CETTE grande nouvelle du rétablissement de l'empire d'Occident porta, comme Charlemagne l'avait prévu, le trouble et l'effroi à Constantinople, et fit trembler Irène sur le trône qu'elle avait enlevé à son fils avec la vie. La politique intérieure ne lui fournissait déjà que trop d'embarras et d'affaires. C'était la première fois qu'on voyait une femme assise en son nom au trône des Césars, et c'était la première fois qu'une mère avait régné pour avoir assassiné son fils. Nos Frédégonde et nos Brunehaut avaient gouverné, mais sous nom de leurs fils : mères dénaturées, elles n'avaient pas toujours respecté leur propre sang, mais elles n'en avaient point hérité ; le crime avait quelquefois prolongé leur puissance, mais il ne leur avait pas acquis la propriété du trône, et le droit héréditaire n'avait reçu aucune atteinte. Irène après avoir puni son fils, par un supplice ignominieux, du projet de monter sur le trône qui était à lui, l'avait puni, par une mort cruelle, d'avoir occupé ce trône pendant quelques années, et le prix de tant de violences avait été d'obtenir l'empire de son chef, et en son nom ; c'est peut-être le plus grand scandale qui ait été donné au monde ; mais il était près de cesser, le sang de son fils criait vengeance, et allait l'obtenir ; la haine des peuples était encore renfermée, mais elle était près d'éclater. Irène crut qu'a cette haine des peuples allaient se joindre les entreprises de Charlemagne ; elle crut que le moment était arrivé où il allait tirer vengeance de l'appui qu'elle avait prêté contre lui au prince lombard Adalgise et au duc de Bénévent Arichise. Elle regarda l'Italie comme perdue pour elle, ne doutant point que la réunion entière de cette contrée sous l'obéissance de Charlemagne ne fût le grand objet de ce renouvellement de l'empire d'Occident, et s'estimant peut-être heureuse dans son âme, si elle en était quitte pour la perte de Naples et de la Sicile. Charlemagne n'était pas fâché qu'elle eût ces inquiétudes ; mais il ne voulait pas que, perdant toute espérance de négociation et d'accommodement avec lui, elle prît le parti désespéré d'armer toutes les forces de l'Orient contre l'Occident, et d'allumer une guerre furieuse, dont l'idée commençait à lui déplaire et à l'alarmer lui-même. Cette disposition d'esprit explique les mouvements qu'il fit paraître et les discours qu'il tint, lorsque le pape lui posa sur la tête la couronne impériale, et lorsque le peuple le proclama ; cet air de surprise et ce mécontentement affecté entrent naturellement dans ce plan. Charlemagne voulait qu'on publiât, et qu'on crût, s'il était possible, qu'il n'avait eu aucune part au grand événement dont il avait été l'objet, et qu'il l'a-voit même improuvé comme un effet indiscret de la reconnaissance du pape, et de l'effervescence du peuple : cette idée laissait à Irène des espérances de conciliation, et prévenait les résolutions extrêmes. En effet, Irène, qui ne recourait guère à la force qu'après avoir essayé l'artifice, imagina un moyen très heureux de tirer parti de la conjoncture, et de faire tourner à l'affermissement de son autorité cette même entreprise qui semblait faite pour la détruire. Charlemagne était veuf, depuis quelque temps, de Luitgarde sa cinquième femme ; Irène était depuis longtemps veuve et, libre ; elle était belle encore au-delà de ce que son âge semblait permettre ; elle offrit sa main à Charlemagne : elle lui portait en dot tout ce qu'il aurait pu vouloir conquérir, elle joignait l'empire d'Orient à l'empire d'Occident ; elle joignait le grand nom d'Irène au grand nom de Charlemagne ; elle sentait quel secours la politique intérieure allait tirer de la politique extérieure ; combien la gloire de Charlemagne, qui n'était pas, comme la sienne, souillée par le crime, combien sa puissance, chère à ses peuples, redoutable ou respectable à toutes les nations, imposeraient aux sujets de sa femme : il est à présumer que, clans le traité qui devait se faire, Irène aurait pris des mesures pour s'assurer l'exercice de cette autorité à laquelle elle avait tout sacrifié ; que ces époux auraient été souvent séparés par les soins qu'entraînait l'administration de leurs vastes États ; qu'enfin Charlemagne, dans les États de sa femme, n'aurait été que son lieutenant. Il était assez difficile de prévoir quel ordre de succession allait naître de cette réunion de l'empire d'Occident et de l'empire d'Orient dans la main de Charlemagne : tant que la race de Léon l'Isaurien avait subsisté, la succession n'avait pas eu d'incertitude ; Constantin Copronyme avait succédé sans difficulté à Léon l'Isaurien son père, Léon Porphyrogénète à Constantin Copronyme, et Constantin Porphyrogénète, ou Irène sous son nom, avait succédé à Léon : mais Irène n'avait plus de fils, elle avait immolé ce fils unique à son ambition et au maintien de son autorité ; les peuples allaient-ils, après la mort d'Irène, rentrer dans les droits d'élection, et se nommer des maîtres, ou l'empire d'Orient allait-il passer avec l'empire d'Occident par droit héréditaire dans la famille de Charlemagne ? Cette question était ce dont Irène s'occupait le moins : sa politique n'avait qu'elle seule pour objet ; elle voulait, ne disons pas régner, mais être la maîtresse à Constantinople, tout le reste n'était rien pour elle. Irène ne voyait dans Charlemagne qu'un instrument utile à ses desseins ; ses intérêts, toujours uniquement personnels, étaient séparés de ceux de l'empire, comme ils l'avaient été de ceux de son fils ; elle voyait tomber cet empire en lambeaux, et ne paraissait pas s'en inquiéter : Aaron Rachid lui imposait tribut, et dédaignait de le conquérir ; les Arabes et les Tartares le déchiraient à l'envi : un prince de cette dernière nation faisait impunément des courses jusqu'à Constantinople, et enlevait dans l'écurie même de l'impératrice les chevaux réservés pour son usage. Irène dissimulait tous ces affronts ; mais le ministre Storace et l'eunuque Aétius, s'armant contre elle de ses bienfaits, et lui enviant l'autorité dont elle était si jalouse, la faisaient trembler ; une mort prompte, et arrivée très à propos pour ses intérêts, l'avait délivrée de Storace ; la qualité d'eunuque éloignait sans retour Aétius du trône, et ce préjugé, que le trône ne pouvait être rempli par un eunuque, parce que le vœu public attendait de chaque empereur un héritier né de lui, était peut-être le principe de la confiance des empereurs dans cette espèce d'hommes, qui ne pouvaient être pour eux un objet de jalousie, ni dans leurs plaisirs, ni dans leur ambition[1] ; mais Aétius avait un frère incapable de gouverner, et propre uniquement à lui fournir un nom sous lequel il pût régner lui-même. Aétius était alors le grand objet de l'inquiétude d'Irène : n'ayant pu s'en défaire ainsi que de Storace, elle imagina de lui opposer toute la puissance de Charlemagne, et de se jeter entre les bras de ce conquérant. C'était peut-être à Charlemagne à balancer sur cette alliance avec l'empoisonneuse d'un mari, et la meurtrière d'un fils ; peut-être devait-il craindre de prendre pour femme celle qu'il avait Craint de donner pour belle-mère à sa fille. Il ne paraît pas que cette considération l'ait arrêté ; il était dans son caractère ambitieux et intrépide qu'un grand empire lui parût plus à désirer que la femme la plus criminelle ne lui paraissait à craindre ; ce fut donc de bonne foi et avec beaucoup d'ardeur qu'on traita de part et d'autre cette grande affaire. Aétius, témoin de la négociation, n'oublia rien pour la traverser ; ses émissaires répandaient dans le public que Constantinople allait être assujettie à Paris ou à Aix-la-Chapelle, et que l'empire romain allait être dépendant d'un empire barbare, élevé sur les ruines des Saxons dans les forêts de la Germanie. Ces discours, et plus encore l'évidence des intérêts, firent impression sur les esprits ; mais Aétius ne recueillit point le fruit de ses intrigues ; on ne voulait être gouverné ni par un eunuque, ni par un étranger, et on se lassait de l'être par une femme. On parut cependant se contenter d'abord d'avertir Irène sans la rejeter : les grands de Constantinople lui déclarèrent sans détour qu'il fallait qu'elle renonçât à l'alliance de Charlemagne ; qu'en lui permettant de s'asseoir sur le trône des Césars, on n'avait pas prétendu lui donner le privilège d'en disposer à son gré, encore moins d'anéantir l'empire, en le soumettant à une puissance étrangère et ennemie ; que la nation s'était réservé tous- ses droits, et voulait les exercer lorsque le trône serait vacant. Mais comme on comptait peu sur l'effet que ces remontrances pourraient produire dans son âme, or conspira contre elle, et bientôt ce fut moins une conspiration qu'un soulèvement général. Les regards des grands s'abaissèrent sur un homme qui n'avait jamais élevé les siens jusqu'à l'autorité suprême ; son manque et de crédit et d'ambition fut son titre le plus puissant ; c'était Nicéphore, chancelier de l'empire. Le peuple et les soldats le proclamèrent empereur, le patriarche le couronna dans l'église de Sainte-Sophie, et Irène, prisonnière dans son palais, n'eut plus de gardes que pour l'observer, et non pas pour la défendre. Nicéphore parut devant elle plutôt comme un sujet que comme un maître ; il protesta qu'il la respecterait toujours comme son impératrice et comme la bienfaitrice de l'empire ; mais il finit 'par lui demander les trésors des empereurs Constantin Copronyme et Léon Porphyrogénète, dont elle s'était, disait-on, emparée. Qu'en veux-tu faire ? lui dit Irène ; ils m'ont trahi comme mes sujets. Je les prodiguais ces trésors pour conserver l'empire, et l'empire m'a échappé. Nicéphore, toujours respectueux, mais inflexible sur un article si important, lui fit entendre que sa liberté dépendait de sa condescendance ; il jura sur la vraie croix, serment ordinaire à Constantinople, qu'à ce prix elle serait traitée et servie en impératrice dans son palais : elle obéit, ne pouvant résister, et remit à Nicéphore ce qu'elle appelait le reste des trésors de l'empire. Nicéphore ne crut pas, ou ne voulut pas croire cette restitution bien complète, en conséquence, ne se jugeant point lié par son serment, il relégua Irène au fond d'un monastère, qu'elle avait bâti elle-même dans l'île du Prince ; mais ensuite, la trouvant trop près de Constantinople, et jugeant qu'elle n'était pas assez oubliée, il l'envoya dans l'île de Lesbos, à Mitylène, où il la fit étroitement garder. Elle y mourut, dans la même année, de la maladie des ambitieux, ayant eu le loisir de reconnaître combien est fausse et trompeuse cette politique machiavéliste, qui foule aux pieds la nature et la justice, qui, ne voyant rien au-delà du moment présent, se permet toute sorte de crimes pour renverser le moindre obstacle, sans songer que de ces crimes mêmes naîtront des obstacles plus forts. Irène avait fait périr trois empereurs, son beau-père, son mari, et son fils ; elle avait empoisonné son ministre, le complice de ses crimes, et peut-être aussi le principe de sa grandeur et de sa gloire ; elle avait appelé Charlemagne pour renverser l'eunuque Aétius qui alarmait son autorité, et cette autorité lui est enlevée par un homme obscur, sans talents, sans desseins, qui n'était à craindre que parce que personne ne le craignait. Combien elle dut regretter ce fils, qu'elle avait sacrifié au désir de conserver le pouvoir et d'usurper la couronne ! s'il eût vécu, quelque faible part qu'il lui eût laissée dans l'autorité, cette part eût été consacrée par ses droits et affermie par sa puissance : elle perdit tout, parce qu'elle l'avait perdu, et surtout parce qu'elle l'avait fait périr, car sa chute fut évidemment l'effet, non du hasard, mais de l'indignation qu'excitaient ses crimes, et c'est ce qu'on ne peut trop redire aux petits politiques, aux petits ambitieux, toujours prêts à se prosterner devant les criminels, qu'ils appellent habiles, et à se croire très habiles eux-mêmes, quand ils peuvent se rendre le témoignage qu'ils sont faux et malfaisants. Tout machiavéliste est essentiellement maladroit, va directement contre son but, et sera tôt ou tard, mais infailliblement et par la nature des choses, la victime de ses artifices, parce qu'il n'en est point qu'on puisse dérober entièrement aux regards, ou du moins aux soupçons, et qu'il n'en est point qui n'irrite et ne révolte, dès qu'il est aperçu ou soupçonné. C'est une vérité qu'il importe encore plus de bien inculquer, que celle de l'inutilité de la guerre, car il est effrayant de considérer quel vieux respect pour la fourberie et pour le crime est encore enraciné dans le cœur des hommes, et combien l'une les séduit par un air d'esprit, et l'autre par un air de grandeur. Les ambassadeurs français, à la tête desquels était un évêque nommé Hetton, furent témoins de la révolution qui renversa Irène du trône ; à tout ce que cet événement avait de désagréable pour eux, la nation grecque ajouta des marques choquantes d'éloignement pour la France. Les ambassadeurs prirent d'abord le ton de la menace, ils protestèrent que Charlemagne ne laisserait pas impuni le traitement fait à son alliée, et ils partirent mécontents. Cependant l'affaire tourna bientôt en négociation. Nicéphore sentit l'intérêt qu'il avait de ne pas s'attirer un ennemi tel que Charlemagne, il se hâta de lui envoyer des ambassadeurs pour demander la paix. Charlemagne, ordinairement le plus simple de tous les hommes dans son extérieur, ne voulut pas même que l'empire d'Occident cédât à l'empire d'Orient le foi-hie avantage de la représentation ; il prit plaisir à étonner les ambassadeurs grecs par une magnificence, inattendue, et à étaler un faste plus qu'asiatique aux yeux de cette nation vaine et frivole, qui n'estimait que l'éclat. Le moine de Saint-Gal dit que ceux qui servaient de guides aux ambassadeurs les firent passer à dessein à travers les Alpes par des chemins impraticables[2], ce qui en allongeant leur route et la rendant plus pénible, les avait excédés de fatigue, et même épuisés d'argent, de sorte qu'ils manquaient de tout à leur arrivée. Cette petite vengeance ou ce petit artifice, pour leur faire trouver la magnificence de l'empereur plus imposante par le contraste de leur pauvreté, est au moins d'un mauvais goût. Les ambassadeurs furent admis à l'audience de l'empereur dans le palais de Seltz en Alsace ; on les fit passer par quatre grandes salles superbement ornées, et où la pompe allait toujours en croissant de salle en salle. Dans la première, qui était consacrée au faste militaire, une foule de guerriers et d'officiers, revêtus, les uns d'habits somptueux, les autres de riches armures, environnait avec respect un trône élevé, sur lequel était assis un roi devant qui les ambassadeurs allaient se prosterner, lorsqu'on les avertit que cet honneur devait être réservé à l'empereur, dont ils ne voyaient là que le connétable. Dans la seconde salle, le comte du palais rendait la justice[3], et joignait à la magnificence dont il était environné, un appareil imposant de grandeur et de puissance. Le maître de la table du roi, qui, dans la troisième salle, semblait étaler tout le luxe de la cour, était encore effacé en magnificence par le grand chambellan qui présidait dans la quatrième salle ; partout nouvelle surprise, nouvelle erreur, nouvelle envie de se prosterner de la part des ambassadeurs, saisis d'admiration et de respect. Le moine de Saint-Gal dit qu'on chassait ces ambassadeurs de chaque salle, en leur donnant des soufflets, cumcolaphis propellerentur : ne peut-on pas ici se dispenser de croire le moine de Saint-Gal ? Deux des plus grands seigneurs de la cour vinrent ensuite recevoir les ambassadeurs, et au fond d'un appartement encore plus riche, ils trouvèrent l'empereur tout éclatant d'or et de pierreries, au milieu des rois ses enfants, des princesses ses filles, et d'une multitude de prélats et de ducs, auxquels ii paraissait se communiquer avec une dignité paternelle et une auguste familiarité. Il avait dans ce moment la .main appuyée sur l'épaule de l'évêque 'letton, auquel il affectait de prodiguer les marques de considération, comme pour le venger des dégoûts qu'il avait essuyés à la cour de Constantinople. Les ambassadeurs reconnurent aisément dans Charlemagne le roi de tous ces rois, le prince que la nature et la fortune semblaient avoir fait pour être le monarque du monde, ils se prosternèrent devant lui avec une espèce de vénération religieuse, non sans quelque confusion de retrouver dans la plus haute faveur auprès d'un tel souverain et dans une telle cour, ce même évêque Hetton, pour lequel ils savaient qu'on avait eu à Constantinople fort peu d'égards. L'empereur les releva, les rassura, et leur dit avec un mélange imposant de sérénité et de fierté : Hetton vous pardonne, et je vous pardonne à sa prière ; mais désormais respectons la personne des évêques et des ambassadeurs. La leçon était utile. Quant à cette petite recherche, et, s'il est permis de s'exprimer ainsi, cette débauche de représentation, que des écrivains, même modernes, vantent et admirent comme une des actions les plus imposantes de Charlemagne, c'est un véritable jeu d'enfant, qui ne reçoit d'excuse que parce que c'était devant des enfants qu'on le jouait, et qu'il faut des spectacles pour tous les yeux. Le respect que Charlemagne exigeait avec raison pour ses ambassadeurs, il se piquait de l'avoir pour les ambassadeurs étrangers, ce qui ne s'observait pas alors fort exactement, les ambassades étant assez rares, et les principes du droit des gens, à cet égard, peu familiers. Les ambassadeurs de Perse s'étant plaints d'avoir été assez mal accueillis à leur passage, par quelques gouverneurs et quelques évêques, Charlemagne cassa ces gouverneurs, et condamna ces évêques à une forte amende : ce qui peut faire douter de quelques circonstance dont le moine de Saint-Gal charge l'histoire de la réception des ambassadeurs grecs, surtout de celle des soufflets, qui est incroyable, et de celle du passage par les Alpes, qui ressemble trop encore à un jeu d'enfants fâchés, qui font des niches pour se venger. La paix, objet digne d'occuper des hommes, fut bientôt conclue ; il ne pouvait plus être question d'unir les deux empires ; il s'agissait d'en consacrer les droits et d'en fixer les bornes. Nicéphore, si inférieur à Charlemagne, fut trop heureux de le reconnaître pour collègue et pour égal, et de conserver à ce prix tout ce que l'empire d'Orient possédait encore en Italie. Les deux empires furent également l'empire romain, comme ils l'avaient été autrefois, et les Grecs admirèrent la modération du nouvel empereur, qui, avec tant de moyens de conquérir, n'acquérait tant de droits litigieux que pour les éteindre ou les suspendre. |
[1] On peut dire des eunuques-ministres ce que Pline disait à Trajan des affranchis, qui avaient été si puissants sous l'empereur Claude et sous Néron : Scis prœcipuum esse indicium non magni principis magnos libertos. Il est reconnu que la grandeur dans des affranchis est une preuve certaine que le prince n'en a point.
[2] Moine de S. Gal, de reb. bellic. Car. Magn.
[3] Ordinairement la cour de justice de nos rois siégeait à l'entrée du palais (Mémoires de Littérature, tome 30, p. 590) ; peut être même dans la cour, quand le temps le permettait, pour que l'audience contint plus de monde ; chez les Juifs, les jugements se rendaient à la porte des villes. Chez nos ancêtres, dit M. Fleury (Mœurs des Israélites), les vassaux de chaque seigneur s'assemblaient dans la cour de son château, et de là sont venues les cours des princes. En Levant, comme les princes sont plus enfermés, les affaires se font à la porte de leur sérail. De là le nom de la Porte donné à la cour ottomane, et le nom de cours donné aux demeures des rois et aux divers tribunaux.