I A l'époque de Hugues Capet, l'Eglise de France avait manifesté certaines velléités d'indépendance à l'égard du Saint-Siège : au concile de Saint-Basle de Verzy (991) et aux conciles qui l'avaient suivi, les évêques avaient fait bon marché de l'appel à Rome pour les sentences rendues aux divers conciles[1]. La fin du XIe siècle marque au contraire un effort des papes pour ressaisir l'autorité qui leur avait été contestée. La théorie de la suprématie romaine ressort de toutes les bulles de Grégoire VII et d'Urbain II. Dans une lettre à l'archevêque de Tours, Raoul (5 avril 1094), Urbain II formule ainsi la doctrine[2] : Les affaires importantes des églises particulières doivent être jugées par l'autorité apostolique ; les canons l'ordonnent. Cette doctrine, les évêques français l'ont acceptée bon gré mal gré, les uns, comme Yves de Chartres[3], sans la contester sérieusement, les autres, comme Raoul, archevêque de Tours, en cherchant à éviter autant que possible les interventions romaines ; c'est ce Raoul qui, en 1078, conseillait à l'évêque du Mans, Ernaud, de régler lui-même une affaire de simonie afin d'éviter de s'adresser à Rome, ce qui, disait-il, est coûteux et toujours périlleux si le pape n'est pas satisfait[4]. Les papes sont, il est vrai, difficiles à contenter : dans une bulle de 1078 adressée aux archevêques, évêques et abbés de Gaule, Grégoire VII se plaint vivement de ne pas être assez soutenu par eux. Que vous dirai-je, s'écrie le pape, sinon qu'en faisant preuve de cette molle négligence, en refusant par peur à votre mère toute consolation dans de si cruelles épreuves, vous vous montrez indignes du nom de fils et étrangers à tout esprit de charité ![5] Ainsi la théorie est claire : la papauté affirme sa suprématie et sa primauté sur l'Église de France ; par une série de moyens ingénieux, elle va s'attacher à rendre impossible toute tentative d'indépendance. II Au xe siècle et au début du XIe, l'Eglise de France avait un chef, le primat des Gaules et de Germanie. Celte dignité, conférée en 876 à Anségise, archevêque de Sens, par le pape Jean VIII au concile de Pontion, renouvelée plus tard à ses successeurs Séguin et Liétri, entraînait certaines fonctions effectives. Le primat, comme on le voit par la lettre du pape Jean VIII, remplaçait le pape dans bien des cas[6] ; il était vicaire apostolique ; il pouvait en particulier présider les conciles nationaux et, au concile de Saint-Basle, les évêques avaient, pour justifier leur attitude, invoqué la présence du primat Séguin[7]. Un chef national pouvait donc paralyser l'influence romaine. Aussi le Saint-Siège chercha-t-il sinon à le supprimer totalement, du moins à diviser la primatie pour qu'elle ne fût pas un obstacle à son autorité. Le 19 avril 1079, une bulle de Grégoire VII conférait la primatie à l'archevêque de Lyon[8], mais cette primatie n'est plus la primatie des Gaules et de Germanie ; c'est seulement la primatie sur les quatre provinces qui, à la fin de l'empire romain, portaient le nom de Lyonnaises, soit les provinces ecclésiastiques de Lyon, Rouen, Tours et Sens ; ces provinces devront obéir à l'Eglise de Lyon, tout en réservant les droits spéciaux du siège apostolique[9]. Le lendemain, 20 avril, une bulle adressée à Jean, archevêque de Rouen, à Raoul, archevêque de Tours, à Richer, archevêque de Sens, leur prescrivait d'obéir à l'archevêque de Lyon devenu leur primat[10]. De même que les provinces lyonnaises durent reconnaître pour primat l'archevêque de Lyon, les autres provinces furent soumises également à des primats. Le 25 décembre 1089, Urbain II donne à Renaud, archevêque de Reims, la primatie sur toute la Belgique[11] ; le 6 novembre 1097, il confère à Bertrand, archevêque de Narbonne, la primatie sur Aix qui formait la Narbonnaise seconde[12]. De même Bourges aura la primatie de l'Aquitaine[13]. Ainsi, au lieu d'un primat des Gaules et de Germanie, il y en a maintenant trois dont les pouvoirs étaient loin d'être aussi étendus que ceux des archevêques de Sens au xe siècle. Dans ses deux bulles, Grégoire VII est, à dessein sans doute, très vague ; les archevêques de Rouen, Tours et Sens devront à l'archevêque de Lyon l'obéissance, c'est-à-dire en somme que l'archevêque de Lyon ne sera qu'un métropolitain supérieur aux autres, ayant sous sa dépendance d'autres métropolitains et, comme Rome se réserve toutes les causes importantes, ses pouvoirs sont très limités ; il n'a rien du chef d'une Église nationale. Cette mesure prise par Grégoire VII pour Lyon, par Urbain II pour Reims et Narbonne, ne passa pas sans difficulté ni sans résistance de la part des archevêques français. La primatie de Lyon sur Tours, Rouen et Sens fut surtout contestée. En dehors des raisons personnelles que pouvaient avoir les archevêques de Sens, investis à plusieurs reprises de la primatie, il y en avait une plus générale : Lyon n'était pas en France, mais était terre d'Empire. C'est la raison qu'invoque, en 1080, l'archevêque de Reims Manassès pour ne pas se rendre à un concile, réuni à Lyon, où il devait venir se justifier[14]. Le roi de France n'avait aucun droit sur Lyon, tandis que Sens était ville du domaine royal. Bien qu'on ne voie pas que Philippe Ier ait soutenu les archevêques de Sens dans leurs revendications, il est évident que la primatie lyonnaise n'était pas faite pour lui plaire. L'archevêque de Tours, Raoul, ne fit pas la moindre résistance. Une lettre de Gebuin, écrite peu après le décret de Grégoire VII, félicite au contraire Raoul et ses suffragants, en particulier Eusèbe, évêque d'Angers, de leur soumission à la primatie lyonnaise[15]. Cette soumission existait autrement qu'en paroles, car on voit l'archevêque de Lyon intervenir dans les affaires de la province de Tours : un différend survenu entre l'évêque du Mans, Ernaud, et les moines de Marmoutier fut porté devant le primat[16]. Comment peut-on s'expliquer cette déférence pour le primat d'un archevêque qui n'eut pas toujours le caractère facile et fut souvent assez jaloux de son autorité ? Raoul, en reconnaissant le primat et en lui obéissant docilement, pensait peut-être limiter les interventions du Saint-Siège en France ; porter certaines causes ecclésiastiques devant l'archevêque de Lyon, c'était courir la chance d'éviter qu'elles n'allassent jusqu'à Rome, ce que redoutait Raoul. Une lettre de Raoul à Ernaud, évêque du Mans, écrite en 1080[17], semble autoriser cette hypothèse : Raoul s'y montre hostile au légat du pape, Amat d'Oloron, auquel il avait été d'abord favorable, mais qui maintenant le gênait dans son administration archiépiscopale, et il se demande quel est le vrai primat, si c'est Amat, ou Gebuin, archevêque de Lyon. Il écrivit sans doute dans le même sens à Gebuin, car Gebuin lui répondit qu'il s'étonnait de la façon dont avait agi Amat, et il ajoutait : J'ai appris qu'il avait prétendu exercer une légation sur votre province avant mon voyage à Rome. S'il en est ainsi, j'ai besoin de vos conseils, car je n'entends pas laisser porter atteinte à la dignité de l'église de Lyon ni contredire aux ordres formels du Siège apostolique[18]. L'archevêque de Rouen ne semble avoir protesté que pour la forme. Le nouveau décret d'Urbain II sur la primatie lyonnaise contient bien quelques vagues menaces à son endroit, car il n'avait pas assisté à la séance du concile de Clermont où cette primatie avait été à nouveau proclamée, mais ses suffragants y étaient présents et l'avaient docilement acceptée[19]. On ne voit pas que dans la suite les archevêques de Rouen aient essayé de s'y dérober. En somme, il n'y eut d'opposition vraiment sérieuse que de la part de l'archevêque de Sens, Richer. Richer refusa cette subordination à l'archevêque de Lyon qu'on exigeait de lui, et lorsqu'on 10951e pape Urbain II vint en France, l'affaire fut portée devant lui au concile de Clermont. Urbain II, dans une lettre à Hugues de Die qui est le renouvellement du décret de Grégoire VII[20], donne quelques détails sur l'attitude de Richer. Le second jour du concile, on lut les dispositions relatives à la primatie ; or Richer n'assistait pas à la séance et n'avait pas donné de motif valable d'excuse. Le pape, pour faire preuve de mansuétude, renvoya la délibération au troisième jour, mais, ce jour-là encore, Richer ne vint pas, tant à cause de l'affaire elle-même que parce qu'il était souffrant ; on lui fit demander sa soumission ; il la refusa et chercha à faire retarder encore la délibération du concile. On pria les suffragants de Sens d'aller trouver leur métropolitain et on consentit à cet ajournement, moyennant la promesse des suffragants d'accepter la décision du concile, même si Richer ne voulait pas l'admettre. Richer demanda de nouveaux délais, mais cette fois on passa outre et, le sixième jour, le concile de Clermont décida que l'archevêque de Sens devrait soumission et obéissance à celui de Lyon qui était son primat. Les évêques suffragants de la province de Sens promirent d'obéir à la décision du concile. On espérait que Richer allait suivre cet exemple, mais, le huitième jour, Hugues de Die, archevêque de Lyon depuis la mort de Gebuin, lui envoya Aganon, évêque d'Autun, et Lambert, évêque d'Arras, qui ne purent lui arracher son adhésion. Le pape lui interdit alors l'usage du pallium et délia ses suffragants de l'obéissance envers lui jusqu'à ce qu'il eût reconnu la primatie lyonnaise. Les choses en restèrent là. Richer fut intraitable, malgré les supplications de ses suffragants portés à la conciliation. Yves de Chartres lui conseilla de faire valoir les privilèges apostoliques accordant la liberté à l'église de Sens à l'égard de la province lyonnaise ; sinon il n'avait pas intérêt à vouloir braver le torrent des sanctions apostoliques et il devait soustraire sa tête au glaive qui la menaçait[21]. Richer montra-t-il la lettre du pape Jean VIII conférant la primatie à Anségise ? La chose est peu probable. En tout cas la primatie avait été conférée en 876 à Anségise et non pas au siège de Sens ; elle avait toujours été personnelle et jamais attachée à un siège : Arles, Metz, Reims, Sens, en avaient joui tour à tour. Il n'y avait donc pas de bulle pontificale consacrant l'indépendance de l'église de Sens à l'égard de celle de Lyon. Quant aux suffragants, ils se montrèrent très déférents pour la primatie lyonnaise, comme ils l'avaient promis au concile de Clermont. Lorsqu'en 1097, Richer demanda à Yves de Chartres de consacrer Sancion, élu évêque d'Orléans, Yves, avant de procéder à la cérémonie, demanda l'avis de l'archevêque de Lyon dont la primatie était toujours contestée par son métropolitain[22]. Richer mourut en cette année 1097 sans avoir reconnu Hugues de Die comme primat. Les chanoines de la cathédrale Saint-Etienne de Sens élurent Daimbert et demandèrent à Yves de Chartres d'ordonner prêtre leur élu le jour de la Purification (2 février), puis de le consacrer évêque le dimanche suivant. Yves les pria d'attendre, parce qu'il avait à examiner certains détails avec l'élu et avec ses confrères avant de confirmer l'élection[23]. En même temps Yves écrivait à Hugues de Die pour lui annoncer l'élection de Daimbert et le prier de se prononcer rapidement[24]. Nous n'avons pas la réponse de Hugues de Die à cette première lettre d'Yves de Chartres, mais nous pouvons conjecturer d'après une autre lettre d'Yves[25] quelle elle fut : Hugues refusa de ratifier l'élection de Daimbert tant qu'il n'aurait pas reconnu la primatie lyonnaise. Yves de Chartres insista pour que l'archevêque de Lyon consentît à la consécration de Daimbert ; il essaya de montrer à Hugues, en s'appuyant sur les décrets des papes et sur les canons des conciles, qu'il n'y avait pas d'empêchement canonique, que jamais l'élu du diocèse de Sens n'avait été présenté à l'archevêque de Lyon avant sa consécration, que jamais on n'avait exigé de lui une déclaration de soumission et obéissance à la primatie lyonnaise, pas plus qu'on ne l'exigeait dans les autres provinces[26]. Hugues maintint son interdiction ; dans sa réponse à Yves de Chartres[27], il déclara que ses exigences n'étaient ni déraisonnables ni anti-canoniques, et qu'elles étaient pleinement justifiées par les circonstances. Il se défiait de Daimbert parce qu'il avait fait partie du troupeau de clercs sénonais qui avait montré tant d'opiniâtreté dans son insoumission et avait encouragé l'archevêque défunt à désobéir au pape Urbain II, à braver la suspension dont il avait été l'objet. Il interdisait donc à Yves comme à tous les évêques suffragants de la province de Sens de consacrer Daimbert avant qu'il eût reconnu la primatie de l'église de Lyon que les décrets d'Urbain II et de ses prédécesseurs avaient pleinement consacrée. Devant ce refus catégorique, Yves s'adressa au pape lui-même[28]. Il montra à Urbain II qu'il n'y avait d'autre raison pour différer la consécration de Daimbert que le refus du nouvel archevêque de reconnaître préalablement la primatie lyonnaise ; or l'on n'avait jamais exigé des métropolitains un tel serment d'obéissance aux primats avant leur consécration. Urbain II fut insensible, comme l'avait été Hugues de Die, aux arguments apportés par l'évêque de Chartres. Nous n'avons pas la réponse qu'il fit à sa lettre, mais elle dut être assez sèche, comme on peut le voir par une nouvelle lettre d'Yves, écrite sans doute à la fin de 1097 ou au début de 1098[29] ; Yves s'y montre désolé de ce que ses dernières lettres aient déplu au pape ; il n'avait certes pas l'intention de froisser le souverain pontife et n'avait fait que donner son avis dans la question ; il n'en est pas moins prêt à se démettre de l'épiscopat, si le pape le désire. Mais Yves ne tarda pas à rentrer en grâce auprès d'Urbain II et même de Hugues de Die. A la fin de 1098, Geoffroy, abbé de Vendôme, alla à Rome et, au retour, s'arrêta à Lyon, où il séjourna pendant cinq jours ; le primat lui fit une réception magnifique. Geoffroy, au cours de ce voyage, dissipa tous les soupçons qui pesaient sur Yves, ainsi qu'il le lui écrivit peu après son passage à Lyon[30]. D'ailleurs, à ce moment-là, Daimbert avait fait sa soumission et Geoffroy de Vendôme était tout heureux d'annoncer à l'évêque de Chartres que l'archevêque de Sens avait enfin reconnu la primatie lyonnaise, que la paix était donc faite[31]. Daimbert avait été à Rome et, en présence des délégués de l'archevêque de Lyon, Ismion, évêque de Die, Girin, doyen, et un autre Girin, chapelain, sur l'ordre du Siège apostolique, il avait reconnu la primatie de l'église de Lyon sur celle de Sens ; il avait promis obéissance envers Hugues et ses successeurs ; il s'était enfin engagé à aller présenter ses hommages à l'archevêque de Lyon et à reconnaître solennellement la primatie, en présence de toute l'église de Lyon, avant la Saint-Denis (9 octobre), à moins d'empêchement canonique[32]. Le débat fut donc terminé, pour le moment du moins. Après la mort d'Urbain II et de Hugues de Die, Pascal II renouvela la primatie au nouvel archevêque de Lyon Gozeran[33]. Mais la question ne devait pas tarder à être soulevée de nouveau. Philippe Ier, excommunié par le Saint-Siège, n'avait pas osé se mêler de cette affaire qui l'intéressait cependant, puisque les églises du domaine se trouvaient placées sous la dépendance de celle de Lyon, ville d'empire. Louis VI n'aura pas les mêmes raisons de se tenir sur la réserve et, en 1121, il écrira au pape Calixte II qu'il préférerait voir son royaume consumé par l'incendie ou courir lui-même danger de mort plutôt que de consentir à ce que le métropolitain de Sens fût sous la dépendance du primat de Lyon[34]. Dès lors l'affaire entrera dans une nouvelle phase et se poursuivra pendant tout le moyen âge. La primatie de Narbonne souleva aussi quelque opposition de la part de l'archevêque d'Aix. En 1097, Urbain II lui reprocha de ne pas reconnaître la primatie narbonnaise[35] et il pria Hugues de Die de veiller à ce qu'il ne se dérobât pas à l'obéissance envers l'archevêque de Narbonne[36]. Pour faire taire toute velléité d'opposition, en 1099, Pascal II conféra de nouveau la primatie à l'archevêque de Narbonne, Bertrand[37], et l'archevêque d'Aix semble, dès lors, en avoir pris son parti, Ainsi, au début du XIIe siècle, la réforme apportée par
Grégoire VII et Urbain II à la hiérarchie de l'Eglise de France est adoptée ;
il n'y a plus de primat des Gaules et de Germanie, plus de chef de l'Eglise
nationale ; c'est un coup sensible porté au gallicanisme. D'ailleurs tous les
pouvoirs intermédiaires entre Rome et les évêques voient diminuer leur
autorité. Les nouveaux primats n'ont eu d'influence réelle que lorsqu'ils ont
été en même temps les légats du Saint-Siège, par exemple Hugues de Die. Les
autres sont simplement des métropolitains un peu supérieurs aux autres. Or
l'autorité du métropolitain tend à disparaître. Sans doute le métropolitain a
certaines fonctions qui ne peuvent lui échapper ; ainsi son assentiment est
nécessaire pour l'ordination d'un évêque suffragant ; on le vit lorsque
Hugues de Die, en 1082, au concile de Meaux, nomma évêque, à la place du
défunt Gautier, Robert, abbé de Rebais ; cette élection fut faite en
l'absence du métropolitain Richer et de ses suffragants qui excommunièrent le
nouvel élu[38].
Sans doute aussi les suffragants doivent à leur métropolitain respect et
obéissance ; en 1099, Yves de Chartres reproche à Philippe, évêque de Troyes,
de n'être pas venu au concile d'Etampes pour se justifier de certaines
accusations portées contre lui et d'avoir écrit une lettre peu respectueuse
au métropolitain[39]. Comme on le
voit par cet exemple, le métropolitain préside les conciles provinciaux, mais
les suffragants lui méconnaissent le droit d'intervenir dans les détails de
leur administration diocésaine. Vers 1099, Yves de Chartres écrit aux évêques
de la province de Reims, à propos d'une lettre que leur métropolitain leur
avait adressée, qu'il la juge menaçante et injurieuse tant pour eux tous que
pour l'évêque de Soissons spécialement visé. S'il
est permis au métropolitain, dit-il, de
commander ce qu'il veut dans toutes les églises de la province même contrairement
à la volonté des évêques qui sont à leur tête, s'il peut juger leurs clercs,
les suspendre de leur office, il fait indignement violence à la dignité des
évêques et il ruine l'autorité des canons des Pères[40]. D'ailleurs
beaucoup d'affaires jadis soumises au métropolitain vont maintenant au pape
ou aux légats du Saint-Siège qui sont les véritables chefs de l'Église de
France à la fin du XIe siècle, tout intermédiaire entre eux et les évêques
tendant à disparaître. III L'institution des légats n'est pas nouvelle. De bonne heure des missions temporaires ont été confiées par la papauté à des évêques ou même à de simples clercs avec le titre de légats ; mais, à la fin du XIe siècle, et en particulier sous Grégoire VII, ces légats deviennent un des rouages les plus importants de l'administration pontificale. Sous Alexandre II, les légats ne sont encore chargés que de missions temporaires ; ce sont des évêques italiens qui vont, au nom du pape, examiner l'état des diocèses de France, juger les affaires importantes et qui, au retour, rendent compte au pape de leur mandat. Tel est le caractère de la légation de Pierre Damien (appelé improprement Giraud par Hugues de Flavigny), évêque d'Ostie, envoyé par Alexandre II en France en 1063[41]. Nous avons conservé la bulle par laquelle le pape annonce la venue de Damien aux archevêques de Reims, Sens, Tours, Bourges et Bordeaux[42]. Alexandre II y rappelle que le pape a pour mission de gouverner l'Eglise universelle ; ne pouvant se rendre lui-même en France parce qu'il est retenu par de nombreuses affaires, il a décidé d'y envoyer le personnage le plus important de l'Eglise romaine après lui, Pierre Damien, évêque d'Ostie, qui sera, dit-il, son œil — qui nimirum et noster est oculiis — ; tout ce que décidera Damien aura la même valeur que si la décision avait été prise par le pape lui-même. Pierre Damien tint un concile à Chalon-sur-Saône[43] où fut cité l'évêque de Mâcon qui avait violé les privilèges de Cluny ; il profita de l'occasion pour rappeler longuement les privilèges accordés à Cluny par les papes ; l'évêque se soumit d'ailleurs sans grande difficulté. Pierre Damien jugea encore quelques affaires ecclésiastiques, puis retourna en Italie[44]. Cette légation de Pierre Damien est donc toute temporaire ; il a représenté pendant quelque temps le pape en Gaule, puis il est revenu à Rome. Il semble y avoir eu, sous Alexandre II, d'autres légations de ce genre, sur lesquelles nous sommes beaucoup moins bien renseignés. Hildebrand s'est occupé de l'hérésie de Bérenger[45] ; il a donc eu une légation. Nous savons aussi, par une notice anonyme, qu'à l'époque de Barthélémy, abbé de Marmoutier, un certain Etienne fut envoyé par le Saint-Siège pour juger un différend entre les moines de Marmoutier et ceux de Redon[46]. Or une bulle d'Alexandre II non datée constitue l'évêque de Pise légat du Saint-Siège pour juger ce démêlé au sujet d'une église[47]. Mais il n'y a pas eu sous Alexandre II d'évêque de Pise du nom d'Etienne, et c'est sans doute un autre nom qu'il faut lire. Il n'en reste pas moins que la notice et la bulle ne permettent pas de douter d'une légation temporaire, analogue à celle de Pierre Damien. Enfin une bulle d'Alexandre II à Gervais, archevêque de Reims, écrite entre 1062 et 1067, fait allusion à deux autres légats, l'un bibliothécaire de l'Eglise romaine, l'autre cardinal prêtre[48]. Grégoire VII n'a pas brisé complètement avec le système des légations temporaires : Hugues, abbé de Cluny, et Géraud, évêque d'Ostie, ont été investis, semble-t-il, d'une légation de ce genre vers 1074, car dans une lettre à Hugues, datée du 19 mars 1074, Grégoire VII rappelle l'abbé à Rome et fait allusion aux nombreuses affaires qui lui sont confiées[49]. Il est de même question d'un moine du nom de Teuzon dans une bulle du 21 mars 1077, adressée à Guillaume le Conquérant au sujet d'une élection à Dol[50], Teuzon y est appelé formellement legatus noster, mais sa mission ne semble pas avoir été limitée à cette affaire de Dol. De même encore un certain Hubert, sous-diacre de l'Eglise romaine, a été légat temporaire[51]. Il eut même des difficultés avec l'un des légats permanents, Hugues de Die, sur les fonctions duquel il avait empiété[52]. A côté de ces légats temporaires et exceptionnels, Grégoire VII a eu en France des légats permanents. Pour rattacher d'une façon continue l'Eglise de France au Saint-Siège, pour pouvoir intervenir dans les moindres détails, il a eu l'idée de confier à des évêques français qui lui étaient particulièrement attachés ces importantes fonctions de légat. C'est ainsi que les deux personnages autour desquels se concentre la vie de l'Eglise de France pendant le pontificat de Grégoire VII, ce sont les deux légats Amat, évêque d'Oloron, et Hugues, évêque de Die, puis archevêque de Lyon ; ils sont vraiment, comme ils s'intitulent eux-mêmes dans une lettre de 1081, les vicaires (vicarii) du Siège apostolique[53]. On connaît mal les débuts d'Amat. Peut-être fut-il d'abord moine au Mont-Cassin[54], mais il n'est pas prouvé que le moine du Mont-Cassin et l'évêque d'Oloron soient le même personnage. On ignore même la date exacte de son ordination. Tout ce qu'on sait, c'est qu'en 1074 il était déjà évêque d'Oloron et légat du Saint-Siège, car il est nommé comme tel dans une bulle de Grégoire VII, datée du 10 septembre 1074, adressée à Isembert, évêque de Poitiers[55]. Sa légation ne fut formellement définie que dans une bulle du 28 juin 1077 aux archevêques, évêques, abbés, rois, princes, clercs et laïques de la Gaule narbonnaise, de la Gascogne et de l'Espagne[56]. Les fonctions d'Amat sont formellement limitées à ces trois pays, mais nous verrons qu'il s'occupe de beaucoup d'affaires qui n'étaient pas de ce ressort ; nous avons déjà noté que l'archevêque de Tours, Raoul, s'était plaint de ses fréquentes interventions dans la province de Tours. A partir de 1074, Amat est tout-puissant : en 1075, il convoque un concile à Poitiers pour rompre le mariage de Guillaume VIII, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine[57]. En 1079, Grégoire VII le charge de convoquer un concile en Bretagne et il rappelle aux évêques, prêtres, princes et fidèles de ce pays, par une bulle du 25 novembre, qu'ils devront obéir à l'évêque d'Oloron comme à lui-même[58]. On devait traiter à ce concile, qui se réunit sans doute à Redon[59], la question des pénitences qui ne pouvaient être vraiment fructueuses qu'autant que celui qui en était l'objet était revenu aux promesses de son baptême, et avait renouvelé sa profession de foi chrétienne. En 1080, Amat tint un autre concile beaucoup plus solennel à Bordeaux[60]. Nous savons par une de ses lettres qu'à ce concile de Bordeaux assistèrent, outre les légats Amat et Hugues de Die, Gozlin, archevêque de Bordeaux, Guillaume, archevêque d'Auch, Raoul, archevêque de Tours, l'archevêque de Dol et leurs suffragants[61]. L'archevêque de Tours avait fait quelque résistance, car Amat dut lui renouveler l'invitation sous la forme d'un ordre du Saint-Siège[62]. C'est qu'à ce concile, outre diverses questions de discipline, il fut longuement traité de l'hérésie de Bérenger de Tours. Pendant la fin du pontificat de Grégoire VII, il est moins souvent question d'Amat. C'est Hugues de Die qui retient toutes les affaires importantes. Amat n'intervient guère en dehors de l'Aquitaine. En 1082, au concile d'Issoudun[63], il tranche un différend entre les chanoines de Saint-Hilaire de Poitiers et les moines de Bourgueil[64]. La même année, au concile de Charroux, il juge une querelle analogue entre l'abbé de Maillezais et celui de Montierneuf de Poitiers[65]. Hugues de Die a joué en France un rôle beaucoup plus décisif qu'Amat d'Oloron[66]. C'est lui le véritable représentant du pape, chargé de toutes les affaires délicates. Il devint évêque de Die en 1073, dans des circonstances assez particulières qu'a narrées Hugues de Flavigny[67]. En cette année 1073, Géraud, évêque d'Ostie, qui venait d'accomplir une légation en France et s'en retournait à Rome, s'arrêta à Die. Le siège de Die était occupé par un évêque simoniaque du nom de Lancelin qui refusait de se rendre à l'audience du légat et se préparait à se défendre au besoin par les armes dans son palais épiscopal où il s'était fortifié. Le légat cherchait avec les chanoines et les habitants de Die le moyen de se débarrasser de Lancelin, car il jugeait que la faute de simonie était sans rémission. C'est alors que Hugues, camérier de l'église de Lyon, entra dans l'église où Géraud et les chanoines s'étaient réunis ; aussitôt il fut acclamé évêque ; il opposa d'abord une certaine résistance, car il n'était pas prêtre, mais, devant l'insistance des chanoines et du légat Géraud qui voyaient en lui un envoyé du Seigneur, il finit par accepter ; il fut consacré, puis confirmé. L'évêque simoniaque, pris de peur, abandonna le palais épiscopal. Tout cela se passait, dit Hugues de Flavigny, le 19 octobre de l'année en laquelle Grégoire VII succéda à Alexandre II, soit 1073. Au mois de décembre, Hugues vint à Rome et il y reçut la prêtrise. C'est sans doute à ce moment que Grégoire VII put connaître et apprécier le nouvel évêque de Die. Le 16 mars 1074, il le nomma légat du Saint-Siège en France et en Bourgogne[68]. A partir de ce moment, Hugues est vraiment à la tête de l'Eglise de France et, se souvenant sans doute des circonstances qui avaient accompagné son élection, il eut avant tout pour programme la guerre à la simonie qu'il mena, comme nous le verrons plus loin, avec plus d'ardeur et de ténacité que Grégoire VII lui-même. Nous aurons à revenir souvent sur l'œuvre de Hugues de Die ; nous voulons simplement noter ici son activité infatigable dans ses fonctions de légat apostolique. Dès le début, il est bien décidé à faire sentir partout son autorité. Par une lettre qui n'est pas datée, mais qui n'est évidemment pas très postérieure à mars 1074, il annonce à Raoul, archevêque de Tours, que le Saint-Siège l'avait délégué pour examiner toutes les affaires ecclésiastiques et, pour se mettre au courant de celles de la province de Tours, il le prie de venir conférer avec lui[69]. Il se met en rapports avec les métropolitains qui sont beaucoup plus sous sa dépendance qu'ils ne seront sous celle de Gebuin, archevêque de Lyon, pourtant primat à partir de 1077. Le moyen d'agir sur les métropolitains, ce sont les conciles convoqués très fréquemment ; il y en a souvent plusieurs dans la même année. Hugues de Flavigny nous a conservé le souvenir de trois conciles tenus en 1076 : le premier à Anse, le second à Clermont-Ferrand où Etienne, évêque de Clermont, qui avait abandonné son siège pour celui du Puy parce qu'il y trouvait son profit, et Guillaume, devenu évêque simoniaque de Clermont, furent déposés : Guillaume fut remplacé par Durand, abbé de la Chaise Dieu. Enfin un troisième concile eut lieu à Dijon[70]. Il semble que ce concile de Dijon doive se placer avant celui de Clermont-Ferrand, Nous avons en effet trois lettres de Hugues de Die à Raoul pour le convoquer à trois conciles, à Dijon pour le 2 janvier, à Clermont-Ferrand pour le 7 août, enfin à Autun pour le 10 septembre[71]. Ce concile d'Autun est, si l'on en croit Hugues de Flavigny, le quatrième tenu par Hugues de Die. Il suit d'un an celui de Clermont-Ferrand et la troisième lettre de Hugues à l'archevêque de Tours n'est que de 1077 : la chronique de Saint-Bénigne de Dijon affirme, en effet, que ce concile eut lieu en 1077 et que Jarenton fut ordonné abbé de la Chaise-Dieu le 17 septembre[72]. Il semble donc, d'après une lettre du pape Grégoire VII[73], qu'il faut placer au début de l'année 1077, avant le concile d'Autun, un autre concile tenu à Reims. En tout cas, il fut longuement question au concile d'Autun de l'archevêque simoniaque de Reims Manassès, qui, convoqué au concile, y fit défaut[74]. En 1078, nouveau concile à Poitiers où Philippe Ier chercha à paralyser l'action du légat[75]. Manassès qui y était convoqué ne voulut toujours pas comparaître[76]. C'est encore de lui que s'occupa le concile de Lyon de 1080 ; le prélat simoniaque chercha à corrompre Hugues de Die, mais il n'y réussit pas et fut déposé[77]. Il y eut quatre autres conciles cette année-là, à Avignon où l'archevêque d'Arles Achard fut déposé et où furent élus Gibelin à Arles, Lantelme à Embrun, Hugues à Grenoble, Didier à Cavaillon ; après le concile, Hugues emmena les nouveaux élus à Rome où ils furent consacrés par le pape lui-même[78]. Puis Hugues revint assister aux conciles de Saintes et de Bordeaux ; il en présida enfin un dernier à Meaux où Ursion, évêque de Soissons, fut déposé et Arnoul, abbé de Saint-Médard, élu à sa place[79]. En 1082, l'archevêque de Lyon, Gebuin, mourut. Hugues de Die fut élu[80]. Il fit quelques difficultés pour accepter, mais Grégoire VII insista vivement auprès de lui et il lui ordonna même de ne pas refuser la dignité qu'on lui offrait si le clergé et le peuple de Lyon n'arrivaient pas à s'entendre sur le nom d'un autre[81]. L'élévation de Hugues au siège de Lyon avait pour le pape l'immense avantage de réunir sur la même tête la dignité de primat et les fonctions de légat ; Hugues devenant le supérieur hiérarchique des métropolitains de Tours, Rouen et Sens, rencontrerait peut-être moins d'obstacles pour accomplir les missions que lui confierait le Saint-Siège, pour jouer le rôle assez délicat de porte-parole des ordres de Rome qui lui était dévolu depuis 1074. Il continua donc à exercer ses fonctions de légat jusqu'à la mort de Grégoire VII, et Hugues de Flavigny laisse même entendre[82] que le pape le considérait comme le plus propre à lui succéder. Didier n'en fut pas moins élu, et Hugues écrivit à la comtesse Mathilde en termes injurieux pour le nouveau pape ; cela lui valut d'être excommunié, en août 1087, mais l'excommunication fut levée l'année suivante par Urbain II. A l'avènement d'Urbain II, il sembla tout d'abord que le gouvernement pontifical allait changer d'allure et qu'on allait revenir aux légations temporaires. Dans un démêlé entre l'archevêque de Rouen et les moines de Fécamp, Urbain II intervient par l'intermédiaire de ses légats Herbert, évêque de Thetford, et Roger, cardinal archidiacre[83]. Mais bientôt Urbain II reprit, en ce qui concernait les légats, les traditions de Grégoire VII. Sans doute il y a encore, sous son pontificat, comme il y en avait eu sous celui de Grégoire VII, des légats chargés de missions temporaires, comme Richard, abbé de Marseille, qui, en 1096, règle un différend entre les moines de Psalmodi et ceux de Saint-Victor de Marseille[84]. Mais, en général, ce sont Amat d'Oloron et Hugues de Die qui continuent à être les maîtres de l'Eglise de France. Dès 1089, Amat, devenu archevêque de Bordeaux, présidait un concile à Saintes[85] et mettait d'accord les abbés de Saint-Cyprien de Poitiers et de Marmoutier qui se disputaient l'île d'Yeu[86]. En 1093, il tient un concile à Bordeaux dans lequel, avec l'aide de Guillaume-Bernard, archevêque d'Auch, il fait restituer à Saint-Benoît-sur-Loire, sur la réclamation du moine Otger, le monastère de Saint-Caprais, que détenait Bernard, évêque de Dax[87]. Cette même année 1093, dans une bulle adressée à Géraud, abbé de Montierneuf de Poitiers, Urbain Il appelle Amat son légat5[88] et, dans une autre bulle de 1095 dont le destinataire est Adémar, évêque d'Angoulême, il lui donne le nom de vicaire[89]. D'ailleurs, en 1095, Amat assistait au concile de Clermont et faisait venir à Bordeaux le pape Urbain II qui y consacra la cathédrale. Jusqu'à sa mort, survenue le 22 mai 1101[90], Amat présida encore plusieurs conciles : en 1096 à Saintes où il mit d'accord les abbayes de Charroux et de Saint-Jean-d'Angély[91] ; en 1098 à Bordeaux où il accorda à cette même abbaye de Saint-Jean-d'Angély l'église de Marestais que lui disputaient les moines de Maillezais, exerçant dans toute sa plénitude l'autorité du pape Urbain II[92]. Pendant qu'Amat d'Oloron continuait à remplir ses fonctions de légat en Aquitaine, Hugues de Die, après une éclipse passagère, reprenait les siennes en France et en Bourgogne. Aubri de Trois-Fontaines prétend qu’en 1094, Yves de Chartres, retenu en prison par le comte de cette ville, écrivit à Houel, évêque du Mans, pour qu'il priât Urbain II de donner à la France un légat comme l'avait fait Grégoire VII[93]. Il est fort possible qu'Yves ait fait demander l'envoi d'un légat, car il soumettra plus tard la même requête à Pascal II, mais sa lettre est certainement antérieure à sa captivité ; dès 1094, Hugues de Die préside de nouveau des conciles, et une autre lettre d'Yves, qui paraît avoir été écrite en 1093[94], félicite Hugues de la nouvelle légation que lui a confiée Urbain II ; il lui demande même une entrevue pour le début du carême (sans doute 1094), afin de traiter certaines affaires ecclésiastiques qui lui paraissent délicates. C'est donc très probablement à la fin de 1093 que l'archevêque de Lyon a repris les fonctions de légat qu'il avait exercées sous Grégoire VII. Dès 1094, Hugues présida le concile d'Autun oLt fut excommunié Philippe Ier[95]. Il subit ensuite une nouvelle disgrâce pour ne pas avoir assisté au concile de Plaisance où Urbain II l'avait convoqué, et pour ne pas s'y être fait représenter, ni s'être justifié par une excuse canonique ; il fut suspendu de sa charge[96], mais la réconciliation avec le pape ne tarda guère, car Hugues assista au concile de Clermont où il obtint confirmation de la primatie lyonnaise. En 1097, il fut encore chargé de plusieurs affaires importantes à Orléans, Sens et Beauvais[97]. En 1098, il réconcilia Odilon, abbé de Saint Gilles, avec l'abbé de Cluny[98]. Enfin il régla un différend entre Molesme et Cîteaux, ainsi que le prouve une lettre des cardinaux Jean et Benoît[99]. Cette intervention dans les affaires de Cîteaux fut le dernier acte de sa légation, car, avec Pascal II qui, en 1099, succéda à Urbain II, les légats français furent remplacés par des légats italiens. Hugues, comme Amat d'Oloron, ne survécut guère à cette disgrâce. Il mourut le 7 octobre 1106 à Suse, tandis qu'il se rendait à Rome pour un concile[100]. Amat d'Oloron et Hugues de Die ont eu, l'un en Aquitaine, l'autre en France et en Bourgogne, le pouvoir le plus absolu. A vrai dire, la séparation territoriale de leur sphère d'action n'est pas aussi nette dans la pratique qu'elle l'est en théorie. Dans un décret confirmant les décisions du concile de Bordeaux, en 1080, Amat s'intitule légat de la sainte Église romaine, très humble évêque d'Oloron, chargé de réformer les églises d'Aquitaine par l'ordre et au nom du pape Grégoire VII[101]. Or, la même année, Amat écrit à l'archevêque de Tours, Raoul, pour lui annoncer qu'il allait venir visiter son église[102]. Tours était cependant sous la dépendance du primat de Lyon et ne faisait partie à aucun degré de l'Aquitaine. Nous avons vu, d'autre part, que Hugues de Die, chargé de la France et de la Bourgogne, avait présidé le concile de Poitiers en 1078. Ainsi les deux légats empiètent sur leurs circonscriptions respectives ; ils se surveillent mutuellement, comme ils surveillent les autres légats. Hubert, sous-diacre de l'Église romaine, avait empiété en Flandre sur les attributions de Hugues de Die ; aussitôt Grégoire VII prie Hubert d'aller trouver Hugues et de lui soumettre ses actes, afin qu'il les confirme ou qu'il les amende, selon ce qui sera nécessaire (23 septembre 1079)[103]. S'il n'y a pas de délimitation précise entre les sphères d'influence des deux légats, on peut dire qu'ils ont, l'un et l'autre, paralysé l'action des métropolitains, car ce sont eux qui président les conciles provinciaux. Si l'on dresse la liste des principaux conciles tenus en France à la fin du XIe siècle, on voit qu'ils sont toujours, à quelques exceptions près, présidés par des légats pontificaux. Encore ces exceptions ne se rencontrent-elles guère qu'en Normandie, où Guillaume le Conquérant ne voulait supporter d'autre autorité que la sienne ; le Saint-Siège tenait beaucoup à le ménager, tant pour se rattacher l'Eglise d'Angleterre qui lui avait quelque temps échappé, que pour avoir éventuellement l'appui des Normands de Sicile. Aussi, le métropolitain de Rouen est-il le seul dont l'action n'ait pas été trop gênée par les légats. En 1072, un concile solennel fut réuni à Rouen sous la présidence de l'archevêque Jean, assisté de ses suffragants Odon de Bayeux, Hugues de Lisieux, Robert de Séez, Michel d'Avranches, Gilbert d'Evreux. Ce concile s'occupa de la foi en la sainte Trinité, de la vente des dignités pastorales, du mariage et du concubinage des prêtres, lévites et sous-diacres et de plusieurs autres questions de discipline ecclésiastique[104]. Il y eut encore un concile provincial à Rouen, en 1074, présidé à la fois par l'archevêque Jean et par Guillaume le Conquérant[105]. Guillaume assista également, en 1080, au concile de Lillebonne qui réunissait tous les évêques, abbés, comtes et princes de la Normandie ; on s'y occupa, dit Orderic Vital, de la condition de l'Eglise et de celle de tout le royaume[106]. On trouve des conciles à Rouen en 1091[107], en 1096[108], toujours présidés par le métropolitain et jamais par le légat. Ainsi en Normandie, ni Amat d'Oloron ni Hugues de Die n'ont osé supplanter l'archevêque de Rouen. Ailleurs certains conciles provinciaux sont présidés par le métropolitain, mais ils ne s'occupent en général que d'affaires secondaires. Notons, à titre d'exemple, le concile tenu à Soissons en 1084, sous la présidence de Renaud, archevêque de Reims : le seul acte que nous en ayons conservé, c'est une sentence de Renaud, rendant aux moines de Marmoutier le prieuré de Ventilly. A ce concile assistaient Roger, évêque de Châlons-sur-Marne, Elinand, évêque de Laon, Géraud, évêque de Cambrai, Radbod, évêque de Noyon, Roric, évêque d'Amiens, Guy, évêque de Beauvais, Géraud, évêque de Térouanne[109]. C'est à un concile analogue, à Compiègne, que fut examiné, l'année suivante, le différend entre Helgot, évêque de Soissons, et les chanoines de Compiègne[110]. On pourrait évidemment trouver des exemples encore assez nombreux de conciles provinciaux présidés par le métropolitain, mais il n'en est pas moins vrai que, toutes les fois que le légat du Saint-Siège peut s'y rendre, il s'empresse d'y aller et, en tous cas, jamais les décisions des conciles ne sont valables s'il ne les a lui-même confirmées. D'ailleurs la papauté a bien soin d'exiger des évêques la soumission la plus absolue à ses légats. Nous avons noté les timidités d'Yves de Chartres à l'égard de Hugues de Die, en particulier à propos du débat sur la primatie. Un des prédécesseurs d'Yves sur le siège de Chartres, Robert, a signé à Rome, en avril 1076, sur l'ordre de Grégoire VII, un serment d'obéissance au légat qui est des plus curieux[111]. Moi, Robert, dit-il, en présence de Dieu, du bienheureux Pierre, prince des apôtres, dont le corps repose ici, je m'engage à ce qui suit : à quelque moment qu'un légat du Saint-Siège, envoyé par Grégoire, actuellement pontife romain, mon maître, ou par l'un de ses successeurs, vienne à moi, dans les limites que fixera ce légat, je me démettrai, sans protester, de l'évêché de Chartres et je m'emploierai loyalement à faire en sorte que cette église ait un pasteur selon la volonté de Dieu. Ainsi le légat a sur les évêques les pouvoirs les plus absolus. De ces pouvoirs, Amat d'Oloron et Hugues de Die usèrent largement et Grégoire VII lui-même dut les rappeler à la modération. En 1081, il leur reproche d'avoir excommunié tous les évêques de Normandie à l'exception de l'archevêque de Rouen et de l'abbé de la Couture parce qu'ils n'étaient pas venus à un concile convoqué par eux ; s'ils n'étaient pas venus, c'était moins par désobéissance que par crainte du roi de France et manque de sécurité. Le pape pria les légats d'absoudre les évêques et de les réintégrer dans l'administration de leurs diocèses[112]. De même, vers 1082, un abbé vint se plaindre à Rome d'avoir été interdit par Hugues parce qu'il ne s'était pas trouvé au lieu fixé pour que justice fût rendue par le légat dans un différend entre lui et l'abbé de la Chaise-Dieu. Comme le pape ne connaissait pas suffisamment la cause, il renvoya l'abbé à Hugues, mais le pria de le traiter avec douceur, afin qu'il n'eût pas entrepris pour rien le long voyage de Rome[113]. On comprend que des allures aussi autoritaires aient parfois mécontenté l'épiscopat et le clergé français ; Grégoire VII dut lui-même intervenir pour ménager certaines susceptibilités. La lettre écrite par les clercs de Cambrai à ceux de Reims en 1078[114] est le plus formidable réquisitoire qui ait été écrit contre les excès de pouvoir des légats du Saint-Siège. Ils se plaignent de toutes les interventions importunes des légats romains qui ne peuvent se dispenser de mettre la main à toutes les affaires, surtout quand il s'agit de porter atteinte au pouvoir royal ; suivant leur fantaisie, ils excommunient les métropolitains, déposent les évêques, élèvent à l'épiscopat ceux qu'il leur plaît, sous le couvert de la religion qui cache ainsi de vaines ambitions ; ils ne cessent de réunir des conciles et de juger des causes auxquelles ils sont étrangers. Tel est le rôle en Flandre de deux imposteurs avec lesquels on aboutit toujours en y mettant le prix et dont la main droite est pleine de présents ; ce sont Hugues de Langres, dont la vie et les mœurs sont connues de tous, et Hugues, évêque de Die, dit-on, dont on ne connaît en Flandre que le nom. Cette lettre des clercs de Cambrai est la protestation du gallicanisme indigné. Bien que l'épiscopat français n'ait pas exprimé les mêmes idées en des termes aussi vifs et aussi nets, on peut voir par la correspondance de Grégoire VII qu'il les partageait et qu'il eut souvent à se plaindre des excès de zèle et de pouvoir des légats pontificaux. Le pape dut intervenir lui-même pour remettre les choses au point. La bulle du 9 mars 1078 est très significative à cet égard[115]. C'est l'habitude de l'Eglise de Rome, avoue ingénument le pape Grégoire VII, de tolérer certaines choses, d'en dissimuler d'autres, d'obéir à une discrète modération plutôt qu'à l'inflexible rigueur des canons. Le pape éprouve une peine réelle à voir que plusieurs évêques de France et de Bourgogne ont été suspendus ou condamnés par son légat Hugues de Die. Aussi a-t-il levé la sentence qui pesait sur Manassès, archevêque de Reims, et l'a-t-il rétabli dans sa dignité. Il a fait de même pour Hugues, archevêque de Besançon, parce que la lettre qui l'invitait à un concile ne lui avait pas été transmise par ses clercs ; pour Richer, archevêque de Sens, qui a promis de venir exposer au légat ou de lui faire exposer par un mandataire la cause pour laquelle il n'était pas venu ; pour Geoffroy, évêque de Chartres, qui n'avait pas été invité ; pour Richard, archevêque de Bourges, qui, par colère, avait abandonné sa charge, mais qui promettait de se justifier devant le légat ; pour Raoul, archevêque de Tours, qui n'avait pas eu d'accusateurs légaux. Les excommunications s'abattaient donc sur l'épiscopat français pour les fautes les plus légères, comme celle de ne pas se rendre à un concile tenu par Hugues de Die. Un seul archevêque osa élever la voix contre ce régime de rigueur : c'est Manassès de Reims. Nous voyons, par une lettre que lui adresse Grégoire VII le 22 août 1078, qu'il s'était vivement plaint des légats étrangers et qu'il avait revendiqué les privilèges de son église ; le pape lui répondit que la nécessité contraignait parfois à porter atteinte à certains privilèges[116]. Nous avons conservé, en outre, une lettre adressée en 1079 par Manassès à Hugues de Die lui-même[117] ; c'est la lettre par laquelle il refuse de se rendre au concile de Lyon auquel il avait été convoqué. Il se plaint que, dans un concile tenu deux ans auparavant (à Autun, en 1077) dans la même province, Hugues ait fait attendre son arrivée pendant onze semaines ; Manassès en a appelé au pape, et dans un concile tenu à Rome ses griefs ont été reconnus justes. Il a déclaré que désormais il ne se soumettrait plus à la juridiction de Hugues de Die, et le pape a désigné pour le juger Hugues, abbé de Cluny. Aussi s'est-il rendu au concile de Troyes où se trouvait l'abbé de Cluny, mais il refuse catégoriquement de se rendre à celui de Lyon, pour plusieurs raisons : 1° il n'est pas question de la présence de l'abbé de Cluny à ce concile ; 2° Lyon n'est pas en France ; 3° la région entre Reims et Lyon est très troublée par la guerre ; 4° il ne veut pas que les vexations du concile d'Autun recommencent ; 5° Hugues lui demande de réunir en vingt jours six évêques, ce qu'il considère comme impossible en si peu de temps ; 6° il lui est difficile de trouver six évêques dont la vie soit à l'abri de toute critique. Malgré cette tyrannie que les légats de Grégoire VII et d'Urbain II firent peser sur l'épiscopat français, l'institution avait des avantages, car elle donnait à l'Eglise de France un représentant du pape qui était français. Certains évêques regrettèrent les légats français, lorsque Pascal II employa de nouveau les légats italiens et temporaires. Dans une lettre écrite à Pascal II en 1102[118], Yves de Chartres fait remarquer au pape que les cardinaux a latere envoyés en France ne font que passer et ne peuvent remédier à tous les maux ; on s'en plaint et on trouve que le Saint-Siège songe plus à sa commodité qu'aux intérêts des Eglises ; d'accord avec les évêques de la région, il supplie le pape de nommer un légat français permanent qui servira d'intermédiaire constant, car beaucoup d'évêques, pour diverses raisons, ne peuvent aller à Rome. Hugues de Die, ajoute Yves, paraît désigné pour cette fonction dans laquelle il a déjà rendu de si grands services. Ainsi Hugues, détesté de tous, fut regretté par tous ou tout au moins par beaucoup. Pascal II n'en fut pas moins sourd aux prières des évêques du nord de la France et, abandonnant le mode de gouvernement de Grégoire VII et d'Urbain II, il revint aux légations temporaires[119]. En 1100 il envoie les cardinaux Jean et Benoit qui réunissent un premier concile à Valence, puis, à Poitiers, le concile où fut excommunié Philippe Ier[120] et où l'on décida que les églises pourraient racheter à prix d'argent leurs droits et leurs fiefs[121]. Il n'y eut pas de légations en 1101-1102. En 1103, le pape envoya Richard, évêque d'Albano, qui tint en 1104 les conciles de Troyes et de Beaugency et rétablit les bons rapports entre le roi de France et le Saint-Siège que le mariage avec Bertrade avait altérés[122]. La mission de Richard d'Albano, comme celle des cardinaux Jean et Benoit en 1100, n'eut, pas exclusivement un caractère politique. Les légats italiens s'occupèrent d'une foule d'affaires ecclésiastiques, qui jadis allaient aux légats français. Par exemple, au concile de Troyes, en 1104, Richard rendit une sentence au sujet du monastère de Saint-Gondon-sur-Loire qu'Herbert, abbé de Vierzon, disait avoir été injustement enlevé à son abbaye par les moines de Saint-Florent. Ceux-ci, ayant prouvé que l'abbé de Vierzon n'avait pas rempli les engagements stipulés par un acte de 1095, furent reconnus légitimes propriétaires[123]. La légation de Richard d'Albano cessa aussitôt après le concile de Troyes, mais Pascal II envoya bientôt un nouveau légat, Brunon, évêque de Segni. Brunon tint deux conciles, l'un à Soissons où fut cassé le mariage de Constance, fille de Philippe Ier, avec Hugues, comte de Troyes[124], l'autre beaucoup plus important à Poitiers, le 26 mai 1106[125]. Il essaya d'y prêcher la croisade, mais sans grand succès semble-t-il[126], Il y jugea du moins plusieurs affaires ecclésiastiques ; il fit comparaître l'évêque du Mans, Houel, avec qui les moines de Marmoutier étaient en contestation au sujet de l'église de Chahain que Brunon adjugea à Marmoutier[127]. Après son voyage en France (1107), Pascal II aura un légat français Géraud, évêque d'Angoulême, que, dans une bulle aux évêques des provinces de Bordeaux, Tours, et de Bretagne, il désignera comme son vicaire[128]. Géraud tint plusieurs conciles, notamment celui de Nantes en 1108[129], mais l'histoire de sa légation n'appartient déjà plus au règne de Philippe Ier. Les légats soit permanents, soit temporaires, ont été l'instrument à l'aide duquel les papes gouvernent l'Eglise et la France. C'est grâce à eux, grâce surtout à Hugues de Die, que Grégoire VII et Urbain II ont pu multiplier leurs interventions qui s'étendent aux objets les plus divers. IV Les papes tranchent d'abord des questions purement canoniques que les évêques ne se croient pas assez d'autorité pour juger eux-mêmes et fixent aux évêques des règles de conduite sur certains points délicats en cette matière. C'est presque uniquement à cela que se limitent les interventions d'Alexandre II ; elles ont trait à la direction spirituelle de l'Église de France. Le pape écrit à Gervais, archevêque de Reims, pour lui faire observer que l'abbesse du monastère de Saint-Jean a été déposée sans audience canonique et sans jugement de son évêque, ce qui est contraire aux canons[130] ; ; il revient sur ce sujet dans une bulle au même Gervais et pose comme règle qu'il est injuste d'excommunier quelqu'un sans lui avoir laissé la faculté de se justifier devant un concile[131]. L'attention du pape s'étend à tout en matière de discipline : il ne veut pas que l'on puisse arriver au diaconat et à la prêtrise sans avoir passé par le sous-diaconat ; de tels prêtres devront être suspendus, être ordonnés sous diacres aux prochains Quatre-Temps et arriver régulièrement ensuite aux ordres supérieurs[132]. A Gozlin, archevêque de Bordeaux, il fait de véhéments reproches parce qu'il a trempé dans l'hérésie des Grecs en interdisant de vénérer l'image de la croix de Jésus-Christ et il le menace d'excommunication s'il persévère dans cette erreur[133]. A Geoffroy, évêque de Coutances, il annonce qu'il a remis deux années de pénitence sur cinq à un de ses diocésains qui avait trouvé mort près de lui, la nuit, son fils qui n'avait pas reçu le baptême[134]. Sous les successeurs d'Alexandre II, on trouve encore des interventions de ce genre. Grégoire VII reçoit l'appel d'un certain Gautier de Douai qui se plaignait d'avoir été injustement excommunié par l'archevêque de Reims et se montrait tout prêt à donner satisfaction[135]. Son légat, Amat d'Oloron, dicte à l'archevêque de Tours, Raoul, l'attitude à prendre dans une affaire de mariage non canonique[136]. Urbain II fait savoir à Guillaume, archevêque de Rouen, que, dans certains cas, après une année de pénitence passée en exil, les autres peuvent se faire dans le pays d'origine, à la condition qu'une autre pénitence soit ajoutée aux précédentes pour cette tolérance[137]. C'est au pape que s'adresse l'abbé de Saint-Michel de Bordeaux en 1098 pour obtenir qu'un nouveau cimetière soit créé autour de l'abbaye pour les moines, afin de ne pas être obligé d'aller au cimetière du vieux monastère situé très loin[138]. Le 29 avril 1097, Urbain II écrit à l'archevêque d'Auch récemment ordonné, pour qu'il fasse justice des clercs qui avaient violé un cimetière, et il lui recommande d'observer fidèlement les décrets de l'Eglise romaine à cet égard[139]. A Hugues, archevêque de Lyon, il permet de recevoir dans son diocèse des clercs canoniquement ordonnés par d'autres évêques[140]. C'est enfin à Pascal II qu'est adressée une lettre d'Yves de Chartres qui prouve combien était limitée l'autorité épiscopale en pareilles matières ; Yves adresse à Pascal II un chevalier du nom de Raimbaud qui s'était distingué à la croisade ; ce chevalier, de retour chez lui, avait fait enfermer un moine, lequel avait fait fouetter ses serviteurs qui lui volaient son blé. Yves a imposé à Raimbaud une pénitence de quatorze ans avec jeûne et aumônes ; il supplie le pape d'atténuer la peine, car il n'ose l'adoucir lui-même de crainte de donner un mauvais exemple : le Saint-Siège seul peut en prendre l'initiative[141]. Rome apparaît donc comme la gardienne du dogme et des règles de la discipline ecclésiastique. Le Saint-Siège est aussi chargé de veiller sur l'organisation religieuse des différents pays, et par là il est en quelque sorte garant des circonscriptions épiscopales. Aussi réprima-t-il des tentatives qui furent faites en France à la fin du XIe siècle pour en créer de nouvelles, sauf quand il était de son intérêt de diviser un diocèse en deux. Dans le midi de la France, l'église d'Orange voulait se séparer de celle de Saint-Paul-Trois-Châteaux, dont elle dépendait. Déjà, sous le pontificat d'Alexandre II, Orange ne voulait pas reconnaître comme évêque Géraud et le pape dut écrire au comte d'Orange, Bertrand, pour le prier de ne pas séparer les deux églises unies en vertu d'une constitution du pape Grégoire IV[142]. Malgré la décision pontificale, la séparation ne s'en fit pas moins ; Grégoire VII envoya un légat, mais l'affaire ne fut pas résolue et, entre temps, Guillaume fut élu et consacré évêque d'Orange. Pons, évêque de Saint Paul-Trois-Châteaux, protesta. Urbain II convoqua un concile auquel il invita les deux évoques ; Guillaume ne put fournir de preuves en faveur de la séparation, tandis que l'évêque de Saint-Paul put invoquer des bulles de Grégoire IV et d'Alexandre II. A la suite du concile, le pape décida, le 15 avril 1095, que, à la mort de Guillaume, l'église d'Orange devrait être rattachée à celle de Saint-Paul[143]. Guillaume mourut en 1100 et aussitôt Pascal II écrivit, le 11 avril, à l'archevêque d'Arles, Gibelin, pour qu'il procédât à l'union des deux églises[144]. Le même jour, dans une bulle au clergé et au peuple de l'église d'Orange, il confirma toutes les bulles antérieures relatives à cette union[145]. Il rencontra de vives résistances ; le 10 décembre 1100, il fut obligé d'adresser une nouvelle bulle au clergé et au peuple d'Orange pour les sommer d'obéir à ses décisions[146]. Un débat analogue eut lieu au nord de la France entre les deux églises de Noyon et de Tournai qui voulaient également constituer deux diocèses distincts. Le 20 mars 1073, Alexandre II signifia à toutes les églises de France que les églises de Noyon et de Tournai devraient rester sous le gouvernement d'un même pasteur[147]. Il y eut une nouvelle tentative de séparation en 1098 à la mort de Radbod, évêque de Noyon, mais Urbain II écrivit à Manassès, archevêque de Reims, pour qu'il enjoignît à Tournai de reconnaître le nouvel élu de Noyon, Baudri[148]. Dans le diocèse voisin, la papauté se prononça au contraire pour la séparation des deux sièges épiscopaux de Cambrai et d'Arras. Nous aurons à revenir sur cette question qui a une portée beaucoup plus générale, car elle intéresse à la fois la politique pontificale, la politique impériale et la politique de Philippe Ier. Une contestation d un caractère un peu différent eut lieu en Bretagne. Là, il ne s'agissait pas de circonscriptions épiscopales à proprement parler. L'archevêque de Tours était le métropolitain de tous les évêchés bretons. Or l'évêque de Dol aspirait au titre d'archevêque et voulait ainsi soustraire ces évêchés à l'archevêque de Tours. Le 27 septembre 1076, Grégoire VII concéda le pallium, insigne de la dignité archiépiscopale à Yves, archevêque de Dol, à la condition toutefois qu'il ne se refuserait pas, en temps opportun, à discuter les griefs de Raoul, archevêque de Tours, au sujet de la soumission de Dol à Tours[149]. Raoul se plaignit aussitôt et Grégoire VII dut le rassurer par une bulle du 1er mars 1077 ; il lui promit d'examiner lui-même l'affaire au cours d'un voyage éventuel en France[150]. Yves mourut à ce moment-là et le nouvel archevêque de Dol, nommé aussi Yves, alla à Rome avant le 22 mai 1078[151].Grégoire VII renvoya l'affaire à Hugues de Die[152], puis la fit examiner lui-même dans un concile réuni à Rome. Ce concile se prononça pour la soumission de Dol à Tours et, le 8 mars 1080, dans une bulle solennelle adressée aux évêques de la Bretagne, au clergé et au peuple de la province de Tours, Grégoire VII décréta que la Bretagne devait être soumise à l'église de Tours comme à sa mère et à sa métropole ; mais, pour ne pas ruiner l'autorité de l'archevêque de Dol, il lui permit de porter le pallium[153]. Urbain II ne changea rien aux décisions de Grégoire VII : en 1093, il accorda au nouvel archevêque de Dol, Roland, l'usage du pallium dans les mêmes conditions[154]. Raoul archevêque de Tours protesta[155] : il fit valoir que, depuis le concile de 1080, il avait été prouvé à un concile provincial que Dol n'avait pas de droit sur les évêchés bretons soumis à Tours. A la suite de ce concile, qui est celui de Saintes[156], l'archevêque de Tours et l'évêque de Dol furent convoqués à Rome ; l'évêque ne vint pas. Devant ces représentations de Raoul, Urbain II lui assura, par une bulle du 5 avril 1094, qu'après avoir lu les décrets de Grégoire VII et de plusieurs de ses prédécesseurs, il avait décidé que Dol et les évêchés bretons seraient soumis à Tours, et qu'après la mort de Roland les évêques de Dol n'auraient plus le droit de porter le pallium. Quelques jours après, le 11 avril, Urbain II signifia cette décision aux évêques bretons[157]. On sait par une lettre de Guillaume, évêque de Poitiers, qu'il la confirma au concile de Clermont[158]. Malgré cela il concéda le pallium à Baudri, archevêque de Dol, tout en limitant les circonstances dans lesquelles il devrait le porter[159]. Si la papauté prétend être libre de répartir les diocèses comme elle l'entend, elle veut aussi exercer un pouvoir absolu sur les titulaires de ces diocèses. Ne pouvant les nommer elle-même, elle a du moins le droit de les déposer, de les interdire, de casser leurs sentences et d'annuler leurs actes. Alexandre II n'hésite pas à lever la peine prononcée par l'évêque de Coutances contre certains de ses diocésains qui ne s'étaient pas justifiés d'un homicide dont on les accusait[160]. Il casse toutes les ordinations et toutes les dédicaces faites par Hildegaire, évêque de Chartres, parce qu'il avait aliéné les biens des chanoines, en même temps qu'il frappe d'anathème ceux qui l'avaient ainsi conseillé ou ceux qui recevraient de ses mains des fonctions ecclésiastiques après l'interdit du Saint-Siège[161]. Sous Grégoire VII, les suspensions et les dépositions d'évêques se multiplient pour cause de simonie, mais certaines furent dictées par d'autres motifs, comme celle d'Isembert, évêque de Poitiers en 1074. Dans une bulle du 10 septembre 1074, Grégoire VII reproche à Isembert son extraordinaire audace : il n'a pas craint, alors qu'il était l'objet d'une interdiction de la part des légats, d'exercer les fonctions épiscopales et surtout, quand Amat, évêque d'Oloron, et Gozlin, archevêque de Bordeaux, sont venus à Poitiers pour tenir un concile au sujet du divorce du comte Guillaume, il a fait jeter le trouble dans le concile par ses soldats, il a fait porter atteinte à la dignité du légat et de l'archevêque, il a fait accabler d'injures et de coups de fouet ceux qui les accompagnaient. En conséquence, Isembert devra venir se justifier à Rome avant la Saint-André, c'est-à-dire le 30 novembre ; puis il sera privé de toutes fonctions sacerdotales et de la participation à la sainte communion[162]. Grégoire VII annonçait en même temps cette décision à Gozlin[163], mais Isembert fit la sourde oreille à toutes les admonestations pontificales[164]. Urbain II ne fut pas plus tendre que Grégoire VII pour l'épiscopat français. Même Pascal II, plus conciliant en apparence et plus modéré dans la forme, eut recours aux interdictions quand les évêques s'écartaient de leur devoir. Geoffroy, évêque d'Angers, fut interdit par lui pour avoir pillé les biens de l'abbaye de Marmoutier[165]. Les papes ont donc le droit formel de déposer les évêques comme de les absoudre, si les accusations qui les ont fait déposer ne sont pas justifiées. Nous avons vu que les papes n'avaient pas hésité à casser les sentences de leurs légats, quand elles leur paraissaient injustes ou trop rigoureuses. Aux exemples que nous avons cités on peut ajouter celui de Radbod, évêque de Noyon, absous en 1095 au concile de Plaisance parce que personne n'avait rien prouvé à son endroit. Urbain II, dans une bulle du 9 mars 1095, adressée au clergé et au peuple de Noyon, les prie de porter à la connaissance de Hugues de Die ce qu’ils avaient à reprocher à Radbod, mais, en attendant, il lui restitue tous les privilèges de ses prédécesseurs[166]. Maîtres souverains des diocèses et des évêques, les papes du XIe siècle ont été conduits tout naturellement à s'immiscer dans les affaires intérieures de l'église séculière ; on peut toujours en appeler à eux et, par-dessus les évêques, ils peuvent juger toutes les causes. Aussi leurs interventions sont-elles multiples, même dans les moindres détails de l'administration diocésaine, jusqu'aux questions de préséance et d'étiquette. C'est une bulle du pape Urbain II qui décide que, lors de la consécration de l'archevêque de Bourges, l'évêque de Clermont-Ferrand aura la première place (18 avril 1097)[167]. Il faut encore l'intervention pontificale et une bulle d'Urbain II[168] pour mettre fin à un débat du même genre qui s'était élevé entre le légat Amat et les chanoines de Saint-Martin de Tours. Lorsque Amat et d'autres légats étaient venus à Tours, les chanoines avaient refusé de venir processionnellement au-devant d'eux. Amat les excommunia de ce fait au concile d'Issoudun, mais quand Urbain II vint à Tours, en 1096, les chanoines lui montrèrent les privilèges de ses prédécesseurs d'après lesquels seuls le pape, le roi et l'archevêque de Tours avaient le droit d'exiger une réception processionnelle. Urbain II ne put donc que les absoudre et menacer de peines ecclésiastiques les légats ou évêques qui contreviendraient à ce privilège. Grégoire VII est intervenu à Poitiers dans un cas analogue, mais moins grave, car les légats n'étaient pas en cause En 1074, ainsi qu'il le rapporte lui-même dans une bulle du 16 mars[169], les chanoines de Poitiers vinrent se plaindre à Rome de ce que les clercs de Saint-Hilaire leur avaient dénié le droit d'aller processionnellement à Saint-Hilaire le jour de la Toussaint et le jour de la fête de saint Hilaire, d'y faire dire la messe par l'évêque, s'il était là, ou, à défaut de l'évêque, par le doyen ou un autre dignitaire du chapitre. Grégoire VII reconnut formellement ce droit aux chanoines et pria les clercs de Saint-Hilaire de ne pas y mettre obstacle. La papauté est intervenue de même dans un démêlé entre les chanoines de Saint-André de Bordeaux et les clercs de Saint-Seurin au sujet du cimetière de leur église. Ceux-ci en disputaient la possession aux chanoines. Urbain II, par une bulle du 3 mai 1099, le leur restitua[170]. On pourrait multiplier les exemples à l'infini, et on est en droit de s'étonner que des affaires d'une aussi minime importance n'aient pu être réglées par les évêques. L'évêque, dans l'administration de son diocèse, doit toujours compter avec Rome. A plus forte raison, cette action du Saint-Siège se fait-elle sentir encore davantage dans tout ce qui intéresse l'Eglise régulière qui est sous sa dépendance plus immédiate. Les démêlés entre réguliers ne diffèrent guère de ceux que nous avons notés entre séculiers. De même que certaines églises veulent se constituer en diocèses distincts, certaines abbayes ont la prétention de s'affranchir de celle à laquelle elles ont été jusque-là soumises, et le pape est obligé de les rappeler à l'ordre. C'est le cas par exemple des deux monastères de Conques et de Figeac. Le 7janvier 1084, Grégoire VII écrit aux moines de Conques et de Figeac que, selon les dispositions des fondateurs des deux abbayes, le monastère de Figeac devait être soumis à celui de Conques. Or deux abbés avaient été régulièrement ordonnés par le Saint-Siège qui ignorait le cas des deux monastères ; celui qui vivrait le plus longtemps succéderait à l'autre et, de toute façon, Figeac resterait soumis à Conques[171]. Le 5 juillet 1096, Urbain II fut obligé à son tour d'intervenir. Dans une lettre à Hugues, abbé de Cluny, il rappela que Grégoire VII avait ordonné l'union des deux monastères de Conques et de Figeac, et l'abbé de Conques, qui, contrairement à cette bulle, s'était établi au monastère, avait été déposé au concile de Clermont, tandis que celui de Figeac était mis à la tête des deux abbayes. Hugues de Cluny contesta la bulle de Grégoire VII ; la question fut de nouveau portée au concile de Nîmes qui, après un long débat, décida qu'un abbé serait rendu aux deux monastères et que les moines de Figeac seraient sous la surveillance de l'abbé de Cluny[172]. Les moines de Figeac avaient donc ce qu'ils désiraient. Ceux de Saint-Cybard d'Angoulême, qui s'étaient dérobés au monastère de Saint-Jean-d'Angély, furent au contraire excommuniés par une bulle d'Urbain II, adressée à Adémar, évêque d'Angoulême, le 29 décembre 1095, jusqu'à soumission complète[173]. Le plus souvent, les rivalités entre monastères sont suscitées par des revendications d'églises. Un des plus longs procès de ce genre fut celui qui mit en conflit l'abbé de Sainte-Croix de Bordeaux avec celui de Saint-Sever, au sujet de l'église Notre-Dame de Soulac. Arnaud, abbé de Saint-Sever, avait pris cette église à Sainte Croix. Appelé à un concile par le légat pontifical Géraud, évêque d'Ostie, il n'avait même pas daigné répondre à la convocation. Le concile avait rendu l'église à Sainte-Croix et Grégoire VII, par une bulle du 14 mars 1074, confirma cette décision. Si Arnaud avait des réclamations à élever, il lui était donné comme délai jusqu'à la Toussaint[174]. Arnaud dut protester, car le 8 mars 1079, Grégoire VII institua juges du différend Hugues de Die et Amat d'Oloron[175]. L'affaire traîna en longueur et n'était pas encore terminée sous Pascal II, vers 1105[176]. Un différend analogue se produisit en Auvergne entre les moines de Blesle et ceux de la Chaise-Dieu qui avaient enlevé aux précédents une église consacrée à Saint-Etienne et Saint-Léon avec l'appui de l'évêque de Clermont. Les moines de Blesle durent en 1095 invoquer la protection du pape[177]. Ces rivalités entre monastères étaient, en somme, très fréquentes. Pascal II interdira de même aux moines de Flavigny de molester ceux de Corbie (31 mai 1107)[178]. A côté de ces conflits entre séculiers et entre réguliers, il y en a d'autres où l'intervention de la papauté est particulièrement nécessaire ; ce sont ceux qui mettent aux prises les deux ordres de clergé. Ceux-là ne peuvent être tranchés ni par l'autorité épiscopale ni par l'autorité abbatiale ; ils ne peuvent l'être que par le pape. Alexandre II eut ainsi à protéger le monastère de Vendôme contre l'évêque de Chartres, Arnoul, qui lui avait enlevé sept églises. Le pape le menaça de l'interdit s'il ne les rendait immédiatement[179], et il concéda même aux moines le droit d'excommunier directement leurs oppresseurs si l'évêque refusait de leur rendre justice[180]. Arnoul provoqua aussi une intervention de Grégoire VII. Isembard, abbé de Saint-Laumer, était venu se plaindre à Rome de ce qu'à son retour de Jérusalem il avait trouvé un autre abbé, du nom de Guy, installé à sa place. Grégoire VII pria l'évêque de rétablir Isembard si l'on ne pouvait invoquer contre lui d'autre grief que d'avoir été à Jérusalem (27 novembre 1073)[181]. Grégoire VII est intervenu dans un très grand nombre de cas de ce genre. En voici quelques-uns : le 22 mars 1074, il fait de violents reproches à l'évêque de Nîmes, Frotier, qui, au temps d'Alexandre II, avait agi contre toute justice envers le monastère de Saint-Gilles ; il avait osé saisir l'abbé consacré par le pape, et, par là, avait porté injure à la majesté romaine ; il avait également excommunié les moines, ce qui était réservé au Saint-Siège ; le pape le pria donc de les laisser célébrer les offices sans les inquiéter et le menaça de rigueurs s'il persistait dans son attitude[182]. A Tours, au contraire, Grégoire intervient en faveur de l'archevêque Raoul qui s'était plaint d'un refus d'obéissance de l'abbé de Beaulieu (15 novembre 1074)[183]. De même, il prie les moines de Déols de restituer deux monastères à Guy, évêque de Limoges, tout en les autorisant à plaider devant les légats (24 mars 1080)[184]. Sous Urbain II, le rôle de la papauté est identique. Lorsque, en 1091, les chanoines de Billom envahirent le monastère de Saint-Loup de Sauxillanges, ils pillèrent tout jusqu'aux ornements et aux reliques ; le pape écrivit à Durand, évêque de Clermont-Ferrand, qu’il s'étonnait de ce qu'il n'eût pris aucune mesure contre les chanoines ; il le pria de leur faire rendre tout ce qu'ils avaient pris et de les inviter, s'ils prétendaient exercer des droits de justice sur Sauxillanges, à venir les faire valoir à Rome[185]. En 1098, Urbain II protège les moines de Saint-Hubert contre l'évêque de Liège Otbert qui les persécutait et qui fut, de ce fait, excommunié[186]. En 1099, il enjoint à Engeran, évêque de Laon, de faire preuve de plus d'aménité dans ses rapports avec les moines de Saint-Rémi[187]. C'est donc toujours la papauté qui juge en dernier ressort ; par là son autorité s'accroît sur les évêques et les chanoines comme sur les moines. Évêques, chanoines et moines sont parfois menacés par les seigneurs laïques qui convoitent les biens d'église ; les papes vont intervenir et rappeler les laïques au respect de l'Eglise et de ses ministres. Sous Alexandre II, ces interventions sont rares, mais le pape n'hésite pas à rappeler aux seigneurs les lois de la morale chrétienne. En 1063, il écrit à Bérenger, vicomte de Narbonne, pour qu'il protège les Juifs et les empêche d'être mis à mort, car Dieu n'aime pas l'effusion du sang et ne se réjouit pas du meurtre des méchants[188]. En 1065, il prie Richer, archevêque de Sens, Hugues, évêque de Troyes, Roger, évêque de Châlons, de veiller à ce que des personnes mal intentionnées n'inquiètent pas Brunon, abbé de Montiérender, que le pape Léon IX avait pris sous sa protection[189]. Grégoire VII et Urbain II se sont attaqués surtout aux princes simoniaques, mais, en outre, toutes les fois qu'un personnage ecclésiastique avait été lésé par un laïque, ils ont élevé la voix. En 1074, l'archevêque de Tours Raoul se plaint de ce qu'un certain Lanzlin, du diocèse de Sens, l'ait attaqué en voyage, qu'il ait dépouillé ou blessé sa suite et tué un de ses parents ; aussitôt Grégoire VII prie Richer, archevêque de Sens, d'exiger satisfaction de Lanzlin et, s'il résiste, de le frapper de peines canoniques[190]. Le même jour, il écrit à Hugues, chevalier de Sainte-Maure, que l'archevêque de Tours, Raoul, l'accuse de retenir injustement des biens de l'église de Tours ; il lui ordonne de donner satisfaction immédiatement ou de venir à Rome avec un messager de l'archevêque, afin que le pape puisse prononcer ; sinon il sera frappé d'excommunication[191], Urbain II, en 1096, requiert l'appui du comte de Champagne contre certains de ses sujets qui avaient pillé une église appartenant au monastère de Verdun[192]. C'est surtout Pascal II qui a eu à juger des conflits entre clercs et laïques. Peu de temps après son avènement, le 14 février 1100, il écrivit à Yves de Chartres pour interdire le pillage du palais épiscopal à la mort de l'évêque[193]. Nous savons, en effet, tant par une ordonnance du comte Henri et de l'évêque Yves[194] que par une autre bulle adressée par Pascal II aux clercs de l'église de Chartres le 26 mars 1102[195], que c'était une habitude à Chartres que de saccager le palais de l'évêque au moment de sa mort. Pascal II, rappelant le décret du concile de Clermont qui prononçait l'excommunication contre ceux qui s'emparaient des biens des évêques, des prêtres et en général de tous les clercs qui venaient à mourir, défendit formellement de dépouiller le palais qu'Yves s'était donné tant de mal à construire, lorsque l'évêque ou l'un de ses successeurs passeraient de vie à trépas. Non seulement tout le mobilier de l'évêque, mais tout ce qu'il possédait dans la ville ou au dehors devrait être respecté, et si quelqu'un, archevêque, roi, duc, comte, vicomte, avoué, défenseur, venait à oublier cette bulle, il serait excommunié jusqu'à ce qu'il eût accordé satisfaction. Pascal II ne s'est pas borné à des ordonnances réglant les rapports des laïques avec les évêques et les clercs. Il est intervenu plusieurs fois pour faire respecter les biens ecclésiastiques par des laïques cupides et pillards. Le 8 décembre 1102, il écrit à l'archevêque de Bordeaux, aux évêques de Poitiers et de Saintes, pour qu'ils fassent justice canonique de certains nobles qui, dans leurs diocèses, avaient pris des biens au monastère de Montierneuf de Poitiers[196]. En 1104, il accueille la requête des chanoines de Paris qui lui demandaient de les protéger, comme l'avait fait Urbain II, contre les exactions du comte de Dammartin, de prier les évêques de Beauvais et Meaux de l'excommunier et de jeter l'interdit sur ses châteaux[197]. Le 25 avril 1104, il prie Lambert, évêque d'Arras, de juger l'affaire de l'abbaye de Samer dont l'abbé prétendait avoir été chassé par le comte de Boulogne[198]. Ce comte de Boulogne se plaisait à piller les biens ecclésiastiques. En 1105, Lambert, évêque d'Arras, se plaignit de ce qu'il ne voulait pas lui laisser la tranquille possession d'autels qui lui avaient été légués par Geoffroy, archidiacre d'Arras, puis évêque de Paris[199]. Le pape lui ordonna de ne plus inquiéter l'évêque et de faire la paix avec lui[200]. De toutes les affaires de ce genre, la plus grave fut celle qui mit aux prises le comte de Toulouse Bertrand et les moines de Saint-Gilles. Une première bulle de Pascal II, écrite entre 1101 et 1104, reproche au comte d'avoir envahi le bourg de Saint-Gilles et le prie de ne pas rester sous le coup d'une faute aussi grave ; il ne lui servirait à rien de faire le pèlerinage de Jérusalem s'il restait enchaîné par les liens de l'excommunication et de l'anathème qui avaient été prononcés contre lui à Nîmes[201]. En même temps, Pascal II annonçait à Etienne, abbé de Saint-Gilles, et à ses moines qu'il allait excommunier Bertrand s'il ne cessait de tourmenter le monastère[202]. Bertrand ne tint pas compte des avertissements du Saint-Siège. Une bulle du 4 février 1107 rapporte un nouveau pillage de l'abbaye ; le comte de Toulouse avait violemment envahi le monastère, avait tout saisi, y compris les objets sacrés, avait introduit des courtisanes, ce qui lui avait valu d'être excommunié[203]. Richard, archevêque de Narbonne, et ses suffragants durent jeter l'interdit sur les terres de Bertrand et de ses chevaliers et y suspendre complètement l'office divin, à l'exception du baptême des enfants et des pénitences des mourants, s'ils ne s'amendaient avant le carême[204]. L'archevêque d'Arles Gibelin et l'évêque d'Avignon Aubert furent plus spécialement chargés de veiller au châtiment de Bertrand[205]. En même temps, le pape fit appel au concours des laïques pour défendre l'abbaye ; le 8 février, il demanda à Bernard, vicomte de Béziers, à Aimeri, vicomte de Narbonne, à Guillaume de Montpellier et à Bernard d'Anduze de répondre il l'appel de l'abbé quand il les appellerait à son aide contre le comte de Toulouse[206]. Bertrand se refusa à revenir à de meilleurs sentiments. Le 14 mars 1107, Pascal II l'excommunia et il pria les moines de Saint-Gilles de s'abstenir de tout rapport avec lui jusqu'à ce qu'il eût donné satisfaction[207]. Bertrand se décida alors à aller à Rome, comme le rapporte une bulle du 25 juillet 1107[208] ; en présence de l'abbé de Saint-Gilles, de plusieurs moines et de plusieurs habitants qui étaient venus avec lui, on lui fit lire une charte de Raymond, comte de Toulouse, relative à l'abbaye ; par cette charte, confirmée, en présence d'Urbain II, au concile de Nimes, le comte renonçait à toutes les charges et à toutes les coutumes dans les villas qui dépendaient de l'abbaye. Bertrand y renonça à son tour ; il exprima ses regrets pour tout le mal qu'il avait fait et fut absous. Le pape profita de ces incidents pour rattacher plus étroitement l'abbaye à Rome, et, dans une bulle qui semble datée du 15 décembre 1107, il expliqua aux évêques en deçà et au delà du Rhône que le monastère de Saint-Gilles dépendait du Saint-Siège ; il leur prescrivit de n'en jamais rien exiger sans être venu préalablement le trouver avec l'abbé[209]. Quant à Bertrand, il ne persista pas longtemps dans ses dispositions pacifiques. Dès l'année 1108, il recommença à inquiéter le monastère et Pascal II dut le menacer de nouveau de l’excommunication par l'intermédiaire des évêques de Nîmes, Valence et Uzès[210]. C'est que, comme l'apprend une autre bulle du 14 mai 1108, Bertrand avait maltraité les moines, avait envahi de nouveau les domaines du monastère et emmené des captifs qu'il retenait encore ; Eustache, évêque de Valence, et Léger, évêque de Viviers, furent chargés de vérifier les faits et d'exiger une satisfaction immédiate[211]. Ce qui aggravait l'affaire cette fois, c'est que certains évêques, comme Bérenger, évêque de Fréjus, et Léger, évêque d'Arles, voulant sans doute soustraire l'abbaye à la tutelle du Saint-Siège, avaient encouragé le comte et collaboré à son expédition[212]. Ainsi, par la menace de l'excommunication et de l'interdit, la papauté peut forcer les laïques à respecter les biens d'Eglise ; des armes spirituelles, c'est elle qui dispose toujours en dernier ressort. Cependant tous les démêlés entre clercs et laïques ne vont pas jusqu'à elle, et parfois l'autorité épiscopale suffit pour y mettre fin. En 1102, Hugues, évêque de Châlons, fut enfermé en prison par Aubri de Meslay. Manassès, archevêque de Reims, excommunia le seigneur[213] et, sans que Rome fût intervenue, l'évêque fut délivré[214]. On ne voit pas non plus que le Saint-Siège ait pris part aux démêlés d'Ida, comtesse de Mons et de Manassès, évêque de Cambrai. Manassès, dans une lettre à Lambert, évêque d'Arras (1102), se plaint vivement de l'hostilité d'Ida qui ne cessait de le persécuter, et lui demande de jeter l'interdit sur la terre de cette femme qui ne rougit pas d'offenser Dieu et de déshonorer le Saint-Siège, l'église de Reims et celle d'Arras[215]. Manassès, archevêque de Reims, appuya cette requête auprès de Lambert[216]. Mais, de son côté, Ida assura Lambert de son obéissance et le supplia de pas écouter les calomnies dont elle était l'objet[217]. Pascal II laisse aussi Yves de Chartres régler lui-même ses différends avec Adèle, comtesse de Chartres. Les rapports entre l'évêque et la comtesse furent d'abord courtois. Dans une de ses lettres[218], Yves se félicite de ce que la santé d'Adèle se soit rétablie, mais il voudrait aussi que la santé de son âme fût meilleure. Dans une autre[219], il la prie de ne pas tenir compte des bruits qu'on pourrait faire courir sur des actes d'hostilité de sa part. Mais, en 1103, une véritable conjuration se forma contre Yves ; Guillaume, fils de la comtesse Adèle, avait juré la mort de l'évêque et des clercs de Chartres, et il avait fait entrer dans cette conjuration tous les citoyens qui relevaient de son ban. Au lieu d'avoir recours à Rome contre le comte, Yves s'adressa seulement à Daimbert, archevêque de Sens, son métropolitain, et lui demanda s'il était d'avis de lancer l'anathème[220]. Yves différa cependant cet anathème par égard pour la comtesse[221] qu'il avait besoin de ménager à ce moment pour une affaire beaucoup plus grave. La comtesse voulait faire entrer dans le chapitre de Chartres des fils d'affranchis ; les chanoines s'y opposaient, affirmant qu'un tel acte eut été contraire à leurs statuts. Yves soutenait les chanoines[222]. Adèle chercha à terroriser ceux-ci ; ses sergents, comme le révèle une lettre d'Yves[223], saisirent le blé de l'église à Châteaudun et à Bonneval, ainsi que le vin du chantre Audoin, et commirent quantité d'autres méfaits. Les chanoines réclamèrent l'interdiction du culte dans la ville et le diocèse jusqu'à ce que satisfaction leur eût été donnée. Yves supplia la comtesse de faire restituer aux clercs ce qui leur appartenait et de ne pas le contraindre à cette grave mesure. Le prince Louis chercha à s'interposer[224] ; il pria Yves de venir le trouver, mais Yves s'excusa en annonçant au jeune prince que la comtesse reconnaissait pour juge de cette affaire Richard d'Albano, légat pontifical[225]. Richard ne régla d'ailleurs pas l'affaire qui ne fut terminée que par une décision du pape Pascal II. Celui-ci, avec l'assentiment de l'évêque[226], décida que les enfants des gens de la comtesse pourraient entrer dans le chapitre s'ils étaient de naissance libre. C'était un véritable compromis. Ainsi, toutes les fois qu'une question grave se pose pour l'Eglise de France, c'est au jugement du pape qu'elle s'en remet : séculiers, réguliers, laïques, reconnaissent bon gré mal gré la suprématie romaine. Cette Eglise qu'il s'est asservie, le Saint-Siège va essayer d'en tirer le plus de ressources possible. La création de l'administration pontificale, la lutte contre les empereurs provoquent des dépenses. Pour y pourvoir, il faut augmenter les recettes, et la papauté va faire appel à certaines églises, en particulier à celle de France. En mars 1074, Grégoire VII rappelle aux abbés et prélats de Gaule, que certaines églises, en vertu des bulles de ses prédécesseurs, doivent des cens annuels à saint Pierre[227]. Certaines ont négligé de s'acquitter de cette redevance ; elles doivent réparer et payer ce qui est dû au légat Hugues de Die chargé de recouvrer les cens des retardataires. Dans ce décret, il ne s'agit que de quelques églises particulières. Une bulle de 1081 a une portée beaucoup plus générale[228] : Grégoire VII prie l'évêque d'Albano et le prince de Salerne, qu'il a envoyés comme légats, de déclarer à tous les Français que, s'ils sont fils obéissants du Saint-Siège, chaque maison doit chaque année payer un denier à saint Pierre, sous prétexte que Charlemagne offrait chaque année douze cents livres pour le service du Saint-Siège. Urbain II, sans formuler aussi nettement la théorie, l'a également mise en pratique : le 2 novembre 1093, il informe les évêques et abbés d'Aquitaine, Gascogne et Bourgogne inférieure que Renaud, abbé de Saint-Cyprien de Poitiers, a été chargé de récolter de l'argent pour le Saint-Siège qui se trouve dans une détresse lamentable[229]. Il écrit en même temps à Renaud pour qu'il insiste auprès des évêques, des seigneurs, de tous les catholiques en général. Les monastères spécialement devront s'acquitter du cens, mais tous les fidèles doivent venir en aide à l'Eglise romaine[230]. Certains laïques ne demandaient d'ailleurs pas mieux que de faire des offrandes au Saint-Siège. En 1085, Pierre, comte de Melgueil, fit don à Grégoire VII, en la personne de son légat Pierre d'Albano et en celle de Geoffroy, évêque de Maguelonne, du comté de Substantion et des droits qu'il avait sur l'évêché de Maguelonne, et il s'engagea à payer à Rome chaque année une once d'or comme cens[231]. Ainsi le cens était payé non seulement par l'Eglise, mais même par des laïques. Rome dispose donc en France d'un pouvoir religieux qui chaque jour augmente davantage. Par l'institution des légats, par son intervention continuelle dans la plupart des affaires ecclésiastiques, elle a placé l'Eglise de France sous son autorité directe et immédiate. Rien ne se fait plus sans l'ordre ni sans l'assentiment du Saint-Siège. Or, de son côté, le roi Philippe Ier considérait l'Église comme assujettie au pouvoir royal au même degré que la société laïque. Allait-il tolérer cette ingérence perpétuelle du Saint-Siège dans les affaires ecclésiastiques de son royaume ?
V Dans leur tentative de subordination de l'Église de France au Saint-Siège, les papes devaient d'autant plus fatalement se heurter à l'autorité royale qu'ils prétendaient non seulement gouverner la société ecclésiastique, mais donner des règles de conduite à la société laïque. En Allemagne, au même moment, l'autorité impériale se dresse en face de l'autorité pontificale qui prétend s'imposer à elle ; la grande lutte du sacerdoce et de l'empire vient de s'engager. En France, le conflit ne prend pas les mêmes proportions, mais il se manifeste dès le pontificat d'Alexandre II. Dans une bulle qui remonte au milieu de l'année 1063[232], Alexandre II pose nettement les revendications de la papauté vis-à-vis du roi. Il écrit à Philippe Ier que les décrets du Saint-Siège doivent être considérés par lui comme ayant la même valeur que tous les canons de l'Eglise ; il cite à l'appui de sa théorie une sentence de Léon le Grand : Il serait quelque peu insensé, écrivait ce pape, de tenter quelque chose contre celui qui a pour tuteur et pour patron l'Apôtre qui tient en mains les clefs du royaume du ciel, de crainte d'attirer la vengeance de saint Pierre. La thèse est donc très nette : la volonté du Saint-Siège ne doit pas connaître d'obstacles et les rois doivent s'incliner devant elle. Or, cinq ans plus tard, en 1068, dans un diplôme pour l'abbaye de Saint-Denis[233], à la thèse romaine Philippe Ier oppose la thèse royale. Sans doute il reconnaît la suprématie du Saint-Siège en matière ecclésiastique, mais il laisse bien entendre que la juridiction de ce dernier sur l'Église ne peut s'exercer sans l'assentiment du roi. Il s'agissait d'un conflit entre l'évêque et le clergé de Paris d'une part, l'abbé de Saint-Denis d'autre part. Malgré les privilèges accordés à Saint-Denis par plusieurs rois et plusieurs papes, l'évêque de Paris avait prétendu exercer sa juridiction sur le monastère. L'abbé de Saint-Denis se plaignit au pape Alexandre II qui convoqua les deux parties en sa présence et renouvela, en 1065, les décrets de ses prédécesseurs qui accordaient l'exemption à Saint-Denis[234]. Alexandre II eut soin de rappeler à Philippe Ier et au comte Baudoin les privilèges de cette abbaye exempte[235] ; il en informa également l'archevêque de Sens Richer, métropolitain, et l'évêque de Paris[236]. Philippe Ier ne fit aucune difficulté pour confirmer les privilèges de ses prédécesseurs, mais, dans le diplôme délivré à cette occasion, il a soin de bien délimiter les pouvoirs du roi et ceux du pape. Après avoir exposé les origines de la querelle, il explique que la cause est venue en sa présence et en celle de ses fidèles, mais, comme le procès avait un caractère plus ecclésiastique que laïque, il a été terminé, avec la permission du roi, en cour de Rome et, maintenant que l'affaire est finie, le roi confirme la décision pontificale, en renouvelant pour Saint-Denis les privilèges de ses prédécesseurs[237]. En résumé, la théorie de Philippe Ier est la suivante : ce n'est qu'avec la permission et. en quelque sorte, en vertu d'une délégation du roi, que le pape peut juger une affaire, même ecclésiastique, et sa sentence, pour être valable, a besoin de la confirmation royale. Nous sommes loin de la théorie romaine, exprimée plus haut par Alexandre II lui-même, d'après laquelle les rois doivent plier devant les injonctions du Siège apostolique. Malgré ces divergences, il n'y eut pas de conflit sous le pontificat d'Alexandre II, pacifique et disposé à la conciliation, plus intransigeant en théorie qu'en pratique. D'ailleurs le roi est encore jeune, et c'est l'archevêque de Reims, Gervais, qui dirige la politique ecclésiastique. La seule affaire un peu sérieuse fut, en 1065, celle d'Hildegaire qui s'était emparé violemment et par simonie du siège de Chartres. Alexandre II pria Gervais d'avertir le roi et les seigneurs qu'il ne supporterait pas plus longtemps la présence d'Hildegaire à Chartres ; il agita la menace de l'interdit[238]. Gervais s'acquitta avec zèle de la mission dont le chargeait le pape, car, peu après, une autre bulle[239] le félicita d'avoir donné de bons conseils au jeune roi et Gervais put témoigner à Philippe Ier et à ses optimates toute la gratitude du Saint-Siège. Mais le 21 avril 1073, Alexandre II meurt et, avec Hildebrand qui lui succède sous le nom de Grégoire VII[240], les rapports de la royauté et du Saint-Siège vont prendre une allure toute différente. |
[1] Cf. Lot, Etudes sur le règne de Hugues Capet, p. 82 et suiv.
[2] Jaffé, Regesta pontificum Romanorum, n° 5519 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 708.
[3] Dans la lettre 35 d'Yves de Chartres (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 83), on relève en effet cette phrase : Postremo, quia non de veritatis tramite, sed de odii fomite mea procedit accusatio, apostolicam sedem appello : quod omnibus in crimine pulsatis apostolica concedit auctoritas, ut per se aut per vicarios suos, loco et tempore quod mihi præscripserit, causam meam discutiat, et, cum peroratum fuerit, légitimant sententiam proferri præcipiat.
[4] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 667.
[5]
Greg. VII ep. coll. 23. (Jaffé, Bibl. rer.
Germ., t. II. p. 549.)
[6] Cf. Jaffé, n° 3032 ; Rec. des histor. de France, t. VII, p. 459.
[7] Cf. Lot, Etudes sur le règne de Hugues Capet, p. 100.
[8]
Greg. VII Reg., l. VI, ep. 34. (Jaffé, Bibl.
rer. Germ., t. II. p. 370.)
[9] Greg. VII Reg., l. VI, ep. 34. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II. p. 370.)
[10] Greg. VII Reg., 1 VI, ep. 35. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 372.)
[11] Jaffé, n° 5115 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 695. Ici la primatie est donnée à la Belgique seconde ; cela tient au lieu de naissance d'Urbain II.
[12] Jaffé, n° 5688 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 727.
[13] Cf. Pariset, De primordiis Bituricensis primatiæ,
[14] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 785.
[15] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 668. — Cf. une autre lettre de Gebuin. (Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 672.)
[16] Cf. une lettre d'Ernaud, évêque du Mans. (Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 669) et une lettre des évêques de la province de Lyon aux évêques et clercs de la province de Tours. (Ibid., t. XIV, p. 673.)
[17] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 671.
[18] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 671.
[19] Jaffé, n° 5600 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 716.
[20] Jaffé, n° 5600 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 715.
[21] Yves de Chartres, ep. 50. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 87.)
[22] Yves de Chartres, ep. 54. (Migne, Patr. lat., t. CLXII, col. 65.)
[23] Yves de Chartres, ep. 58. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 90.)
[24] Yves de Chartres, ep. 59. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 90.)
[25] Yves de Chartres, ep. 60. (Migne, Patr. lat., t. CLXII, col. 70.)
[26] Yves de Chartres, ep. 60. (Migne, Patr. lat., t. CLXII, col. 70.)
[27] Migne, Patr. lat., t. CLVII, col. 520-522.
[28] Yves de Chartres, ep. 65. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 96.)
[29] Yves de Chartres, ep. 67. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 99.)
[30] Geoffroy de Vendôme, l. II. ep. 18. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 271.)
[31] Geoffroy de Vendôme, l. II. ep. 18. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 271.) — Cf. Compain, Etude sur Geoffroy de Vendôme.
[32] Tous ces détails se trouvent dans une bulle d'Urbain II, adressée à Hugues de Die le 24 avril 1099. (Jaffé, n° 5788 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 735.)
[33] Jaffé, n°6510 ; Migne, Patr. lat., t. CLXIII, col. 399.
[34] Quantin, Cartulaire de l'Yonne, n° CXXXI, t. I, p. 245-247.
[35] Jaffé, n° 5689 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 728.
[36] Jaffé, n° 5690 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 728.
[37] Jaffé, n° 5808 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 17.
[38] Clarius, Chronicon S. Petri Vivi Senonensis, année 1082. (Duru, Bibl. hist. Yonne, t. II, p. 511.)
[39] Yves de Chartres, ep. 79. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 105.)
[40] Yves de Chartres, ep. 83. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 106.)
[41] Hugues de Flavigny, I. II. (Monumenta Germaniæ historien, Scriptores, t. VIII, p. 410.)
[42] Jaffé, n° 4516 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 534.
[43] Hugues de Flavigny, l. II. (Monumenta Germaniæ historien, Scriptores, t. VIII, p. 410.)
[44]
Cf. S. Pétri Damiani iter Gallicum. (Migne, Patr. lat. t. CXLV, col. 876-878.)
[45] Il en sera question plus loin.
[46] Notitia de calumnia Rotonensium monachorum. (Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 151.)
[47] Jaffé, n° 4716 ; Bibl. Nat., ms. lat. 16992, fol. 202.
[48] Jaffé, n° 4603 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 544.
[49] Greg. VII Reg., l. I, ep. 62. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 81-82.) — Géraud présida, d'après la chronique de Saint-Maixent (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 401 ; Marchegay et Mabille, Chroniques des églises d'Anjou, p. 406), le concile de Poitiers en 1075.
[50]
Greg. VII Reg., l. IV, ep. 17. (Bibl. rer.
Germ., t. II, p. 264.)
[51] Greg. VII Reg., l. VII, ep. 1. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
379-381.)
[52] Greg. VII Reg.. l. VII, ep. 1. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
379-381.)
[53] On trouve dans une lettre d'Amat, relative au concile de Saintes, les deux souscriptions suivantes : Signum Amati vicarii, factum in Santonensi concilio. — Signum Hugonis vicarii in eodem concilio. (Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 767.)
[54] Cf. Mabillon, Analecta, t. V, app. p. 633, n. 9 ; Baluze, Misc., t. II, pr. 4 ; Histoire littéraire de la France, t. IX, p. 226-233.
[55]
Greg. VII Reg., l. II, ep. 2. (Bibl. rer. Germ.,
t. II, p. 110.)
[56] Greg. VII ep. coll. 21. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 547-548.)
[57] Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio, t. XX, p. 447-448.
[58] Greg. VII Reg., l. VII, ep. 10. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 391-392.)
[59] Chronicon Britannicum. (Lobineau, Hist. de Bretagne, t. II, p. 33.)
[60] Sur la date du concile, cf. Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 764, n. c.
[61] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 763-765.
[62] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 670.
[63] Robert de Saint-Marien d'Auxerre, année 1081. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 279.)
[64] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 767.
[65] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 768.
[66] Sur Hugues de Die, cf. Hinschius, Kirchenrecht ; Lühe, Hugo von Die.
[67]
Hugues de Flavigny, l. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 410-411.)
[68] Greg. VII Reg., l. I, ep. 69. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 87-88.)
[69] Migne, Patr, lat., t. CLVII, col. 507.
[70]
Hugues de Flavigny, I. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 413.)
[71] Migne, Patr. lat., t. CLVII, col. 507-509.
[72] Chronicon S. Beniqm Divionensis, anno MLXXVII. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 310.)
[73]
Greg. VII Reg., l. IV, ep. 22. (Bibl. rer.
Germ., t. II, p. 272-275.)
[74]
Hugues de Flavigny, I. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 415.)
[75] Cf. plus loin, c. III.
[76]
Hugues de Flavigny, l. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 418.)
[77]
Hugues de Flavigny, l. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 421-422.)
[78]
Hugues de Flavigny, l. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 422.)
[79] Vita S. Arnulf, l. II, c. IV. (Acta Sanctorum ordo S. Bened., sæc. VI, part. 2, p . 531.)
[80]
Hugues de Flavigny, l. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 460.)
[81] Greg. VII Reg., l. VIII, ep. 42. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
492-493.)
[82] Hugues de Flavigny, l. II. (Monumenta
Germaniæ historica, Scriptores, t. VIII, p. 466.)
[83] De controversia Guillelmi, Rotomagensis archiepiscopi. (Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 69.)
[84] Notitia definitionis inter monachos S. Victoris Massiliensis et Psalmodienses. (Rec. des histor. de France, t. XIV. p. 104.)
[85] Chronicon S. Maxentii Pictavensis. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 402 ; Marchegay et Mabille, Chroniques des églises d'Anjou, p. 409.)
[86] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 769.
[87] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 772.
[88] Jaffé, n° 5492 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 706.
[89] Jaffé, n° 5605 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 717.
[90] Chronicon S. Maxentii, anno MCI. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 404 ; Marchegay et Mabille, Chroniques des églises d'Anjou, p. 421.)
[91] Cf. Carta concordiæ Carofencis et Angeliacensis ecclesiæ dans cartulaire de Saint-Jean-d'Angély. (Bibl. Nat., ms. lat. 5451, fol. 55.)
[92] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 774. La date du concile est donnée par un acte d'Amat pour Saint-Jean-d'Angély. (Bibl. Nat., ms. lat. 5451, fol. 128.)
[93] Aubri de Trois Fontaines, année 1094. (Rec. des histor. de France, t. XIII, p. 687 ; Monumenta Germaniæ historica, Scriptores. t. XXIII, p. 803.)
[94] Yves de Chartres, ep. 24. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 79.)
[95] Cf. supra, l. I, c. II.
[96] Bertold de Reichenau, année 1095. (Rec. des histor. de France, t. XI, p. 28 ; Monumenta Germaniæ historica, Scriptores, t. V, p. 462.)
[97] Jaffé, n° 5678 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 728.
[98] Jaffé, n° 5721 ; Pflugk-Harttung, Acta, t. I, p. 66.
[99] Exordium Cisterciensis cœnobii. (Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 112.)
[100] Cf. une lettre de Hugues de Cluny à saint Anselme. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 67.)
[101] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 763.
[102] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 669.
[103]
Greg. VII Reg., l. VII, ep. l. (Jaffé, Bibl.
rer. Germ., t. II, p. 379-381.)
[104] Orderic Vital, l. IV, c. IX. (Ed. Leprévost, t. II, p. 237.)
[105] Chronicon Rotomagense, anno MLXXIV. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 784.)
[106] Orderic Vital, l. V, c. V (Ed. Leprévost, t. II, p. 315) ; Chronicon Lyrense, anno MLXXX. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 776.)
[107] Orderic Vital, l. VIII, c. XVIII. (Ed. Leprévost, t. III, p. 379.)
[108] Orderic Vital, l. IX, c. III. (Ed. Leprévost, t. III, p. 470.)
[109] Dom Martène, Histoire de Marmoutier. (Bibl. Nat., ins. lat. 12878, fol. 105 v°.)
[110] Prou, Recueil des actes de Philippe Ier, n° CXVII, p, 297.
[111] Greg. VII Reg., l. III, ep. 17 a. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 232-233.) Ce serment a été écrit par Conon, sur l'ordre de Grégoire VII, en présence d'Engeran, doyen de l'église de Chartres, et d'Yves, écolâtre, qui avaient accompagné leur évêque à Rome.
[112] Greg. VII Reg., l. VIII, ep. 28. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 478-479.)
[113] Greg. VII Reg., l. VIII, ep. 42. (Ibid., t. II, p. 493.)
[114] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 778.
[115]
Greg. VII Reg., l. V, ep. 17. (Jaffé, Bibl.
rer. Germ., t. II, p. 312-314.)
[116] Greg. VII Reg., l. VI, ep. 2, (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 322-325.)
[117] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 781.
[118] Yves de Chartres, ep. 109. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 118.)
[119] Cf. Bernard Monod, Essai sur les rapports de Pascal Il et de Philippe Ier, p. 10.
[120] Cf. supra, l. I, c. II.
[121] Chronicon S. Maxentii Pictavensis, anno MC. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 404 ; Marchegay et Mabille, Chroniques des églises d'Anjou, p. 420.)
[122] Cf. supra, l. I, c. II.
[123] Marchegay (P.), Cartulaire du prieuré bénédictin de Saint-Gondon-sur-Loire, n° XI, p. 30.
[124] Cf. supra, l. I, c. III.
[125] Chronicon S. Maxentii Pictavensis, anno MCVI. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 405 ; Marchegay et Mabille, Chroniques des églises d'Anjou, p. 423.)
[126] Chronicon S. Maxentii
Pictaviensis, loc. cit.
[127] Notitia de ecclesia Chahanniarum. (Rec, des histor. de France, t. XIV, p. 119.)
[128] Rec. des histor. de France, t. XV, p. 41.
[129] Cf. Cyrographum inter monachos Majoris monasterii et Rotonenses de Bairitico. Rec. des histor. de France, t XIV, p 153) ; Notitia de ecclesia Filgerarium (Ibid., t. XIV, p. 145.)
[130] Jaffé, n° 4605 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 538.
[131] Jaffé, n° 4620 ; Coll. Brit. Al. ep. 81.
[132] Jaffé, n° 4510 ; Coll. Brit. Al. ep. 54 ; — Jaffé, n° 4584 ; Coll. Brit. Al. ep. 42.
[133] Jaffé, n° 4715. : Anal. jur. pont , t. X, p. 407.
[134] Jaffé, n° 4479 ; Coll. Brit. Al. ep. 6.
[135]
Greg. VII Reg., l. IV, ep. 20. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 268.)
[136] Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 670.
[137] Jaffé, n° 5405 ; Coll. Brit. Urb. ep. 43.
[138] Rec. des histor. de France, t. XIV, p 729.
[139] Jaffé, n° 5684 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 725.
[140] Jaffé, n° 5723 ; Migne, Patr. lat., t. CLI, col. 521.
[141] Yves de Chartres, ep. 135. (Migne, Patr. lat., t. CLXII, col. 144.)
[142] Jaffé, n° 4711 : Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 546.
[143] Jaffé, n° 5561 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 712.
[144] Jaffé, n° 5830 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 21.
[145] Jaffé, n° 5829 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 21.
[146] Jaffé, n° 5852 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 22.
[147] Jaffé, n° 4768 ; Anal. jur. pont., t. X, p. 405. — Cf. sur cette affaire : D'Herbomez, L'évêché de Tournai-Noyon (Messager des sc. histor. de Gand, 1891, 4e livraison.)
[148] Jaffé, n° 5717 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 733.
[149] Greg. VII Reg., l. IV, ep. 5. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. Il, p. 248-249.)
[150] Greg. VII Reg., l. IV, ep. 13. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
259-261.)
[151] Greg. VII Reg., l. V, ep. 22. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. Il, p. 318-319.)
[152] Greg. VII Reg., l. V, ep. 23.
(Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 319-320.)
[153] Greg. VII Reg., l. VII, ep. 15. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
405-406.)
[154] Jaffé, n° 5475 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 704.
[155] Jaffé, n° 5519 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 708.
[156] Cela est dit formellement dans la bulle du 11 avril 1094 aux évêques de Bretagne. (Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 709.)
[157] Jaffé, n° 5520 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 709.
[158] Martène, Thes. anecd., t.
III, p. 882.
[159] Martène, Thes. anecd., t.
III, p. 882-884.
[160] Jaffé, n° 4480 ; Migne, Patr. lat., t. CXLVI, col. 1408.
[161]
Jaffé, n° 4587 ; Coll. Brit. Al.
ep. 44,
[162] Greg. VII Reg., l. II, ep. 2. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
109-110.)
[163] Greg. VII Reg., l. II, ep. 4. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
112-113.)
[164] Greg. VII Reg., l. II, ep. 23. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 136) ;
l. II, ep. 24. (Ibid., t. II, p. 136-137.)
[165] Jaffé, n° 5855 ; Loewenfeld, Epistolæ
pontificum, p. 67.
[166] Jaffé, n° 5544 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 712.
[167] Jaffé, n° 5683 ; Anal. jur. pont., t. X, p. 561.
[168] Jaffé, n° 5620 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 719.
[169]
Greg. VII Reg., l. I, ep. 54. (Jaffé, Bibl.
rer. Germ., t. II, p. 74-75.)
[170] Jaffé, n° 5800 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 736.
[171] Greg. VII ep., coll. 45. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 571-572.)
[172] Jaffé, n° 5654 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 723.
[173] Jaffé, n° 5605 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 717.
[174]
Greg. VII Reg., l. I, ep. 51 (Jaffé, Bibl.
rer. Germ., t II, p. 71 72.)
[175] Greg. VII Reg., l. VI, ep. 24 et 25. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
360-362.)
[176] Jaffé, n° 6066 ; Migne, Patr. lat., t. CLXIII, col. 461.
[177]
Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 713. — Cf. aussi une lettre de
l'abbé de Saint-Sever, du duc d'Aquitaine et du comte de Béarn se plaignant
d'une sentence mal rendue à cet égard (1104) et demandant au pape de la reformer.
(Ibid., t. XV, p. 2.)
[178] Jaffé, n° 6153 ; Migne, Patr. lat., t. CLXIII, p. 220.
[179] Jaffé, n° 4699 ; Anal. jur. pont., t. X, p. 406.
[180] Jaffé, n° 4699 a ; Anal. jur. pont., t. X, p. 406.
[181]
Greg. VII Reg., l. I, ep. 32. (Jaffé, Bibl.
rer. Germ., t. II, p. 50.)
[182] Greg. VII Reg., l. 1, ep. 68 (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 86-87.)
[183] Greg. VII Reg., l. II, ep. 21. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
134-135.)
[184] Greg. VII Reg., l. VII, ep. 17. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p.
407-408.)
[185] Jaffé, n° 5533 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 711.
[186] Jaffé, n° 5711 et 5712 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 732-733.
[187] Jaffé, n° 5778 ; Rec. des histor. de France, t. XIV. p. 736.
[188] Jaffé, n° 4532 ; Rec. des histor. de France, l. XIV, p. 538.
[189] Jaffé, n° 4570 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 542.
[190]
Greg. VII Reg., l. II, ep. 20. (Jaffé, Bibl.
rer. Germ., t. II, p. 134.)
[191] Greg. VII Reg., l. II, ep. 22. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 135.)
[192] Jaffé, n° 5617 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 719.
[193] Jaffé, n° 5818 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p 18.
[194] Bibl. Nat., Coll. Moreau, vol. XXXIII, fol. 173 ; Martène, Ampl. Coll., col. 621.
[195] Jaffé, n° 6432 ; Rec. des histor. de France, t XV, p. 23. — Cf. aussi Yves de Chartres, ep. 94. (Ibid., t. XV, p. 111.)
[196] Jaffé, n° 5927 ; Pflugk-Harttung, Acta,
t. I, p. 75.
[197] Rec. des histor. de France, t. XV, p 30.
[198] Jaffé, n° 5976 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 29.
[199] Rec. des histor. de France, t. XV, p. 199.
[200] Jaffé, n° 5999 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 28.
[201] Jaffé, n° 5964 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 32.
[202] Jaffé, n° 5996 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 30.
[203] Jaffé, n° 6116 ; Rec. des histor. de France, t XV, p 34.
[204] Jaffé, n° 6117 : Rec. des histor. de France, t. XV, p 35.
[205] Jaffé, n° 6118 ; Pflugk-Harttung, Acta,
t. 1, p. 88.
[206] Jaffé, n° 6121 ; Chartularium S
Aegidii, Bibl. Nat., ms. lat. 11018, fol. 36.
[207] Jaffé, n° 6126 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p. 37.
[208] Jaffé, n° 6161 ; Rec. des histor. de France, t. XV, p 38.
[209] Jaffé, n° 6177 ; Pflugk-Harttung, Acta,
t. I, p. 95.
[210] Jaffé, n° 6187 ; Pflugk-Harttung, Acta,
t. I, p. 98.
[211] Jaffé, n° 6198 ; Rec. des histor de France, t. XV, p. 41. Une bulle analogue est adressée le même jour aux moines de Saint-Gilles. (Jaffé, n° 6200 ; Pflugk-Harttung, Acta, t. I, p. 99 )
[212] Jaffé, n° 6199 : Rec. des histor. de France, t XV, p. 42.
[213] Cf. une lettre de Manassès à Lambert, évêque d'Arras. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 194.)
[214] Cf. une autre lettre de Manassès. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 195.)
[215] Rec. des histor. de France, t. XV, p. 190.
[216] Rec. des histor. de France, t. XV, p. 189.
[217] Migne, Patr. lat., t. CLXII, col 667.
[218] Yves de Chartres, ep. 91. (Patr. lat., t. CLXII, col 112.)
[219] Yves de Chartres, ep. 116 (Patr. lat., t CLXII, col. 132.)
[220] Yves de Chartres, ep. 134. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 126.)
[221] Yves de Chartres, ep. 136. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 127.)
[222] Yves de Chartres, ep. 126. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 123.)
[223] Yves de Chartres, ep. 121. (Rec. des histor. de France, t. XV, p 122.)
[224] On voit par la lettre 132 que les chanoines avaient sollicité cette Intervention royale. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 125.)
[225] Yves de Chartres, ep. 127. (Rec. des histor. de France, t. XV, p. 124.)
[226] Yves de Chartres, ep. 147. (Rec. des histor. de France, t XV. p. 130.)
[227]
Greg. VII ep , coll. 6. (Jaffé, Bibl. rer.
Germ., t. II, p. 526.)
[228] Greg. VII Reg., l. VIII, ep. 23. (Jaffé, Bibl. rer. Germ., t. II, p. 468-469.) — Cf. Fabre, Le Liber censuum de l'Eglise romaine.
[229] Jaffé, n° 5494 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 697.
[230] Jaffé, n° 5495 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 697.
[231] Cf. Series episcoporum Magalonensium, anno MLXXXV. (Rec. des histor. de France, t. XII, p. 370.)
[232] Jaffé, n° 4525 ; Coll. brit. Al. ep. 20 ; Migne, Patr. lat., t. CXLVII, col. 1303.
[233] Prou, Recueil des actes de Philippe Ier, n° XL, p. 114-117.
[234] Jaffé, n° 4566 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 541. (Lettre à Gervais, archevêque de Reims.)
[235] Jaffé, n° 4567 ; Cartulaire de Saint-Denis. Arch. (Nat., LL 1156, fol. 77).
[236] Jaffé, n° 4568 ; Cartulaire de Saint-Denis. Arch. (Nat., LL 1156, fol. 78.)
[237] Prou, Recueil des actes de Philippe Ier, n° XL, p. 116, l. 17 et suiv.
[238] Jaffé, n° 4573 ; Coll. brit. Al., ep. 32 ; cf. aussi n° 4574 (à Richer, archevêque de Sens).
[239] Jaffé, n° 4586 ; Rec. des histor. de France, t. XIV, p. 541.
[240] Sur l'avènement de Grégoire VII, cf. Chronica Mariani Scoti Fuldensis. (Monumenta Germaniæ historica, Scriptores, t. V, p. 560) ; Lambert de Hersfeld, (Rec. des histor. de France, t. XI, p. 65 ; Monumenta Germaniæ historica, Scriptores, t. V, p. 194) Paul de Bermied, Vita Gregorii (Acta Sanctorum, Maii, t. VI, p. 115), etc.