Tome II
De Crépy, après le départ de l’armée anglaise pour la Normandie, le roi Charles envoya le comte de Vendôme, les maréchaux de Rais et de Boussac arec leurs gens d’armes à Senlis. Les habitants lui donnèrent à savoir qu’ils désiraient les fleurs de lis[1]. La soumission de Compiègne était désormais assurée. Le roi somma les bourgeois de le recevoir ; le mercredi 18, les clés de la ville lui furent apportées ; le lendemain il fit son entrée[2]. Les attournés (c’était le nom des échevins)[3] lui présentèrent messire Guillaume de Flavy qu’ils avaient élu capitaine de leur ville comme le plus expérimenté et fidèle qui fût au pays. Ils demandaient que, suivant leur privilège, le roi, sur leur présentation, le confirmât et admît, mais le sire de la Trémouille prit pour soi la capitainerie de Compiègne, déléguant la lieutenance à messire Guillaume de Flavy, que néanmoins les habitants tinrent pour leur capitaine[4]. Le roi recouvrait une à une ses bonnes villes. Il enjoignit à ceux de Beauvais de le reconnaître pour leur seigneur. En voyant les fleurs de lis, que portaient les hérauts, les habitants crièrent : Vive Charles de France ! Le clergé chanta un Te Deum et il se fit de grandes réjouissances. Ceux qui refusèrent de reconnaître le roi Charles furent mis hors de la ville avec licence d’emporter leurs biens[5]. L’évêque et vidame de Beauvais, messire Pierre Cauchon, grand aumônier de France pour le roi Henri, négociateur d’importantes affaires ecclésiastiques, voyait à contrecœur sa ville retourner aux Français[6] ; c’était à son dommage, mais il ne put l’empêcher. Il n’ignorait pas qu’il devait pour une part cette disgrâce à la Pucelle des Armagnacs, qui faisait beaucoup pour son parti et avait la réputation de tout faire. Étant bon théologien, il soupçonna, sans doute, que le diable la conduisait et il lui en voulut tout le mal possible. A ce moment l’Artois, la Picardie, cette Bourgogne du Nord se débourgognisait. Si le roi Charles était allé à Saint-Quentin, à Corbie, à Amiens, à Abbeville et dans les autres fortes villes et châteaux de Picardie, il y aurait été reçu par la plupart des habitants comme leur souverain[7]. Mais pendant ce temps ses ennemis lui auraient repris ce qu’il venait de gagner dans le Valois et l’Ile-de-France. Entrée à Compiègne avec le roi, Jeanne logea à l’hôtel du Bœuf chez le procureur du roi. Elle couchait avec la femme du procureur, Marie Le Boucher qui était parente de Jacques Bouclier, trésorier d’Orléans[8]. Il lui tardait de marcher sur Paris, qu’elle était sûre de prendre, puisque ses Voit le lui avaient promis. On conte qu’au bout de deux ou trois jours, n’y pouvant tenir, elle appela le duc d’Alençon et lui dit : Mon beau duc, faites appareiller vos gens et ceux des autres capitaines, et qu’elle s’écria : Par mon martin ! je veux aller voir Paris de plus près que je ne l’ai vu[9]. Les choses n’ont pu se passer ainsi ; la Pucelle ne donnait pas d’ordres aux gens de guerre. La vérité c’est que le duc d’Alençon prenait congé du roi avec une belle compagnie de gens et que Jeanne devait l’accompagner. Elle était prête à monter à cheval quand le lundi 22 août un messager du comte d’Armagnac lui apporta une lettre qu’elle se fit lire[10]. Voici ce que contenait cette missive : A la très chière dame, je me recommande humblement à vous et vous supplie pour Dieu que, attendu la division qui en présent est en sainte Église universal, sur le fait des papes (car il i a trois contendans du papat : l’un demeure à Romme, qui se fait appeler Martin quiet, auquel tous les rois chrestiens obéissent ; l’autre demeure à Paniscole, au royaume de Valence, lequel se fait appeller pape Climent VIIe ; le tiers en ne sect où il demeure, se non seulement le cardinal de Saint-Estienne et peu de gens avec lui, lequel se fait nommer pape Benoist XIIIIe ; le premier qui se dit pape Martin, fut esleu à Constance par le consentement de toutes les nations des chrestiens ; celui qui se fait appeler Climent fut esleu à Paniscole, après la mort du pape Benoist XIIIe, par trois de ses cardinaulx ; le tiers, qui se nomme pape Benoist XIIIIe, à Paniscole fut esleu secrètement, mesmes par le cardinal de Saint-Estienne) : Veuillez supplier à Nostre Seigneur Jhésuscrit que, par sa miséricorde infinite, nous veulle par vous déclarier, qui est des trois dessusdiz, vray pape, et auquel plaira que on obéisse de ci en avant, ou à cellui qui se dit Martin, ou à cellui qui se dit Climent, ou à cellui qui se dit Benoist ; et auquel nous devons croire, si secrètement ou par aucune dissimulation ou publique manifeste ; car nous serons tous pretz de faire le vouloir et plaisir de Nostre Seigneur Jhésuscrit. Le tout vostre conte D’ARMIGNAC[11]. C’était un grand vassal de la Couronne qui écrivait de la sorte, appelait Jeanne sa très chère dame et se recommandait humblement à elle, non à la vérité en s’abaissant soi-même, mais comme qui dirait aujourd’hui avec affabilité. Elle n’avait jamais vu ce seigneur, et sans doute elle n’avait jamais entendu parler de lui. Fils du connétable de France, tué en 1418, l’homme le plus cruel du royaume, Jean IV, alors âgé de trente-trois ou trente-quatre ans, possédait l’Armagnac noir et l’Armagnac blanc, le pays des Quatre-Vallées, les comtés de Pardiac, de Fesenzac, l’Astarac, la Lomagne, l’Ile-Jourdain ; il était le plus puissant seigneur de Gascogne après le comte de Foix[12]. Tandis que son nom demeurait aux partisans du roi Charles et qu’on disait les Armagnacs pour désigner ceux qui étaient contraires aux Anglais et aux Bourguignons, Jean IV n’était lui-même ni Français ni Anglais, mais seulement Gascon. Il se disait conne par la grâce de Dieu, quitte à se reconnaître vassal du roi Charles pour recevoir des dons de son suzerain, qui pouvait n’avoir pas toujours de quoi payer ses houseaux, mais à qui ses grands vassaux coûtaient fort cher. Cependant Jean IV ménageait les Anglais, protégeait un aventurier à la solde du Régent et donnait des emplois dans sa maison à des gens qui portaient la croix rouge. I1 était aussi féroce et perfide qu’aucun des siens. S’étant, contre tout droit, emparé du maréchal de Séverac, il lui extorqua la cession de ses biens et le fit ensuite étrangler[13]. Ce meurtre était alors tout frais. Voilà le fils docile de la sainte Église qui montrait tant de zèle à découvrir son vrai père spirituel. Il semble bien pourtant qu’il eût déjà son opinion faite à ce sujet et qu’il sût à quoi s’en tenir sur ce qu’il demandait. En réalité, le long schisme, qui avait déchiré la chrétienté, n’existait plus depuis douze ans, depuis que le conclave, ouvert le 8 novembre 1417, à Constance, dans la Maison des Marchands, avait proclamé pape, le 11 du même mois, jour de la Saint-Martin, le cardinal diacre Otto Colonna, qui prit le nom de Martin V. Martin V portait dans la Ville Éternelle la tiare sur laquelle Lorenzo Ghiberti avait ciselé huit figurines d’or[14], et l’habile Romain s’était fait reconnaître par l’Angleterre et même par la France, qui renonçait désormais à l’espoir d’avoir un pape français. Et si le conseil de Charles VII était en désaccord avec Martin V sur la question du concile, un édit de 1425 restituait au pape de Rome la jouissance de tous ses droits dans le royaume ; Martin V était vrai pape et seul pape. Cependant, Alphonse d’Aragon, fort irrité de ce que Martin V soutenait contre lui les droits de Louis d’Anjou sur le royaume de Naples, imagina d’opposer un pape de sa façon au pape de Rome. Il avait précisément sous la main un chanoine qui se disait pape ; et voici sur quel fondement : l’antipape Benoît XIII, réfugié à Peñiscola, avait, en mourant, nommé quatre cardinaux, dont trois désignèrent à sa place un chanoine de Barcelone, Gilles Muñoz, qui prit le nom de Clément VII. C’est ce Clément, emprisonné dans le château de Peñiscola, sur une morne pointe de terre, battue de trois côtés par la mer, que le roi d’Aragon avait imaginé d’opposer à Martin V[15]. Le pape Martin excommunia l’Aragonais, puis il ouvrit des négociations avec lui. Le comte d’Armagnac suivit le parti du roi d’Aragon. Il faisait venir de Peñiscola ; pour baptiser ses enfants, de l’eau bénite par Benoît XIII. Il fut pareillement frappé d’excommunication. Ces foudres étaient tombées sur lui en cette même année 1429, et depuis titi certain nombre de mois Jean IV était privé de la participation aux sacrements et aux prières publiques, ce qui ne laissait pas de lui causer des difficultés temporelles, sans compter qu’il avait peut-être peur du diable. D’ailleurs la situation devenait intenable pour lui. Son grand allié, le roi Alphonse, cédait et sommait lui-même Clément VIII de se démettre. Quand il adressait sa requête à la Pucelle de France, l’Armagnac ne songeait plus évidemment qu’à quitter l’obéissance d’un antipape manqué, renonçant lui-même à la tiare, ou bien près d’y renoncer ; car Clément VIII se démit à Peñiscola le 26 juillet. Ce ne peut être longtemps avant cette date que le comte dicta sa lettre, et il est possible que ce soit après. Dans tous les cas, en la dictant, il savait à quoi s’en tenir sur le souverain pontificat de Clément VIII. Quant au troisième pape qu’il mentionnait dans sa missive, c’était un Benoît XIV, dont il n’avait pas de nouvelles et qui aussi ne faisait pas de bruit. Son élection au saint-siège avait eu cela de singulier qu’un seul cardinal y avait procédé. Benoît XIV tenait tous ses droits d’un cardinal créé par l’antipape Benoît XIII dans sa promotion de 1409, Jean Barrère, Français, bachelier ès lois, prêtre, cardinal du titre de Saint-Etienne in Cœlio monte. Ce n’est pas à l’obédience de Benoît XIV que l’Armagnac pensait se ranger ; évidemment, il avait hâte de faire sa soumission à Martin V. On ne voit pas bien, dès lors, pourquoi il demandait à Jeanne de lui désigner le vrai pape. Sans doute, c’était l’usage, en ce temps-là, de consulter sur toutes choses les saintes filles que Dieu favorisait de révélations. Telle se montrait la Pucelle et sa renommée de prophétesse s’était, en peu de jours, partout répandue. Elle découvrait les choses cachées, elle annonçait l’avenir. On se rappelle ce capitoul de Toulouse qui, trois semaines environ après la délivrance d’Orléans, fut d’avis de demander à la Pucelle un remède à l’altération des monnaies. Bonne de Milan, mariée à un pauvre gentilhomme de la reine Ysabeau sa cousine, lui présentait une requête à fin d’être remise dans le duché qu’elle prétendait tenir des Visconti[16]. Il était tout aussi expédient de l’interroger sur le pape et l’antipape. La difficulté est, en cette affaire, de découvrir les raisons qu’avait le comte d’Armagnac de consulter la sainte fille sur un point dont il parait bien qu’il était suffisamment éclairci. Voici ce qui semble le plus probable. Disposé à reconnaître le pape Martin V, Jean IV cherchait les moyens de donner à cette soumission un tour honorable. C’est alors que l’idée lui vint de se faire dicter sa conduite par Jésus-Christ lui-même parlant en une sainte Pucelle. Encore fallait-il que la révélation s’accordât avec ses calculs. Sa lettre y tâche clairement. Il prend soin dans cette lettre de préparer lui-même à Jeanne et, par conséquent, à Dieu, la réponse convenable. Il y marque avec force que Martin V, qui vient de l’excommunier, fut élu à Constance par le consentement de toutes les nations chrétiennes, qu’il demeure à Rome et qu’il est obéi de tous les rois chrétiens. Il- signale au contraire les circonstances qui infirment l’élection de Clément VIII, due à trois cardinaux seulement, et l’élection plus ridicule encore de ce Benoît, dont un seul cardinal composa tout le conclave[17]. Sur ce seul exposé comment hésiter à reconnaître que le pape Martin est le vrai pape ? Cette malice fut perdue ; Jeanne n’y vit rien. La lettre du comte d’Armagnac, qu’elle se fit lire en montant à cheval, ne dut pas lui paraître claire[18]. Les noms de Benoît, de Clément et de Martin lui étaient inconnus. Mesdames sainte Catherine et sainte Marguerite, qui conversaient avec elle à tout moment, ne lui firent pas de révélations sur le pape. Elles ne lui parlaient guère que du royaume de France, et Jeanne avait d’ordinaire la prudence de ne prophétiser que sur le fait de la guerre. C’est ce qu’un clerc allemand signala comme une chose singulière et notable[19]. Mais cette fois, bien que pressée par le temps, elle consentit à répondre à Jean IV pour soutenir sa renommée prophétique ou parce que ce nom d’Armagnac était une grande recommandation pour elle. Elle lui manda qu’à cette heure elle ne lui pouvait désigner le vrai pape, mais qu’elle lui dirait plus tard auquel des trois il faudrait croire, selon ce qu’elle trouverait d’elle-même, par le conseil de Dieu. Enfin, elle faisait un peu comme les devineresses qui remettent leur oracle au lendemain. JHESUS † MARIA Conte d’Armignac, mon très chier et bon ami, Jehanne la Pucelle vous fait savoir que vostre message est venu par devers moy, lequel m’a dit que l’aviès envoié pardeçà pour savoir de moy auquel des trois papes, que mandez par mémoire, vous devriés croire. De laquelle chose ne vous puis bonnement faire savoir au vray pour le présent, jusques à ce que je soye à Paris ou ailleurs, à requoy ; car je suis pour le présent trop empeschiée au fait de la guerre : mais quand vous sarez que je seray à Paris, envoiez ung message par devers moy, et je vous feray savoir tout au vray auquel vous devrez croire, et que en aray sceu par le conseil de mon droiturier et souverain seigneur, le roy de tout le inonde, et que en aurez à faire, à tout mon pouvoir. A Dieu vous commans ; Dieu soit garde de vous. Escript à Compiengne, le XXIIe jour d’aoust[20]. Certes, avant de faire cette réponse, Jeanne ne consulta ni le bon frère Pasquerel, ni le bon frère Richard, ni aucun des religieux qui se tenaient en sa compagnie ; ils lui auraient appris que le vrai pape était le pape de Rome, Martin V. Peut-être aussi lui auraient-ils représenté qu’elle faisait peu de cas de l’autorité de l’Église, en s’en rapportant à une révélation de Dieu sur le pape et les antipapes ; Dieu, sans doute, lui auraient-ils dit, confie parfois à de saintes personnes des secrets sur son Église, mais il est téméraire de s’attendre à recevoir un si rare privilège. Jeanne échangea quelques propos avec le messager qui lui avait apporté la missive ; l’entretien fut court. Ce messager n’était pas en sûreté dans la ville, non que les soldats voulussent lui faire parer les crimes et les félonies de son maître, mais le sire de la Trémouille était à Compiègne ; il savait que le comte Jean IV, allié, pour lors, au connétable de Richemont, méditait quelque entreprise contre lui. La Trémouille n’était pas aussi méchant que le comte d’Armagnac ; toutefois, il s’en fallut de peu que le pauvre messager ne fût jeté dans l’Oise[21]. Le lendemain, mardi 23 août, la Pucelle et le duc d’Alençon prirent congé du roi et partirent de Compiègne avec une belle compagnie de gens. Avant de marcher sur Saint-Denys en France, ils allèrent à Senlis rallier partie des hommes d’armes que le roi y avait envoyés[22]. La Pucelle y chevaucha parmi ses religieux, à sa coutume. Le bois frère Richard, qui annonçait la fin du monde, s’était mis de la procession. Il avait, ce semble, pris le pas sur les autres et même sur frère Pasquerel, le chapelain. C’est à lui que la Pucelle se confessa sous les murs de Senlis. En ce même lieu, elle communia deux jours de suite avec les ducs de Clermont et d’Alençon[23]. Assurément elle était entre les mains de moines qui faisaient un très fréquent usage de l’Eucharistie. Le seigneur évêque de Senlis se nommait Jean Fouquerel. Il avait été jusque-là du parti des Anglais et tout à la dévotion du seigneur évêque de Beauvais. Homme de précaution, Jean Fouquerel, à l’approche de l’armée royale, s’en était allé à Paris cacher une grosse somme d’argent. Il tenait à son bien. Quelqu’un de Post lui prit sa haquenée pour la donner à la Pucelle. Elle lui fut payée deux cents saluts d’or en une assignation sur le receveur de Senlis et sur le grainetier de la ville. Le seigneur évêque ne l’entendit pas ainsi et réclama sa bête. La Pucelle, ayant appris qu’il était malcontent, lui fit écrire qu’il pouvait ravoir sa haquenée, s’il et1 avait envie, qu’elle ne la voulait point, ne la trouvant pas assez endurante pour des gens d’armes. On envoya le cheval au sire de La Trémouille en l’avisant de le faire remettre au seigneur évêque, qui ne le reçut jamais[24]. Quant à l’assignation sur le receveur et sur le grainetier, il se peut qu’elle ne valût rien, et probablement révérend père en Dieu Jean Fouquerel n’eut ni la bête ni l’argent. Jeanne n’était point fautive, et pourtant le seigneur évêque de Beauvais et les clercs de l’Université devaient bientôt lui montrer quel sacrilège c’est que de toucher à une haquenée d’Église[25]. Saint-Denys s’élevait au nord de Paris, à deux lieues environ des murs de la grande ville. L’armée du duc d’Alençon y arriva le 26 août, et y entra sans résistance, bien que la ville fût forte[26]. Ce lieu était célèbre par son abbaye, très antique, très riche et très illustre. Voici de quelle manière on en rapportait la fondation : Dagobert, roi des Français conçut dès son enfance une vive dévotion pour saint Denys. Et aussitôt qu’il craignait la colère de son père, le roi Clotaire, il se réfugiait dans l’église du saint martyr. Lorsqu’il fut mort, un homme pieux eut un songe dans lequel il vit Dagobert cité au tribunal de Dieu ; un grand nombre de saints l’accusaient d’avoir dépouillé leurs églises ; et les démons allaient l’entraîner en enfer lorsque monseigneur saint Denys survint et, par son intercession, l’âme du roi fut délivrée et échappa au châtiment. Le fait était tenu pour véritable, et l’on supposait que l’âme du roi revint animer son corps et qu’il fit pénitence[27]. Quand la Pucelle occupa Saint-Denys avec l’armée, les trois portails, les parapets crénelés, la tour de l’église abbatiale, élevés par l’abbé Suger, dataient déjà de trois siècles. C’est là que les rois de France avaient leur sépulture ; c’est là qu’ils prenaient l’oriflamme. Quatorze ans en ça, le feu roi Charles l’y était venu prendre, et nul depuis lors ne l’avait levée[28] On rapportait beaucoup de merveilles touchant cet étendard royal, et il fallait que La Pucelle en eût entendu quelque chose, si, comme on l’a dit, elle avait, lors de sa venue en France, donné au dauphin Charles le surnom d’oriflamme, en gage et promesse de Victoire[29]. On conservait à Saint-Denys le cœur du connétable Bertrand Du Guesclin[30] Le bruit d’une si haute renommée était venu aux oreilles de Jeanne ; elle avait offert le vin au fils aîné de madame de Laval et envoyé à son aïeule, qui avait été la seconde femme de sire Bertrand, un petit anneau d’or, en s’excusant du peu, et par révérence, pour la veuve d’un si raillant homme[31]. Les religieux de Saint-Denys conservaient de précieuses reliques, notamment un morceau du bois de la vraie croit, les langes de l’enfant Jésus, un tesson d’une cruche où l’eau s’était changée en vin aux noces de Cana, une barre du gril de saint Laurent, le menton de sainte Madeleine, une tasse de bois de tamaris dont saint Louis s’était servi pour se préserver du mal de rate. On y montrait aussi le chef de monseigneur saint Denys. Il est vrai qu’on le montrait en même temps dans l’église cathédrale de Paris ; et le chancelier Jean Gerson traitant, peu de jours avant sa mort, de Jeanne la Pucelle, disait qu’il en était d’elle comme du chef de monseigneur saint Denys, lequel était objet d’édification et non point objet de foi, et néanmoins devait être vénéré pareillement dans l’un et l’autre lieu pour que l’édification ne se tournât point en scandale[32]. Tout dans cette abbaye proclamait la dignité, les prérogatives et l’excellence de la maison de France. Jeanne dut admirer bien joyeusement les insignes, les symboles, les images de la royauté des Lis amassés en ce lieu[33], si toutefois ses yeux, remplis de visions célestes, pouvaient encore apercevoir les choses sensibles, et si les Voix qui parlaient à ses oreilles lui laissaient un moment de répit. Monseigneur saint Denys était un grand saint, puisqu’on ne doutait pas que ce ne fût saint Denys l’Aréopagite lui-même[34], mais depuis qu’il avait laissé prendre son abbaye, on ne l’invoquait plus comme le patron des rois de France ; les partisans du dauphin l’avaient remplacé par le bienheureux archange Michel, dont l’abbaye, près de la cité d’Avranches, résistait victorieusement aux Anglais. C’était saint Michel, non saint Denys, qui avait apparu à Jeanne dans le courtil de Domremy ; mais elle savait que saint Denys était le cri de France[35]. Dans cette riche abbaye, ruinée par la guerre, les religieux, affranchis de toute discipline, menaient une existence misérable et déréglée[36]. Armagnacs et Bourguignons venaient les uns après les autres piller et ravager tout alentour villages et cultures et ne laissaient rien de ce qui se pouvait emporter. La foire du Lendit, une des plus belles de la chrétienté, se tenait à Saint-Denys. Les marchands n’y venaient plus. Au Lendit de l’an 1418 on n’avait vu que trois échoppes de souliers de Brabant dans la grande rue de Saint-Denys, près des Filles-Dieu ; puis il n’y avait plus eu de foire jusqu’en l’an 1426, où s’était tenue la dernière[37]. A la nouvelle que les Armagnacs s’approchaient de Troyes, les paysans avaient scié leurs blés avant qu’ils fussent mûrs et les avaient apportés à Paris. Quand ils entrèrent à Saint-Denys, les gens d’armes du duc d’Alençon trouvèrent la ville abandonnée. Les gros bourgeois s’étaient réfugiés à Paris[38]. Il y restait encore quelques pauvres familles. La Pucelle y tint deux nouveau-nés sur les fonts[39]. Instruits des baptêmes de Saint-Denys, ses ennemis l’accusèrent d’avoir fait allumer des cierges qu’elle penchait sur la tête des nouveau-nés pour lire leur destinée dans la cire fondue. Ce n’était pas la première fois, paraît-il, qu’elle se livrait à de telles pratiques. Quand elle venait dans une ville, de petits enfants, disait-on, lui offraient à genoux des cierges qu’elle recevait comme une oblation agréable. Puis elle faisait tomber sur la tête de ces innocents trois gouttes de cire ardente, annonçant que, par la vertu d’un tel acte, ils ne pouvaient plus être que bons. Les clercs bourguignons discernaient en ces œuvres idolâtrie et sortilège impliqué d’hérésie[40]. A Saint-Denys encore, elle distribua des bannières aux gens d’armes ; les clercs du parti anglais la soupçonnaient véhémentement de mettre des charmes sur ces bannières, et comme il n’y avait personne alors qui ne crut aux enchantements, on n’attirait pas sur soi sans danger un pareil soupçon[41]. La Pucelle et le duc d’Alençon ne perdirent pas de temps. Dès leur arrivée à Saint-Denys ils allèrent escarmoucher aux portes de Paris. Ils faisaient de ces escarmouches deux et trois fois par jour, notamment au moulin à vent de la porte Saint-Denys et au village de la Chapelle. Chose à peine croyable et pourtant certaine, car elle est attestée par un des seigneurs de l’armée, dans ce pays tant de fois pillé et ravagé, les gens de guerre trouvaient encore quelque bien à prendre. Tous les jours y avait butin, dit messire Jean de Bueil[42]. Par révérence pour le septième commandement de Dieu, la Pucelle défendait aux gens de sa compagnie de faire le moindre vol ; si on lui offrait des vivres qu’elle sût acquis par pillerie, jamais elle n’en voulait user. En fait, tout comme les autres, elle ne vivait que de maraude ; mais elle l’ignorait. Un jour, un Écossais lui donnant à entendre qu’elle venait de manger d’un veau dérobé, elle se fâcha contre cet homme et voulut le battre : les saintes ont de ces emportements[43]. On a dit que Jeanne observait les murs de Paris et cherchait le meilleur endroit où donner l’assaut[44]. La vérité est que sur ce point comme sur tous les autres elle s’en rapportait à ses Voix. Au reste, elle passait de beaucoup tous les hommes de guerre en courage et bonne volonté. De Saint-Denys, elle envoyait au roi message sur message, le pressant de venir prendre Paris[45]. Mais le roi et son conseil négociaient à Compiègne avec les ambassadeurs du duc de Bourgogne, savoir : Jean de Luxembourg, seigneur de Beaurevoir, Hugues de Cayeux, évêque d’Arras, David de Brimeu, et le seigneur de Charny[46]. La trêve de quinze jours, que nous ne connaissons que par ce qu’en a écrit la Pucelle aux habitants de Reims, était expirée. Selon Jeanne, le duc de Bourgogne s’était engagé à rendre la ville au roi de France, le quinzième jour[47]. S’il avait pris c’et engagement, c’était à des conditions que nous ne connaissons pas, et dont nous ne saurions dire si elles ont été remplies ou non. La Pucelle ne se fiait pas à cette promesse, et elle avait bien raison ; mais elle ne savait pas tout, et le jour même où elle se plaignait de cette trêve aux habitants de Reines, le duc Philippe recevait des mains du Régent le gouvernement de Paris et se trouvait dès lors en droit de disposer en quelque manière de cette ville[48]. Le duc Philippe ne pouvait voir en face Charles de Valois qui avait été sur le pont de Montereau au moment du meurtre, mais il détestait les Anglais et les souhaitait au diable ou dans leur île. Il avait trop de vins à récolter et de laines à tisser pour ne pas désirer la paix. Il ne voulait pas être roi de France ; on pouvait traiter avec lui, encore qu’il fût avide et dissimulé. Toutefois le quinzième jour était passé et la ville de Paris demeurait aux Anglais et aux Bourguignons non amis, mais alliés. A la date du 28 août, une trêve fut conclue, qui devait courir jusqu’à la Noël et comprenait tout le pays situé au nord de la Seine, de Nogent à Harfleur, excepté les villes ayant passage sur le fleuve. En ce qui concernait la ville de Paris, il était dit expressément Notre Cousin de Bourgogne pourra, durant la trêve, s’employer, lui et ses gens, à la défense de la ville et à résister à ceux qui voudraient y faire la guerre ou porter dommage[49]. Le chancelier Regnault de Chartres, le sire de la Trémouille, Christophe d’Harcourt, le Bâtard d’Orléans, l’évêque de Séez, et aussi de jeunes seigneurs fort portés pour la guerre, tels que les comtes de Clermont et de Vendôme et le duc de Bar, tous les conseillers du roi et tous les princes du sang royal qui conclurent cette trêve et signèrent cet article, donnaient en apparence à leur ennemi des verges pour les battre et semblaient s’interdire toute entreprise sur Paris. Mais ces gens-là* n’étaient pas tous des sots ; le Bâtard d’Orléans avait l’esprit fin et le seigneur archevêque de Reims était tout autre chose qu’un Olibrius. Ils avaient bien sans doute leur idée, en reconnaissant au duc de Bourgogne des droits sur Paris. Le duc Philippe, nous le savons, était, depuis le 13 août, gouverneur de la grand’ville. Le Régent la lui avait cédée, pensant que Bourgogne pour contenir les Parisiens vaudrait mieux qu’Angleterre qui était parmi eux faible en nombre et haïe comme étrangère. Quel avantage le roi Charles trouvait-il à reconnaître les droits de son cousin de Bourgogne sur Paris ? Nous ne le voyons pas bien clairement ; mais en fait, cette trêve n’était ni meilleure ni pire que les autres. Certes elle ne donnait pas Paris au roi ; mais elle n’empêchait pas non plus le roi de le prendre. Est-ce que les trêves empêchaient jamais les Armagnacs et les Bourguignons de se battre quand ils en avaient envie ? Est-ce que de ces trêves sempiternelles une seule fut gardée[50] ? Le roi, après avoir signé celle-là, s’avança jusqu’à Senlis. Le duc d’Alençon par deux fois l’y vint trouver. Charles arriva le mercredi 7 septembre à Saint-Denys[51]. |
[1] Chronique de la Pucelle, p. 328. — Journal du siège, p. 18. — Jean Chartier, Chronique, t. I, p. 106. — Perceval de Cagny, pp. 163-164. — Morosini, pp. 212-213. — Flammermont, Senlis pendant la seconde période de la guerre cent ans, dans Mémoires de la Société de l’Histoire de Paris, t. V, 1878, p. 241.
[2] Perceval de Cagny, p. 164. — Monstrelet, p. 352. — De l’Épinois, Notes extraites des Archives communales de Compiègne, pp. 483-484. — A. Sorel, Séjours de Jeanne d’Arc à Compiègne, maisons où elle a logé en 1429 et 1430, Paris, 1889, in-8° de 20 pages.
[3] La Curne, au mot : Attournés. — Procès, t. V, p. 174.
[4] Chronique de la Pucelle, p. 331. — Jean Chartier, Chronique, t. I, p. 106. — A. Sorel, La prise de Jeanne d’Arc devant Compiègne, Paris, 1889, in-8°, pp. 117-118. — Duc de la Trémoïlle, Les La Trémoïlle pendant cinq siècles, Nantes, 1890, in-4°, t. I, pp. 185 et 212. — P. Champion, Guillaume de Flavy, capitaine de Compiègne, Paris, 1906, in-8°, Pièce justificative, VIII, p. 137.
[5] Chronique de la Pucelle, p. 327. — Journal du siège, p. 118. — Jean Chartier, Chronique, t. I, p. 106. — Monstrelet, t. IV, pp. 353-354. — Morosini, t. III, pp. 214-215.
[6] A. Sarrazin, Pierre Cauchon, juge de Jeanne d’Arc, Paris, 1901, in-8°, pp. 49 et suiv.
[7] Monstrelet, t. IV, p. 354.
[8] A. Sorel, Séjours de Jeanne d’Arc à Compiègne, p. 6.
[9] Perceval de Cagny, pp. 164-165. — Chronique de Tournai, t. III du Recueil des chroniques de Flandre, éd. de Smedt, p. 414.
[10] Procès, t. I, pp. 82-83.
[11] Procès, t. I, pp. 245-246.
[12] A. Longnon, Les limites de la France et l’étendue de la domination anglaise à l’époque de la mission de Jeanne d’Arc, Paris, 1875, in-8°. — Vallet de Viriville, dans Nouvelle Biographie générale, III, col. 255-257.
[13] Chronique de Mathieu d’Escouchy, t. I, p. 68 et Preuves, pp. 126, 128, 139-140. — Dom Vaissette, Histoire générale du Languedoc, t. IV, p. 469-470. — De Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. II, p. 151. — Vallet de Viriville, dans Nouvelle Biographie générale, 1861, t. III, pp. 255-257. — Le P. Ayroles, La vierge guerrière, p. 66.
[14] Annales juris pontificis (1872-1875), VII, 385. — E. Muntz, La tiare pontificale du VIIIe au XVIe siècle, dans Mém. Acad. Inscript. et Belles-Lettres, t. XXVI, I, pp. 235-324, fig. ; Les Arts à la cour des papes pendant les XVe et XVIe siècles, dans Bibl. des Écoles françaises d’Athènes et Rome, t. IV.
[15] Baluze, Vitæ paparum Avenionensium, 1693, I, pp. 1182 et suiv. — Fabricius, Bibliotheca medii œvi, 1734, I, p. 1109.
[16] D’après Le Maire, Histoire et antiquités de la ville et duché d’Orléans, p. 197, la suscription de cette supplique était ainsi conçue : A très honorée et très devote Pucelle Jeanne, envoyée du Roi des cieux pour la réparation et extirpation des Anglais tyrannisans la France. — Procès, t. V, p. 253. — Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, p. 131.
[17] Noël Valois, La France et le Grand Schisme d’Occident, t. IV (1902), in-8°, passim.
[18] Procès, t. I, p. 82.
[19] Procès, t. III, pp. 466-467.
[20] Procès, t. I, pp. 243-246.
[21] Ibid., t. I, p. 83.
[22] Perceval de Cagny, p. 165. — Chronique de la Pucelle, p. 331. — Jean Chartier, Chronique, t. I, p. 106, — Morosini, t. III, pp. 212-213. — Compte de Hémon Raguier, dans Procès, t. IV, p. 24.
[23] Procès, t. II, p. 450.
[24] Procès, t. I, p. 104. — Extraits du 13e compte de Hémon Raguier, dans Procès, t. V, p. 267. — E. Dupuis, Jean Fouquerel, évêque de Senlis, dans Mémoires du Comité archéologique de Senlis, 1875, t. I, p. 93. — Vatin, Combat sous Senlis entre Charles VII et les Anglais, dans Comité archéologique de Senlis, Comptes rendus et Mémoires, 1866, pp. 41, 54.
[25] Procès, t. I, p. 264.
[26] Perceval de Cagny, p. 16 — Le 25, selon le Journal d’un bourgeois de Paris, p. 243.
[27] J. Doublet, Histoire de l’abbaye de Saint-Denys en France, contenant les antiquités d’icelle, les fondations, prérogatives et privilèges, Paris, 1625, 2 vol. in-4°, t. I, chap. XX et XXIV. — Des Rues, Les antiquités, fondations et singularités des plus célèbres villes, pp. 84 et 85.
[28] J. Doublet, Histoire de l’abbaye de Saint-Denys, t. I, chap. XXXI, XXXIV.
[29] Thomassin, Registre Delphinal, dans Procès, t. IV, p. 304. — Voyez le Glossaire de Du Cange, au mot : Auriflamme.
[30] J. Doublet, Histoire de l’abbaye de Saint-Denys, t. I, chap. XXII. — D. Michel Félibien, Histoire de l’abbaye royale de Saint-Denys en France, Paris, in-folio, 1706, pp. 229, 320. — Vallot de Viriville, Notice du manuscrit de P. Cochon, à la suite de la Chronique de la Pucelle, p. 360. — Chronique de Du Guesclin, éd. Francisque-Michel, pp. 452 et suiv.
[31] Procès, t. V, pp. 107, 109.
[32] D. M. Félibien, op. cit., chap. II, pp. 528 et suiv., planches. — J. Doublet, op. cit., t. I, chap. XLIII, XLVI. — Procès, t. III, p. 301. — Gallia Christiana, t. VII, col. 142.
[33] Religieux de Saint-Denis, pp. 154, 156, 226.
[34] Estienne Binet, La vie apostolique de saint Denys l’Aréopagite, patron et apostre de la France, Paris, 1624, in-12. — J. Doublet, Histoire chronologique pour la vérité de Saint Denys l’Aréopagite, apôtre de France et premier évêque de Paris, Paris, 1646, in-4°, et Histoire de l’abbaye de Saint-Denys en France, p. 95. — J. Havet, Les origines de Saint-Denis, dans les Questions mérovingiennes.
[35] Procès, t. I, p. 179.
[36] Journal d’un bourgeois de Paris, p. 179, note 5.
[37] Ibid., pp. 101, 209, note 1.
[38] Ibid., pp. 241-242. — Monstrelet, t. IV, p. 354.
[39] Procès, t. I, p. 103.
[40] Procès, t. I, p. 304. — Noël Valois, Un nouveau témoignage sur Jeanne d’Arc, dans Annuaire-bulletin de la Société de l’Histoire de France, Paris, 1907, in-8°, tirage à part, pp. 17-18.
[41] Procès, t. I, p. 236.
[42] Le Jouvencel, t. II, p. 281.
[43] Procès, t. III, p. 81.
[44] Perceval de Cagny, p. 166.
[45] Ibid., p. 166.
[46] Vallet de Viriville, Histoire de Charles VII, t. II, p. 112. — De Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. II, pp. 404-408. — Morosini, t. III, p. 192 ; t. IV, annexe XVIII.
[47] Procès, t. V, p. 140.
[48] Chronique de la Pucelle, p. 332. — Jean Chartier, Chronique, t. I, p. 106. — P. Cochon, p. 457. — Perceval de Cagny, p. 165.
[49] Monstrelet, t. IV, pp. 352, 353. — Journal d’un bourgeois de Paris, pp. 247-248. — D. Félibien, Histoire de Paris, t. II, p. 813 et preuves, t. IV, p. 591. — Morosini, t. III, pp. 208, 209, 224, note 2 ; t. IV, annexe XVIII, pp. 343-344.
[50] De Beaucourt, Histoire de Charles VII, t. II, chap. VII : La diplomatie de Charles VII jusqu’au traité d’Arras.
[51] Perceval de Cagny, p. 166.