HISTOIRE DE LA GRÈCE

CINQUIÈME VOLUME

CHAPITRE VIII — THRACES ET COLONIES GRECQUES EN THRACE.

 

 

Ce vaste espace compris entre les fleuves du Strymôn et du Danube, et borné à l’ouest par les tribus illyriennes les plus orientales, au nord du Strymôn, était occupé par les innombrables subdivisions de la racé appelée Thraces ou Threïciens. C’était la race la plus nombreuse et la plus terrible que connut Hérodote : s’il était possible qu’ils agissent à l’unisson et sous une seule autorité (dit-il), on ne pourrait leur résister. Une coalition aussi formidable sembla menacer une fois, pendant les premières années de la guerre du Péloponnèse, sous le règne de Sitalkês, roi des Odrysæ, qui régnait depuis Abdêra à l’embouchure du Nestos, jusqu’au Pont-Euxin, et tenait sous son sceptre un nombre considérable de ces pillards féroces mais belliqueux ; de sorte que les Grecs même jusqu’aux Thermopylæ tremblèrent dans l’attente de leur arrivée. Mais le talent de ce prince ne se trouva pas suffisant pour amener toutes les forces de la Thrace à une coopération effective et à une agression dirigée contre d’autres peuples.

Quelque nombreuses que fussent les tribus des Thraces, leurs usages et leur caractère (selon Hérodote) étaient marqués par une grande uniformité : il nous dit un petit nombre de particularités au sujet des Getæ, des Trausi et d’autres. Et la vaste contrée sur laquelle la race était répandue, comprenant toute la chaîne du mont Hæmos, et la chaîne encore plus élevée du Rhodope[1], avec une portion des monts Orbêlos et Skomios, était encore occupée en partie par une surface unie et fertile, — telle que la grande plaine d’Andrinople, et le pays situé vers le cours inférieur des rivières Nestos et Hebros. Les Thraces de la plaine, bien que non moins belliqueux, étaient du moins plus sédentaires et moins avides de piller les étrangers que ceux des montagnes. Mais le caractère général de la race présente un agrégat de traits repoussants, qui se rachète par la présence des affections domestiques même les plus communes[2]. Le chef thrace faisait venir sa généalogie d’un dieu appelé par les Grecs Hermès, auquel il offrait un culte séparément du reste de sa tribu, parfois avec l’agréable offrande d’une victime humaine. Il tatouait son corps[3] et celui des femmes qui lui appartenaient, comme privilège d’une honorable lignée ; il achetait ses femmes à leurs parents et vendait ses enfants au marchand étranger pour l’exportation : il tenait pour déshonorant de cultiver la terre, et ne se sentait honoré que par les acquisitions de la guerre et du pillage. Les tribus thraces adoraient des divinités que les Grecs assimilent à Arès, à Dionysos et à Artemis. Le grand sanctuaire et l’oracle de leur dieu Dionysos étaient sur l’un des sommets les plus élevés du Rhodope, au milieu de fourrés épais et sombres, — résidence des farouches et inattaquables Satræ. Pour expliquer le caractère thrace, nous pouvons citer un acte accompli par le roi des Bisaltæ. — peut-être l’un des divers chefs de cette tribu thrace étendue, — dont le territoire, entre le Strymôn et l’Axios se trouvait sur la route directe de Xerxès vers la Grèce, et qui, pour échapper à la honte d’être traîné parmi les auxiliaires forcés de l’invasion des Perses, s’enfuit sur les hauteurs du Rhodope, défendant à ses fils d’y prendre aucune part. Par insouciance ou par curiosité, les fils désobéirent à ses ordres, et accompagnèrent Xerxès en Grèce. Ils revinrent sans avoir été blessés par les lances grecques ; mais le père, enflammé de colère, quand ils reparurent en sa présence, leur fit arracher les yeux à tous. L’exaltation du succès se manifestait chez les Thraces par une plus grande ardeur à verser le sang ; mais à la guerre, seule occupation qu’ils estimassent, ils étaient non moins braves que durs aux fatigues ; conservant un bon front, dans leur ordre particulier de bataille, contre des forces bien supérieures en valeur militaire[4]. Il parait que les Thyniens et les Bithyniens[5], sur la côte asiatique du Bosphore, peut-être aussi les Mysiens, étaient membres de cette grande famille thrace, qui se rattachait aussi de plus loin aux Phrygiens. Et l’on peut dire que la race entière, présentait un caractère plus asiatique qu’européen ; surtout dans ces rites extatiques et frappant de folie, qui dominaient lion moins chez les Thraces Edoniens que dans les montagnes de l’Ida et du Dindymôn d’Asie, bien qu’avec quelques différences importantes. Les Thraces servaient à fournir aux Grecs des troupes mercenaires et des esclaves, et le nombre des colonies grecques fondées sur la côte eut l’effet d’adoucir en partie les tribus du voisinage immédiat, dont les chefs s’unissaient assez souvent par des mariages avec ceux des Grecs. Mais les tribus de l’intérieur semblent avoir conservé leurs habitudes sauvages avec un peu d’adoucissement ; de sorte que le langage dans lequel Tacite[6] les décrit est une juste continuation de celui d’Hérodote, bien que venant plus de cinq siècles après.

Marquer la situation de chacune de ces nombreuses tribus différentes dans le vaste territoire de la Thrace, qui, même aujourd’hui, est imparfaitement connu et mal indiqué sur les cartes, serait inutile, et à vrai dire impraticable. Je continuerai en mentionnant les principales colonies grecques qui furent formées dans le pays, signalant à l’occasion les tribus thraces particulières avec lesquelles elles en vinrent à être en contact.

Les colonies grecques établies sur le golfe Thermaïque, aussi bien que dans la péninsule de Chalkidikê, — émanant principalement de Chalkis et d’Eretria, bien que nous en ignorions l’époque précise, — paraissent avoir été d’ancienne date, et probablement elles précédaient le temps où les Macédoniens d’Edessa étendirent leur conquête jusqu’à la mer. A cette époque reculée, ils rencontrèrent les Piériens encore entre le Pêneios et l’Haliakmôn, — et aussi une quantité de petites tribus thraces dans toute la partie large de la péninsule chalkidique ; ils trouvèrent Pydna, ville piérienne, et Therma, Anthemonte, Chalastra, etc., villes mygdoniennes.

La plus ancienne colonie grecque dans ces contrées semble avoir été Methônê, fondée par les Erétriens en Pieria ; c’est presque à la même époque — si nous pouvons ajouter foi à une assertion d’un caractère plutôt suspect, bien que la date elle-même ne soit nullement improbable — que Korkyra fut établie par les Corinthiens (vers 730-720 av. J.-C.)[7] Ce fut un peu au nord de la ville piérienne de Pydna, et séparée par environ dix milles (= 16 kil.) de la ville bottiæenne d’Alôros, qui était située au nord de l’Haliakmôn[8]. Nous savons très peu de choses au sujet de Methonê, si ce n’est qu’elle conserva son autonomie et son hellénisme jusqu’à l’époque de Philippe de Macédoine, qui la prit et la détruisit. Mais bien que,’une fois établie, elle fût assez forte pour se maintenir malgré des conquêtes faites tout alentour par les Macédoniens d’Edessa, nous pouvons bien supposer qu’elle n’a pas pu être fondée dans l’origine sur le territoire macédonien. En réalité la situation n’était pas non plus particulièrement avantageuse pour des colons grecs, en ce qu’il y avait d’autres villes maritimes, non grecques, clans son voisinage, — Pydna, Alôros, Therma, Chalastra ; tandis que le point avantageux pour une colonie grecque était de devenir le port de laser servant exclusivement aux peuplades indigènes de l’intérieur des terres.

Les colonies fondées par Chalkis et Eretria sur chacune des trois projections de la péninsule chalkidienne furent nombreuses, bien que peu considérables pendant un longtemps. Nous ne savons pas jusqu’à quel point ces promontoires furent occupés avant l’arrivée des colons venus de l’Eubœa. Nous pouvons probablement placer cette arrivée à quelque époque antérieure à 600 avant J.-C. Car après cette époque Chalkis et Eretria semblent plutôt sur le déclin ; et il paraît aussi que les colons chalkidiens en Thrace aidèrent leur mère patrie Chalkis clans la guerre qu’elle soutint contre Eretria, ce qui ne peut être postérieur de beaucoup à l’an 600 avant J.-C., bien que cela puisse être considérablement plus ancien.

La chaîne de montagnes qui s’étend du golfe Thermaïque au golfe Strymonique et forme la limite septentrionale de la péninsule chalkidique, s’abaisse vers l’extrémité méridionale de manière à laisser un espace considérable de terre productive entre le golfe Torônaïque et le golfe Thermaïque, comprenant le fertile promontoire appelé Pallênê,-la plus occidentale de ces trois pointes de la Chalkidikê qui s’avance dans la mer Ægée. Des deux autres pointes ou projections, la plus orientale est terminée par le majestueux mont Athos, qui sort de la mer comme un rocher escarpé de 6.400 pieds de haut (= 1.950 mètres), rattaché à la terre ferme par une crête qui n’a pas plus de la moitié de la hauteur du mont lui-même, cependant élevée encore, raboteuse et boisée dans toute sa largeur d’une mer à l’autre, ne laissant par occasions que quelques espaces propres à être occupés ou cultivés. Le promontoire intermédiaire ou sithonien est aussi montueux et boisé, bien qu’à un degré moindre, — tous deux moins séduisants et moins productifs que Pallênê[9].

Æneia, près de ce cap qui marque l’entrée du golfe Thermaïque intérieur, — et Potidæa, à l’isthme étroit de Pallênê, — furent toutes deux fondées par Corinthe. Entre ces deux villes se trouvait le fertile territoire appelé Krusis ou Krossa~a, qui forma dans la suite une partie du domaine d’Olynthos, mais qui au sixième siècle avant J.-C. était occupé par de petits municipes thraces[10]. Dans l’intérieur de Pallênê étaient les villes de Mendé, colonie d’Eretria, — Skiônê, qui, n’ayant point de mère patrie légitime, — faisait remonter son origine à des guerriers pelléniens revenant de Troie, — Aphytis, Neapolis, Ægê, Therambôs et Sanê[11], colonies d’Eretria, soit complètement, soit en partie. Dans la péninsule sithonienne étaient Assa, Pilôros, Singos, Sartè, Torônè, Galèpsos, Sermylè et Mekyberna : toutes ou la plupart d’entre elles semblent avoir été d’origine chalkidique. Mais au sommet du golfe Toronaïque (qui se trouve entre Sithonia et Pallênê) était placée la ville d’Olynthos, entourée par une plaine étendue et fertile. Nous verrons que, dans l’origine, la ville bottiæenne d’Olynthos à l’époque de l’invasion des Perses passa dans les marins des Grecs Chalkidiens[12] et s’incorpora graduellement plusieurs des petits établissements voisins appartenant à cette race ; ce qui donna aux Chalkidiens, dans la péninsule, cette prépondérance marquée qu’ils conservèrent, même contre les efforts d’Athènes jusqu’au temps de Philippe de Macédoine.

Dans les rares espaces que laissait le promontoire montagneux ou chaîne finissant par l’Athos étaient établies quelques colonies thraces et quelques-unes pélasgiques des mêmes habitants qui occupaient Leamos et Imbros ; un petit nombre de citoyens chalkidiens étant domiciliés avec eux et le peuple parlant et le langage pélasgique et l’hellénique. Mais près de l’isthme étroit qui unit ce promontoire à la Thrace, et le long de la côte nord-ouest du golfe Strymonique, étaient des villes grecques d’une importance considérable, — Sanè, Akanthos, Stageira et Argitos, toutes colonies d’Andros, qui avait été elle-même colonisée par Eretria[13]. Akanthos et Stageira furent fondées, dit-on, en 654 avant J.-C.

En suivant la côte méridionale de Thrace, à partir de l’embouchure du Strymôn vers l’est, nous pouvons douter que dans l’année 560 avant J.-C. il y ait déjà été formé aucune considérable colonie grecque indépendante. La colonie ionienne d’Abdêra, à l’est de l’embouchure de la rivière Nestos ; créée par Teôs en Iônia, est de date plus récente bien que les Klazoméniens[14] y eussent commencé sans succès un établissement déjà dès l’an 651 avant J.-C. ; tandis que Dikæa, -l’établissement de Marôneia, formé par des colons de Chios, et celui d’Ænos, fondé par des Lesbiens à l’embouchure de l’Hebros, sont d’une date inconnue[15]. L’important et excellent territoire situé près de l’embouchure du Strymôn, oit, après plus d’un insuccès ruineux[16], la colonie athénienne d’Amphipolis se maintint dans la suite, était, à la date mentionnée ici, possédé par des Thraces Edoniens et par des Piériens. Les diverses tribus thraces, — les Satræ, les Edoniens, les Dersæens, les Sapæens, les Bistones, les Kikones, les Pætiens, etc., — dominaient sur la partie principale de la contrée placée entre le Strymôn et l’Hebros, même jusqu’à la côte. Il est à remarquer cependant que file de Thasos et celle de Samothrace possédaient chacune ce qui en grec était appelé une Peræa[17], — bande de terre sur le continent voisin, cultivée et défendue au moyen de postes fortifiés ou de petites villes. Probablement ces occupations sont de date très ancienne, puisqu’elles semblent être presque indispensables comme moyens de subsistance pour les îles. Car la stérile Thasos, particulièrement, mérite même à cette époque la description peu engageante que lui applique le poète Archiloque, au septième siècle avant J.-C. : — un dos d’âne, entièrement couvert de bois sauvages[18] ; tant elle est composée complètement de montagnes nues ou boisées, et tant y sont rares les pièces de terre cultivables, presque toutes attenant au rivage de la mer.

Cette île fut occupée dans l’origine par les Phéniciens, qui exploitaient les mines d’or de ses montagnes avec un degré d’industrie qui, même dans ce qui en restait, excitait l’admiration d’Hérodote. Comment et quand fut-elle évacuée par eux, c’est ce que nous ignorons. Mais le poète Archiloque[19] faisait partie d’un corps de colons pariens qui s’y établirent au septième siècle avant J.-C. et firent la guerre, non toujours heureusement, contre la tribu thrace appelée Saiens : dans une occasion, Archiloque se trouva forcé de jeter son bouclier. Par leurs mines et leurs possessions sur le continent — qui renfermaient à Skaptê Hylê et ailleurs des mines même plus riches que celles de l’île —, les Grecs thasiens s’élevèrent à tale puissance et à une population considérables. Et comme ils semblent avoir été les seuls Grecs, .jusqu’à l’établissement d’Histyæos de Milêtos sur le Strymôn, vers 510 avant J.-C. ; quai s’occupassent activement des districts à mines en Thrace situés en face de leur île, nous rie pouvons être surpris d’apprendre que leur revenu net avant la conquête des Perses, vers l’an 493 avant J.-C, après qu’ils avaient défrayé les charges de leur gouvernement sans imposer aucune taxe, montât annuellement à la somme considérable de 200 talents, quelquefois même à 300 talents (46.000, - 66.000 livres sterling, = 1.150.000, - 1.650.000 fr.).

Sur la longue péninsule appelée la Chersonèse de Thrace il y a eu probablement de petits établissements grecs à une date reculée, bien que nous ne sachions pas à quelle époque fut fondée soit la colonie milésienne de Kardia, sur le côté occidental de l’isthme de cette péninsule, près de la mer Ægée, soit la colonie æolienne de Sestos sur l’Hellespont. L’ascendant athénien, dans la péninsule ne commence qu’avec la migration du premier Miltiadês, pendant le règne de Pisistrate à Athènes. La colonie samienne de Perinthos, sur la côte septentrionale de la Propontis[20], était, dit-on, ancienne en date, et les colonies mégariennes Selymbria et Byzantion (Byzance) appartiennent au septième siècle avant J.-C. : la fondation de la dernière de ces deux colonies est placée dans la trentième Olympiade (657 av. J.-C.), et sa voisine Chalkêdôn, sur la côte opposée, était d’un petit nombre d’années plus ancienne. La situation de Byzantion dans le détroit resserré du Bosphore, avec son abondante pêcherie de thons[21], qui employait et nourrissait à la fois une partie considérable des hommes libres pauvres, était également commode, soit pour un trafic maritime, soit pour lever des contributions sur, les nombreux navires de blé qui passaient du Pont-Euxin dans la mer Ægée. On nous dit même qu’elle tenait sous sa dépendance un nombre considérable des Thraces Bithyniens voisins comme periœki tributaires. Une telle domination, bien que conservée probablement pendant la période la plus forte de la vie municipale grecque, devint impraticable dans des temps plus récents, et nous trouvons même les Byzantins n’étant pas toujours en état de défendre leur propre petit territoire environnant. On verra, cependant, que la ville possède une importance considérable pendant toute la période qu’embrasse notre histoire[22].

Les établissements grecs situés sur la côte inhospitalière sud-ouest du Pont-Euxin, au sud du Danube, paraissent n’avoir jamais atteint aucune considération : le trafic principal des navires grecs dans cette nier tendait vers les ports septentrionaux placés sur les bords du Borysthenês et dans la Chersonèse Taurique. Istria fut fondée par les Milésiens, près de l’embouchure méridionale du Danube, — Apollonia et Odêssos sur la même côte, plus au sud, — toutes probablement entre 600-560 avant J.-C. La colonie mégarienne ou byzantine de Mesambria semble avoir été postérieure à la révolte des Ioniens : on lie tonnait pas l’époque de Kallatis. La ville de Tomi, au nord de Kallatis et au sud d’Istria, est renommée comme lieu de bannissement d’Ovide[23]. Le tableau que le poète nous fait de ce lieu peu engageant, qui ne jouissait que de peu de repos à cause du voisinage des cruels Getæ, nous explique suffisamment pourquoi ces villes n’acquirent que peu ou point d’importance.

Les îles de Lemnos et d’Imbros, dans la mer Ægée, étaient, à cette période reculée, occupées par des Pélasges Tyrrhéniens. Elles furent conquises par les Perses, vers 508 avant J.-C., et semblent avoir passé au pourvoir des Athéniens, à l’époque où l’Iônia se révolta contre les Perses. Si les récits mythiques ou poétiques relatifs à ces Pélasges Tyrrhéniens contiennent une base quelconque de vérité, ils doivent avoir été une race de boucaniers non moins rapaces que cruels. A une époque, ces Pélasges semblent aussi avoir possédé Samothrace ; mais quand ou comment furent-ils remplacés par des Grecs, c’est un point sur lequel nous ne trouvons aucun récit digne de foi : la population de Samothrace était ionienne du temps de la guerre des Perses[24].

 

 

 



[1] Ce territoire de l’ancien mont Rhodope — l’espace intérieur entre le Strymôn, l’Hebros et la mer Ægée — a été moins visité par des voyageurs modernes, et est aujourd’hui plus complètement inconnu que toute autre partie de la Turquie d’Europe. M. Viquesnel le visita en 1847, et les données topographiques qu’il recueillit (mises dans un rapport fait au gouvernement Français) ont été employées par Kiepert dans la préparation de sa nouvelle carte de la Turquie d’Europe, récemment publiée (1853). Mais la carte que Viquesnel fit de la région du Rhodope n’a pas encore paru (V. les Erlaeuterungen de Kiepert, ajoutées à sa carte, p. 5).

[2] Mannert assimile la civilisation des Thraces à celle des Gaulois lorsque César les envahit, — grande injustice à l’égard de ces derniers, à mon avis (Géographie Gr. und Roem., vol. VII, p. 23).

[3] Cicéron, De Officiis, II, 7. Barbarum compunctum notis Threiciis. Plutarque (De Servi Numin. Vindict., c. 13, p. 558) parle comme si les femmes seules fussent tatouées en Thrace ; il en donne une singulière explication, en disant que c’était une punition continue infligée à ce sexe pour avoir tué Orpheus.

[4] Pour les Thraces en général, V. Hérodote, V, 3-9 ; VII, 110 ; VIII, 116 ; IX, 119 ; Thucydide, II, 100 ; VII, 29, 30 ; Xénophon, Anabase, VII, 2, 38, et le septième livre de l’Anabase en général, qui décrit les relations de Xénophon et des Dix Mille Grecs avec Seuthês, le prince Thrace.

[5] Xénophon, Anabase, VI, 2,17 ; Hérodote, VII, 75.

[6] Tacite, Annales, II, 66 ; IV, 46.

[7] Plutarque, Quæst. Græc. p. 293.

[8] Skylax, c. 67.

[9] Pour la description de la Chalkidikê, V. Grisebach’s Reisen, vol. II, c. 10, p. 6-16, et Leake, Travels in Northern Greece, vol. III, c. 24, p. 152.

Si nous lisons attentivement la description de la Chalkidikê, telle qu’elle est donnée par Skylax (c. 67), nous verrons qu’il ne la considère pas comme ayant trois pointes, mais comme se terminant seulement par la péninsule de Pallênê avec Potidæa à son isthme.

[10] Hérodote, VII, 123 ; Skymnus de Chios, v. 627.

[11] Strabon, X, p. 447 ; Thucydide, IV, 120-123 ; Pomponius Mela, II, 2 ; Hérodote, VII, 123.

[12] Hérodote, VII, 122 ; VIII, 127. Steph. Byz. (v. Παλλήνη) nous donne quelque idée des mythes au sujet de Pallênê, que rapportaient les écrivains grecs, aujourd’hui perdus, Hêgesippos et Theagenês.

[13] Thucydide, IV, 84, 103, 109. V. Fasti Hellenici de M. Clinton, ad ann. 654 avant J.-C.

[14] Solin, c. 10.

[15] Hérodote, I, 168 ; VII, 58-59, 109 ; Skymnus de Chios, v. 675.

[16] Thucydide, I, 100 ; IV, 102 ; Hérodote, V, 11. Actuellement on exporte des quantités considérables de blé de ce territoire à Constantinople (Leake, North. Gr., vol. III, ch. 25y p. 172).

[17] Hérodote, VII, 1O8-109 ; Thucydide, I, 101.

[18] Archiloque, Fragm. 17-18, éd. Schneidewin.

On peut voir dans les voyages de Grisebach l’exactitude frappante de cette description, même après un laps de temps de 2.500 ans, vol. I, ch. 7, p. 210-218, ainsi que dans Prokesch, Denkwürdigkeiten des Orients, Th. 3, p. 612. Thasos, vue de la mer, justifie le titre Ήερίη (Œnomaus, ap. Eusèbe, Præpar. Evang., VII, p. 256 ; Steph. Byz., Θάσσος).

Thasos (aujourd’hui Tasso) contient à présent une population d’environ 6,000 Grecs, dispersés dans flouze petits villages ; elle exporte quelque bon bois de construction pour les vaisseaux, principalement du sapin, que l’île produit en abondance, avec de l’huile d’olive et du lin en petite quantité ; mais il ne peut y venir assez de blé, même pour cette petite population. On n’y exploite pas de mines aujourd’hui, ou il n’y en a pas eu d’exploitées depuis longtemps.

[19] Archiloque, Fragm. 5, éd. Schneidewin ; Aristophane, Pac., 1298, avec les Scholies ; Strabon, X, p. 487 ; XII, p. 549 ; Thucydide, IV, 104.

[20] Skymnus de Chios, 699-7/15 ; Plutarque, Quæst. Græc., c. 57. V. M. Raoul Rochette, Histoire des Colonies grecques, ch. XI-XIV, vol. III, p. 273-298.

[21] Aristote, Politique, IV, 4, 1.

[22] Polybe, IV, 39 ; Phylarque, Fragm. 10, éd. Didot.

[23] Skymnus de Chios, 720-740 ; Hérodote, II, 33 ; VI, 33 ; Strabon, VII, p. 319 ; Skylax, c. 68 ; Mannert, Geograp. Gr. Roem., vol. VII, eh. 8, p. 126-140.

Une inscription contenue dans la collection de Bœckh prouve l’existence d’une pentapolis ou union de cinq cités grecques sur cette côte. Tomi, Kallatis, Mesambria et Apollonia appartenaient à cette union, suivant la supposition de Blaramberg, V. inscription N° 2,056 c.

Syncelle (p. 213) cependant place la fondation d’Istria bien plus haut, en 651 avant J.-C.

[24] Hérodote ; VIII, 90.