LE CHEVALIER D'ÉON

 

CHAPITRE TROISIÈME.

 

 

Le duc de Nivernais, ambassadeur de France à Londres. — Difficile négociation de la paix de 1763. — D'Éon est chargé par le gouvernement anglais de porter à Paris les ratifications du traité. — Il reçoit la croix de Saint-Louis. — Le comte de Guerchy est désigné pour succéder au duc de Nivernais, et d'Éon, nommé ministre plénipotentiaire, fait l'intérim de l'ambassade. — Le chevalier d'Éon mène à Londres un train d'ambassadeur et n'entend pas d'évêque redevenir meunier. — Sa querelle avec le duc de Praslin et le comte de Guerchy.

 

Si la paix qu'il s'agissait de conclure avec l'Angleterre était difficile, le choix qu'on avait fait du négociateur était excellent. Le duc de Nivernais fut parfaitement accueilli par la société anglaise, faite pour apprécier les qualités du vrai grand seigneur et qui les reconnut toutes chez le nouvel ambassadeur de France. Fils du duc de Nevers et d'une princesse Spinola, il avait épousé Hélène de Pontchartrain ; au crédit que lui donnaient son origine et ses alliances, il avait su joindre l'amitié particulière de Mme de Pompadour en organisant à Versailles les comédies dont se servait la favorite pour retenir le roi. Dans les billets nombreux qu'elle lui adressait, Mme de Pompadour ne manquait guère d'appeler Nivernais mon cher petit époux ; les sobriquets avaient été mis à la mode par le roi lui-même, et celui-ci marque bien sur quel pied d'intimité on traitait le duc au château. Il avait du reste des mérites plus solides et plus rares que les qualités nécessaires au bon courtisan.

Ambassadeur près du Saint-Siège en 1748, au moment où fut publiée la bulle Unigenitus, il avait su à la fois étonner les Romains par le faste de ses équipages et gagner, par l'habileté de sa diplomatie, la confiance du pape Benoît XIV. Envoyé ensuite à Berlin, il avait réussi à séduire Frédéric, malheureusement trop tard pour détacher la Prusse de l'alliance anglaise, où elle venait de s'engager secrètement. L'échec de sa mission n'avait eu d'autre cause que les lenteurs et l'indécision du gouvernement du roi. Aussi nul n'avait pu songer à en tirer grief contre lui et à tous il avait paru l'homme le mieux fait pour obtenir des Anglais de moins rigoureuses conditions à une paix devenue nécessaire à la France. Grand seigneur accompli et négociateur habile, agréable causeur et charmant écrivain, cavalier et musicien, il avait su plaire partout et à tous. Personne mieux que lui ne pouvait donc prétendre à réconcilier deux nations qui se piquent également de se connaître en gentilshommes, et les Anglais ne s'y trompèrent pas. Ils lui firent fête, Horace Walpole allant jusqu'à déclarer que la France leur envoyait ce qu'elle avait de mieux.

Nivernais avait été choisi comme le meilleur ambassadeur ; d'Éon lui fut adjoint comme le plus habile et le mieux informé des secrétaires. Mêlé déjà, à maintes reprises, aux affaires les plus délicates et les plus importantes, il devait être d'un précieux conseil pour son chef et trouver dans son esprit ingénieux plus d'une ressource pour la négociation[1]. Tous deux s'embarquèrent à Calais le 11 septembre 1762 et arrivèrent à Londres dès le 14, grâce aux rapides équipages du duc de Bedford. Si les Anglais avaient paru pressés de recevoir l'ambassadeur de France, ils devaient mettre moins de hâte à poursuivre les négociations de la paix. Le parti de l'opposition, qui désirait continuer la guerre, était à l'affût de tout ce qui pourrait les rompre et renverser le cabinet de lord Bute. La nouvelle de la prise de la Havane, parvenue à Londres le 1er octobre, tourna toutes les têtes et, sous la pression de l'opinion, le roi et le ministère augmentèrent leurs exigences. Ils demandèrent la Floride, que la France dut, non sans peine, obtenir de l'Espagne. Cette maudite Havane, petit époux, j'en suis dans la frayeur, écrivait Mme de Pompadour au duc de Nivernais[2]. Il importait que les préliminaires de la paix pussent être signés avant l'ouverture du parlement anglais, où le parti de l'opposition ne songeait qu'à renverser le ministère et à reprendre la guerre. Nivernais craignait du reste qu'une nouvelle victoire navale des Anglais ne rendit plus dures encore les conditions de la paix : Je tremble à présent, écrivait-il à Choiseul, que Lisbonne soit pris avant cette diable de signature.

Lisbonne ne fut pas pris, car le 5 novembre Choiseul put annoncer à Nivernais que les préliminaires de la paix venaient d'être signés à Fontainebleau. Il ajoutait, avec une satisfaction quelque peu égoïste et irritante pour l'ambassadeur qui avait eu à Londres la tâche la plus ingrate, qu'à cette occasion lui-même avait été fait duc et pair sous le titre de duc de Praslin. Une bonne part du succès de ce premier accord qui, malgré tout ce qu'il coûtait à la France, fut considéré à la Cour comme un grand avantage, était dûe en effet à la mission du duc de Nivernais. Faut-il croire que pour déterminer les ministres anglais à faire la paix, en dépit de l'opposition, l'ambassadeur de France dut les acheter, ainsi qu'on l'affirma hautement à Londres quelques années plus tard, lors du procès en diffamation intenté au docteur Mulgrave ? Cela n'aurait rien d'invraisemblable, car on sait que plus d'une fois, dans la longue lutte qui remplit l'histoire du dix-huitième siècle, la France et l'Angleterre essayèrent l'une contre l'autre de la corruption. Dans tous les cas, d'Éon a raconté comment un jour, chez le duc de Nivernais, il aurait réussi à affriander par du bon vin de Tonnerre M. Wood, sous-secrétaire d'État du roi d'Angleterre, et à prendre, pendant que celui-ci buvait à plein verre, copie des papiers qu'il avait apportés clans son portefeuille et parmi lesquels se trouvait l'ultimatum qui allait être expédié au duc de Bedford, ambassadeur de la Cour de Saint-James à la Cour de Versailles. Grâce à cet audacieux tour de passe-passe, M. de Choiseul, prévenu à l'avance de toutes les difficultés qui allaient être soulevées, aurait pu amener plus facilement, plus vite, et sans rien risquer, le duc de Bedford à composition. On colporta un peu partout en France cette amusante anecdote, et les journaux anglais de l'opposition ne tardèrent pas à la recueillir pour en tirer grief contre le ministère.

Les préliminaires étant signés, il ne restait plus aux deux gouvernements qu'à se mettre d'accord sur certaines questions secondaires et sur le texte du traité. Cette tâche, rendue assez ingrate et difficile par le souci de Choiseul de reprendre quelques-unes des concessions qu'il avait faites dans sa grande hâte de traiter avant l'ouverture du parlement anglais, occupa Nivernais et d'Éon pendant-trois mois encore. C'est seulement le 10 février 1765 que fut signé à Paris le traité définitif. Cette paix désastreuse, qui nous coûtait tout un magnifique empire colonial plein de promesses plus magnifiques encore, fut accueillie en France par des transports, tandis qu'elle soulevait en Angleterre une véritable réprobation. D'Éon était trop ambitieux pour ne pas tirer profit pour lui-même de l'ouvrage auquel il avait été mêlé. Il savait par deux expériences personnelles qu'il était toujours avantageux de porter à la Cour une bonne nouvelle et que la satisfaction du roi se traduisait alors par des faveurs pour le messager. Il avait gagné un brevet de dragons en portant à Versailles l'accession de l'impératrice Élisabeth au traité de Versailles, et trois ans plus tard une pension de 2.000 livres en faisant une commission du même genre. Le nouveau traité qui avait été si fort désiré et si bien accueilli en France lui vaudrait évidemment des avantages plus précieux encore, mais il fallait arriver jusqu'av roi lui-même, non pas mystérieusement comme l'agent du secret, mais devant la Cour tout entière, comme le secrétaire en titre d'une ambassade officielle. D'Éon, à qui rien ne semblait impossible, pressa son chef de demander pour lui au gouvernement anglais la faveur de porter à Versailles les ratifications de la paix. Pareille désignation de la part d'un gouvernement étranger, pour une mission considérée comme fort honorifique, était sans précédents et allait contre tous les usages. L'ambassadeur consentit toutefois à faire la démarche, quelque insolite qu'elle fût et bien que le duc de Praslin ne pût en admettre le succès ; celui-ci mettait en garde Nivernais et l'assurait que la Cour de Londres ne donnerait certainement point pareille mission à un secrétaire français. Il semble bien aussi que le ministre, impatienté par l'ambition qu'avait inspirée à d'Éon de trop rapides succès, tenait à le faire rentrer dans le rang : Il est jeune, disait-il, et a le temps de rendre encore des services et de mériter des récompenses ; je m'intéresse à lui et je le mettrai volontiers à portée de les obtenir avec le temps et le travail[3].

En dépit des prévisions sceptiques de Praslin, le duc de Nivernais obtint pour son petit d'Éon la faveur difficile qu'il avait demandée. Ce succès manifestait mieux qu'aucun témoignage le très grand crédit de Nivernais à la Cour de Londres ; aussi l'ambassadeur ne se fit-il pas faute de plaisanter le ministre sur son incrédulité :

Je suis bien aise que vous ayez été une bête en croyant, mon cher ami, qu'il était inexécutable de faire porter les ratifications du roi d'Angleterre par le secrétaire de France, mon petit d'Ion. C'est que vous ne savez pas à quel point vont la bonté et l'estime qu'on a ici pour votre ambassadeur, et il n'y a pas de mal que vous l'ayez touché au doigt en cette occasion, car sans cela vous auriez été homme à me mépriser toute votre vie, art lieu qu'à présent vous me considérerez sans doute un peu[4].

 

D'Éon arriva le 26 février à Paris, porteur des ratifications. Praslin ne manqua pas de remarquer qu'il avait fait grande diligence mais, sans lui tenir rigueur de son succès, s'employa en sa faveur. Il annonçait le 1er mars à Nivernais que son petit d'Éon aurait la croix de Saint-Louis et une gratification du roi : Je crois qu'il sera content, ajoutait-il ; pour moi je le suis fort, car c'est un joli garçon, bon travailleur, à qui je veux toutes sortes de biens[5]. D'Éon fut fêté à la Cour et n'eut garde d'y oublier les commissions dont l'avait chargé son chef. Il donna à Mme de Pompadour des nouvelles de la chétive santé de son petit époux et lui remit des bourses anglaises qu'elle déclara fort vilaines et grosses comme des cordes. La favorite trouva d'Éon un fort bon sujet et jugea MM. les Anglais très polis de lui avoir donné à apporter le traité. Félicitant Nivernais d'avoir achevé son ouvrage, elle le pressait de venir faire raccommoder sa santé par le bon air de France[6].

Le duc de Nivernais ayant en effet terminé à la satisfaction de son maître l'ouvrage délicat et difficile pour lequel on l'avait envoyé à Londres, le duc de Praslin ne pouvait songer à prolonger une ambassade dont son ami avait retiré tout avantage et tout honneur, et qui n'était plus guère pour ce grand seigneur riche et lettré qu'un honorable exil. D'ailleurs Nivernais lui-même s'était préoccupé depuis plusieurs mois déjà de sa succession. Il avait songé à son ami le comte de Guerchy, lieutenant-général des armées du roi, qui s'était distingué pendant la guerre de sept ans et jouissait à Versailles d'une grande réputation de courage. Soldat intrépide, Guerchy n'avait jamais eu l'occasion de se montrer diplomate et ses amis eux-mêmes doutaient de ses capacités à le devenir. C'était l'avis de Praslin qui, le 8 janvier 1763, répondait aux ouvertures que venait de lui faire le duc de Nivernais :

Je suis toujours fort occupé de Guerchy. Je ne sais cependant si nous lui rendrons un bon office en le faisant ambassadeur à Londres... Je crains ses dépêches comme le feu ; et vous savez combien les dépêches déparent un homme et sa besogne, quand elles ne sont pas bien faites. On juge souvent moins un ministre sur la manière dont il fait les affaires que sur le compte qu'il en rend... Mais il ne sait pas du tout écrire, nous ne saurions nous abuser là-dessus[7].

 

Guerchy toutefois fut désigné, d'abord parce qu'on ne voulait pas refuser le candidat du duc de Nivernais, dont tout Versailles chantait les louanges, et aussi parce qu'en dépit de sa trop juste opinion des mérites de son ami le duc de Praslin fut heureux d'obliger à la fois deux de ses intimes. Le 16 février 1763, on en avisa le duc de Nivernais à Londres. Il fut entendu que d'Éon, serait maintenu à l'ambassade afin de conseiller son nouveau chef et de tenir la plume à sa place. On le chargerait même de l'intérim et, sur les instances de Nivernais, Praslin consentit à ce qu'on lui donnât le titre de ministre résident.

D'Éon se trouvait en France, où il avait apporté les ratifications du roi d'Angleterre, lorsque Nivernais le rappela à Londres pour lui remettre l'ambassade. Il tarda quelque peu à se rendre à l'appel de son chef et se fit même passer pour malade. C'étaient en réalité les intrigues de la diplomatie secrète qui le retenaient à Paris.

Le comte de Broglie se trouvait alors exilé dans ses terres de Normandie. Il avait été enveloppé dans la disgrâce de son frère le maréchal, à qui Mme de Pompadour avait attribué, malgré les faits et en dépit de l'opinion publique, les responsabilités qu'avait encourues Soubise pendant la guerre de sept ans. Louis XV n'avait su résister ouvertement à la favorite ; mais, ne voulant point se priver des services de son ministre secret, il s'était résigné à faire passer par le château de Broglie tout le réseau de sa politique personnelle. C'est durant cette retraite momentanée que le comte de Broglie avait étudié un projet de descente en Angleterre, conçu depuis longtemps déjà, mais qui n'avait pu recevoir d'exécution pendant les dernières hostilités. Si la paix actuelle en reculait l'opportunité, elle permettait tout au moins d'étudier sur place les conditions et les moyens qui en faciliteraient la réussite. Le roi et k ministre avaient mieux compris que la nation les désastreuses conditions du traité de Versailles et tenaient à se mettre promptement en mesure d'en réparer les effets. Louis XV avait donc examiné avec intérêt le projet qui lui avait été soumis et l'avait renvoyé à Tercier, avec son approbation. C'est chez ce dernier que d'Éon et le comte de Broglie, qui se trouvait de passage à Paris, se réunirent pour organiser cette périlleuse mission. D'Éon, par sa situation à Londres et par son expérience dans ces sortes d'intrigues, était à même de diriger les recherches. On lui adjoignit un de ses cousins, le sieur d'Éon de Mouloize, qui devait mettre les documents à l'abri dans le cas où l'intrigue viendrait à s'ébruiter. Quant à la partie technique, elle devait être confiée à un ingénieur, Carrelet de la Rozière. Enfin on jeta les bases d'une correspondance secrète qui devenait nécessaire pour traiter cette affaire[8]. Le roi lui-même donna ses instructions :

Le chevalier d'Éon recevra mes ordres par le canal du comte de Broglie ou de M. Tercier sur des reconnaissances à faire en Angleterre, soit sur les côtes, soit dans l'intérieur du pays, et se conformera à tout ce qui lui sera prescrit à cet égard, comme si je le lui marquais directement. Mon intention est qu'il garde le plus profond secret sur cette affaire et qu'il n'en donne connaissance à personne qui vive, pas même à mes ministres nulle part[9].

 

Elles furent précisées et commentées dans une lettre que, le 7 mai 1763, le comte de Broglie envoya au chevalier d'Éon à Londres. Il lui recommandait la plus grande prudence dans sa conduite, l'avertissait que le caractère défiant du comte de Guerchy rendrait sa tache secrète des plus difficiles et qu'il devrait prendre mille précautions pour mettre les papiers de la correspondance à l'abri de toute surprise. Il l'établissait gouverneur de M. de la Rozière : C'est, disait-il, un pupille un peu sauvage, mais dont vous serez content. Enfin, en se félicitant de l'avoir pour lieutenant dans une besogne aussi importante qui peut faire le salut et même la gloire de la nation, il le remerciait du zèle et de l'attachement qu'il n'avait cessé de témoigner au maréchal de Broglie et à lui-même[10].

La fidélité montrée par d'Éon à une famille aussi suspecte que l'était devenue alors celle des Broglie avait éveillé la défiance du duc de Praslin. Aussi le ministre n'avait-il pas hésité à soumettre le jeune représentant du roi près la Cour de Londres à un véritable interrogatoire. Il fit mander d'Éon dans son cabinet, où se trouvaient son premier commis Sainte-Foy et le comte de Guerchy, et sans préambule lui demanda de raconter la bataille de Fillingshausen, à laquelle il devait avoir assisté lorsqu'il était aux dragons. D'Éon ne se fit pas prier et n'hésita point à mettre sur le compte de Soubise toutes les fautes que l'on attribuait officiellement au duc de Broglie. Praslin, impatienté, se promenait à grands pas, tapant du pied ; puis l'interrompant soudain : Je sais, s'écria-t-il, tout le contraire de ce que vous me dites, et cela par un de mes amis intimes qui s'y trouvait aussi. Et en même temps il se tournait vers M. de Guerchy : Vous n'avez pas bien vu tout cela, mon cher d'Éon.

Le nez du ministre s'allongeait, rapporte d'Éon, et sa mine faisait des airs sardoniques, car moi de persister et d'assurer, comme je le ferai toute ma vie, que j'avais bien vu et bien entendu. Le duc finit par lui dire : C'est votre attachement pour les Broglie qui vous fait parler ainsi ?Ma foi, monsieur le duc, répliqua d'Éon, c'est mon attachement à la vérité. Vous m'interrogez, je ne puis vous répondre que ce que je sais par moi-même.

En sortant de chez le ministre, Sainte-Foy tança fortement d'Éon et lui conseilla de ne pas rester dans ce pays où il ne ferait pas fortune, mais d'aller retrouver ses Anglais. D'ailleurs une nouvelle tentative pour connaître les véritables sentiments de d'Éon vis-à-vis du parti Broglie devait être faite, avec plus de délicatesse, par la duchesse de Nivernais. Se trouvant en particulier dans son cabinet avec d'Éon, elle lui demanda s'il entretenait une correspondante avec M. de Broglie. Non, madame, répondit-il, et j'en suis fâché, car j'aime beaucoup M. le maréchal de Broglie ; mais je ne veux pas le fatiguer de mes lettres et je me contente de lui écrire au jour de l'an. — J'en suis bien aise pour vous, mon cher petit ami, répliqua la duchesse, parce que je vous confierai qu'une grande liaison avec la maison de Broglie pourrait vous nuire à la Cour et dans l'esprit de Guerchy, votre futur ambassadeur[11].

A peine rentré à Londres, où l'attendait le duc de Nivernais fort impatient de se mettre en route, d'Éon fut reçu selon les formes prescrites chevalier de Saint-Louis par son chef. Il n'avait pas voulu d'autre parrain. En même temps que sa propre croix, d'Éon rapportait les présents du roi au ministre de Sardaigne, qui avait été l'un des négociateurs de la paix. Le comte de Viry reçut avec beaucoup de sensibilité et de reconnaissance les bienfaits de Sa Majesté. C'étaient, avec une lettre autographe, un portrait du roi enrichi de brillants, ainsi que des tapisseries des Gobelins et des tapis de la Savonnerie. Le premier mouvement de l'heureux destinataire fut d'aller montrer ces cadeaux au chef du ministère anglais, lord Bute. Celui-ci, raconte Nivernais, les porta sur-le-champ au roi d'Angleterre, qui trouva les présents magnifiques et la lettre charmante[12].

Le 4 mai, le duc de Nivernais fut reçu en audience de congé par le roi d'Angleterre, et le 22 il partit pour la France, fatigué des brouillards de Londres, heureux aussi de retrouver Versailles, l'Académie et son beau domaine de Saint-Maur.

D'Éon devenait son maitre à Londres ; il commença aussitôt à jouer le rôle et à mener le train d'ambassadeur. Il tint table ouverte ; on vit passer chez lui le bailli de Fleury, le chevalier Carrion, ami du duc de Nivernais, une députation de l'Académie des sciences qui devait aller à l'Équateur mesurer le méridien terrestre, des savants, des gens de lettres : Duclos, Le Camus, Lalande et La Condamine. La comtesse de Boufflers, dont l'esprit et l'élégance avaient séduit le prince de Conti et les habitués de l'hôtel du Temple, ne dédaigna pas, lors de son passage à Londres, de faire les honneurs de l'ambassade, ainsi qu'en témoigne le billet suivant :

Mme de Boufflers et milady Mary Coke viendront lundi dîner avec M. d'Éon si cela lui convient ; elles amèneront lady Suzanne-Stuart. Mme de Boufflers, pour profiter de la proposition de M. d'Éon, amènera peut-être encore deux hommes de ses amis s'ils sont revenus de la campagne, mais elle ne le croit pas. Elle fait bien des compliments à M. d'Éon ; elle l'aidera à faire les honneurs du dîner aux dames, comme compatriote et comme une personne toute disposée à être de ses amis.

Elle avertit M. d'Éon que milord Harlderness est revenu, et qu'ainsi il faudra l'inviter[13].

 

Grâce au duc de Nivernais, qui ne se tenait pas quitte envers lui et continuait en France à s'employer en sa faveur, il reçut en juillet des lettres qui l'accréditaient auprès du roi d'Angleterre en qualité de ministre plénipotentiaire.

La fortune et les honneurs étaient venus vite au petit d'Éon. En moins de deux ans il était passé du rôle de secrétaire à celui de représentant du roi près Sa Majesté Britannique et avait troqué le titre et l'uniforme de capitaine de dragons pour ceux de ministre plénipotentiaire. L'obscur gentilhomme de Tonnerre pouvait désormais traiter sur un pied d'égalité avec les ambassadeurs les plus titrés et les grands dignitaires de la Cour de Londres. Il n'eut garde d'y manquer, et dès le 25 août, à l'occasion de la Saint-Louis, il offrait un dîner de gala où se rendirent lord Hertford, lord March, David Hume et tout le corps diplomatique. Le succès, lui étant venu trop soudainement, le grisa. Ce n'était point d'ailleurs une aventure commune que celle de ce jeune homme de naissance très médiocre, engagé par occasion dans la diplomatie secrète et introduit ensuite par faveur dans la carrière régulière ; gratifié, en récompense de ses services, d'un brevet de lieutenant de dragons, qui se trouvait, à peine âgé de trente-six ans, représenter le roi de France près la Cour la plus magnifique après celle de Versailles et continuer la mission de M. le duc de Nivernais, pair du royaume. D'Éon ne sentit pas tout ce que cette rapide ascension à travers les hiérarchies les plus strictes et les castes les plus fermées avait de surprenant pour ceux qui l'observaient et de scandaleux pour ceux qui lui portaient envie. Il était plus dans son caractère d'abuser du crédit que de le ménager. Le regard qu'arrivé à ce sommet de la fortune il ne manqua pas de jeter sur sa carrière passée, le souvenir des difficultés de tout ordre dont il avait dû triompher, loin de l'avertir et de le mettre en défiance, augmentèrent sa présomption. Il ne se crut pas à l'apogée, mais bien au premier début sérieux de sa fortune. La tète lui tourna ; quoiqu'il prévînt le reproche et s'en défendît. Il voulut s'imposer aux Anglais, à ses compatriotes, à son ministre, à son roi lui-même.

Il continuait à faire figure d'ambassadeur en attendant qu'on se décidât à lui en accorder le titre et à l'égaler ainsi aux premiers seigneurs de France. Mais si, dans cette folle entreprise, sa volonté ne s'usait pas, si les ressources de son esprit toujours en éveil ne diminuaient jamais, son argent fondait à II vue d'œil. Il fallait payer l'aumônier, l'écuyer, les cinq officiers, les quatre laquais, le suisse, les quatre servants, les deux cochers, les deux palefreniers, etc., qui composaient son train ordinaire de maison. Ses appointements n'y suffisant pas, d'Éon dut avoir recours au duc de Praslin pour obtenir quelques subsides supplémentaires. Il le fit avec une modestie et un détachement admirablement joués, exposant que seul le caractère de ministre plénipotentiaire qui était venu le chercher, à son insu, l'obligeait, bien malgré lui, à porter quelques habits propres et des dentelles :

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Le caractère de ministre plénipotentiaire, qui est venu me chercher à mon insu, ne m'a certainement pas fait tourner la tête, grâce à un peu de philosophie ; il m'a seulement jeté dans des frais extraordinaires, suivant le mémoire ci-joint, tant en habits pour moi que pour ceux des domestiques et d'un cocher. Quand j'étais secrétaire d'ambassade, j'allais tout simplement avec mon uniforme et mes manchettes de batiste ; aujourd'hui il faut malgré moi porter quelques habits propres et des dentelles. Si les affaires du roi n'en vont pas mieux, du moins ma bourse en va plus mal ; votre bonté et votre justice ne le souffriront pas. Il y a bientôt dix ans que je suis politique sans en être ni plus riche, ni plus fier. On m'a beaucoup promis, et les promesses et les prometteurs n'existent plus. Jusqu'à présent j'ai toujours seine, et j'ai recueilli moins que nia semence. Mon bail politique étant heureusement fini, je serai forcé de mettre la clef sous la porte et de faire une banqueroute générale, si vous n'avez pas l'humanité de venir à mon secours par quelque gratification extraordinaire. Plus je travaille avec zèle et courage, Moins je deviens riche : ma jeunesse se passe et il ne me reste plus qu'une mauvaise santé qui dépérit tous les jours, et plus de vingt mille livres de dettes. Ces différentes petites dettes nie tourmentent depuis si longtemps que cela absorbe en vérité les facultés de mou esprit et ne lui permet pas de s'appliquer comme je le voudrais aux affaires du roi. Le temps de la récolte me paraissant à peu près arrivé, je vous supplie de prononcer sur mon sort présent et futur, sur mes appointements et sur les faveurs et grâces que je puis attendre de votre justice et de votre bon cœur[14]...

 

Le duc de Praslin fut d'autant moins disposé à accueillir la requête qu'il se trouva en même temps saisi de violentes réclamations formées par le comte de Guerchy contre d'Éon. Non content de s'endetter lui-même, celui-ci avait dépensé par avance une partie du traitement du futur ambassadeur. Il considérait du reste ces appointements comme les siens, car il ne pouvait admettre qu'après avoir été au premier rang il se retrouvât au second, que d'évêque il devint meunier. Il s'obstinait avec sa ténacité de Bourguignon au rêve chimérique de conquérir, lui d'Éon, le titre comme les fonctions d'ambassadeur, de succéder à Londres à son ancien chef Nivernais. En dépit des avertissements qui lui viennent de tous côtés, des conseils de modération que ne cessent de lui prodiguer ses protecteurs les mieux informés et les plus dévoués, le premier commis des affaires étrangères Sainte-Foy et le duc de Nivernais lui-même, il s'entête et finit par recevoir du duc de Praslin des remontrances fort méritées :

Je n'aurais jamais cru, monsieur, que le titre de ministre plénipotentiaire vous fit si promptement oublier le point d'où vous êtes parti et je n'avais pas lieu de m'attendre à vous voir augmenter de prétentions à mesure que vous recevez de nouvelles faveurs. 1° Je ne vous ai point fait espérer le remboursement de votre ancien voyage de Russie puisque trois de mes prédécesseurs à qui vous avez fait la même demande n'ont apparemment pas trouvé qu'elle fût légitime. 2° Vous vous plaignez à moi de vaines promesses qui vous ont été faites, et ce n'est assurément pas la manière dont j'en ai agi avec vous. Rappelez-vous que je vous ai reçu à Vienne dans un temps où je ne pouvais avoir aucune raison de vous obliger, puisque vous ne m'étiez nullement connu ; vous êtes arrivé chez moi malade et je vous ai guéri ; vous en êtes parti dans l'incertitude du sort qui vous attendait ici, et je vous ai procuré la pension qui vous a été donnée. Deux ans après, vous trouvant sans occupations, vous avez eu recours à moi, et je vous ai donné le poste le plus agréable et l'occasion la plus avantageuse pour vous faire connaître. Vous êtes enfin venu nous apporter les ratifications de l'Angleterre ; ce voyage vous a été payé comme aurait pu l'être celui de Pétersbourg et Sa Majesté vous a récompensé comme si vous aviez fait dix campagnes de guerre. Si ce tableau, monsieur, vous offre des sujets de mécontentement, je vous avoue que je serai obligé de renoncer à vous employer de peur de manquer des moyens suffisants pour récompenser vos services. Mais j'aime mieux présumer que vous en sentirez la vérité et que vous mettrez à l'avenir plus de confiance en ma bonne volonté pour vous qu'en des représentations aussi mal fondées. Je ne dois point oublier de vous dire que je n'ai pas aperçu que le caractère de plénipotentiaire engageât M. de Neuville à faire ici aucunes dépenses ; je le vois toujours tel qu'il était auprès de M. de Bedford, et rien ne petit me faire soupçonner la nécessité des frais extraordinaires auxquels vous vous êtes livré sur le compte de M. de Guerchy et qui sont extrêmement déplacés. Je ne vous cache pas que j'ai trouvé très mauvais que vous ayez fait autant de dépense aux dépens de quelqu'un à qui je m'intéresse autant et qui vous a donné sa confiance sur ma parole. J'espère qu'à l'avenir vous serez plus circonspect dans vos demandes et plus attentif à ménager l'argent d'autrui et que vous vous attacherez autant à lui être utile que vous l'avez fait auprès de M. le duc de Nivernais.

Je suis très parfaitement, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur[15].

 

Le duc de Praslin se trompait étrangement s'il espérait avoir le dernier mot avec son impétueux correspondant. D'Éon, loin de se rendre, fut exaspéré par la sagesse même des avis qui lui étaient donnés et, n'écoutant que son dépit, répondit le jour même :

Aussitôt que j'ai eu appris, monsieur le duc, qu'on voulait me donner malgré moi le titre de ministre plénipotentiaire, j'ai eu l'honneur d'écrire à M. le duc de Nivernais que je regardais ce titre plutôt comme un malheur que comme un bien pour moi ; en toutes choses, il faut' envisager la fin.

Je suis parti fort jeune du point de Tonnerre, ma patrie, où j'ai mou petit bien et une maison au moins six fois grande comme celle qu'occupait M. le duc de Nivernais à Londres. En 1756 je suis parti du point de l'hôtel d'Ons-en-Bray, rue de Bourbon, faubourg Saint-Germain. Je suis l'ami du maître de la maison et j'en suis parti malgré lui pour faire trois voyages en Russie et autres Cours de l'Europe, pour aller à l'armée, pour venir en Angleterre, pour porter quatre ou cinq traités à Versailles, non comme un courrier, mais comme un homme qui y avait travaillé et contribué. J'ai souvent fait ces courses quoique malade à la mort et une fois avec une jambe cassée. Malgré tout cela, je suis, si le destin l'ordonne, prêt à retourner au point d'où je suis parti. J'y retrouverai mon ancien bonheur. Les points d'où je suis parti sont d'être gentilhomme, militaire et secrétaire d'ambassade ; tout autant de points qui mènent naturellement à devenir ministre dans les Cours étrangères. Le premier y donne un titre ; le second confirme les sentiments et donne la fermeté que cette place exige ; mais le troisième en est l'école...

Si un marquis, monsieur le duc, avait fait la moitié des choses que j'ai faites depuis dix ans, il demanderait au moins un brevet de duc ou de maréchal ; pour moi, je suis si modeste dans mes prétentions que je demande à n'être rien ici, pas même secrétaire d'ambassade[16].

 

D'Éon qui ce jour-là se sentait en verve et pour le plaisir de faire des mots, courait au-devant de sa disgrâce ne s'en tint pas encore là. Par le même courrier il envoyait au comte de Guerchy, qui n'avait cessé de son côté de l'exhorter à plus de retenue, de pareilles impertinences :

... Je prendrai seulement la liberté de vous observer au sujet du caractère que le hasard m'a fait donner que Salomon a dit, il y a bien longtemps, qu'ici-bas tout était hasard, occasion, cas fortuit, bonheur et malheur, et que je suis plus persuadé que jamais que Salomon était un grand clerc. J'ajouterai modestement que le hasard, qui ferait donner le titre de ministre plénipotentiaire à un homme qui a négocié heureusement depuis dix ans, n'est peut-être pas rin des plus aveugles de ce monde : ce qui m'arrive par le hasard peut arriver à un autre par bonne aventure...

Un homme quelconque ne peut se mesurer, même dans l'opinion, que par un ou plusieurs hommes. Il y a même plusieurs proverbes qui serviraient à prouver la vérité de ceci. On dit communément : il est bête comme mille hommes, il est méchant comme quatre, il est ladre comme dix. C'est la seule échelle dont on puisse se servir, excepté dans certains cas où les hommes se mesurent par les femmes. Un ambassadeur quelconque équivaut à un demi-homme, ou à un homme entier, ou à vingt hommes, ou à dix mille. Il s'agirait de trouver la proportion existant entre un ministre plénipotentiaire, capitaine de dragons, qui a fait dix campagnes politiques — sans compter les campagnes de guerre, comme dit M. le duc de Praslin — et un ambassadeur lieutenant-général qui débute...

J'ai déjà eu l'honneur, monsieur, de vous faire mes sincères remerciements pour toutes vos offres gracieuses de services ; à l'égard des espérances à venir, j'aurai celui de vous avouer franchement que je suis le second tome de ma sœur Anne de la Barbe Bleue, qui regardait toujours et qui ne voyait rien venir, et cela m'engage souvent à chanter en faux-bourdon ce beau refrain :

Belle Philis, on désespère

Alors qu'on espère toujours.

J'ai l'honneur d'être[17]...

 

 

 



[1] Le duc de Brissac, écrivant au duc de Nivernais pour le féliciter de la mission qu'on lui confiait en Angleterre, ajoutait à sa lettre : Je vous recommande M. d'Éon ; mon fils m'a dit que c'était un véritable dragon à l'armée et au cabinet. (Lettres, mémoires et négociations..., 2e part., p. 1.)

[2] Cité par Lucien PEREY, Un Petit Neveu de Mazarin. — Calmann Lévy, 1893.

[3] Le duc de Praslin au duc de Nivernais, 23 février 1763. (Lettres, mémoires et négociations..., 2e part., p. 23.)

[4] Le duc de Nivernais au duc de Praslin, 3 mars 1763. (Lettres, mémoires et négociations..., 2e part., p. 25.)

[5] Le duc de Praslin au duc de Nivernais, 1er mars 1763. (Lettres, mémoires et négociations..., 2e part., p. 25.)

[6] Mme de Pompadour au duc de Nivernais. (Lettres, mémoires et négociations..., 2e part., p. 29.)

[7] Le duc de Praslin au duc de Nivernais, 8 janvier 1763. (Lettres, mémoires et négociations,... 2e part., p. 74.) — D'Éon, au cours de sa querelle à Londres, ne manqua pas d'avancer que la nomination de Guerchy avait eu une tout autre cause. Il donna à entendre que Praslin n'aurait rien pu refuser à la comtesse de Guerchy. Gaillardet a reproduit cette insinuation, dont la source est plus que suspecte et que la lecture des documents authentiques fait apparaître comme une calomnie. Il suffira de noter que Nivernais lui-même, écrivant à Praslin le 17 janvier 1763, s'exprime ainsi sur le compte de celle qu'il n'eût pas manqué de mieux traiter s'il avait pu la soupçonner d'être la maîtresse de son correspondant : Sans doute il vaudrait mieux qu'il n'y eût jamais ici d'ambassadrice française ; mais je dois vous dire aussi qu'une femme d'un certain âge et sans aucune prétention de figure comme est celle de notre ami réussira moins mal qu'une autre et aura moins d'inconvénients. (Lettres, mémoires et négociations... 2e part., p. 13.)

[8] Les personnages qui devaient figurer dans cette correspondance durent à l'imagination de d'Éon des surnoms dont voici les principaux : Le Roi devenait l'avocat ; Tercier, son procureur ; Broglie, son substitut ; le duc de Nivernais s'appelait le mielleux ; le duc de Praslin, l'amer ; Choiseul, la porcelaine.

[9] BOUTARIC, Correspondance secrète, t. I, p. 293.

[10] Louis XV au chevalier d'Éon, 3 juin 1763. — Archives des Affaires étrangères — cité par le duc DE BROGLIE, Le Secret du roi, t. II, p. 30.

[11] Tous ces détails ont été rapportés par La Fortelle, sous l'inspiration directe de d'Éon, qui se donne probablement une belle allure dans le récit, mais qui a certainement montré à la famille de Broglie un attachement qui ne s'est jamais démenti. ll semble au contraire que le maréchal et le comte aient fait plus tard très bon marché de d'Éon, dont la gratitude même était devenue compromettante, et récemment encore l'historien de la famille, le duc de Broglie, n'a pas, dans le Secret du roi, traité avec l'indulgence qu'on eût aimé rencontrer sous sa plume un aventurier qui n'oublia jamais ses premiers protecteurs.

[12] Le duc de Nivernais au duc de Praslin, 5 avril 1763. (Lettres, mémoires et négociations..., 2e part., p. 34.)

[13] La comtesse de Boufflers à d'Éon. (Papiers inédits de d'Éon.)

[14] Lettre de d'Éon au duc de Praslin, 22 août 1763. (Lettres, mémoires et négociations..., 1re part., p. 23.)

[15] Le duc de Praslin à d'Éon, 13 septembre 1763. (Papiers inédits de d'Éon.)

[16] D'Éon au duc de Praslin, 25 septembre 1763. (Lettres, mémoires et négociations..., p. 40.)

[17] D'Éon au comte de Guerchy, le 25 septembre 1763. (Lettres, mémoires et négociations..., p. 74.)