HISTOIRE D'ANNIBAL

 

LIVRE PREMIER. — TEMPS DE CARTHAGE ANTÉRIEURS À ANNIBAL.

CHAPITRE II. — TYR.

 

 

Bien que le nom de Tyrien soit généralement pris pour synonyme de Phénicien ou Chananéen, il est indispensable de pénétrer un instant au cœur même de la ruche florissante d'où va s'échapper l'essaim qui doit se poser à Carthage.

L'antiquité de Tyr[1] se perd dans la nuit des âges mythologiques, et cette cité fameuse entre toutes paraît avoir été fondée par Baal, vers l'an 3000 avant l'ère chrétienne[2]. Ses premières maisons se bâtissent en terre ferme sur la falaise d'Adloun[3], pourvoient aux besoins de leur commune défense et constituent ainsi une place forte qui, du temps de Josué (1450), était déjà très-respectable[4]. Vers l'an 2000, Paléo-Tyr fonde Sidon, et plus fard, vers 1200, Sidon vient, en regard de sa métropole, créera son tour une autre Tyr, non plus sur le continent, mais dans l'île la plus voisine[5].

En modifiant ainsi l'assiette de leurs établissements, les Tyriens cherchaient à se dérober aux bouleversements dus à de fréquents tremblements de terre[6]. En même temps, ils cédaient le terrain aux hordes venues de l'Assyrie, et, protégés enfin par la mer qui battait les rochers de leur île, parvenaient à braver l'insatiable ambition de toutes les Sémiramis[7].

Dès qu'elle n'eut plus à redouter les maux de la domination étrangère, Tyr prit des accroissements rapides. Vers l'an 1100, elle fonde Utique et Gadès, et à cette fondation se rattachent de vastes entreprises maritimes, la conquête d'une partie de l'Espagne, la colonisation des côtes occidentale et septentrionale de l'Afrique.

A la même époque, il s'opère dans l'organisation intérieure de la république urbaine une révolution qui paraît en augmenter la puissance. Primitivement démocratique, puis oligarchique, sa constitution fut brusquement modifiée par un coup d'Etat. Tous les pouvoirs tombèrent aux mains d'A'bd-Baal (Abibal), qui prit le titre de roi de Tyr, de Sidon et des Phéniciens[8].

Le gouvernement monarchique n'était pas de nature à tarir les sources de la fortune de Tyr, et la ville marchande parvint à l'apogée de sa splendeur sous le règne de Hiram Ier, fils et successeur d'A'bd-Baal.

Ce prince[9], contemporain et allié des rois David et Salomon[10], commença par agrandir le périmètre de la ville, qui étouffait dans ses murs. A cet effet, il y annexa une île voisine, au moyen d'une digue établie à grands frais[11]. Défendue par des môles et des brise-lames heureusement disposés, la rade de Tyr put abriter une flotte importante, et la capitale de la Phénicie prit, dès lors, rang parmi les puissances militaires de l'Asie Mineure[12].

Le roi donna en même temps une impulsion nouvelle aux expéditions maritimes[13], et, par ses traités de commerce avec le roi Salomon, assura l'alimentation des insulaires tyriens[14]. Enfin il encouragea l'industrie, les arts, principalement l'architecture, et couvrit sa capitale de somptueux édifices[15].

Ce règne de paix et de grandeur[16] fut suivi d'une longue période de troubles, et, emportée par la tourmente, la dynastie de Hiram fut violemment arrachée du trône de Tyr[17].

A'bd-Astart, son petit-fils, périt, en 931, victime d'une conspiration qui semble n'avoir été qu'une explosion violente des haines populaires longtemps comprimées.

L'organisation sociale de la cité tyrienne était loin d'être parfaite, et de nombreux abus arrêtaient souvent, dans la machine gouvernementale, ces rouages essentiels qui ne doivent jamais cesser de fonctionner. Sans doute le gouvernement royal, soutenu dans ses écarts par une avide aristocratie, pressurait outre mesure les classes ouvrières de Tyr, dont les travaux de Hiram avaient révélé l'importance. Les masses sentirent leur force, et la révolution, dominée, comme il arrive toujours, par des passions ardentes, posa sur la tête d'un esclave la couronne tombée du front d'A'bd-Astart.

L'esclave[18] régna douze ans (930-918), durant lesquels un grand nombre de patriciens émigrèrent, soit pour aller s'établir aux colonies, soit pour créer des colonies nouvelles.

Ce temps écoulé, les émigrés rentrèrent à Tyr, amenant à leur suite une coalition formée pour organiser une restauration de la dynastie de Hiram. Mais cette famille était usée. Trois frères d'A'bd-Astart remontèrent un instant sur le trône, et le dernier en fut précipité par un prêtre d'Astarté, qui prit sa place.

Cette fois c'était une révolution de palais, qui n'amenait qu'un changement de dynastie. Le prêtre Aït-Baal[19], souillé du sang du dernier rejeton de Hiram, fut le fondateur de cette dynastie nouvelle, et l'autorité monarchique, exercée avec une énergie remarquable, rendit à Tyr sa splendeur première.

C'est sous le règne de cet Aït-Baal que tout le littoral de l'Afrique septentrionale se couvrit de colonies tyriennes, lesquelles, dévorées d'une activité fiévreuse, allaient fouiller au loin l'intérieur du pays, et chercher jusqu'au Soudan des débouchés au commerce de la métropole[20] Ces créations lointaines offraient de grands avantages à la politique du gouvernement, car, d'une part, elles ouvraient des voies nouvelles aux instincts d'expansion de l'île de Tyr, et, d'autre part, conviant à de brillantes destinées les déshérités et les mécontents de toute classe, elles apportaient une puissante diversion aux maladies sociales qui désorganisaient la cité.

Aït-Baal semble avoir tenu d'une main légère et ferme les rênes d'un Etat si difficile à conduire, et son règne fut calme. Mais ses successeurs, Balezor et Mytton, devaient voir se reproduire les troubles intérieurs qui avaient désolé le pays sous la descendance de Hiram.

Les luttes de l'aristocratie et du peuple, auxquelles on croyait avoir mis fin, ne tardèrent point à recommencer, et, en proie à un nouvel accès de fièvre, le corps social parut menacé d'une décomposition prochaine. L'horizon politique était gros d'orages. Pour comble de malheurs, le roi Mytton mourut en 833, laissant le pouvoir à ses enfants mineurs, Pygmalion et Elissa.

On vit aussitôt les partis relever hardiment la tête et s'agiter passionnément, à la faveur de cette minorité.

L'aristocratie, en possession exclusive de toutes les richesses et de tous les droits politiques, fut violemment battue en brèche par les jalousies d'une bourgeoisie marchande qui voulait diriger les affaires de l'Etat, et par les désirs inassouvis de prolétaires dont le sort était singulièrement misérable. Le parti démocratique semble alors l'avoir emporté. Le roi Pygmalion, dominé par les agitateurs populaires, fut mis en demeure de consentir des concessions importantes, et l'aristocratie, atterrée, dut avisera prendre des mesures de salut[21]. Ses instincts la portèrent vers la côte d'Afrique.

Avant de suivre le sillage des navires qui vont emporter les émigrés, il est indispensable d'insister sur un point, de mettre en pleine lumière l'une des faces du caractère national qui, de Tyr, va se transplanter à Carthage. Contrairement aux dispositions manifestées par les autres républiques de la Phénicie, la ville de Tyr était animée d'un esprit militaire extrêmement prononcé, et l'on pourrait fort bien la peindre sous une figure de femme, une main posée sur ses balles de marchandises, mais l'autre sur la garde de son épée.

Majestueusement assise à la crête de son rocher fortifié, elle finit par tenir en respect la puissance des Perses qui désolaient l'Asie Mineure[22], et, dès le temps de David, elle fut mise elle-même au rang des puissances avec lesquelles on doit nécessairement compter lors des crises internationales[23].

Les fortifications qui, du temps de Josué, entouraient le Paléo-Tyr avaient été reproduites dans l'île, et la place, que l'eau protégeait de toutes parts, présentait des défenses imposantes[24]. Elle était d'ailleurs couverte par une ligne de postes détachés, établis sur le continent[25]. Pour le maintien de sa sécurité et de son influence politique, la République entretenait une armée permanente, composée de soldats recrutés en Asie, parmi les peuples les plus belliqueux[26].

S'abstenant de conquêtes, mais acharnée à la défense du territoire national, Tyr demeura de longs siècles à l'abri de toute atteinte[27] ; mais elle connut enfin l'adversité. C'est alors que la métropole de Carthage fit, pour sa gloire, appel à toutes les ressources d'une vaillante industrie. Sa constance dans la mauvaise fortune fut, comme son patriotisme, au-dessus de tout éloge.

Seule parmi toutes les villes de la Phénicie, qui se soumettaient avec une sorte d'empressement au roi Salmanasar (vers l'an 700), elle résista bravement aux forces de l'Assyrie[28]. Echappée au glaive des Scythes (634-607), qui désolaient le littoral phénicien, elle sut tenir treize ans (586-574) contre l'armée de Nabuchodonosor[29]. Qui ne connaît enfin les prodiges opérés par les ingénieurs chargés de la défense de Tyr, lors du siège formé par Alexandre (332)[30] ?

Ruinée de fond en comble par le roi de Macédoine, qui, à l'exemple de Nabuchodonosor, voulait changer les voies du commerce du monde[31], elle eut la force de renaître de ses cendres. Une fois relevée, elle reprit, en très-peu de temps, assez d'importance pour allumer la convoitise des successeurs d'Alexandre, assez de vigueur pour résister treize mois à Antigone. Encore Antigone ne put-il la prendre que par trahison (313).

Ces observations historiques, qui entraînent le lecteur bien au delà des limites du règne de Pygmalion, devaient lui être présentées, pour qu'il sentit battre au cœur de la race tyrienne un sang ardent et généreux, capable de grandes entreprises, et dans le commerce et dans la guerre. C'est le sang des jeunes patriciens qui s'embarquent[32] et disent résolument à Tyr un éternel adieu. La cité qu'ils vont fonder héritera des vertus guerrières[33] qui valurent à la mère patrie sa prééminence sur les autres républiques de la ligue phénicienne.

 

 

 



[1] Isaïe, XXIII, 7.

[2] Hérodote, qui fit un voyage à Tyr vers l'an 450, rapporte (II, XLIV) que, de son temps, la ville comptait 2300 ans d'existence. Elle remonte donc à 2300 + 450 = 2750, soit, en nombre rond, 3000 avant Jésus-Christ.

[3] Ce lieu était loin d'être aride. Osée, IX, 13.

[4] Josué, XIX, 29. — Tyr (Tyrus, Τύρος), en hébreu araméen Tsour (rocher), aujourd'hui Sour, est probablement la plus ancienne ville du monde. On l'appelle aussi Sor, Sar, Sarra, Paléo-Tyr.

Ces noms divers ont tous une même origine, mais se rapportent aux emplacements successivement occupés par les habitants. La ville primitive ou Paléo-Tyr fut bâtie sur le continent, au point dit aujourd'hui Adloun, et ce sont les fortifications du Paléo-Tyr que mentionne le verset précité de Josué (XIX, 29).

Tyr, ainsi qu'il sera dit ci-après, fut successivement établie dans une ile jointe au continent par Nabuchodonosor (572), dans une autre ile également transformée en péninsule par Alexandre (332), enfin sur la montagne dite Scala Tyriorum. (Voyez J. de Bertou, Topographie de Tyr.)

[5] Les Tyriens... tourmentés par des tremblements de terre, s'établirent d'abord près du lac assyrien, et plus tard sur les bords de la mer. Là ils bâtirent une ville, qu'ils appelèrent Sidon, à cause de l'abondance du poisson... Plusieurs années après, la ville ayant été prise par le roi d'Ascalon, les habitants s'embarquèrent et allèrent fonder la ville de Tyr, un an avant la destruction de Troie. (Justin, XVIII, III.)

Isaïe, qui donne à Tyr le nom de fille de Sidon (XXIII, 12), entend parler de la nouvelle Tyr, bâtie dans l'île.

[6] Justin, loco cit.

[7] Les conquêtes assyro-babyloniennes, qui s'étendirent jusqu'au littoral phénicien, sont mentionnées par Ctésias (Diodore, II, 1), Josèphe (Antiquités judaïques, I, IX, 1). Eusèbe (Canon), etc.

[8] Eupolemus, dans Eusèbe, Præp. Evang., IX, XXXI.

[9] Hiram, en grec Εΐρωμος, qui n'est probablement qu'une altération d'Er-Roum, le Royal.

[10] Fragments de Ménandre et de Dius, conservés par Josèphe (Antiq. Jud., VIII, V, 3). — Fragments divers cités par Eusèbe (Præp. Evang., IX, XXXIII, XXXIV). Voyez surtout la Bible. Rois, II, V, 11. Paralipomènes, I, XIV, 1 ; XXII, 4. Rois, III, V, 1.

L'alliance et le traité de commerce consentis entre Hiram et David demeurèrent en vigueur sous le règne de Salomon. Rois, III, V, 1, 2. Paralipomènes, II, II, 3, 4. Rois, III, V, 6, 8, 9, 12.

[11] Ménandre, cité par Josèphe (Antiq. Jud., VIII, V, 3) donne à cette digue le nom de Εΰρύχωρος. Dius (loco cit.) dit que cet ouvrage hydraulique fut exécuté vers les parties orientales de la ville.

[12] Les psaumes de David indiquent nettement qu'il faut désormais tenir compte de la puissance de Tyr dans le concert des nations asiatiques. Psaume, XLIV, 13 ; Psaume LXXXVI, 4.

[13] Rois, III, X, 21 et 22.

[14] Rois, III, V, 11. Paralipomènes, II, II, 10.

L'île de Tyr fut toujours, pour sa nourriture, à la merci de la Palestine. Esdras, I, III, 7. Actes des apôtres, XII, 20.

[15] Hiram mit à la disposition de Salomon un ingénieur tyrien, à la fois architecte et artiste habile, qui fut chargé de construire le temple de Jérusalem, Rois, III, VII, 14 et 40. Paralipomènes, II, II, 7 et 8 ; 13 et 14.

Hiram fit construire à Tyr les temples d'Hercule et d'Astarté, agrandit la ville, orna le temple de Jupiter Olympien. (Fragm. cités de Ménandre et de Dius.) Suivant les traditions grecque et hébraïque, il bâtit aussi un temple semblable à relui de Jérusalem et dans lequel il laissait librement adorer le Dieu d'Israël.

[16] Ce sont vraisemblablement les splendeurs du règne de Hiram qui arrachent aux prophètes des cris d'admiration : Isaïe, XXIII, 3 et 8. Ézéchiel, XXVI, 4 et 12 ; 17 ; XXVII, 3, 4 et 33 ; XXVIII, 7. Cf. XXVI, XXVII, XVIII. Amos, I, 10. Zacharie, IX, 3.

[17] Josèphe et Eusèbe nous ont laisse une liste des rois de Tyr, de Hiram jusqu'à Pygmalion. Ceux de la dynastie de Hiram Ier sont :

Baleastartus (946-940), fils de Hiram ; alias Baal-Astart ;

Abdastartus (939-931), mort victime d'une conspiration ; alias A'bd-Astart ;

Astartus (918-907) ;

Astyramus (906-898), assassiné par son frère Pheles ;

Pheles, assassiné, après huit mois de règne, par l'usurpateur Aït-Baal.

Les quatre derniers sont fils de Baleastartus et petits-fils de Hiram.

[18] Voyez Justin, XVIII, III.

[19] Alias Eth-Baal, Ithobaal, Itobal. Mieux vaut lire Aït-Baal. C'est le père de la fameuse Jézabel, immortalisée par les vers d'Athalie.

[20] C'est à cette époque que remonte la fondation d'un grand établissement tyrien, situé dans l'intérieur du Tell, et destiné à commander les importantes vallées de l'oued Sah'el et du Chelef (Cheliff). Il s'agit d'Auzia (Aumale). (Voyez les Fragments de Ménandre conservés par Josèphe, Ant. Jud., VIII, XIII, 2.)

[21] Le récit de Justin, mis en regard des fragmenta de Ménandre et des Commentaires de Servius (Ad Virg. En.), ne peut laisser aucun doute sur ce fait, que la création de Carthage est due à l'émigration en masse du parti aristocratique de Tyr.

[22] Justin, XVIII, III.

[23] Psaumes, I, XXXII, 5 et 8, et LXXXVI, 1.

[24] Isaïe, XXIII, 11. Ézéchiel, XXVII, 12.

[25] Aït-Baal fonda sur la frontière septentrionale de la Phénicie la place forte de Botrys.

[26] Ézéchiel, XXVII, 10. Voyez aussi le verset 11.

[27] Elle passait pour imprenable, Isaïe, XXIII, 12. — On disait Tyr la Vierge, comme nous disons, en France, Metz la Pucelle.

[28] Sidon, Aké, l'ancienne Tyr et beaucoup d'autres villes se révoltèrent contre les Tyriens et se livrèrent au roi des Assyriens. Comme les Tyriens ne voulurent pas reconnaître son pouvoir, le roi marcha de nouveau contre eux ; les Phéniciens rebelles lui équipèrent une flotte de soixante navires montés par huit cents rameurs. Les Tyriens les attaquent avec douze navires, dispersent la flotte ennemie et font cinq cents prisonniers. Le roi Salmanasar se retira, en établissant des postes autour du fleuve, afin d'empêcher les Tyriens de venir y puiser. Les Tyriens furent réduits à boire à des puits forés, et cela durant cinq années d'investissement. (Fragments de Ménandre, dans Josèphe, Antiq. Jud., IX, XIV, 2.)

[29] Saint Jérôme, in Ezech., XXV et XXVII, et in Amos, I.

[30] Cette merveilleuse défense, qui nous est connue dans tous ses détails, pourrait être l'objet d'une étude fort intéressante. (Voyez : Diodore, III ; — Arrien, Exp. d'Alex., II, VII ; — Polybe ; — Quinte-Curce ; — Guillaume de Tyr.)

[31] Nabuchodonosor voulait détruire Tyr, afin de faire passer le commerce des Indes par le golfe Persique et Babylone. Alexandre avait des desseins semblables. Dans sa pensée, Babylone devait devenir la métropole de tout le commerce de l'Asie, comme Alexandrie eût été l'entrepôt de toutes les marchandises de l'Occident. D'ailleurs, tous les conquérants qui jetaient les yeux sur l'Asie ou l'Egypte devaient nécessairement chercher à ruiner Tyr, qui les couvrait toutes deux. Isaïe, XXIII, 5.

[32] Virgile, Énéide, I, v. 360 et suiv. ; Justin, XVIII, IV et V, passim.

[33] Virgile, Énéide, I, v. 14 ; Festus Avienus, Descriptio orbis terræ.