HISTOIRE DU RÈGNE DE LOUIS XIV

TROISIÈME PARTIE. — LA DÉCADENCE : GUERRES DE LA SECONDE COALITION ET DE LA SUCCESSION D'Espagne (suite et fin)

 

CHAPITRE XXXVIII. — Guerre de la succession d'Espagne : Première partie jusqu'à la fin de 1703. La France conserve encore l'avantage.

 

 

III. — Les Camisards ; Cavalier, leur chef. - Campagne de 1703. - Création de dix maréchaux. - Adoption définitive de la baïonnette. - Campagne de Villars en Allemagne : Prise de Kehl ; jonction avec l'électeur de Bavière. - Expédition du Tyrol, malheureuse pour le duc de Bavière. - Avantages des alliés dans les Pays-Bas ; victoire des Français à Eckeren. - Leur supériorité assurée eu Allemagne. Reprise de Brisach ; victoire d'Hochstett. — Soulèvement des Hongrois ; Ragoczi. - Fin de la campagne avantageuse à l'électeur de Bavière. - Embarras de l'Empereur. - Mais les embarras de la France accrue par l'obstination des Camisards et par la défection du Portugal et du duc de Savoie.

 

Malgré les avantages de la campagne, sauf en Flandre, les difficultés ne diminuaient pas ; déjà même elles se compliquaient d'une guerre civile dans le midi de la France. Les Camisards étaient en armes. On appelle de ce nom des bandes de Huguenots des Cévennes, dont les premiers avaient pris une chemise blanche relevée sur leurs tètes, comme moyen de se déguiser autant que comme signe de ralliement. On les appelle aussi les Fanatiques, parce qu'ils avaient parmi eux de prétendus prophètes, hommes, femmes et surtout enfants, instruits à tomber en extase, et à prêcher, avec un tremblement de tout le corps, la guerre et le règne prochain de Dieu. Le refus de la liberté de conscience, les exigences fiscales redoublées par la guerre étrangère, et les rigueurs déployées, selon le système de là-ville, contre ceux qui n'allaient pas à la messe, les avaient prédisposés à la révolte ; l'impulsion décisive venait de leur être donnée par un jeune homme de dix-sept ans, Jean Cavalier, garçon boulanger, qui, à l'énergie de caractère, à la fermeté du commandement, joignait plus d'un talent de général. Leur début fut, à Pont de Monvert, l'assassinat de l'archiprêtre Du Chayla, qu'ils regardaient particulièrement comme leur persécuteur (juillet 1702) ; de là ils se répandirent dans les villages, frappant les prêtres et les maîtres d'école catholiques..Le comte de Broglie, commandant militaire en Languedoc, avait peu de troupes ; il n'exerça d'abord qu'une répression impuissante. Au mois de décembre, Cavalier, dont le parti s'enhardissait de jour en jour, battait un corps de noblesse, et habillait ses soldats des uniformes des morts. Le mois suivant, il triomphait en rase campagne du comte de Broglie lui-même, aux portes de Nimes. Alors les Camisards parcoururent les diocèses de Mende, d'Alais, d'Uzès et de Nimes ; en un mois ils brûlèrent quarante paroisses, et massacrèrent quatre-vingts curés. La lutte prenait un caractère atroce ; leurs violences et bientôt l'appel qu'ils firent à l'étranger provoquaient les représailles impitoyables sous lesquelles ils devaient un jour succomber[1].

A cette recrudescence de contradictions, Louis XIV opposa un redoublement de préparatifs. L'hiver fut employé à une troisième augmentation des troupes de terre et de mer, à renforcer les armées de Flandre, d'Italie et du Rhin, à renouveler le personnel des officiers généraux, et même à perfectionner l'armement. C'est à ce moment que la pique fut abandonnée, et l'usage de la baïonnette au bout du fusil rendu général dans toute l'infanterie ; Louvois et Vauban, après une trop longue attente, triomphaient enfin de la routine[2]. Pour animer le zèle par la perspective de la récompense, le roi créa d'un coup dix maréchaux, presque tous bien choisis, c'est-à-dire désignés par des services notoires : Chamilly, Estrées, Château-Renaud, Vauban, Rosen, Huxelles, Tessé ; Montrevel, Tallard et Harcourt. S'il était possible de contester les titres de Rosen, de Montrevel et d'Harcourt, s'il était vrai que Tessé ne dût son élévation qu'aux instances de la duchesse de Bourgogne qui croyait lui de voir son mariage[3], personne n'avait oublié ce qu'avait été Château-Renaud dans la guerre précédente, Chamilly à Grave, Huxelles à Mayence, et Vauban à tant de sièges fameux. Non moins digne de cet honneur par son désintéressement que par son génie, Vauban voulait se défendre d'accepter une dignité qui serait une entrave à son art, puisque un ingénieur ne commandait jamais en chef, et qu'un maréchal ne devait être subordonné qu'à un plus ancien. Le roi passa par-dessus ce scrupule de bon serviteur de l'État, aux applaudissements de tous[4]. Dans les rangs inférieurs, il fit une promotion de vingt-trois lieutenants généraux, de vingt-quatre maréchaux de camp, et de trente et un brigadiers. La marine eut pour sa part quatre nouveaux chefs d'escadre et vingt et un capitaines de vaisseau.

Aux trois armées déjà existantes, il en ajouta une nouvelle contre les Camisards, qu'il composa de dragons levés en Languedoc même et de bataillons tirés des Pays-Bas, d'Allemagne et d'Italie ; il en confia le commandement à Montrevel, un des nouveaux maréchaux. Il laissa aux trois premières leurs commandants de l'année précédente, Boufflers, assisté de Villeroi, Vendôme et Villars ; mais il lui parut bon d'en former une cinquième sur la Moselle, pour agir en Lorraine et en Alsace, seconder la jonction de Villars avec l'électeur de Bavière, et diviser les Impériaux en occupant une partie de leurs forces sur le Rhin. Destinée au duc de Bourgogne, cette cinquième armée fut réellement confiée au maréchal de Tallard. Grâce à cette activité, à cette vigilance, il gardera encore en 1703, malgré plusieurs échecs, la supériorité sur ses ennemis.

La pensée dominante du roi était le secours de l'électeur de Bavière, une diversion puissante en Allemagne, de laquelle, selon lui, dépendait uniquement le succès de cette guerre, et une paix aussi glorieuse pour lui qu'avantageuse pour son allié[5]. Il ajournait toute autre entreprise après celle-là. Il voyait les Autrichiens réduits à l'inaction en Italie, avec des troupes délabrées, sur un terrain marécageux, et le prince Eugène obligé d'aller à Vienne demander des renforts qu'on ne pouvait lui donner. Il projetait de faire passer en Allemagne une partie de l'armée de Vendôme[6]. Du côté du Nord, il recommandait à Boufflers et à Villeroi de garder l'attitude défensive, de ne livrer bataille que lorsqu'il serait possible de le faire avec avantage, ou dans le cas où Anvers et Namur seraient menacés. Mais du côté de l'Allemagne il était impatient d'entrer en action. Villars, à peine arrivé à la cour, reçut l'ordre d'en partir dès le 13janvier 1703. Le roi était convaincu, par divers mouvements des troupes allemandes, que le prince de Bade se disposait à entrer dans la Bavière ; il importait de le retenir dans le voisinage du Rhin ou de le suivre dans l'électorat. Villars, sur les ordres pressants du roi, prit le parti de passer le Rh in et d'assiéger Kehl, pour couvrir Strasbourg contre toute attaque, pour s'ouvrir une porte de plus sur l'Allemagne, et un chemin vers les montagnes noires le long d'une rivière — Kinzig, affluent du Rhin —. On était au 12 février, l'hiver ajoutait ses glaces et ses neiges aux autres difficultés. Le passage s'effectua à Huningue et à Neubourg. De Neubourg à Kehl, il y avait vingt lieues de pays ennemi à traverser avec un équipage d'artillerie et de vivres, à passer entre les garnisons allemandes de Brisach et de Fribourg, à franchir des ruisseaux ou des défilés épuisés de vivres pendant la campagne précédente, à emporter toutes les redoutes des bords du Rhin, et peut-être au bout du voyage à combattre une armée retranchée derrière la Kinzig. L'audace fit la fortune de l'entreprise. Le prince de Bade, ne soupçonnant pas une telle témérité, rie prit aucune mesure pour la combattre ; chaque quartier ennemi, surpris dans son isolement, ne songea qu'à fuir dans les places fortes. Sans perdre un soldat, les Français s'emparèrent de plus de cinquante redoutes ou forts, et même de quelques villes impériales telles qu'Offenbourg ; où ils trouvèrent de l'artillerie et des munitions de guerre et de bouche, destinées à approvisionner Kehl, qui servirent à l'attaquer. Le prince de Bade inquiet se hâta de rappeler dans ses lignes de Bühl ce qu'il avait encore de troupes sur la rive gauche, et celles qu'il avait détachées vers la Bavière ; dans la nuit du 25 au 26 février, Villars ouvrit la tranchée devant Kehl.

Une égale activité présida aux opérations du siège ; deux ponts de bateaux sur le Rhin, ouvrant la communication avec Strasbourg, permirent de recevoir de cette ville des renforts et de l'artillerie, et de transporter les blessés dans de bons hôpitaux. Pour soutenir le cœur des soldats, Villars passait une partie des nuits avec eux dans la tranchée, buvait du brandevin à leur santé, et leur faisait des contes joyeux, disant entre autres choses qu'il n'y avait que les Français pour prendre les villes pendant l'hiver[7]. Dans le désir d'en finir vite, il ne tint aucun compte des observations des ingénieurs ; il se vante même de n'avoir pas respecté d'avantage l'avis de Vauban, qui aurait voulu venir à ce siège[8]. La ville avait deux ouvrages à corne ; il n'eu voulut attaquer qu'un seul, mais avec une si grande énergie, que le 6 mars, le dixième jour, il s'en empara par un vigoureux assaut. La contrescarpe était encore entière, les fossés pleins d'eau et bien revêtus. Si on prenait la place dans cet état, des réparations faciles et peu coûteuses suffiraient pour en faire une citadelle française presque inexpugnable sur le territoire allemand. Dans cet espoir, pour presser la reddition par la peur, il fit préparer des batteries formidables, et sommer le commandant avec la menace de ne le recevoir qu'à discrétion si une fois ses nouvelles batteries commençaient à tirer. Le commandant, qui s'était jusque-là défendu assez mollement et qui ne voyait venir aucun secours, aima mieux capituler avec les honneurs de la guerre. Le 12 mars, il rendit Kehl, y laissant vingt-huit pièces de canon, vingt-six milliers de poudre, et d'autres provisions bien plus considérables que le vainqueur n'avait pu l'espérer.

Ce glorieux début fut suivi d'un temps d'arrêt que l'on ne comprit pas en France. A la victoire des Français correspondaient les exploits inespérés de l'électeur de Bavière. Ce prince, tour à tour nonchalant et actif, avait aussi attaqué en plein hiver les Impériaux dans son voisinage. Il avait pris, sur le Danube, la ville palatine de Neubourg entre Donawerth et Ingolstadt[9], le 2 février. La veille de la prise de Kehl, il dispersait à Scharding sur l'Inn une armée d'Autrichiens.et de Saxons qui menaçait la Bavière (11 mars) ; les jours suivants, il écarta du Danube les troupes des Cercles commandées par le comte de Styrum, et mit la main sur Ratisbonne pour s'assurer le passage et le cours& fleuve. Villars avait applaudi à la prise de Neubourg pour l'électeur et pour lui-même, puisqu'il ne s'oubliait jamais : Il faut, lui écrivait-il[10], que vous partagiez l'Empire et que je sois connétable. Ce ton décidé était d'un bon augure pour la jonction, et le bonheur inattendu de l'électeur semblait la rendre plus facile. On apprit avec surprise qu'au lieu de saisir cette occasion, Villars repassait le Rhin, et renvoyait ses troupes dans leurs quartiers. Ses ennemis en donnèrent le motif odieux et moqueur, qu'il était impatient de revoir sa femme. Lui-même, en se plaignant de n'être pas rémunéré selon ses mérites, de n'être pas encore élevé au rang de duc, pouvait donner à penser qu'il n'avait de zèle que pou r sa propre élévation[11]. Réellement ses raisons étaient conformés à la prudence : la fatigue de ses troupes, et leur pénurie en armes et en vêtements, le danger d'affronter les montagnes quand la neige les rendait inabordables au simple voyageur, ou de risquer, sans les ressources nécessaires, une bataille contre le prince de Bade qui ne manquerait pas de disputer le passage. Aussi bien, après les derniers succès de l'électeur, le secours était moins pressé.

Mais Louis XIV fut inflexible. La jonction était sa pensée, il signifia à Villars d'avoir, sous peine de disgrâce, à n'en pas retarder l'exécution. Je vous ordonne, lui disait-il[12], à moins qu'il n'y ait une impossibilité entière ou que la perte de mes troupes soit certaine, de vous mettre en état d'exécuter, sans perdre un moment, les ordres que je vous ai envoyés ; et pour qu'à l'avenir il n'arrive plus de pareils contre-temps, vous ne prendrez pas sur vous des choses de pareille conséquence sans avoir reçu mes ordres..... Tout cela n'est arrivé que par la confiance que j'ai eue en vous. Il est de votre intérêt, pour la conserver, de faire en sorte que le mouvement que vous avez fait ne porte aucun préjudice à la situation heureuse dans laquelle vous avez mis mes affaires.

Devant cette volonté souveraine, Villars n'avait plus qu'à s'incliner. Dès le 5 avril, ses troupes commencèrent à repasser le Rhin. Le maréchal de Tallard, avec l'armée destinée à agir sur ce fleuve, s'approcha pour aider au mouvement de jonction. Il n'y avait que deux chemins pour entrer dans le bassin du Danube : l'un conduisait aux lignes du prince de Bade qu'il faudrait forcer d'abord, l'autre par la vallée de la Kinzig conduisait aux sources du Danube, derrière des montagnes dont l'ennemi avait sans doute fermé les passages. Dans le premier cas, on avait à combattre et à déloger une armée fortement retranchée, dans l'autre à laisser cette armée sur son flanc ou ses derrières avec les seules troupes de Tallard en face. Tous les officiers généraux réunis en conseil déclarèrent, malgré Villars, le premier parti impossible, et lei lignes du prince de Bade inexpugnables. Il ne restait que le chemin de la Kinzig ; Villars se résigna, comme il l'exposait dans une lettre à Louis XIV, à voiturer du pain et des munitions sur des chariots qui n'avaient pas la voie, à faire vivre la cavalerie en marche sans fourrage dans les villages, sans herbe nouvelle sur la terre, à affronter dans les montagnes les détachements du prince de Bade, les milices du Wurtemberg, à se heurter peut-être inutilement à des châteaux imprenables. L'expédition, couverte par l'armée de Tallard, commença le 27 avril. Une avant-garde de seize bataillons et de vingt escadrons partit d'Offenbourg, et occupa les petites villes de Gengenbrach, de Biberach, de Hausach sans rencontrer d'autre obstacle que quelques retranchements mal défendus et facilement occupés. Au bout de quatre jours (1er mai), Villars les ayant rejoints avec le reste de ses troupes et son convoi de munitions et de vivres, on s'avança vers Homberg, le plus redouté des châteaux qui hérissaient les passages ; les grenadiers à la droite et à la gauche de la colonne écartaient les ennemis des hauteurs ; le corps principal, ayant attaqué de front les retranchements du château, les enleva presque sans résistance. Il y avait encore jusqu'à la crête des montagnes deux lieues de chemin plus difficile et plus dangereux, où il fallait marcher tantôt dans le fond des précipices, tantôt sur les pentes dont le moindre abatis aurait intercepté le passage ; quelques hommes rassemblés au sommet auraient pu avec des pierres écraser les envahisseurs. Une tête de colonne se lança bravement dans cette terrible aventure, et arriva sans rencontrer d'ennemis. Le 5, toute l'armée, artillerie et caissons, campait sur la crête escaladée, dans un retranchement fait par les ennemis pour garantir la Souabe des incursions des Bavarois. Le 6, elle marchait vers Willingen, rendez-vous indiqué par l'électeur de Bavière, et elle poussait des partis jusqu'à Tutlingen et Donauschingen. Onze jours avaient suffi pour accomplir cette glorieuse traversée. L'Électeur arrivait de son côté avec une armée que ses derniers succès avaient un peu fatiguée. Dès qu'il sentit Villars près de lui, il accourut à sa rencontre avec tous les signes de la joie et de la reconnaissance. Il vint lui-même au galop, écrit Villars à Louis XIV, et dès qu'il put m'apercevoir poussa à toutes jambes. Je parus vouloir descendre de cheval, il courut à moi m'embrassant avec des larmes de joie, et fut près de me jeter à terre et d'y tomber aussi. Tous ces transports étaient violents et sincères, les expressions pleines de sa reconnaissance, que j'avais sauvé sa personne, son honneur, sa famille, son État, enfin tout ce que peuvent inspirer le changement de la situation terrible où il s'était vu, et l'état triomphant où une armée puissante de Votre Majesté l'allait mettre. Louis XIV, qui avait si fermement voulu l'entreprise, en la voyant si heureusement accomplie, devait être content.

Sa joie ne tarda pas être tempérée par de moins bonnes nouvelles des Pays-Bas et bientôt même de Bavière. Aux Pays-Bas, où nous avons vu qu'il prescrivait la défensive, ses ennemis suivaient avec un bonheur régulier le plan de déposséder ses alliés et Philippe V, et de n'avancer vers la France qu'en laissant derrière eux des conquêtes certaines. Le 15 mai, Marlborough faisait capituler Bonn, la dernière ville de l'électorat de Cologne. Toute la compensation pour la France dans cet échec se bornait à l'honneur d'une noble défense, et pour le commandant d'Alègre et sa garnison à la gloire du courage malheureux qui commençait à devenir trop fréquente. Les vainqueurs essayèrent ensuite d'occuper la Flandre, les Hollandais pour ruiner le commerce de l'Escaut, les Anglais pour occuper Bruges, Ostende, Nieuport, ces villes dont ils avaient réclamé la garde pour s'en assurer la possession. Ils envahirent le pays de Waes, en forçant les lignes françaises et espagnoles, y levèrent sans retard des contributions, et se préparèrent au siège d'Anvers (juin 1703). Leur attente fut, il est vrai, trompée. Boufflers, marchant avec la rapidité française au secours des Espagnols, rencontra les Hollandais près d'Eckeren (30 juin), les attaqua d'abord à coups de canon, puis à la baïonnette, et leur tua quatre mille hommes, en prit huit cents, tous leurs canons, leurs mortiers et trois cents chariots d'artillerie. Cette victoire venait fort à point pour relever Boufflers de l'inaction peu glorieuse où il s'était tenu dans la campagne précédente, elle réjouit la cour par la dépêche du vainqueur dont le roi donna lui-même lecture aux dames et aux courtisans[13]. Mais elle fut stérile en résultats effectifs. Pendant tout le mois suivant les deux maréchaux restèrent à la portée de l'ennemi sans rien entreprendre, et le laissèrent libre de préparer de nouvelles tentatives contre l'évêché de Liège, la Gueldre et le Limbourg espagnol, qui devaient terminer la campagne à son avantage.

En Bavière, il fallut bien vite en rabattre des espérances qu'avaient fait naître la réunion de Villars et de l'électeur, et leurs embrassements si tendres. Ces deux hommes, qui s'étaient connus à Vienne et à Munich, n'étaient pas faits pour s'accorder. A en croire non-seulement leurs ennemis, mais eux-mêmes se dénonçant tour à tour, l'amour de l'argent en était la cause. L'électeur, dans ses lettres à Chamillard, impute à Villars de s'être enrichi par les contributions et les sauvegardes. Villars, dans une lettre à Louis XIV, ne craint pas d'accuser l'électeur de ne combiner ses opérations qu'en vue de l'argent qu'il espère en tirer pour payer ses dettes de jeu[14]. Il l'accuse de plus, et ici les preuves sont patentes, d'incertitude dans ses engagements et d'incapacité dans la guerre[15]. La jonction une fois opérée, il fut question d'en tirer sans délai le meilleur parti possible. Les deux alliés examinèrent deux plans : attaquer l'Autriche par le Tyrol après avoir conquis cette province et rallié l'armée de Vendôme, ou marcher directement sur Vienne en suivant le Danube par Passau et Lintz. Par le premier projet, on délivrait la France de la guerre d'Italie, qui coûtait par an trente millions et vingt mille hommes. Par le second on délivrait également l'Italie, et du premier coup on frappait l'Autriche au cœur ; le Danube ouvrait une route facile au canon, au matériel, à l'infanterie ; les villes du bas Danube étaient à peine gardées ; en arrivant à Vienne on pouvait se placer sur la contrescarpe, occuper la Léopoldstadt, et la ville même, avant que les armées autrichiennes d'Italie et du Rhin en fussent averties. Ce dernier projet était le préféré de Villars ; il l'a expliqué longuement à Louis XIV comme le plus grand et à la fois le plus sage et le plus solide ; à diverses époques il l'a repris, et proposé de nouveau comme le vrai moyen de mettre définitivement l'Empire à la raison ; huit ans plus tard il en regrettait encore l'abandon[16]. L'électeur sembla d'abord l'accueillir. Ulm fut choisi pour rendez-vous des troupes bavaroises et françaises et du matériel à embarquer sur le Danube ; pendant que l'électeur descendrait vers Passau, Villars se proposait de tenir tête sur la rive gauche à l'armée des Cercles. Quelle ne fut pas sa colère, quand au bout de quelques jours il apprit que l'électeur avait changé d'avis, et, pour l'échec d'un de ses détachements sous un petit château, se déterminait à marcher en Franconie. Était-ce une résolution honorable quand on était maitre du cours du Danube depuis sa source jusqu'à Vienne, quand la France amenait un renfort de cinquante bataillons et de soixante escadrons, quand il dépendait des deux alliés de faire trembler l'Autriche ? A force de représentations, Villars fit abandonner la marche sur Nuremberg ; mais au lieu de Passau, l'électeur s'entêta à essayer le projet du Tyrol, pendant que Villars couvrirait la Bavière contre les troupes des Cercles et celles que le prince de Bade allait sans doute ramener d'Allemagne. La marche du Tyrol, écrivait Villars au roi, peut nous produire de très-grands avantages, et M. de Bavière promet de revenir au projet de Passau ; mais les délais sont dangereux en pareilles matières. La suite ne lui donna que trop raison.

Au commencement, l'expédition du Tyrol réussit à souhait ; la surprise, le défaut de résistance sérieuse et l'audace des Français multiplièrent en quelques jours les conquêtes. A Kufstein, le feu mis par le commandant à quelques maisons du dehors se communiquait à la ville et au château ; cinquante grenadiers français se cachèrent dans les flammes pour escalader une des tours, la prirent et égorgèrent une partie de la garnison ; le commandant épouvanté s'enfuit avec le reste. Rattenberg, Hall, Insprück, la capitale, plusieurs forts étaient occupés du 14 au 26 juin. Villars, en recevant ces nouvelles, semblait croire au triomphe complet de l'électeur, à la ruine imminente de l'Autriche ; et comme il lui fallait toujours la part de son orgueil personnel et de sa cupidité, il demandait pour lui un duché en Bohême, quelque chose du trésor d'Insprück et surtout de ces belles statues d'argent des empereurs, plutôt que des curiosités naturelles ou historiques[17]. L'illusion ne fut pas longue. L'expédition du Tyrol allait avorter par l'insurrection des paysans et par le défaut de jonction de l'armée de Vendôme. Celui-ci, malgré l'affaiblissement flagrant des Autrichiens en Italie, malgré l'absence d'Eugène, n'avait rien entrepris de considérable pour achever l'expulsion des vaincus. Averti par Villars, dès le 7 juin, de l'assistance que l'électeur attendait de lui, il en était encore, au Milieu de juillet, à n'avoir fait aucun mouvement sérieux. Pressé par les ordres formels du roi, il n'atteignit qu'à la fin de juillet le premier village du pays de Trente dans le Tyrol italien. Arrêté par des résistances inattendues, par des soulèvements de paroisses, par des châteaux qu'il fallait prendre l'un après l'autre, il n'était pas arrivé à Trente le 27 août. Cependant l'électeur se voyait subitement ravir ses avantages. Il était parti d'Insprück le 19 juillet pour franchir le col du Brenner qui forme la communication entre les deux Tyrol, et s'avancer jusqu'à Brix en à la rencontre de Vendôme, lorsqu'il apprit que derrière lui le pays conquisse soulevait. Nouvelle vraiment surprenante, selon l'expression répétée de Villars, ces paysans, qui avaient laissé envahir leurs forts et leurs villes les mieux situées, avaient repris courage, et combattaient et mouraient comme des fanatiques. Un renfort autrichien leur étant arrivé de Passau, malgré l'opposition de l'archevêque de Salzbourg, en tournant par la Carinthie, ils égorgeaient dans Hall tout ce qu'il y était resté de troupes, sans pitié même pour les malades ; ils commençaient à couper aux Bavarois le retour sur Insprück. L'électeur ramené en arrière, après une marche de quatorze lieues sans s'arrêter, trouva les Tyroliens postés sur les deux rives de l'Inn. Il réussit à les débusquer par un combat de deux heures, grâce à la valeur d'un régiment français ; mais bientôt, soit par la trahison de ses officiers, soit par le désarroi de l'imprévu, la contrée lui échappa. A Ehrenberg, une troupe de paysans, soutenue par cent hommes à peine de troupes réglées, se fit rendre cette ville regardée comme imprenable et munie de quarante pièces de canon et de quarante mille sacs de grain ou de farine. Il ne restait plus à l'électeur que la forteresse de Kuffstein lorsqu'un corps. de six mille Danois, joint à deux régiments autrichiens, ayant pénétré dans la Bavière jusqu'à l'Isar, il fut contraint de quitter le Tyrol pour défendre ses États (fin d'août).

Par un double malheur, la position de Villars était devenue vraiment critique. Demeuré à la garde du Danube avec une armée réduite à vingt-cinq mille hommes par tout ce qu'il avait prêté à l'électeur, il avait vu les armées allemandes se concentrer contre lui ; d'abord le prince de Bade, n'ayant pu empêcher le passage des montagnes noires, avait quitté ses lignes de Buhl et Stolhofen, et rejoint au-delà du Necker le comte de Styrum, général des Cercles ; le margrave de Bayreuth, accru des Brandebourgeois, leur avait ensuite amené un renfort de dix-huit mille hommes : la plus grande partie des forces de l'Empereur et toutes celles de l'Empire étaient réunies contre les Français. Si k maréchal de Tal lard eût fait pour Villars ce que Bade avait fait pour Styrum, c'est-à-dire pénétré en Allemagne au secours de son collègue, la partie n'eût pas été trop inégale ; mais l'armée du Rhin, destinée au duc de Bourgogne, était réservée à d'autres opérations, et surtout à dégager tout à fait ce fleuve des Allemands par l'occupation de quelque ville importante, telle que Fribourg ou Brisach. Villars avait donc à tenir tête tout seul à deux armées dont la moindre était supérieure à la sienne. Par le poste avantageux qu'il avait choisi, par sa vigilance sur tous les points menacés, il parvint longtemps à les contenir sur la rive gauche du Danube ; leur première tentative pour passer le fleuve fut glorieusement réprimée par un vif combat à Munderkinghen (31 juillet) à six heures d'Ulm, où quatre mille chevaux allemands furent culbutés et rejetés dans le fleuve par un détachement français fort inférieur en nombre. On répand le bruit, écrivait Villars, de l'investissement de mon camp ; au moins faisons-nous de belles sorties, puisqu'on va battre quatre mille chevaux à dix-huit lieues de mon camp. Mais cette brillante affaire ne l'avait pas trompé sur le véritable état des choses. Il demandait au roi u ne diversion de l'armée du Rhin. Qu'on vienne à moi, disait-il, par le chemin que j'ai ouvert. Il ne fut pas entendu. L'armée du Rhin s'arrêta au siège de Brisach qu'elle investit le 15 août, et au moment où le Bavarois revenait vaincu du Tyrol, le prince de Bade, renforcé encore de quelques bataillons rappelés des lignes de Buhl et de Stolhofen, commençait à remonter le Danube pour le passer hors de la portée des Français.

Les embarras de Villars s'accrurent encore par le retour de l'électeur. Le prince, préoccupé avant tout des dangers qui menaçaient ses États par l'Inn, ne se prêta à aucune autre pensée. Il refusa de s'emparer d'Augsbourg avant que le prince de Bade eût le temps de s'en approcher ; il refusa de marcher à cet adversaire pour le combattre entre l'Iller et le Danube, ou entre l'Iller et le Lech. Pendant toutes ces hésitations, l'ennemi passa le Danube, surprit Augsbourg, et s'y plaça dans une position inexpugnable. Ces résultats étaient si graves, que Louis XIV prit un moment la résolution de renoncer à l'alliance de l'électeur et à la guerre d'Allemagne. Dans une lettre à Villars, résumant tous ces faits, la prise d'Augsbourg, les ennemis maîtres de la Bavière, l'armée française sans argent, sans magasin, et de beaucoup inférieure à celle du prince de Bade, il n'avait plus qu'un désir : Sauver son armée et conserver à l'électeur de Bavière ses États ; il invitait expressément l'électeur à faire son accommodement avec l'Empereur, et Villars à ramener les Français en France ; il promettait l'assistance du maréchal de Tallard pour assurer le retour en Alsace[18].

Villars ne reçut pas cette lettre assez tôt pour pouvoir y obéir. Une telle obéissance aurait d'ailleurs répugné à son énergie militaire. Déjà ses officiers généraux avaient agité la question de savoir s'il ne serait pas opportun et raisonnable de se retirer. Villars avait été d'avis de chercher encore une occasion de livrer bataille avec avantage. Le danger était sans doute trop grand de combattre les deus armées ensemble ; mais, si elles venaient à se séparer, l'une d'elles pouvait être attaquée avec succès. Le comte de Styrum, général des Cercles, donna cette occasion attendue en s'éloignant du prince de Bade par une manœuvre qui avait pour objet d'assaillir le principal camp des Français des deux côtés ; et se plaça près d'Hochstett, en plaine, en avant d'un bois. A cette vue, Villars rallie ses divers corps, appelle énergiquement l'électeur, et après une marche de nuit, engage le 20 septembre une bataille que l'opiniâtreté devait rendre plus décisive. Elle dura en effet de neuf heures du matin à quatre heures du soir. L'infanterie des Allemands était supérieure à la française da ns la proportion de quatorze contre neuf, et par une fermeté longtemps inébranlable elle permettait à leur cavalerie de se rallier toujours. Une attaque impétueuse la força bien de céder, mais sans se rompre comme par le sentiment que, une brèche une fois faite dans ses rangs, la dispersion entraînerait le massacre. Mais quand, à force de reculer, elle eut atteint la forêt et que la poursuite parut devenir moins facile, elle se rua dans cet asile en désordre, les uns jetant leurs armes, les autres escaladant les arbres. Les vainqueurs, emportés par la confiance du triomphe, entrèrent à la suite, et traquant les fuyards jusque dans la nuit, en réduisirent un grand nombre à se rendre ; l'épaisseur du bois sauva le reste. Quatre mille morts, quatre mille prisonniers, toute son artillerie consistant en trente-trois pièces de fonte, ses pontons, ses bagages, telles étaient les pertes de l'ennemi, et le bénéfice d'une victoire, la plus grande et la plus heureuse qui eût été remportée depuis longtemps. Le comte de Styrum s'arrêta au delà du Danube à Nordlingen pour rallier ses débris.

A quelques jours de distance, les affaires de la France s'étaient relevées dans le bassin du Danube et sur les bords du Rhin. Le 7 septembre, le due de Bourgogne, dirigé par Vauban, avait reconquis Brisach après 14 jours seulement de tranchée ouverte. Cette ville, ancienne conquête de Richelieu, que Louis XIV avait été contraint d'abandonner par la paix de Ryswick, redevenait un poste avancé de la France en Allemagne sur le haut Rhin. Il n'était pas téméraire d'attendre aussi d'heureuses conséquences de la victoire d'Hochstett ; elles furent pourtant amoindries en partie par la faute de Louis XIV, et beaucoup par les incertitudes éternelles de l'électeur de Bavière. Malgré le bruit que faisait la victoire.de Villars, une augmentation de forces lui était indispensable, et il ne cessait de la réclamer. Le roi, qui était tout prêt un mois plus tôt à expédier des troupes par les montagnes noires pour assurer la retraite, s'imagina que Villars vainqueur n'avait plus besoin d'assistance pour soutenir ses avantages. Il ordonna au maréchal de Tallard d'aller assiéger Landau, afin de réparer un affront de l'année précédente. L'électeur de son côté ne savait auquel entendre ; sa femme, ses ministres le pressaient de se réconcilier avec l'Empereur. Selon Villars, la victoire d'Hochstett, qui pouvait lui être un encouragement à continuer la guerre, n'avait pas tant effrayé l'Empereur que l'électrice et tout Munich. Si ce prince ne cédait pas à la tentation, il chicanait Villars sur ses plans de guerre et perdait le temps à vouloir et à ne vouloir plus. Il voulait par exemple prendre Augsbourg pendant que l'armée du prince de Bade, encore campée sous cette ville, ne pouvait être attaquée impunément. Villars rejeta cette imprudence ; l'électeur à son tour rejeta le projet du général français qui consistait à se rapprocher des montagnes noires pour établir une communication avec la France ; à son avis, tous, Bavarois et Français, devaient se cantonner dans la Bavière pour lui assurer la conservation de ses places. Il se refusa même à aller attaquer le prince de Bade qui, sorti de ses ligues d'Augsbourg, occupait maintenant un poste désavantageux. Villars poussé à bout exposa ces difficultés au roi et sollicita son rappel. Louis XIV y consentit ; il permit au vainqueur d'Hochstett de rentrer en France, et transporta son commandement au comte de Marcin, créé tout exprès maréchal de France, comme au plus capable de s'entendre avec l'électeur de Bavière.

Néanmoins tel avait été l'effet de la victoire d'Hochstett, que ni Bade ni Styrum ne furent en état de rien entreprendre. Sur le Rhin, le siège de Landau par Tallard commença le 18 octobre et se continua sans que le prince de Bade fit aucun mouvement pour le troubler. Ce fut de l'armée ennemie des Pays-Bas que vint un essai de diversion. Le prince de Hesse, ralliant sur sa route les garnisons des villes et les troupes palatines, était arrivé à Spire avec 29 bataillons et 64 escadrons. Tallard, ne se fiant pas assez à sa contrevallation pour y attendre le choc, en sortit résolument avec la moitié de ses troupes et marcha vers Spire (14 novembre). L'ennemi n'était pas encore entièrement rangé en bataille ; il l'attaqua sans délai. Sauf un moment d'avantage de la cavalerie allemande sur la gauche des Français, la victoire ne fut pas douteuse. Ce fut le triomphe de l'infanterie et de la baïonnette ; l'habileté française à manier cette arme rompit et coucha par terre l'infanterie allemande. La perte du prince de Hesse monta à près de dix mille hommes, quatre mille morts, le reste blessés ou prisonniers ; leurs drapeaux, leurs munitions et trente pièces de canon demeurèrent au vainqueur. En rentrant dans ses lignes de Landau, Tallard apprit que les assiégés, désespérant d'être secourus, avaient déjà battu la chamade. Il reprit possession de la ville le 17, puis il fit occuper Spire et Gemersheim abandonnés par les vaincus. Par là il achevait de mettre en sûreté la basse Alsace et s'assurait le moyen de protéger la Sarre, d'étendre les contributions et de menacer Philipsbourg[19]. Louis XIV, en apprenant ces bonnes nouvelles par le fils de Tallard, lui dit : Vous m'avez fait un des plus grands plaisirs que j'aie eus de ma vie, et j'espère vivre assez pour vous en faire beaucoup[20].

La Bavière elle-même lui donna une égale satisfaction. L'électeur avait une rancune personnelle contre Augsbourg, parce que cette ville, lui ayant autrefois promis la neutralité et livré même des otages, avait accueilli sans résistance le prince de Bade. Depuis que ce prince s'était éloigné d'Augsbourg, tout en y laissant une garnison de six mille hommes, le Bavarois avait à cœur de la reprendre. Il décida Marcin à cette entreprise, et le prince de Bade désorienté ne songea pas à l'entraver. L'électeur commença l'investissement le 4 décembre, ouvrit la tranchée le7, et, parla crainte de la mort de leurs otages, obligea les bourgeois, en dépit de la garnison, à capituler le 13. Il leur imposa pour leur punition de loger dans leurs murs et de nourrir à leurs dépens seize bataillons et dix escadrons de troupes françaises. Cette occupation couvrait la Bavière à l'ouest et livrait aux Français pour leurs quartiers d'hiver tout le pays entre le Danube, le Lech et l'Iller. Animé par cette bonne fortune, Louis XIV, à l'instigation de Villars, demanda pourquoi on n'irait pas à l'est jusqu'à Passau, manqué au commencement de la campagne. Les circonstances étaient favorables. Depuis plusieurs mois, l'Autriche sentait la Hongrie prête à lui échapper de nouveau ; depuis cinq mois on recevait de ce côté, à la cour de France, les nouvelles les plus encourageantes ; on se flattait de retrouver en Hongrie l'ennemi domestique de l'Autriche, l'ancien auxiliaire. Ragoczi, échappé de captivité (voir plus haut, ch. XXXVII, § III), réfugié pendant quelque temps en Pologne, était revenu prendre le commandement des insurgés, et il avertissait le roi de ses progrès[21]. Le 13 décembre, le jour même de la prise d'Augsbourg, on disait à Versailles qu'il avait vaincu les Impériaux à huit lieues de Vienne, et huit jours après, qu'il avait failli faire l'Empereur prisonnier. L'Empereur effrayé faisait rapporter de Presbourg à Vienne la couronne de Saint-Étienne, et délibérait s'il ne sortirait pas de Vienne, s'il irait à Prague ou à Gratz, en Styrie[22] : il se crut au moins obligé à retirer ses troupes de Passau et des retranchements qui défendaient l'Autriche du côté de l'Inn. L'électeur et Marcin, informés de l'occasion et poussés par les désirs du roi, se hâtèrent d'en profiter, et le 8 janvier 1704, l'armée d'Allemagne terminait la campagne par l'occupation de Passau.

Cette supériorité de la France en Allemagne était atténuée un peu par les avantages des alliés aux Pays-Bas. Quelques jours après la bataille d'Hochstett (27 septembre), Marlborough avait entamé la province espagnole de Limbourg par la prise de cette ville, et le 7 décembre il achevait la conquête de la Gueldre par celle de la capitale. Mais ces dédommagements, dont la suite a seule révélé l'importance, n'auraient eu que peu d'effet, si Louis XIV avait pu pousser jusqu'au bout l'expédition qu'il avait voulue avec opiniâtreté, et compléter l'abaissement de l'Empereur en forçant ce concurrent personnel à renoncer à la guerre dont il était le principal prétexte. Il faut chercher ailleurs, et dans l'année même 1703, la cause des événements qui, en sauvant l'Empereur, ont déterminé les désastres de la France.

D'abord à l'intérieur la guerre des Camisards consumait sans utilité une partie notable des forces militaires. Pour ce qui regarde les affaires du Languedoc, écrivait Louis XIV à Tallard au mois de mai, j'ai tout lieu d'espérer qu'elles finiront avant la fin du mois prochain ; mais je n'en retirerai aucune troupe que le calme n'y soit entièrement rétabli, et que je ne sois assuré que ces gens-là n'aient plus de secours à espérer de mes ennemis[23]. Or rien n'était terminé à la fin de l'année. Cette guerre renaissait à chaque instant d'elle-même. C'était une série d'insurrections par villages, et d'apparitions subites de bandes, qui déconcertaient tous les calculs ; les insurgés avaient des intelligences dans quelques grandes villes comme Nîmes, et dans plusieurs châteaux où ils trouvaient un asile contre la poursuite ou des renseignements exacts sur les plans de l'ennemi. Le maréchal de Montrevel, impitoyable pour les crimes de révolte et de pillage, multipliait les rigueurs contre les coupables, les tuant sur place dans les rencontres, les livrant sommairement aux tribunaux et aux exécuteurs de la justice, et condamnant des villages entiers à émigrer comme on avait fait dans le Palatinat. Les Camisards, furieux de cette répression, ne reculaient devant aucune violence pour se venger ou pour échapper, ravageant les églises, éventrant des femmes grosses, faisant rôtir des prêtres et des enfants[24], et achevant leurs propres blessés pour les empêcher de tomber aux mains du vainqueur[25]. Au milieu de ce chaos, la cupidité poussa certaines gens à s'organiser, sous une apparence de zèle catholique, en cadets de la croix ou Camisards blancs, qui profitaient de la confusion pour s'enrichir ; Montrevel n'hésitait pas à les désavouer : Ils sont, écrivait-il[26], quasi aussi fâcheux que les autres ; ils ne cherchent qu'à voler et à faire impunément un pillage universel, sans chercher les rebelles en armes ; ils tuent sans règle et sans mesure. Par représailles, des rangs des rebelles sortirent les Camisards noirs commandés par un boucher d'Uzès, composés de déserteurs, de voleurs de grands chemins, de galériens échappés dont les crimes faisaient frémir Cavalier lui-même. La désolation planait sur tout le pays des montagnes, sans qu'il fût permis d'en entrevoir la fin. L'espérance d'être soutenus par l'étranger ranimait sans cesse la résistance. Il leur venait des prédicants de Genève, on saisit des officiers hollandais qui leur apportaient de l'argent[27]. Tout à l'heure le duc de Savoie allait leur expédier des armes et des renforts de réfugiés.

Au dehors, les alliés avaient acquis, dès le mois de mai, l'adhésion du Portugal. La France et Philippe V se flattaient d'avoir rattaché ce royaume à leur cause ; mais, à en croire un manifeste du roi Pierre II, la France avait négligé de lui envoyer des vaisseaux pour le couvrir contre les puissances maritimes, et l'Espagne, après lui avoir promis l'abandon des bords de la Plata et une indemnité pour sa compagnie des Indes, n'avait pas tenu ces engagements[28]. Les alliés avaient besoin du Portugal pour introduire l'Autrichien en Espagne et pour guerroyer Philippe V sur son propre territoire. Ils gagnèrent le roi Pierre II par un Espagnol disgracié, l'amirante de Castille, que Philippe V avait écarté comme partisan de l'Autriche[29]. Le Portugais oublia qu'il devait son indépendance au concours de Louis XIV ; il allégua pour se justifier, malgré l'antipathie si connue des Portugais et des Espagnols, l'origine commune des deux peuples et la nécessité de délivrer une patrie commune de l'oppression étrangère ; cette plaisante raison est formulée en propres termes dans le préambule du traité. Séduit par les apparences de quelques avantages pour lui-même, il accepta d'être l'instrument de la politique des alliés et bientôt du commerce anglais. Un premier traité (13 mai 1703) avec l'Empereur, l'Angleterre et les Provinces-Unies, lui promit la protection des flottes anglaise et hollandaise, la satisfaction de ses griefs sur le continent et ailleurs, et l'augmentation de son territoire aux dépens de l'Espagne par l'abandon de Badajoz, Albuquerque, Valencia et Alcantara en Estramadure, de Garda, Tuy, Bajona et Vigo en Galice. A ces conditions il s'engagea à tenir sur pied une armée de 28.000 hommes pour faire la guerre en Espagne, et à recevoir l'archiduc Charles en Portugal avec tous les secours que les alliés devaient à ce prince[30] ; ce qui était ouvrir ses ports aux troupes, aux approvisionnements, à l'artillerie, qu'il plairait désormais aux ennemis de la France d'expédier par l'Atlantique. La coalition s'assurait ainsi une nouvelle route et un nouveau théâtre de guerre. A la suite de ce bénéfice commun, les Anglais ne laissèrent pas échapper l'occasion de s'en réserver un autre pour eux seuls. Par un traité particulier, leur négociateur Methuen, dont le nom en a gardé une célébrité diplomatique, stipula qu'à l'avenir l'Angleterre prendrait tous les vins de Portugal en échange de ses manufactures : de là date l'assujettissement du Portugal au commerce anglais ; la perspective d'un débit certain changea bientôt en vignes toutes les terres du royaume, et la présence des produits de l'industrie anglaise étouffa toute industrie nationale.

On hésita longtemps en France à croire à la défection du Portugal ; on ne s'y résigna qu'au bout de deux mois[31]. On acquit ensuite, par quelques démonstrations des alliés, la certitude que cette défection était le prélude d'une guerre en Espagne. En septembre l'Empereur, par un acte solennel, transportait ses droits sur la monarchie espagnole à son second fils l'archiduc Charles. Un seul homme, disait-il, ne pouvant gouverner tant d'États à la satisfaction de tous, il donnait à l'Espagne un roi qui pût résider au milieu de ses sujets, et qui ne fût pas appelé à régner à Vienne[32] ; et il l'acheminait par lé Palatinat vers la Hollande et l'Angleterre, d'où il passerait en Portugal. Au même moment, les Anglais et les Hollandais répandaient en Espagne des placards où ils se vantaient d'arriver bientôt en ce pays pour le délivrer de la servitude de la France, et enjoignaient à tous les Espagnols, sous peine de mort, de se soumettre à la maison d'Autriche[33]. Louis XIV, après la victoire de Spire et la reprise de Landau, se voyait contraint de former une armée de secours pour défendre son petit-fils chez lui, et de la mettre en marche au mois de décembre. Au moins il trouvait pour la commander Berwick, dont cette mission allait révéler les talents.

Au Portugal se joignait la Savoie : la défection de Victor-Amédée, depuis longtemps prévue et attendue à la première occasion, éclata enfin par les mesures mêmes que Louis XIV prit pour la prévenir. Convaincu, après une trop longue hésitation, que le renard de Savoie ne pouvait se résigner à être resserré et comme enfermé entre les États de France et ceux d'Espagne, Louis XIV avait d'abord (juin 1703) signalé à Vendôme la nécessité d'empêcher un débarquement des Hollandais et des Anglais en Piémont. Pendant l'expédition du Tyrol, il acquit la certitude que Victor-Amédée avait pris des arrangements avec l'Empereur et s'engageait à dépouiller sa fille, la reine d'Espagne, pour son propre agrandissement. Vendôme, qui commençait à bombarder Trente, reçut l'ordre (10 septembre) de rentrer en Lombardie, de désarmer les corps piémontais qui servaient dans l'armée française, et de marcher sans délai vers le Piémont pour réduire le duc de Savoie à l'impuissance[34]. Le désarmement s'accomplit sans difficulté ; les soldats demeurèrent prisonniers, les armes et les chevaux passèrent au service des Français (29 septembre). Le 16 octobre Vendôme paraissait sur la Sesia, un affluent du Pô, entre le Piémont et le Milanais. On a parlé dans le temps d'une lettre du roi à Victor-Amédée, ainsi conçue[35] : Monsieur, puisque la religion, l'honneur, l'intérêt, l'alliance et votre propre signature ne sont rien entre nous, j'envoie mon cousin le duc de Vendôme à la tête de mes armées pour vous expliquer mes intentions. Il ne vous donnera que vingt-quatre heures pour vous déterminer. Louis. Si cette lettre n'est pas suffisamment authentique, les intentions dont elle parle étaient expresses et décisives. Le roi exigeait la réduction (le l'armée piémontaise à six mille hommes, conformément à la paix de Ryswick, et la remise aux mains des Français de deux places de sûreté jusqu'à la fin de la guerre. Le Savoyard, surpris, sans moyen de défense, ajourna sa réponse sous des protestations réitérées de son dévouement au roi ; mais à la faveur de ces délais, il pressait l'arrivée des Autrichiens qui, en dépit des difficultés, parvinrent à le sauver.

Les Autrichiens, commandés par le comte de Stahrenberg à la place d'Eugène, s'étaient tenus pendant toute l'année entre la Secchia et le Panaro, dans d'inexpugnables retranchements. Vendôme, en partant pour le Piémont, avait laissé devant eux une partie de l'armée française sous le commandement de Vaudemont. C'était de cette position éloignée et surveillée que le duc de Savoie attendait les secours. Le premier effort de Stahrenberg ne fut pas heureux. Deux mille cavaliers qu'il envoya comme avant-garde par la rive droite du Pô furent surpris par Vendôme (25 octobre), tués ou dispersés vers Gènes qui refusa de les recevoir ; il n'en arriva pas quatre cents à Victor-Amédée. D'un autre côté le maréchal de Tessé, gouverneur du Dauphiné, entra dans la Savoie (novembre) et en détermina la soumission par la prise de Chambéry[36]. Victor-Amédée semblait donc perdu ; tout à coup il échappa par une négligence de Vendôme. Celui-ci n'avait pas pris la peine de vérifier la situation des Français sur la Secchia ; il ne s'était rendu compte ni de leur dépérissement, ni des renforts reçus par l'armée ennemie. Dans les derniers jours de décembre, Stahrenberg franchit la Secchia sans opposition avec la plus grande partie de ses troupes, et arriva rapidement dans le duché de Parme. Vendôme déconcerté ne pouvait croire à une marche vers Turin à une si grande distance. Il supposa une ruse de guerre, il poursuivit mollement l'agresseur, s'occupant plus de lui barrer le retour que d'entraver sa marche en avant. Quand il comprit enfin la vérité, il essaya de réparer ses retards, de devancer l'ennemi, de lui disputer le passage des défilés ou des rivières si nombreuses dans ces contrées. Chaque fois il leur tua du monde, il leur prit des traînards, des bagages, et il envoyait au roi la relation de ces petits succès, qui rassuraient la cour[37]. Mais chaque fois aussi Stahrenberg passait ; au prix de quelques pertes, peut-être même de quatre mille hommes, selon les bulletins réunis de Vendôme, il atteignait son but. Le 16 janvier 1704, il rejoignit à Alba le duc de Savoie et lui remit une armée capable d'arrêter au moins pour un temps les entreprises des Français.

Tel fut le dernier complément de la Grande Alliance. Ébauchée par un traité de Guillaume III avec le Danemark, elle s'était organisée par l'accord de l'Angleterre et de la Hollande avec l'Empereur ; elle s'était ensuite étendue à la Prusse et aux Cercles de l'Empire ; elle se rattachait enfin le Portugal et la Savoie. De quelque côté que Louis XIV portât ses regards, il ne voyait autour de lui que des ennemis déclarés et un protégé onéreux. Huit nations étaient réunies contre lui, et, si l'Espagne ne lui faisait pas la guerre, il avait à faire la guerre pour l'Espagne ; le cercle et le théâtre des hostilités s'étendaient avec le nombre de ses adversaires. La supériorité, qu'il avait en somme conservée depuis trois campagnes, lui échappait par l'impuissance de la soutenir ; l'heure des désastres allait sonner.

 

 

 



[1] Voir sur ce sujet : Ernest Moret, Quinze Ans du règne de Louis XIV. Il a donné à cet épisode de l'histoire générale un développement impartial, où, à l'intérêt qu'il porte aux Camisards, se joint l'aveu des excès qu'ils ont commis. Voir aussi les Mémoires de Villars et de Berwick dont nous nous servirons plus bas. Villars surtout parait assez digne de foi par son indifférence même dans la question religieuse, qui lui laisse en quelque sorte plus de liberté pour dire la vérité aux deux partis.

[2] Dangeau, 27 février 1703 : Le roi entra dans son cabinet, où il fit demeurer monseigneur le duc de Bourgogne et les maréchaux de Boufflers et d'Harcourt. Il y fut question d'ôter les piques à l'infanterie, qui est un parti qu'apparemment on prendra, et qu'on prit en effet.

[3] Mémoires de Choisy, livre VII.

[4] Mémoires de Saint-Simon, tome II, chapitre XXXV.

[5] Louis XIV à Villars, 19 mars 1703 : Pelet, tome III, page 538.

[6] Louis XIV à Vendôme, 11 décembre 1712 : Pelet, tome III, page 150.

[7] Mémoires de Villard.

[8] Dangeau, 12 février 1703 : Le roi dit à Vauban : Songez-vous, monsieur le maréchal, que cet emploi est au-dessous de votre dignité !Sire, lui répondit-il, il s'agit de vous servir, ce que je crois pouvoir faire utilement en cette occasion. Je laisserai le bâton de maréchal à la porte, et j'aiderai peut-être à la prise de la place. Plus vous nous élevez et plus nous devons avoir envie de vous servir. Le roi ne veut pas lui permettre d'y aller, mais il insiste encore.

[9] Ne pas confondre avec le petit Neubourg des bords du Rhin, que Villars avait occupé avant Friedlingen.

[10] Mémoires de Villars.

[11] Il écrivait à Chamillard, 27 mars 1703 : On commence par me gronder ; ce n'est pas la bonne manière. Il fallait me mander : Le roi sait que votre zèle et un désir de gloire vont, tellement avant tout dans votre cœur, que les récompenses ne sont pas nécessaire pour vous exciter. Cependant, comme rien n'est plus important que la jonction, Sa Majesté envoie à M. l'électeur de Bavière un brevet de duc pareil à ceux qu'elle a déjà donnés à MM. de Boufflers et d'Harcourt, pour vous le remettre aussitôt que son armée aura rejoint les troupes bavaroises. Après cela, allez vers l'Autriche, divisez les forces de l'Empire et forcez-le à la paix...

Voilà, monsieur, des paroles nécessaires, non pour augmenter le zèle, il est toujours égal, mais pour que votre général ait l'esprit plus libre, le cœur satisfait, et que, jugeant de sa fortune dans la guerre par celle qu'il trouve dans on élévation, il ne croie rien impossible... Pelet, tome III, page 547.

[12] Louis XIV à Villars, 19 mars 1703 : Pelet, tome III, page 538.

[13] Dangeau, 3 juillet 1703. Voir la relation de Boufflers : Général Pelet, tome III, page 66.

[14] Pelet, tome III, page 587 : Villars explique au roi que l'électeur est pressé de commencer une lutte où ses troupes seront réunies à celles du roi, parce que les conventions portent que, quand l'armée du roi est tout à fait jointe à la sienne, c'est à lui d'imposer, et que, quand elle est séparée, c'est au maréchal de Villars. Je dois dire à Votre Majesté, pour qu'elle soit instruite de tout, que M. de Bavière doit à Monasterol, d'argent de jeu, plus de sept cent mille livres, trois cent mille écus au général d'Arco et autant à Bombarde ; qu'il n'y a pas un seul de ces gens-là qui ne compte se faire payer ou sur les subsides ou sur les contributions.

[15] Les lettres où se trouvent ces appréciations ont été trouvées dans les Archives de la Guerre par Ernest Moret.

[16] Lettres de Villars au roi, 16 mai et 17 juin 1703 ; Mémoire de Villars à l'électeur : général Pelet, tome III, pages 582, 622, 951 ; lettre de Villars à Mme de Maintenon, en 1711.

[17] Conformément à notre habitude de montrer les grands hommes WU toutes leurs faces, nous citerons quelques passages des Mémoires de Villars, année 1703. Il écrivait à l'électeur : Comme vous disposerez des couronnes, il faudra bien que votre petit serviteur ait un duché... Il me semble qu'il y a un trésor à Insprück ; que V. A. E. m'en donne quelque chose, mais du bon. Je ne veux pas de curiosités, comme quelques peaux de bêtes extraordinaires, de ces épées qui ont coupé cinq cents têtes. Je voudrais quelques beaux rubis des anciens ducs d'Autriche. Par exemple, on m'apprend qu'il y a je ne sais combien de belles statues d'argent des empereurs. Je supplie très-humblement V. A., dans la part qu'elle voudra bien me taire du trésor, qu'il y ait plutôt de ces statues que quelques gros lézards ou crocodiles.

[18] Cette lettre du 25 septembre 1703 répond à une lettre de Villars du 10. Elle était écrite sous l'impression de la nouvelle de la prise d'Augsbourg, et avant que le roi eût pu recevoir la nouvelle de la bataille d'Hochstett, qui est du 20 septembre. Pelet, tome III, page 985.

[19] Pelet, tome III, pages 484-488.

[20] Dangeau, Journal, 20 novembre. Saint-Simon lui-même est obligé de louer l'ordre que Tallard donna à la victoire.

[21] Dangeau, Journal, 13 décembre 1703 : Le prince Ragotski écrivait, il y a quelque temps, à M. de Bonnac, notre envoyé auprès du roi de Suède en Pologne ; il lui mandait que ses affaires allaient fort bien en Hongrie, et qu'il y avait lieu d'espérer d'heureux succès, ayant été joint par les plus grands seigneurs du pays.

[22] Dangeau, Journal, passim de juillet à décembre. Pelet, Mémoires militaires, tome III, pages 715 et 717.

[23] Pelet, tome III, page 381.

[24] Mémoires de Berwick.

[25] Burnet, Histoire de sa vie, 1703 : Il sait ces choses et plusieurs autres de celui que la reine Anne avait envoyé dans la contrée pour connaître l'état des affaires.

[26] Archives de la guerre : lettre de Montrevel à Chamillard, citée par Ernest Moret, tome Ier.

[27] Dangeau, 14 septembre 1703.

[28] Voir ce manifeste dans Dumont, tome VIII.

[29] Voir, entre autres témoignages, Burnet, en 1703.

[30] Texte du traité dans Dumont, tome VIII.

[31] Dangeau, 9 juillet 1703.

[32] Dumont, Corps diplomatique, tome VIII.

[33] Dangeau, 4 octobre 1703.

[34] Pelet, tome III, pages 222 et 270.

[35] Œuvres de Louis XIV, tome VI.

[36] Dangeau, 19 novembre 1703.

[37] Voir Dangeau, derniers jours de décembre 1703 et janvier 1704.