HISTOIRE DE CHARLES VII

LIVRE I. — LE COMTE DE PONTHIEU, LE DAUPHIN ET LE RÉGENT - 1403-1422

 

CHAPITRE VII. — LE DAUPHIN DE BAUGÉ À SON AVÈNEMENT.

 

 

22 MARS 1421-21 OCTOBRE 1422

Le Dauphin se porte au devant de l'armée d'Écosse ; grand conseil tenu à Selles. — Charles apprend, par une lettre des comtes de Douglas et de Buchan, la victoire de Bauge ; il se rend aussitôt à Tours. — Effets de cette victoire : le duc de Bretagne revient à l'alliance française ; traité de Sablé. — Campagne du Dauphin : prise de Montmirail et de Gallardon ; lettre adressée aux habitants de Tours ; brusque interruption de ta campagne. — Lettre aux habitants de Lyon. — Le Dauphin à Bourges ; voyage de Limoges. — Célébration du mariage du Dauphin. — Le bâtard d'Orléans épouse la fille du président Louvet ; influence croissante de ce personnage ; les sceaux sont enlevés à Robert le Maçon et donnés à Martin Gouge. Correspondance du Dauphin avec les habitants de Lyon et avec le maréchal de Séverac. Voyage de La Rochelle, où Charles échappe miraculeusement à la mort. — Il apprend en revenant à Mehun la mort do son père. — Appréciation du caractère du Dauphin.

 

Le 8 janvier 1421, Charles quitta Mehun[1] pour se porter au devant du comte de Buchan et de John Stuart de Derneley, qui amenaient un contingent important de troupes écossaises. II était le 17 à Selles, où fut tenu le 25 un grand conseil pour aviser aux mesures à prendre. Un nouvel incident venait de se produire à Paris : un lit de justice avait été tenu le 23 décembre, à l'hôtel Saint-Paul, par Charles VI, en présence du roi d'Angleterre, assis à ses côtés sur le même banc, et du duc de Bourgogne, qui avait près de lui les ducs de Clarence et de Bedford ; le procureur général Nicolas Rolin, au nom de la duchesse de Bourgogne, veuve de Jean sans Peur, et de ses filles, avait exposé le félon homicide commis contre la personne de Jean, duc de Bourgogne, par Charles, soy disant Dauphin de Vienne, et ses complices, et requis qu'ils fussent mis en tombereaulx et menez par tous les quarrefours de Paris, nues testes, par trois jours de samedi ou de festes, chascun un cierge ardant en sa main, en disant à haulte voix qu'ils avoient occis mauvaisement, faulsement, dampnablement et par envie le duc de Bourgongne, sans quelconque cause raisonnable[2]. Après Nicolas Rolin, on avait entendu l'avocat du Roi, Pierre de Marigny, puis un docteur en théologie, Jean Larcher, parlant au nom de l'Université. Les bourgeois de Paris et les gens des trois estats de plusieurs villes et pays du royaume avaient aussi été appelés à donner leur avis[3]. Le même jour, des lettres patentes du Roi déclaraient les auteurs du meurtre criminels de lèse-majesté, inhabiles et indignes de toute succession directe et collatérale, et de tous honneurs, dignités et prérogatives[4]. Enfin, le 3 janvier 1421, à la requête du procureur général, Charles fut ajourné, à son de trompe, à comparaître avant le 6 à la Table de Marbre, et, dans les délais voulus, une sentence fut rendue, au nom du Conseil royal et du Parlement, le déclarant banni du royaume et déshérité de la couronne[5].

Duquel arrêt, lisons-nous dans un document du temps, ledit de Valois appela, tant pour soy que pour ses adherants, à la pointe de son espée, et fit vœu de poursuivre sa dicte appellation tant en France qu'en Angleterre et par tous les pays du duc de Bourgongne[6]. Comme le dit Georges Chastellain dans son pittoresque langage, s'il ne se fust trouvé puissant pour resister aux deux puissances contraires, il y faisoit mal sain pour luy[7]. Mais grâce à Dieu, malgré les difficultés chaque jour croissantes de la lutte, la partie était loin d'être perdue. Dans le conseil tenu à Selles le 25 janvier, et où figuraient, avec des princes du sang, plusieurs prelas, barons, chevaliers et autres personnes notables de divers estas, on avisa d'une part aux moyens de resister à l'oultrageuse entreprinse de l'adversaire d'Angleterre qui, disait le Dauphin dans une lettre aux habitants de Lyon, tient à present en sa main et subjection la personne de Monseigneur, dont nous avons si Brant et amère deplaisance de tuer que plus ne povons avoir ; de l'autre aux mesures à prendre pour entendre à la delivrance du Roi et le remettre en sa franchise, puissance et auctorité roial, comme ll appartient, et aussi au recouvrement de la seigneurie[8]. Il fut décidé qu'une assemblée des États généraux aurait lieu à Clermont le ter mai, et que d'ici là on poursuivrait la guerre avec vigueur.

Le 27 janvier, le Dauphin ordonnançait une dépense de 4.000 livres, pour tourner et convertir en la despense extraordinaire de son hostel, nécessitée par la venue et assemblée de plusieurs chevaliers, escuiers et autres gens du Conseil, qui s'étaient rendus à son mandement en la ville de Selles en Berry[9]. Grande était l'affluence à la cour du Dauphin. Tout à coup on apprit, par une lettre du seigneur de Chaumont-Quitry et du vicomte de Narbonne, écrite à Villeneuve-le-Roi, le 29 janvier, à une heure du matin, qu'ils venaient de remporter, sans coup férir, un succès important sur les Bourguignons[10]. La fortune, qui jusqu'alors s'était montrée si, peu favorable au Dauphin, allait-elle enfin lui sourire ? A ce moment, nous le voyons envoyer en pèlerinage au Mont-Saint-Michel[11], comme s'il eût voulu mettre la campagne qu'il allait entreprendre sous la protection de ce grand saint.

Le Dauphin, continuant sa marche vers l'ouest, partit de Selles le 10 février, et arriva le 27 à Poitiers. Il y reçut les chefs de l'armée d'Écosse, et y célébra les fêtes de Pâques. Le jeudi saint (20 mars), suivant la pieuse coutume de ses ancêtres, il accomplit la cérémonie du lavement des pieds[12]. Le même jour, il écrivait aux habitants de Tours pour leur enjoindre de donner tout aide et faveur à ses gens estans et alans entre les rivières du Loir et de Loire, en esperance de illec combattre ses ennemis, et leur annonçait son intention d'estre briefment, au plaisir Notre-Seigneur, à toute puissance, par delà, pour donner confort à eux et à ses autres bons et loyaux sujets, et grever ses ennemis[13]. Il se disposait à marcher en avant quand, le lundi de Pâques (24 mars), au matin, un gentilhomme de Sologne, Louis Boyau, lui apporta la nouvelle d'un éclatant succès remporté le 22 mars sur les Anglais.

Voici la lettre par laquelle les comtes de Douglas et de Buchan annonçaient cet heureux événement :

Très hault et puissant prince et nostre très redouté seigneur, nous . nous recommandons à vous tant humblement comme nous povons, et vous plaise savoir que le vendredi derié (sic) arrivasmes en ceste ville de Baugé, ayans entencion de donner bataille aux Angloiz vos anciens ennemis et les nostres au champ de la Lande Charles, et au jour d'uy avons envoyé nostre amé cousin le connestable de nostre ost et vos (sic) mareschal, le sire de la Fayette, pour adviser ledit champ, avecques plusieurs autres seigneurs, où avions entencion de combattre lesdiz ennemis lundi prouchain, pour ce que le jour de Pasques estoit trop grande l'este. Mais, très hault et puissant prince et nostre très redoubté seigneur, an jour d'uy sont venus devant ceste ville vos diz ennemis et les nostres, en bataille rangée, une heure devant soleil couchant ; et tantost que nous avons sceu leur venue, sommes alez appertement sur eulx, et là, mercy Dieu, le champ est demouré pour vous ; et est tué le duc de Clarence et le conte de Quint ; le conte de Hantiton est mon prisonnier, et le conte de Sumbrecit est aussi pris ; et finablement toute la fleur de vos diz ennemis et les nostres sont que tuez que pris.

Et pour ce, très hault et puissant prince et nostre très redoubté seigneur, nous vous prions très ardemment, pour l'onnepr de vostre royaume de France, qu'il vous plaise de venir icy, en ce pays d'Anjou, pour aler incontinent en Normandie, car, à l'aide de Dieu, tout est vostre.

Item, très hault et puissant prince et nostre très redoubté seigneur, nous vous envoyons la bannière du dit duc de Clarence, et est celui qui la portoit mon prisonnier, car il a esté pris par le gentilhomme de mon hostel appelé Thomas Walen.

Item, très hault et puissant prince et nostre très redoubté seigneur, plaise vous savoir que vostre amé messire Charles le Bouteiller est mort à ceste journée, dont Dieu aie lame 1 lequel en son vivant estoit senéschal de Berry ; et pour ce, très hault et puissant prince et nostre très redoubté seigneur, nous vous prions de tous nos cuers qu'il vous plaise, de vostre grace et à nostre requeste, de donner le dit office, comme ledit chevalier l'eust en son vivant, à vostre serviteur et nostre cousin Thomas Serton, lequel a grandement fait son devoir à ceste fois.

Autre chose ne vous savons dire de present, fors qu'il vous plaise de nous mander vostre entencion avecques ce mesme poursuyvant.

Très hault et puissant prince et nostre très redoubté seigneur, le Saint Esperit vous ait en sa sainte garde comme nous le desirons.

Escript en ceste dicte ville de Baugé, la veille de Pasques, à mye nuit.

Vos très humbles serviteurs, les contes DE DOUGLAS et DE [BOUCAN][14].

A la nouvelle de cette victoire, la première pensée du Dauphin fut une pensée d'actions de grâces. Il se rendit à pied à la cathédrale, en grande joie et diligence, et y fit célébrer une belle et notable messe chantée, à l'issue de laquelle Pierre de Versailles prononça un sermon ; après avoir remercié Dieu, Charles, fort joyeulx de la signalée victoire qu'il lui avoit donnée, retourna au château pour prendre sa refexion, et faire ses préparatifs de départ[15]. Répondant à rappel de ses généraux, il partit le jour même, avec l'intention de marcher sur la Normandie[16]. Le 30, il fit son entrée solennelle à Tours, où il prêta serment comme chanoine de l'église de Marmoutiers[17].

Charles séjourna dans cette ville pendant dix jours, et y tint cour plénière. Il était entouré du duc d'Alençon, qui avait fait ses premières armes à Baugé, du sire d'Amboise, de Tanguy du Chastel, du président de Provence, du sire de Tucé, des archevêques de Bourges, de Reims et de Sens, etc. Les comtes de Buchan et de Douglas, et les autres capitaines écossais, vinrent l'y joindre. Le jeune prince les reçut à sa table, avec les seigneurs anglais qu'ils avaient fait prisonniers. On n'avait pas vu d'un œil favorable l'arrivée en France des Écossais, et jusque-là, loin de rendre les services qu'on attendait d'eux, ils avaient donné lieu à plus d'une plainte[18]. On les appelait à la Cour sacs à vin et mangeurs de moutons. Charles, interpellant ceux qui s'étaient faits les détracteurs des Écossais, leur dit : Eh bien ! que vous semble de ces mangeurs de moutons et sacs à vin ? et il les réduisit au silence[19]. Plusieurs conseils furent tenus à Tours. Dans une solennelle assemblée, le Dauphin remit (5 avril) au comte de Buchan l'épée de connétable[20]. Les seigneurs qui s'étaient distingués à Baugé reçurent des présents et des terres[21]. John Stuart de Derneley fut honoré d'une manière toute spéciale : il reçut... un astrologue ! C'était alors l'usage, pour les plus hauts princes, d'avoir un astrologue attaché à leur personne ; aussi le seigneur écossais regarda-t-il comme un grand honneur le don qui lui était fait : maitre Germain de Thibouville, docteur en médecine et souverain astrologue, entra aussitôt en fonctions, et prédit, à ce qu'on assure, la mort prochaine de Charles VI et de Henri V[22].

La victoire de Baugé avait été si inattendue et si éclatante qu'il semblait que la face des choses fût changée. La consternation régnait parmi les Anglais, qui avaient vu tomber sur le champ de bataille le duc de Clarence, propre frère de leur roi, et la fleur de la chevalerie anglaise. Henri V était alors en Angleterre, hors d'état de leur porter secours. Il y eut un moment de désarroi et presque de terreur[23]. Du côté des Français, on sentait comme un souffle d'enthousiasme et de confiance. Tours fut le théâtre de fêtes et de réjouissances[24], auxquelles se mêlaient les préparatifs militaires, poursuivis avec activité. Le Dauphin remit sa maison sur le pied de guerre et compléta son équipement[25]. De toutes parts arrivaient de nouveaux auxiliaires : outre un renfort d'Écossais qu'on attendait, il en vint du Poitou, de la Guyenne, du Languedoc, et même du Dauphiné[26]. On ne songeait à rien moins qu'à attaquer la Normandie, et l'on devait débuter par le siège d'Alençon.

Mais l'entreprise ne pouvait être tentée que si l'on était assuré du concours ou tout au moins de la neutralité du duc de Bretagne. La première pensée du Conseil se tourna vers ce prince. Les ouvertures vinrent-elles du Dauphin ou du duc ? On ne sait. Quel n'est pas le prestige de la victoire ? Le versatile Jean VI revint peut-être de lui-même à l'alliance française. Toujours est-il que, le ter mai, une ambassade, à la tête de laquelle était le nouveau connétable, le comte de Buchan, se trouvait à Vannes[27].

Le Dauphin quitta Poitiers le 8 avril ; il séjourna à Chinon du 8 au 15, à Saumur du 15 au 28 ; là, apprenant que le duc de Bretagne consentait à une entrevue, il prit la route de Sablé, ou il devait le joindre, et visita sur son passage le champ de bataille de Baugé[28]. Il était le 4 mai à Sablé, où le duc son beau-frère s'était rendu de son côté, avec le comte de Richemont, récemment sorti de captivité ; une réception brillante fut faite aux deux princes, et ils reçurent des présents du Dauphin[29]. Les négociations ne furent pas longues : dès le i mai était signé un traité d'alliance et de confédération.

Les deux princes, considérant que les Anglais sont descendus dans le royaume, dont ils occupent une grande partie, qu'ils détiennent les personnes du Roi et de la Reine, et s'efforcent de priver le Dauphin de la succession au trône, chose qui seroit en grant scandalle, lesion et dommage, et à l'exheredacion de la maison et lignée royale, et au grant reproche des deux princes contractants ; considérant d'autre part qu'étant alliés, ils seraient, avec l'aide de Dieu, en mesure de résister aux ennemis et de préserver le royaume, comme aussi de s'opposer à tous ceux qui leur porteraient préjudice et dommage — ente autres Olivier et Charles de Blois, qui, au très grant deplaisir de Charles Régent, ont récemment tenu le duc prisonnier — ; après mûre délibération, se sont, outre et pardessus les amitiés, alliances et obligations où ils sont l'un envers l'autre, promis, pour plus grande fermeté et accroissement de bonne amour, foi, fraternité et confédération l'un à l'égard de l'autre, tant pour eux que pour leurs pays et, sujets.

Le duc de Bretagne s'engage, en son nom et au nom de ses sujets, à chérir et à honorer Charles Régent et à lui complaire en toutes manières, à lui donner conseil, confort, aide et secours contre les Anglais et contre leurs adhérents et alliés, avec toute sa puissance, sans y rien épargner, et à s'opposer à tous ceux qui s'efforceraient d'endommager la seigneurie du Roi et du Dauphin ; à cette cause, il met lui, ses pays et sujets, en guerre ouverte contre lesdits ennemis, leurs alliés et complices, et déclare qu'il renonce à toutes alliances, à tous traités et parlemens avec eux et leurs alliés, attendu, dit-il, que jamais à, eux ne entendismes avoir tresve,,sinon sur l'intention que pendant icelle nous puissions envoyer par devers lesdiz ennemis pour traicter du bien de paix, se faire se povoit, et que à present sommes bien acertenez que ils ne veulent accord ne appoinctement, mais tendent à eux attribuer la couronne et seigneurie royal de France ; il déclare donc casser, froisser et annuler la trêve et abstinence de guerre que ses ambassadeurs pourraient avoir contractée en son nom avec les Anglais, leurs alliés et leurs adhérents ;

De son côté, Charles Régent, connaissant la bonne affection du duc envers le Roi et lui, déclare qu'il l'aimera et chérira, le maintiendra dans ses droits, honneurs et dignités, et lui complaira en toutes manières raisonnables, qu'il l'aidera contre ses anciens ennemis et leurs adhérents, et contre tous autres qui voudraient entreprendre quoi que ce fût contre sa personne, ses pays et sujets ; qu'il l'aidera en particulier contre Olivier et Charles de Blois, et leur mère, leurs alliés et complices, pour parachever la mise à exécution de la sentence du Parlement rendue contre eux, à raison du crime de lèse-majesté dont ils se sont rendus coupables, et qu'il se met dès à présent en guerre contre eux, renonçant à toutes alliances et promesses à ce contraires.

Les deux princes promettent, en paroles de princes, sur les saints Évangiles, et sous l'obligation de leurs biens, meubles et héritages, de tenir, accomplir et avoir pour agréables les choses dessus dites, tant pour eux que pour leurs pays et sujets, et de ne faire aucun traité avec lesdits ennemis, leurs adhérents ou autres contre lesquels est faite la présente alliance, sans le consentement l'un de l'autre[30].

Dans une clause préliminaire, tenue secrète, Charles avait pris l'engagement, à la requête de son beau-frère, d'éloigner de sa Cour le Président de Provence, le bâtard d'Orléans, Guillaume d'Avaugour et Pierre Frotier, désignés comme complices du comte de Penthièvre[31].

Par lettres du même jour, le, Dauphin donna à Richard de Bretagne le comté d'Étampes, en reconnaissance de ses services et en souvenir de ce qu'il avait contribué, en 1418, à la délivrance de la Dauphine. Richard, investi d'un grand commandement militaire, recevait en même temps diverses seigneuries confisquées sur les Penthièvre[32].

Enfin, c'est encore à Sablé que fut arrêtée une double alliance, destinée à resserrer les liens qui unissaient les princes restés fidèles au trône : celle de Richard de Bretagne avec Marguerite d'Orléans, sœur du duc Charles, née en 1406, et celle du jeune duc d'Alençon avec la fille du duc, Jeanne d'Orléans, née le 13 septembre 1409[33].

Tranquille du côté de la Bretagne, où il croyait pouvoir compter désormais sur la fidélité du duc, le Dauphin entama les opérations militaires. Le comte de Buchan, le duc d'Alençon, le maréchal de la Fayette, La Hire et Saintrailles, à la tête d'environ six mille combattants, mirent le siège devant Alençon, et forcèrent le comte de Salisbury, accouru à la hâte, à battre en retraite et à se replier sur l'abbaye du Bec[34]. Pendant ce temps, Charles se mettait en campagne, avec sept mille lances, quatre mille arbalétriers et sept mille archers[35], et marchait dans la direction de l'Ile-de-France. Le 10 juin, ayant rallié les troupes du connétable, il était devant Montmirail, assiégé depuis quinze jours par le vicomte de Narbonne, et dont le château fut rasé[36] ; le 15, il s'emparait de Beaumont-le-Chétif[37], qui capitula le lendemain ; le 16, il était à Brou ; le 18, à Mers ; le 20, à Nogent-sur-Eure ; le 22 à Saint-Prest, près de Chartres. Cette dernière ville fut investie de trois côtés, mais, nous dit un contemporain, Charles ne voulut pas en faire le siège, pour reverence de Dieu et de sa benoiste mère[38]. Tandis que l'armée bloquait Chartres, il se porta (23 juin) au nord-est, sur Gallardon, occupé par une garnison bourguignonne. La place fut emportée d'assaut le 25 : pour venger la mort de Charles de Montfort, tué dans l'attaque, on passa au fil de l'épée tous ceux, armés ou non, qui s'étaient refugiés dans l'église et s'étaient rendus prisonniers. La ville, qui était fort riche, fut pillée, et ses murailles furent abattues[39].

Dans une lettre écrite le jour même, et adressée aux habitants de Tours, le Dauphin rendait compte en ces termes de sa campagne :

A nos très chiers et bien amez les gens d'eglise, bourgois et habitans de nostre ville et cité de Tours.

DE PAR LE REGENT LE ROYAULME, DAULPHIN DE VIENNOIS.

Très Chiers et bien amez, nous tenons que vous saichez assez comment nous nous sommes mis sus en toute puissance pour le reboutement de noz ennemiz, soit par la bataille ou autrement, et le recouvrement de la seigneurie de Monseigneur et nostre. Et depuis que avons pris les champs, avons, grâce à Nostre Seigneur, recouvert les places de Montmirail, Boisruffin, Beaumont-le-Chétif et Villebon, ou pais du Perche, et le jour de hier, au vespre, fut prise par assault, qui ne dura pas un quart d'heure, ceste ville et place de Galardon, laquelle chose pourra donner exemple à plusieurs autres ; car ja soit ce que plusieurs fois eussions fait sommer ceulx dedans de nous bailler ladicte place et faire obeissance comme ilz devoient, neantmoins, par leur mauvaiseté et felonnie, ilz se sont laissiez de tous poins destruire. Et aussi se sont cy entour autres places mises en nostre obeissance, et tant que, environ Chartres, en a à present pou qui ne nous obeissent. A quoy nous donrons briefment bonne provision, et est en nostre entencion de aler avant, au plaisir de Dieu, en nostre entreprise.

Et ces choses vous signiffions afin que vous sachez de noz nouvelles, vous priant que tousjours vueillez diligemment entendre à la repparacion, garde et bon gouvernement de nostre ville de Tours, comme nous en avons en vous nostre confiance, et incessamment faictes amener vivres par devers nous et en nostre ost, afin que, par deffault de ce, nostre compaignie, qui est si grant et si notable que pieça ne fut veue telle, ne se doye aucunement rompre ne departir. Très chiers et bien amez, Nostre Seigneur soit garde de vous.

Escript en nostre ost devant Galardon, le XXVIe jour de juing.

CHARLES.

VILLEBRESME[40].

Après la prise de Gallardon, le Dauphin se rapprocha de Chartres, et vint camper au village de Sours le 1er juillet. Son intention était, on l'a vu, de poursuivre ses avantages. Gallardon était sur la route de Paris, que tout le monde s'attendait à lui voir prendre. Déjà l'alarme régnait dans la capitale, où les vivres manquaient, et d'où l'on envoyait messages sur messages au roi d'Angleterre pour l'avertir du péril et le supplier de se hâter. Henri, débarqué à Calais le 10 juin, à la tête de quatre mille hommes d'armes et de vingt-quatre mille archers, se contenta d'envoyer un secours de onze cents hommes à son oncle le duc d'Exeter, qui se trouvait comme bloqué dans Paris. Il n'arriva que le 4 juillet, et repartit le 8 pour Mantes, où il avait donné rendez-vous au duc de Bourgogne[41]. Les historiens bourguignons prétendent qu'il voulait livrer bataille au Dauphin. Mais son attente fut déçue : quand, après avoir opéré, vers le 12 juillet, sa jonction avec Philippe, il envoya quinze mille hommes, sur les ordres de son frère le duc de Glocester, pour commencer les hostilités, le Dauphin avait battu en retraite. Dès le 5, passant par Illiers, Brou, Châteaudun et Vendôme, il avait regagné ses cantonnements de la Loire.

Quelle était la cause de cette brusque retraite ? Dans des lettres patentes du 5 août suivant, elle est motivée en ces termes : Par maladie survenue en nostre ost, et pour voir le gouvernement et manière d'entreprendre des ennemis[42]. Charles, en écrivant le.9 juillet aux habitants de Lyon, est plus explicite : il expose qu'il a tenu les champs pendant trois semaines ; que, pour la grant chierté et defaut de vivres, et l'indisposition du temps, tant de maladie comme autrement, les gens de sa compagnie se departoient chascun jour ; que sachant d'ailleurs combien était forte la garnison de Chartres, et qu'on n'y pourrait bonnement profiter, il s'est replié sur Vendôme ; mais que, quand il saura ce que doit faire le roi d'Angleterre, lequel vient de rentrer en France, et quand il aura joint ses troupes à celles de Richard de Bretagne, son intention est d'aller querir le roi en quelque lieu qu'il soit : car soiez tous certains, ajoute-t-il, que nostre dit adversaire n'a pas amené en tout quatre mil combatans... Aussi, nous entretenons et tousjours nous entretendrons ensemble compagnie puissant pour lui resister, et secourir partout où il vouldroit porter dommage[43].

Ces explications ne sont guère concluantes. Il est difficile de comprendre comment une campagne, si brillamment inaugurée, finissait aussi misérablement. Evidemment, le Dauphin et ses généraux avaient manqué de résolution. A travers les motifs, plausibles d'ailleurs — car semblable épidémie éclata peu après dans l'armée de Henri V — qui sont mis en avant, on sent un certain embarras, et, tranchons le mot, quelque pusillanimité[44] : nous approchons du moment où les conseillers du trône vont éloigner systématiquement leur maitre du théâtre de la lutte[45], où le jeune prince, renonçant à cette initiative dont il a donné plus d'une preuve, se résignera trop facilement à un rôle passif.

Cette expédition de 1421, la dernière à laquelle Charles prit part jusqu'à la campagne du Sacre, en 1429, trace dans sa vie comme une ligne de démarcation. Il semble s'opérer chez lui une de ces transformations dont sa longue carrière offre plus d'un exemple. Au lieu de se mêler aux choses et aux hommes, et se mettre à la tête de ses troupes, de se montrer au peuple, va s'enfermer dans ces retraites impénétrables pour ses sujets — comme le lui reprochera plus tard, avec une courageuse franchise, un de ses conseillers — et plus impénétrables encore pour l'histoire. Désormais il n'apparaîtra à nos yeux qu'à de rares intervalles, et nous ne le verrons plus accomplissant avec une persévérante énergie son métier de Roi.

Le 5 août, en l'absence du Dauphin, qui était au château de Chinon, fut tenu à Blois un grand conseil, où se trouvèrent, comme chefs militaires, le connétable de Buchan, les maréchaux de la Fayette et de Séverac, le maitre des arbalétriers Torcy, Tanguy du Chastel, le vicomte de Narbonne et le sire Treignac[46], et comme membres du Conseil royal, le chancelier Le Maçon et Regnault de Chartres, archevêque de Reims. Afin de pourvoir à la résistance contre le roi d'Angleterre, qui faisait alors le siège de Dreux, on appela aux armes tous les nobles du royaume, et On les convoqua à Vendôme, où ils devaient se trouver le 25 août, sous peine d'encourir confiscation de corps et de biens, et d'être déclarés fauteurs des ennemis. On faisait appel en même temps aux milices des bonnes villes[47].

A la suite de ce conseil, le Dauphin quitta Chinon pour se rendre à Loches, et de là à Amboise ; mais il ne prit aucune part aux opérations militaires entamées contre le roi d'Angleterre, opérations que nous trouvons relatées en ces termes dans une lettre qu'il adressa le 6 septembre aux habitants de Lyon :

A nos chiers et bien antes les consuls, bourgois et habitans de la bonne ville et cité de Lyon.

DE PAR LE REGENT DAUPHIN.

Chiers et bien amez, pour ce que bien savons qu'estes en continuel desir de savoir au vray de noz nouvelles et affaires de pardeça, et que bonne resistence et provision soit mise aux emprises des Anglois noz anciens ennemis, vous faisons savoir que, puis aucuns jours en ça, beaux cousins le conte de Boucquen, connestable de France, Richart de Bretaigne 2, et nos autres chiefz et gens, qui de present sont en très Brant nombre et puissance, ont esté par deux jours entiers sur les champs à v ou vi lieues seulement desdiz ennemis, en les attendant, tous prestz et disposez, se venuz feussent, de les combatre ; mais iceulx ennemis ont prins autre chemin, et se sont tirez vers Baugency et Meung-sur-Loire ; et pour ce nos dictes gens vont après, en faisant leur poursuite, et les ont jà fort approuchez. Par quoy, à l'aide de Nostre Seigneur, avons esperance d'en oir. en brief bonnes nouvelles, et que nos dictes gens se y gouverneront si prudemment et si vaillamment que ce sera à leur honneur et à nostre prouffit. Et si tost que aucune chose de bien y survendra, nous la vous signifierons. Si vueillez tousjours soigneusement entendre au bon gouvernement de la ville et cité de Lyon, ainsi qu'en avons en vous singulièrement nostre confience, et se riens y survient de nouvel, le nous faites hastivement savoir, pour y donner la provision et remède necessaires. Nostre Seigneur soit garde de vous.

Escript à Amboise le VIe jour de septembre.

CHARLES.

PICART[48].

Le Dauphin quitta Amboise le 24 septembre[49], et alla se fixer à Bourges. Jusque-là, il n'avait guère fait que passer dans cette ville[50]. Il devait désormais y faire de longs séjours et justifier ainsi ce surnom de Roi de Bourges que ses ennemis lui donnèrent. Il habitait le palais qu'on appela bientôt le Logis du Roi, et qui avait — comme le château de Mehun-sur-Yèvre, — été construit par son grand oncle le duc de Berry. Ce palais était en même temps une forteresse : élevé sur le bord de l'enceinte gallo-romaine, il dominait toute la campagne, et, du côté de la ville, il était protégé par des retranchements qui le mettaient à l'abri d'un coup de main. La grande salle du palais est célèbre dans l'histoire de Bourges, non moins que la magnifique Sainte-Chapelle, attenante au palais, que le vieux duc avait fait construire, et dont il ne reste plus aujourd'hui le moindre vestige[51].

Dans des lettres du 26 novembre 1421, où il ordonnait d'engager ou de vendre, pour faire finances, des terres de son domaine, Charles annonçait l'intention de resister, en la saison nouvelle, à toute puissance, à la damnable et mauvaise voulenté et entreprinse des Anglois, et d'employer la plus grande partie de ses finances et ses joyaux même au paiement des gens d'armes, afin de protéger la seigneurie du royaume, laquelle, disait-il, nous avons tousjours gardée et deffendue, garderons et deffenderons à notre pouvoir[52]. Constatons qu'à la Cour de Bourges on faisait encore preuve d'une prodigalité qui contrastait d'une façon déplorable avec la pénurie des finances. En octobre, le Dauphin se fait faire une épée de parement, dite épée de Turquie[53] ; en novembre, il donne un mandement de 40.000 livres (en faible monnaie, il est vrai) pour l'acquisition de plusieurs chevaux[54] ; en décembre, il commande une robe de drap noir, sur les manches de laquelle furent employés seize marcs d'argent doré ouvrés en manière de grandes pièces pendans a deux chaynons, et en plusieurs autres manières, l'une partie doré et l'autre blanc. L'épée fut payée (en faible monnaie) la somme de 3.300 livres, et la garniture de la robe 2.000 livres[55]. A quelle occasion se faisait cette dépense ? On célébrait les noces de Guillaume Rogre, l'un des échansons du prince[56]. Le 1er novembre, on achète six selles à 200 livres pièce[57]. En décembre on remet les chariots en état[58]. Le Dauphin s'apprêtait à partir pour le Limousin : son absence dura du 23 décembre au 30 janvier. Nous n'avons, relativement à ce voyage, que les étapes du cortège, fournies par les comptes du temps[59], et un renseignement tiré des chroniques de Limoges : Charles fit son entrée dans cette ville le 20 janvier ; il fut reçu avec grand honneur et s'avança sous un dais porté par six consuls. Après s'être informé de la résistance que faisaient les bourgeois aux Anglais, voulant accroître leur courage et les engager à rester fidèles à la couronne, il leur donna le privilège d'ajouter aux armoiries de la ville une bande d'azur à trois fleurs de lis d'or ; il accorda aussi d'importants privilèges aux consuls, et l'on ajoute qu'il leur enjoignit de faire changer la coiffure des femmes, lesquelles avaient conservée fidèlement la coiffe adoptée par leurs grand'mères en 1233, sur les conseils d'un dominicain qui était venu prêcher la modestie aux femmes de Limoges. Le jeune prince, trouvant cette mode un peu surannée, voulut qu'elles pussent prendre tel coffrage qu'il leur plairoit prendre, au port de France[60].

A peine revenu de cette rapide excursion, Charles recommence ses dépenses luxueuses. En février, on lui fait une Nuque italienne de satin cramoisi, une salade, un heaumet, une nouvelle épée de parement, un bacinet de parement ; en mars, une huque de drap noir à découpures tricolores sur laquelle on emploie dix-huit marcs d'argent doré, et dix robes bordées de drap vermeil, blanc et pers, pour ses gens et valets du séjour et de la grande écurie[61]. Le 11 avril, il donne l'ordre d'acheter plusieurs parties de drap de soye[62]. En même temps, il envoie vers le chancelier du duc d'Orléans pour qu'il mette à sa disposition les riches tapisseries que son cousin a dans son château de Blois, et le 28 mars on remet à son receveur général, Guillaume Charrier, une chambre de drap d'or de vieille façon, de couleur verte, faite à espiz de blé comme de ciel, dossier et couvertures de mesme, trois courtines de baudequin et six pièces de tapisserie de laine de celle mesme façon[63].

Que se passe-t-il donc à la Cour de Bourges ? Et comment, au moment même où l'on est à bout d'expédients financiers, où l'avilissement de la monnaie témoigne de la détresse croissante du trésor, déploye-t-on un tel luxe ?

C'est qu'un grand événement se prépare, et qu'on est à la veille de célébrer le mariage du Dauphin avec Marie d'Anjou, sa fiancée depuis le 18 décembre 1413.

Associée dans son enfance à la vie de Charles, en Anjou et en Provence, puis fixée à Paris, à partir de juin 1416, d'abord sous la garde de la reine Isabeau[64] et ensuite seule dans l'hôtel de Bourbon, jusqu'au moment où le duc de Bretagne et son frère le jeune duc d'Anjou l'arrachèrent à un séjour plein de périls et d'angoisses, la jeune princesse était venue en octobre 1418 rejoindre sa mère à Saumur. Le 30 juin 1419, elle se sépara de celle-ci ; et tandis que Yolande, partant de Bourges, allait se fixer pour quelques années en Provence[65], Marie prenait sa résidence au château de Mehun-sur-Yèvre[66], où elle eut aussitôt sa maison constituée[67]. Elle était en correspondance avec son fiancé, qui lui annonça la conclusion du traité de Pouilly par une lettre qui fut transmise aussitôt à sa mère, et qui parvint à celle-ci le 15 juillet, au Puy, où elle avait été implorer, en passant, la protection de la Sainte Vierge[68]. Le 18 janvier, le Dauphin étant à l'Arbresle, sur la route de Lyon, reçut les étrennes de la princesse[69], qu'il retrouva à Mehun en septembre, après la campagne si brusquement interrompue par la mort du comte de Vertus, et avec laquelle il passa le restant de l'année. Nous voyons la Dauphine faire, le 29 avril 1421, son entrée à Tours, où elle prend en main les intérêts des habitants, et reçoit d'eux en présent dix pipes de vin du cru[70].

Charles venait d'entrer dans sa vingtième année ; Marie avait eu dix-sept ans accomplis le 14 octobre 1421. Le moment était arrivé où les liens qui les unissaient allaient recevoir leur consécration. La cérémonie du mariage eut lieu à Bourges, au mois d'avril 1422, et, malgré la situation précaire où se trouvait l'héritier du trône, elle fut célébrée avec une grande magnificence. suivant un témoignage digne de foi, on vit rarement à des noces royales si belle compagnie de princes, de seigneurs et de grandes dames ; on n'a, d'ailleurs, aucun détail sur les fêtes qui accompagnèrent le mariage ; on sait seulement qu'au banquet des noces, suivant l'antique coutume, les dames seules furent assises dans la salle où se trouvait la Dauphine, et que Charles y parut, au milieu du repas, donnant des marques de cette affabilité qui était un des traits de son caractère[71].

Quelques jours après le mariage royal, d'autres noces furent célébrées à Bourges. Jean, bâtard d'Orléans, dont le nom était destiné à une si grande célébrité, épousait Marie Louvet, demoiselle de corps de la Dauphine, et l'une des filles du président de Provence. Le fils naturel de Louis, duc d'Orléans, et de Marie d'Enghien, dame de Cany, était à peu près du même âge que le Dauphin, et de bonne heure il avait révélé ce qu'il devait être un jour : Il m'a esté emblé, disait en mourant Valentine le Milan, car nul n'est mieux taillé pour venger la mort de son père[72]. Le jeune bâtard avait débuté à l'âge de quinze ans dans la carrière des armes ; fait prisonnier à Saint-Germain-en-Laye par les Bourguignons, en 1418, il avait été mis en liberté, par voie d'échange, en août 1420[73]. Le Dauphin l'avait attaché à la personne, à titre de chambellan, et lui avait donné, par lettres du 4 novembre 1421, la terre de Valbonnais en Dauphiné[74].

La date de son mariage, restée longtemps incertaine, est fixée par un document en date du 28 juin 1422 : c'est une quittance donnée par un changeur de Bourges, pour la vente et delivrance d'un anel d'or garni d'un dyamant, prins et acheté de lui au mois d'avril derrenier passé, par Mademoiselle Jehanne d'Orleans, fille de Monseigneur le duc, pour donner en presant aux noces de Monseigneur le bastard d'Orleans[75].

A l'occasion de ce mariage, le Dauphin, voulant favoriser son amé et féal cousin, qu'il qualifie dans l'acte de conseiller et chambellan, et en mémoire des grands services rendus par son amé et féal conseiller et chambellan Jean Louvet, seigneur de Mirandol, donna au bâtard d'Orléans les châteaux et châtellenies de Theis, de la Pierre, de Dommène et de Falavier en Dauphiné[76].

On se rappelle que le président Louvet avait reçu ces terres en don par lettres du 29 septembre 1419, et dans les ordonnances du Dauphin où il figure comme signataire, il est parfois désigné ainsi : le seigneur de Falavier. Ce n'était pas sans peine qu'il avait eu la jouissance de cette seigneurie. La courageuse opposition du Conseil de Dauphiné à toutes les aliénations du domaine ne céda ici que devant les injonctions réitérées du Dauphin. Louvet était en possession d'une fortune considérable. Par lettres du 15 mai 1420, il reçut l'office de châtelain et capitaine du château de Mirandol[77], et c'est sous ce nom qu'il figure le plus souvent au bas des ordonnances du Dauphin[78]. Depuis longtemps il avait su se rendre nécessaire par les prêts faits au Trésor : en août 1418, il avançait une somme de quatre mille cinq cents livres[79] ; en février 1420, il fournissait une partie de la vaisselle d'argent dont le Dauphin avait fait présent aux comtes de Buchan et de Vigton à leur arrivée en France[80] ; au commencement de 1421, il livrait comptant une somme de sept mille cinq cents moutons d'or pour les frais de l'armée amenée d'Écosse par les comtes de Douglas et de Mar. Le Dauphin lui avait donné, en garantie de ce prêt, la châtellenie de Meulhon eu Dauphiné. Dans les lettres de don, en date du 8 mai 1421[81], a rappelait les éminents services rendus par le président de Provence qui, depuis longtemps, aidait la couronne, non seulement de sa faculté et chevance mais aussi de la peine et travail de sa personne, qu'il avait du tout exposée et abandonnée et qu'il exposait chaque jour pour le bien et service du Roi et du Dauphin, et dont le dévouement avait été jusqu'à se priver de la plus grande partie de son vaillant pour subvenir à son maitre dans sa nécessité. L'insistance mise par le Dauphin à exiger l'accomplissement de ce don par le Conseil du Dauphiné, atteste à la fois l'empire exercé par Louvet et le joug que subissait à son égard le prince[82].

Le président de Provence, au comble de la faveur, donnait la main d'une de ses filles à un seigneur qui, malgré la tache de sa naissance, pouvait prétendre à une haute destinée ; trois ans auparavant, il avait marié l'autre à un jeune écuyer du Dauphiné, Louis de Joyeuse, fils de Randon, gouverneur de cette province. Le bâtard d'Orléans était l'objet de distinctions toutes spéciales et de nombreux dons[83]. Guillaume d'Avaugour continuait à résider près du Dauphin, auquel il prêtait de l'argent[84] et dont il recevait des dons de terres et de chevaux[85]. Pierre Frotier, le grand maitre de l'écurie, était, malgré les tristes exploits, sans cesse renouvelés, de ses gens, qui semblaient avoir pour leurs excès le privilège de l'impunité, très avant dans l'intimité du Dauphin[86].

C'étaient pourtant les quatre personnages que Charles avait pris, à l'égard de son beau-frère le duc de Bretagne, l'engagement formel d'éloigner de sa Cour, comme ayant été mêlés à l'attentat du comte de Penthièvre !

Un autre incident très significatif nous révèle l'ascendant de plus en plus irrésistible de Louvet et la faiblesse du Dauphin : le 3 février 1422, les sceaux avaient été enlevés à Robert le Maçon pour être donnés à Martin Gouge, évêque de Clermont ; et, sans tenir compte des éminents services rendus par le vieux chancelier, on présentait le nouveau titulaire comme le successeur immédiat du chancelier Henri de Marie, massacré en juin 1418[87]. Si nous ajoutons que, parmi les personnages appelés nouvellement à siéger dans le Conseil et qui avaient part aux faveurs du prince, figurait Guillaume de Champeaux, promu, en novembre 1419, à l'évêché de Laon, nous aurons achevé de faire connaître la transformation qui s'opérait chez le Dauphin et nous aurons montré à quelles fâcheuses influences il commençait à s'abandonner.

Au moment où il se tenait éloigné de la scène, et où, d'ailleurs, son mariage l'autorisait à prendre un repos momentané[88], des devoirs impérieux l'appelèrent soudain à La Rochelle. Il avait pu laisser ses généraux faire seuls la campagne du Nivernais et se borner à envoyer son ost au siège de Cosne[89] ; mais il se voyait exposé à perdre le seul port qu'il eût sur l'Océan ; un complot, secrètement favorisé par le duc de Bretagne, — lequel, plus coupable encore que le Dauphin, se disposait, au mépris des engagements contractés à Sablé, à jurer le traité de Troyes, — était à la veille d'éclater et avait pour but de livrer La Rochelle aux Anglais[90]. Charles partit de Bourges, en toute hâte, le 26 septembre, pour cette ville ; il s'arrêta quatre jours à Poitiers, où siégeait son Parlement, et arriva le 10 octobre à La Rochelle.

Pendant ce séjour à La Rochelle, où le Dauphin déploya à la fois de l'activité et de l'énergie, il reçut une marque signalée de la protection divine. Une nombreuse assemblée était réunie sous sa présidence, dans la grande salle de l'évêché où il était logé. Le plancher s'effondra soudain : tous les assistants furent précipités dans une salle basse, à l'étage inférieur ; plusieurs furent tués, un grand nombre blessés. Le prince, qui était assis sur une chaière, placée sous une sorte d'arcade pratiquée dans l'épaisseur d'un gros mur, tomba moins lourdement ; sa chute fut ainsi atténuée : il glissa, au lieu d'être précipité dans le vide, et ne reçut que de légères contusions[91]. L'émoi rut grand dans la ville ; un auteur du temps nous dit que tous ceux qui n'estoient pas en la place furent près de s'entretuer, cuidans que Monseigneur le Daulphin et ceulx de sa compagnie lussent mors par trahison et mal apensement[92]. La rumeur se répandit au loin : dans tout le royaume, le bruit courut que le Dauphin avait été tué, et jeta le trouble et la consternation parmi les bons Français[93].

Charles ne passa que cinq jours à La Rochelle : il partit le 15 octobre, après avoir, par de sages et habiles mesures[94], mis cette ville à l'abri des menées de ses adversaires, et l'avoir confirmée dans une fidélité qui ne se démentit jamais. Le 24, il rejoignait la Dauphine au château de Mehun.

C'est là qu'il apprit la mort de son père, survenue le 21 octobre à Paris, et que, le vendredi 30, il prit le titre de Roi.

 

En examinant attentivement l'image de Charles, telle qu'elle nous apparaît jusqu'au jour de son avènement, nous pouvons constater combien elle est différente de celle que nous présente l'histoire, et l'histoire même qu'on pourrait croire la mieux informée. Où est cette éducation molle, énervante, solitaire, abreuvée du poison de la flatterie dont on a parlé récemment[95] ? A quelle marque reconnaît-on un développement tardif des facultés ?[96] Y a-t-il plus de vérité à parler de l'inertie du Dauphin, et de sa disparition au sein d'un demi-jour sans gloire tt probablement sans vertu ?[97] Pendant cette première période de sa vie publique, il est loin d'être enfermé comme au milieu d'une enceinte impénétrable[98], et l'histoire ne nous voile pas tellement ses traits qu'il ne soit possible d'en tracer une esquisse[99].

Nous pouvons désormais, à la lumière des seuls d6cuments contemporains, nous rendre compte de ce que fut, de quinze à vingt ans, ce prince eslongné par fureur et sedicion de la maison royale, guerroyé de ses ennemis, assailly de glaive et de parolles de ses propres subjetz, doubteusement obey du surplus de son peuple, delaissé de ses aides principaulx où il se devoit fier, despourvu de tresor, enclos de fortereses rebellans[100]. Alors que certains désertaient sa cause, la regardant comme perdue, lui ne s'est point laissé abattre : mettant, selon l'expression d'un auteur du temps, son fait et son bon droit ès mains de Dieu[101], il a résisté énergiquement à tous ses ennemis, de quelque côté qu'ils vinssent. Quatre années de luttes, de déplacements, d'efforts continuels[102], ont ranimé l'ardeur de ses partisans, et inspiré confiance à ceux-là mêmes qui le condamnaient comme malade jugié à mort et babandonné sans remède[103]. Il a su affermir son pouvoir dans une bonne partie du royaume, et ramener à sa cause plus d'un adversaire. Il ne s'armoit mie vollentiers, nous dit un auteur du temps, et n'avoit point chier la guerre s'il s'en eust peu passer[104], il n'a eu que plus de mérite à triompher de cette répugnance, car il s'est armé, nous l'avons vu, à plus d'une reprise. Il a fait preuve d'activité, de bon sens et d'une certaine intelligence des affaires[105]. Ses avantages physiques, son affabilité, ont prévenu le peuple en sa faveur, car il était moult bel prince, biau parleur à toutes personnes, et piteux envers povres gens[106].

Un trait de caractère du jeune prince sur lequel nous devons insister, c'est son empressement à observer les devoirs religieux que nos rois, en dignes petits-fils de saint Louis, avaient coutume de remplir.-Ne faut-il voir, dans ces pratiques de dévotion que nous révèlent les documents du temps, qu'une pure affaire de convenances et de décorum, une simple tradition de famille et dynastique[107] ? Nous ne le pensons pas : fidèle aux enseignements de son vertueux confesseur Gérard Machet, Charles agissait dans une pensée de foi, et sa piété était sincère[108]. Dès le 6 novembre 1418, nous le voyons revêtir à Loches le surplis, la chape et l'aumusse pour se faire recevoir abbé[109], et, après avoir entendu la messe dans sa stalle, jurer d'observer les statuts du chapitre[110]. Le même jour, il ordonne de payer cinquante livres tournois à un religieux franciscain pour icelle emploier et convertir, lit-on dans les lettres données à cet effet, selon nostre devocion et entencion, au saint sepulcre où il va de present, et ainsi et selon ce qu'il verra en sa conscience estre le mieulx emploié pour nous [111]. En 1420, il se fait recevoir chanoine de Notre-Dame du Puy, assiste, revêtu du surplis et de l'aumusse, aux premières vêpres de l'Ascension, et communie le lendemain à la grand-messe[112]. Vers la même époque, il offre à l'église Notre-Dame de Boulogne une grande image de vermeil doré, qui avait sur la tête une couronne enrichie de perles et de pierreries, et qui tenait une relique en sa main[113]. Le 15 mars 1420, il fait remettre aux Cordelières de Sainte-Claire de Toulouse une somme de soixante livres tournois, donnée pour Dieu et en aumosne, pour leur aidier à vivre et afin qu'elles prient Dieu pour nous[114]. Deux jours avant la bataille de Baugé, le jeudi saint de l'année 1421, vêtu d'un sac de toile, il lave lui-même les pieds de douze pauvres[115]. A la nouvelle de la victoire, il se rend à pied, en actions de grâces, à la cathédrale de Poitiers[116]. Quelques jours après, il se présente, avec le costume de chanoine, en l'église de Marmoutiers, prête le serment accoutumé, et prend part aux distributions de pain, de vin et d'argent qui représentaient sa prébende[117]. Après son accident de La Rochelle, Charles, qui avait pour saint Michel une dévotion particulière[118], envoya au Mont-Saint-Michel une pierre qui s'était détachée au-dessus de sa tête et son buste en cristal, comme ex-voto[119]. En même temps, il fonda à la Sainte-Chapelle de Bourges une messe perpétuelle[120].

La maison religieuse du Dauphin se composait, outre son confesseur Gérard Machet, d'un aumônier et de plusieurs chapelains. Chaque jour il entendait dévotement deux ou trois messes, et faisait de nombreuses aumônes[121]. A son entrée dans une ville, sa première visite était pour la cathédrale, où il ne manquait pas de venir s'agenouiller[122].

A côté de la piété ; un autre trait du caractère du Dauphin, c'est la bonté : beau parleur à toutes personnes, piteux envers pauvres gens, comme le dit Pierre de Fenin[123]. Nous le voyons donner, en pitié et aumosne, dix livres tournois à la femme d'un charpentier, pour lui aidier à aler querir son mary, qui estoit malade et blecié au siège de Montberon, où il estoit alé pour le fait et gouvernement des engins[124]. Un de ses chevaliers, Jean de Coucy, reçoit deux cents livres pour l'aider à se tirer des mains des Bourguignons, qui l'ont fait prisonnier et mis à très grande rançon[125]. Il serait facile de multiplier ces exemples.

Sa générosité ne saurait être contestée, et nous en avons fourni de nombreuses preuves dans les pages qui précèdent ; elle était accompagnée d'une libéralité qui l'entraînait souvent hors des bornes. Nous l'avons vu également céder avec une regrettable facilité à ses goûts luxueux et à sa passion pour les chevaux. Dès ses jeunes années se révèlent encore certaines tendances qui, chez lui, sont caractéristiques : l'amour de la science et la protection donnée aux savants et aux lettrés[126]. A quinze ans, il faisait acheter des livres de médecine[127] et, durant sa régence, Jean Gerson lui présenta un livre intitulé : Ustrologia theologizata[128]. Il avait dès lors un grand penchant pour tout ce qui touchait à l'artillerie[129].

Si les qualités et les goûts apparaissent déjà, les défauts commencent aussi à. se montrer ; nous pouvons constater chez le Dauphin une fâcheuse disposition à subir l'ascendant de ceux qui l'entourent et à s'aveugler sur leurs travers jusqu'au point de tout souffrir de leur part. Mais si des influences fatales se font sentir, elles ne sont point encore prédominantes. Pourtant l'année qui précède l'avènement au trône accuse déjà une transformation regrettable : l'ardeur des premières années commence à faire place à une certaine tiédeur, et aux anciens et fidèles conseillers qui ont veillé sur son enfance, le jeune prince semble préférer de nouveaux venus, qui ont su conquérir ses bonnes grâces.

Un autre symptôme, gros de menaces pour l'avenir, sur lequel nous devons nous arrêter, ce sont les rivalités qui se manifestent dans l'entourage du Dauphin. Nous sommes fort peu renseignés à cet égard, mais nous en savons assez pour constater qu'à diverses reprises l'intervention du prince est nécessaire pour arrêter les disputes, et qu'elle n'empêche pas l'effusion du sang. L'incident relatif au comte de Ventadour nous en offre la preuve. Arrêtons-nous un instant sur cette scène, qui nous fera pénétrer dans la vie intime du Dauphin.

Jacques, comte de Ventadour, avait épousé la fille du grand-maître des arbalétriers Torsay : c'était un jeune et brillant seigneur, que le Dauphin avait nommé conseiller et chambellan. Un soir, au mois de mai 1421, Charles étant à la Ferté-Bernard au moment d'aller rejoindre ses troupes devant Montmirail[130], le comte de Ventadour se présenta pour remplir les devoirs de sa charge et assister au coucher de son maître. L'huis du retrait du Dauphin était gardé par Guichard du Puy, son premier huissier d'armes, lequel dit au comte qu'ordre avait été donné de ne laisser pénétrer personne, et qu'il n'entrerait pas. Le comte répondit que cette défense ne le concernait point. N'êtes-vous pas homme ? Ne m'en croyez-vous pas ? reprit brusquement Guichard. — Je me souviendrai de cette réponse, dit le comte en se retirant dans l'antichambre. Survint Jean du Cigne, l'un des écuyers d'écurie du Dauphin. Ventadour rentra à sa suite, et se mit à apostropher Guichard ; ils allaient en venir aux mains, quand le premier écuyer Pierre Frotier et les autres gens de la maison du prince qui étaient là, les séparèrent. Le Dauphin, entendant la dispute, sortit de son retrait et demanda ce que c'était. Guichard et Ventadour, s'agenouillant tous deux, donnèrent chacun leur explication. A la plainte du comte, Charles répondit : Ne vous en prenez point à nos gens, mais dites-nous le, et on leur ordonnera ce qu'on vous devra faire, car il faut qu'ils fassent ce que leur avons commandé.

Le comte se retira en silence, mais avec la vengeance dans le cœur : quatre jours après Guichard du Puy, sortant de l'église, tombait frappé de deux coups d'épée par le comte de Ventadour, qui, le lendemain, était arrêté et mis en prison[131].

 

Il nous reste maintenant, pour achever de mettre en lumière cette période de la régence du Dauphin, que les historiens, — à l'exception de M. Vallet de Viriville, qui l'a amplement, et, en général, fort bien traitée[132], — ont presque complètement laissée dans l'ombre, d'une part à suivre le prince dans ses relations avec les puissances étrangères, et d'autre part à étudier le rôle de son gouvernement relativement à l'administration du royaume.

 

 

 



[1] Itinéraire (du 20 septembre 1419 au 30 septembre 1423), dans le Compte de l'écurie (KK 53).

[2] Monstrelet, t. IV, p. 17-20 ; Chastellain, t. I, p. 194-97.

[3] Jouvenel, p. 385, et auteurs cités.

[4] La Barre, t. I, p. 347 ; D. Plancher, t. III, preuves, p. 311.

[5] Duquel deboutement et banissement, dit Monstrelet, plusieurs Parisiens furent très joieux, car moult le doubtoient. Monstrelet, t. IV, p. 36-37 ; Chastellain, t. I, p. 218 ; Fenin, p. 149 ; Extrait des Minutes du Parlement, dans Godefroy, p. 703. Boissy d'Anglas a cherché, mais sans raisons valables (Mém. de l'Institut, littérature ancienne, t. IV, p. 545), à contester la réalité de ce fait. Voir Valet, t. I, p. 240, note.

[6] Godefroy, p. 703.

[7] Chastellain, t. I, p. 218.

[8] Lettre missive aux habitants de Lyon, en date du 8 février.

[9] Archives, KK 50, f. 2 v°. — Quelques jours avant on avait envoyé à Blois chercher des blés et vins pour l'assemblée du conseil que mondit seigneur le Regent a tenue eu ce jour audit lieu de Selles, samedi XXVe jour de janvier M CCCC XX. Id., f. 6 v°.

[10] Voir le texte à la fin du tome Ier, parmi les Pièces justificatives.

[11] Archives, KK 53, f. 8.

[12] Archives, KK 53, f. 9 v°.

[13] Original aux Archives de Tours ; lettre publiée par M. Luzarche (p. 35).

[14] Le texte de cette lettre a été publié par M. Compayré, dans ses Études historiques sur l'Albigeois (1841, in-4°, p. 226) ; il est tiré des Archives d'Albi.

[15] Jouvenel, p. 390.

[16] Lettre missive du 30 mai, aux habitants de Tours. Le 15 avril, les commissaires des finances écrivaient, de Bourges, aux gens du Conseil en Dauphiné, que le Dauphin était parti pour tirer ès marches de Normandie, à toute puissance. Archives de Grenoble, B 2825, f. 35.

[17] Registres des Comptes, vol. XVIII, f. 105 et 108 v° ; Registres Capitulaires, dans Baluze, 77, f. 347. On donna au Dauphin pour 168 l. t. de poisson, et cent livres de cire neuve en cinquante torches.

[18] Ils avaient même été jusqu'à s'emparer, en février 1451, d'une somme qu'on portait au trésor du Dauphin. Archives, KK 50, f. 13 et 15.

[19] C'est ce que nous apprend un auteur écossais contemporain, Walter Bower, continuateur du Scotichronicon de Jean de Fordun (éd. Hearne, 1752, in-8°, t. IV, p. 1213) : Sed statim quia non excluserunt Anglos de regno, delati sunt Scoti apud Regem, et vocati sunt devoratores vini et multonum nebulones. Quorum murmura rex bibulis auribus patienter obsorbens, distulit exprobrantibus respondere verbum, donec commisso Bello de Bawgy, ubi anglici capti erant et devicti, vocatis ad se querelantibus, dixit : Quid vobis videtur de Scotis multonum epulonibus et vini voraltribus ? Qui tanquam malleo frontibus repercussi, præ verecundia non habebant quid regi responderent.

[20] Cousinot, p. 179 ; Berry, p. 441.

[21] Lettre du 23 avril portant don à John Stuart de Derneley de la terre de Concressault ; autres lettres sans date dans un formulaire du temps, ms. 5271, f. 224 v° ; Catalogue Joursanvault, n. 3386.

[22] Simon de Phares, cité par M. Vallet, t. I, p. 260-61.

[23] Voir Chastellain, t. I, p. 227. Cf. Monstrelet, t. IV, p. 4041. Des lettres missives furent envoyées les 4 avril et jours suivants, au nom de Charles VI, aux bonnes villes, pour contrebalancer l'effet de l'événement. (Moreau, 247, f. 123 ; Cabinet historique, t. I, p. 59 ; Doyen, Histoire de Beauvais, t. I, p. 61, etc.) — Le 22 mai, des lettres, délivrées à Rouen au nom de Henri V, défendaient à tout homme d'armes, archer ou autre, d'abandonner sa bannière sous aucun prétexte, et prescrivait de se grouper sous les ordres du comte de Salisbury.

[24] On servait à la table du prince du vin de Saint-Pourçain. Archives, KK 50, f. 4.

[25] Le Dauphin commanda plusieurs harnoiz à armer, entre autres un harnoiz de bras à la façon d'Escosse. (KK 53, f. 88 v°.) Il se fit faire une magnifique épée de parement (id., f. 84 v°, 87, 94 v°), des huques, des cottes d'armes, des bassinets, des lances, un étendard à un saint Michiel armé, des bannières, 650 panonceaux (id., f. 84 v° 85, 85 v°, 86 v°, 94 v°).

[26] Chastellain, t. I, p. 235.

[27] D. Morice, t. II, col. 1164.

[28] Mardi ensuivant, XXIXe jour du dit mois d'avril, Monseigneur au giste à Baugy... KK 53, f. 106.

[29] Les dépenses du Dauphin, relatives à cette réception, s'élèvent à 13.878 l. t. Archives, 50, f. 3. — 7 mai : Don à Richard de Bretagne d'un cheval du prix de 2.500 l. KK, f. 78 v°.

[30] D. Lobineau, t. II, p. 976 ; D. Morice, t. II, col. 1.092.

[31] Nous savons par les comptes du Dauphin que Louvet avait fait une absence au commencement de 1421 : il était parti le 9 février, en compagnie de Tanguy du Chastel, pour remplir une mission financière dans le Midi (KK 53, f. 94). Mais on voit par les Registres des Comptes de Tours qu'il se trouvait dans cette ville, ainsi que Tanguy, dans les premiers jours d'avril ; il était le 20 à Saumur, où sans doute il resta pendant le voyage de Sablé. Nous le retrouvons les 13 et 19 mai au Mans, contresignant des ordonnances du Dauphin rendues dans cette ville.

[32] D. Lobineau, t. II, p. 978. Cf. t. I, p. 557.

[33] Anselme, t. I, p. 207-208 et 273 ; Cousinot, p. 184 ; Monstrelet, t. IV, p. 41. Cf. D. Taillandier, t. I, p. 473.

[34] Chastellain, t. I, p. 227-230 ; Monstrelet, t. IV, p. 40-41.

[35] Chastellain, t. I, p. 235 ; Monstrelet, t. IV, p. 45.

[36] Les deux capitaines passèrent au service du Dauphin. Jouvenel, p. 391.

[37] Aujourd'hui Beaumont-les-Autels, entre Nogent-le-Rotrou et Brou.

[38] Cousinot, p. 181.

[39] Chronique d'Alençon attribuée à Perceval de Cagny. Cf., sur cette expédition, Jouvenel, p. 391 ; Berry, p. 441 ; Monstrelet, p. 44, et Chastellain, p. 235. — Les lettres du Dauphin montrent que le siège ne dura pas huit jours, comme le dit Jouvenel, et que la reddition n'eut pas lieu le 29, ainsi que l'affirme Percerai de Cagny.

[40] On lit au dos : Ces lettres ont esté recueus le XXVIIIe jour de juing M CCCC et XXI. M. Luzarche en a publié le texte (avec quelques petites erreurs de transcription) dans ses Lettres de Tours, p. 37.

[41] Monstrelet, t. IV, p. 43 et s. ; Chastellain, t. I, p. 236 et s. ; Saint-Remy, p. 455 ; Registres du Parlement, X1a 1480, f. 236 et v°.

[42] Ordonnances, t. XI, p. 126.

[43] Lettre du 9 juillet 1421. Archives de Lyon.

[44] Blondel dit formellement qu'on n'osa affronter le choc des Anglais : Sed eventum belli adversum et inclementissimum tuum furorem verentes, publicam certamen offerre non audent. Blondel, De Reductio Normanniæ, éd. Stevenson, p. 179-80. Cf. lettre de Henri V à la commune de Londres, en date du 12 juillet, publiée par Delpit, Documents français qui se trouvent en Angleterre, t. I, p. 231.

[45] Le tiroient tousjours arrière de ses ennemis le plus qu'ilz povoient. Pierre de Fenin, p. 195 (année 1422).

[46] Nous pensons que c'est lui qui est désigné, dans la copie fautive de l'acte du 5 août, sous le nom de sire de Crequin. — C'est par erreur que M. Vallet de Viriville traduit vous (t. I, p. 274), par l'évêque de Clermont, qui ne devint chancelier que le 3 février 1422, et qui était alors devant Béziers, en la compagnie de Charles de Bourbon (Ordonnances, t. XI, p. 132). Vous, c'est encore ici le chancelier du Dauphin, Robert le Maçon.

[47] Ordonnances, t. XI, p. 126.

[48] Original, Archives de Lyon, AA 22, f. 12.

[49] On livra, en ce mois, plusieurs parties d'appothicairerie pour la personne du Dauphin. Peut-être, lui aussi, éprouva-t-il quelque influence de l'épidémie régnante. Archives, KK 50, f. 29.

[50] Itinéraire, séjours à Bourges : 13-16 juin 1418, 4-12 février 1419, 24-28 octobre 1419. Le plus long séjour avait été avant le départ pour le Midi, du 16 novembre au 10 décembre 1419, et du 14 décembre au 21.

[51] Raynal, Histoire du Berry, t. II, p. 409, 411, 446 et s.

[52] Ordonnances, t. XI, p. 141.

[53] Archives, KK 53, f. 115 v°, 125 et 126.

[54] Archives, KK 53, f. 116.

[55] Archives, KK 53, f. 115 v°, et 125. — Sans parler de 260 livres pour l'épée, payées en forte monnaie en novembre.

[56] Registre cité.

[57] Archives, KK 53, f. 127 v°.

[58] KK 50, f. 47 ; KK 53, f. 125.

[59] Itinéraire : Issoudun, 23 ; — Châteauroux, 26 ; — Argenton, 27 ; — La Souterraine, du 31 au 12 janvier ; — Limoges, du 19 au 23. Retour par le même, chemin. Il y a aussi dans les registres KK 50, f. 68 v°, et 53, f. 117, des mentions de dépenses faites pendant ce voyage de Limoges.

[60] Chroniques manuscrites de Limoges, extraits publiés par M. Ardant dans la Revue anglo-française (1839), 2e série, t. I, p. 205. Cf. Revue archéologique et historique de la Haute-Vienne, par M. l'abbé Arbellot (Limoges, 1856, in-12), p. 93. — Nous ne trouvons rien à ce sujet dans les Chroniques de Saint-Martial de Limoges, publiées par M. Duplès-Agier, pour la Société de l'histoire de France, en 1874 ; mais il donne (p. 131), l'indication suivante au sujet du sermon de 1233 : Item, A. D. M CC XXXIII, mulieres castri et civitatis Lemovicensis sumpserunt capitegia in capitibus suis ad predicationem fratrum prædicatorum, qui tunc de novo venerant ad castrum Lemovicense, quæ mulieres antea sine capitegiis se portabant.

[61] KK 53, f. 117, 117 v°, 126, 126 v°, 129 v°, 130 v°, 131.

[62] Clairambault, 31, p. 2323. Cf. KK 53, f. 117 v°.

[63] Extraits des mss. du British Museum, par M. Vallet de Viriville, dans la Bibliothèque de l'École des Chartes, t. VIII, p. 168.

[64] Elle fut enlevée à la Reine, avec laquelle elle demeurait au château de Vincennes, un peu avant l'expulsion de celle-ci, qui eut lieu en avril 1417.

[65] Archives, KK 243, f. 50 et 62.

[66] C'est ce qui ressort d'un passage de la Chronique d'Étienne de Médicis, bourgeois du Puy, p. 239.

[67] Dès le 3 décembre 1417, Guillaume le Baudreyer était maître de sa chambre aux deniers (KK 243, f. 44). Voir sur les officiers de la Dauphine les registres KK 50 et 53, passim.

[68] Chronique de Médicis, p. 239.

[69] Elles lui furent apportées par Guillaume de Gamaches, un de ses échansons. Lettre de ce jour. Pièces originales, vol. 1273 : GANACHES. — Ce document vient d'être publié dans la Revue des documents historiques, 8 novembre 1880 (t. VII, p. 154-55).

[70] Registres des comptes, aux Archives de Tours, vol. XVIII, f. 105 et s. ; Registres des délibérations, vol. I, part. V, au 28 avril 1421. Cf. AA, 4.

[71] Madame de Namur fut assise au disner en bas de toutes les comtesses, resta une : et quand ce vint au milieu du disner le Roy vint où elle estoit assise et luy dit qu'elle avoit assé esté assise comme femme du comte de Namur et qu'il falloit que le demeurant du disner elle fust assise comme sa cousine germaine, et la fit asseoir à la table de la Royne. Et à graces elle alla en son lieu, et disoit madicte dame de Namur que oncques à nopces, le Roy n'eust tant de princes ne tant de grandes dames qu'il y avoit là, et disnoient le jour es nopces touttes les dames en la salle où la Royne disnoit et nuls hommes n'y estoient assis. Les honneurs de la Cour, par Aliénor de Poitiers, dans les Mémoires sur l'ancienne chevalerie, par La Curne de Sainte-Palaye, éd. Nodier, t. II, p. 153. — La comtesse de Namur était Jeanne d'Harcourt, fille de Jean, comte d'Harcourt, et de Catherine le Bourbon.

[72] Jouvenel, p. 197.

[73] Le 13 août : c'est ce qui résulte d'une pièce originale en notre possession.

[74] Archives de Grenoble, B. 3044, f. 142. Nous avons une lettre missive du Dauphin, au sujet de ce don, adressée aux gens du Conseil en Dauphiné. On la trouvera aux Pièces justificatives.

[75] Louis et Charles ducs d'Orléans, par Aimé Champollion-Figeac, p. 316. Documents sur Dunois, publiés par M. Vattel de Viriville dans le Cabinet historique, t. III, p. 5.

[76] Lettres du 31 juillet 1422. Archives JJ 187, pièce 59.

[77] Lettres du 15 mai 1420. Archives de Grenoble, B 3223 bis, f. 171.

[78] A partir du mois de mai 1421, au retour de son voyage dans le Midi.

[79] Le 30 août 1418, il donnait quittance de 4.500 l. t. pour paiement du solde de la garnison de Morgue. Clairambault, 67, p. 5211. On voit par les comptes qu'il vendait souvent des chevaux au Dauphin. KK 53, f. 5 v°, 11, 12 v°, 79. Cf. dons de chevaux à Louvet, f. 16 v°, 78 v°, 79.

[80] Lettres du 13 février 1420. Pièces originales, 1763 : LOUVET.

[81] Archives de Grenoble, B 3044, f. 102.

[82] Lettres missives du 15 mai ; nouvelles lettres patentes du 24 juin ; lettres missives lies 24 et 28 juin, 20 août, etc. Archives de Grenoble, B 3044. Voir plus loin, chapitre X.

[83] A sa sortie de captivité (novembre 1420), le Dauphin lui donna un cheval du prix 800 livres ; en octobre 1421, don d'un cheval de 2.000 l. ; à la même époque, don d'un cheval de 5.200 l. (faible monnaie) ; en mars 1422, don d'un quatrième cheval. Archives, 53, f. 75 v°, 81 v°, 121 124 v°.

[84] Prêt de 6.000 livres, en date du 8 décembre 1420, remboursé par lettres du 4 septembre 1421 ; prêt de 1.000 fr. : lettres du 19 janvier 1422.

[85] Don, par lettres du 20 octobre 1420, de la châtellenie d'Ubrils, en Dauphiné (Archives de Grenoble, B 3223 f. 174) ; dons de chevaux de 400, 800 livres, un autre de 1.000 livres en 1420-21 (KK 53, f. 8 v°, 13, 118 v°). Guillaume d'Avaugour, comme bon nombre de familiers du prince, lui vendait aussi des chevaux (KK 53).

[86] Don de 10.000 livres, en considération de son mariage, par lettres du 13 août 1421 (Clairambault, 50, p. 3811). En septembre 1421, le Dauphin donna à sa femme une haquenée (KK 53, f. 78 v°).

[87] Voir le P. Anselme, t. VI, p. 397.

[88] Nous avons sur cette période quelques lettres missives, rares épaves de ces temps troublés, qu'on trouvera parmi les Pièces justificatives.

[89] Voir à ce sujet une note de M. Vallet, t. I, p. 335.

[90] Des détails sur la situation de La Rochelle, et sur le mouvement du 12 août, se trouvent dans les Registres du Parlement de Poitiers. Archives, X1a, 18, à la date des 13 et 20 décembre 1423 et 27 janvier 1424.

[91] Voir l'Histoire de La Rochelle (manuscrite), d'Amos Barbot, ms. fr. 18968 (Saint-Germain français 1060), à l'année 1422 ; Cousinot, Geste des Nobles, p. 187 ; Monstrelet, t. IV, p. 122 et 142 ; ms. fr., 23018, f. 431 (cité par M. Douët-d’Arcq, en note) ; Chronique d'Alençon, dans Du Chesne, 48 ; Raynal, Hist. du Berry, t. III, 1re partie, p. 9. Il parait résulter de certains de ces témoignages, que le Dauphin, bien que légèrement blessé, demeura tout assis, et ne fut point entraîné à l'étage inférieur Avec tous les assistants. Pourtant, la Chronique d'Alençon affirme que lui et grand nombre de chevaliers et escuyers fondirent et chairent en bas. En outre, nous lisons dans des lettres en faveur de la Sainte-Chapelle, en date du 28 juillet 1427 : .... Et une messe pour nous le jour que Dieu nous préserva à La Rochelle du peril en quoy fusmes, quand nous cheusmes d'une salle haulte en une basse, parce que le plancher fondi sur mous et plusieurs autres en nostre compaignie, dont les aucuns furent mors emprez nous. (Raynal, l. c.) Dans son Épître sur la réformation de son Royaume, adressée à Charles VII (Ms. fr. 2701, f. 87), Jean Jouvenel des Ursins s'exprime en ces termes : Je scay qu'il vous souvient bien du peril ou fustes à La Rochelle, quand le plancher Perdit souba vous, et vostre parent, nommé monseigneur de Preaulx (Pierre de Bourbon), qui estoit derrière vous, fut tué, et aultres blessez et navrez.

[92] Chronique d'Alençon, attribuée à Perceval de Gagny.

[93] Et fu depuis commune renommée que il moru dedens brief temps après ; et les aucuns maintenoient le contraire. Et fu très lonc temps qu'on ne savoit à Paris, ne ès marces de Picardie, ne en pluiseuis autres pais, se il estoit vivant ou non. Et dura celle esreur depuis ce temps jusques au mois de match ensuivant. Chronique anonyme, citée en note dans Monstrelet, t. IV, p. 132. Les habitants de Tournai envoyèrent, pendant le caresme, pour savoir la verité de l'estat dudit Daulphin. Cf. ms. fr. 23018, f. 436, et Archives législatives de la ville de Reims, par Varin, 2e partie, t. I, p. 618, note.

[94] Voir à ce sujet Arcère, Hist. de La Rochelle, t. I, p. 269-70.

[95] Histoire de Charles VII, par M. Vallet de Viriville, t. I, p. 422.

[96] M. Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. I, p. 159. — Le même historien appelle Charles (p. 465) l'enfant de la démence. Les faits, tels qu'il les expose, suffisent pour démentir ces appréciations fantaisistes, où le peintre a poussé au noir.

[97] M. Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. I, p. 361. Cf. p. 160.

[98] M. Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. I, p. 160.

[99] M. Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. I, p. 202.

[100] Alain Chartier, Quadrilogue invectif, dans l'édition des Œuvres donnée par André du Chesne, p. 439.

[101] Raoulet, à la suite de Jean Chartier, t. III, p. 174.

[102] Nous voyons nostre prince qui depuis quatre ans n'a cessé de voyager sans gueres de repos, écrivait Alain Chartier en 1422, peu avant l'avènement de Charles VII. Quadrilogue invectif, p. 446.

[103] Et n'a pas encore trois ans que j'ay veu en plusieurs hommes de tous estatz si enferme et petite foy, que les plusieurs en leur courage fuyoient l'adhesion de leur seigneur et l'aide de leur seigneurie, comme chose perdue et comme malade jugié à mort et habandonné sans remède, qui depuis ont reprins cueur et bonne fiance. Alain Chartier, l. c., p. 439.

[104] Pierre de Fenin, p. 195.

[105] Un écrivain, M. de Vidaillan, qui a publié de nos jours une Histoire des Conseils du Roi, faite d'après les actes, loue (t. I, p. 218) la sagesse précoce et l'heureuse activité du Dauphin.

[106] Pierre de Fenin, p. 195 (année 1422).

[107] Dans les hautes régions sociales auxquelles appartenait le Dauphin de France, la piété était particulièrement une tradition de famille et dynastique. L'observation des préceptes de la foi constituait, pour les princes, aux yeux des populations, non seulement un devoir, mais un titre de recommandation spéciale, etc. Vallet de Viriville, t. I, p. 257.

[108] Mist son fait et son bon droit ès mains de Dieu, lequel il servoit chaque jour moult devotement, dit Jean Raoulet, t. p. 174. — Devot à Dieu, dit Chastellain, t. II, p. 179, en parlant de cette période de sa vie.

[109] Charles, comme duc de Touraine, était chanoine-né de la collégiale de Loches.

[110] Extrait du Cartulaire de l'église collégiale de Loches, Collection de Dom Housseau, t. IX, n° 3829. Cf. Vallet, t. I, p. 137 : Charles, par la pente de sa nature, aussi bien que par habitude et par éducation, témoigna toujours un grand zèle pour ces prérogatives.

[111] Clairambault, 49, p. 3681.

[112] Gallia christiana, t. II, col. 732 ; Francisque Mendet, Histoire du Velay, t. IV, p. 324-26.

[113] Antoine le Roy, Histoire de Notre-Dame de Boulogne (1681), p. 60 ; l'abbé Haigneré, Histoire de Notre-Dame de Boulogne, p. 89.

[114] Ms. fr. 20902, pièce 57.

[115] Archives, KK 50, f. 9 v° — Par lettres du 1er avril 1423, deux cents livres tournois sont versées pour le mandé que icellui seigneur a fait aux pauvres le jeudi absolu derrenier passé. Voir f. 87 v°.

[116] Jouvenel, p. 390. Par lettres du 8 novembre 1422, Charles VII, en reconnaissance des grâces que Dieu lui a faites en le préservant de ses ennemis, et en mémoire de la victoire de Baugé, prend l'engagement, quand il aura recouvré la seigneurie de Thury, d'y fonder un couvent de Célestins, auquel seront attribués tous les revenus de la seigneurie. Archives, K 68, n° 40.

[117] Armoires de Baluze, 77, fol. 347 ; cf. Vallet, t. I, p. 259-60.

[118] Voir les lettres du 6 avril 1423, citées par M. S. Luce dans les Pièces diverses de son édition de la Chronique du Mont-Saint-Michel, t. I, p. 123, note.

[119] Vallet de Viriville, t. I, p. 351. Cf. Hist. du Mont Saint-Michel, composée en 1744 par un religieux de l'abbaye, ms. fr. 18949, p. 44. Le Héricher dit par erreur (Hist. du Mont Saint-Michel, p. 65) que le prince alla lui-même au Mont Saint-Michel. — Dans son Histoire de l'abbaye du Mont Saint-Michel, publiée par M. E. de Beaurepaire (Rouen, 1862-63, 2 vol. in-8°), D. Huynes rapporte (t. I, p. 198) que Charles obtint du pape des indulgences pour exciter les fidèles à venir en pèlerinage au Mont et contribuer par leurs aumônes à réparer les murailles.

[120] Cette fondation est rappelée dans des lettres en faveur de la Sainte-Chapelle, en date du 28 juillet 1425. Raynal, Histoire du Berry, t. III, 1re partie, p. 9.

[121] A Messire Estienne de Montmoret, prestre, aumosnier duAloy, auquel ledit seigneur a voulu et ordonné estre baillé par ledit trésorier la somme de six cens livres par an... pour par ledit aumosnier employer et convertir en aumosnes, par ses lettres du 20 novembre 1422. Godefroy, Historiens de Charles VI, p. 797. — A Maistre Gérard Machet, confesseur du Roy, auquel le Roy, par ses lettres données le 22 novembre 1422, a ordonné cinquante livres de pension par chascun mois, pour et en recompensacion des livraisons que ledit confesseur, à cause de son dit office, avoit accousturné de prendre en l'hostel dudit seigneur, tant pour sa personne que pour le chapelain qui chante la seconde messe du Roy. Godefroy, p. 797-98. — Cf. Archives, KK 50, f. 14 v° ; ms. fr. 6749, fol. 6 v°. — Je me garde bien de citer ici Henri Baude, comme l'a fait M. Vallet (t. I, p. 260, note 1) ; je m'attache scrupuleusement à ne prendre que des témoignages de cette période du règne.

[122] Dedens trois jours ensuivans, icellui Daulphin par traicté entra à Rouen atout sa puissance, et ala à cheval jusques à la grande église faire son oraison. Monstrelet, t. III, p. 179, année 1417.

[123] Pierre de Fenin, p. 195.

[124] Lettres du 24 septembre 1418. Clairambault, 61, p. 4079.

[125] Lettres du 26 mars 1419. Clairambault, 35, p. 2637.

[126] Simon de Phares nous apprend qu'il était amateur de science, et qu'il avait près de lui deuz medecins expers astrologiens, lesquieux il aima moult. Ms. fr. 1357, f. 152 v°.

[127] Lettres du 30 septembre 1418. Clairambault, 24, p. 1715.

[128] Ms. fr. 1357, f. 152 v°.

[129] Dans des lettres du 20 décembre 1419, nous trouvons, entre autres dons, celui de 41 livres à un canonnier, en la compensation du canon que avons eu de lui. Chartes royales, XIV, n. 2.

[130] La scène dut se passer le dimanche 31 mai, d'après l'itinéraire.

[131] Tous ces détails sont tirés des lettres de rémission données au comte au mois de juillet suivant. Archives, X1a 9190, f. 195 v°. Cf. X1a 19, au 12 juin 1422. — Il y eut, dans la même année, à Chinon et à Saumur, une querelle, avec effusion de sang, entre André de la Roche et Thibaut de la Haye, chevalier de l'entourage du Dauphin. Voir Archives, X1a 18, f. 185 et suivants, au 2 janvier 1430.

[132] M. Vallet de Viriville a consacré à cette période la plus grande partie du premier volume de son Histoire de Charles VII et de son époque (1862).