rente tomba à 68,25 le 19 mars et remonta le 20 mars à 73,50. Elle oscilla entre 71 et 69 à la fin de mars, entre 68 et 67 jusqu'au 12 avril et tomba à 58 le 14 avril (après la publication du rapport de Caulaincourt sur l'état des relations extérieures). Elle était à 57 fr. à la fin d'avril, à 56 à la fin de mai, à 54 le 10 juin.

[88] Moyenne des recettes de l'Opéra et de la Comédie-Française : février : 3.900 fr. et 2.900 fr., avril-mai : 2.450 fr. et 1.600 fr. (Arch. de l'Opéra. Arch. de la Comédie-Française.) — Il faut d'ailleurs tenir compte de la différence des saisons.

[89] Montlosier à Barante, Paris, 23 mars, 6 et 20 avril. Barante à sa femme, 15 mai, 19 mai. (Barante, Mémoires, II, 129-149.) Hobhouse, Lettres, I, 23. Barry, Cahier d'un rhétoricien, 43, 49, 72, 79. Miss Williams, Relation, 52, 53. Notes de Rousselin (Collection Bégis). Huss à Fouché, Paris, 22 mars. Rapport de Réal, 8 avril. (Arch. nat., F. 7, 3168, et AF. IV, 1934.)

Sur Royer-Collard, voir le Journal de l'Empire, 18 et 19 mai, et Guizot, Mém., I, 82-83.

[90] Rapports de Réal, 31 mars, 8 avril, 15 avril. Rapport de police, 10 avril (Arch. nat., AF. IV, 1934, et F1e I, 26.) Notes de Rousselin. Montlosier Barante, 11 avril. (Barante, Mém., II, 132.) Lettre à Wellington, Paris, 1er mai. (Dispatchs of Wellington, Supplément, X, 213.)

[91] Rapports de Réal, 29, 31 mars, 3, 4, 5, 8, 12, 15 avril. Huss à Fouché, 22 mars. (Arch. nat., AF. IV, 1934, F. 7. 3168.) Cf. Barry, 43, 79, et Miot de Mélito (Mém., III, 427) : L'empereur fut jusqu'au dernier moment le roi du peuple de Paris.

[92] Moniteur et Journal de l'Empire, 15 et 16 mai, Napoléon, Correspondance, 21.907. Général Dumas et Davout à l'empereur, 1er et 7 juin. (Arch. nat., AF. IV, 1935, AF. IV, 1940.)

[93] Rapports à l'empereur, 28 mars, 30 avril, 24 mai. Davout à l'empereur 14 avril. Dejean à l'empereur, 2, 15, 17, 24 mai. (Arch. nat., AF. IV, 1935. IV, 1940.) Napoléon, Correspondance, 21.710, 21.714, 21.732, 21.869. Cf. Hobhouse, Lettres, I, 254. — Entre autres projets d'édilité. Napoléon voulait faire démolir les maisons du carré du Louvre.

[94] Rapports de police, 25 mars, 10 et 19 avril, 2 juin. Rapport de Real, 3 avril. (Arch. nat., F, 7, 32004, F. 7, 3940, AF. IV, 1934.)

[95] Les journaux des 3 et 4 avril donnent ce chiffre de 15.000, qui ne paraît pas exagéré La garde impériale s'élevait au mois de mars à 7,390 hommes, sans compter le bataillon de l'île d'Elbe. (Davout à Napoléon, 21 mars. Arch. nat., AF. IV, 1940) Les troupes de Grenoble et de Lyon présentes à Paris, à 6.690 hommes (Durrieu à Lobau, 1er avril. Arch. Guerre). Enfin il y avait eu 2.813 gardes nationaux de garde aux Tuileries le 20 mars (Laborde, Quarante-huit heures de garde, 12).

Le repas des officiers fut fourni par Véry et coûta 35 fr. par tête, soit 37.800 fr. pour 1.080 officiers. (Drouot à Napoléon, 26 et 31 mars. Napoléon à Drouot, 31 mars. Arch. nat., AF. IV, 1949, et Arch. Guerre, carton de la correspondance de Napoléon.)

[96] Moniteur, 3 avril, Journal des Débats, 4 avril. Hobhouse, Lettres, I, 259- 260. Barry, Cahiers d'un rhétoricien, 67. Rapport de Real, 3 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1934.)

[97] Journal des Débats, 16, 18 avril. Journal universel de Gand, n° 3 et 5. La bourgeoisie avait une telle répugnance pour les chants de la Révolution que des musiciens de la garde nationale ayant commencé Veillons au Salut de l'Empire. Acloque, chef de la 11e légion, les arrêta en disant : — Tant que je commanderai, on ne jouera pas des airs incendiaires. (Rapport de Réal, 1er juin. Arch. nat. F. 7, 3774.)

[98] Rapports de Real, 1er, 3, 4 avril. (Arch. nat., AF. IV, 1934.) Hobhouse, Lettres, I, 205-206. — Une partie du répertoire du café Montansier fut publiée en avril, mai et juin 1815, dans un recueil périodique ayant pour titre : Le Bouquet de violettes ou la Réunion des Braves. Parmi ces chansons, il s'en trouve une de Mery.

[99] Napoléon à Joseph, 25 mars (Arch. nat., AF. IV, 907). Cf. Relation du Père Maurice (Arch. Aff. étr., 1816). Fabry, Itinéraire de Buonaparte, 179-180. Miss Héléna Williams, Relation des événements, 69-70. Barry, Cahiers, 87-88. Hobhouse, Lettres, I, 28-29, et Guizot (Mém., I, 72) qui dit : ... Je vis clairement Napoléon se retirer en haussant les épaules, plein d'humeur sans doute d'avoir à se prêter à ces démonstrations.

[100] Moniteur, Journal des Débats, Journal de Paris, Gazette de France, avril-mai. Hobhouse, Lettres, I, 281. Mlle Cochelet, Mémoires, III, 33-38.

[101] Je ne suis pas à moi. Je suis à la patrie

— Mais ton Astyanax a des droits à la vie.

— Il en aura peut-être à l'immortalité.

S'il imite son père...

Comme un colosse immense à l'armée immobile

Apparait un guerrier...

Qu'armé pour la patrie, il soit toujours vainqueur.

[102] Hobhouse, Lettres, I, 40-41. Napoléon, Correspondance, XXXI, 108. Journal de l'Empire, 19, 22, 23 avril. Arch. de la Comédie-Française.

[103] De nombreux renseignements des départements annonçaient que des gens déterminés à assassiner l'empereur étaient partis pour Paris. Des conspirateurs sont partis d'ici pour assassiner l'empereur. Général Blanmont à Davout, Abbeville, 25 mars. Cf. le même au même, 29 mars. Une vieille Vendéenne, nommée la Langevin, vient de se rendre à Paris pour tuer l'empereur. Le monstre en est bien capable. Général Saulnier à Rovigo, Angers, 4 avril. — Un sieur Jaffard est parti pour Paris, pour tuer l'empereur. Général Laplane à Davout, Montauban, 8 avril. (Arch. Guerre.) Cf. Correspondance des préfets, mai. (Arch. nat. F. 7, 3774.)

[104] Rapport de police, 17 avril. (Arch. nat., F. 7, 3774.) Rapport du chevalier d'Artez, 19 avril (Dispatchs of Wellington, Supplément, X, 347). Hobhouse, Lettres, I, 30-33, 39. Moniteur et Journal de l'Empire, 17 et 18 avril. Napoléon, Correspondance, XXXI, 107. — Sur les craintes d'une sédition dans la garde nationale, cf. rapport de Réal, 27 mars. (Arch. nat., AF. IV, 1934.)

La revue, d'abord annoncée pour le 9 avril, fut remise au dimanche suivant. On en conclut que l'empereur redoutait de passer cette revue. La raison de l'ajournement, dit Napoléon à Sainte-Hélène, était que le dimanche, la garde nationale se trouvait en concurrence avec des troupes de ligne qu'il importait de faire partir tout de suite pour leur destination. L'assertion de Napoléon est exacte. Il y a un ordre de Davout du 9 avril prescrivant de mettre en route pour Metz les huit régiments d'infanterie et de cavalerie passés en revue aujourd'hui. (Arch. Guerre).

[105] Hobhouse, Lettres, I, 33-37.

[106] Bulletin des Lois, 26 mars. (Le décret est daté du 24.)

[107] C'est ainsi que les Bertin partirent le 20 mars pour la Belgique.

[108] Cf. les notes au livre de Miss Williams, Relation des événements, 38-39. Hobhouse, Lettres, I, 188. Les crimes de Buonaparte et de ses adhérents, 100-103. Esquisse sur les Cent Jours, introduction, 6. Napoléon, Correspondance, 21.925.

[109] Le 7 juin, la poste refusa de transporter le Journal Général, la Feuille du Jour (ex-Quotidienne) et l'Aristarque. (Le Censeur des Censeurs, 17 juin.)

[110] Miss Helena Williams, Relation des événements, 39, note.

[111] Général Hugo à Davout, Thionville, 13 mai. (Arch. Guerre.) — Converti aux idées régnantes qu'il fallait, selon le vieux principe de l'hilote ivre, donner la plus grande publicité aux attaques contre l'empereur, le Nain Jaune avait publié dans le n° du 10 mai le fragment d'une brochure très violente : Bonaparte au 4 mai.

[112] Le Censeur, n° VI, 331. Benjamin Constant, Mém., II, 98. Mémoires sur Carnot, II, 426. Cf. la lettre de Fouché à Mme de Custine (citée par Bardoux, Mme de Custine, 237).

[113] Le Censeur, n° V, 333-336.

[114] Legoux à Réal, Paris, 24 avril. (Arch. nat., F. 7, 3688, 24.)

[115] Bulletin de Paris, 177-178.

[116] Journal du Lys, n° 11 et 14.

[117] Bulletin de Paris, 178.

[118] Journal de l'Empire, 14 avril. Cf. 9 avril, et Journal de Paris, 13 avril.

[119] Journal de l'Empire, 12 mai.

[120] Rapport du ministre de la police générale, 7 mai. (Moniteur, 11 mai.)

[121] Plus de six cents sont mentionnées dans le catalogue de la Bibliothèque nationale, et la Bibliothèque est loin de posséder toutes les brochures publiées alors. Ainsi, dans les deux cents que j'ai réunies, il y en a plus de trente qui n'existent pas rue de Richelieu, et un assez grand nombre de pamphlets, cités dans les journaux de 1815, ne s'y trouvent pas davantage.

[122] La France a le sentiment de la chute prochaine de Bonaparte. Ce brigand qui a volé le trône de Louis XVIII n'a pour lui qu'un petit nombre d'hommes flétris et souillés. — Maîtres du monde, venez réparer la faute magnanime que vous avez commise en accordant la vie à l'homme odieux qui devait être mis en jugement pour le tissu d'horreurs dont sa vie privée et publique était semée. — En signant le traité de Fontainebleau, ce vil jongleur avait déjà la pensée de le violer, comme il a violé tous les autres. — Il faut faire justice à la nation française des hommes odieux qui l'oppriment et attirent sur nous les armées de l'Europe. — Bonaparte est un criminel. Un mot est sur toutes les lèvres : A bas Napoléon ! Bonaparte au 4 mai. Du retour de Bonaparte. Réfutation de la Déclaration du Conseil d'Etat. Réponse à Carnot. Lettre à un archevêque. Le Jacobinisme réfuté. Protestation de l'immense majorité des Français. Des intérêts de la France, etc., etc.

[123] Je ne me suis pas astreint à lire toutes les brochures publiées pendant les Cent Jours, mais j'en ai lu deux cents au hasard, nombre qui permet, je crois, d'établir une moyenne pour tout l'ensemble. Voici le classement de ces deux cents écrits : Brochures royalistes, 35 ; républicaines, 6 ; libérales sans couleur dynastique, 45 ; libérales bonapartistes, 47 ; napoléonistes, 44 ; bonapartistes jacobines 23.

[124] L'Amour du Bien, l'Intérêt de tous. Conversation entre une dame bonapartiste et une dame bourboniste. Le Retour de l'empereur. Cf. Lettre aux membres du collège électoral. Quelques vérités inédites. Le Réveil de Napoléon. Les Vœux de la France accomplis. L'Homme du siècle. Lettre d'un garde national au comte de Lille. L'élan de l'âme. Rira bien qui rira le dernier ! etc., etc.

[125] Causes de la chute de Louis XVIII. Du Modérantisme. Conspiration de la noblesse féodale. Cf. Le peuple et la dictature sauveront l'honneur et la patrie. Un dictateur momentanément nécessaire. Examen rapide du gouvernement. Vœux d'un républicain en faveur de la dictature. La Restauration de la liberté. De la noblesse et du peuple, etc., etc.

[126] Adresse à l'empereur. Observation à Napoléon. Mémoire à l'empereur. Cf. Les Époques de la nation. Des rois et de la nécessité de conserver Napoléon. Réflexions d'un homme libre. Réflexions d'un Français impartial. Le Conciliateur. Profession de foi d'un militaire. Un Français à ses compatriotes. Défendez notre liberté. Le Cri du peuple. Quelques observations. La Patrie avant tout, que m'importe Napoléon ! Une Constitution et pas de constitution. Lettre d'un bon Français. Quatre discours. Lettre d'un Ami de la Liberté. Opinion d'un Français. Au Peuple français, etc., etc.