HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE V. — L'EXPULSION DES ANGLAIS. - 1449-1453.

 

CHAPITRE VIII. — RELATIONS AVEC LE DUC DE BOURGOGNE. - INTERVENTION DANS L'AFFAIRE DES GANTOIS.

 

 

1449-1453

 

Le duc de Bourgogne envoie de nombreuses ambassades au Roi ; ses réclamations incessantes ; réponse faite à Caen aux ambassadeurs du duc. — Nouvelle ambassade à Montils-les-Tours. — Envoi par le Roi d'une grande ambassade ; instructions données ; réfutation de tous les griefs allégués par le duc. — Ambassade du duc relativement à son projet de croisade ; discours de l'évêque de Chalon. — Affaire des Gantois. Appel fait par eux au Roi ; le duc prend les devants auprès de lui : lettre et ambassades. — Lutte à main armée entre le duc et les Gantois. — Ceux-ci implorent l'intervention royale ; le Roi profite de cette occasion pour demander la restitution des villes de la Somme. — Exposé de cette affaire ; enquête faite par ordre du Roi ; échange de communications à ce sujet avec le comte de Saint-Pol et le sire de Croy. — Désignation d'ambassadeurs pour se rendre à la Cour de Bourgogne ; instructions qu'ils reçoivent. — Portrait du comte de Saint-Pol ; situation fausse où il se trouve. — Arrivée des ambassadeurs ; leur réception par le duc ; difficultés qu'ils rencontrent dans l'accomplissement de leur mission ; ils se rendent à Gand et obtiennent enfin du duc la conclusion d'une trêve. — Conférences de Lille. Les ambassadeurs abordent le point délicat de leur mission ; ils échouent honteusement. — Sentence arbitrale prononcée dans l'affaire de Gand ; protestation des Gantois ; les ambassadeurs reçoivent du duc des gratifications. — Seconde phase de l'affaire des Gantois. — Nouvelle ambassade de Charles VII ; instructions qu'elle reçoit. — Les ambassadeurs sont reçus avec hauteur par le duc ; on leur fait attendre leur réponse ; paroles échangées avec los conseillers du duc ; réponse insolente qui leur est faite verbalement. — Séjour des ambassadeurs à Tournai ; triste rôle qu'ils jouent ; le Roi se décide à les rappeler. — L'affaire des Gantois se dénoue par la voie des armes ; triomphe du duc.

 

Les concessions faites par Charles VII au duc de Bourgogne, à la suite de la conférence de Paris[1], n'avaient point donné à ce prince complète satisfaction. Dans le courant de 1449, il n'envoya pas moins de trois ambassades au Roi, chargées de transmettre de nouvelles plaintes[2]. En janvier 1450, il fit rédiger des instructions pour une autre ambassade. Charles VII poursuivait alors sa campagne en Normandie, d'où il adressait parfois des messages à son cousin pour lui faire part de ses succès[3]. Tandis qu'il se dirigeait vers Caen, deux lettres successives lui annoncèrent l'intention où était le duc de députer vers lui une notable ambassade[4]. Cette ambassade partit dans les premiers jours de mai ; elle se composait d'Antoine, seigneur de Croy, de Jean de Croy, seigneur de Chimay, de Jean de Poitiers, seigneur d'Arcey, de Valeran de Soissons, seigneur de Moreuil, de Toison d'Or, de Jean Lorfèvre, conseiller et maître des requêtes, et de Jean de Molesmes[5].

Les ambassadeurs avaient mission tout d'abord de réclamer l'exécution des décisions prises, lors de la conférence de Paris, relativement à sept points déterminés : empiètements de juridiction commis par les officiers royaux dans des villes de la châtellenie de Bar ; affaire des enclaves ; affaire des aides d'Auxerre ; affaire du grenier à sel de Mâcon ; affaire du grenier à sel de Marcigny ; affaire du grenier à sel d'Auxerre ; affaire des aides de Ham et de Bohain. Ils devaient ensuite traiter les questions suivantes : affaire des marchands de Dieppe, affaire de l'église de Saint-Bertin ; ajournement donné au seigneur d'Anthoing et à d'autres officiers du duc ; poursuite faite par le comte d'Eu relativement à une obligation de trois mille écus contractée envers lui et dont le duc soutenait la nullité ; procès pendant entre le seigneur de Saveuse et le seigneur de Torcy ; appel du duc contre une sentence du bailli de Rouen[6].

A toutes ces questions, d'une importance fort secondaire, la chancellerie royale donna réponse dans un mémoire rédigé à Caen le 3 juillet 1450[7]. Il fut décidé que des commissaires seraient désignés de part et d'autre pour examiner les points litigieux, et que, à la date du 1er janvier suivant, il y aurait simultanément plusieurs réunions : l'une à Saint-Orner, la seconde à Langres, la troisième à Villefranche[8].

En outre il fut convenu qu'une journée se tiendrait à Eu, le 1er septembre suivant, au sujet de l'affaire des marchands de Dieppe et de Harfleur, et une autre à Mâcon, à la même date, pour s'occuper de l'affaire des enclaves[9].

Une question politique d'un ordre supérieur paraît avoir été abordée à Caen par les ambassadeurs bourguignons : celle du mariage du comte de Charolais, veuf de Catherine de France, avec une autre jeune fille du Roi[10].

Pendant la tenue des conférences d'Eu et de Mâcon, une nouvelle mission fut donnée à Jean de Molesmes, qui se rendit près du Roi[11]. Nous avons un long mémoire, rédigé par la chancellerie royale en réponse aux plaintes formulées au nom du duc et qui roulaient sans cesse sur les mêmes points[12].

A la fin de décembre 1450, le duc de Bourgogne fit partir une ambassade, à la tète de laquelle était Jean de Croy[13] ; elle arriva à Montils-les-Tours au commencement de janvier 1451. Le duc faisait une fois de plus exposer certaines doléances contenues dans onze articles[14].

Charles VII, avait fait preuve, dans ses relations avec le duc de Bourgogne, d'une patience poussée jusqu'à la longanimité. Mais il s'irritait de cette persistance à reproduire les mêmes griefs, à en inventer de nouveaux. Cette fois la mesure était comble : il fit savoir aux ambassadeurs que, après en avoir délibéré dans son Conseil, il avait décidé d'envoyer au duc une ambassade pour lui porter sa réponse, et désigna aussitôt, à cet effet, Jacques Jouvenel des Ursins, archevêque de Reims, le sire de Gaucourt, Guy Bernard, archidiacre de Tours, et Jean Dauvet, procureur général[15].

Le choix des ambassadeurs indiquait l'importance de la mission qui leur était confiée ; elle apparaît mieux encore à la lecture des instructions royales.

Ces instructions étaient divisées en trois parties. Dans la Première, le Roi faisait répondre aux points mentionnés par les ambassadeurs du duc ; dans la seconde, il énumérait ses propres griefs ; dans la troisième, il donnait à l'archevêque de Reims et à son procureur général une mission spéciale relativement à l'affaire de Flandre. Sans se départir de la modération qui lui était habituelle, le Roi parlait en souverain : le triomphe de ses armes lui avait donné un ascendant qu'il faisait sentir à son arrogant vassal.

Les ambassadeurs bourguignons l'avaient entretenu de onze questions : 1° Arrêt donné par le Parlement au profit du sire de Torcy contre le sire de Saveuse ; 2° Procès fait contre le comte de Joigny, à la requête du sire de Gaucourt et du chancelier ; 3° Affaire de la bateure de Thibaut de la Haye ; 4° Termes estranges tenus par le Parlement à l'égard du duc ; 5° Limites et enclaves de la Bourgogne ; 6° et 7° Greniers à sel de Mâcon et de Martigny ; 8° Aides de Ham ; 9° Affaire du sire d'Anthoing ; 10° Impôt mis sur le vin en Bourgogne : 11° Procès du comte d'Eu. Sur chacun de ces points réponse était donnée aux plaintes articulées.

Le Roi arrivait ensuite aux réclamations que ses ambassadeurs étaient chargés de présenter.

En voici le résumé :

Le Roi a été informé qu'empêchement a été donné à l'exécution de plusieurs arrêts du Parlement, ainsi que de mandements royaux, et que les gens chargés de cette exécution ont été, les uns emprisonnés, les autres tellement menacés que les arrêts et mandements n'ont point eu d'effet. Déclaration sera faite des cas particuliers.

Des usurpations et entreprises ont été faites par les officiers du duc et se poursuivent chaque jour relativement aux droits et cas royaux, dont on enlève la connaissance au Roi et à ses représentants.

Bien qu'il n'appartienne qu'au Roi de donner des lettres de rémission, de relèvement, d'anoblissement, d'amortissement et autres lettres de grâce, le duc en donne indifféremment aux sujets et habitants des pays et seigneuries qu'il tient dans le royaume, et ce au préjudice du Roi et de son autorité.

Le Roi a été informé que le duc a établi des péages et tributs, tant par eau que sur terre, sur les vins, blés et autres denrées et marchandises, au mépris de ses droits, au préjudice du commerce et de la chose publique. On précisera les faits.

Le duc a rendu des ordonnances sur le cours des monnaies et a fait publier ses mandements en Flandre, eu Picardie et en Artois, ce qui est entreprendre sur l'autorité royale.

Les gens du duc empêchent les sujets et habitants de ses Pays et seigneuries de poursuivre leurs appels en Parlement ou ailleurs ; ceux qui ont voulu le faire ont été, soit emprisonnés, soit transportés en Franche-Comté ou dans d'autres Pays hors du royaume, et condamnés à de grosses amendes. En les contraignant ainsi à se désister de leurs poursuites, on a porté directement atteinte au ressort et à la souveraineté du Roi. Les officiers du duc s'efforcent d'usurper et d'empêcher les droits de bourgeoisie et autres que le Roi a de toute ancienneté au bailliage de Sens.

Un cas de pendaison s'est produit à Beaune, en dépit des lettres de rémission données par le Roi.

Vers l'année 1444, trois officiers du duc (on les nomme) ont abattu les panonceaux et bâtons royaux placés dans la maison d'un bourgeois du Roi, à Goncourt, au bailliage de Chaumont.

Des empiètements sur la juridiction royale ont été commis dans le comté d'Ostrevant et dans le comté de Hainaut.

On rappellera les autres usurpations, entreprises et excès commis par les gens du duc contre le Roi et ses sujets, dont les ambassadeurs ont par devers eux le détail.

On remontrera, en bons termes et par bonnes raisons, la gravité de ces excès et entreprises, au préjudice du Roi et de ses droits.

On fera ressortir, en bons, grands et honorables termes, l'autorité royale et les droits, dignités, prééminences et prérogatives de la couronne de France, et que l'honneur de ceux qui en sont issus est de les maintenir et garder, sans rien entreprendre au contraire ; car de tant qu'ils sont plus grands et Plus prochains, ils y sont plus tenus et obligés.

On dira que le Roi a voulu que toutes ces choses soient remontrées au duc, car il ne croit pas que, si celui-ci en avait été dûment averti, il eût souffert qu'elles fussent accomplies. Le Roi a donc espérance que, une fois avisé, le duc y mettra tel remède qu'il appartient.

Les ambassadeurs s'entendront avec le duc sur la manière dont seront faites les réparations.

Et comme un des ambassadeurs du duc — Jean Van den Driessche[16] — s'est permis, en proposant devant le Roi, de dire au nom de son maitre que le traité d'Arras n'était point observé et que le duc voudrait bien savoir comment dorénavant il aurait à vivre sous le Roi et comment il s'y pourra fier, les ambassadeurs diront que le Roi s'est donné grande merveille de ces paroles, car de sa part le traité n'a point été violé et il n'a fait ni autorisé à faire aucune chose à l'encontre ; tandis que, depuis le traité, le duc a souffert et toléré, de la part de ses officiers, plusieurs excès et entreprises contre l'autorité du Roi et au préjudice de ses droits et souveraineté. Le Roi les a doucement passés ; il a oublié et pardonné certains d'entre eux ; il a fait plus, pour complaire au duc, qu'à l'égard de tous autres princes et seigneurs de son sang. Le Roi pense qu'il en a bien souvenance : d'ailleurs, s'il le désire, ses ambassadeurs pourront le lui rappeler. Le duc n'a donc aucun motif de crainte : rien ne l'empêche d'avoir pleine et entière confiance dans le Roi. De son côté, le Roi ne doute pas que le duc n'ait vouloir et intention de se conduire toujours envers lui comme bon et obéissant parent.

Le même ambassadeur a dit qu'il y a autour du Roi des gens de son Conseil qui n'ont point les affaires du duc pour recoin-mandées et qui lui sont hostiles. Le Roi s'en étonne, car jamais il ne sut ni ne s'aperçut qu'il y eût auprès de lui homme, de quelque état qu'il fût, n'ayant bonne volonté à l'égard du duc et ne voulant entretenir tous termes de bon amour et bonne paix. S'il eût su qu'il en fût autrement, il n'eût pas été content, et y eût donné provision, comme il le ferait encore le cas échéant.

Enfin, le Roi s'étonne de ce que cet ambassadeur se soit permis de dire que les réponses données naguères à Jean de Molesmes n'avaient point été faites au sçu du Roi, car on ne saurait dire ni même penser que le Conseil du Roi se permît une telle faute ou que le Roi ne s'aperçût pas d'une si étrange licence[17].

L'instruction relative au fait de Flandre portait que, conformément à appointement de Paris, le Roi s'était décidé, bien que son droit de souveraineté Mt incontestable, et que, Comme souverain, il fût seul juge, à nommer des commissaires Pour trancher la question des appels de Flandre de concert avec les représentants du duc. Les ambassadeurs avaient charge de faire ressortir la grande douceur, courtoisie, et, à proprement parler, grâce dont le Roi avait fait preuve en agissant ainsi, car, en faveur et contemplation du duc, il lui avait octroyé ce que nul souverain ne devrait céder en des matières touchant à sa couronne et à sa seigneurie souveraine ; c'était ce que jamais roi de France n'avait fait. On pourrait remontrer gracieusement au duc que, à bien entendre cette Matière en la conséquence, lui-même, qui est un des plus grands principaux princes de France, et l'un des principaux et plus puissants membres de la très chrétienne Couronne[18]... devait être le premier à maintenir les prérogatives de la souveraineté du Roi.

Les ambassadeurs de Charles VII arrivèrent à Bruxelles vers le 15 mars[19], et y séjournèrent pendant deux mois et demi[20]. Nous avons le texte des réponses faites par eux aux requêtes formulées au nom du duc : elles sont, à peu de chose près, conformes au texte des instructions royales[21].

Le duc de Bourgogne se montrait alors fort préoccupé de la situation de la chrétienté en Orient. Reprenant d'anciens projets interrompus, il annonçait l'intention d'intervenir de nouveau dans la lutte contre les Turcs. Au commencement de mai 1451, il désigna des ambassadeurs pour se rendre, d'une part, vers le Pape et le roi d'Aragon, de l'autre, vers Charles VII, afin de les entretenir de ses desseins. Les ambassadeurs envoyés à Rome et à Naples furent Jean de Croy, seigneur de Chimay, Jacques de Lalaing, Toison d'Or et l'abbé d'Everbode ; ceux qui allèrent en France furent Jean Germain, évêque de Chalon, André, seigneur de Humières, et Nicolas le Jaul, maître des requêtes[22]. On a conservé le texte du long discours prononcé, en présence du Roi, par l'évêque de Chalon[23]. C'est une pressante exhortation à prendre part à la croisade ; l'orateur fait ressortir la déplorable situation de la religion chrétienne en Orient, et indique les moyens d'y porter remède. Jamais l'occasion n'a été plus favorable. Le Roi est sorti triomphant des adversités qu'il a supportées avec une si grande patience ; en lui accordant la paix, Dieu lui a offert la faculté d'employer sa puissance et sa sagesse au relèvement de la foi chrétienne. Par la pacification de l'Église, menée à une glorieuse fin après deux années d'efforts, il a fait un acte plus notoire de sainte religion que s'il fût allé nu-pieds à Jérusalem. Le Roi a mis provision à ses gens de guerre : aujourd'hui la discipline est si grande au sein de son armée que durant les cinq mois que l'évêque a employés à courir pour joindre le duc et le Roi, depuis Lyon jusqu'à la mer d'Anvers et de là jusqu'à la mer de Bordeaux, il n'a vu ni su que l'on ne pût porter de l'or sur sa tête par tout le royaume. De toutes parts les églises se relèvent, les châteaux se reconstruisent, les villes et les villages se repeuplent. Que le Roi ait donc égard aux doléances de la chrétienté ; qu'il s'emploie au relèvement de la foi. On fera plus avec le Roi en un an qu'on ne pourrait faire sans lui en trois ans. Le duc de Bourgogne est prêt à s'entremettre pour la conclusion de la paix avec l'Angleterre ; il offre au Roi de le servir en Grèce ou en Syrie, selon que ce prince en décidera. Si le Roi cède aux désirs du duc, on criera : Honneur, gloire et victoire à Charles, Roy de France, dit le Victorieux, nouveau David, nouveau Constantin, nouveau Charlemaigne, qui, après ses conquestes et que Dieu luy a donné paix de tous costez, il s'est employé au relievemeut de la sainte foy catholique ; dont il sera repeuz et saoulez non mye seulement de memoire, par cronicques et histoires, mais de la gresse du froment de gloire perpetuelle et bonne renommée !

Charles VII était alors trop absorbé par les soins à donner aux affaires de son royaume pour pouvoir s'associer à une croisade contre les Turcs. Les projets du duc de Bourgogne étaient, d'ailleurs, à longue échéance : il avait lui-même de graves affaires qui réclamaient toute son attention : au sein de ses états, un orage commençait à poindre et menaçait de Prendre de vastes proportions.

Dès le 7 mars de l'année précédente, les habitants de Gand avaient, par un acte d'appel, placé leurs privilèges et coutumes sons la protection du roi de France[24]. Philippe ne redoutait rien tant qu'une intervention de Charles. VII dans sa querelle avec les Gantois. Au commencement de 1451, il écrivit à ce sujet au Roi, et chargea ses ambassadeurs de l'entretenir de cette affaire. Dans une lettre, en date, du 29 juillet, il annonça l'envoi d'une ambassade spéciale, chargée de parler du fait de Gand. Averti que les Gantois avaient envoyé ou se proposaient d'envoyer une députation pour obtenir du Roi certains mandements ou provisions contre lui, au préjudice de ses droits de seigneurie, le duc en informait le Roi en toute humilité, le suppliant, ainsi qu'il l'avait déjà fait à deux reprises, que, au cas où les Gantois s'adresseraient à lui, il ne leur voulût octroyer aucune provision avant de l'avoir entendu en ses raisons et en son bon droit, ainsi qu'il lui en avait donné vrai espoir, et tout au moins suspendre sa décision jusqu'à la prochaine venue d'ambassadeurs qui le mettraient pleinement au courant et lui feraient connaître les estranges manières que ceux de sa ville de Gand avaient tenu et tenaient envers lui. En ce faisant, mon très redouté seigneur, concluait le duc, vous ferez œuvre de justice, et à moi grand honneur et parfait plaisir, dont je me réputerai de plus en plus tenu et obligé envers vous[25].

 Au commencement d'août, le duc de Bourgogne fit partir deux ambassadeurs pour la cour de France[26] ; une nouvelle ambassade[27] vint encore, au mois de décembre, entretenir le Roi de la conspiration détestable des Gantois, de leur révolte ouverte contre l'autorité du duc, et des attentats commis à l'égard de plusieurs notables personnages de leur ville ; le duc espérait, avec l'aide de Dieu et de ses bons sujets, venir à bout de la rébellion ; il demandait une fois de plus que, dans le cas où les Gantois solliciteraient l'assistance du Roi, celui-ci ne leur donnât ni ne permit qu'il leur fût donné aucun appui[28].

 Charles VII se borna à répondre qu'il ne voulait nullement soutenir les Gantois en chose déraisonnable, mais qu'il les réprimerait au besoin, en maintenant les droits et prérogatives de sa souveraineté, comme aussi les droits du duc et de sa seigneurie, s'ils y portaient atteinte. Au cas où les Gantois s'adresseraient à lui, le Roi était bien averti de ne leur donner aucunes lettres provisoires dont ses droits et ceux du duc pussent être amoindris ; il veillerait à la conservation desdits droits de façon à ce que le duc en soit satisfait[29]. Les échanges de communications entre le duc et le Roi se poursuivirent durant les premiers mois de 1452[30].

La ville de Gand était, depuis quelques mois, en pleine révolte : le 11 novembre 1451, deux partisans du duc avaient été mis à mort ; le 3 décembre, une nouvelle élection d'échevins consacrait le triomphe de l'anarchie ; dès le lendemain, une attaque fut dirigée sur Biervliet. Deux manifestes successifs du duc (15 et 31 mars 1452) annoncèrent l'intention de réprimer la sédition à main armée. Une dernière tentative de conciliation fut faite par une députation composée de six abbés, de trois chevaliers et de députés de toutes les villes de la châtellenie de Gand : le duc consentit à entrer en négociation ; mais les capitaines de Gand, qui étaient à la tête du mouvement, voulurent mettre une barrière infranchissable entre le duc et les rebelles : le 7 avril ils envoyèrent surprendre le château de Gavre ; le 14, une attaque fut dirigée sur Audenarde : la guerre était inévitable. Le comte d'Étampes entra en campagne, et les hostilités commencèrent le 21 avril. Dès le 24, le Siège d'Audenarde était levé et les Gantois étaient mis en déroute. Le duc de Bourgogne et son neveu s'avancèrent jusque sous les murs de Gand, où régnait l'anarchie la plus complète. Mais une réaction s'opéra : les trois capitaines qui avaient dirigé l'expédition d'Audenarde furent mis à mort, et de nouvelles élections placèrent le pouvoir aux mains de la haute bourgeoisie. Tout enflammé du succès de ses armes, le duc envoya au Roi (28 avril) un long récit de la défaite des Gantois : Lesquelles choses, mon très redouté seigneur, disait-il, vous écrivons et signifions volontiers, pour ce que je sais certainement que de votre grâce les aurez à plaisir et qu'elles vous seront agréables[31].

C'est à ce moment que se produisit la démarche tant redoutée du duc. A la date du 24 mai 1452, une lettre fut rédigée pour être portée au Roi. Elle portait cette souscription : Vos très humbles et obéissants sujets les chevetaines, échevins des deux bans, deux doyens conseillers, et toute la communauté de la ville de Gand. Les Gantois s'adressaient au Roi comme à leur souverain seigneur, à celui qui sur tous autres devait être véritablement et pleinement informé du gouvernement de ce pays de Flandre, ensemble de l'état, affaires et dispositions de cette ville. Ils lui exposaient longuement la façon dont ils avaient été grevés et chargés en plusieurs manières, au mépris des promesses du duc de Bourgogne ; la rigueur dont celui-ci avait usé à leur égard, les laissant sans justice, ne voulant point recevoir leurs excuses, quelques supplications qu'ils aient faites à diverses reprises ; les désordres qui en étaient résultés ; la nécessité où ils avaient été de se donner de nouveaux chefs ; la guerre ouverte enfin qui s'était allumée, guerre qui leur était moult dure, griesve et desplaisante, car tous vrays naturels sujets doivent sur toutes choses bien comprendre et doloir la rigueur et indignation de leur naturel prince. Mais ils avaient l'intention, avec l'aide et la grâce de Dieu, de soutenir de tout leur pouvoir, puisque la nécessité les y forçait, la conservation de leur droit, le maintien de leurs privilèges, franchises, libertés, coutumes et usages. Vous, comme nostre souverain seigneur, disaient-ils, vous en estes gardien et conservateur au mieux que pour vous. Nous vous supplions donc, très excellent, très hault et très puissant prince nostre très cher sire et souverain seigneur, en toute humilité, que de vostre très noble et benigne grace vous plaise en ceste matière, que nous vous sigriffions ainsi que naturellement tenus et obligés y sommeset laquelle nous eussions dès pieça signiffiée si n'eussions épargné de faire complainte de nostre dit très redouté seigneur et prince, et esperé qu'il se deust avoir ravist de nous conduire en justice et recevoir en sa grace, remedier, gardant vostre haulteur et souveraineté, ainsi que à vous et vostre très noble Conseil semblera pertinent et expedient, et nous, par ce porteur, sur ce signifier vostre très noble responce, afin que nous, ayant su par icelle responce ce qu'il vous en plaira faire, nous puissions conduire et ordonner selon que besoin nous sera[32].

Le Roi n'avait pas attendu cette requête pour envoyer une ambassade au duc de Bourgogne. Il voulait profiter de cette occasion pour revendiquer la possession des villes de la Somme, cédées conditionnellement en vertu du traité d'Arras, et en demander la restitution sans indemnité.

Ce n'était point d'ailleurs, dans l'esprit du Roi, chose nouvelle qu'une telle revendication.

Avant même que la conquête de la Normandie et l'expulsion des Anglais fussent venues modifier la situation, il en avait conçu le projet. S'il en faut croire Georges Chastellain, diverses tentatives avaient été faites pour rentrer, sans bourse délier, en possession des villes de la Somme[33], et l'on avait songé à les faire réclamer par le Dauphin, comme héritier de la couronne non consentant au transport[34]. Nous avons la trace de négociations entamées par Dunois et Précigny avec les ambassadeurs du duc, au sujet des pays engagés[35]. Au commencement de 1449, Charles VII avait ordonné de procéder à ce sujet à une enquête. Dans des lettres du 9 janvier de cette année[36], il déclarait que son procureur général lui avait fait exposer que, lors de la conclusion du traité d'Arras, certains pays avaient été abandonnés au duc de Bourgogne pour en jouir jusqu'au moment où une somme de quatre cent mille écus d'or lui serait comptée afin d'en opérer le rachat ; mais que, quoique le duc et les gens de son conseil eussent dit aux ambassadeurs royaux et leur eussent concédé que, si le Roi concluait avec les Anglais soit une paix définitive, soit une trêve de longue durée, le duc rendrait et délivrerait les dits pays sans prendre ni réclamer la somme de quatre cent mille écus ni autre chose quelconque, le traité n'en faisait pas mention ; le procureur général craignait donc que, le cas échéant, le duc ne fît difficulté de rendre lesdits pays sans paiement de la somme susdite. En conséquence, le Roi donnait commission à Jean Tudert, conseiller et maître des requêtes de son hôtel, à Guillaume de Vic et Robert Thiboust, conseillers au Parlement, et à Jacques Aude, notaire et secrétaire, greffier du grand Conseil, de faire une enquête relativement à cette question et de mettre en forme authentique les dépositions des témoins qui seraient entendus.

L'enquête fut ouverte dès le lendemain[37]. On fit comparaître successivement André du Beuf, notaire et secrétaire du Roi, le connétable de Richemont et le maréchal de la Fayette, qui avaient pris part aux négociations relatives au traité d'Arras. Il résulta de cette enquête et spécialement de la déposition d'André du Beuf, que la cession des villes de la. Somme n'avait été faite que pour protéger les frontières du duc contre une invasion anglaise et pour l'aider à soutenir la lutte ; que non seulement la promesse sus-mentionnée avait été faite, mais que le duc avait donné des lettres patentes par lesquelles il s'engageait, au cas où la paix serait conclue avec les Anglais, à restituer sans aucune indemnité les villes de la Somme[38].

On ne peut que s'étonner de l'ignorance où semblait être la chancellerie royale sur ce qui avait été stipulé à cet égard à Arras, car les lettres patentes dont le connétable de Richemont ne se rappelait pas l'existence et dont le maréchal de la Fayette ne parlait même pas, croyant que la clause en question avait été insérée dans le traité d'Arras, — ces lettres, d'une si haute importance, elles existaient en bonne et due forme[39]. Elles avaient été données à la date du 30 septembre 1435. Le duc s'y engageait, au cas où la paix avec les Anglais serait faite, à restituer sans indemnité les villes de la Somme ; mais sa promesse était conditionnelle ; elle était subordonnée : 1° au cas où le roi d'Angleterre aurait, avant le Ier janvier 1436, adhéré aux offres contenues dans les lettres des ambassadeurs français en date du 7 septembre 1435 ou renoncé à la couronne (et l'accomplissement de la promesse ne devait avoir lieu qu'après que la publication de la paix aurait été faite à Amiens) ; 2° au cas où le roi d'Angleterre accepterait le délai de sept ans qui lui était donné pour faire les déclarations et renonciations demandées, et où, après ces sept années écoulées, la paix aurait été faite et publiée.

Les deux lettres patentes du 30 septembre avaient été remises aux ambassadeurs français qui, le 1er octobre, en avaient délivré un récépissé[40]. On comprend d'autant moins l'absence de mémoire du connétable de Richemont et du maréchal de la Fayette que l'un et l'autre figuraient parmi les signataires de l'acte du 1er octobre.

L'enquête ordonnée par Charles VII n'élucidait point la question : on restait dans l'équivoque. Il est permis de se demander comment les graves enquêteurs ne songèrent point à se mettre en possession du document qui seul pouvait faire jaillir la lumière.

Quoi qu'il en soit, l'enquête ne fut point poursuivie. Ce n'est que près de trois ans plus tard, à la date du 6 novembre 1451, qu'on interrogea un nouveau témoin. C'était Raoul le Bouvier, chanoine d'Angers, qui avait figuré au congrès d'Arras comme l'un des représentants du duc d'Alençon. Mais le déposant n'avait point été mêlé aux négociations secrètes qui accompagnèrent la conclusion du traité ; il ne put que répondre négativement à la question qui lui était posée : savoir s'il n'entendit point dire que, s'il advenoit que les Anglois feussent deboutez et mis hors de Normandie, par puissance ou autrement, en ce cas monseigneur de Bourgogne seroit tenu de rendre icelles villes (de la Somme) au Roy sans aucun payement de ladicte somme (de quatre cent mille écus)[41].

Charles VII voulait à tout prix rentrer en possession des villes de la Somme. S'il en faut croire Georges Chastellain, il aurait en le dessein de lever sur ses sujets la somme nécessaire Pour le rachat, mais le Parlement s'y serait refusé[42]. Quoi qu'il en soit, le Roi s'était décidé à agir. Un échange de communications avec le comte de Saint-Pol[43] lui donnait lieu d'espérer que le duc de Bourgogne prêterait à ses propositions une oreille favorable[44]. Le 21 février 1452, il écrivit à Antoine de Croy, lequel, ainsi que son frère le seigneur de Chimay, avait promis au comte de s'employer dans les négociations qui s'ouvriraient à ce sujet. Le Roi consentait à ce qu'une journée fût tenue entre ses envoyés et les représentants du duc pour traiter de cette matière ; il manifestait sa satisfaction de ce que le sire de Croy et son frère, auquel il écrivait pareillement, y prissent part, car, disait-il, les besoingnes n'en pourront que mieulx valoir[45].

Mais la tournure que prirent les affaires de Flandre empêcha la réalisation immédiate de ce projet. A la date du 5 juin, Charles VII signa des instructions pour les ambassadeurs chargés de se rendre à la cour du duc : c'étaient Louis de Luxembourg, comte de Saint-Pol, Louis de Beaumont, sénéchal de Poitou, Guy Bernard, archidiacre de Tours, maître des requêtes, et Jean Dauvet, procureur général[46]. Leurs instructions portaient sur deux points : le recouvrement des villes de la Somme ; la pacification du différend entre le duc et les Gantois.

Relativement au premier point, les ambassadeurs devaient dire que le Roi avait été informé des paroles et ouvertures échangées entre le comte de Saint-Pol et le duc, et aussi entre le comte de Saint-Pol et le sire de Croy et Jean de Croy, son frère, touchant la restitution des villes, châteaux, terres et seigneuries situés sur la rivière de Somme, cédés au duc lors du traité d'Arras. Depuis, le duc avait écrit au Roi qu'il estoit bien content d'entendre en la matière et pour y besoigner commettre de ses gens, et qu'il desiroit en ce et en toutes autres choses complaire au Roy. Le Roi en avait été et en était bien joyeux et avait ferme confiance que le duc le voudrait ainsi faire ; il se fiait singulièrement en lui comme en son bon parent. Comme il avait semblé au Roi, par les nouvelles qu'il avait reçues du duc, que celui-ci était disposé à s'occuper de cette matière, et que, de son côté, le Roi en avait présentement le loisir, il avait décidé d'envoyer ses ambassadeurs pour traiter de la restitution desdites terres, en demandant au duc que son plaisir fût de les lui rendre et restituer.

Relativement au second point, les ambassadeurs devaient dire que le Roi avait été informé, tant par ce que le duc lui avait écrit et fait savoir que autrement, du démêlé qui existait entre lui et les Gantois, et de ce que lesdits Gantois s'étaient efforcés et s'efforçaient de faire plusieurs entreprises, excès et voies de fait tant contre la souveraineté et les droits du Roi que contre les droits du duc. Le Roi avait singulier vouloir et affection au bien du duc et entendait maintenir son droit partout où il appartiendrait ; il avait aussi pleine confiance que le duc voudrait maintenir, suivant son pouvoir, l'autorité et la souveraineté royales, ainsi qu'il le lui avait fait, d'ailleurs, savoir par ses lettres. Et comme les Gantois et leurs alliés el complices s'étaient mis en armes, et avaient fait des sièges et de grandes invasions, et que pareillement le duc s'était mis en armes et avait fait contre eux de grandes assemblées de gens de guerre, et que déjà il y avait eu des voies de fait, le Roi, qui, comme souverain seigneur, était tenu de procurer toute bonne raison et de nourrir paix et amour entre ses sujets, considérant que par de telles invasions et guerres particulières qui au temps passé avait existé au pays de Flandre plusieurs inconvénients étaient advenus dans le royaume, lesquels, à l'occasion de la présente guerre, pourraient se renouveler ; désirant y pourvoir et ayant en vue les droits, prééminences et prérogatives de sa souveraineté et de sa couronne, aussi bien que la décharge de sa conscience, avait chargé ses ambassadeurs d'exposer ces considérations au duc, afin que son plaisir fût de les mettre au courant de la matière et de la cause du débat existant entre lui et les Flamands, et que les ambassadeurs pussent travailler à l'apaisement du différend et y faire tout ce qu'ils pourraient, au bien et à la conservation des droits et de la souveraineté du Roi et aussi des droits du duc[47].

Quel était le personnage qui figurait au premier rang parmi les ambassadeurs ? C'était un membre de la maison de Luxembourg, vassal du duc de Bourgogne. — Louis de Luxembourg, Comte de Saint-Pol, était alors âgé d'environ trente-quatre ans. Engagé, au début, dans le parti bourguignon, il avait fait, à l'âge de quinze ans, ses premières armes au service des Anglais. Rallié à la cause royale après le traité d'Arras, il prit part au siège de Dieppe en 1443, et il fut armé chevalier par le Dauphin. Nous l'avons vu apparaître à la Cour en 1445 ; il devint, par le mariage de ses deux sœurs, beau-frère du comte du Maine et du connétable de Richemont. Il figura avec honneur dans la campagne de Normandie, et sut se concilier la faveur du Roi, qui lui donna une pension de trois mille livres. C'était un brillant seigneur, célèbre par sa jactance, renommé pour ses bonnes fortunes, mais qui n'était guère préparé au rôle de diplomate que Charles VII, se fiant à des assurances données par lui à la légère, l'appelait à jouer[48]. On se demande comment le Roi avait pu choisir un tel représentant et quelle confiance il pouvait lui inspirer. Le comte de Saint-Pol préludait déjà à ce rôle de duplicité qui devait lui être si fatal et le conduire un jour à l'échafaud.

Le comte n'était point à la Cour au moment où le Roi le désignait comme ambassadeur. Ses collègues devaient le prendre en passant par Paris, et, s'ils ne le rencontraient pas en son hôtel, lui assigner un rendez-vous à Tournai ; là ils s'entendraient avec lui sur la façon dont il convenait de procéder et sur le moment à choisir pour faire au duc de Bourgogne des ouvertures relativement au point délicat de leur mission : la restitution des villes de la Somme. On ignorait donc à la Cour que le comte de Saint-Pol se trouvait alors dans les rangs de l'armée bourguignonne, combattant ces mêmes Gantois que le Roi chargeait ses ambassadeurs de réconcilier avec le duc de Bourgogne ? Le véritable chef de l'ambassade fut le procureur général Jean Dauvet : c'est sur ce personnage, étranger aux affaires diplomatiques[49], qu'allait porter tout le poids de cette négociation si épineuse.

Les ambassadeurs arrivèrent le 11 juin à Saint-Amand, quatre lieues de Tournai[50] ; c'est là que le comte de Saint-Pol vint les joindre : ils lui donnèrent communication de lettres closes du Roi à son adresse et des instructions royales. De là ils se rendirent à Tournai, où l'esprit de sédition qui régnait en Flandre avait fait sentir son influence et où l'intervention des représentants de. la Couronne était fort nécessaire[51]. Le duc de Bourgogne, averti par eux de leur venue, répondit qu'il était absorbé par les soins de la guerre, et les invita à se rendre à Bruxelles pour s’entendre avec ses conseillers. Arrivés dans cette ville le 16 au soir, les ambassadeurs trouvèrent le chancelier Rolin, l’évêque de Tournai et les autres conseillers du duc, venus pour les recevoir. Interrogés sur l’objet de leur mission, les ambassadeurs répondirent, en termes généraux, qu’ils étaient chargés de traiter deux questions, dont l’une était relative à la pacification du différend entre le duc et les Gantois, mais que la nature de la matière les obligeait à ne s’en ouvrir qu’au duc en personne et à lui exposer eux-mêmes leur charge et créance. Le comte de Saint-Pol, sachant dans quelles dispositions se trouvait alors le duc, leur recommanda se bien garder de l’entretenir pour le moment de l’affaire des villes de la Somme. Après un échange de paroles entre les ambassadeurs et les représentants du duc, ceux-ci déclarèrent qu’ils feraient savoir à leur maître la venue des envoyés du Roi et le désir manifesté par eux de l’entretenir en personne. Une lettre des ambassadeurs fut en même temps transmise au duc.

Le 19 juin, Philippe leur fit dire de se rendre à Termoude et que, de là, ils pourraient venir le joindre. Arrivés dans cette ville, les ambassadeurs reçurent une lettre du Roi, apportée Par un chevaucheur de son écurie. Le Roi leur envoyait copie de la lettre des Gantois en date du 24 mai et de la réponse qu'il y avait faite.

Le 20 juin, les ambassadeurs allèrent trouver le duc au camp de Waesmunster. Ils furent reçus en présence du comte de Charolais, du duc de Clèves, du comte d'Étampes, du seigneur de Croy, de Jean de Croy et d'autres seigneurs. Les ambassadeurs exposèrent leur créance : elle contenait deux points ; Mais, vu son occupation et la disposition où il était, ils déclarèrent qu'ils ne l'entretiendraient que de l'un de ces Peints, celui relatif à la pacification de la guerre de Flandre. Ils firent ressortir les inconvénients qui pouvaient, résulter de cette guerre, le désir que le Roi avait de s'employer à la conclusion de la paix, en sauvegardant tout ensemble ses propres droits et ceux du duc ; ils s'exprimèrent avec la plus grande modération, afin de ne point heurter les sentiments du duc. A peine avaient-ils fini de parler que Philippe, sans consulter son Conseil, leur répondit sèchement : Les gens de Gand sont les chefs de toute rébellion ; ils m'ont fait les plus grands outrages ; il est besoin d'en tirer telle punition que ce soit exemple à jamais. J'ai l'intention, à l'aide de Dieu, de leur remontrer tellement leur outrage, que ce sera à l'honneur de tous princes chrétiens. Si le Roi étoit bien informé de l'état des choses, de la mauvaise rebellion des Gantois et des termes qu'ils ont tenu, il seroit sans nul doute bien content de me laisser faire sans me faire parler de paix. Je vous prie donc que vous en veuilliez déporter. Je reconnais, d'ailleurs, que le Roi est souverain du comté de Flandre, et je lui voudrois obéir el complaire en tout ce que je pourrois[52]. Le duc ajouta que le lendemain il donnerait plus ample réponse.

Les ambassadeurs passèrent la nuit à Termonde, et revinrent le lendemain près du duc ; ils le trouvèrent entouré de son chancelier et de l'évêque de Tournai. Le chancelier prit la parole ; il exposa longuement les grandes offenses dont les Gantois s'étaient rendus coupables envers le duc ; des négociations étaient entamées, par l'intermédiaire des députés des nations étrangères résidant à Bruges et des députés des trois états de Flandre, et les comtes de Charolais et d'Étampes s'étaient portés médiateurs ; le duc remerciait le Roi de son bon vouloir ; il était content que ses ambassadeurs s'employassent à l'apaisement des hostilités par voie amiable, en s'entendant avec les princes médiateurs et avec les députés susnommés.

Les ambassadeurs firent connaître l'intention où ils étaient de se rendre à Gand, afin d'y exposer leur créance au bien de la besogne. — Ce ne seroit point honneur et sureté vous d'y aller, répondit le chancelier. Les ambassadeurs insistèrent, disant que travailler à la pacification avec d'autre que les Gantois ce ne serait pas bien garder l'honneur et autorité du Roi ; d'ailleurs, ils n'avaient ni puissance ni charge de le faire, et ils ne le pourraient, oseraient ni voudraient ; quant à aller à Gand, ils n'y voyaient point de déshonneur ni de doubte ; ils étaient persuadés que le duc ne leur donnerait aucun empêchement à cet égard : ils demandèrent donc que les hostilités fussent suspendues pendant qu'ils seraient à Gand et qu'ils y travailleraient à la pacification.

Le duc de Bourgogne, leva alors la séance, disant qu'une nouvelle conférence aurait lieu dans la journée entre les ambassadeurs et ses conseillers pour examiner la façon de procéder à la pacification et trancher la question du voyage à Gand.  

On fit tout au monde pour empêcher les ambassadeurs d'effectuer ce voyage ; mais finalement on se résigna à les laisser intervenir auprès des Gantois[53].

Dans le rapport circonstancié où les ambassadeurs exposaient ces faits au Roi, ils disaient : En vérité, Sire, cette matière est bien grande et dangereuse, et difficile à manier ; et la guerre est bien dure, car on n'y prend homme à merci ; et se brûlent villes et villages ; et font grands dommages tant d'une part que de l'autre ; toutefois ceux de Gand ont toujours eu du pire jusqu'ici. Et à cette occasion, monseigneur de Bourgogne est fort dur et difficile.

On était, en effet, en pleine guerre, et le moment de l'intervention royale ne pouvait être plus mal choisi. Le 14 juin, les troupes bourguignonnes avaient franchi l'Escaut près de Rupelmonde : le comte de Saint-Pol et le sire de Chimay avaient eu à livrer un sanglant combat. Le 16, trente ou quarante mille hommes, sous les ordres du duc, s'avançaient à travers la vaste plaine qui sépare Rupelmonde de Basele : une bataille avait été livrée ; elle s'était terminée par la défaite des Gantois ; mais Jacques de Lalaing et le sire de Chimay avaient été blessés, et le duc avait vu périr Cornille, l'un de ses bâtards, Pour lequel il avait une grande prédilection. Le 17, une flotte nombreuse avait amené des renforts venus de Hollande. Le duc s'était avancé le 18 jusqu'à Waesmunster, dans l'espoir que les Gantois viendraient y implorer sa clémence[54].

Pendant ce temps un héraut français, parti le 15 juin de Tournai, était arrivé à Gand et avait remis aux habitants une lettre des ambassadeurs annonçant qu'ils avaient reçu du Roi pleine autorité pour faire cesser la guerre et prononcer sur les démêlés qui l'avaient occasionnée[55]. Les Gantois répondirent aussitôt qu'ils ne desiroient que l'amiablité du Roy et estre de lui preservez et entretenuz en justice. Une nouvelle lettre ne tarda pas à parvenir aux ambassadeurs : on les pressait de se rendre à Gand, afin qu'on les pust advertir tout au long des affaires et besoingnes[56].

Les ambassadeurs partirent le 23 juin. Le lendemain, dans un post-scriptum, ils faisaient part au Roi de la réception qui leur avait été faite : Nous arrivâmes hier au soir en cette ville de Gand, et vindrent au devant de nous, à une lieue loin de la ville, plusieurs échevins et bourgeois en grand appareil ; et nous firent bien grande reception et honneur, en montrant qu'ils étoient tant joyeux que merveille de notre venue ; et parlèrent à nous en si grand honneur, révérence et humilité du Roi que plus on ne pourroit. Et aujourdhui au matin sont venus vers nous en grand nombre, et leur avons présenté les lettres closes du Roi ; et après nous ont dit qu'ils remercient le Roi très humblement du bon mémoire qu'il a eu d'eux, et qu'ils en sont très joyeux, et ont grand désir et affection à ladite pacification, comme ils disent... Et à la vérité nous semble que l'apaisement est nécessaire, car nous voyons les choses bien difficiles et bien dangereuses[57].

Tandis que les ambassadeurs du Roi remplissaient à Gand leur mission pacificatrice, le duc de Bourgogne, pour venger

la mort de son bâtard, faisait mettre à feu et à sang le pays des Quatre Métiers. Tous les villages qui avaient pris part à la rébellion furent incendiés. On dit que plus de quatre mille manoirs devinrent la proie des flammes[58].

Le 26 juin, une députation se présenta devant le duc, en compagnie des ambassadeurs du Roi : elle se composait de l’abbé de Tronchiennes et de plusieurs représentants de la ville de Gand, et venait solliciter une suspension d’armes d’un mois. Philippe, dont la colère avait été calmée par une manifestation hostile — presque une révolte — qui venait de se produire au sein de son armée, consentit à accorder une trêve de trois Jours. Le 29 juin, Dauvet retourna à Gand pour rendre compte des négociations entamées et proposer une pacification sur les hases suivantes : maintien de l’autorité du duc de Bourgogne ; conservation des privilèges des Gantois ; reconnaissance du droit d’arbitrage des ambassadeurs du Roi, avec l’amende pour Seule sanction au cas où les Gantois seraient reconnus coupables de quelque délit. L’assemblée de la Commune, aussitôt consultée, accepta la médiation des ambassadeurs, mais non leur arbitrage ; elle entendait réserver non seulement ses privilèges et la faculté de se justifier près du duc, mais encore le droit de ratifier toutes les conditions du rétablissement de la paix[59].

Le 30 juin, le duc de Bourgogne recommença les hostilités. Son armée se répandit dans le pays de Waes, brûla Axel, pilla toute la contrée. Le 7 juillet, les ambassadeurs vinrent trouver le duc à Witteren : toutes leurs instances pour obtenir une Nouvelle trêve restèrent sans résultat. Ils négociaient toujours et s’efforçaient d’obtenir l’adhésion des conseillers du duc à une formule de soumission rédigée d’accord avec les Gantois[60]. Enfin, le 19 juillet, le duc consentit à accorder une trêve qui fut définitivement conclue le 21, et qui devait durer jusqu’au 1er septembre. Pendant ce temps des conférences devaient se tenir à Lille avec les ambassadeurs du Roi et les députés de la ville de Gand[61].

Le 26 juillet, les Gantois adressèrent une lettre au Roi pour le remercier de son intervention ; ils annonçaient qu'ils avaient accepté son arbitrage pour vider à l'amiable leur différend avec le duc de Bourgogne ; ils espéraient que les ambassadeurs du Roi les maintiendraient en la possession de leurs droits[62].

Le duc de Bourgogne ne tarda pas à venir présider en personne aux négociations. Le 21 août, les ambassadeurs du Roi se rendirent auprès de lui, à Roubaix. Jugeant le moment venu, ils abordèrent le point principal de leur mission. En présence du comte de Charolais, du comte d'Étampes, du chancelier, des évêques de Tournai et de Cambrai, des deux Croy et d'autres conseillers du duc, Jean Dauvet prit la parole. Le Roi a été informé, dit-il, de certaines paroles et ouvertures échangées entre monseigneur de Bourgogne et monseigneur de Saint-Pol, et aussi entre monseigneur de Saint-Pol et monseigneur de Croy et messire Jean de Croy, son frère, sur les difficultés qui pourroient se produire entre le Roi et monseigneur de Bourgogne à cause de certaines terres et seigneuries. Le Roi a compris que ces paroles s'appliquoient à la restitution des villes, châteaux et seigneuries étant sur et par deça la rivière de Somme, baillées par le Roi à monseigneur de Bourgogne au traité d'Arras. Monseigneur de Bourgogne a écrit au Roi qu'il étoit bien content d'y entendre et desiroit, en ce et en toutes autres choses, complaire an Roi. Le Roi en a été et en est très joyeux et content de lui ; il a ferme confiance que ainsi le voudroit faire, et se confie à lui entièrement comme à son bon parent. Monseigneur de Bourgogne peut aussi se tenir sûr que le Roi lui voudroit complaire en toute chose. Le Roi nous a donc députés et ordonnés pour venir par devers monseigneur de Bourgogne, garnis de bonne puissance, pour recevoir lesdites terres. Nous requerrons donc Monseigneur que son plaisir soit rendre et restituer icelles villes, châteaux, terres et seigneuries.

Immédiatement, et sans s'entretenir avec ses conseillers, le duc de Bourgogne répondit :

Je me donne merveille de ce que vous me dites touchant la restitution des terres, vu que oncques je n'en ai parlé à monseigneur de Croy ni à messire Jean. Et s'ils se sont avancés d'en parler, je les désavoue et ils en paieront la lamproie. Le traité a été fait si solennellement et par tant de gens notables, comme chacun sait, que mon intention n'est pas de me départir d'aucune chose contenue audit traité. La manière et les causes du transport de ces terres ont été déclarées au traité, auquel je nie rapporte. Jamais je ne me serois soumis ni me soumettrai, de si grande chose comme du fait du traité et desdites terres, à deux ou trois personnes.

Le sénéchal de Poitou fit observer que, alors même que le seigneur de Croy et son frère n'eussent point averti le Roi de cette matière, le Roi avait bien cause et occasion de demander et requérir la restitution de ces terres qui lui appartenaient.

Le seigneur de Croy et Jean de Croy se levèrent et déclarèrent que jamais ils n'avaient parlé, ni au comte de Saint-Pol, ni à d'autres, du recouvrement desdites terres ; ils avaient seulement échangé avec le comte certaines paroles sur les difficultés existant entre les officiers du Roi et monseigneur de Bourgogne, disant que ce serait bien fait de les apaiser.

Le comte de Saint-Pol, prenant la parole, déclara à son tour que ce que les Croy lui avaient dit, il l'avait fait savoir au Roi Par Cardin des Essarts.

Après cet échange d'observations, les ambassadeurs se retirèrent pour aviser à ce qu'ils répondraient au duc de Bourgogne ; ils décidèrent de faire la réponse suivante, qui lui fut aussitôt communiquée.

Au regard des paroles échangées entre monseigneur de Saint-Pol et lesdits de Croy, nous nous en rapportons à ce qu'il en est. Mais, quoiqu'il en soit, le Roi en a été averti. De plus, il semble, par les lettres mêmes que monseigneur de Bourgogne a écrites au Roi, déclarant que, sur les difficultés qui pourroient surgir entre le Roi et lui à cause de certaines des terres du Roi il étoit content de commettre de ses gens et que le Roi commit des siens pour pacifier lesdites dificultés, en bon entendement, ces lettres se doivent appliquer et entendre aux dites terres. Car ces terres, par le texte même du traité, n'ont point été transportées incommutablement, mais se doivent restituer. Et ainsi, en parlant de questions ou difficultés pour certaines terres, il faut plus entendre de ces terres que de nulles autres. Et posé que jamais n'en ait été parlé, le Roi a bien cause et matière d'en parler. Relativement à ce qu'a dit monseigneur de Bourgogne sur la manière dont a été fait le traité, nous répondrons que, en requérant la restitution susdite, nous ne venons en rien contre le traité. Nous avons charge de nous adresser à sa personne et non à autre, pour lui parler privément et rondement de cette matière, sans entrer en grands arguments : Et en supposant que l'article du traité faisant mention desdites terres porte que ces terres furent transportés au rachat de quatre cent mille écus, toutefois, quand on parla, lors du traité, de bailler ces terres à monseigneur de Bourgogne, la cause et occasion du bail qui lui en fut fait fut pour résister aux Anglais de Normandie et pour assurer les terres de monseigneur de Bourgogne et supporter la guerre de ce côté ; et fut dit et expressement accordé de la part de monseigneur de Bourgogne que toutes fois qu'il y auroit paix ou longues trêves entre le Roi et les Anglais, et que le Roi auroit recouvré le duché de Normandie, monseigneur de Bourgogne seroit tenu de rendre et restituer au Roi, franchement et quittement, lesdites terres. Or le Roi a eu premièrement longues trêves avec les Anglais ; après il a conquis le duché, de Normandie ; ainsi les conditions sont advenues. Par quoi il s'ensuit bien clairement que monseigneur de Bourgogne est tenu de rendre et restituer franchement au Roi icelles terres, et que le Roi a bien cause de les demander, et que, en ce faisant, il ne vient en rien contre le traité.

A cette argumentation spécieuse, qui ne s'appuyait point, et pour cause, sur le texte du traité, mais sur une interprétation fort discutable et peu conforme à l'exactitude des faits, le duc de Bourgogne n'eut pas de peine à répondre victorieusement. Le Roi m'a mandé par plusieurs fois, dit-il, qu'il ne vouloit en rien enfreindre ledit traité. Je veux bien garder le mien et le garderai. Il ne faut point entrer aux causes du transport desdites terres ; chacun les sait. Mieux vaut se déporter d'en parler. Assurément il n'y a prince en ce royaume qui plus voulût complaire au Roi que moi, ni qui l'ait fait davantage quand le temps s'en est ordonné. Toutefois, la matière est grande ; il y écheoit bien penser. J'y aurai avis et je vous ferai donner plus ample réponse.

Quinze jours s'écoulèrent avant que les ambassadeurs eussent une nouvelle audience. Le duc leur déclara, que, ainsi qu'il l'avait déjà dit, le traité d'Arras avait été fait aussi solennellement que chacun le savait, en présence des légats du pape et d'ambassadeurs de tous les princes chrétiens ; il avait alors auprès de lui plusieurs de ses parents et amis, et avait consulté les états de son pays. Il ne voudrait rompre ni enfreindre le traité, ni rien faire qui y fût contraire, sans grande délibération et sans l'avis de ses parents et amis, et des états de ses Pays. Assurément il était disposé à complaire et faire service au Roi en tout ce qu'il pourrait ; mais, pour le présent, il ne lui était point possible de faire d'autre réponse.

Les ambassadeurs eurent beau insister, revenir sur les arguments déjà invoqués, soutenir qu'il avait été dit et expressement promis et accordé de la part de monseigneur de Bourgogne et de ses commissaires que, au cas où il y auroit paix ou longues trêves, ou que le Roi auroit recouvré le duché de Normandie, il seroit tenu de rendre et restituer au Roi lesdites terres franchement et quittement, le duc fut inflexible. Toutes les convenances et promesses faites au traité, dit-il, y sont bien déclarés et écrites. On sait bien les causes du bail et transport desdites terres, et je les dirois bien ; mais je ne le veux point dire pour l'honneur du Roi[63].

Ainsi se termina, sur ce point, la mission si malencontreusement donnée par le Roi à ses ambassadeurs.

Devait-on être plus heureux en ce qui concernait la pacification entre le duc et les Gantois ?

La conférence de Lille fut loin d'y mettre un terme. Le procureur général Dauvet et ses collègues, en écrivant le 30 août

aux Gantois, étaient forcés d'avouer qu'il leur avait été impossible d'arriver à aucune bonne conclusion. Parvenus à la veille du terme fixé pour la suspension d'armes, ils déclaraient qu'ils avaient fait défense aux députés de Gand de procéder par les armes et par voie de fait ; ils les engageaient à avoir recours au Roi, leur souverain seigneur, qui avait la volonté de leur donner remède et provision[64].

Pourtant, à la date du 4 septembre, une sentence arbitrale fut rendue par les ambassadeurs : elle était entièrement favorable aux prétentions du duc de Bourgogne[65]. Accueillie à Gand par un cri de colère, elle fut rejetée le 8, à l'unanimité par la Collace. Maine, le héraut du Roi qui l'avait apportée, fut contraint de se déguiser pour éviter d'être maltraité, et s'enfuit à franc étrier jusqu'à Lille.

Une protestation fut rédigée le 21 septembre et portée au Roi par un religieux cordelier. Les Gantois rappelaient les promesses faites en son nom et les réserves consenties par les ambassadeurs pour le maintien de leurs privilèges. Et néanmoins, disaient-ils, vos ambassadeurs ont fait tout au contraire, mettant arrière et délaissant leurs susdites promesses ; car, après le partement de nos députés de Lille et sans la présence d'aucun d'eux, ils ont prononcé un très rigoureux et très mauvais appointement contre nous, contre nos droits, et nos privilèges, franchises, libertés, coutumes et usages. Après avoir établi la légitimité de leur résistance, ils concluaient ainsi : Pour ce, très cher seigneur, que toutes ces choses sont très mauvaises et frauduleuses, contre votre vraie intention et le contenu de vos lettres, et aussi contre droits, privilèges, ... et pour ce à rebouter de toutes nos forces, nous nous complaignons très rigoureusement à Votre Royale Majesté, comme raison est, et nous vous supplions en toute humilité qu'il vous plaise les délinquants corriger et aux dites fautes remédier et pourvoir[66].

C'est ainsi que se dénoua cette longue négociation : Charles VII n'avait certes pas à se louer de la façon dont ses ambassadeurs l'avaient conduite. Le duc, au contraire, devait en être pleinement satisfait : aussi témoigna-t-il sa gratitude aux envoyés du Roi par des largesses que ceux-ci ne firent aucune difficulté d'accepter : le comte de Saint-Pol reçut deux mille écus d'or[67] ; le sénéchal du Poitou, l'archidiacre de Tours et le procureur général du Roi eurent la somme énorme de Vingt quatre mille livres[68]. On voit qu'ils étaient grassement rétribués de leurs peines. Le chroniqueur officiel de Philippe le Bon n'est-il pas bien fondé à célébrer la générosité de son maitre et à dire que, à la cour de France, on ne se conduisait pas d'une façon aussi magnifique[69] ?

 

La négociation pour l'affaire de Gand n'en resta pas là ; elle devait avoir un épilogue, plus regrettable encore que ce qui avait précédé. C'est ici qu'on va voir combien la diplomatie royale s'était égarée et à quel point les misérables arguties du procureur général Dauvet avaient compromis le prestige de Charles VII.

En dépit de la sentence arbitrale du 4 septembre, la lutte ne tarda point à recommencer avec un nouvel acharnement. Le duc de Bourgogne donna le commandement supérieur de ses troupes au maréchal de Bourgogne, qui prit les mesures les plus violentes : ce fut une véritable guerre d'extermination ; elle se prolongea durant plusieurs mois, non sans avantages pour les Gantois dont les soldats, dits compagnons de la Verte-Tente, ravageaient le pays et tenaient sans cesse les Bourguignons en échec.

Justement courroucé de la conduite de ses ambassadeurs et fort mécontent de l'issue de leurs négociations, Charles VII se décida à intervenir une seconde fois. Il l'aurait fait peut-être à main armée, si un grave événement ne s'était produit à ce moment : l'occupation de Bordeaux et de la Guyenne par Talbot. Quand on apprit en Flandre cette nouvelle, un des familiers du duc laissa échapper cette parole : Plût à Dieu que les Anglais fussent aussi bien à Rouen et par toute la Normandie qu'à Bordeaux ! N'eût été la prise de Bordeaux nous eussions eu à besogner[70].

On prétend que, en réponse à la protestation des Gantois, Charles VII leur envoya aussitôt des lettres dans lesquelles il désavouait la sentence rendue par ses ambassadeurs, comme obtenue par fraude et contrairement à sa volonté[71]. Ce qui est certain, c'est que, au mois de décembre 1452, il désigna trois ambassadeurs pour se rendre près du duc de Bourgogne et des Gantois. C'étaient Guillaume de Menypeny, seigneur de Concressault, chevalier écossais devenu récemment conseiller et chambellan du Roi[72] ; Guillaume de Vic, conseiller au parlement, et Jean de Saint-Romain, conseiller à la Cour des aides[73]. Leurs instructions portent la date du 11 décembre. En voici le résumé.

Le Roi a reçu les plaintes des Gantois sur ce que ses ambassadeurs ont excédé les termes de leur mandat. Comme souverain il doit justice à tous ses sujets ; il envoie donc vers les Gantois pour savoir les causes de leurs plaintes, les motifs pour lesquels ils n'ont point voulu adhérer à la sentence arbitrale et ont repris les voies de fait. Mais il a tenu à ce que ses ambassadeurs se transportassent auparavant près du duc de Bourgogne pour l'informer de leur mission et savoir s'il avait quelque chose à leur notifier. Après avoir été à la cour du duc, les ambassadeurs se rendront à Gand ; ils exprimeront le regret du Roi de ce qu'aucun bon appointement n'a pu être conclu et le désir qu'il a de voir cesser les voies de fait ; ils demanderont aux Gantois quelle provision ils réclament, les assurant que le Roi est toujours disposé à leur faire rendre justice et que c'est pour eux la meilleure voie à suivre. Si les Gantois requièrent un ajournement en cas d'appel, ou une autre voie judiciaire, les ambassadeurs le notifieront aussitôt au Roi, afin qu'il donne ses lettres dans ce sens. Les ambassadeurs devront en même temps porter plainte au duc relativement à des excursions faites par ses gens de guerre dans le Tournésis et à l'asile que trouvent dans ses États les maraudeurs anglais[74].

Les ambassadeurs quittèrent Paris le 16 janvier 1453[75]. Arrivés à Tournai le 23, ils y passèrent quelques jours pour faire une enquête sur les maux commis dans la région par les gens 1453 du duc. De là ils écrivirent aux Gantois pour les informer de leur venue et demander un sauf-conduit[76]. Le 29 ils étaient à Lille, où résidait alors le duc de Bourgogne. On leur fit attendre huit jours une audience, sous prétexte que le duc était malade et ne pouvait les recevoir. Enfin, ils furent reçus le 5 février, dans la soirée. Le duc était dans sa chambre, assis sur une chaise placée au chevet de son lit. A sa droite étaient le comte de Charolais, le chancelier et plusieurs membres de son conseil. Il se leva pour prendre les lettres du Roi et porta la main à son chaperon en disant : Comment se fait monseigneur le Roi ? Quand Menypeny lui eut répondu, il s'assit, et entendit l'exposé de la mission des ambassadeurs. Le duc se borna à faire dire par son chancelier qu'il consulterait son conseil et donnerait sa réponse. Puis, se levant, il fit un salut de la tête, souleva son chaperon et congédia les ambassadeurs.

Cet accueil n'était pas de nature à rassurer les envoyés du Roi. En arrivant à Lille, ils avaient appris que le bâtard de Saint-Pol était prêt à partir pour aller, soit à Calais, soit en Angleterre[77], Ils surent plus tard que le duc les aurait fait attendre encore davantage s'il n'avait voulu connaître ce qu'ils avaient à lui dire avant d'expédier le bâtard. Quelques démarches qu'ils pussent faire, ils demeurèrent trois semaines sans recevoir la moindre communication. Ils voyaient bien qu'on voulait lasser leur patience et les renvoyer sans daigner leur répondre ; ils ne doutaient point d'ailleurs, que la réponse qu'ils recevraient ne fût négative en ce qui concernait l'affaire de Gand ; on leur avait laissé clairement entendre que, s'ils se rendaient à Gand, jamais ils n'en rapporteraient de nouvelles au Roi. Apprenant que les Gantois étaient en pourparlers avec le duc et qu'ils avaient envoyé des députés à Bruges pour conférer avec le comte d'Étampes, ils se demandèrent ce qu'ils avaient à faire. Ils savaient que le duc n'avait pas grande fiance au Roi ni à eux ; qu'il lui semblait que leur venue ne pouvait être qu'à son préjudice, car on lui avait dit que, n'eût été l'empêchement de Bordeaux, l'armée du Roi se fût tournée sur lui. D'un autre côté, le seigneur de Créquy n'avait point laissé ignorer aux ambassadeurs qu'ils faisaient grand déplaisir au duc en lui parlant de la matière de Gand, et d'autres serviteurs du duc le leur avaient répété. Ils Pensaient que, si quelque arrangement était fait avec les Gantois pendant leur séjour à Lille, le duc demeurerait en sa grande dissidence du Roi ; ils craignaient en outre que le bâtard de Saint-Pol, dans sa mission près des Anglais, ne tramât avec eux quelque chose de fâcheux. Ils n'ignoraient point qu'un secrétaire du duc d'Alençon était venu apporter des lettres de son maitre au duc, qui les avait ouvertes avec empressement ; que d'un autre côté, un jeune gentilhomme était à la cour de Bourgogne de la part du Dauphin, sous le prétexte de rapporter deux gerfauts à son maître.

Après s'être concertés, ils se décidèrent à aller trouver Pierre de Bauffremont, seigneur de Charny, qui, en l'absence du grand chambellan Antoine de Croy, remplissait son office. Monseigneur, lui dirent-ils, nous voyons bien que monseigneur de Bourgogne se défie du Roi et ne nous donne réponse, dont, en bonne foi, il a grand tort. Nous ne sommes point venus ici en son préjudice ni pour lui faire quelque déplaisir, mais seulement pour les causes que nous lui avons dites. Afin que vous connaissiez que nous avons bonne volonté envers monseigneur de Bourgogne, parlez à nous en chevalier. Nous savons bien que les Gantois sont à Bruges, avec monseigneur d'Étampes, pour traiter. Dites-nous que nous nous déportions un peu de temps jusqu'à ce qu'on voie si l'appointement se fera, et nous nous gouvernerons tellement que monseigneur de Bourgogne ne pourra pas dire que nous ayons mauvaise volonté et que nous veuillions empêcher ledit appointement. — Charny répondit : Puisque vous parlez en chevaliers, je vous dis que c'est le plus grand déplaisir que le Roi puisse faire à monseigneur de Bourgogne que de se mêler de cette besogne de Gand, car nous savons bien que le Roi ne voudroit pas que nous eussions mieux que nous avons. Et je vous jure, par l'ordre que je porte, que c'est le bien et profit du Roi que vous vous en alliez sans autre chose faire et sans vous en mêler plus avant. Je crois que si vous le faisiez ainsi, Monseigneur feroit quelque chose[78]. Charny ajouta que, quelque provision que les Gantois eussent du Roi, le duc n'y obéirait pas et n'en continuerait pas moins la guerre. Les ambassadeurs répondirent qu'ils ne se retiraient point et que, autant que cela leur serait possible, ils avaient l'intention d'accomplir leur charge.

Le lendemain, Saint-Romain alla voir le chancelier, qu'il trouva en compagnie de Charny, et lui répéta que lui et ses collègues ne voulaient nullement entraver la conclusion du traité qui se négociait avec les Gantois. Le chancelier feignit d'ignorer la négociation et dit à Saint-Romain : Je m'ébahis de ce que le Roi envoie vers les Gantois pour leur faire justice, car, s'ils la veulent avoir, ils la doivent bien aller quérir. Saint-Romain répondit que les Gantois avaient envoyé vers le Roi, mais que ce prince, ayant été sollicité par le duc de lui venir en 'aide quand il en aurait besoin, n'avait pas voulu répondre à la requête des Gantois avant d'avoir été bien averti et informé des deux côtés.

L'embarras des ambassadeurs ne faisait que s'accroître ; ils se bornèrent à solliciter la réponse attendue depuis longtemps.

Elle vint enfin. Le chancelier, en présence du duc, du comte de Charolais et de plusieurs seigneurs, fit la déclaration suivante :

1° En ce qui touche le fait de Gand, à cause des grands outrages, désobéissance et rebellion des Gantois, le duc ne peut consentir à ce que les ambassadeurs se rendent à Gand ; ils ne doivent point y aller pour plusieurs raisons, ou tout au moins ils doivent surseoir à ce voyage pendant un certain temps.

2° En ce qui touche le fait relatif aux Anglais de Calais, dont le Roi se plaint, la chose est advenue par la faute du comte d'Eu et de ses gens qui, chaque jour, font des courses devant Calais. D'ailleurs, Madame de Bourgogne a toujours fait ce qu'elle a pu sous ce rapport, et elle fera encore du mieux qu'elle pourra.

3° En ce qui touche le fait des logis et les autres maux qui sont l'objet de réclamations de la part des sujets du Roi, les gens du Roi ont, par le passé, fait pis aux pays du duc ; on ne peut entretenir des gens d'armes sans que parfois ils ne fassent quelque mal. Le duc est au courant de ce qui s'est passé, et il n'a pas de réparation à donner.

Les ambassadeurs demandèrent que cette réponse leur fût remise par écrit. Le chancelier s'y refusa, disant qu'il n'en était pas besoin. Les ambassadeurs se bornèrent alors à dire qu'ils feraient savoir à leur maitre les intentions du duc ; puis ils se retirèrent.

Le lendemain ils allèrent prendre congé du chancelier, qui leur dit que le duc désirait connaître leurs projets et savoir s'ils entendaient surseoir à leur voyage. Les ambassadeurs, voulant éviter de donner prise au duc et de lui offrir un prétexte pour consentir quelque chose vilaine avec les Anglais, répondirent qu'ils lui feraient savoir leur décision, et qu'ils avaient l'intention d'attendre quelque temps à Tournai pour voir la tournure que prendraient les négociations.

Les ambassadeurs avaient, dès le 17 février, fait connaître au Roi l'étrange façon dont ils avaient été reçus et les craintes qu'ils concevaient au sujet de l'accomplissement de leur mission. Ils s'empressèrent de lui donner avis de la réponse qui leur avait été faite.

Le Roi approuva la conduite de ses ambassadeurs ; il les autorisa à rester à Tournai jusqu'à ce qu'ils eussent pu voir si l'accord se ferait entre le duc et les Gantois, et à renoncer au voyage de Gand s'ils le jugeaient convenable. En ce cas, les ambassadeurs devraient écrire aux Gantois pour exposer le motif de leur venue et provoquer une réponse de leur part, afin qu'il apparût bien que le Roi n'entendait dénier la justice à aucun de ses sujets, mais la leur administrer ainsi qu'il appartiendrait par raison[79].

A la date du 28 mars, les ambassadeurs adressèrent une nouvelle lettre au Roi[80]. Le duc était â Lille et une députation des Gantois s'était rendue à Seclin. Ils avaient su que le bâtard de Saint-Pol était allé vers les Anglais pour la conclusion d'une alliance ; il était revenu et était reparti aussitôt. Madame de Bourgogne était partie à la hâte de Lille pour se rendre à Gravelines, où elle était encore[81] ; on disait que l'alliance entre le duc et les Anglais était faite et que bientôt six à huit mille Anglais allaient arriver à Calais. Mais le duc allait avoir fort à faire du côté du Luxembourg : plusieurs villes s'étaient soustraites à son obéissance ; le duc avait fait partir le seigneur de Croy et la guerre s'était rallumée. Le duc préparait une grosse armée.

Conformément aux instructions du Roi, les ambassadeurs écrivirent à plusieurs reprises aux Gantois. Mais il était facile de voir, par les réponses qui leur furent faites[82], que les Gantois se souciaient peu de l'intervention royale et ne cherchaient qu'à s'accommoder avec le duc. Aussi les ambassadeurs résolurent-ils de ne point se rendre à Gand. Sachant d'ailleurs combien le duc de Bourgogne était hostile à ce voyage, ils craignaient de le pousser à bout. Les bruits les plus alarmants étaient répandus : un jour on disait que l'alliance entre les Anglais et le duc était conclue ; un autre jour que le mariage du comte de Charolais avec la fille du duc d'York était résolu. Les ambassadeurs estimaient que, si le Roi eût donné aux Gantois un mandement de justice, le duc n'y eût point obéi, ce qui, selon eux, eut été grand inconvénient, attendu les termes ou le Roi est de présent[83] — allusion à la situation de la Guyenne —. Ils écrivirent donc une dernière lettre aux Gantois pour leur faire connaître le motif qui les décidait à ne point aller à Gand, et leur répéter que le Roi était prêt à leur faire justice et à leur donner toutes provisions aimables et raisonnables en justice s'ils l'en requéraient ; pour cela ils devraient s'adresser à leur procureur en Parlement ; ils avaient d'ailleurs pleine latitude pour traiter avec le duc de Bourgogne[84].

Sur ces entrefaites, les ambassadeurs reçurent une lettre du Roi, datée du 14 avril. Le Roi leur donnait l'ordre de s'en revenir, en se départant de par delà le plus agréablement pour chacune des parties que possible leur seroit[85]. Ils n'avaient Point attendu cette lettre pour se mettre en route. Ils se rendirent à Lille pour prendre congé du duc, et savoir si, comme les Gantois le leur avaient écrit, le prince était dans l'intention d'entrer eu négociations. La réponse fut négative. Le seigneur de Charny profita de l'occasion pour faire entendre à Saint-Romain, l'un des ambassadeurs, des paroles mal sonnantes pour son maitre : Le peuple de France, dit-il, est mécontent du Roi, pour les tailles et aides qui courent et la mangerie qui se fait au Royaume ; il y a là grand danger. — Saint-Romain répondit que, dans les pays du duc, l'aide du vin Montait dans une seule ville à un chiffre plus élevé que toutes les aides du Roi en deux villes. Quant aux tailles, le Roi n'en imposait que pour ses gens d'armes, et elles ne s'élevaient qu'à quatorze on seize sous par feu. Pour les mangeries, la provision était bien aisée à mettre, et le Roi y avait bonne volonté. Les ambassadeurs quittèrent Lille, emportant une lettre du duc pour le Roi[86].

Ainsi se termina cette seconde ambassade, aussi stérile que la première, et dont le résultat était non moins humiliant pour la Couronne. Quant à l'affaire des Gantois, elle se dénoua par la voie des armes. La guerre reprit au mois de juin 1453, avec plus de violence que jamais. Après la prise de Poucques, après celle de Gavre, que le duc célébra dans une lettre triomphante, adressée à Charles VII (25 juillet), où il annonçait en post-scriptum que les Gantois imploraient sa merci[87], un traité fut conclu à la date du 30 juillet. Les Gantois durent subir la loi du vainqueur.

 

 

 



[1] Voir t. IV, chapitre XIII.

[2] Ambassade d'Antoine Hanneron et de Pierre de Goux : 9 avril-31 mai ; ambassade de Pierre de Goux : 2-12 juin ; ambassade de Jean de Molesmes : 24 septembre-30 novembre. Archives du Nord, B 2002, f. 85 v°, 115 et 122 v° ; 13 2002, f. 86 ; B 2002, f. 135 et 144. Une conférence fut tenue à Langres, au mois de juillet, pour régler certaines limites territoriales (Du Puy, 113, f. e, 27 et 108 s. V C Colbert, 65, f. 236 et 775.) — Le 7 décembre 1449 un chevaucheur de l'écurie part de Bruges pour porter au Roi des lettres closes du duc. Archives du Nord, B 2002, f. 135.

[3] De Rouen il lui envoya un valet de chambre, Jean de la Grange, porteur de lettres closes (Rôle dans Preuves de Mathieu d'Escouchy, p. 379) ; au commencement de 1450, le duc fait des gratifications à deux poursuivants d'armes, Martainville et Colombiers, qui lui ont apporté des lettres closes du Roi (Archives du Nord, B 2004, f. 303).

[4] Ambassade de Jean Boudault, écuyer d'écurie du duc : 30 janvier-17 février 1450 ; ambassade de Jean de Molesmes : 27 février-27 mars. Archives du Nord, B 2004, f. 136 et 131 v°. — A ce moment, Charles VII donna commission (28 mars) à quatre de ses conseillers pour se transporter à Mâcon et faire une enquête sur l'affaire du sel. Archives de la Côte-d'Or, B 11176.

[5] 4 mai-21 juillet. Archives du Nord, B 2004, f. 113, 132 ; B 2008, f. 96 v°, 105, 105 v°, 106 v°, 113. Archives de Bruxelles, n° 1921, f. 169 (Compte de Guillaume de Poupet, année 1452, transporté au dernier siècle de Lille à Bruxelles). Cf. lettre de Jean Singet (ou Fruget ?) aux Archives de la Côte-d'Or, B 11942, n° 250, publiée dans la nouvelle édition d'Olivier de la Marche, t. II, p. 208 note.

[6] La charge des ambaxeurs de Monseigneur le duc de Bourgogne. Archives de la Côte-d'Or, B 11907 ; Bibl. nat., collection de Bourgogne, 99, p. 486, et Le Grand, VII, f. 213.

[7] Responce faite aux articles bailliez par les ambaxeurs de Monseigneur de Bourgogne. Archives de la Côte-d'Or, B 11907 ; Bibl. nat., collection de Bourgogne, 99, p. 486, et Le Grand, VII, f. 213.

[8] Responce faite aux articles bailliez par les ambaxeurs de Monseigneur de Bourgogne. Archives de la Côte-d'Or, B 11907 ; Bibl. nat., collection de Bourgogne, 99, p. 486, et Le Grand, VII, f. 213.

[9] Conférence d'Eu, continuée à Rouen et à Dieppe : 26 août-12 octobre ; 26 octobre-22 novembre ; 12-30 décembre ; mission du seigneur d'Auxy, Jean Potel, etc., au nom du duc. Archives du Nord, II 2004, f. 191 v°, 201 v°-202 v°, 205 v°, 208 v° ; 2008. f. 98 v° et 152 ; 2017, f. 113 v° ; cf. Archives nationales, J 798, n° 14. — Conférence de Mâcon, transférée à Villefranche : 27 août-14 septembre ; mission de Jean Jacquelin et Gérard de Plaine, au nom du duc. Archives du Nord, B 2008, f. 116. — Les commissaires du Roi étaient Blaise Greslé, Pierre Balarin, Jean Jossart, seigneur de Chastillon et Jean Nancey (Archives de la Côte-d'Or, B 11176). Voir les Doléances et requêtes faites à Villefranche : Archives de la Côte-d'Or, B 11908, et Bibi. nat., collection de Bourgogne, 99, p. 892-902.

[10] Jean Chartier, t. II, p. 223.

[11] Son ambassade dura du 7 septembre au 28 octobre (Archives du Nord, B 1004, f. 132 v° et 204). En môme temps le duc fit partir un de ses écuyers d'écurie, Hervé de Meriadec, chargé de se rendre près du Roi en Touraine, près du duc de Bretagne à sa nouvelle entrée dans son duché, et devers plusieurs autres princes et grans seigneurs en diverses marches de ce royaume et aucuns extremitez d'icelui, pour aucunes matières secretes dont mon dit seigneur ne veult autre declaration estre faicte. (Archives de Bruxelles, 1921, f. 169 v°.) Sa mission dura du 12 septembre au 23 décembre 1450 ; l'envoyé du duc se rendit en dernier lieu près du roi d'Angleterre (Archives du Nord, 2004, f. 113 v°).

[12] Archives, J 257, n° 77.

[13] Elle se composait, avec le seigneur de Chimay, de Jean de la Driesche, Jean de Molesmes et Guillaume Rolin, seigneur de Deauchamp, et fut employée du 29 décembre 1450 au 4-9 mars 1451. Archives du Nord, B 2004,  f. 211 v° ; 2008, f. 96 v°, 106, a19 v°, 129 v°.

[14] Ce document est visé dans les instructions de Charles VII du mois d'avril suivant. D. Plancher, t. IV, p. CXCVII.

[15] Messire Raoul, seigneur de Gaucourt, chevalier, conseiller et premier chambellan du Roy IIIc l. pour avoir esté en fevrier de Tours en ambassade devers Mgr le duc de Bourgogne, avec Mgr l'arcevesque de Rheims et Jehan Dauvet, procureur general, pour le fait du traité d'Arras et autres matieres. — Me Guy Bernard, maistre des requestes, VIxx XVII l. X s. pour semblable cause. Cabinet des titres, 685, f. 144 v°.

[16] Ce Jean Van den Driessche était un huissier de la chambre du Conseil que les magistrats de Gand avaient condamné en 1446 à un exil de cinquante ans ; le duc l'avait marié richement et l'avait comblé d'honneurs. Voir Kervyn de Lettenhove, Histoire de Flandre, t. III, p. 575.

[17] Minute dans le ms. fr. 5040 f. 89 ; édité Histoire de Bourgogne, t. IV, p. XCVII et suivantes.

[18] Les Instructions pour Flandres, en date du 14 février 1451, se trouvent en copie du temps dans le ms. fr. 5040, f. 154. Malheureusement, il y a dans le manuscrit une lacune importante : le texte s'arrête à la phrase citée et dont il nous a fallu dégager le sens.

[19] Van den Driessche est mandé près du duc à Termonde à partir du 18 février, tant tour l'ambassade de l'archevêque de Reims que pour autres affaires (Archives du Nord, BB 2008, f. 120). — Le 11 mars, un chevaucheur de l'écurie va, de Bruxelles, porter des  lettres closes du duc au Roi et au Conseil (Id., f. 162). — Du 17 au 20 mars, Georges Chastellain fait un voyage secret (Id., f. 127 v°). La date du 15 mars est fixée par les mandats de paiement dont il est question dans la note suivante.

[20] Les ambassadeurs employèrent si bien ce temps que, par lettres patentes du 19 juin 1451, Philippe le Bon fit compter à l'archevêque de Reims dix francs, à Jean Dauvet six francs, et à Etienne Cordier deux francs par jour de vacation, pour soixante quinze Jours à partir du 15 mars. Archives du Nord, B 2008, f. 94 r° et v°.

[21] Ms. fr. 5040, f. 134.

[22] Le départ des ambassadeurs pour Rome eut lieu le 11 mai ; ils sont nommés dans les comptes (Archives du Nord, B 2008, f. 100 et 145 ; Archives de Bruxelles, 1921, f. 153 v° et 177 v°) et dans le Liber de virtutibus Philippi, etc., de Jean Germain (Ludwig, Reliquiæ manuscriptorum, t. XI, p. 83, et Chroniques belges, p. 77-18). Cf. Olivier de la Marche, t. II, p. 205 ; Livre des faits de messire Jacques de Lalain, dans les Œuvres de G. Chastellain, t. VIII, p. 249 : Le départ des ambassadeurs envoyés au Roi s'effectua du 1er au 8 juin (Archives du Nord, B 2017, f. 114 v° et 116).

[23] Manuscrit petit in-4° de 24 feuillets, coté Fr. 5737, avec une miniature en tête, représentant Charles VII donnant audience aux trois ambassadeurs.

[24] Kervyn de Lettenhove, Histoire de Flandre, 2e édition, t. III, p. 273.

[25] L'original de cette lettre est dans le ms. fr. 5011, f. 19 ; elle a été publiée par M. Kervyn dans la première édition de son Histoire de Flandre, t. IV, p. 516 (avec la date fautive de 1452), et par M. Gachard, dans ses Analectes historiques (Bulletins de la commission royale d'histoire, 2e série (1859), t. XII, p. 362).

[26] C'étaient Guilbert Dausque et Nicolas le Bourguignon. Archives du Nord, B 2008, f. 127 ; Archives de Bruxelles, 1921, f. 186 v°.

[27] Elle se composait de Guiot Pot et de Nicolas le Bourguignon (Archives de Bruxelles, 1921, f. 170 v° et 187). Le voyage des ambassadeurs dura du 13 décembre 1451 au 9 février 1452.

[28] Ms. fr. 5042, f. 29 ; édité Preuves de la Chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 413.

[29] Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCIII.

[30] Un nouvel ambassadeur, Jean Jacquelin, partit le 5 février pour aller trouver le Roi à Tours, et fut employé à cette mission jusqu'au 29 mars (Archives de Bruxelles, 1921, f. 167 et 215). Le 23 février, un chevaucheur de l'écurie partait de Bruxelles pour aller devers ledit Me Jehan Jacquelin et monseigneur l'arcevesque de Tarente eulx porter response, estans devers le Roy à Tours, de certaines lettres qu'ilz avoient escript à mondit Seigneur touchans aucunes matières secrettes. (Id., ibid., f. 218.)

[31] L'original de cette lettre est dans le ms. fr. 5041, f. 2. Elle a été publiée par M. Kervyn, Histoire de Flandre, 1re édition, t. IV, p 506, et dans les Preuves de la chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 415.

[32] Original, Ms. fr. 5041, f. 33 ; édité Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCIII.

[33] Donc que cecy vray soit appert quand, par deux ou trois fois, le Roy s'est assayé de les ravoir par demande, et a envoyé des ambassadeurs à ceste cause par devers le possessànt, sans encores luy offrir les deniers sur quoy s'estoit obligé, mais faisant dire que autant et plus que les deniers montoient il en avoit levé et reçu... Et voyant que ces terres ne pourroit ravoir sans satisfaction des deniers, contendi à faire Payement par vieilles debtes trouvées en la chambre des comptes à Paris... Auxquels ambassadeurs proposans cecy, fut suffisamment respondu, et aussi à la matière, tellement que peu y profitèrent. Chastellain, t. IV, p. 17.

[34] Et par ainsi doncques, quand tous ces moyens quis faillirent [et lorsque] le Roy avait jà son royaume tout entier doé à luy, exceptées lesdites terres de Somme, dont l'envie se sourdy grande en cœurs de plusieurs, imaginèrent de les recouvrer par mauvaistié de cestuy flitur Roy, qui faindroit non vouloir consentir au compact de son père, qui estoit et eust esté chose damnable et honteuse, et directement contre la paix et toute équité divine et humaine. Chastellain, t. IV, p. 18. Cf. t. III, p. 51-54. — Dans le procès de Guillaume Mariette, il est fait allusion à cette revendication. Brezé, se servant de l'intermédiaire de l'agent du Dauphin, faisait dire au duc de Bourgogne : Monseigneur dit... qu'il recouvrera les pays engaigez, sans riens bailler, et que encores y aura-t-il des escus plus de Cm, etc. — Item recouvrera Ly (Lille), Do (Douai) et que par tous ses pays en tiendra de ses plus fortes places, etc. Preuves de Mathias d'Escouchy, p. 277.

[35] Monseigneur le comte de Dunois et de Longueville, messire Bertrand de Beauvau, chevalier, seigneur de Precigny, pour les frais et despens qu'il leur a convenu faire en traitant et appaisant avec les ambaxadeurs du duc de Bourgogne touchant les pays engagea, VIm VIc XXV l. Compte d'Antoine Raguier, trésorier des guerres, commis par le Roi, à la nomination du duc de Bourgogne, à la recette d'une taille de 36.000 fr. aux pays sis sur la rivière de Somme transportés au duc par le traité d'Arras. Cabinet des titres, 685, f. 131.

[36] Ces lettres ont été publiées par Lenglet du Fresnoy, dans son édition des Mémoires de Commines, t. II, p. 403 et suivantes.

[37] Le procès-verbal original de cette enquête, revêtu des signatures des commissaires, se trouve dans le ms. fr. 10365, p. 47. Il a été publié par Lenglet du Fresnoy, l. c., p. 404-407.

[38] Déposition d'André du Beuf : Et outre fut dit à luy qui parle par feu mondit seigneur le chancellier que, en ayant paix avec lesdiz Anglois, que mondit seigneur de Bourgoigne rendroit au Roy franchement et quictement lesdictes terres et seigneuries... et scet luy qui parle veritablement que, au jour que ledit traictié fut fait, ou environ iceluy jour, il vist tenir à feu mondit seigneur le chancellier unes lettres patentes en Parchemin scellées du scel de mondit seigneur de Bourgoigne en cire vermeille ; et disait iceluy feu monseigneur le chancellier audit feu messire Christophle (d'Harcourt) que c'estoit les lettres de promesses de mondit seigneur de Bourgoigne de rendre les-dictes terres et seigneuries franchement et sans rien payer, parmy ayant paix ausdiz Anglois.

Déposition du connétable de Richemont : Interrogé se mondit seigneur de Bourgoigne ou ses gens firent lors ou depuis aucunes promesses à mesdiz seigneurs et autres ambassadeurs du Roy de rendre et restituer lesdictes terres engagées toutes et quantes fois que le Roy feroit paix ou longue treve aux Anglois, sans payer ladicle somme de quatre cens mille escus pour laquelle lesdictes terres sont engagées, et si de ce en furent faictes ou accordées aucunes lettres, dit qu'il n'en scet aucunes choses.

Déposition du maréchal de la Fayette : Se recorde que finablement lesdiz gens de mondit seigneur de Bourgoigne consentirent et accorderent que, en baillant lesdictes terres en galges à mondit seigneur de Bourgoigne de quatre cens mille escus, ou cas que le Roy feroit paix final aux Anglois, il recouvrast lesdictes terres engaigées pour lesdiz quatre cens mille escus sans payer aucune chose. Et cuidoit certainement que lesdictes Promesses sur ce faictes par lesdiz gens de mondit seigneur de Bourgoigne fussent eseriptes oudit traictié ; et n'est pas souvenant qu'ils accordassent restituer lesdictes terres s'il avenoit que le Roy prinst longue treve aux Anglois.

[39] Nous les avons mentionnées plus haut. Voir t. II, chapitre XII.

[40] Archives du Nord, B 1505.

[41] Original signé de cette déposition. Ms. fr. 5044, n° 18.

[42] Voir Chastellain, t. IV, p. 358.

[43] Cardin des Essars, escuyer, gouverneur et capitaine d'Aumalle, pour un voyage devers le comte de Saint-Pol et le duc de Bourgogne, C. l. (Onzième compte d'Étienne de Bonney. Cabinet des titres, 685, f. 150 v°.) — Cardin des Essarts, escuyer, XL l. V s. pour aller par devers le comte de Saint-Pol. (Troisième compte de Mathieu Beauvarlet. Id., ibid., f. 159.)

[44] Certaines ouvertures ont esté flûtes entre eux (Saint-Pol et le duc) sur les difcultez qui pourroient estre à cause d'aucunes noz terres et seigneuries. Lettre du Roi au sire de Croy, publiée par M. de Reiffenberg dans les Bulletins de la Commission royale d'histoire de Belgique, t. IV, p. 62. — Nous la donnons aux Pièces justificatives.

[45] Même lettre.

[46] Messire Loys de Beaumont, chevalier, seigneur du Plessis Macé et de la Forest, conseiller et chambellan du Roy, M l. pour un voyage devers Mgr le duc de Bourgogne en Flandre. — Me Guy Bernard, maistre des requestes, pour ledit voyage, IIIc l. — Me Jehan Dauvet, conseiller et procureur général, pour ledit voyage, IIIc l. Cabinet des titres, 685, f. 150 v. ; cf. f. 156. — Georges Chastellain, parlant de Guy Bernard (t. III, p. 33), l'appelle homme bien notable et discret, bon clerc et de grant autorité au conseil du Roy.

[47] Ces instructions se trouvent dans le ms. 5040, f. 77-81 ; elles ont été publiées par Kervyn de Lettenhove, l. c., 1re édit., I. IV, p. 510.

[48] Utinam non nimium in eumdem confisus, ab eo tempestive declinasset ! Forsitan ad casum ad quem pervenit perductus nunquam fuisset. Chronique d'Adrien de But, p. 247. — Il estoit orgueilleux oultre bord et à l'encontre de ses meilleurs, dit Chastellain (t. IV, p. 134), qui ajoute : Et estoit le plus extremement dissolu sur femmes par multitude que nul à peine son pareil. Et ailleurs (t. II, p. 172) : Vaillant chevalier estait en guerre, et assez heureux et merveilleux solliciteur de Madame Vénus.

[49] C'était un ancien conseiller du roi René, solliciteur de ses causes au Parlement.

[50] Tout ce qui suit est emprunté à la relation des ambassadeurs, en date du mois de septembre, qui se trouve dans le ms. fr. 5041, f. 82, et a été publiée dans les Preuves de D. Plancher, Histoire de Bourgogne, t. IV, p. CCV.

[51] Relation des ambassadeurs, l. c. Cf. Chroniques de Flandre, t. III, p. 494.

[52] Relation citée ; cf. Chastellain, t. II, p. 308-309. Voir le discours que Jean Germain place dans la bouche du duc. Oratio ad Pium Papam, p. 198.

[53] Relation citée ; cf. Chastellain, t. II, p. 310.

[54] Sur tous ces faits voir Blonnnaert, Guerre de la ville de Gand contre le duc de Bourgogne (Gand, 1841, in-8° de 63 p.), et Kervyn de Lettenhove, Histoire de Flandre, 2e édition, t. III, p. 318 et suivantes.

[55] Le texte est dans Kervyn, 1re édition, t. IV, p. 425-426.

[56] Kervyn, l. c., p. 426-427.

[57] Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCVIII.

[58] Du Clercq, l. II, ch. XVI.

[59] Kervyn, t. III, p. 330.

[60] Lettres des ambassadeurs aux Gantois en date du 9 juillet. Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCVIII.

[61] Le 19 juillet, André, seigneur de Humières, allait à Lille joindre l'évêque de Tournai, le chancelier Rolin et plusieurs conseillers du duc assemblés pour le fait des Gantois, lesquels s'estoient soubzmis en certains ambaxadeurs envoiez de par le Roy pour l'appaisement de mon dit seigneur (le duc) vers eulx. Archives du Nord, B 2017, f. 115 v°-116 ; cf. Archives de Bruxelles, 1921, f. 186.

[62] Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCVIII.

[63] Relation des ambassadeurs. Ms. fr. 5040, f. 209 ; éditée par Kervyn, Histoire de Flandre, 1re édition, t. IV, p. 517-522.

[64] Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCVIII.

[65] Elle se trouve en original aux Archives de Bruxelles : Pièces restituées par l'Autriche (juillet 1864), n° 786.

[66] Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCX.

[67] Ce n'est pas à propos de ce don princier, mais en parlant de libéralités dont le bailli de Berry fut plus tard l'objet que Chastellain fait cette remarque (t. III, p. 28).

[68] A messire Loys de Luxembourg, conte de Saint Pol, la somme de deux mil escuz d'or, laquelle mondit seigneur le duc lui a de sa grace donnée et octroyée pour une fois, en consideracion des vacacions qu'il a faictes avec les ambaxadeurs du Roy en certaine sentence et appointement par eulx rendue entre mon avant dit seigneur et ceulx de sa ville de Gand, pour lors rebelles et desobeissans envers luy, et aussi pour les frais et despens soustenus par ledit conte de Saint Pol à ceste cause. Mandement du 22 septembre 1452, porté dans le compte de 1455. Archives du Nord, B 2020, f. 317 v°. — Ce qui ajoute à la signification de ce don, c'est que le duc détestait le comte de Saint Pol ; cela résulte d'un passage de Chastellain (t. III, p. 132) : Celui de Brederode, qui mesme estoit de son ordre, estot celuy du monde, avecques le conte de Saint Pol, que plus héoit pour celle heure.

[69] Aux seneschal de Poytou, l'archediacre de Tours et au procureur general du Roy, la somme de six mille livres sur la somme de XXIIIIm l. que mon dit seigneur lui (sic) a de sa grace donné et octroyé pour une fois, pour cause de leurs vacacions, frais et despens qu'ils ont fait par long temps qu'ilz ont sejourné quant ils ont esté en ambaxade Par devers luy de par le Roy pour traitier et appointier de la guerre et different qu'il avoit en ladicte année mil truc Lai à l'encontre desdis de Gand, comme il peut apparoir par mandement donné le XVIe jour de decembre M CCCC LII. Archives de Bruxelles, 1921, f. 340 v°. — Nota. Le passage a été barré dans le compte, et, en marge, on lit : Neantmoins, attendu la grandeur de cette somme, il semble que le mandement deust estre chargié de quittance.

[70] Relation des ambassadeurs de Charles VII, dans Kervyn, Histoire de Flandre, 1re édition, t. IV, p. 525. — On a la trace d'une ambassade envoyée par le duc au Roi du 23 septembre 1452 au 31 décembre suivant (Archives de Bruxelles, 1921, f. 159 et 265). Au mois d'octobre, un secrétaire du Dauphin était près du duc, id., (ibid., f. 355).

[71] C'est du moins ce qu'on lit dans une chronique flamande citée par M. Kervyn, l. c., p. 457.

[72] Il venait de remplir une mission en Écosse, au cours de laquelle il était tombé aux mains des Anglais.

[73] Voir Cabinet des titres, 685, f. 166 v°.

[74] Original, ms. fr. 5040, f. 45 ; édité Histoire de Bourgogne, t. IV, preuves, p. CCX.

[75] Tous les détails qui suivent sont empruntés à la lettre des ambassadeurs en date du 17 février 1453 (original, ms. fr. 5041, f. 53 ; éd. par Gachard dans les Comptes rendus de la commission royale d'histoire (2e série, t. XII, p. 364), et à leur relation en date du 29 niai (Ms. fr. 5040, f. 45 ; éd. par Kervyn, Histoire de Flandre, 1re édition, t. IV, p. 523 et suivantes).

[76] Lettre du 14 janvier. Texte dans la relation du 29 mai.

[77] Les comptes de Lille mentionnent un voyage du bâtard de Saint-Pol à Calais ; du 14 au 26 février, pour aucunes matières touchant les abstinences de guerre d'entre les pays et seigneuries de mondit seigneur et le royaulme d'Angleterre. Archives du Nord, B 2020, f. 176.

[78] L'un des ambassadeurs, Saint-Romain, interprétait cette parole dans ce sens que le duc leur donnerait de l'argent.

[79] Lettre du 6 mars 1453, insérée dans la relation du 20 mai. Kervyn, l. c., p. 529.

[80] Original, Du Puy, 762, f. 116. Éditée Kervyn, l. c., p. 522.

[81] Les comptes nous apprennent que la duchesse fut à Gravelines, ayant en sa compagnie le sire de Humières, le bâtard de Saint-Pol, etc., du 10 mars au 30 avril 1453. Il s'agissait ostensiblement d'une journée pour le fait de la marchandise. Archives du Nord, B 2017, f. 118 v° ; 2020, f. 177.

[82] Lettre du 22 mars ; autre lettre, sans date ; lettre du 31 mars. Relation des ambassadeurs, l. c., p. 530 et suivantes.

[83] Relation des ambassadeurs, l. c., p. 534.

[84] La lettre est dans la relation des ambassadeurs du 29 mai, l. c., p. 534-536.

[85] Le texte est dans la relation des ambassadeurs du 29 mai, l. c., p. 537.

[86] Relation citée. Les ambassadeurs repassèrent par Tournai, d'où ils partirent le samedi de Quasimodo (14 avril) pour retourner en France ; ils passèrent le mardi suivant par Compiègne. Archives de Compiègne, CC 19 ; extraits des registres de Compiègne dans D. Grenier, XX bis, 2e partie, f. 22.

[87] Me suy incliné à leur pardonner leurs dictes deffaultes, et demain me doy trouver devant ma dicte ville de Gand, atout mon armée, pour recevoir desdiz de Gand ladicte amende honorable, et moy fere par eulx obeïssance. Original, Ms. fr. 5041, f. 16 et 17 ; éd. Preuves de la chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 425-429.