1435-1439 Charles VII à Tours ; mort de la reine Isabeau ; naissance d'un fils ; députation des Parisiens. — Arrivée de la dauphine Marguerite d'Écosse ; cérémonie du mariage ; formation de la maison du dauphin. — Intrigues à la Cour ; état des partis ; rivalité du duc de Bourbon et de Charles d'Anjou. — Voyage du Roi dans le Midi. — Les menées du duc de Bourbon et la nouvelle de l'apparition de Rodrigue de Villandrando en Touraine le rappellent soudain ; expédition dirigée contre le célèbre routier ; sévérité du Roi à l'égard du duc de Bourbon. — Nouvelle campagne de Charles VII ; il fait le siège de Montereau ; bravoure qu'il' y déploie. — Entrée solennelle du Roi à Paris, au milieu des acclamations populaires. Voyage en Saintonge ; préparatifs pour une expédition en Guyenne. — Le Roi perd son second fils ; il tombe malade. — Voyage dans le Midi ; entrée à Limoges ; la journée du Roi en voyage ; séjours à Riom, au Puy, à Lyon. — Charles VII revient pour seconder ses gens employés au siège de Meaux ; court séjour à Paris. — États généraux tenus à Orléans ; résultats de cette assemblée. Nous avons dit plus haut qu'on se tromperait en pensant que la révolution de palais qui aboutit à la chute de La Trémoille ait produit chez Charles VII une soudaine transformation. C'est par degrés, et d'une façon presque insensible, qu'il sortit de cette inaction où, par un fâcheux concours de circonstances, il avait été si longtemps plongé, qu'il secoua cette apathie devenue chez lui comme une seconde nature. Le premier acte personnel accompli par Charles VII, au lendemain de la signature du traité d'Arras, fut la ratification du pacte conclu avec le duc de Bourgogne. Nous apprécierons plus loin le caractère politique de cet acte. Bornons-nous pour le moment à l'enregistrer. C'est le il décembre, dans l'église de Saint-Martin de Tours, qu'eut lieu la cérémonie de la prestation du serment. Dans le courant de l'année 1435, Charles.VII avait perdu sa mère. La reine Isabeau était morte à Paris le 29 septembre, huit jours après la conclusion du traité d'Arras. Cette mère dénaturée, dont la carrière avait été signalée par de -si honteux débordements et qui n'avait pas craint de déshériter son fils, vivait depuis longtemps dans l'abandon et presque dans la misère : elle disparut au milieu de l'indifférence générale. On dit que la nouvelle de la réconciliation du duc de Bourgogne avec le Roi lui causa un tel saisissement qu'elle ne put se remettre de cette commotion[1]. Était-ce bien, comme le dit le chroniqueur officiel, un sentiment de joie ? N'était-ce pas plutôt le remords ? Un autre événement vint, au commencement de 1436, mettre la ville de Tours en liesse. Le 4 février, la Reine accoucha d'un fils. Comme s'il eût voulu sceller le pacte conclu avec le duc de Bourgogne, Charles VII choisit ce prince pour parrain de l'enfant. Le nouveau-né, nommé Philippe, fut tenu sur les fonts, au nom du duc, par le duc de Bourbon et par le comte du Maine. Cependant les affaires du royaume ne tardèrent pas à prendre une tournure plus favorable le 17 avril arrivait à Issoudun, où se trouvait le Roi, Raoulet Guillaume, chevaucheur de son écurie, porteur de lettres du connétable annonçant la réduction de Paris[2]. Bientôt vint à Bourges une députation des bourgeois et de l'Université pour saluer le Roi et le supplier de se rendre au milieu d'eux, en compagnie de la Reine et du Dauphin. Charles VII répondit qu'il mettait volontiers le passé en oubli ; que les habitants de sa bonne ville de Paris seraient désormais en sa bonne grâce, et que, s'ils se conduisaient en bons et loyaux sujets, il les traiterait doucement et bénignement, comme leur bon Roi et leur naturel et souverain seigneur ; il ajouta qu'une des choses qu'il désirait le plus était de se rendre dans sa capitale, et que, quand il aurait réglé certaines affaires urgentes qui l'occupaient, il se transporterait à Paris, pour visiter et consoler ses bons et loyaux sujets habitant en cette ville, y rétablir et remettre sa Cour de Parlement et siège royal, et donner ordre au fait de sa justice et à tout le reste, au bien de sa dite ville et de tout son royaume. Les Parisiens n'ayant pas craint de demander au Roi d'entendre à la totale expulsion de ses ennemis de son royaume, Charles VII leur donna pleine satisfaction, en déclarant que c'était bien la chose mondaine qu'il avait le plus à cœur, et qu'il s'y voulait employer, de corps et de biens, de toute sa puissance, tant et si avant que, à l'aide de Notre-Seigneur et de ses bons et loyaux sujets, il remettrait son royaume en bonne paix et tranquillité[3]. Le Roi agréa la plupart des requêtes des Parisiens, sauf en ce qui concernait la résidence royale. Les souvenirs de sa régence étaient demeurés trop vivaces pour qu'il se décidât à aller s'installer à Paris. If montra même peu d'empressement à faire le voyagé annoncé : malgré les nouvelles instances dont il fut l'objet dans le courant de l'année[4], il ne l'entreprit qu'à la fin de 1437. A la réception de l'ambassade parisienne succéda le mariage du Dauphin. Après bien des lenteurs, bien des hésitations, le roi
d'Écosse avait fini par consentir au départ de sa fille. Les derniers
arrangements furent pris au commencement de février 1436. Un grand banquet
fut donné à Perth ; les ambassadeurs de France prirent place à la table
royale ; puis le roi et la reine firent venir la jeune princesse, et, en
présence des ambassadeurs, lui dirent plusieurs
beaux mots et notables, en luy remonstrant l'honneur que le Roy de France luy
faisoit et l'honneur du prince avec lequel elle devoit estre proposée, et en
la inhortant de bien faire[5]. Les ambassadeurs
prirent alors congé. Pour l'honneur du Roy de France,
Jacques Ier ordonna à Regnault Girard d'embrasser la reine ; laquelle, dit l'ambassadeur, de sa grace et humilité, me baysa, que je repute le plus
grant honneur que oncques m'advint. Regnault partit le 15 février pour
Dumbarton, comblé de présents, ayant été défrayé de toutes ses dépenses depuis
le jour de son arrivée en Écosse. Avant de s'embarquer, il envoya au roi un
beau mulet, que, suivant le conseil du comte de Vendôme, il avait fait venir
à cette intention de La Rochelle. Cet animal était alors, paraît-il, inconnu
en Écosse[6], et Jacques fut
très joyeux du cadeau. L'ambassadeur offrit à la reine trois tonneaux pleins
de châtaignes, de poires et de pommes, et six pipes de vin. Jacques conduisit lui-même sa fille à Dumbarton. Au moment de mettre à la voile, il revint pour présider à l'embarquement et l'embrasser une dernière fois. Le départ s'effectua le 27 mars ; la flotte se composait de vingt navires. La traversée fut des plus heureuses[7]. On parvint à éviter les vaisseaux anglais qui croisaient sur les côtes de Bretagne[8], et la princesse débarqua le 17 avril, dans un petit port de l'île de Ré, nommé La Palisse[9]. Le lendemain, le navire qui la portait jeta l'ancre à Chef-de-Bois, à une lieue de La Rochelle ; le surlendemain, elle aborda dans cette ville. Le Roi avait envoyé pour la recevoir son chancelier Regnault de Chartres, le sire de Graville, grand maître des arbalétriers, un de ses maîtres d'hôtel, Le Gallois du Puy du Fou, et Jean Chastenier, général des finances. Après quelques jours de repos au prieuré de Nieul, situé près de La Rochelle, Marguerite fit le 5 mai son entrée solennelle dans cette ville. Elle prit ensuite le chemin de Poitiers. A Niort, elle fut jointe par les dames de la Rocheguyon et de Gamaches, venues pour la saluer au nom de la Reine. Le Parlement de Poitiers et l'Université se portèrent à sa rencontre, et un enfant, figurant un ange, vint déposer un chapeau sur sa tête[10]. La cérémonie du mariage avait été fixée au 25 juin, et devait s'accomplir dans la ville de Tours. L'entrée de la princesse eut lieu le 24, à quatre heures du soir. Montée sur une haquenée richement caparaçonnée, elle était accompagnée de Jean de Cranach, évêque de Brechin, de Jean Stewart, prévôt de Methven, de Henri, lord Sinclair, comte d'Orkney, amiral d'Écosse, de sir Walter Ogilvy, trésorier du roi Jacques, et d'une nombreuse suite de seigneurs, de dames et de demoiselles. Les seigneurs de Maillé et de Gamaches prirent la haquenée par la bride et conduisirent la Dauphine jusqu'au château, où elle descendit de cheval. Escortée d'un côté par, le comte de Vendôme, de l'autre par le comte d'Orkney, elle s'avança jusqu'à la grande salle, qui avait été entièrement tendue de tapisseries apportées de Blois[11]. La reine de Sicile et Madame Radegonde de France s'étaient portées à sa rencontre jusqu'aux marches de la salle. Elles la conduisirent à la Reine ; celle-ci, se levant et faisant quatre ou cinq pas en avant, prit Marguerite dans ses bras et l'embrassa[12]. Le Dauphin attendait dans sa chambre, située à l'étage supérieur. Dès qu'il apprit l'arrivée de sa fiancée, il descendit et fit son entrée dans la salle, entouré de ses chevaliers et écuyers. Marguerite s'avança vers lui, et les deux enfants s'entrebaiserent et accollerent. Puis ils prirent place auprès de la Reine, qui les emmena dans sa chambre, richement décorée pour la circonstance, où ils se divertirent jusqu'au souper[13]. Charles VII arriva le lendemain. Il se rendit aussitôt ail château et alla voir la Dauphine dans la chambre où l'on procédait à sa toilette. Selon une relation contemporaine, il se montra moult joyeux et bien content de sa personne[14]. Le mariage fut célébré dans la cathédrale par l'archevêque de Reims. En raison du jeune âge des époux, des dispenses avaient été données par le métropolitain[15]. On remarqua que, pour assister à la cérémonie, le Roi ne quitta pas son habit de voyage : il resta en robe grise, houssé et esperonné. La Reine avait une robe de velours bleu, toute chargée d'ornements d'orfèvrerie à grands feuillages. Le Dauphin et la Dauphine portaient l'habit royal[16]. Marguerite excita l'admiration des assistants par sa beauté et par la richesse de son costume[17] : C'estoit, dit un chroniqueur, moult belle chose de veoir les paremens et abillemens en quoi elle estoit, lesquels elle avoit aportez de son païs[18]. Un long manteau tombait de ses épaules, et sa tête était ceinte d'un diadème[19]. Ce jour-là le jeune Louis reçut en présent une épée, dite l'épée du roi d'Écosse, ornée au pommeau d'une image de la Sainte Vierge, d'un côté, et de saint Michel, de l'autre[20]. A l'issue de la cérémonie, il y eut un grand festin. L'archevêque de Reims, la Dauphine, la reine de Sicile, la Reine, la comtesse de Vendôme et le comte d'Orkney s'assirent à la table du Roi. Le Dauphin présida une autre table, où prirent place les seigneurs d'Écosse. Le repas fut vraiment royal : luxe des costumes, profusion de viandes et d'entremets, affluence de ménestrels, de clairons et de luthiers, concours de hérauts et de, poursuivants, rien n'y manqua[21]. La ville de Tours, n'ayant pas eu le temps de préparer la représentation d'un mystère, fit exécuter devant la Cour des danses morisques[22] et des chœurs ; l'orgue de la cathédrale avait été transporté, pour la circonstance, sur la place de Notre-Dame-la-Riche[23]. Les jeunes époux n'étaient pas en âge d'être réunis ; ce fut seulement un peu plus tard que commença pour eux la vie conjugale[24]. Au mois de juillet suivant, la maison du Dauphin fut définitivement constituée[25]. Son gouverneur fut Bernard d'Armagnac, comte de Pardiac, devenu comte de la Marche par son mariage avec Éléonore de Bourbon. Ce prince n'était pas seulement, comme on l'a dit, un vaillant seigneur, sage et d'honneste vie[26] ; c'était le type accompli du vrai chevalier. A la juste renommée qui s'attachait à ses exploits, il joignait une grande réputation de vertu. D'après Georges Chastellain, qui nous a laissé son portrait[27], il n'avoit son pareil en la terre, en vraye gloire de devotion envers Dieu. Quand il entrait dans une église, dit ce chroniqueur, plus modeste que une espousée, il s'agenouillait au milieu de la nef, et on le voyait prier avec ferveur, les yeux baissés vers la terre, les mains levées au ciel, comme si ce fust un commun homme. En toutes choses, il donnoit exemple d'un excellent singulier miroir de toute bonne vie. Sa maison était un modèle de tenue et de convenance. A l'heure du repas il s'asseyait au milieu de ses serviteurs, et faisait lire la Bible ou des livres de science et de piété. Charles VII ne pouvait confier l'héritier du trône à de plus dignes mains. Le Roi conserva dans l'exercice de leurs fonctions le confesseur et précepteur du Dauphin, Jean Majoris, chanoine de Reims, maître ès arts et licencié ès lois[28] ; son chapelain, Pierre Harenthal, religieux augustin[29] ; son physicien, Jean Leothier[30]. Amaury, seigneur d'Estissac, sénéchal de Poitou en 1430, puis lieutenant de Charles d'Anjou en Limousin, fut désigné pour assister le comte de la Marche, à titre de conseiller et premier chambellan ; Gabriel de Bernes, qui était au service du Roi depuis 1423, fut nommé premier maître d'hôtel, et Joachim Rouault premier écuyer[31]. Nous pouvons constater, la sollicitude qui présida au choix de l'entourage du Dauphin. Quoi qu'on ait pu dire, Charles VII traita son fils avec autant de libéralité que de condescendance ; il pourvut largement à ses dépenses[32], et l'emmena constamment avec lui dans les voyages que, de 1436 à 1439, il entreprit à travers le royaume ; en outre, à plusieurs reprises, il lui donna des missions de confiance. La situation des affaires dans le midi du royaume nécessitait une prompte intervention du Roi. Le comte de Foix venait de mourir (4 mai 1436), laissant l'administration du Languedoc dans un grand désordre. Charles VII prit une résolution énergique : celle de ne point donner de successeur au comte, et de prendre en main le gouvernement de la province. D'autre part un conflit était survenu entre Robert Dauphin et Bernard de Casilhac, relativement à la possession du siège épiscopal d'Albi, et ce conflit prenait les proportions d'une véritable guerre civile[33]. De graves motifs portaient donc le Roi à entreprendre un voyage en Languedoc. Mais ce ne fut pas sans difficulté que cette résolution fut prise. Une opposition très vive se manifesta au sein du Conseil, où régnaient deux influences rivales : celle de Charles d'Anjou et celle du duc de Bourbon. Les uns opinaient en faveur du voyage ; les autres auraient voulu que le Roi, cédant aux instances des habitants de Paris, se rendit dans sa capitale. C'est ici le lieu de nous rendre compte de l'état des partis à la Cour. Un document précieux, complètement inconnu jusqu'à présent[34], va nous servir pour cela de guide. Depuis la chute de La Trémoille, le poste qu'il occupait est resté vacant : personne n'exerce un ascendant particulier sur le Roi[35]. Mais la Reine, la reine Yolande sa mère, Charles d'Anjou son frère, jouissent à la Cour d'une autorité sans rivale, et le bâtard d'Orléans leur est étroitement uni. On peut dire que rien ne se fait en dehors de leur concours. Le connétable de Richemont n'a d'autre rôle que celui qui appartient à ses fonctions ; étranger désormais aux intrigues politiques, il est tout entier aux opérations militaires. Le duc de Bourbon, malgré la prééminence du titre, ne surpasse pas en influence les autres princes du sang. Sans prendre une part active aux affaires, il se tient à là Cour, espérant gagner à la longue la confiance du Roi. Son ancienne intimité avec le connétable a fait place à une certaine froideur. Il entretient le secret espoir de voir revenir sur la scène le duc de Bourgogne, et de pouvoir un jour tout diriger de concert avec lui[36]. Le personnage le plus considérable, celui que le Roi affectionne davantage, en qui il place toute sa confiance, c'est le bâtard d'Orléans. Le bâtard peut, s'il lui plaît, être le premier à la Cour, et son titre de grand chambellan lui en donne le droit. Mais il se dérobe aux honneurs ; il a les intrigues de Cour en horreur ; se rappelant les envies et malveillances dont il a été, l'objet pendant le séjour du Roi à Vienne, il se tient à l'écart et se consacre uniquement à la guerre[37]. Le duc de Bourbon et le bâtard d'Orléans sont en bons termes, sans qu'il y ait entre eux aucune intimité. Le duc voudrait que le bâtard l'aidât, à se mettre bien en Cour et â supplanter Charles d'Anjou. Mais, depuis le jour où ce prince et le bâtard d'Orléans ont agi de concert contre La Trémoille, ils sont unis par une indissoluble alliance, que rien ne saurait rompre. Dans le Conseil les influences rivales se trouvent en présence. Le duc de Bourbon y compte de nombreux partisans, tels que. le chancelier Regnault de Chartres et Christophe d'Harcourt, qui l'ont assisté dans les négociations avec le duc de Bourgogne ; l'archevêque de Vienne, Jean de Norry, qui lui est tout dévoué ; l'archevêque de Toulouse, Denis du Moulin ; l'évêque de Maguelonne, Robert de Rouvres, et le confesseur du Roi, Gérard Machet, évêque de Castres. Mais ces trois derniers personnages appartiennent avant tout au Roi[38], et le duc de Bourbon sait qu'il ne saurait avoir leur appui le jour où il se mettrait en opposition ouverte avec la Couronne. La maison d'Anjou possède d'actifs auxiliaires, soit parmi les plus anciens membres du Conseil, comme le vieux Robert le Maçon, qui va bientôt disparaître de la scène[39], le chambellan Guillaume d'Avaugour, l'évêque de Poitiers Hugues de Comberel, et l'évêque de Maillezais Guillaume de Lucé, soit parmi ceux récemment arrivés aux affaires, comme Bertrand de Beauvau, seigneur de Précigny, Geoffroy Vassal, archidiacre d'Albi, et Jean Fournier, ancien juge d'Anjou[40]. D'autres conseillers — et non des moins influents demeurent étrangers à ces rivalités, ne voulant appartenir qu'au Roi seul. Parmi eux il faut nommer le vieux gouverneur du comte de Ponthieu, Hugues de Noé, plus que jamais l'objet des faveurs de son maître ; le sire de Gaucourt, toujours activement mêlé aux affaires politiques et aux opérations militaires ; Jean de Rochechouart, sire de Mortemart, ancien serviteur de la maison d'Orléans ; enfin Regnier de Bouligny, qui a l'administration des finances du Roi et de la Reine. Le 28 juillet 1436, le président Louvet, écrivant au duc de Savoie, lui annonçait que certaines novités étaient survenues à la Cour, et qu'à ce sujet le Roi avait mandé en toute hâte le bâtard d'Orléans[41]. Quelle est la signification de cet incident ? Un examen attentif des actes nous montre qu'il s'agissait de contrebalancer l'influence du duc de Bourbon en fortifiant le groupe des conseillers dévoués à la maison d'Anjou. L'archevêque de Vienne sort du conseil[42], où entrent successivement quatre personnages ayant joué un rôle actif dans le renversement de La Trémoille : Jean, sire de Bueil ; Pierre d'Amboise, seigneur de Chaumont ; Prégent, seigneur de Coëtivy, et Pierre de Brezé, seigneur de la Varenne[43]. Le chancelier et ceux de ses collègues qui jusque-là avaient soutenu le parti du duc de Bourbon durent se soumettre aux volontés du Roi[44]. Bref, le voyage en Languedoc ne rencontra plus d'opposition. Un chroniqueur nomme, parmi ceux qui avaient poussé à l'entreprendre, Charles d'Anjou, Christophe d'Harcourt, les sires de Bueil et de Chaumont, les évêques de Clermont et de Maguelonne[45]. C'est sans doute pour se mettre en garde contre les intrigues du duc de Bourbon que Charles d'Anjou conclut alors un pacte d'alliance avec le duc de Bretagne[46]. A ce moment le bâtard d'Orléans, plus en faveur que jamais, obtint confirmation de sa charge de grand chambellan[47]. Le 16 août, fut signé à Tours, en l'hostel où estoit logé le tres excellent Roy, le contrat de mariage de Yolande de France avec Louis de Savoie, prince de Piémont[48]. Le lendemain Charles Va se mit en route, accompagné de son fils, de Charles d'Anjou, des comtes de Vendôme et de la Marche, et de la majeure partie de son Conseil[49]. Une garde spéciale, placée sous les ordres de Christophe d'Harcourt, fut chargée de veiller à la sécurité du Roi[50]. Après avoir séjourné quelque temps à Loches, à Montrichard et à Amboise, il se mit en route et s'avança par le Berry. A Clermont, il présida l'assemblée des États de Basse-Auvergne[51], et sévit contre les gens de Rodrigue de Villandrando qui, d'Albi où ils s'étaient établis, se répandaient dans la contrée, où ils faisaient d'affreux ravages[52]. De là Charles VII se rendit à Lyon (22 décembre) ; puis, traversant le Dauphiné, il passa par Uzès et Nîmes, et arriva le 27 février 1437 à Montpellier, où il résida pendant deux mois. C'est dans cette ville que fut tenue, sous sa présidence, la réunion des États de Languedoc ; il prit de sévères mesures contre les routiers et convoqua à Pézenas toutes les milices de la province pour une expédition qu'il voulait diriger en personne[53]. Mais, soit que la convocation n'ait point été suivie d'effet, soit plutôt qu'il ait été obligé de renoncer à ce projet, le Roi quitta brusquement Pézenas le 7 mai. Après avoir pourvu à la sécurité du Languedoc, il se remit en marche vers le nord[54]. Charles VII venait d'apprendre que les routiers, contre lesquels il s'efforçait de protéger ses provinces méridionales, avaient paru inopinément dans le centre de la France, et que, pour les arrêter, il n'avait fallu rien moins que l'intervention de la Reine. Sur les instances des habitants de Tours, Marie d'Anjou et le jeune Dauphin, qui résidaient en ce moment dans cette ville[55], avaient écrit à leur chef, lequel n'était autre que le célèbre Rodrigue de Villandrando, pour lui demander d'épargner la Touraine. Rodrigue avait répondu, avec une courtoisie toute chevaleresque, que, malgré l'importance du dessein qu'il poursuivait, en considération de l'honneur et de la révérence dus à de si grandes dames, et aussi en l'honneur du Dauphin envers lequel il se tenait fort obligé, il renonçait à continuer sa marche. Mais les routiers ne se dispersèrent pas pour cela : au mépris de la promesse de leur capitaine, ils s'établirent à Châtillon-sur-Indre. Il fallut une nouvelle lettre de la Reine pour les obliger à se retirer[56]. Quel était le motif de l'apparition en Touraine de Villandrando et de ses terribles bandes ? Cette invasion coïncidait avec une réunion tenue à Angers, au mois d'avril, par plusieurs princes du sang, à l'occasion du mariage de Jean d'Anjou, duc de Calabre, fils du roi René, avec Marie de Bourbon[57]. Cette intrigue remontait à l'année précédente. Le duc de Bourbon avait vu d'un mauvais œil le voyage dans le midi, et il avait réussi à provoquer un véritable soulèvement de l'opinion[58]. Autour de lui on disait tout haut que le Roi avait petit regart aux graves meschiefs et guerres de son royaume[59], et l'on voulait renverser les conseillers qui l'avaient poussé à entreprendre ce voyage. Le duc de Bourbon était à la tête du complot, auquel participaient le duc d'Alençon, le duc de Bretagne, et même le roi René, qui venait pourtant, grâce à l'intervention royale, de voir s'ouvrir les portes de sa prison[60]. C'était pour se concerter avec les princes que Rodrigue de Villandrando, devenu l'année précédente beau-frère du duc de Bourbon par son mariage avec une fille bâtarde du duc Jean, se rendait à Angers : il venait mettre à leur service l'armée dont il était le chef[61]. A la première nouvelle de ces événements, le Roi rassembla toutes les troupes qu'il trouva sous sa main. Puis il se mit en marche à la tête d'une brillante armée[62], informant sur son passage, dit M. Quicherat, recueillant dans chaque localité les innombrables plaintes portées contre Rodrigue et ses gens, comme s'il eût pris plaisir à se former au sujet de cet homme comme un trésor infini d'indignation et de colère[63]. Par Millau, Rodez et Saint-Flour, il se porta rapidement sur Clermont, et de là sur Aigueperse et Montmarault. Sur ces entrefaites, un détachement de routiers, envoyé en reconnaissance, rencontra près de Hérisson les fourriers et autres officiers du Roi qui venaient préparer ses logis. C'était pour les brigands une rare fortune : sans respect pour la livrée royale, ils firent main basse sur les bagages. A cette nouvelle, le Roi, justement indigné d'une telle licence, donna l'ordre de marcher contre les pillards. Rodrigue de Villandrando n'osa pas affronter la lutte : se frayant un passage à travers le Bourbonnais et le Forez, et traversant le Rhône, il alla se mettre hors de l'atteinte du Roi sur les terres de l'Empire, près de Trévoux[64]. Toute poursuite était désormais inutile ; après s'être avancé jusqu'à Roanne[65], Charles VII prit le chemin du Berry. Cette activité et cette vigueur déconcertèrent les
princes. Mettant fin à leur conciliabule, ils se dispersèrent aussitôt. Le
duc d'Alençon regagna ses domaines ; le roi de Sicile et le duc de Bourbon
tentèrent d'approcher du Roi, qui était venu s'installer à Bourges. Charles
VII leur fit dire qu'il ne les recevrait pas. Grâce à l'intervention de la
Reine sa sœur et de son frère Charles d'Anjou, le roi de Sicile fut pourtant
admis à l'audience royale[66] : il fit sa
soumission à Gien, le 2 août. Un acte de ce jour, passé entre le roi de
Sicile et Charles d'Anjou, et qui porte la signature de la Reine, nous initie
aux arrangements politiques pris alors, soit pour sauvegarder les intérêts de
René qui allait rejoindre sa femme dans le royaume de Naples, soit pour
ménager le retour à la Cour du duc de Bourbon[67]. Mais ce prince
dut rester à l'écart[68]. Le Roy ne le vouloit veoir, ne ouyr parler de lui, pour le
despit gin avoit des gratis plaintes et pilleries que ledit Rodigues,
acompaignié de deux mille combattans, telz quelz, fesoient ou pais du Roy par
le port dudit de Bourbon[69]. René eut beau insister,
faisant observer que le duc avait de nombreux gens de guerre, prêts à servir
le Roi ; il lui fut répondu qu'il se deportast de en
plus parler, et que le Roy avoit intention, au plaisir de Dieu, de fournir et
emplir le fait de sa guerre en la fourme et manière que deliberé il avoit[70]. Pour obtenir sa
grâce, il fallut que le duc désavouât Rodrigue, qui fut banni du royaume, et
s'obligeât à éloigner de sa personne le bâtard de Bourbon et Jacques de
Chabannes, pour les envoyer servir en Gâtinais contre les Anglais[71]. Ainsi fut
étouffée, grâce à l'énergie du Roi, une tentative de révolte qui aurait pu
mettre la couronne en péril ; la Praguerie était reculée de trois ans. Charles VII se retrouve enfin, tel que nous l'avons vu de 1418 à 1421, à Azay, au Pont-Saint-Esprit, à Montmirail, à Gallardon. Il reprend l'épée en même temps que le sceptre, et chaque jour marque un progrès dans la transformation qui s'opère chez lui[72]. A peine l'expédition contre Rodrigue de Villandrando est-elle terminée que le Roi prépare une nouvelle campagne. Au commencement de juillet, il fait acheter deux coursiers pour son corps[73]. Le 10, il écrit aux habitants de Reims qu'il va se rendre en personne sur les marches de France et qu'il leur fera savoir de ses nouvelles[74]. Au châtiment des rebelles succède la lutte contre les anciens ennemis du royaume. La campagne s'ouvre par la prise de Château-Landon, où le Dauphin fait ses premières armes et se signale par une rigueur précoce[75], et par la réduction de Charny et de Nemours. Après ces premiers succès, le Roi, dit un chroniqueur, considerant la grant grace que Nostre Seigneur lui avoit fait... en mercia Dieu moult devotement, et fist faire des processions et prières par toutes les bonnes villes de son obéissance[76]. L'affluence des gens de guerre et des auxiliaires venus des garnisons et des bonnes villes, le concours financier qu'il rencontre, notamment à Paris, excitent son ardeur[77]. Passant par Gien et Sens, il s'avance jusqu'à Bray-sur-Seine, et envoie son armée faire le siège de Montereau. Lui-même vient, le 21 septembre, établir son ost devant la place, qui oppose une vive résistance. On le voit s'employer activement aux travaux du siège ; jour et nuit il parcourt le camp en habit dissimulé ; il veut tout voir et tout connaître. Ce qui ne lui semble pas bien ordonné, il le fait changer[78]. Et tant en fesoit, dit le chroniqueur déjà cité, que, par plusieurs foiz, lesdiz conte de Perdriac, seigneur d'Albret et autres luy dirent qu'il s'en peust passer à mains de diligence, s'il lui plaisoit, pote le peril de sa personne en alant et venant ausdiz lieux ; et il leur respondoit que la guerre estoit à lui et non à autre, et que il devoit prendre sa part des diligences[79]. Enfin une brèche fut pratiquée, et l'assaut put être donné (10 octobre). Le Roi y parut en personne, aussi avant que chevalier ou escuier de sa compaignie. Malgré tout ce qu'on put lui dire, il se jeta dans les fossés, ayant de l'eau au-dessus de la ceinture, monta à l'échelle l'épée au poing, et entra l'un des premiers dans la ville[80]. L'ardeur du combat ne lui fit point oublier ses habitudes d'humanité et de clémence : il défendit tout excès[81] ; sur la demande du Dauphin, il rendit la liberté aux Anglais prisonniers et les remit en possession de leurs biens[82]. A la suite de ce brillant succès, Charles VII ordonna des prières publiques dans tout son royaume. Puis il mit en délibération la question de savoir s'il poursuivrait les opérations militaires ou si, cédant aux vœux des Parisiens, il se rendrait dans sa capitale. On fit observer dans le Conseil que l'armée avait été très éprouvée par le siège de Montereau, que l'hiver commençait, qu'il serait difficile de tenir les champs et d'assurer la solde aussi bien que la subsistance des troupes. Il fut décidé que les capitaines recevraient, jusqu'à la saison prochaine, des assignations pour leur logement. Le comte de la Marche, qui avait sous ses ordres le contingent le plus important, fut chargé de faire hiverner les gens de guerre dans son pays de la Marche, tout en demeurant prêt, au premier signal, à les ramener au service du Roi. Après avoir pris ces dispositions, Charles VII s'achemina vers sa capitale, s'arrêtant à Melun, où il célébra la fête de la Toussaint, et à Corbeil, où il passa quelques jours, tandis qu'on achevait les préparatifs de sa réception. Le 12 novembre 1437 eut lieu l'entrée solennelle. Bien qu'elle eût perdu de son antique splendeur, la cité de Philippe-Auguste et de saint Louis était toujours considérée comme la gloire du royaume et la tête de la France[83]. La magnifique réception qu'elle fit au souverain revenant en vainqueur dans ses murs, montra bien que sa déchéance ne devait être que passagère[84]. Charles VII avait couché la veille à Saint-Denis. Le prévôt de Paris, le prévôt des marchands, les échevins et les bourgeois en grand nombre, l'évêque de Paris avec son clergé, le Parlement, l'Université, la Chambre des comptes, se portèrent à sa rencontre jusqu'à La Chapelle-Saint-Denis. Le Roi montra, suivant sa coutume, beaucoup d'affabilité. Il reçut les clés de la ville des mains du prévôt des marchands, et les remit au connétable. Quatre échevins s'avancèrent, portant un riche dais en drap d'or vermeil, semé de fleurs de lis d'or, sous lequel le Roi prit place. Le cortège se mit en marche. Il s'ouvrait par un corps de huit cents archers, commandé par le grand maître des arbalétriers, Jean de Graville. Les archers du comte du Maine, les archers de la garde du Roi, venaient à la suite ; puis les hérauts des princes du sang, des rois et des princes étrangers, portant les cottes d'armes de leurs maîtres. Sur quatre coursiers semblables, revêtus de drap blanc parsemé de cerfs ailés d'or, s'avançaient, précédant le Roi, son grand écuyer, son roi d'armes et deux écuyers d'écurie. Poton de Saintrailles portait sur un bâton le heaume royal, surmonté d'une couronne et ayant pour cimier une grosse fleur de lis double en or. Le héraut Berry tenait entre ses mains la cotte d'armes du Roi, en velours azuré à trois fleurs de lis d'or brodées, de perles' fines. Un des écuyers d'écurie portait en écharpe l'épée de parement, toute semée de fin or d'orfèvrerie en fleur de lys. Charles VII était monté sur un magnifique cheval, entièrement recouvert d'un riche caparaçon de velours azuré semé de fleurs de lis d'or ; armé de toutes pièces, il avait la tête découverte ; par-dessus son armure, une longue robe de drap d'or traînait jusqu'à terre. Jean d'Aulon, le compagnon de Jeanne d'Arc et l'un des écuyers d'écurie du Roi, marchait à pied, tenant son cheval par la bride. Aux côtés du souverain, mais un peu en arrière, on voyait : à droite, le connétable de Richemont, ayant au poing son bâton de commandement ; à gauche, le comte de Vendôme, grand maître de l'hôtel. Le Dauphin, revêtu des plus riches habits, chevauchait derrière son père, escorté par le comte du Maine et par le comte de la Marche. Les pages du Roi et du Dauphin, ceux des princes et seigneurs, venaient à la suite. Enfin apparaissait, armé de toutes pièces et portant à la main un gros bâton de bois, en signe du commandement, Jean, bâtard d'Orléans. Ses épaules étaient ornées d'un collier d'or, formé de feuilles de chêne, du poids de cinquante marcs. Il conduisait l'armée royale, forte d'environ mille lances : toute la chevalerie du Roi était là, rivalisant de splendeur, et offrant le plus éblouissant spectacle. Derrière le bâtard, un écuyer d'écurie du Roi, monté sur un grand destrier, tenait une lance vermeille semée d'étoiles d'or ; cette lance était surmontée d'un étendard, également parsemé d'étoiles d'or, sur lequel était représenté saint Michel, patron du royaume. En arrivant au Ponceau Saint-Lazare, on vit s'avancer un groupe de personnages, montés sur diverses bestes, qui figuraient les sept vertus théologales et les sept péchés capitaux. A la porte Saint-Denis, un ange, suspendu dans les airs, et semblant descendre du ciel, portait un écu d'azur à trois fleurs de lis d'or, au-dessous duquel on lisait ce quatrain : Très excellent Roy et seigneur, Les manans de vostre cité Vous recoivent en tout honneur Et en très grande humilité. Dev.ant les Filles-Dieu, une grande fontaine versait à la fois, par quatre tuyaux, du lait, du vin vermeil, du vin blanc et de l'eau ; des gens se tenaient tout autour, donnant à boire aux passants dans des tasses d'argent. Sur tout le parcours, et principalement dans la rue Saint-Denis, des échafauds, richement tendus, avaient été dressés : on y voyait la représentation de divers mystères : l'Annonciation, la Nativité, la Passion, la Résurrection, l'Ascension, la descente du Saint-Esprit. Devant le Châtelet, on représenta le Jugement dernier, où l'on voyait l'archange saint Michel occupé à peser les âmes. Un auteur contemporain, fort hostile, constate qu'à cette entrée on fist aussi grant feste comme on pouroit faire à Dieu[85]. Mais l'impulsion était irrésistible. Les rues et les fenêtres étaient remplies d'une foule immense, avide de contempler un si beau spectacle. Il semblait que, comme plus tard à une autre entrée royale succédant à de nouveaux malheurs, le peuple fût affamé de voir un Roi. Des larmes de joie coulaient de tous les yeux ; les cris : Noël Noël ! étaient mille fois répétés[86]. Arrivé au portail de Notre-Dame, le Roi descendit de cheval. Il était quatre heures de l'après-midi. L'évêque de Paris, le clergé et l'Université l'attendaient devant les portes de la basilique, restées fermées. Une harangue lui fut adressée par un docteur de l'Université[87]. Puis l'évêque Jacques du Chastelier s'avança, portant le livre des Saints Évangiles, et prononça les paroles suivantes : Très chrestien Roy, nostre souverain et droicturier seigneur, les saincts et très chrestiens Roys de France, vos predecesseurs, qui tant ont honoré et aimé Dieu et l'Eglise, si ont accoustumé que, après leur unction et sacre, en leur premier joyeux advenement en ceste vostre cité, ilz viennent premier à l'eglise, et devant qu'ils entrent en ladite eglise, ilz doivent faire premier le serement à l'eglise. Et ainsi le devez faire, en ensuivant les sainctes voyes et bons propos de vos predecesseurs, et est le Serment tel. L'évêque lut la formule. Le Roi se mit à genoux, baisa la croix et le livre sacré. Puis, étendant la main sur les Évangiles, il dit à haute voix : Ainsi comme mes predecesseurs l'ont juré, je le jure[88]. Alors les portes s'ouvrirent, et les cloches sonnèrent à toute volée. Charles VII pénétra dans la cathédrale, dont les trois nefs étaient éclairées par une multitude de cierges. Au milieu des acclamations qui retentissaient et des cris de Noël ! Noël ! il alla s'agenouiller devant la statue de la Sainte Vierge ; revêtu d'une chape, il prit place dans le Chœur, où il vénéra les reliques. Un Te Deum fut chanté solennellement et les oraisons furent dites par l'évêque de Paris. Après avoir accompli ce devoir royal auquel, durant le cours de sa vie, il demeura toujours fidèle, le Roi remonta à cheval et alla loger au Palais. Lès témoignages sur l'enthousiasme populaire sont unanimes : Et fist-on moult grant joie celle nuit, dit un chroniqueur peu suspect, comme de bucciner[89], de faire feus enmy les rues, dancer, menger et boyre, et de sonner pluseurs instrumens[90]. Un autre peint en ces termes les sentiments qui agitaient les esprits : Les uns se efforçoieut de chanter et crier Nouel ! et les autres plouroient et crioient, en suppliant le Roy qu'il leur vousist pardonner les grans offences que, par l'espace de près de vingt ans, ilz avoient commis envers lui[91]. On dit que le Roi lui-même, touché d'un tel spectacle, ne put dominer son émotion, et qu'il versa des larmes de joie[92]. Le lendemain, Charles VII alla entendre la messe à la Sainte-Chapelle, où il fit vénérer au peuple les saintes reliques ; puis il monta à cheval, et se rendit à l'hôtel Saint-Paul où il établit sa résidence[93]. Son séjour à Paris fut signalé par d'utiles mesures : il nomma Amboise de Loré prévôt de Paris ; il accueillit avec bienveillance lés requêtes que la ville, l'Université, le Parlement lui présentèrent[94], et l'on remarqua qu'aucune représaille politique ne fut exercée[95] : les Anglais furent seuls exclus du Parlement, où les Bourguignons demeurèrent en fonctions. Le 3 décembre, Charles VII quitta sa capitale pour retourner dans les provinces du centre : le 22, il rejoignit la reine à Tours, où il fut moult parlé entre les dames et autres des grans biens et vaillances du corps du Roy, et du beau commencement de monseigneur le Daulphin, de la bonne fortune que Dieu leur envoya de l'entreprinse, et de leur entrée à Paris[96]. Charles VII ne fit point un long séjour à Tours. Au mois de février 1438, emmenant avec lui le Dauphin, il se rendit à Poitiers et de là en Saintonge, où l'appelaient les préparatifs de l'expédition projetée contre les Anglais en Guyenne[97], Il présida le 14 mars, à Saint-Jean-d’Angély, la réunion des États provinciaux, dont il n'obtint pas tout le concours financier qu'il espérait[98]. Après avoir pris des mesures pour faire cesser les désordres des gens de guerre[99], il revint faire ses Pâques à Poitiers, et rejoignit la reine à Tours le 4 mai. Un grand deuil venait de frapper la famille royale : Jacques, le second fils du Roi, était mort (2 mars) dans sa cinquième année. Déjà deux fils, Jean, né en 1425, et Philippe, né en 1436, avaient été enlevés presque aussitôt après leur naissance. La perte de Monseigneur Jacques excita dans tout le royaume une douloureuse émotion[100]. De graves affaires nécessitaient la présence de Charles VII à Bourges, où une assemblée générale du clergé avait été convoquée : elle eut lieu le 7 juillet, sous la présidence du Roi, et aboutit à la rédaction de la Pragmatique sanction. Avant la séparation de cette assemblée, des remontrances furent présentées au Roi. En lui rappelant la grande grâce que Dieu lui avait faite et l'honneur qu'il s'était acquis par la prise de Montereau et des places environnantes, on le sollicita de reprendre en personne les opérations militaires contre les Anglais ? afin de les chasser du royaume. Charles VII n'avait pas attendu cette mise en demeure pour se préparer à une nouvelle entrée en campagne[101] ; il fit donner une réponse assez agréable[102]. Mais il n'était point en état de reparaître à la tête des armées : une maladie était venue récemment ébranler sa santé. D'étranges rumeurs circulaient à ce propos ; elles prirent assez de consistance pour que des poursuites fussent dirigées contre Jean de Bar, apothicaire du Roi. Cité devant le Parlement, Jean de Bar dut se rendre à Paris ; mais il revint déchargé de tout soupçon : Charles VII paya les frais de son voyage et le maintint dans ses fonctions[103]. Le Roi passa la fin de l'année 1438 dans ses résidences d'Amboise, de Loches, de Saint-Aignan et de Blois[104]. C'est dans cette dernière ville que le comte d'Eu, sortant de sa longue captivité, vint le saluer. Le Roi lui fit très bonne chère et lui donna aussitôt un commandement[105]. C'est là également que, dans des séances du Conseil tenues les 19 et 22 septembre, furent prises des mesures pour la réforme de l'armée et pour la garde des places frontières de la Saintonge[106]. C'est là enfin que fut célébrée, le 12 octobre[107], la cérémonie des fiançailles de Catherine de France avec Charles de Bourgogne, comte de Charolais. Le traité de mariage avait été passé le 30 septembre avec les ambassadeurs de Philippe le Bon par le comte du Maine, le comte d'Eu, le comte de Vendôme et les autres commissaires royaux. Le comte du Maine était plus puissant que jamais, au grand mécontentement du duc de Bourbon, qui ne renonçait pas à prendre sa revanche[108]. Dans les derniers jours de novembre, Charles VII se rendit en Berry : nous le trouvons à Bourges jusqu'au mois de janvier. La situation du Languedoc réclamait sa présence. Avant de se mettre en route, le Roi vint à Tours prendre congé de la Reine. Cette princesse était accouchée de deux filles[109], quelques mois auparavant, et ne devait pas l'accompagner dans ce voyage. Le 14 février, le Roi était à Poitiers ; le 2 mars, il faisait, avec le Dauphin, son entrée dans Limoges. Un curieux document contemporain va nous permettre de pénétrer un moment dans la vie intime de Charles VII : c'est une relation de l'arrivée du Roi et de son séjour à Limoges, faite par un chambrier du monastère de Saint-Martial[110]. Le moine raconte d'abord la marche du cortège ; l'exposition de la croix et des reliques, devant lesquelles Charles s'arrête à deux reprises, descendant de cheval pour adorer la croix ou baiser les reliques ; l'entrée dans la ville, au milieu des cris populaires de : Noël ! et la visite à l'église Saint-Martial. Il donne des détails sur les logements du Roi, du Dauphin et des personnes de leur suite : le bon moine raconte qu'il donna l'hospitalité à l'apothicaire du Dauphin, lequel, dit-il, ne contraria en rien ma volonté, bien qu'il couchât dans ma chambre et dans mon lit, et même avec Denis, mon clerc et mon serviteur, à qui il donna au départ cinq sous, malgré moi[111]. Il rapporte que Tanguy du Chastel avait envoyé au Dauphin une jeune lionne, âgée de huit mois, qui faisait ses délices, mais que, une nuit, la lionne, attachée près d'une fenêtre, sauta au dehors, et se trouva étranglée : dont le Dauphin fut moult dolent. Enfin, il arrive à ce que nous pourrions appeler la journée de Charles VII en voyage. Voici ce que fit le Roi chaque jour qu'il passa ici. Et d'abord le mardi 3 mars, lendemain de son arrivée, il se rendit à Saint-Martial et y entendit sa messe du jour, et les vêpres, au maître-autel... Après les vêpres, chantées par sa chapelle, le seigneur abbé et tout son monastère furent présentés au Roi, devant le grand autel, par monseigneur Jacques de Chabannes, chevalier et sénéchal de Toulouse ; et là même le Roi accueillit avec bonté le seigneur abbé et tout son couvent, qui lui offrirent leurs personnes et les biens de leur église pour son service et à son bon plaisir... Après son dîner, le Roi nous fit savoir qu'il désirait voir le lendemain le chef du bienheureux saint Martial, ce qui eut lieu : le Roi le vénéra sur le maître-autel, et avec lui les seigneurs de sa suite, ou la plupart d'entre eux... Le Roi entendit, dans l'église, tout son office comme la veille, et nous y assistâmes aussi. Le jour-suivant, à savoir le jeudi cinq, le Roi fit disposer pour lui la chapelle de Saint-Benoît, et y fit célébrer le service divin pendant son séjour dans la ville. A sa sortie de l'église le même jour, avant de prendre sen repas dans la maison de maître Martial de Bermondet, lieutenant du Roi et consul de ladite ville en cette année, il entendit une harangue belle et notable, où le consul exposa hautement les pauvretés, misères et afflictions, les brigandages des gens de guerre de Chalucet, et les autres maux que la contrée souffrait chaque jour. Le Roi écouta ces paroles gracieusement et bénignement, promettant d'apporter remède à ces maux dans un bref délai. Le même jour, après dîner, le Roi monta à cheval, et se rendit hors des murs avec la plus grande partie de ses barons et de sa noblesse ; il entra dans l'église Saint-Étienne, où on lui montra la chemise et la mâchoire de sainte Valérie, première martyre de la Gaule ; après les avoir vénérées, il rentra et parcourut la cité ; passant devant les Frères-Prêcheurs, Saint-Géraud et les Grands Carmes, il vint au Creux des Arènes, où il s'arrêta quelque temps pour voir tirer à l'arbalète[112] ; puis il rentra par la porte des Arènes, traversa le marché près du Pilori, et regagna sa demeure. Charles VII fut enchanté de la réception des habitants de Limoges. Il leur accorda des lettres de sauvegarde. Un peu plus tard, voulant les récompenser de leur fidélité, il leur donna un blason où figuraient les armes de France[113]. De Limoges, où les États de la province se réunirent en sa présence[114], le Roi se rendit à Riom : il y présida une réunion des États d'Auvergne[115]. Là furent prises d'importantes résolutions. Dans un conseil auquel assista le duc de Bourbon, le Roi trancha, contrairement à l'avis de ce prince et de ses partisans, la question, depuis longtemps restée en suspens, de la reprise des négociations avec l'Angleterre ; puis il décida que les routiers, appartenant en-bonne partie au duc de Bourbon, qui guerroyaient en Lorraine et en Allemagne, seraient immédiatement rappelés, et qu'on les enverrait assiéger Meaux ou Creil. Un des familiers du Roi partit aussitôt pour les faire venir directement, sans leur permettre de traverser les terres du duc de Bourgogne[116]. Après avoir célébré à Riom les fêtes de Pâques[117], Charles VII partit tour le Puy, car il aimait à visiter en pèlerin le sanctuaire de Notre-Dame[118]. Il présida dans cette ville les États de Languedoc, et y passa près d'un mois, recevant les doléances de ses sujets. Sur la demande des États, il investit le Dauphin de la lieutenance générale en Languedoc[119]. Le jeune Louis fut aussitôt envoyé à Toulouse, assisté d'un Conseil où figuraient son gouverneur le comte de la Marche, les évêques de Toulouse et de Poitiers, Hugues de Noé, les sires de Gamaches et d'Estissac, et Regnier de Bouligny. Charles VII avait convoqué les États du Dauphiné à Vienne, où il comptait se trouver le 12 mai : la peste, qui sévissait dans la contrée, obligea de transférer la réunion à Lyon. En se rendant dans cette ville, le Roi rencontra une troupe considérable de gens de guerre ; cette bande revenait de Lorraine et d'Allemagne, et venait le joindre à Lyon, en traversant les terres du duc de Bourgogne, au lieu de se diriger sur Meaux, comme il l'avait prescrit. Un grand nombre étaient sans armes, démontés, malades, dans le plus piteux état. Touché de leur misère, le Roi s'empressa de leur fournir, autant qu'il le put, de l'argent, des vêtements, des chevaux et des armes, et les envoya au siège de Meaux[120]. Charles VII passa plus d'un mois à Lyon (12 mai-15 juin). Pendant son séjour eut lieu — fion dans cette ville, car les députés invoquèrent le privilège qu'ils avaient de ne point siéger hors de leur province, mais à Saint-Symphorien-d'Auzon — la réunion des États du Dauphiné : le 18 mai, le Roi donna audience aux députés, à Lyon, dans une grande salle du couvent des Cordeliers[121]. A la date du 3 juin, voulant débarrasser du joug anglais les provinces voisines de la Guyenne, Charles VII désigna le comte de Beaufort pour recevoir la soumission des villes encore occupées par l'ennemi en Limousin, en Périgord et en Quercy[122]. Puis il reprit le chemin de la Touraine, en traversant Clermont, qu'il n'avait point visité au passage, et Ébreuil, où le duc de Bourbon se rendit près de lui, l'accompagnant jusqu'à Montluçon, à la limite du Bourbonnais. Charles VII exhorta ce prince à bien faire, et lui recommanda de ne point manquer de le venir joindre à Orléans, pour l'accompagner au voyage de Meaux[123]. Arrivé à Tours le 11 juillet, le Roi fut bientôt obligé de repartir. Le connétable avait mis le siège devant Meaux, et il fallait assurer le succès de cette entreprise. La nouvelle de la prise de la ville lui parvint sur ces entrefaites[124]. Mais quelle fut sa surprise et son courroux en apprenant que Talbot, venu pour ravitailler le Marché de Meaux, avait surpris les assiégeants et réussi à détruire deux de leurs bastilles ! Le Roi s'avança rapidement jusqu'à Brie-Comte-Robert, où ses gens de guerre avaient été convoqués. Grâce à son intervention, l'échec fut bien vite réparé, et le Marché réduit à capituler[125]. Une réunion générale des États généraux de Languedoil et de Languedoc ; devait se tenir à Paris, le e septembre, pour trancher la question de la paix avec l'Angleterre, qui venait de se poser aux conférences de Gravelines. Le Roi ne voulait point résoudre un si grave problème sans le concours des trois États de son royaume[126]. Il arriva dans sa capitale le 9 septembre ; mais la ville était dans une situation si précaire, qu'il dut renoncer à y tenir la réunion projetée. Dans le cours de l'année 1438, cinq mille personnes étaient mortes de la petite vérole, et la disette avait succédé à l'épidémie : les vivres atteignaient un prix exorbitant ; à chaque instant les loups pénétraient dans la ville et y faisaient d'affreux ravages[127]. Les Parisiens, mécontents de l'administration du connétable, qu'ils accusaient d'épargner les Anglais et qu'ils qualifiaient de très mauvais homme et très couart[128], étaient loin d'être favorables au Roi, ils prétendaient qu'il ne tenait pas plus compte de l'Ile-de-France, de la guerre, ni de son peuple que s'il eût été prisonnier des Sarrasins[129]. A vrai dire, ils avaient à se plaindre, non seulement des courses incessantes des Anglais, qui rôdaient sans cesse autour de la ville, mais des désordres auxquels se livraient impunément les garnisons des places voisines[130]. Car le Roi était plus impuissant que jamais à réprimer les excès de ses gens de guerre : malgré l'ordre qu'il s'efforça d'établir parmi les garnisons de l'Ile-de-France, la situation ne s'améliora guère. La capitale était d'ailleurs toujours éprouvée par les épidémies et la famine. Durant son séjour, Charles VII fit célébrer à Saint-Denis un service pour sa sœur Marie de France, religieuse au couvent de Poissy, morte de la peste le 19 août précédent[131]. Malgré l'épidémie et la misère publique, eut lieu le 16 septembre, en présence du Roi, du duc de Bourbon, de Charles d'Anjou, des comtes de Vendôme, d'Eu, de Richemont et d'un grand nombre de seigneurs, un combat à outrance entre quatre Français et quatre Anglais. Ce spectacle inusité attira une grande affluence. Il n'y eut pas mort d'hommes, mais le sang coula en abondance[132]. La réunion des États généraux avait été transférée à Orléans[133]. Le Roi partit pour cette ville le 30 septembre. Depuis l'assemblée de Chinon, en octobre 1428, on n'avait
pas vu de réunion si nombreuse et si solennelle. Parmi les princes, la
vieille reine de Sicile, le duc de Bourbon, Charles d'Anjou, les comtes de la
Marche, d'Eu et de Vendôme, le connétable de Richemont, le bâtard d'Orléans
et Pierre de Bretagne y figuraient en personne ; le duc d'Orléans, le duc de
Bourgogne, le duc de Bretagne, le comte d'Armagnac s'étaient fait représenter[134]. Et y avoit, dit Berry, notables
gens envoyez de tous les pays et citez de ce royaume, pour ouir parler et
pratiquer du bien et gouvernement de ce royaume, et pour le povoir mettre en
bonne paix, justice et pollice[135]. Le Roi fit d'abord venir en son hôtel, avant la séance d'ouverture, les ambassadeurs des princes, afin de leur faire connaitre l'objet de la réunion et d'avoir leur avis sur l'exposition et demande, au bien de la chose publicque. Il se rendit ensuite dans la grande salle où devaient se tenir les États, et prit place sur un trône, ayant sa belle-mère à ses côtés, entouré du duc de Bourbon, de Charles d'Anjou, du connétable et des autres princes. Chacun s'assit suivant son rang : d'abord les princes, puis les prélats, et les autres seigneurs et ambassadeurs, dont il y avoit grant nombre, et grant multiplicacion de peuple. L'archevêque de Reims, chancelier de France, ouvrit la séance. Le Roi, dit-il, n'a cessé de désirer la paix ; il y a toujours travaillé de toute sa volonté et de tout son pouvoir il est prêt à s'en occuper encore. Pour cela, il a envoyé ses représentants partout où les Anglais ont voulu tenir des conférences, afin de s'entendre avec eux. Dernièrement ses ambassadeurs, à la tête desquels étaient le comte de Vendôme et le chancelier, se sont rendus à Saint-Omer, où ont été jetées des bases de négociations ; il a été convenu qu'on se réunirait de nouveau dans cette ville le 1er mai 1440, pour là conclurre ou toute paix ou toute guerre. Le Roi a donc mandé toute la compagnie réunie pour cette heure à Orléans, afin que chacun puisse aviser au bien de la chose publique et au recouvrement du royaume, et donner en conscience son bon et vrai advis. Le chancelier fit alors distribuer aux membres de l'assemblée le texte des articles rédigés durant les conférences de Gravelines, afin que ung chascun peust mieux respondre, jugier et parler sur chascun article. On se sépara après avoir décidé qu'on se réunirait le lendemain, en la chambre du Conseil ordonné pour ce faire, et qu'on siégerait sans désemparer jusques à tant que la chose eust prins fin et deliberacion. Huit jours se passèrent dans ces discussions. Et là furent ouyz, dit le chroniqueur, tous ou la pluspart des seigneurs de ce royaume qui là
estoient presens ; et aussi l'oppinion des ambassadeurs des seigneurs qui
estoient absens, et pareillement l'oppinion de tous ceulx des bonnes villes.
Puis eut lieu une nouvelle séance générale, en présence du Roi et de la reine
Yolande. C'est alors que fut agitée, pour la première fois, la question de la
réforme de l'armée, si intimement liée à celle de la paix. On fit ressortir les desolacions, maulx, pilleries, meurtres, rebellions,
roberies et raençonnemens qui estoient perpetrez et fais soubz umbre de la
guerre, et aussi les biens, la joye et les plaisirs qui viengnent et sont par
les pais où paix est. Cependant les avis étaient toujours partagés, et il était impossible d'arriver à une conclusion. On résolut de désigner des orateurs pour faire valoir tour à tour les raisons à invoquer soit en faveur de la paix, soit pour la continuation de la guerre. Après avoir pris l'avis de son Conseil, le Roi désigna pour soutenir la première opinion le comte de Vendôme, grand maître de son hôtel, et Jacques Jouvenel des Ursins, depuis évêque de Poitiers ; pour soutenir la seconde, le bâtard d'Orléans, le maréchal de la Fayette et Jean Rabateau, président au Parlement[136]. Jacques Jouvenel prit le premier la parole ; Jean Rabateau lui répondit. Enfin, après une longue et solennelle discussion, la question fut mise en délibération. L'assemblée, estimant que le meilleur estoit de tirer au bien de paix, décida que les négociations avec les Anglais seraient poursuivies. Pourtant, en l'absence du Dauphin, alors en Languedoc, on ne voulut pas se prononcer sur le fond de la question : on renvoya à une autre assemblée, qui se tiendrait le 1er février 1440, en présence de l'héritier du trône, le soin de fixer les conditions auxquelles la paix pourrait être conclue[137]. La réforme des gens de guerre donna lieu également à de sérieuses discussions. Le Roi, qui avait tant à cœur de résoudre cette grave question, y eut une large part. Les résolutions prises d'un commun accord eurent leur sanction dans la célèbre ordonnance du 2 novembre 1439, qui inaugure en quelque sorte une ère nouvelle dans l'histoire de la Monarchie française. Nous y reviendrons avec détail. Pour le moment, il convient de rechercher sous l'empire de quelles circonstances avaient été reprises avec les Anglais les négociations interrompues depuis le mois de septembre 1435. |
[1] Jean Chartier, t. I, p. 210.
[2] Lettres des généraux des finances du 15 juillet 1436. Ms. fr. 26061 (Quittances, 70), n° 2884.
[3] Instructions données aux ambassadeurs de l'évêque, de l'université, et des habitants de Paris, dans Du Boulay, Historia universitatis Parisiensis, t. V, 436-37 ; Réponse du Roi aux requêtes des Parisiens, dans Félibien, Histoire de Paris, t. V, p. 269-70. — Dès le 28 mai, le chapitre de la cathédrale, voulant remercier Dieu du bon accueil qu'avait reçu du Roi l'ambassade parisienne, ordonnait une procession solennelle pour le 30. Archives, Registres capitulaires, LL 217, f. 108.
[4] Une autre ambassade vint, à la fin d'octobre, trouver le Roi à Amboise. Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, 48, f. 103 v°.
[5] Relation de Regnault Girard. Ms. fr. 17330.
[6] Fut choses bien estrange de par delà, pour ce qu'il n'y en a nulz. — Relation de Regnault Girard. Ms. fr. 17330.
[7] Et eust ma dicte dame très beau temps et beau passage, la Dieu mercy, dit Regnault Girard dans la relation de son ambassade. — C'est donc par erreur que MM. Francisque Michel (les Écossais en France, t. I, p. 183) et Vallet de Viriville (Histoire de Charles VII, t. II, p. 372) disent que Marguerite, après de grands périls et des avaries ou fortunes de mer, arriva à La Palice à peu près saine et sauve, mais pourtant à demi morte. — Un marché avait été passé avec Jean de Preel, dit Pymor, sergent d'armes du Roi, maitre de navires, moyennant la somme de 10.000 réaux, pour le passage de la Dauphine. Voir un acte du 16 juillet 1436. Pièces originales, 2374 : PREEL.
[8] La flotte anglaise se composait de cent quatre-vingt vaisseaux ; s'étant lancée à la poursuite de navires flamands qui portaient de La Rochelle en Flandre une cargaison de vin, elle fut elle-même attaquée par des navires castillans qui la dépouillèrent de sa prise. Pendant ce temps, la flotte écossaise put passer librement.
[9] La Palisse était sur la côte de l'ile de Ré ; on lit dans un acte notarié de 1549 : Terrouer du petit fort, autrement La Pallice, siz à l'île de Ré près la rive de la mer. Cette rade était près du bourg de la Flotte, alors simple fief dépendant de Notre-Dame de Sainte-Marie-les-Châteliers. Ces renseignements nous sont fournis par une lettre de M. Jourdain, en date du 7 août 1862, qui se trouvait dans les papiers de M. Vallet de Viriville, dont nous devons la communication à l'obligeance de Mm Vallet de Viriville.
[10] Et à l'entrée de la dicte ville, sailly ung enfant, en figure d'ange, du portal d'icelle ville, qui apporta ung chappeau sur le chef de madicte dame, qui estoit chose bien genterrent et subtilement faicte. Relation de Regnault Girard. Ms. fr. 17330. — Les États du Poitou donnèrent à la jeune princesse de la vaisselle d'argent pour une somme de 2.300 l. t. Archives, K 64, n° 11 ; Pièces originales, 1324 : GILIER.
[11] Voir lettres du duc d'Orléans données à Blois le 16 août1436, à la relation de son Conseil. British Museum, Additional Charters, n° 2811 ; édité par M. Vallet dans la Bibliothèque de l'École des chartes, t. VIII, p. 138. Cf. un document du 23 août 1436. Pièces originales, 2239 : PERRIER.
[12] Ces détails sont empruntés principalement à la relation circonstanciée donnée par le chroniqueur officiel Jean Chartier, t. I, p. 229 et suivantes. Nous les avons complétés au moyen de la Relation de Regnault Girard et de la Chronique d'Alençon, dans Du Chesne (vd. 48). Voir aussi Walter Bower, dans Hearne, Scolichronicon, t. IV, p. 1274-1279, et Liber Pluscardiensis, dans The Historians of Scotland, t. VII, p. 374-375.
[13] Relation de Regnault Girard.
[14] Relation de Regnault Girard.
[15] Le Dauphin, né le 3 juillet un, n'avait pas encore treize ans accomplis ; Marguerite était née vers 1424. — Le 3 juin 1436, le Roi donnait commission au chancelier Regnault de Chartres, à Adam de Cambray, premier président au parlement, et à trois autres, pour comparoir devant l'archevêque de Tours, et requérir dispense pour le mariage ; le même jour il donnait pouvoir à son fils de comparoir devant ledit archevêque pour contracter mariage avec Marguerite ; le 13, l'archevêque Philippe de Coëtquis donnait ses lettres de dispense. Original, Archives, J 409, n° 57-59 ; Léonard, Recueil des traitez, t. I, p. 28-31, etc. — Dans ses lettres, l'archevêque dit, en parlant de l'âge de la princesse : Et ipsa sponsa quasi duodecim finem anni attingeret. Le Religieux de Dumferline ne lui donne même pas cet âge : Erg enim flua decem annorum. Liber Pluscardiensis, dans Historians of Scotland, t. VII, p. 374.
[16] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 102 v°. — Et ne fut le Roy en autre habit en la dicte benéisson qu'en celui en quoy il chevauchoit. Maiz mon dit seigneur le Daulphin estoit veste en habit royal et ma dicte dame son espouse aussi. Aussi fut la Royne de France au matin vestue d'une robe de velloux pers toute couverte d'orfaverie à grans fueillages, qui estoient moult belles et moult riches. Chartier, t. I, p. 231.
[17] In notabilissimo apparatu vestita, preciosissime et splendide, ac corpore decora, facie venusta valde. Liber Pluscardiensis, dans Historians of Scotland, t. VII, p. 374.
[18] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 105 v°.
[19] Relation de Regnault Girard.
[20] Une espée, la poignée de fouet blanc, au pommeau une Nostre-Dame d'un costé et saint Michel de l'autre, nommée l'espée du Roy d'Escosse qui fut fort hardy, laquelle fust donnée au feu Roy Loys quant il espousa madame la Daulphine. Inventaire du château d'Amboise (23 septembre 1499), cité par Laborde, Glossaire français du moyen âge, p. 482.
[21] Chronique citée, et J. Chartier, p. 232. Et à proprement parler, là fut faicte grande et bonne chière.
[22] Danses avec travestissements. V. Du Cange, au mot Morikinus.
[23] M. Lambron de Lignim a communiqué, en 1847, au Congrès scientifique de France, des extraits des comptes où se trouvent des détails relatifs aux fêtes célébrées les 24 et 15 juin 1436, à l'occasion du mariage du Dauphin. Congrès scientifique de France. Quinzième session, tenue à Tours en septembre 1847. Tours, 1848, t. I, p. 123-124. — Et fut la feste grande, et pleine, dit la Chronique d'Alençon (f. 101 v°), comme le cas le requeroit bien, sans y avoir joustes ne faire autres grans choses estranges. — Les habitants de Tours et de Chinon donnèrent à la Dauphine de la vaisselle pour une somme de 571 l. 6 s. 8 d. t. Archives de Tours, Registres des comptes, XXVI, f. 112 ; Mémoires de la Société archéologique de Touraine, t. XX, p. 255.
[24] Le détail suivant nous est fourni par un texte contemporain publié par M. J. Stevenson : the life and death of King James the first of Scotland. Printed for the Maitland Club (1837, in-4°). On y lit (p. 8) : Quinimo licet desponsati erant et matrimonialiter copulati, non tamen in thoro nuptiali intraverunt usque post duos annos vel cum dimidio, quibus transactis, completi sunt in eis anni nubiles et in lecto positi, apud villam de Gien sur Laare et sic matrimonium perfecte consummatum est in nomine Jesu Christi. — Le séjour du Dauphin à Gien parait devoir être placé à la fin de juillet 1437, d'après l'itinéraire de Charles VII.
[25] Le 4 juillet 1436. Extrait du 13e compte de Guillaume Charrier, dans Legrand, vol. VI, f. 23 ; reproduit par M. E. Charavay, Lettres de Louis XI, t. I, p. 163-64.
[26] Berry, p. 407. — Le comte de la Marche avait une pension de 6.000 l. t. (même compte).
[27] Voir Œuvres de Georges Chastellain, t. II, p. 169.
[28] Jean Majoris était maitre d'école du Dauphin en 1429 (voir t. II, chapitre VI). Une erreur d'impression de la notice consacrée par M. E. Charavay à ce personnage (Lettres de Louis XI, t. I, p. 370) est à relever : il faut lire 1429 et non 1422.
[29] Pierre Harenthal était en fonctions dès 1428.
[30] Jean Leothier était physicien du Dauphin depuis sa naissance.
[31] Amaury d'Estissac fut, par lettres du 28 août 1436, commis et ordonné entre et soy tenir ordinairement en la compaignie de monseigneur le Daulphin et au gouvernement de sa personne, à 1200 livres de pension (Compte cité dans Legrand, VI, f. 23 v°). Gabriel de Bernes, est qualifié de maitre d'hôtel du Dauphin dans des lettres du 4 février 1437, par lesquelles le Roi lui fait allouer 100 livres (Pièces originales, 305 : BERNES). — Le 4 février 1437, Joachim Rouault, premier écuyer de corps et maître de l'écurie du Dauphin, reçoit 1.350 l. t. pour l'achat de chevaux, selles, harnais, épées, robes, etc., nécessaires au Dauphin (Clairambault, 196, p. 8031). — Le Dauphin avait en outre trois autres maîtres d'hôtel, Jean Sanglier, Jean Havart, Rogerin Blosset, et Jean Trousseau était son premier écuyer tranchant.
[32] On a prétendu (Duclos, Histoire de Louis XI, p. 35, d'après Legrand, Histoire manuscrite de Louis XI, t. I, p. 25) que Charles VII laissa son fils dans une pénurie complète. Les textes donnent un démenti formel à cette assertion. Par lettres du 24 juillet 1437, le Roi faisait ordonnancer à Simon Verjus, maître de la chambre aux deniers du Dauphin, une somme de 21.000 l. t. pour la dépense ordinaire de son hôtel pendant deux ans, à partir du 4 juillet 1436. Compte de Guillaume Charrier, déjà cité, et reproduit par M. Charavay, l. c., p. 163-64. Cf. p. 167, 169 et suivantes, et Pièces originales, 2588 : RU.
[33] Voir sur cette affaire les détails circonstanciés donnés par M. Quicherat, Rodrigue de Villandrando, p. 126 et suivantes. Cf. D. Vaissète, t. IV, p. 485 et suivantes.
[34] Ce document est un mémoire rédigé par le président Louvet au mois de novembre 1435, et qu'il remit à Luc de Jouge, chargé près du duc de Savoie d'une mission dont il sera question plus loin. Il porte ce titre : A celle fin que les faits de la court de France soient bien entendus. Archives de Turin, Archivio camerale.
[35] C'est ce qui ressort du premier paragraphe : Premièrement que le Roy n'a aujourduy nul serviteur particulier qui ait plus de povoir envers luy que les autres.
[36] La principale attente de Bourbon si est que monseigneur de Bourgongne viengne devers le Roy, et que lors eulx deux pourront tout et reculleront tous les autres.
[37] Item le Roy aime très fort monseigneur le bastard et a plus de Galice particulière en sa personne que en nul autre. Mais il se vuelt du tout emploier à la guerre, et ne se vuelt point tenir à court, pour non avoir bruit de gouvernement, pour les envies et malveillances que il an a eu autresfoys quant le Roy vint à Vienne, etc. — Remarquons que Louvet, dans cette énumération des princes, passe sous silence le comte de Vendôme.
[38] Est a entendre à Bourbon de cuer, mais ilz le endureroyent à monstrer en ce que despleroit à ceulx d'Anjou.
[39] Robert le Maçon apparait pour la dernière fois au Conseil le 16 août 1436.
[40] Nous voyons apparaître le premier dans une ordonnance du 23 novembre 1435 ; les deux autres dans des lettres du 8 mars 1436.
[41] Et depuis lesdictes lettres sont survenues aucunes novités en la court du Roy, pour lesquelles ha esté ledit monseigneur le bastard hastivement mandé aler devers le Roy... Archives de Turin.
[42] Jean de Norry disparaît du conseil en 1436.
[43] Jean de Bueil figure parmi les signataires de l'acte du 8 mars 1436 ; Pierre d'Amboise siège au conseil à partir du second semestre de 1436 ; les noms de Prégent de Coëtivy et de Pierre de Brezé apparaissent dans des lettres des 3 et 7 janvier 1437.
[44] Le chancellier souloit estre tout à Bourbon ; le Roy vuelt qu'il soit à monseigneur Charles d'Anjou. Mémoire de Louvet. — Il en fut de même pour Christophe d'Harcourt et les prélats nommés ci-dessus.
[45] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 103 v°. — L'évêque de Clermont, qui n'est point compris dans la nomenclature faite par Louvet, était l'ancien chancelier Martin Gouge.
[46] Lettres du 13 septembre 1436, signées par Charles d'Anjou, qui prend la qualification de comte de Mortain, lieutenant pour le Roy ès pays d'Anjou et du Maine. Le bâtard d'Orléans et Jean de Bueil figurent parmi les personnages qui contresignèrent cet acte. Original, aux Archives de la Loire-Inférieure, E 179 ; copies dans les Mss. fr. 2714, f. 106, et 2715, f. 67 v°.
[47] Lettres du 13 octobre 1436, visées par La Roque, Histoire de la maison d'Harcourt, t. I, p. 714.
[48] Texte dans Léonard, Recueil des traitez, t. I, p. 456-457.
[49] Voici les noms des membres du conseil qui suivirent le Roi dans le midi : l'archevêque de Toulouse, les évêques de Clermont, de Maguelonne et de Castres, Christophe d'Harcourt, Hugues de Noé, le sire de Bueil, Pierre d'Amboise, seigneur de Chaumont, Prégent de Coëtivy, Pierre de Brezé, Geoffroy Vassal, Jean le Picart et Jean Bureau, que l'on voit apparaitre pour la première fois au Conseil durant ce voyage.
[50] La Roque, Histoire de la maison d'Harcourt, t. I, p. 903 ; t. IV, p. 1729.
[51] Thomas, les États provinciaux de la France centrale sous Charles VII, t. p. 195. — Le Roi arriva le 10 octobre à Clermont.
[52] Rodrigue de Villandrando, p. 130-131 et 280-282. Cf. document du 4 décembre 1436. Pièces originales, 2622 : SALSAN.
[53] D. Vaissète, Histoire générale du Languedoc, t. IV, p. 488. — On a une foule de lettres de retenue au service du Roi en date des 5 et 6 mai. Voici les considérants de la plupart de ces documents : Comme pour resister aux entreprises et courses que plusieurs routiers et gens de compaignie font et s'efforcent souventes fois faire pour entrer et descendre en nostre dit pays de Languedoc, pour le chevaucher, piller et rober, et raenconner noz bons et loyaux subgetz, soit besoing avoir et tenir en icelluy nostre dit pays aucun nostre feable, qui continuellement ait et tiengue en sa compaignie aucun nombre de gens de guerre... Pièces originales, 2043 : MORAS.
[54] D. Vaissète, Histoire générale du Languedoc, t. IV, p. 488.
[55] La Reine paraît avoir résidé à Tours durant presque toute l'année 1437. Registres des comptes, vol. XXVI, f. 173.
[56] Extraits des Registres de Tours, publiés par M. Quicherat, l. c., p. 287 et suivantes.
[57] Jean était né le 2 août 1427 ; le traité de mariage est du 2 avril 1437.
[58] Duquel voiage et de la longueur du temps de sa demeure, le Roy de Cecille, les ducs d'Alençon et de Bourbon, tous les chevaliers et escuiers, les prelaz des bonnes villes et tous les subgez obeissans au Roy ont esté en très grain esmoy. Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 103 v°.
[59] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 103 v°.
[60] Il était depuis la bataille de Bulgneville (1431) demeuré le prisonnier du duc de Bourgogne. Sur sa délivrance, voir plus loin, chapitre III. — M. Lecoy de la Marche (Le roi René, t. I, p. 122) cherche vainement à atténuer la faute du roi de Sicile.
[61] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne : extrait publié par M. Quicherat, l. c., p. 290-291.
[62] La Chronique d'Alençon dit qu'il avait plus de cinq cents chevaliers et écuyers et quatre mille hommes de trait.
[63] Rodrigue de Villandrando, par M. Quicherat, p. 141.
[64] Berry, p. 395. — Un document, dont M. Quicherat n'a pas fait usage, fixe la date de ce passage. C'est le Journal de Jean Denis, publié par M. Canat, dans l'ouvrage auquel nous avons fait de si fréquents emprunts. On y voit (p. 272) que le 29 juin furent pendus à Mâcon huit hommes de guerre de la compagnie de Rodrigue, venus pour piller. Leur capitaine était alors avec mille chevaux vers Villefranche et Anse, c'est-à-dire vers les rives du Rhône.
[65] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 104 v°. — On a des lettres du 13 juin, datées de Saint-Haon.
[66] La Chronique d'Alençon dit à ce propos (f. 105) : Et fut plus de deux mois avant qu'il vousist veoir le Roy de Cecille. Mais l'itinéraire du Roi montre qu'il ne put s'écouler un délai aussi prolongé, car, arrivé le 5 juillet à Bourges, Charles VII en partit à la fin de ce mois pour son expédition de Montereau.
[67] C'est à Gien que fut passé cet acte, qui est longuement analysé dans l'inventaire de Lorraine conservé aux Archives, KK 1116, f. 515-v° 522 v°. Cf. le roi René, par M. Lecoy de la Marche, t. I, p. 131-132.
[68] M. Quicherat dit (p. 142) que la peur fit épuiser au duc de Bourbon toutes les formules de l'humilité. Berry nous apprend (p. 395) qu'il s'était empressé de désavouer son beau-frère Rodrigue et de déclarer qu'il était prêt à faire tout ce que le Roi voudrait lui commander.
[69] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 105.
[70] Chronique d'Alençon.
[71] Berry, p. 395 ; Quicherat, l. c., p. 144-143.
[72] Combien que depuis l'an de son sacre et couronnement à Rains et de son retour de devant Paris, il povoit sembler à tous les seigneurs de son sang, les chevaliers et les escuiers, les bonnes villes et gens de plat pais, que le Roy eust delessié du tout de soi entremettre et estre present en sa personne de faire guerre à ses anciens ennemis d'Engleterre, mais, la mercy de Nostre Seigneur, il a entreprins le vouloir leur faire plus forte et aspre guerre que oncques ne leur fist. Et quelque conseil qu'il ait eu le temps passé, à present veult faire la guerre la pluspart à son vouloir. (Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 105.) — Et hoc enim ipse rex qui per longa ante tempora, celui somno sepultus, obterpuerat, nullisque pagine bellicis obsidionibus prnsens affuerat, excitatus est (Th. Basin, t. I, p. 138.)
[73] Par lettres du 5 juillet 1437, données à Bourges, Charles VII ordonnait de payer à Hugues de Noé la somme de quatre cents écus d'or, pour deux coursiers de poil bay que avons fait prendre et achetter de lui pour ledit pris pour nostre corps et iceulx faire mettre en nostre escurie. Ms. fr. 40403, f. 20.
[74] Archives de Reims. — De Gien, le 1er août, le Roi écrivit une nouvelle lettre où il annonçait sa venue ; le 4, il demanda de l'artillerie et des munitions.
[75] Et de fait ne rouit ouyr ne entendre conseil que on luy vouseist faire au contraire que tous ceulx qui avoient esté prins etc ladicte place, ou pou s'en fallit, les Englois furent penduz, et les traitres renduz les testes couppées. Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, 137 v°.
[76] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, 137 v°.
[77] Et quant il vit et aperçeut ce, et la grant compaignie de gens d'armes et de trait lesquels à son mandement estoient venez devers lui de ses garnisons et bonnes villes, de ses pais de Picardie et conté de Champaigne et d'ailleurs, et les offres de finances et de vivres que iceulx pais et la ville de Paris lui fesoient, le très bon courage qu'il avoit et la grant volenté de recouvrer son royaume lui creut de plus de la moitié. (Idem.) — Châlons, Troyes et d'autres villes se saignèrent ; Paris s'exécuta aussi. Seul le chapitre de Notre-Dame fit quelques difficultés (Archives, LL 217, f. 156 et 156 v°). A Amiens, où l'on reçut le 29 août une lettre du Roi datée du 19 et demandant de l'artillerie, on décida le 31 que, tout consideré que c'est les premières lettres et premières requestes du Roy, fut dreoit que tout ainsi qu'il le mandoit il fust acompli si avant que faire se porroit. Les fournitures faites se montaient à mille livres. Registres des délibérations, vol. IV, f. 176.
[78] Et vouloit veoir et sçavoir toutes les manières et l'apareil que chascun de ses capitaines qui avoient la charge de applicquier les lieux où les bombardes, cagnons et antres engins seroient assis pour batre la ville. Et tout ce qui ne lui sembloit estre bien aposé, le fesoit lever et mettre en aultre lieu plus convenable à son avis. (Chronique d'Alençon.) — Cette sollicitude s'étendait aux secours du dehors On en a la preuve par les lettres que le Roi écrivait à ses bonnes villes. Il y a aux archives de Reims quatre lettres missives signées, datées de Montereau, les 21 septembre, 5, 6 et 17 octobre. Les registres d'Amiens mentionnent une lettre apportée le 23 octobre aux habitants par deux envoyés du Roi (vol. IV, f. 183).
[79] Chronique d'Alençon. Cf. Monstrelet, t. V, p. 294.
[80] Auquel (assault) il fut en personne aussi avant que chevalier ou escuier de sa compaignie : et tant que il fut aux fons des fessés de la place en l'eaue jusques passé la sainture ; ne oucques pour chose qui luy en feust dicte ne se voult deporter d'entrer dedens lesdiz fossés. (Idem.) — Auquel assault le Roy nostre dit seigneur a esté et se y est exposé en sa propre personne, et vaillamment s'est mis en les fossés en l'eaue jusques au dessus de la ceinture, et passé oultre à pié de mur, et monté par une eschelle durant l'assault, l'espée ou poing, et entré dedans que encores y avoit très peu de ses gens. (Registres du Parlement, X1a, 1482, f. 38.) — Il est assez étrange, après de pareils témoignages, confirmés d'ailleurs par ceux de Berry et de Monstrelet : (Le Roy y estoit present en personne, faisant son devoir comme les autres ; — Et luy meisme de sa personne y prist moult de traveil), d'entendre un historien moderne (Sismondi, Histoire des Français, t. XIII, p. 312) dire : Ce langage (de Berry et de Monstrelet) était trop simple pour les écrivains postérieurs : selon eux, Charles se signala à ce siège par la plus brillante valeur. M. Henri Martin cite le récit des Registres du Parlement, et ajoute (Histoire de France, t. VI, p. 365) : Cela est un peu suspect, l'historiographe Jean Chartier et Berry n'en disant rien.
[81] Chronique d'Alençon ; Registres du Parlement, Archives, X1a, 1482, f. 37 v° ; Monstrelet, t. V, p. 294.
[82] Berry, p. 396.
[83] Si quid tibi gloria est regni sedere Galliæ caput et nominis majestatem consequi, disait Alain Chartier, dans son De delestatione belli Gallici et suasione pacis. Voir Œuvres, p. 487.
[84] Sur l'entrée de Charles VII dans Paris, voir l'acte notarié qui se trouve dans les Registres capitulaires de Notre-Daine, aux Archives, LL 217, f. 165 v°, 166 v° ; Berry, p. 398-399 ; Monstrelet, t. V, p. 301-306 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 335-336.
[85] Journal d'un bourgeois de Paris, p. 335. — Les bourgoys lui mirent un ciel sur sa teste comme on a à la Sainct Sauveur à porter Nostre Seigneur.
[86] Lesquelx eu divers lieux crioient à haulte voix Noél pour la joyeuse venue de leur Roy et naturel seigneur et de son fils le Daulphin. Si en y avoient plusieurs qui plouroient de joie et de pitié qu'ilz avoient de ce qu'ilz le revéeoient en leur ville. Monstrelet, t. V, p. 308. Cf. Martial d'Auvergne, les Vigilles de la mort du Roy Charles VII, t. I, p. 167.
[87] Singulier retour des choses d'ici-bas ! Le docteur chargé de porter la parole au nom de l'Université n'était autre que Nicolas Midi, l'un des juges de Jeanne d'Arc, et le plus acharné contre la Pucelle ! L'analyse de sa harangue est donnée par du Boulay, t. V, p. 442.
[88] Registres capitulaires de Notre-Dame de Paris, aux Archives, LL 217, f. 357-59. Cf. Journal d'un bourgeois de Paris, p. 336, note.
[89] De buccinare, jouer de la trompette.
[90] Journal d'un bourgeois de Paris, p. 336.
[91] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, 48 f. 107 v°.
[92] C'est ce que rapporte Martial d'Auvergne, gardien fidèle de la tradition en ajoutant de son fond aux récits contemporains qu'il paraphrase. Voir ses Vigilles, t. I, p. 157.
[93] Il faut entendre l'auteur du Journal d'un bourgeois de Paris se plaindre (p. 337-338) du renchérissement des denrées. et des dépenses occasionnées par la venue du Roi : le Roi, dit-il, partit sans faire nul bien à la ville ; il sembloit qu'il ne fust venu seullement que pour veoir la ville.
[94] Berry ; Monstrelet ; Du Boulay, Histor. univers. Paris., t. V, p. 441 ; Ordonnances, t. XV, p. 49, etc.
[95] M. Vallet fait cette observation, t. II, p. 388. — Le 18 novembre Charles VII nomma Jean Chartier, moine de Saint-Denis, historiographe de France. Chronique latine de Jean Chartier, dans le Bulletin de la Société de l'histoire de France, 1857-58, p. 214.
[96] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, 48 f. 107 v°.
[97] Voir chapitre I.
[98] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, 48, f. 108.
[99] Lettres des 3 février et 14 avril 1438. Clairambault, 194, p. 7669 ; Ms fr. 20385, f. 4.
[100] Chronique d'Alençon, 48, f. 108 ; le P. Anselme, t. I, p. 117.
[101] Et pour proceder au surplus, soyons, Dieu devant, deternulez, concluz et deliberez de nous mettre de rechief sus en ceste prouchaine saison nouvelle, à toute la meilleure et plus grosse puissance que porrons finer. Lettres des 3 mars et 23 juin 1438, faisant mention de la levée d'une imposition de 200.000 livres. Chartes royales, XIV, n° 114 et 116.
[102] Chronique d'Alençon, f. 108 v°. — L'auteur fait de vifs reproches au Roi pour n'avoir pas repris les armes en personne.
[103] Le P. Anselme, t. I, p. 116.
[104] Le parti des mécontents lui reprochait vivement cette inaction. On lit dans la Chronique d'Alençon (Du Chesne, 48, p. 109) : Tout le temps de l'esté present, le Roy ne s'est entretenu de faire guerre. Et aussi n'ont fait nos seigneurs les ducs d'Alençon ne de Bourbon, monseigneur Charles d'Anjou, ne le conte de Richemont connestable de France. Et n'y eut fait guerre que des frontières les uns aux autres, en pillant tousjours le povre peuple.
[105] Berry, p. 401. — Voir chapitre I.
[106] Lettres du 19 septembre (Archives de Reims) ; Délibération du Conseil, en date du 22, signée par Geoffroy Vassal (Clairambault 188, p. 7149).
[107] Chronique d'Alençon, f. 110.
[108] Et ledit messire Charles d'Anjou, seul sans nos autres seigneurs de France, combien qu'il fust moult jeune, et bien est apparu, gouvernoit le Roy et son ostel ; de quoy le duc de Bourbon n'estoit pas bien content. Chronique d'Alençon, f. 109 v°.
[109] Ces deux jumelles, nommées Jeanne et Marie, étaient nées (sans doute à Amboise) le 7 septembre 1438. Chronique d'Alençon, f. 109 ; le P. Anselme, t. I, p. 118.
[110] Ce document, publié d'abord par M. Allou dans les Mémoires de la Société des antiquaires de France, t. XI, p. 357 et suivantes, a été reproduit, avec une traduction française, par M. Maurice Ardant, en 1854, dans le Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, t. V, p. 55-70, et réimprimé en 1874 par M. Duplès-Agier à la suite de son édition des Chroniques de Saint-Martial de Limoges, p. 202.
[111] Apothecarius domini Delphini, qui vocabatur G. Boutet, de civitate Bituricensis, fuit hospes meus, qui non gravavit in aliquo contra voluntatem meam ; verumtamen in camera et lecto meo jacebat, et etiam cum Dionysio, clerico meo mihi servienti ; cui dedit in recessu V solidos, quod tamen ego nolebam.
[112] Nous verrons plus loin que Henri Baude, dans son Portrait historique, parle de la passion du Roi pour le tir à l'arbalète.
[113] Lettres sans date dans le ms. fr. 5909, f. 317.
[114] Thomas, Les États provinciaux de la France centrale sous [Charles] VII, t. I, p. 230 et 244 ; Relation, dans Duplès-Agier, l. c., p. 212.
[115] Thomas, Les États provinciaux de la France centrale sous [Charles] VII, t. I, p. 198.
[116] Mémoire en réponse aux doléances des princes, publié dans les Preuves de la chronique de Mathieu d'Escouchy, p. 4 et suivantes.
[117] C'est par erreur que D. Vaissète dit (t. IV, p. 490) que le Roi passa la fête de Pâques à Montpellier. Berry nous apprend qu'il partit de Riom le mardi d'après Pâques (7 avril).
[118] Chronique d'Étienne de Médicis, p. 250.
[119] Voir les lettres du Dauphin, en date du 5 septembre 1439, dans D. Vaissète, t. IV, preuves, col. 450.
[120] Mémoire cité, p. 56 ; Berry, p. 401.
[121] Voir le Procès-verbal qui se trouve aux Archives : K 687, n° 4. Cf. D. Vaissète, t. IV, p. 490.
[122] Lettres du 3 juin 1439. Archives, K 65, n° 3.
[123] Mémoire cité, p. 6.
[124] Voir chapitre I.
[125] Mit telle provision à Saint-Denis et ailleurs que les Anglois n'osèrent secourir iceluy Marché. Berry, p. 403. Cf. Monstrelet, t. V, p. 389-390, et Gruel, p. 388-389.
[126] Voir aux Pièces justificatives les lettres de convocation en date du 25 août. Cette réunion avait été annoncée à Gravelines (voir chapitre IV) comme devant se tenir à Paris ou dans les environs. Jouvenel des Ursins qui, dans son Epître de 1440, constate que, convoquée à Paris, elle fut transférée à Orléans, s'en fait un grief contre Charles VII. Ms. fr. 2701, f. 9 v°-10.
[127] Item en celui temps, especialment tant comme le Roy fut à Paris, furent les loups si enragez de menger cher de homme, de femme ou d'enfeus que, en la darraine sepmaine de septembre, estranglerent et mangerent quatorze personnes, que grans que petiz, entre Montmartre et la porte Saint-Anthoine, que dedens les vignes que dedens les marês ; et s'ils trouvoient ung tropeau de bestes, ils assaillaient le berger et laissaient les bestes. La vigille Saint-Martin fut tant chassé un loup terrible et orrible, que on disoit que lui tout seul avoit fait plus des douleurs devant dictes que tous les autres ; celui jour fut prins, et n'avoit point de queue ; et pour ce fui nommé Courtaut ; et parloit autant de lui comme [on fait] d'un larron de bois ou d'un cruel cappitaine ; et disoit-on aux gens qui alloient aux champs : Gardez-vous de Courtaut ! Journal d'un bourgeois de Paris, p. 348.
[128] L'auteur du Journal d'un bourgeois de Paris, qui paraît être Jean Chuffart, chanoine de Notre-Darne, s'est fait l'écho de ces plaintes, et a formulé lui-même un jugement très sévère à l'égard du connétable. Voir pages 340-341 et 346-437.
[129] Journal d'un bourgeois de Paris, p. 344-345.
[130] A ce moment même les gens du duc de Bourbon, qui tenaient garnison au Bois de Vincennes et à Corbeil, se livraient à un pillage continuel. Journal d'un bourgeois de Paris, p. 351 ; Gruel, p. 387.
[131] Elle était âgée de près de 45 ans, étant née le 24 avril 1393. Voir Journal d'un bourgeois de Paris, p. 348.
[132] Gruel parle de ce combat (p. 389). La date et les faits sont précisés par le prieur Maupoint dans son Journal (Mémoires de la Société de l'histoire de Paris, t. IV, p. 2526). On a confondu ce combat à outrance avec le duel entre Jean de Massé et l'écuyer anglais Jean de Asteley, qu'on prétend à tort avoir eu lieu, le 29 août 1438, devant le Roi, lequel n'était point alors dans la capitale. Voir Ms. fr. 197, f. 223 ; Brienne, 272, f. 178 ; Vulson de la Colombière, Théâtre d'honneur, t. II, p. 311 ; Vallet, Histoire de Charles VII, t. II, p. 399, note.
[133] Le 17 septembre on recevait à Senlis des lettres du Roi portant convocation à Orléans pour le 25. (Manet, Extrait en bref de ce qui s'est passé à Senlis, dans Bernier, Monuments inédits, p. 23). Le 26 on délibérait encore à Amiens sur l'envoi des députés (Registre des délibérations, vol. V, f. 33).
[134] Berry, p. 404. — Tous les détails qui suivent sont empruntés à ce chroniqueur ; les citations sont faites d'après le texte établi par le comte Amédée de Bourmont, dans l'édition qu'il prépare pour la Société de l'histoire de France.
[135] Berry, l. c.
[136] Plusieurs autres conseillers furent désignés pour les assister.
[137] Ce curieux détail nous est fourni par le rapport des députés que la ville d'Amiens avait envoyés à Orléans. Toutes voies le Roy et son conseil ne vaurent determiner aucune chose pour ce fere. On disoit que Monseigneur le Doffin n'estoit present ; et fu dit de par le Roy que nouvelle assemblée se feroit au premier jour de fevrier, ou seroit ledit Monseigneur le Doffin, pour, sur ces coses, avoir advis, et au XVe jour d'avril ensuivant le Roy nostre dit seigneur envoieroit son ambaxade les Gravelines, où autreffois et derrenierement a esté ladicte assemblée. Registres des délibérations, vol. V, f. 45.