1435-1444 Perte de Saint-Denis ; reprise de Dieppe ; soulèvement du pays de Caux, bientôt reconquis par les Anglais. — Occupation de Paris par le connétable de Richemont. — Campagne infructueuse en Normandie. — Siège de Calais par le duc de Bourgogne ; Glocester en Flandre et le duc d'York en Normandie. — Triste situation de la France ; divisions dans le Conseil d'Angleterre. — Tentatives des Anglais sur Paris, où un complot éclate. — Siège et prise de Montereau. — Succès des Anglais en Normandie ; nouvel échec du duc de Bourgogne devant Le Crotoy. — Maux du royaume : la peste, la famine, l'escorcherie. — Recouvrement de Montargis et de Dreux ; expédition en Guyenne. — Le comte d'Eu, investi de la lieutenance en Normandie, arrête de ce côté les progrès de l'ennemi. — Tristes exploits des écorcheurs ; leurs campagnes en Lorraine, en Alsace, en Bourgogne ; les retondeurs. — Prise de Meaux ; campagne du Dauphin en Guyenne contre le comte d'Huntingdon. Siège d'Avranches par le connétable ; les Anglais profitent de la Praguerie pour assiéger Harfleur, qui tombe entre Leurs mains. — Recouvrement de Louviers et de Conciles. Prise de Creil, de Pontoise et d'Évreux ; les Anglais sont définitivement chassés de l'Île de France. — Campagne de Charles VII en Guyenne ; journée de Tartas ; conquête du pays des Landes et de l'Agenais. — Désarroi des Anglais en Normandie ; Talbot compense leurs pertes en reprenant Conches ; il fait le siège de Dieppe ; une armée commandée par le Dauphin le force à lever le siège. — Nouvelle invasion des écorcheurs en Bourgogne ; ils sont repoussés par les gens du duc. — Descente du duc de Somerset en Normandie ; il échoue misérablement. — Brillante campagne du Dauphin contre le comte d'Armagnac. Le congrès d'Arras n'avait point entraîné la suspension des hostilités. A ce moment même, l'un des plus célèbres capitaines anglais, Jean Fastolf, grand maître d'hôtel du duc de Bedford, adressait à son maître un mémoire sur la direction à imprimer à la fois au gouvernement et aux opérations militaires[1]. Après avoir donné son approbation à ce mémoire, Bedford s'empressa de le transmettre aux ambassadeurs anglais siégeant à Arras. Pendant le cours des négociations, et conformément au plan de Fastolf, le sire de Willoughby, assisté du bourguignon L'Isle-Adam, maréchal de France et gouverneur de Paris pour Henri VI, vint au mois d'avril mettre le siège devant Saint-Denis, rentré le 1er juin précédent sous l'obéissance royale. Le bâtard d'Orléans, laissant dans la place le maréchal de Rochefort, alla demander du secours au Roi. Il fut décidé qu'une diversion serait faite en Normandie, et qu'un corps d'armée, sous les ordres du bâtard et du duc d'Alençon, se porterait dans cette province. Au commencement de septembre, les princes parurent devant Verneuil. L'assaut fut tenté, mais sans succès[2]. De là, le duc d'Alençon marcha sur Séez, tandis que le bâtard d'Orléans se rapprochait du cours de la Seine, dans le dessein d'intercepter les communications de l'ennemi par ce fleuve. Bien que les Anglais fussent sur leurs gardes[3], le Pont de Meulan fut (24 septembre) pris par escalade[4]. A peine en possession de cette place, le bâtard apprit que la garnison de Saint-Denis, pressée par la famine et le manque d'argent, venait de capituler (24 septembre)[5]. Il n'était plus possible d'empêcher la reddition de la ville. On se borna à dresser une embuscade où tombèrent Thomas Kyriel et Mathieu Gough, venus, à la tête de six cents combattants, pour tenir la journée de Saint-Denis. Surpris durant la nuit, les Anglais furent culbutés et Gough demeura prisonnier[6]. Le bâtard d'Orléans alla ensuite joindre le connétable, qui, à la nouvelle de la capitulation, s'était avancé jusqu'à Senlis. Ayant reconnu l'impossibilité de marcher sur Saint-Denis, les princes ne tardèrent pas à se séparer. Les Anglais se disposaient à assiéger le Pont de Meulan, quand arriva la nouvelle que les Français occupaient Verneuil[7]. Déjà Gisors avait failli, par trahison, tomber entre leurs mains[8]. On craignait de les voir s'avancer sur Évreux ou Conches ; des mesures de défense furent prises : rendez-vous fut donné à Évreux (27 octobre) à tous ceux qui étaient en état de porter les armes, afin de former un corps de troupes sous les ordres.de Willoughby et de Scales[9]. Bientôt on apprit que le bâtard d'Orléans[10] était à Chartres et y rassemblait de nombreux gens de guerre[11]. Le bruit courut que Rouen allait être attaqué. On redoubla de vigilance dans cette ville[12] : pendant plusieurs mois on fit des rondes de nuit, et deux fallots restèrent allumés au Palais, afin de se mettre à l'abri de toute surprise[13]. Dans la Haute-Normandie, les Anglais étaient à la veille de subir un grave échec. Le maréchal de Rochefort, voulant prendre sa revanche de Saint-Denis, alla joindre un vaillant capitaine, Charles des Maretz[14], qui méditait une entreprise sur Dieppe. Un vigoureux assaut, donné le 28 octobre, au point du jour, mit la ville entre leurs mains[15]. L'occupation de Dieppe fut le signal d'un soulèvement général dans le pays de Caux, où les Anglais avaient commis l'imprudence d'armer le peuple[16]. Sous la direction d'un simple paysan, nommé Le Caruyer, et avec l'assistance de La Hire, Floquet et Jean de Grouchy, les Cauchois réussirent à secouer le joug ennemi. En moins de six semaines, Fécamp, Barfleur, Montivilliers, Tancarville, Lillebonne ouvrirent leurs portes aux Français ; à la fin de 1435, toute la contrée, sauf Caudebec et Arques, avait reconnu l'autorité de Charles VII[17]. Jamais la puissance anglaise en Normandie n'avait été aussi profondément atteinte. Une véritable panique régnait dans le Conseil siégeant à Rouen. En vain, au delà du détroit, s'efforça-t-on de le rassurer par des promesses de secours, par la déclaration solennelle, faite au nom du jeune roi, qu'il était bien résolu à ne jamais abandonner la partie[18]. A vrai dire, on n'était pas moins inquiet à Westminster qu'à Rouen : on craignait en Basse-Normandie un soulèvement analogue à celui qui venait d'éclater dans le pays de Caux[19]. Ces terreurs, hélas ! furent passagères. L'absence de discipline, le manque de cohésion chez les vainqueurs, et surtout l'énergie et l'habileté déployées par Talbot et lord Beaumont amenèrent un prompt revirement : la' plupart des places conquises retombèrent presque aussitôt au pouvoir des Anglais. Le Pont de Meulan et Verneuil furent également repris[20]. Des contemporains reprochent à Charles VII d'avoir négligé de soutenir les Cauchois[21]. Ils oublient que l'attention du gouvernement royal était concentrée sur un autre point. Au commencement de 1436, tous les efforts se dirigeaient vers l'Ile de France. Grâce à l'initiative des habitants, Pontoise fut d'abord enlevée par surprise à l'ennemi[22]. Puis on s'empara successivement de Saint-Germain, Brie-Comte-Robert, Charenton et Vincennes[23]. Paris se trouva ainsi comme cerné. En présence des mouvements hostiles qui se manifestaient parmi-la population parisienne, les Anglais se sentirent réduits à l'impuissance. Dès le 29 janvier, Charles VII avait donné à son beau-frère, Charles d'Anjou, la charge de gouverneur de Paris[24] ; peu après il accorda aux habitants de la capitale des lettres d'abolition[25] ; le 8 mars 1436, il investit Richemont des fonctions de lieutenant général dans les provinces situées au Nord de la Seine et de l'Yonne[26]. Quand le connétable eut opéré sa jonction avec L'Isle-Adam — celui-là même qui, en mai 1418, avait enlevé Paris au Dauphin — les jours de la domination anglaise étaient comptés cédant à l'impulsion du brave Michel de Lallier, les habitants allaient, presque sans coup férir, ouvrir aux Français les portes de la capitale. Après un léger engagement entre Épinay et Saint-Denis, où lord Beaumont fut fait prisonnier, Richemont s'empara de Saint-Denis. Le 13 avril, il fit son entrée dans Paris[27]. Après avoir joui un moment de la juste popularité que lui conquirent d'habiles et sages mesures, le connétable se porta sur Beauvais et Gerberoy, tandis que La Hire et Saintrailles marchaient sur Gisors. Un autre corps d'armée, sous les ordres de Lohéac et Bueil, s'empara de Saint-Denis-le-Gast, entra dans la Basse-Normandie et prit position à Granville (fin mai)[28]. Mais cette triple expédition n'amena pas les résultats espérés. Gisors, un moment occupé, dut être évacué[29] ; le connétable, dont le dessein était de se porter sur Rouen après avoir rallié les forces de La Hire et du maréchal de Rochefort, fut obligé de renoncer à son projet, rendu inexécutable par les succès de Talbot dans la Haute-Normandie. Les Normands retombèrent sous le joug écrasant qu'ils étaient condamnés à subir encore pendant de longues années[30]. Richemont se rabattit sur Creil ; de concert avec le bâtard d'Orléans, il tenta vainement le siège de cette place ; de là il se rendit en Artois, où il offrit au duc de Bourgogne, pour la lutte que ce prince allait engager contre les Anglais, un concours qui ne fut point accepté[31]. Philippe s'était, en effet, décidé à assiéger Calais. Préparée de longue main avec le concours des milices flamandes, cette expédition échoua misérablement : le duc, lâchement abandonné, dut lever soudain le siège. Le duc de Glocester, auquel Henri VI venait de donner le comté de Flandre, débarqua à Calais à la tête d'une armée, et put librement porter le ravage dans la Flandre. En même temps le duc d'York, désigné comme successeur de Bedford, dont le décès remontait au mois de septembre 1435, opéra sa descente à Pennedepie[32] près d'Honfleur (juin). Prenant aussitôt l'offensive, ce prince s'empara de Chambrois, de Saint-Germain-sous-Cailly, de Lillebonne et de Fécamp, tandis qu'un de ses lieutenants, Thomas Kyriel, opérait dans le pays de Bray avec non moins de succès[33]. La guerre était donc plus violente que jamais, et le traité d'Arras, salué par les populations comme l'aurore de la délivrance[34], était loin d'avoir mis un terme à leurs souffrances. La lutte ne cessait même pas entièrement entre Bourguignons et Français les capitaines de chaque parti, obéissant à des rancunes personnelles, ne laissaient point échapper une occasion d'en venir aux mains. Il en résultait pour le peuple un accroissement de maux ; de toutes parts les ruines allaient s'amoncelant. Si n'y povoient, dit un auteur du temps, les povres laboureurs mettre aultre provision, sinon de crier miserablement à Dieu, leur createur, vengeance[35]. A Paris, où la domination française avait été accueillie avec enthousiasme, le mécontentement commençait à se faire sentir. On se plaignait de la lenteur apportée à la réorganisation des services publics, de l'indiscipline et des exigences des gens de guerre, du mauvais gouvernement du connétable, et, par-dessus tout, de l'absence du Roi, qui avait passé l'hiver dans le midi[36]. L'échec du duc de Bourgogne devant Calais équivalait pour les Anglais au gain d'une bataille. Débarrassés de ce nouvel adversaire qui, d'ailleurs, allait être pendant longtemps absorba par ses luttes avec les villes flamandes (avril 1437-mars 1438), nos ennemis pouvaient concentrer tous leurs efforts contre la France. Si les ressources financières ne leur avaient fait défaut[37] ; si surtout des rivalités de plus en plus vives dans le Conseil privé n'étaient venues paralyser leur action, ils auraient pu nous causer de graves préjudices. Mais le cardinal de Winchester, qui avait pris la direction des affaires, était en lutte ouverte avec le duc de Glocester : il travaillait à faire enlever la lieutenance générale au duc d'York pour la faire donner à. Richard Beauchamp, comte de Warwick. Voulant rendre son pouvoir inébranlable, il simula un projet de retraite à. Rome, et se fit donner par le conseil l'ordre de rester à la tète du gouvernement. D'ailleurs Beaufort — comme autrefois La Trémoille à l'égard de Charles VII — s'imposait au roi par les finances, étant le prêteur attitré de la couronne en détresse[38]. C'est vers Paris que se tournaient toujours les regards des Anglais. A la fin de janvier 1437, ils réussirent à s'emparer d'Yvry. Le 13 février, l'incurie de L'Isle-Adam leur permit de reprendre Pontoise sans coup férir[39]. Le mois suivant Talbot s'empara de plusieurs places dans le Vexin, au nord de Pontoise[40]. En avril, les Français perdirent Montargis, Chevreuse et Orville[41]. La situation de la capitale devenait alarmante. La réduction de Beauvoir, près de Meaux, et de Malesherbes, opérée par le connétable (avril-mai), ne suffisait pas pour conjurer le péril. A ce moment éclata une conjuration, à laquelle furent mêlés un avocat au Parlement et un clerc des comtes, et qui avait des ramifications hors de. Paris[42]. On s'aperçut que les secrets de l'état étaient livrés à l'ennemi, et l'on sévit avec vigueur. Une députation des Parisiens se rendit près du Roi (fin d'avril) pour le mettre au courant de la situation. Charles VII, au retour de son voyage en Languedoc et d'une brillante campagne contre Rodrigue de Villandrando dont il sera parlé plus loin, s'occupa de porter remède à un état de choses que le connétable, alors installé dans son gouvernement de l'Île de France, n'aurait pas dû, ce semble, laisser s'aggraver de la sorte. Le Roi se mit aussitôt en campagne. Les hostilités s'ouvrirent au mois de juillet, par la prise des villes de Charny, Château-Landon et Nemours. De là l'armée se porta sur Montereau, où, comme on le verra, le Roi fit noblement son devoir. La place fut emportée d'assaut (10 octobre) ; quinze jours après le château capitula. Par ses résultats militaires, par le prestige qu'en 'reçut le représentant de la royauté, ce brillant succès devait entraîner d'incalculables conséquences. A Paris et dans tout le royaume éclata la joie la plus vive[43] : on sentait qu'une impulsion nouvelle allait être donnée à la direction du gouvernement. La guerre n'avait point cessé en Normandie. Au printemps, La Hire et Saintrailles tentèrent un coup de main sur Rouen, où ils s'étaient ménagé des intelligences. Mais les Anglais étaient sur leurs gardes : il fallut battre en retraite ; les deux capitaines n'échappèrent qu'avec peine aux poursuites de Talbot et de Kyriel[44]. Durant le siège de Montereau, l'ennemi fit de grands préparatifs pour attaquer le château de Tancarville, resté, avec quelques autres places de la basse Seine, au pouvoir de Charles VII. L'absence de direction retarda un moment cette entreprise. Le duc d'York venait d'être destitué ; le comte de Warwick avait accepté (26 avril) la lieutenance en France, dont il fut investi par lettres du 16 juillet 1437[45]. Retenu par diverses circonstances et par les vents contraires, Warwick ne s'embarqua que le 6 novembre ; à son arrivée, il trouva Tancarville aux mains des Anglais[46], ainsi que deux autres places de moindre importance. Le nouveau gouverneur passa en revue ses gens de guerre à Rouen, et fit voter par les États une imposition de trois cent mille livres[47]. Au milieu de sa lutte avec les Brugeois, qui venaient (novembre 1437) de mettre le siège devait L'Écluse, le duc de Bourgogne fit assiéger Le Crotoy, pris naguères par les Anglais grâce à son assistance[48]. Le duc vint à Hesdin et parut un instant sous les murs de la place. De grands préparatifs militaires furent faits pour la secourir[49] : Talbot et d'autres capitaines s'avancèrent à la tête de cinq mille hommes. Tandis que Philippe se tenait à Abbeville, l'armée anglaise occupa l'abbaye de Saint-Valery, envoya ses coureurs devant Le Crotoy, et se répandit dans toute la contrée. Cette simple démonstration suffit pour faire lâcher pied aux chevaliers picards, qui levèrent honteusement le siège. Les Anglais ne trouvèrent plus d'ennemis à combattre, et si les capitaines français du pays de Caux n'avaient, au retour, harcelé leurs flancs, ils seraient rentrés à Rouen sans avoir eu à tirer l'épée[50]. Un fait significatif se produisit durant cette expédition : l'ancien lieutenant du duc de Bourgogne dans ses luttes contre la France, Jean de Luxembourg, comte de Ligny, refusa de combattre les Anglais. Ce fut l'origine d'un profond dissentiment entre Philippe et son puissant vassal, qui mourut peu après, toujours fidèle à la cause de Henri VI[51]. L'année 1437 se termina sous de, tristes auspices. La peste faisait, sur divers points du royaume, d'affreux ravages ; partout la famine sévissait et la cherté des vivres allait croissant. Monstrelet nous apprend que cette pestilence dura jusqu'en 1439[52]. Une autre calamité prenait d'effroyables proportions : nous voulons parler de l'escorcherie, ce fléau si ancien et si invétéré dont la France avait eu à souffrir dès le temps de Charles V, et qui, sous des formes multiples, s'était perpétué au milieu des guerres et des discordes civiles. Les gens des garnisons, comme ceux du plat pays, ne vivent que de rapine et de proie[53]. Les Compagnies se multiplient dans une proportion effrayante : les escorcheurs, comme on les appelle si justement[54], sont dans le Hainaut et le Cambrésis, d'où il faut qu'une armée, réunie à Douai, vienne les chasser[55] ; ils sont dans l'Auxerrois et le Tonnerrois où Forte-Épice, un des plus redoutables routiers, s'empare de Mailly[56] ; ils sont en Picardie, où le duc de Bourgogne envoie contre eux des troupes pour venger la mort d'un de ses plus fidèles serviteurs[57] ; ils sont dans le Bourbonnais, où ils tuent dans une embuscade le bailli de Berry, Giraud de Goulard[58] ; il sont sur la frontière du Mâconnais, où ils ravagent la contrée[59] ; en Barrois, semant la terreur dans les terres du roi René[60] ; en Normandie, d'où ils se répandent dans le Vimeu et le Ponthieu et organisent une expédition que Jean de Croy est chargé de repousser[61]. Partout mêmes désordres, mêmes pillages, mêmes cruautés : c'est une véritable émulation de rapines et de meurtres, à laquelle les plus célèbres capitaines et même des grands seigneurs ne restent point étrangers : Chabannes, les deux Blanchefort, Brusac, La Hire, le bâtard de Bourbon, Louis de Bueil ne pratiquent pas seuls l'escorcherie ; elle a pour adeptes le comte de Ligny, le seigneur de Commercy, bon nombre de seigneurs picards et bourguignons[62]. Un prince du sang, le duc de Bourbon, est comme le grand maître d'une partie de cette franc-maçonnerie pillarde. Comment empêcher un mal si universel ? L'argent fait défaut pour solder ces capitaines qui, d'ailleurs, préfèrent leur riche butin à une paie incertaine. Plus fortes que le pouvoir royal, les Compagnies connaissent leur puissance, et elles en abusent[63]. Ni les ordonnances du Roi, ni les exécutions du connétable n'arrêtent leurs excès ; il faudra du temps, il faudra la persévérance et la rare énergie de Charles VII pour couper le mal dans sa racine et tirer de ces bandes sauvages et indisciplinées l'armée régulière destinée à opérer, avec un ordre admirable, la conquête de la Normandie et de la Guyenne. Charles VII, qui avait visité sa capitale après la prise de Montereau, la quitta le 3 décembre 1437. En regagnant la Touraine, il entama avec François de Surienne, capitaine de Montargis pour les Anglais, des négociations qui aboutirent à la remise entre ses mains de cette importante place[64], que les Anglais se disposaient à ravitailler[65]. Dans le cours de 1438, Dreux, Chevreuse et Orville furent aussi replacées sous l'autorité royale[66]. A la fin de février le Roi partit pour la Saintonge : il s'agissait de préparer les voies à une expédition en Guyenne, concertée de longue main[67]. L'apparition d'une flotte espagnole sur les côtes de France[68] semble se rattacher à cette démonstration militaire. On fortifia toutes les places de Saintonge[69] : le sire de Mareuil, sénéchal de cette province, eut mission d'attaquer Mareuil[70]. Saintrailles fut chargé de rallier toutes les bandes du midi et de prendre à revers le pays de Gascogne[71]. De pleins pouvoirs furent donnés au sire d'Albret pour recevoir la soumission des villes et forteresses de la Guyenne[72]. Enfin Rodrigue de Villandrando fut envoyé en Agenais, tandis que le bâtard de Bourbon s'avançait par l'Armagnac. Bordeaux fut assigné comme rendez-vous général à tous les corps d'armée[73]. Villandrando ouvrit les hostilités. Il s'empara de Fumel, d'Issigeac, d'Eymet, de Lauzun et de La Salvetat, où il mit garnison, traversa la Garonne à Tonneins et vint occuper Blanquefort et Castelnau, d'où il porta la terreur dans tout le Médoc. Saintrailles et le sire d'Albret pénétrèrent en Gascogne par la frontière du Béarn, et ne furent pas moins heureux. Bientôt l'armée française, maîtresse de toute la contrée jusqu'à Soulac, à l'embouchure de la Gironde, campa sous les murs de Bordeaux[74]. Saint-Seurin, faubourg de la ville, tomba en son pouvoir. Mais l'artillerie faisait défaut ; on se borna à établir un camp retranché à Saint-Seurin, et l'on chercha à attirer l'ennemi en rase campagne. Un stratagème employé à cet effet eut un plein succès : la garnison de Bordeaux donna dans une embuscade où elle perdit huit cents hommes. Enfin, l'artillerie ne venant pas, l'escalade étant reconnue impossible, et le manque de vivres se faisant sentir, il fallut battre en retraite. L'expédition du Médoc qui, un moment, avait semblé promettre des résultats décisifs, n'aboutit qu'à la prise de quelques places, presque aussi vite perdues que gagnées. Tartas demeura seul au pouvoir des Français[75]. Durant le cours de cette expédition, un des prisonniers d'Azincourt recouvra la liberté : Charles d'Artois, comte d'Eu, fut échangé avec le comte de Somerset, depuis longtemps prisonnier en France[76]. Le comte d'Eu, tombé à vingt-deux ans aux mains des Anglais, était dans toute la force de l'âge. Le Roi l'accueillit avec empressement et lui donna aussitôt un commandement en Normandie et Beauvoisis[77]. Le comte d'Eu ne tarda pas à donner des preuves de son activité et de son énergie. La garnison établie à Harfleur par le maréchal de Rochefort après la levée du siège[78], était fort insubordonnée : elle dut reconnaître l'autorité du comte ; des gens à lui furent placés dans toutes les villes du pays de Caux, menacées à ce moment par l'ennemi[79]. La guerre se poursuivait, du côté des Anglais, mais avec mollesse. En dehors de la tentative sur Harfleur, on ne rencontre qu'une démonstration contre Saint-Denis[80], une attaque dirigée dans le Maine contre La Guierche[81], enfin l'occupation de Longueville et de quelques autres châteaux du pays de Caux par Talbot et Kyriel[82]. Les mesures prises par le comte d'Eu arrêtèrent de ce côté les progrès de l'ennemi. Mais, autour de Paris., les garnisons anglaises de Gisors, de Pontoise, de Creil, de Meaux, sans cesse renforcées et ravitaillées, ne cessaient de parcourir le pays et portaient leurs ravages jusqu'aux portes de la capitale, où la peste continuait à sévir[83]. A la fin de décembre, un arrangement fut pris contre le comte de Dorset, d'une part, et le duc d'Alençon et le comte du Maine, de l'autre, pour mettre les possessions de ces princes à l'abri des apatis, ou contributions de guerre levées sur les habitants[84]. Les gens de guerre français rivalisaient d'ailleurs avec l'ennemi, et les habitants de Paris avaient cruellement à se plaindre de leurs excès[85]. Certains capitaines se donnaient d'étranges licences : Saint-Aignan, en plein Berry, eut à subir un siège ; il fallut que le Roi réunît une armée pour délivrer la place[86]. Les capitaines qui commandaient cette armée trouvant, à leur arrivée, le siège de Saint-Aignan levé, n'eurent garde de perdre une si belle occasion. Le comte de Vaudemont était alors en guerre avec le roi René ; ils prirent le chemin de la Lorraine (novembre 1438), et chacun s'enrôla à son gré sous l'une ou sous l'autre des deux bannières. Charles VII dut intervenir en faveur de son beau-frère, et enlever d'autorité au comte de Vaudemont ses auxiliaires français[87] ; mais ceux-ci se firent solder à deniers comptants le prix de leur retraite. Puis, quand la guerre de Lorraine fut terminée (février 1439), les capitaines, dont le nombre ne s'élevait pas à moins de vingt-cinq, allèrent ravager l'Alsace, où ils commirent les plus effroyables excès ; après une tentative infructueuse sur Bâle, où siégeait encore un simulacre de concile, ils revinrent par le comté de Montbelliard et par la Bourgogne[88]. On dirait que ces hordes indisciplinées, avides de pillage et de meurtre, se sont, en quelque sorte, partagé la France et la mettent en coupe réglée. Les pays du duc de Bourgogne ne sont pas à l'abri de leurs attaques. Dès le mois de janvier 1438, sept à huit mille écorcheurs s'assemblent aux environs de Dijon ; de là ils descendent sur Beaune et vont ravager le Charolais ; le Mâconnais obtient, au moyen d'une rançon, d'être épargné pour quelques mois ; mais l'Autunois subit le sort du Charolais : on ne peut lire sans frémir le récit des horribles traitements infligés aux habitants de ces contrées[89]. Et pourtant le mal n'a point encore atteint son apogée. Olivier de la Marche nous apprend que les gens de guerre bourguignons, rassemblés pour combattre les Compagnies, se mirent à imiter leur exemple : aux écorcheurs se joignirent les retondeurs, ainsi nommés, dit le chroniqueur, parce que ils retondoient et recouvroient tout ce que les premiers avoient failly de happer et de prandre[90]. Au milieu de telles horreurs, un spectacle consolant vient frapper le regard : un seigneur bourguignon, Guillaume de Damas, seigneur de Digoine, se met à la tête de ses serviteurs, parcourt, au mépris du danger, les pays dévastés pour porter secours aux malheureuses victimes, et les arrache parfois à la mort en payant leur rançon[91]. Le seigneur de Charny, gouverneur du duché de Bourgogne, désespérant d'avoir raison de ces hordes sauvages, se décida à composer avec elles : par un traité en règle, il obtint leur retraite (novembre 1438) en versant aux capitaines une somme de trois mille saluts d'or[92]. En Languedoc on fit de même : les États se décidèrent, pour se débarrasser des rouliers, à leur faire compter des sommes énormes[93]. Au commencement de 1439, le gouvernement anglais, fatigué d'une lutte qui devenait pour lui de plus en plus onéreuse, entra en négociations avec Charles VII : des conférences s'ouvrirent à Gravelines. Cela n'empêcha pas le Roi de faire le siège de Meaux. L'opération, vivement conduite par le connétable, aboutit à un heureux résultat : le 12 août la ville était emportée d'assaut. Malgré l'assistance que Somerset et Talbot réussirent à donner au Marché de Meaux, qui tenait encore, le capitaine anglais, sir William Chamberlain, dut capituler dans les premiers jours de septembre. Ce fut, parmi les Anglais, un cri unanime d'indignation contre le lâche qui s'était rendu coupable d'un tel crime[94]. La perte de Meaux était loin d'être compensée par l'occupation de Saint-Germain-en-Laye, de Gerberoy et de Lillebonne, dont l'ennemi réussit à s'emparer[95]. En Guyenne, le comte de Huntingdon, débarqué à Bordeaux au mois de juillet, reconquit toutes les places où les Français avaient laissé garnison l'année précédente, et se porta vers le Languedoc, dont la garde avait été récemment confiée au Dauphin, assisté de son gouverneur le comte de la Marche. Le jeune Louis, qui se disposait à venir rejoindre son père[96], prit aussitôt des mesures pour la défense de la province : les gens de guerre furent convoqués à Albi pour le 20 septembre ; par lettres du 13 octobre, le comte de Foix, le sire d'Albret et le vicomte de Lomagne furent institués capitaines généraux. Le second prit le commandement de l'armée qui devait opérer en Guyenne. Le comte de Penthièvre fut envoyé en Périgord, et mit le siège devant Thenon. Ces vigoureuses démonstrations suffirent à protéger le Midi contre l'ennemi du dehors ; mais l'ennemi du dedans — nous voulons parler des routiers continua plus que jamais à désoler la contrée[97]. Charles VII avait suivi d'un œil attentif les événements militaires accomplis devant Meaux, et il se trouvait à Paris quand, après le succès, le connétable y reparut. Il fut décidé que Richemont, assisté du duc d'Alençon et du maréchal de Lohéac, conduirait l'armée en Normandie[98]. Le connétable s'avança vers la basse Normandie et vint mettre le siège devant Avranches. Mais, mal secondé par les capitaines et dénué d'artillerie, il fut contraint de battre en retraite[99]. Déjà la Praguerie se préparait, et les bandes indisciplinées qu'on avait dirigées sur la Normandie faisaient preuve d'une insubordination qui paralysait toutes les opérations militaires. Nous raconterons plus loin cet épisode de la Praguerie, où apparut avec éclat l'initiative personnelle du Roi. Profitant de la guerre civile, les Anglais mirent le siège devant Harfleur. Aussitôt que Charles VII eut triomphé des princes révoltés, il prit des mesures pour secourir la place, que le capitaine, Jean d'Estouteville, défendait vaillamment depuis quatre mois. Le comte d'Eu, Dunois, Gaucourt, le bâtard de Bourbon et La Hire partirent à la tète de quatre mille combattants. On gagna la Picardie, où l'armée se grossit d'un bon nombre d'auxiliaires, et l'on s'avança par le pays de Caux. Mais la prise de l'un des chefs, Gaucourt, tombé dans une embuscade[100], l'insuccès d'une première attaque contre les Anglais, et par-dessus tout le, manque de vivres, firent échouer l'entreprise. Le comte d'Eu dut battre en retraite, et Harfleur capitula[101]. La reddition de cette ville entraîna celle de Montivilliers. On fut plus heureux sur un autre point de la Normandie, où le Roi avait envoyé Saintrailles et Brezé. Louviers fut occupé[102] et Conches pris d'assaut[103]. De Louviers, où se concentrèrent les forces royales, on tint l'ennemi en échec et on lui causa de perpétuelles alarmes[104]. En l'absence du duc d'York, qui venait (2 juillet 1440) de reprendre la lieutenance générale devenue vacante[105], le Conseil anglais fit appel aux notables, et tint deux assemblées, l'une à Pont-de-l'Arche, l'autre à Rouen, pour combiner les mesures à prendre[106]. La situation de l'Ile-de-France préoccupait toujours le Roi. Les Anglais ne cessaient d'y tenir la campagne et Talbot pouvait aller librement d'une garnison à l'autre. Pourtant les troupes qui gardaient Mantes furent battues par les Bretons du connétable. Mais ce qui était encore plus funeste aux Français que les courses des ennemis, c'étaient les excès des gens de guerre de leur parti, lesquels, selon la remarque d'un auteur du temps, étaient pires que des Sarrasins. La sécurité des habitants, l'honneur des femmes, la vie des petits enfants, étaient à la merci de cette soldatesque sans frein[107]. Au mois de décembre 1440, Saint-Germain-en-Laye fut repris par le connétable[108]. Le mois suivant, Charles VII se dirigea vers la Champagne, où il réduisit un grand nombre de places et mit un terme à l'anarchie qui régnait dans les garnisons[109]. Puis il se porta sur Compiègne et Senlis, soumit plusieurs forteresses sur son passage et fit (19 mai) assiéger Creil, qui n'opposa pas une longue résistance[110]. Enfin, au commencement de juin, l'armée royale arriva sous les murs de Pontoise. La réduction de Saint-Germain avait préparé les voies à l'attaque de cette importante place. Au même moment Beaumont-le-Roger et Beaumesnil tombaient au pouvoir des Français[111]. Le siège de Pontoise présentait de sérieuses difficultés ; il fut long, pénible, interrompu à diverses reprises par les retours incessants de l'ennemi. Enfin deux terribles assauts triomphèrent de la résistance des assiégés : l'Ile-de-France fut enfin délivrée à tout jamais du joug étranger[112]. Les Anglais sentirent bien qu'un coup mortel était porté à leur puissance, et qu'elle ne se relèverait point de tant d'échecs successifs. Dès le mois de juin, le Conseil de Henri VI, écrivant en Angleterre, poussait un cri de détresse et prédisait une ruine prochaine[113]. En même temps, un des plus habiles capitaines enrôlés au service de l'Angleterre adressait à Henri VI une curieuse lettre où, à travers les plaintes personnelles et les réclamations intéressées, on peut constater la mauvaise direction imprimée aux affaires et l'ébranlement de la domination anglaise[114]. De son côté, un personnage bien placé pour tout observer, insistait sur la corruption qui régnait parmi le peuple, et voyait là un fâcheux symptôme de décadence[115]. Le Conseil privé d'Angleterre avait cru trouver un remède à cet état de choses en renonçant à confier à des étrangers la direction du gouvernement. Avec le duc d'York, un Conseil, composé uniquement d'Anglais, vint s'installer à Rouen[116]. Un Anglais, Thomas Hoo, remplaça le chancelier Louis de Luxembourg[117]. Tout en poursuivant la lutte en Guyenne, où le comte de Huntingdon fit (juillet 1440) le siège de Tartas, on entretenait toujours de chimériques desseins de paix, on cherchait à se faire des amis parmi les princes du sang[118], on renouait des relations avec la Cour, de Bourgogne. Le gouvernement de Henri VI ne désespérait pas de trouver dans une nouvelle Praguerie des chances plus favorables. C'était là, en effet, le seul espoir qui restât aux Anglais. Il fallut toute la vigilance de Charles VII pour prévenir une semblable éventualité. La première moitié de l'année 1442 fut employée à déjouer les intrigues des princes. Après avoir fait preuve en cela d'une grande habileté, Charles VII ne se montra pas inférieur dans la direction des opérations militaires. La démonstration connue sous le nom de journée de Tartas, en même temps qu'elle fit apparaître aux ennemis la redoutable puissance de la royauté, obligea les grands vassaux à se tenir dans une prudente réserve. Exact au rendez-vous donné aux Anglais (24 juin 1442) et auquel ceux-ci se gardèrent bien de paraître, Charles VII sut tirer parti de ses avantages. Après avoir occupé Tartas, il marcha sur Saint-Sever, qui fut pris d'assaut (25 juin), sur Dax, qui se rendit au bout de quatre semaines (3 août), et fit si bien que, dans le courant du mois de juillet, tout le pays des Landes, sauf Bayonne, était en son pouvoir[119]. On lira plus loin les détails relatifs à cette expédition. Bornons-nous à dire ici que, de Dax, l'armée française remonta vers l'Agenais, soumit Tonneins et Marmande, et alla assiéger La Réole, qui capitula le 7 octobre. Le château nécessita un siège en règles, qui se prolongea jusqu'au 7 décembre. En octobre, tout l'Agenais, ainsi que les places situées sur les rives de la Garonne, étaient occupés par les Français[120]. Pourtant Charles VII ne crut pas devoir pousser plus loin sa conquête. Les Anglais, secondés avec vigueur par les populations, reprenaient l'offensive. L'hiver, d'ailleurs, était venu. Satisfait des résultats obtenus, le Roi laissa l'amiral de Coëtivy à La Réole, et se retira à Montauban, où il passa le reste de l'hiver. Cependant, au Nord, les Anglais étaient dans un complet désarroi. Au mois de janvier, le chancelier Thomas Hoo se rendit en Angleterre ; Talbot l'y suivit le mois suivant. II revint en juin avec deux mille hommes[121]. En avril, une tentative peu sérieuse fut faite dans le pays Chartrain et la Beauce[122], et Gisors fut repris[123]. En juin, l'ennemi ne fut pas plus heureux près d'Évreux, où Floquet tailla en pièces un corps de troupes[124]. A peine arrivé d'Angleterre, Talbot ramassa tout ce qu'il put trouver de soldats, et vint, à la tète de cinq à six mille hommes, mettre le siège devant Conches. Les Français ne se sentant point assez forts pour attaquer le capitaine anglais, firent une diversion et allèrent attaquer Gallardon, qu'ils assiégèrent en vain. Talbot se hâta de composer avec la garnison. de Conches pour marcher sur Gallardon ; mais Dunois et Brezé, qui dirigeaient les opérations militaires en Normandie, avaient levé le siège et s'étaient retirés avec leur artillerie à Chartres[125]. Peu après Surienne, qui, sans trahir ouvertement la cause qu'il servait, ne perdait jamais l'occasion de faire une bonne affaire, abandonnait à Dunois, moyennant onze mille saluts d'or, les places de Gallardon et de Courville[126]. La trahison d'un Anglais nous livra Granville[127]. Talbot n'avait donc réussi qu'à nous enlever Conches. Mais, au mis de novembre, quittant Caudebec où il avait établi son quartier général, il vint mettre le siège devant Dieppe, et construisit, en face des murs de cette ville, une formidable bastille[128]. Ce siège dura neuf mois. Plusieurs fois secourus ou ravitaillés[129], les Français tinrent bon jusqu'au mois d'août. Alors parut une armée sous les ordres du Dauphin[130], investi de la charge de lieutenant général dans les pays entre la Seine et la Somme. Il était assisté de Dunois et de Gaucourt, et le comte de Saint-Pol lui avait amené un contingent de chevaliers picards. Dieppe fut délivrée le 14 août 1443[131]. Nous avons signalé déjà cette plaie de l'escorcherie, si vive et si profonde, qui faisait cruellement souffrir le royaume ; nous avons montré que le ralentissement des opérations militaires, après le traité d'Arras, fut le signal d'une véritable prise d'armes des Compagnies. Dans l'année où nous sommes parvenus, le fléau avait atteint toute son intensité. C'étaient toujours les possessions bourguignonnes qui avaient le plus à en souffrir. Au mois de janvier 1443, une expédition fut dirigée contre les paya du duc. Était-ce une simple bande de pillards obéissant à cet instinct de pillage et de meurtre devenu trop habituel ? Était-ce un corps de troupes agissant avec des vues déterminées et sous l'impulsion d'une volonté plus haute ? On serait tenté d'adopter cette dernière conjecture, quand on considère l'état des rapports de Charles VII avec le duc de Bourgogne, les secrètes menées du duc avec le duc de Bretagne et le duc de Savoie, le déploiement de forces dont la présence des écorcheurs ne semble avoir été que le prétexte[132]. Le 2 janvier 1443 on annonçait la présence des écorcheurs sur les frontières du Lyonnais et du Beaujolais ; le 17 février on disait qu'Antoine de Chabannes était au Puy avec huit mille chevaux, en marche sur la Bourgogne ; le 12 mars Thibault de Neufchastel, sire de Blamont, nommé capitaine général, passait ses montres pour résister aux escorcheurs qui ont l'intention de passer en Bourgogne[133]. Le 29 mars la place de Vimy (aujourd'hui Neuville-sur-Saône), située sur les frontières du Lyonnais et de la Bresse, et occupée par des gens du duc de Savoie, tombait au pouvoir du seigneur de Beauvoir, lieutenant du maréchal de Jalognes[134] ; ses troupes y commirent les plus effroyables excès et ravagèrent les terres du duc de Savoie. Le duc de Bourgogne convoqua aussitôt ses gens de guerre et mit son capitaine général à la disposition du duc ; puis, comme s'il eût été atteint personnellement, il réclama près du duc de Bourbon[135] et porta plainte au Roi relativement à la présence des écorcheurs sur ses frontières[136]. Le 4 mai Vimy était occupé par les troupes de Savoie, qui achevaient la destruction commencée par les Français[137]. Ceux-ci s'étaient retirés sans coup férir : après avoir occupé le Nivernais et le Bourbonnais, ils regagnèrent la Touraine[138]. Les retardataires furent rappelés au mois d'août[139], Charles VII ayant besoin de toutes ses forces pour poursuivre énergiquement la lutte contre les Anglais. Le Roi avait alors, paraît-il, un double objectif : les récents succès obtenus en Guyenne l'engageaient à profiter de ses avantages pour achever la réduction de cette province ; d'autre part, les conquêtes opérées, en Normandie l'excitaient à pousser les hostilités de ce côté avec une nouvelle vigueur, et à s'emparer de Rouen s'il le pouvait. C'est ce qu'on redoutait à Londres, où le moindre mouvement de Charles VII était épié avec inquiétude[140]. Cependant l'Angleterre était à bout de ressources. Lasse de poursuivre des négociations que ses prétentions rendaient illusoires, elle n'était pas moins fatiguée d'une guerre dont les conditions devenaient chaque jour plus difficiles. Au mois de février 1443, on agita dans le Conseil la question de savoir s'il fallait porter secours à la Guyenne ou à la Normandie. La conclusion fût qu'on devait tout tenter pour défendre ces deux provinces. Mais, suivant le mot du cardinal d'York, Henri VI en était réduit à faire, non ce qu'il voulait, mais ce qu'il pouvait[141]. L'envoi d'une armée en Guyenne fut décidé, et le commandement donné au comte de Somerset, créé duc pour la circonstance. Les préparatifs furent longs ; on s'imposa les plus lourds sacrifices[142]. Tout devait être fini pour le 17 juin ; les lenteurs de Somerset retardèrent le départ : au lieu de partir à la fin de juin, il ne mit à la voile qu'au mois d'août[143], et l'armée de Guyenne débarqua à Cherbourg. Il est vrai qu'on projetait de se porter sur la Loire, en traversant rapidement la Normandie, sans doute avec le dessein de s'avancer ensuite, par une marche triomphale, jusqu'à Bordeaux[144]. En attendant, un secours de peu d'importance fut envoyé en Guyenne[145]. Somerset avait en sa compagnie six cents hommes d'armes et quatre mille hommes de trait[146]. Vain et présomptueux[147], le lieutenant et capitaine général de Guyenne[148] ne devait même pas mettre le pied dans la province sur laquelle s'étendait son autorité. Dissimulant son plan de campagne, il alla faire le siège de La Guerche, place appartenant au duc de Bretagne, qui était alors dans les meilleurs termes avec le gouvernement anglais. On comprend l'étonnement de ce prince en présence d'une telle agression. Que fut-ce quand il vit Somerset autoriser le pillage et la destruction de la ville, et exiger, pour évacuer la Bretagne, un subside de vingt mille saluts, dont dix mille payés comptant[149] ? Après ce bel exploit, le duc passa deux mois devant Pouancé, attendant l'armée de Normandie ; puis il fit une pointe sur Angers, surprit à Château-Gontier et fit prisonniers quelques capitaines français qui s'étaient avancés à sa rencontre, et vint mettre le siège devant Beaumont-le-Vicomte, dont il s'empara. Là se bornèrent ses exploits. Il ne tarda pas à se rembarquer. Accueilli à son retour en Angleterre par une pluie de quolibets et de railleries, il tomba malade, et mourut au bout de quelques mois[150]. Après sa brillante expédition de Dieppe, le Dauphin avait été joindre son père en Anjou. Sur ces entrefaites Charles VII apprit que le comte d'Armagnac, qui lui avait déjà donné de sérieux motifs de plaintes, venait de se jeter sur les places du comté de Comminges et de s'en emparer. Le Roi le fit aussitôt sommer de remettre ces places entre ses mains ; et comme le comte, non content de se soustraire a des injonctions réitérées, débauchait les capitaines de l'armée royale et ne craignait pas de se mettre en révolte ouverte, Charles VII résolut de le châtier d'une façon exemplaire. Le Dauphin tut chargé d'agir à main armée. Il partit au mois de décembre 1443, accompagné du maréchal de Jalognes, du seigneur de Chastillon, d'Amaury d'Estissac et de Blanchefort. Tout d'abord il força Salazar, qui était passé au service du comte, de lui livrer Rodez et d'abandonner le commandement de sa compagnie. En arrivant à Toulouse (premiers jours de février), le Dauphin reçut la soumission de la plus grande partie du Comminges. Rejoint dans cette ville par le comte de la Marche, son ancien gouverneur, qui était l'oncle du comte d'Armagnac, il tint un conseil de guerre où fut arrêtée la marche des opérations. Le Dauphin vint assiéger L'Isle-Jourdain, où le comte s'était enfermé. Celui-ci, effrayé d'un tel déploiement de forces, se rendit près du prince, croyant faire sa paix. Mais il fut appréhendé au corps et envoyé, avec sa femme et ses enfants, au château de Lavaur. Son comté fut mis en la main du Roi. De là, passant en Rouergue, le Dauphin acheva la conquête des possessions du comte. Le vicomte de Lomagne, n'osant résister ouvertement, s'enfuit en Navarre. Seules les places de Séverac et de Capdenac n'avaient point ouvert leurs portes. Louis assiégea la première et força le bâtard d'Armagnac, qui s'y était enfermé, à capituler. Il regagna ensuite le centre de la France, laissant à Theaulde de Valpergue, sénéchal de Lyon, le gouvernement du comté d'Armagnac[151]. C'était encore un allié — peu sûr, il est vrai, — que perdaient les Anglais. Réduits depuis longtemps à la défensive, ils se voyaient enlever peu à peu leurs conquêtes. L'heure était venue pour eux de renoncer à la lutte. A la fin de 1443, des négociations furent ouvertes ; elles aboutirent à une trêve, conclue à la date du 28 mai 1444. Désormais la France allait pouvoir respirer : la délivrance du territoire n'était plus qu'une question de temps. |
[1] Voir ce curieux mémoire, rédigé en anglais, dans le recueil de M. J. Stevenson, t. II, p. [575-585].
[2] Voir quittances des 7 et 8 septembre 1435. Ms. fr. 26059 (Quittances, 68), n° 2612 à 617 ; Lettres de Charles VII du 26 septembre, visées dans une quittance du bâtard d'Orléans en date du 28 octobre. Clairambault, 1122, n° 53.
[3] Voir Quittances, n° 2612.
[4] Journal d'un bourgeois de Paris, p. 308.
[5] Le délai pour la reddition de la place était de trois semaines ; mais elle fut évacuée dès le 4 octobre par le maréchal de Rochefort et les capitaines français.
[6] Berry, p. 391 ; J. Chartier, t. I, p. 179-83 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 306-308 ; Monstrelet, t. V, p. 184-87. — La prise de Saint-Denis fut la dernière affaire où des sujets du duc de Bourgogne combattirent dans les rangs ennemis. Monstrelet nous dit que les Picards, déjà avertis de la signature du traité d'Arras, s'empressèrent de prendre congé des capitaines anglais.
[7] Voir quittances des 27 et 31 octobre et 18 novembre. Ms. fr. 20060, n° 2657, 62, 72. — Les Anglais employaient souvent des femmes comme espions : ce furent deux femmes qui allèrent d'Évreux à Chartres, Courville et environs s'informer des mouvements des Français.
[8] 21 octobre 1435 : exécution de Jean Bardouf, écuyer anglais, et d'un autre, de la garnison de Gisors, qui avoient cuidé livrer aux ennemis du Roy nostre sire, par traïson, le chastel et ville de Gisors. Ms. fr. 26060, n° 2654.
[9] Ms. fr. 26060, n° 2662 ; cf n° 2676, et Archives, K 64, n° 117.
[10] Il est désigné sous cette simple appellation : le bastart, dans une quittance du 19 novembre 1435. Ms. fr. 26060, n° 2679.
[11] Deux femmes furent envoyées pour prendre des informations. Ms. fr. 26060, n° 2679.
[12] Document du 13 décembre 1435. Ms. fr. 26060, n° 2694. Cf. au 12 janvier suivant, n° 2720, et Fr. 26427, n° 49. — 28 janvier : Crue de la garnison. Montres, 9, n°. 1053 et 1054.
[13] Mss. fr. 26060, n° 2694, 2720, 2757, 2760, et 26061, n° 2809.
[14] Voir sur ce personnage une notice de M. Della, dans son édition des Cronicques de Normendie, p. 258-74. — J'adopte ici l'orthographe que Charles des Maretz employait dans sa signature. C'est à tort qu'il a été appelé (t. II, chapitre I) capitaine de Dieppe.
[15] Chartier, t. I, p, 174 ; Chronique du Mont Saint-Michel, t. I, p. 36 ; Monstrelet, t. V, p. 104 ; les Cronicques de Normendie, p. 82.
[16] Voir les Cronicques de Normendie, p. 82, et la note p. 253.
[17] Monstrelet, t. V, p. 200-203 ; Berry, p. 392 ; Gruel, p. 379 ; Thomas Basin, t. I, p. 111-113 ; Les Cronicques de Normendie, p. 82-85. Il faut lire dans ces Cronicques le curieux récit de l'échec éprouvé devant Caudebec. Les milices communales voulurent engager l'action malgré les capitaines français : Cette semaine, disaient ceux-ci, nous avons pris sur nos ennemis Barfleur, Lillebonne, Tancarville et autres places ; aujourd'hui il est Dimanche, il nous faut louer Dieu. — Vous êtes traîtres, répondirent les milices ; nous y voulons aller. Et un désastre s'ensuivit.
[18] Non obstant les villes de Dieppe, Harefleu, Monstrevillier et autres places nadgairs prinses par les ennemyes, et loure dite pursuite, ne leurs aidans et confortans, n'est pas noslre entencione, ne ne serra, de riens habandonner par dela la mere tant que Dieu nous donrra vie. Lettre de Henri VI au chancelier de Luxembourg et à son Conseil en France, en date du 28 janvier 1436, dans Stevenson, t. I, p. 424-429. — Cf. un curieux document (mal daté par M. Stevenson et qui se rapporte, suivant nous, au 21 janvier de l'année 1436 et non 1450) dans lequel le roi d'Angleterre fait un appel désespéré à certains grands seigneurs et prélats, t. I, p. 510-512. Voir aussi deux lettres en date du 16 janvier. Lettres de rois, etc., t. II, p. 435 et 437.
[19] Namly dispose hem to approche oure towne and castell of Chirborowc and other places in the Basse Normandie. Stevenson, t. I, p. 510.
[20] Sur le siège du Pont de Meulan, fait par les Anglais à partir du 24 octobre, voir Ms. fr. 26060, nos 2761 et 2789 ; Clairambault, 160, p. 4539, et 165, p. 5001 ; Montres, vol. 9, n° 1017 et 1033 ; vol. 10, n° 1067 ; Archives, K 64, n° 135.
[21] Voir Thomas Basin, t. I, p.
115-116.
[22] On n'a point la date de l'occupation de Pontoise, racontée tout au long par Jean Chartier, t. I, p. 218. Mais divers documents conservés dans le recueil des Quittances prouvent que l'événement eut lieu vers le 20 février. Voir lettres de Henri VI du 28 mai (Ms. fr. 26061, n° 2838) ; autres lettres du 9 mars (26060, n° 2170) ; Quittance de Richard Guetthrin du 5 mars 1437 (26062, n° 3117).
[23] Sur la reddition de Vincennes, voir lettres de Charles VII du 3 mars 1436. Archives, P 13631, cote 1168.
[24] Le P. Anselme, t. I, p. 235.
[25] A la date du 28 février. Félibien, Histoire de Paris, t. III, p. 558.
[26] Ms. fr. 2861, f. 213.
[27] Gruel, p. 379-382 ; Berry, p. 393-394 ; Chartier, t. I, p. 220-222 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 313-318. Cf. Vallet, t. II, p. 351-361, et Tuetey, les Écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 13.
[28] Gruel, p. 383 ; Monstrelet, t. V, p. 233 ; document dans Stevenson, t. II, p. LVIII-LXI ; Archives, K 64, n° 10 2 et 3 ; Ms. fr. 26061, n° 2836, 843 et 891.
[29] C'est le 7 mai 1436 que Gisors fut repris par les Anglais. Voir un document du 8 novembre 1438. Archives K 64, n° 2316.
[30] Le pays de Caux, privé de deux cent mille habitants par la guerre, la famine et les épidémies, était absolument dévasté et ruiné. De la Seine à la Somme et de l'Oise à la mer, la Normandie était comme un désert. Pendant plus de dix ans le pays resta sans culture et l'on ne voyait même plus trace de chemins. Thomas Basin, t. I, p. 117-118. Cf. les Cronicques de Normendie, p. 85, et Beaurepaire, États de Normandie, p. 59.
[31] Monstrelet, t. V, p. 243 et suivantes ; Berry, p. 394 ; Chronique d'Alençon, attribuée à Perceval de Cagny, dans Du Chesne, vol. 48, f. 100 v°.
[32] Il résulte d'un aveu de la baronnie de Roncheville, du 1er décembre 1522, qu'il avait existé un port sur le territoire de Pennedepie. Archives, R4 1102, n° 2539.
[33] Monstrelet, t. V, p. 263-65 et 271-72 ; Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 103 ; Les Cronicques de Normendie, p. 86-87 ; Archives, K 64, n° 106 et suivants ; Ms. fr. 26061, n° 2879, 2900, 2914, 2999, et 26062, n° 3030 et suivantes.
[34] La joie avait été générale dans le royaume. Voir la ballade chantée à Arras, dans la grant joyeuseté qui y fut faite ; le texte a été publié par M. J.-M. Richard dans la Revue des questions historiques, t. XVIII, p. 225 et suivantes.
[35] Voir Monstrelet, t. V, p. 269. Cf. lettre de rémission publiée par Tuetey, l. c., p. 16, note.
[36] Et en celuy temps n'estoit nouvelle du Roy nullement, ne que se il fust à Romme ou en Jherusalem. Et pour certain, oncques puis l'entrée de Paris, nulz des cappitaines françoys ne flst quelque bien dont on doye aucunement parler, se non rober et pillier par nuyt et par jour. Journal d'un bourgeois de Paris, p. 327.
[37] La Normandie, de plus en plus exploitée et maltraitée, votait, à son corps défendant, de lourdes impositions. Le 22 avril 1437, le conseil anglais à Rouen imposait d'office une somme de 16.500 livres destinée à rembourser au duc d'York et à d'autres seigneurs les avances par eux faites pour le siège de certaines forteresses. On voit par d'autres actes que les capitaines étaient obligés d'emprunter pour payer leurs gens de guerre. En Angleterre, le roi engageait les joyaux de la couronne et contractait de nombreux emprunts. Beaurepaire, l. c., p. 59-61 ; Stevenson, l. c., t. II, p. XXX et LXXI ; Bréquigny, vol. 82, f. 1 ; Proceedings and Ordinances, t. V, p. 13-14 et 313-14 ; Ms. fr. 25973, n° 2186.
[38] Voir Turner, History of England,
éd. t. III, p. 33-37 ; Stevenson, l. c., t. II, p. XXIX-XXX.
[39] Berry, p. 394 ; Chartier, t. I, p. 233 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 329 ; Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f° 103 v°-104.
[40] Beaurepaire, l. c., p. 61-62.
[41] Chartier, t. I, p. 235 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 332 ; Gruel, p. 387.
[42] Voir sur cette conspiration, la chronique ms. de Du Chesne, f. 104-104 v°, le Journal d'un bourgeois de Paris, p. 330-331, et quelques lignes de Monstrelet, t. V, p. 279-80. C'est par erreur que, dans une note de son Histoire de Charles VII (t. II, p. 400), M. Vallet place le fait en 1438.
[43] La dicte place de Montreau prinse, toute la compaignie du Roy fut moult en joye. Si furent Paris et toutes les autres bonnes villes de l'obeissance du Roy et tout son peuple. Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 106 v°.
[44]
Monstrelet, t. V, p. 281. Il y a dans le chroniqueur un double récit de cette
expédition ; cf. p. 297. On voit par des lettres du 26 janvier 1437 que les
Anglais étaient sur leurs gardes et toutes les nuits faisaient faire les escoutes par quatre Anglais, hors des portes de
Rouen. Stevenson, t. II, p.
286.
[45] Rymer, t. V, part. I, p. 42. Cf. Proceedings,
t. V, p. 17 ; Stevenson, t. II, p. LXVI.
[46] Floquet, capitaine de Tancarville, était venu à Montereau demander du secours au Roi, qui lui en avait promis ; mais il capitula un mois avant le moment fixé pour l'envoi de ce secours.
[47] Berry, p. 396-397 ; les Cronicques de Normendie, 86 ; Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 107 ; Beaurepaire, l. c., p. 64-65.
[48] C'est à tort que, d'accord avec M. Vallet. (t. II, p. 338), nous avons dit plus haut (voir notre t. II, chapitre I, in fine) que, au commencement de 1435, Le Crotoy fut pris sur les Anglais, en même temps que Rue, par Charles des Maretz. Le Crotoy était depuis le mois de mars 1424 aux mains de l'ennemi.
[49] Voir les montres en date des 26, 29 et 30 novembre : Montres, vol. 11, n° 1273 à 1277 ; vol. 12, n° 131 ; cf. Clairambault, 170, p. 5475, et 171, p. 5477.
[50] Monstrelet, t. V, p. 308-316 ;
Berry, p. 399-400.
[51] Monstrelet, t. V, p. 311-312. Il s'excusa devers ledit duc de lui armer, disant qu'il avoit encore à renvoyer le sairement qu'il avoit fait aux Anglois, et que bonnement ne se povoit armer contre eulx. — Voir le pompeux éloge fait de ce personnage par le trop complaisant Georges Chastellain (t. II, p. 172-173).
[52] Monstrelet, t. V, p. 319-320 et 339 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 341 et suivantes.
[53] Tout le tournoiement du royaulme de France estoit plain de places et de forteresses, vivans de rapines et proie. Olivier de la Marche, édition publiée par MM. Beaune et d'Arbaumont pour la Société de l'histoire de France, t. I, p. 243.
[54] Et la cause pour quoy ilz avoient ce nom, si estoit pour tant que toutes gens qui estoient rencontrés d'eulx, tant de leur parti comme d'aultre, estoient desvestus de leurs habillemens tout au net jùsques à la chemise. Et pour ce, quand ycenlx retournoient ainsy nuds et devestus eh leurs lieux, on leur disoit qu'ils avoient esté en les mains des Escorcheurs, en aulx gabant de leur male adventure. Monstrelet, t. V, p. 317-18.
[55] Canat, l. c., p. 376.
[56] Histoire de Bourgogne, t. IV, p. 230.
[57] Monstrelet, t. V, p. 290.
[58] Berry, p. 395.
[59] Canat, l. c., p. 272 et suivantes ; 376 et suivantes.
[60] Lettres de Charles VII du 30 décembre 1437.
[61] Monstrelet, t. V, p. 316-319.
[62] Voir Olivier de la Marche, t. I, p. 242-244.
[63] Voir Jean Chartier, t. I, p. 241, et Olivier de la Marche, t. I, p. 242-244.
[64] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 168. Cf. Berry, p. 400, et Chartier, t. I, p. 235. Le bâtard d'Orléans et Saintrailles s'étaient abouchés avec François de Surienne, le fameux capitaine connu sous le nom de l'Aragonais, et celui-ci envoya, au mois de janvier, son neveu à Tours, vers le Roi, pour parfaire le traictié. Moyennant 12.000 réaux d'or, François de Surienne se faisait français et livrait Montargis. Il est bon de noter que Surienne resta capitaine de Saint-Germain-en-Laye pour les Anglais. Nous le voyons recevoir en cette qualité, par lettres du 9 mars 1438, le paiement des gages de ses gens de guerre.
[65] Chartier, t. I, p. 235 ; Berry, p.
400.
[66] Voir Clairambault, 185, p. 6835 ; Montres, vol. 11, n° 1293 et suivants ; Quittances (Fr. 26065), n° 3609. Dreux fut occupé dans la nuit de la Toussaint.
[67] Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, f. 108 et v°.
[68] Voir Rymer, t. V, part. I, p. 54.
[69] Lettres de Charles VII du 30 mars 1438, visées dans des quittances du 30 mai. Clairambault, 188, p. 7149, et Pièces originales, 2305 : PLOESQUELLEC.
[70] Autres lettres du même jour. Ms. fr. 20582, f. 29.
[71] Rodrigue de Villandrando, par M. Quicherat, p. 151. — Saintrailles partit de Tours le 4 mai (D. Vaissète, t. IV, p. 489). — Gaucourt fut aussi chargé d'une mission en Languedoc près des capitaines. Voir Clairambault, 52, p. 3911, et Fontanieu, 117-118, à la date du 10 avril.
[72] Lettres de Charles VII du 15 mai 1438. Doat, 217, f. 48.
[73] M. Quicherat, l. c., p. 150 ; Chronique de Miguel del Vorms, dans le Panthéon littéraire, p. 506.
[74] Monstrelet, t. V, p. 555 ; Fragments d'une enquête pour la béatification de Pierre Berland, dans les Archives historiques du département de la Gironde, t. III, p. 447 ; Quicherat, l. c., p. 151 et suivantes.
[75] Voir Quicherat, p. 158-160. — Aucun historien n'a parlé de cette campagne de Guyenne, et la plupart glissent sur l'année 1438 comme sur une année dénuée d'aucun événement saillant. M. Vallet lui-même passe sous silence les faits que nous venons d'enregistrer.
[76] Somerset avait été fait prisonnier à Baugé en 1421. La duchesse de Bourbon qui, depuis la bataille d'Azincourt, voyait languir en captivité son mari le duc de Bourbon et son fils le comte d'Eu (elle avait épousé en secondes noces Philippe d'Artois comte d'Eu, et s'était remariée en troisièmes noces avec le duc de Bourbon en 1400), acheta Somerset, dans l'espoir d'arriver à un échange. La duchesse eut la douleur de voir mourir son mari prisonnier et mourut elle-même avant la délivrance de son fils, — Le comte d'Eu débarqua en France vers le mois de juillet.
[77] Voici le titre que prenait le comte : Lieutenant et capitaine general pour monseigneur le Roy ès païs de Caulx et Beauvoisis et ès mectes d'entre les rivieres de Oyse et de Somme et jusques à la mer. Lettres orig. signées, aux Archives du Nord, B 1518.
[78] Berry, à la date de 1438, nous apprend (p. 401) que le siège de Harfleur, que les Anglois tenoient par mer, fut levé par le mareschal de Rieux.
[79] Monstrelet, t. V, p. 346. Voir Montres, vol. 11, n° 1330 et suivants ; vol. 12, n° 1375 et 1412 ; Clairambault, 160, p. 4543 et 4571.
[80] Lettres de Charles VII des 30 janvier, 3 et 13 février 1438. Archives, KK 284, f. 1, 16 et 16 v°.
[81] Berry, p. 400.
[82] Monstrelet, t. V, p. 340-341.
[83] Monstrelet, t. V, p. 342 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 312-313 ; Chartier, t. I, p. 246. — Voir sur le ravitaillement des garnisons, Archives, K 64, n° 24 bis ; Bibl. nationale, Montres, 11, n° 1339, 1322, 1323, 1339, 1341, 1344 ; 12, n° 1359 et suivants ; Clairambault, 183, p. 6692 et 94 ; 185, p. 6871 ; D. Villevieille, Titres originaux, 25, n° 67 et 68, etc.
[84] Ce traité fut passé à Harcourt le 20 décembre 1438. Voir le texte dans Léonard, Recueil des Traitez, t. I, p. 457, et Du Mont, Corps diplomatique, t. III, part. II, p.60.
[85] Chartier, l. c.
[86] Berry, p. 401.
[87] Parmi eux se trouvaient Floquet, Blanchefort, Antoine de Chabannes, etc. Les capitaines au service de René étaient La Hire, les deux Brusac, les deux Lestrac, Boniface de Valpergue. Tuetey, Les écorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 66 et suivantes.
[88] Berry, p. 401 ; Monstrelet, t. V, p. 336-338, 349-350 ; Chronique du doyen de Saint-Thibaut, dans D. Calmet, t. V, Preuves, col. LXXXVII ; Chronique de J. de Stavelot, p. 431-432. Voir surtout l'érudit ouvrage de M. Tuetey, où l'expédition d'Alsace est racontée tout au long (t. I, p. 99-120), d'après les sources allemandes inédites tirées des Archives de Bâle et de Strasbourg.
[89] Canat, l. c., p. 279-287, 293-96, 379-388, et dans sa brochure : Les écorcheurs dans le Lyonnais (Lyon, 1861, in-8° de 31 p.), p. 6 et suivantes.
[90] Édition de MM. Beaune et d'Arbaumont, t. I, p. 245.
[91] Ce fait est rapporté dans une enquête citée par M. Canat : Les écorcheurs dans le Lyonnais, p. 13. Voici un extrait de la déposition de Guillaume de Damas : Un jour il veit prandre deux fentes et ung petit enfant de vr ou vit ans, les mettre en une maison et lier les dictes femes à une colonne, et ledit enfant mettre sur un faix de paille, au mylieu de la dite maison, et bouté le feu ez IIII cornaulx de ladite maison ; toutefois lesdictes deux femes, à l'ayde de luy qui parle et de ses gens, se saulvèrent, et ledit enfant fut brûlé ; dit oultre qu'il leur a vu amener des subgez de mon dit seigneur tous liés à deux chenestes, autour lesquels deux ribeaux les tiroient et segoilloient l'ung de çà l'autre de là, et à la fin les pendoient qu'ils ne les ransonnoient VII saluts ; et, par son âme, come par pitié, il en a ransonné d'estrangiers qu'il ne cognoissoient, l'ung des deux l'autre, l'ung plus, l'autre moins, de la valeur de cent escus et plus.
[92] Canat, Documents inédits, etc., p. 388-89 ; Les écorcheurs dans le Lyonnais, p. 14.
[93] Voir D. Vaissète, t. IV, p. 489-490.
[94] Monstrelet, t. V, p. 387-90 ; Berry, p. 402-403 ; Chartier, t. I, p. 249 ; Gruel, p. 387. Les Anglais apprirent à Calais, par Jean de Luxembourg, l'échec considérable qu'ils venaient de subir. Proceedings and Ordinances, t. V, p. 384.
[95] Saint-Germain fut pris, grâce à la trahison d'un religieux de Sainte-Geneviève, au mois de janvier (Journal d'un bourgeois de Paris, p. 344 ; Monstrelet, t. V, p. 351) ; Gerberoy fut pris d'emblée vers la même époque (Monstrelet, t. V, p.351) ; mur Lillebonne, voir lettres de Henri VI du 19 mars 1439, dans Beaurepaire, Les états de Normandie, p. 69.
[96] La date est fixée par des lettres du Dauphin : il était le 29 juillet à Lavaur quand il apprit le débarquement de Huntingdon. D. Vaissète, t. IV, p. 492.
[97] D. Vaissète, t. IV, p. 492-493, et Preuves, col. 450 et suivantes. ; Stevenson, t. II, p. 439 ; Lettres du Dauphin des 5, 6, 13, 16 octobre ; Lettres du Roi des 9 octobre (relatives au siège de Thenon), 12, 13 octobre (sept lettres) ; Hist. généalogique du P. Anselme, t. III, p. 423.
[98] Chartier, t. I, p. 250-252 ; Berry,
p. 405 ; Gruel, p. 389-390.
[99] A grant deshonneur, dit le Journal d'un bourgeois de Paris (p. 351). Le siège d'Avranches fut levé le 23 décembre. Ms. fr. 26066, n° 3920.
[100] Gaucourt fut fait prisonnier vers le 10 octobre. Ms. fr. 26061, n° 4142.
[101]
Monstrelet, t. V, p. 419-424 ; Chartier, t. I, p. 239-240 ; Berry, p. 412 ;
Thomas Basin, t. I, p. 133 ; Gruel, p. 390 ; Les Cronicques de Normendie,
p. 86-88. Voici comment un
Anglais appréciait cet événement dans une lettre intime : Also Freynchmen and Pykardes, a gret nowmbre, kome to
Arfleet for to arescuyd it ; and our Lords wyth there small pusaunce manly
bytte them, ad pytte them to flyte, and, blyssyd be our Lord, have cake the
seide cite of Arflet ; the qwych is a great juell to all Englond and in
especiall to our cuntre. The Paston Letters, ed. by James
Gairdner, London, 1872, t. I, p. 40.
[102] Vers le mois d'octobre, par Saintrailles, qui avait pour lieutenants Salazar et Antoine de Chabannes. La ville était désemparée : ils la remparerent et fortifierent au mieulx qu'ilz peurent. D Chartier, t. II, p. 7 ; Berry, p. 412.
[103] Par Pierre de Brezé, secondé par Floquet et Jean de Brezé. Chartier et Berry, l. c.
[104] Th. Basin, t. I, p. 133-135. Cf. lettres de Henri VI du 10 décembre. Archives, K 66, n° 159.
[105] Le comte de Warwick était mort le 30 avril 1439. Le duc eut soin de faire ses conditions et de bien mettre sa responsabilité à couvert. Voir le texte des demandes présentées par lui au gouvernement anglais, dans Stevenson, t. II, p. [585-591].
[106] La première réunion eut lieu le 30 novembre. Voir les lettres du 10 décembre, et Beaurepaire, l. c., p. 73.
[107] Journal d'un bourgeois de Paris, p. 355 et 358-359 ; cf. Chartier, t. II, p. 14-15.
[108] Voir Gruel, p. 391.
[109] Voir sur ce voyage de Champagne, si fécond en importants résultats, Berry, p. 412-413 ; Chartier, t. II, p. 12-13 ; Monstrelet, t. V, p. 457-470 ; t. VI, p. 1-3.
[110] Creil fut pris d'assaut le 24 mai et les Anglais évacuèrent la place le 24 juin. Berry, p. 413 ; Chartier, t. I, p. 15-17 ; Monstrelet, t. IV, p. 6 ; Gruel, p. 391 ; Journal d'un bourgeois de Paris, p. 359-360.
[111] Avril-mai. Voir Chartier, t. II, p. 17 ; cf. Beaurepaire, l. c., p. 76. Vers le même temps Damazan, sur la frontière de la Guyenne, tombait au pouvoir des Français (lettres de Charles VII du 4 avril).
[112] Voir sur cet événement, que nous raconterons plus loin tout au long, Berry, p. 413-417 ; Chartier, t. II, p. 20-27 ; Monstrelet, t. VI, p. 6-24 ; Thomas Basin, t. I, p. 139-147 ; Gruel, p. 391-393.
[113] Vous escrivons de rechyef en extreme necessité, et signifions notre maladie prouchaine de mort ou exil, et, au regard de votre seigneurie, très près de totale perdicion. Stevenson, t. II, p. [604].
[114] Pétition de François de Surienne, dit l'Aragonais, en date du 26 mai 1441. Proceedings, etc., t. V, p. 147-50.
[115] Se ne fust la vertu et la grace de nostre prince, je guide que noz besongnes se portassent bien estroit ysi ; car, par mon serement, injustice et autres pechiez sont yllec à grant habonance. J'ay eu grant pitié à prendre congié de Mgr le lieutenant (York) le jour de son partement de Rouan, et je lui adverti de l'injustice qui revoit en l'obeissance du Rey, et des vices et pechez qui esloient parmy le peuple de nostre nation. Lettre de Carter, roi d'armes, au chancelier d'Angleterre, Caen, 21 juillet 1441 (et non 1447). Ms. fr. 4054, f. 43 ; cf. Stevenson, t. I, p. 192-93.
[116] On voit dans les articles rédigés par ordre du duc d'York, en date du 29 septembre 1440, qu'il devait y avoir en France un conseil anglais composé de John Fastolf, sir Williarn Oldhalle et sir William ap Thomas, and others of hys discrete councelle. Le duc demandait en outre qu'on envoyât en Normandie les évêques de Lincoln, de Norwich, de Salisbury, le vicomte de Beaumont, lord Hungerford, lord Fanhop, sir Raoul Bouteller, sir John Stourtom et sir John Popham (Stevenson, t. II, p. [585-586]). Le 11 mai, sir Lewys John fut désigné pour faire partie du Conseil en Normandie, avec une mission spéciale (Proceedings, t. V, p. 142-43).
[117] Louis de Luxembourg, évêque de Thérouanne, chancelier de France, parait n'avoir plus eu, à partir de ce moment, qu'une charge honorifique ; nommé archevêque de Rouen en 1436 (24 octobre) et cardinal en 1441, il devait aller mourir (1442) en Angleterre, à Ely, dont il avait le titre épiscopal.
[118] Parmi les sauf-conduits délivrés le 23 mai par la chancellerie anglaise, on remarque ceux qui furent donnés à Charles, duc de Bourbon, à Bernard (sic) d'Armagnac, vicomte de Lomagne, à Jean, duc d'Alençon, à Georges, seigneur de la Trémoille, à Jean Jouvenel, évêque de Beauvais, à Guillaume de Champeaux, évêque de Laon, et à trois serviteurs du duc d'Orléans (Rymer, t. V, part. I, p. 108) ; le 19 juin, nouveaux sauf-conduits à des serviteurs du duc d'Alençon (Bréquigny, vol. 82, fol. 127, 131 v° et suivants) ; le 28, sauf-conduit donné aux ambassadeurs du comte d'Armagnac (id., ibid., f. 135) ; le 5 septembre, sauf-conduit pour la suite du duc de Bretagne (D. Moreic, t. II, col. 1349).
[119] Berry, p. 420 ; Monstrelet, t. VI, p. 53 ; Gruel, p. 393 ; Journal de Bekynton, publié par sir Harris Nicolas (1842) et plus correctement à la suite de l'Official Correspondance of Thomas Bekynton (1872). Cf. Ribadieu, Histoire de la conquête de la Guyenne, p. 131 et suivantes.
[120] Berry, p. 421-22 ; Monstrelet, t. VI, p. 55-57 ; Gruel, p. 395 ; Journal de Bekynton, passim.
[121] Lettres des 6 et 11 février et 5 juin 1442.
[122] Voir la Réponse aux remontrances des princes, dans Monstrelet, t. VI, p. 34.
[123] Ms. fr. 26070, n° 4965.
[124] Berry, p. 419 ; Monstrelet,
t. VI, p. 59.
[125] Berry, p. 419 ; Monstrelet, t. VI, p. 57-59.
[126] Voir la quittance du 30 octobre 1442, signée par François de Surienne, dit l'Aragonnais, Mathew Gough, Thomas Gerard et T. Stones, dans Stevenson, t. II, p. 331, et une autre quittance du 18 mars 1445, p. 360. Gallardon, à ce que nous apprend Berry (p. 419), fut désemparé.
[127] Berry, p. 422.
[128] Chartier, t. II, p. 36 ; Monstrelet, t. VI, p. 60.
[129] Dunois vint avec mille combattants le 29 novembre ; en mars le roi envoya Tugdual de Kermoysan, chargé de prendre le commandement de tous les gens de guerre employés à la défense de la ville ; des navires bretons vinrent, par ordre du roi, apporter des vivres aux assiégés (Chartier, p. 37 et suivantes ; Monstrelet, p. 60-61). Après avoir obtenu l'agrément du duc de Bourgogne, le Roi avait sollicité des villes de Picardie une aide pour la défense de Dieppe (Instructions du duc de Bourgogne au doyen de Vergy et lettres du 24 janvier 1443 aux habitants d'Amiens) ; il fit charger dans le port de la Rochelle des navires pour le ravitaillement de la ville (lettres du 6 juillet 1443 et du 26 février 1444).
[130] Des troupes conduites au secours de Dieppe par quelques capitaines (célèbres d'ailleurs dans les fastes de l'escorcherie), furent attaquées au passage par le comte d'Étampes et destroussées. Malgré les justes griefs que le comte pouvait avoir contre les écorcheurs, la chose était un peu forte. Le Roi en fut très mécontent, et fit écrire au duc de Bourgogne par le Dauphin pour s'en plaindre.
[131] Chartier, t. II, p. 39 et suivantes ; Monstrelet, t. VI, p. 77 et s. ; Berry, p. 423-24 ; Th. Basin, t. I, p. 152-154.
[132] Le 2 février il y eut une convocation faite à Dijon, au 8 février, pour affaires secrètes. Le 18 les états de Bourgogne votèrent une aide de 10.000 livres. Canat, Notes et documents, t. I, p. 427-428.
[133] Canat, Notes et documents, l. c., p. 427 et suivantes, et Les écorcheurs dans le Lyonnais, p. 18-20.
[134] Mêmes sources, et Debombourg, Histoire communale de la Dombe et du Franc-Lyonnais, t. I, p. 128 et suivantes.
[135] Lettre du 6 avril au duc de Bourbon, indiquée dans Canat, p. 432.
[136] Mondit seigneur de Bourgoingne a entendu que le mareschal de Jaloingne, Antoine de Chabannes, Floquet, et autres routes (routiers) et compaignons eulx disans du Roy sont en voulenté et propos de briefment venir en ses pays de Bourgoingne pour y vivre, et les grever et dommager. Instructions au doyen de Vergy. Collection de Bourgogne, 99, p. 928.
[137] Debombourg, Histoire communale de la Dombe et du Franc-Lyonnais, t. I, p. 128. Il y avait encore à Vimy des commissaires du Roi, qui en turent chassés par les troupes de Savoie et de Bourgogne.
[138] Canat, Notes et documents, p. 434, 436, 438.
[139] Le 23 août, on publiait à Lyon des lettres du Roi rappelant toutes les troupes : ceulx que n'y vouldroient aler, il les abandonnoit à tout homme pour les ruer jus et destrousser et les punir comme traitres et rebelles... Reg. secret de Macon, cité par M. Canat, l. c., p. 439.
[140]
Un document anglais nous montre combien le Conseil privé redoutait alors un
retour offensif de Charles VII en Guyenne. On supposait que le Roi voulait
assiéger à la fois Saint Macaire, Rions et le château d'Auros en Bazadois ; on
craignait pour Bordeaux, Bayonne et Dax (Instructions issued to John
viscount Beaumont, etc.) On
lit dans des instructions données le 5 avril au roi d'armes Carter, envoyé au
duc d'York : He hath dayly tidyngs oute of his said
duchie that his said adversarie is disposed not to departe thens unto the tyme
that he have subdued it and have gete his good citees of Bordeaux and of
Baionne. Les actes du Conseil privé portent aussi la trace des
préoccupations des Anglais : le 7 mars on craignait que le siège ne fût mis à
Avranches. Dans l'instruction du
5 avril, on lit que le Roi is disposed this present
season to corne downe into Normandie and there, with all the puissance that he
can and may, to subdue it. Une rumeur était revenue de Bale au
Conseil : on prétait à Charles VII le dessein de s'emparer de Rouen, par
trahison ou autrement. Proceedings
and ordinances, t.
V, p. 240, 259, 260, 261-62, 415.
[141] The kyng may not confourme him to that that he wolde, but to that that he may. Proceedings and ordinances, t. V, p. 223.
[142] On emprunta de divers côtés ; on engagea les joyaux de la couronne ; le cardinal Beaufort prêta dix mille livres sterling. Proceedings and ordinances, t. V, p. 239, 258-59, 272-73, 276, 279, 288-89.
[143]
Les actes du Conseil privé, très complets pour la première moitié de 1443, font
défaut à partir de juillet ; mais on voit que l'armée n'était point partie le
13 juillet (Proceedings, p. 307 ; cf. p. 409-414, instructions à Yerde
et Eltonhede). Les actes du Conseil privé nous montrent les embarras suscités
par les exigences de Somerset, par les susceptibilités du duc d'York, jaloux de
son autorité de lieutenant général. C'étaient chaque jour de nouvelles
difficultés pour arriver à une solution. L'impéritie du gouvernement se montre partout.
[144] The kyng hath wilholden his cousin the duc of Somerset, the which with a greet and mighti armee shal passe the see by a part of Normandie and so passe over the water of Leyre roto the grounde occupied by the ennemyes, and there use most cruel and mortel werre that he can and may. Instructions à Carter, l. c., p. 260.
[145] En avril partirent deux vaisseaux (Katharine et George) envoyés pour ravitailler les villes de Guyenne : un écuyer du nom de Bidan et Thomas West étaient chargés de cette mission (Proceedings, p. 248-49, 259, 265). En juillet Louis Despois, qui était venu de Guyenne avec John Gassias et le clerc de Bayonne (Town clerc) retournèrent avec un corps de troupes qui n'était pas considérable (id., p. 292, 295-96, 310). Que devinrent les huit cents hommes de sir William Bonville dont parle la Chronicle of London (p. 132) ? Il n'en est pas question dans les actes du Conseil privé. — Peut-être en advint-il comme des 4.000 hommes et des trente-cinq vaisseaux dont un Breton arrivant de Plymouth parlait aux ambassadeurs anglais à leur retour de Guyenne, le 5 février 1443 (Journal of Bekynton, p. 89, et Official Correspondence publiée par M. Williams, t. II, p. 279), et qui semblent n'avoir existé que dans l'imagination du Breton. Bonville ne parait pas avoir été envoyé en Guyenne (voir Proceedings, p. 239).
[146] C'est le chiffre officiel constaté dans les actes du Conseil privé (Instructions à John Yerde et à Eltonhede, p. 409). On lui donne 10.000 hommes dans la Chronicle of London (p. 132) ; 8.000 dans Monstrelet, 6.000 dans Berry. Thomas Basin renchérit en disant 10.000 chevaux (p. 150).
[147] Homo animo ultra modum elatus et præsumptuosus. Th. Basin, p. 149.
[148] C'est le titre donné à Somerset. Voir Carte, Rôles Français, III, p. 309, et Proceedings, t. V, p. 251, 255, 261, 288-90. On avait décidé que les lettres de commission pour la France seraient passées sous le sceau de France, et que la Guyenne n'y serait pas mentionnée, et que les lettres de commission pour la Guyenne seraient passées sous le sceau d'Angleterre et que la Guyenne y serait mentionnée avant la France.
[149] Au mois d'août 1443, des ambassadeurs bretons étaient en Angleterre, sollicitant la reconnaissance des droits du duc au comté de Richemont et offrant de se porter médiateurs pour la paix (Proceedings, t. VI, p. 1-7). Un peu plus tard, une nouvelle ambassade vint porter plainte relativement à la prise, au pillage et à la destruction de La Guerche (p. 11-13).
[150] Berry, p. 424 ; Monstrelet, t. VI, p. 66-67. — On sait fort peu de chose sur cette campagne de Somerset. Les 14 et 17 décembre, le bailli de Caen faisait payer des courriers envoyés pour publier l'ordre du duc à tous les gens de guerre ne faisant point partie des garnisons de venir le joindre au siège de Beaumont (Fontanieu, 119-120 ; Stevenson, t. II, p. 347).
[151] Berry, p. 454-25 ; Monstrelet, t. VI, p. 25 ; D. Vaissète, t. V, p. 4-5.