L'ÉGLISE ET L'ÉTAT EN FRANCE

TOME PREMIER — DEPUIS L'ÉDIT DE NANTES JUSQU'AU CONCORDAT (1598-1801)

 

LE ROI ET L'ÉGLISE.

 

 

L'ancienne monarchie française se faisait gloire du titre de fille aînée de l'Eglise et vivait dans une union profonde avec sa mère spirituelle. Ce serait cependant une grave erreur de croire que les rapports de l'Eglise et de l'Etat aient toujours été, même à cette époque, empreints d'une parfaite cordialité. Le roi avait la force pour lui, il le savait, et n'hésitait pas à s'opposer aux ambitions de l'Eglise, quand elles lui paraissaient menacer sa prérogative royale, les intérêts de son royaume, ou simplement son absolutisme.

Les deux rois qui ont gouverné la France du XVIIe siècle ont été l'un et l'autre de pieux personnages. Louis XIII voulait faire son salut à tout prix et a mis son royaume sous la protection spéciale de la Vierge Marie. Louis XIV n'a pas hésité à persécuter une partie de ses sujets pour faire pénitence de ses fautes et pour assurer son salut. Ces deux princes n'ont pas été seulement de bons et orthodoxes catholiques, ils ont été des dévots, dans toute la force du terme ; mais l'orgueil royal parlait dans leurs âmes plus haut que tout autre sentiment et en faisait, presque à leur insu, des hommes de proie, dont la griffe ne ménageait aucun adversaire. Ces fils de l'Eglise, respectueux et soumis â l'ordinaire, eurent leurs crises de violence et de brutalité. Recherchons s'ils avaient une juste idée de leurs droits et de leurs devoirs vis-à-vis de l'Eglise, et si leur conduite à son égard fut toujours juste et raisonnable.

L'ancienne France était fort catholique, mais peu amie du clergé et nullement désireuse de laisser s'établir chez elle un gouvernement théocratique à la mode d'Espagne. Contre les vieilles prétentions des papes et des empereurs, elle s'était toujours révoltée et avait pris pour maxime que le roi est empereur en son royaume. Cet adage voulait dire que la France est une nation pleinement indépendante, sur laquelle personne ne peut prétendre de suzeraineté. Le roi n'a d'autre supérieur que Dieu ; il ne relève que de Dieu et de sa conscience. Souverain seigneur de l'Etat, ne devant sa couronne qu'à sa naissance, il incarne en sa personne la fortune, la grandeur et l'indépendance de la patrie ; le roi, c'est la France faite homme, et ainsi s'expliquent et se justifient le respect, l'amour, le dévouement, le culte véritable que lui rendent ses sujets. Le royalisme du XVIIe siècle, c'est le patriotisme.

L'Eglise est pour les Français de la même époque la grande patrie spirituelle, hors de laquelle il n'est point de salut. Cette idée farouche est professée par tous, et nous verrons que les hérétiques eux-mêmes attribuaient à leurs Eglises le même privilège exclusif. De même qu'un Français est naturellement royaliste, il est naturellement catholique, les deux conceptions politique et religieuse se complètent dans son esprit et se synthétiseront, un jour, dans le cri fameux : Dieu et le roi. Mais, si le Français, qui pense, croit et révère tout ce qu'enseigne la foi, il sait aussi très bien distinguer l'œuvre de Dieu de l'œuvre des hommes, et entend que son obéissance soit raisonnable.

Dans le peuple, cette tendance critique se révèle par la persistance des vieilles railleries à l'encontre des moines et des clercs, par les dictons irrévérencieux, les fabliaux au gros sel, les contes pimentés qui font le régal de la canaille, et, parfois aussi, avec La Fontaine, le mets des plus délicats.

Chez les gens instruits, l'individualisme s'accuse par le goût de la lecture et de la discussion théologique, par le succès du jansénisme, du molinisme, du quiétisme, par l'accueil fait aux Provinciales, à Don Juan, à Tartuffe, au Lutrin.

On veut être catholique, mais à la française, et non à l'espagnole ou à la romaine. Si les jésuites ont leur clan, les gallicans ont aussi le leur, et c'est là que se rassemblent les hommes fidèles aux vieilles idées nationales, c'est là que l'on fronde encore le Concile de Trente, que l'on s'inquiète des empiétements du Saint-Siège, que l'on anathématise la bulle In Cœna Domini, que l'on s'indigne de la vénalité et de l'avidité de la Cour de Rome.

On croit bien que l'Eglise ne peut errer ni faillir, mais on ne veut pas admettre qu'un homme, fût-il le pape, parle en son nom. Le Parlement, la Sorbonne, l'Université, paraissent tout aussi qualifiés que lui pour définir les matières de foi.

La tradition nationale est donc royaliste et gallicane ; elle est avant tout française.

Louis XIII et Louis XIV ont largement profité de ces théories.

Ils ont accepté le culte patriotique que leur ont voué leurs sujets ; ils ont en de leur puissance, de leur majesté, de leur supériorité sur le reste des humains l'idée la plus complète et la plus large.

Ils ont moins bien compris de quel avantage pouvait être pour eux le gallicanisme. Les jésuites, qui ont été les infatigables soutiens de l'autocratie pontificale, ont eu grand crédit auprès d'eux et les ont détournés du gallicanisme. Ils n'ont pu le leur faire abandonner entièrement, mais ils les ont empêchés d'en faire la base de leur politique religieuse. Louis XIII et Louis XIV n'ont été gallicans que par politique, et n'ont vu dans le gallicanisme qu'une machine de guerre contre le Saint-Siège, un épouvantail, qu'ils dressaient devant Rome lorsqu'elle devenait trop encombrante, et qu'ils retiraient de devant ses yeux quand elle avait consenti à quelque accommodement. Leur diplomatie a perdu ainsi la grande allure qu'elle aurait pu avoir et a pris une marche capricieuse et désordonnée, qui trahit la faiblesse de leurs principes.

D'autre part, Louis XIII et Louis XIV ont toujours vu dans les clercs des sujets responsables, comme les autres, de leurs opinions et de leurs actes, et les ont châtiés durement toutes les fois qu'ils y ont trouvé intérêt.

Et, quant aux biens ecclésiastiques, ils les ont respectés en général, mais comme le pouvaient faire des hommes qui se croyaient maîtres de la vie et des biens de leurs sujets.

Ils ont donc été pour l'Eglise des maîtres sévères et capricieux, dont l'action ne s'est pas toujours portée où elle devait et s'est souvent exercée à l'encontre de ton té justice et de tout droit.

Les rois se montrèrent le plus souvent très indulgents pour les abus dont leur autorité n'avait pas à souffrir.

Le cardinal Alexandre de Médicis écrivait à Rome, le 8 septembre 1597, que les revenus de plusieurs évêchés vacants appartenaient à des soldats et à des femmes... que beaucoup de moines faisaient grand scandale et donnaient lieu à beaucoup de plaintes, que la plupart des religieuses ne gardaient plus la clôture, restaient des mois entiers chez leurs parents et portaient des habits immodestes ; les abbesses faisaient figure d'héritières.

Henri IV nomma Charles de Levis évêque de Lodève à quatre ans, et s'en amusait dans une lettre à Marie de Médicis : Je ferai la Toussaint où je me trouverai. M. de Lodève est mon confesseur, jugez si j'aurai l'absolution à bon marché.

Henri de Verneuil, bâtard du roi, fut évêque de Metz à dix ans et demi.

En 1609, un capitaine huguenot, marié, était abbé d'un monastère de la Bresse. Il avait établi un haras dans une partie des bâtiments, empilé le foin dans l'église, où il ne restait plus aux moines qu'une petite partie du chœur pour dire la messe. Dans la maison abbatiale logeaient plusieurs soldats huguenots, qui chantaient leurs psaumes et au demeurant menaient joyeuse vie... ; on ne voyait que moines à la chasse avec les soldats et, s'ils sortaient, c'était montés sur de grands chevaux et des meilleurs, roulant bien armés par le paya avec l'épée et le pistolet (Mariéjol, Henri IV et Louis XIII).

En 1639, quand Nicolas Pavillon vint prendre possession de l'évêché d'Aloi, il trouva sa cathédrale d'une indécence qui ne se peut concevoir et sa maison épiscopale abandonnée depuis près d'un siècle. Son prédécesseur, M. de Polverel, avait obtenu l'évêché comme récompense des services qu'il avait rendus dans la cavalerie royale (1622). Il habitait le château de Cornavel avec une dame, dont il avait eu plusieurs enfants. Il leur avait conféré les meilleurs bénéfices de son diocèse, et en avait donné aussi à une de ses nièces, qui les mettait en adjudication et les faisait desservir par ceux qui lui demandaient le moins d'argent (Histoire ecclésiastique).

Abelly, évêque de Rhodez, auteur d'une vie de saint Vincent de Paul, écrit que vers 1625 le sacerdoce était sans honneur, et même dans un tel mépris en quelques lieux qu'on tenait pour quelque sorte d'avilissement aux personnes de condition tant soit peu honnêtes selon le monde de se mettre dans les saints ordres, à moins que d'avoir quelque bénéfice considérable pour en couvrir la honte, et, selon la coutume opinion du monde, c'était alors une espèce de contumélie et d'injure que de dire à quelque ecclésiastique de qualité qu'il était un prêtre.

Les guerres civiles de la Fronde remplirent les villes de prêtres, de moines et de religieuses, chassés de leurs paroisses et de leurs couvents, dénués de toutes ressources et qui, poussés par le besoin et le désespoir, devinrent souvent un sujet de scandale.

Le clergé des paroisses était d'une ignorance invraisemblable. Le coadjuteur de Rouen se montrant disposé â refuser pour incapacité notoire deux candidats à la prêtrise, l'archevêque lui dit en riant : Ne laissez pas de les recevoir : il vaut mieux que la terre soit labourée par des ânes que de rester en friche.

La Grange, intendant d'Alsace de 1674 à 1698, nous dépeint les curés d'Alsace comme de bons vivants, aimant naturellement le vin et les compagnies, étudiant ce qui était nécessaire pour satisfaire leurs supérieurs, mais 'jans rien approfondir exactement, et, avec tout cela, très supérieurs aux curés de campagne du royaume dont ils auraient pu être les maîtres.

Ce n'est pas du pouvoir royal qu'on pouvait attendre la réforme des mœurs ecclésiastiques. Louis XIV, comme Louis XIII et Reni IV, semble avoir aimé les prélats grands seigneurs et fastueux et n'a jamais fait difficulté de nommer des indignes, quand il a cru politique de le faire.

L'abbé de Sainte-Croix, fils du premier président Molé, possédait six abbayes, un prieuré, un petit gouvernement, et, par surcroît, les chiens de Sa Majesté pour le chevreuil.

Lorsque Denis Sanguin se démit de son évêché de Senlis en faveur de son neveu, celui-ci fut sacré par vingt-cinq évêques. On les servit chacun à part, et chacun avec quinze plats ; soit 390 plats pour 26 personnes.

Au sacre de Jacques-Nicolas Colbert, coadjuteur de Rouen, il y avait 42 évêques. Mine de Sévigné fait observer plaisamment qu'il n'y en avait guère davantage au Concile de Nicée.

Au Sacre de Mme de Chelles, les tentures de la couronne, les pierreries au soleil du Saint-Sacrement, la musique exquise, les odeurs et quantité d'évêques qui officiaient surprirent tellement une manière de provinciale qui était là, qu'elle s'écria tout haut : N'est-ce pas là le paradis ?Ah ! non, Madame, dit quelqu'un, il n'y a pas tant d'évêques. (Mme de Sévigné.)

Tous ces scandales pâlissent devant la candidature du baron de Watteville à l'archevêché de Besançon. Watteville, cadet d'une grande famille de la Franche-Comté, était entré fort jeune chez les Chartreux. Leur règle ne s'accordant point avec son humeur, il s'évada. Comme il était sur le mur du couvent, le prieur apparut et lui intima l'ordre de redescendre. Watteville le tua d'un coup de pistolet et gagna les champs. A la première auberge qu'il rencontra, il demanda à manger et se fit mettre à la broche un gigot et. un chapon, les seules provisions qui garnissaient ce jour-là le garde-manger ; un voyageur affamé survint et lui demanda de partager son repas, Watteville le tua comme il avait fait du prieur.

Il crut prudent de quitter la contrée, se rendit en Turquie, jeta le froc aux orties, se fit musulman et se poussa si bien dans la confiance du Grand Seigneur qu'il devint pacha et servit en Morée contre les Vénitiens. Un jour, l'ennui le prit et il offrit aux Vénitiens de leur vendre les secrets des Turcs, si le pape lui accordait l'absolution de ses crimes, le protégeait contre les rancunes des Chartreux et le réintégrait dans tous ses droits de prêtrise, avec permission de posséder toutes sortes de bénéfices et d'abbayes. La République de Saint-Marc obtint pour son singulier client toutes les miséricordes du Saint-Siège. Watteville se rendit à Rome, y fut parfaitement accueilli par le pape et rentra en Franche-Comté, où il prenait plaisir à narguer les Chartreux. Quand Louis XIV voulut s'emparer de la Franche-Comté, Watteville s'offrit à lui en faciliter la conquête, à condition qu'il deviendrait archevêque de Besançon. Le roi le nomma ; mais le pape le trouva trop scandaleux et permit seulement qu'on lui donnât plusieurs riches abbayes : Il avait partout beaucoup d'équipages, grande chère, une belle meute et bonne compagnie... Il vivait non seulement en grand seigneur, et fort craint et respecté, mais à l'ancienne mode, tyrannisant fort ses terres, celles de ses abbayes et quelquefois ses voisins, surtout chez lui très absolu. Les intendants pliaient les épaules, et par ordre exprès de la cour, tant qu'il vécut, le laissaient faire et n'osaient le choquer en rien, ni sur les impositions qu'il réglait à peu près comme bon lui semblait dans toutes ses dépendances, ni sur ses entreprises, assez souvent violentes. Avec ces mœurs et ce maintien, qui se faisaient craindre et respecter, il se plaisait à aller quelquefois voir les Chartreux pour se gaudir d'avoir quitté leur froc. (Saint-Simon.)

Ces faits suffisent pour affirmer que l'influence de l'Etat sur l'Eglise tendit beaucoup plutôt à la corrompre qu'à la moraliser. La préoccupation morale est, d'ailleurs, le moindre des soucis des gouvernements. Machiavel le remarquait déjà, et sa remarque n'a pas cessé d'être vraie.

Si indulgent pour les fredaines des grands et si complaisant à leur avidité, le gouvernement royal se montrait au contraire très dur aux petits, qui ne pouvaient lui résister.

Richelieu tirait de ses différents bénéfices 1.500.000 livres de revenu et se faisait encore donner une pension de 30.000 livres sur Chezal-Benoît. Mais il n'en poursuivait pas moins avec le zèle le plus dévot la réforme des ordres religieux. Il expulsait les moines réfractaires, mettait des garnisaires dans les couvents, envoya un jour chez les Carmes trois compagnies de gardes françaises et suisses. Il travaillait à réunir en un seul corps tous les monastères de l'ordre de saint Benoît, pour les dominer et gouverner à sa fantaisie.

En 1630, après l'exil de la reine-mère, il fit défendre, sous peine de la Bastille, à tous prédicateurs de prêcher sur le respect dû par les enfants à leurs parents.

Si sa croyance superstitieuse à la sorcellerie empêche qu'on ne voie l'effet d'une vengeance personnelle dans le procès et la mort d'Urbain Grandier, curé de Saint-Pierre de Loudun, c'est bien le caprice politique du cardinal qui a fait enfermer Saint-Cyran à Vincennes, et l'histoire vaut d'être contée, car il n'en est pas qui montre mieux l'ingérence abusive de la politique dans le domaine spirituel.

Louis XIII avait une peur horrible de l'enfer, et cette terreur avait beaucoup plus de part que l'amour de Dieu au regret qu'il témoignait de ses péchés. Il avait l'attrition, comme l'on dit en style théologique, et non la contrition parfaite, qui suppose chez le pécheur le regret d'avoir offensé Dieu et le ferme propos de ne le plus offenser. Or il lui tomba entre les mains un livre de dévotion, intitulé De la Virginité, par le P. Seguenot, de l'Oratoire, où il était dit que la contrition parfaite était la condition indispensable du salut. H prit peur ; sa mélancolie naturelle s'aggrava, et il devint impossible de l'intéresser aux affaires de l'Etat. Richelieu le rassura, en lui exhibant son propre catéchisme du diocèse de Luçon, où il était prouvé que l'attrition combinée avec la grâce du sacrement de pénitence suffit au salut ; mais il voulut remonter jusqu'à la source d'une opinion si dangereuse pour la sûreté de l'Etat et manda auprès de lui le P. de Condren, général de l'Oratoire, pour savoir ce que c'était que ce P. Seguenot. Le P. de Condren, pour couvrir son ordre, déclara que la doctrine incriminée était celle de Saint-Cyran, et Richelieu, qui n'aimait pas l'austère ami de Port-Royal, ordonna de l'arrêter. Vous ne le connaissez pas, disait-il, il est plus redoutable que six armées ! Pour faire plus ample justice, le P. Seguenot fut aussi arrêté et mis à la Bastille.

Les intendants de Louis XIV procédèrent, plus tard, avec la même désinvolture.

Fléchier raconte qu'un bon curé de village d'Auvergne passa aux Grands Jours pour s'être emporté dans son prône contre le roi et les ministres : Il avait dit fort sérieusement à ses paroissiens que la France était mal gouvernée, que c'était un royaume tyrannique ; qu'il avait lu de si belles choses dans un vieux livre qui parlait de la république romaine, qu'il trouverait à propos de vivre sans dépendance et sans souffrir aucune opposition de taille, que le peuple n'avait jamais été plus tourmenté, et plusieurs autres choses de grande édification, qui lui semblaient, aussi bien qu'à ses auditeurs grossiers, plus agréables que l'Evangile. Ce petit peuple trouva ce prône fort bien raisonné, ce jour-là.

En 1710, Pontchartrain écrivait à l'évêque de Luçon qu'il regrettait de ne pouvoir lui envoyer de lettres de cachet pour enfermer arbitrairement les prêtres de son diocèse, mais que cette affaire ne dépendait que du roi.

Le développement extraordinaire de la richesse monastique excitait avec raison l'attention du gouvernement royal. Richelieu était ennemi de la multiplication des monastères : Il faut, dit-il, mépriser l'opinion de certains esprits, aussi faibles que dévots, et plus zélés que prudents, qui estiment souvent que le salut des âmes et celui de l'Etat dépendent de ce qui est préjudiciable à tous deux.

Ces idées étaient justes en elles-mêmes, mais il importait au bon ordre et au bon renom de la monarchie de les concilier avec le respect du droit de propriété.

Nous touchons, ici, à un des points les plus délicats des rapports de l'Eglise et de l'Etat ; voyons s'il n'est pas possible de définir en pareille matière le cuique suum, le droit de l'Etat et le droit de l'Eglise.

Il n'y a en principe qu'un droit, comme il n'y a qu'une morale : l'Eglise, acquérant la propriété, en vertu des modes réguliers d'acquisition reconnus par le droit civil, devient propriétaire aussi légalement que le deviendrait un simple particulier. Toutes les distinctions qu'on a cherché à établir entre la propriété individuelle et la propriété collective sont, aux yeux d'un juriste, sans valeur et sans fondement. Quand une association religieuse a légalement acquis un bien quelconque par une vente régulière, une donation ou un testament valables en justice, ce bien devient la propriété de cette association, comme s'il avait été vendu, donné ou légué à un simple particulier. Soutenir le contraire, c'est méconnaître le droit de propriété, c'est le saper par la base, c'est menacer dans la propriété ecclésiastique toutes les propriétés collectives, et, par voie de conséquence, toutes les propriétés privées.

Cela posé, il faut ajouter que le droit de propriété ne peut pas avoir un caractère plus absolu que n'importe quel autre droit humain, et qu'il comporte des limites et des restrictions, fondées sur l'utilité commune et le respect des intérêts généraux.

Personne ne pourra raisonnablement soutenir que, s'il se trouvait un homme assez riche pour acheter la terre entière, il serait juste et légitime que tous les autres hommes fussent ses fermiers ou ses locataires.

L'extension démesurée de la richesse territoriale d'un particulier ou d'une corporation constitue certainement une anomalie sociale, et doit être combattue et entravée — mais toujours par des moyens légaux, par des mesures prohibitives et préventives, qui empêchent l'accaparement des terres, et par des expropriations pour cause d'utilité publique, quand cet accaparement dommageable s'est produit.

Il faut remarquer, de plus, que la propriété ecclésiastique ne changeant jamais de mains, le fisc se trouve privé par ce fait de droits considérables, qui pèsent de tout leur poids sur les biens des particuliers. C'est là un privilège injuste et qui ne doit pas être maintenu. Mais le Moyen-Age avait trouvé le vrai remède à ce mal en instituant auprès de chaque association propriétaire un homme vivant, mourant et confisquant, qui la représentait à l'égard du fisc et le mettait à même d'exercer ses droits lorsqu'il venait à mourir, ou à commettre quelque crime emportant confiscation. Laissons de côté cette dernière conséquence, inique puisqu'elle punit l'innocent des fautes du coupable ; l'homme vivant et mourant du Moyen-Age remet les associations ecclésiastiques sur le même pied que les individus, au point de vue fiscal, et résoud d'une manière très satisfaisante cette grosse difficulté.

Voilà comment se présente, en droit pur, la question de la propriété ecclésiastique. Cette propriété est réelle et. aussi légitime que la propriété individuelle ou collective laïque ; elle comporte une limite ; elle ne doit point exempter l'Eglise des droits de mutation.

Mais le roi n'a su ni respecter le droit ni éviter les abus ; il s'est toujours trouvé impuissant à empêcher l'accaparement des terres et à soumettre le clergé à un régime légal de contributions aux charges du royaume ; il s'est montré souvent à son égard brutal et fantasque, en même temps qu'il lui cédait ce qu'il n'aurait point dû lui accorder.

François Ier commence ce régime d'arbitraire avec l'institution des abbayes commendataires.

En 1561, à l'assemblée de Poissy, le clergé consentit à payer au roi un impôt régulier sous le nom de décimes, qui, accordé d'abord pour six ans, fût renouvelé à diverses époques et finit par devenir perpétuel. Les décimes servaient au paiement des rentes sur l'Hôtel-de-Ville et montaient environ à 1.200.000 livres par an.

En 1621, à l'occasion de la guerre contre les réformés, le clergé consentit à une nouvelle création d'offices dont la finance vint au roi.

En 1628, il donna 3 millions pour aider à la prise de La Rochelle.

En 1636, nouvelles demandes d'argent pour la guerre. Le clergé cria misère, défendit avec âpreté son bien, qu'il appelait le patrimoine des pauvres, et finit par accorder au roi 200.000 livres de rente pendant cinq ans.

Richelieu, pour lequel la raison d'Etat primait toutes les autres, résolut de faire contribuer désormais le clergé sans lui demander son avis.

Il fit déclarer par le roi, en 1639, que le droit de posséder des biens de mainmorte était une concession gracieuse du monarque, qui pouvait contraindre les ecclésiastiques à vider leurs mains desdites possessions, dans l'an et jour de leurs acquisitions et à faute de ce faire, les en dépouiller. Il ordonna aux monastères établis depuis moins de trente ans de fournir un inventaire général de tous leurs biens pour l'établissement de nouvelles taxes.

Il soumit à l'enregistrement, moyennant finances, un grand nombre d'actes de la juridiction ecclésiastique.

Il prorogea pour cinq ans l'obligation, souscrite par le clergé en 1635, de payer 200.000 fr. par an aux rentiers de l'Hôtel-de-Ville.

Il invita les bénéficiers à lui verser pendant deux ans le sixième de leurs revenus.

Le clergé montra une telle irritation que Richelieu n'osa lui refuser le droit de tenir une assemblée générale ; mais il la réunit à Mantes, dans le diocèse de Chartres, dont l'évêque était son ami, et ce fut pour lui demander de nouveaux sacrifices. Mais, au lieu des 6.600.000 livres qu'il réclamait, il n'obtint que 5.500.000 livres, et dut faire expulser de l'assemblée les archevêques de Sens et de Toulouse, et les évêques d'Evreux, Bazas et Toulon.

Cette mesure révolutionnaire est d'autant plus étrange que la cour avait un parti à l'assemblée et que l'évêque d'Autun, Claude de la Magdeleine, déclarait déjà que tous les biens de l'Eglise appartenaient au roi, et que Sa Majesté, laissant aux ecclésiastiques de quoi pourvoir à la nourriture et entretiennement  modéré, pouvait prendre tout le surplus.

De nouvelles exactions furent perçues en 1652 pour le sacre du roi, en 1660 pour son mariage, et l'usage s'établit de demander à chaque assemblée du clergé un nouveau don gratuit, dont le chiffre, toujours âprement discuté, mettait aux prises l'avarice des bénéficiers et l'avidité du fisc.

Les assemblées quinquennales du clergé étaient mal vues de l'administration royale. Louis XIV écrivait à Colbert, le 5 juin 1675 : Je vois par ce que vous me mandez que l'assemblée du clergé commence très bien. Faites ce qui dépendra de vous pour qu'elle finisse bientôt. Continuez à faire ce que Madame de Montespan voudra, et me mandez quels orangers on a portés à Clagny, car elle me mande qu'il y en aura et je ne sais lesquels ce sont.

Avec les grandes guerres de la fin du règne, les besoins d'argent se font de plus en plus pressants, et le roi en arrive à piller sans vergogne. Un pamphlet de 1690, Les soupirs de la France esclave, nous dit qu'on impose aux couvents des taxes qui vont bien au delà de leurs revenus ; on a proprement pillé l'argent des églises et des trésors. Ces biens ont toujours été réputés sacrés, et, au moins, on n'a jamais entrepris d'y toucher qu'avec la permission du chef de l'Eglise. Mais la Cour, qui fait tout de hauteur, n'a consulté là-dessus ni l'Eglise romaine, ni l'Eglise gallicane.

En 1710, le roi impose tous ses sujets, nobles et roturiers, clercs ou laïques, au dixième de leurs revenus ; avec promesse de supprimer cet impôt dans les six mois qui suivront le rétablissement de la paix. C'est la première fois que le clergé est mis résolument sur le même pied que les autres classes de la nation. C'est la première mesure vraiment légitime de cette longue histoire ; .mais le clergé refuse de se soumettre, excipe de ses privilèges, et Louis XIV n'ose pas lui imposer le droit commun. Le clergé s'en tire en offrant un don gratuit un peu plus fort.

Tyrannie et faiblesse, anarchie et désordre, voilà le bilan de la politique royale. Rien de plus décousu, faute d'avoir su agir de principes et par le droit.

Les rapports de Louis XIV avec le Saint-Siège sont empreints des mêmes caractères de caprice et de violence. Le roi et le pape vivent officiellement dans une étroite alliance, faite de respectueuse révérence du côté du roi et de paternelle condescendance du côté du pape ; mais le pape et le roi ne s'entendent pas mieux que ne s'entendent un père faible et âgé et un fils bouillant et libertin. A chaque instant, des fâcheries troublent la maison et menacent la bonne entente, et il faut reconnaître que c'est presque toujours le roi qui a tort, le roi qui oublie toute courtoisie et tonte modération, sans paraître se douter qu'il n'est pas bien glorieux au maître de 100.000 soldats de faire peur à un pauvre petit prince sans armée.

Le 20 août 1662, la populace de Rome s'ameuta coutre le duc de Créqui, ambassadeur de France. Un corps de la garde pontificale, la garde corse, prit parti pour les émeutiers ; un coup de fusil fut tiré sur le carrosse de l'ambassadrice et un de ses pages tué à ses côtés. C'était un fait fort grave qui demandait une éclatante réparation, d'autant que le pape Alexandre VII sembla d'abord plein d'indulgence pour les émeutiers ; mais Louis XIV dépassa toute mesure dans les représailles auxquelles il se livra.

Il eût dû se contenter de faire reconduire le nonce à la frontière et de déclarer le Comtat-Venaissin réuni à jamais à la couronne. Au lieu de cette juste mesure, applaudie par les Avignonnais eux-mêmes, il rendit le Comtat et exigea des satisfactions de vanité, sans portée et sans utilité. Un nonce extraordinaire, le cardinal neveu Chigi, vint présenter au roi les excuses du pape et protester du profond respect, de la dévotion et de la fidélité de toute sa famille envers la personne et la maison de Sa Majesté. Toute la nation corse fut déclarée incapable à jamais de servir dans Rome et dans tout l'Etat ecclésiastique, et le chef de la police romaine fut chassé.

Enfin une pyramide fut élevée à Rome, en face de l'ancienne caserne des Corses, avec une inscription contenant en termes convenus le décret rendu contre la nation corse.

L'affaire de la régale, qui faillit rendre la France schismatique, ne fut pas conduite par Louis XIV avec beaucoup plus de politique

C'était un droit ancien de la couronne que le roi perçût les revenus des évêchés vacants et pourvût aux bénéfices qui viendraient à se trouver libres pendant la vacance du siège épiscopal ; mais ce droit ne s'exerçait pas sur les provinces du Midi. Un édit du 10 février 1673 étendit la régale à tout le royaume.

Presque tous les évêques du Midi se soumirent. Deux seulement, les évêques de Pamiers et d'Alet, refusèrent de prêter serment à l'édit renouvelé par le roi en 1675. Louis XIV agit alors comme si leurs diocèses eussent été vacants, et nomma aux bénéfices dépendant de leurs évêchés. Les deux évêques excommunièrent les bénéficiers nommés par le roi, et ceux-ci en appelèrent aux métropolitains, qui levèrent les excommunications. Les évêques en appelèrent alors au pape.

Innocent XI, enchanté d'être pris pour arbitre par des évêques gallicans, soutint avec emportement la cause des évêques et, par deux brefs très virulents, mit le roi en garde contre les sinistres conseils de ses ministres.

Le roi ne tint aucun compte des remontrances da pape. Un troisième bref, lancé le 29 décembre 1679, menaça le roi de la colère du Saint-Siège, s'il ne tenait pas compte de ses paternelles exhortations.

L'assemblée du clergé de France, qui se réunit au commencement de l'été 1680, se rangea tout entière du côté du roi, déclara qu'elle voyait avec douleur cette procédure extraordinaire, et protesta expressément contre les vaines entreprises du Saint-Siège.

Le pape répliqua en condamnant un livre sur les droits des évêques, écrit par un docteur de Sorbonne, d'après l'ordre de l'assemblée du clergé (18 décembre 1680).

Sur ces entrefaites, l'évêque de Pamiers mourut et l'archevêque de Toulouse nomma pour administrer le diocèse des vicaires généraux partisans de la régale. Le pape les excommunia (1er janvier 1681), eux, leurs fauteurs et le métropolitain lui-même, et déclara nuls tous les sacrements administrés par les prêtres qui tiendraient leurs pouvoirs des vicaires généraux intrus.

Le Parlement de Paris intervint dans la querelle et rendit arrêt, le 31 mars, contre un libelle imprimé en forme de bref du pape Innocent XI.

Les parlementaires posaient très nettement la question sur le terrain gallican et déniaient au pape le droit de frapper d'interdit un archevêque, son confrère, qui a reçu de Dieu, et non de ses bulles, les pouvoirs attachés à son caractère.

Le pape s'adressa alors aux jésuites et leur ordonna de répandre et de soutenir son Bref ; mais, en dépit du quatrième vœu d'obéissance particulière au Saint-Siège, les jésuites ne bougèrent pas, leurs supérieurs estimant moins dangereux pour leur Société de désobéir au pape que de désobéir au roi.

A la prière des évêques, Louis XIV convoqua une assemblée du clergé pour le 31 octobre 1681.

L'occasion se présentait d'affirmer définitivement l'indépendance de l'Eglise nationale et de briser les liens qui la rattachaient de plus en plus étroitement à l'Eglise romaine. Beaucoup d'évêques se montraient favorables à cette politique ; l'opinion s'échauffait ; on allait jusqu'à parler d'établir en France un patriarche.

Mais les meilleures têtes du clergé de France comprirent que l'Eglise gallicane n'avait aucun intérêt à se détacher de Rome, parce que toute autorité enlevée à Rome passerait au roi. L'indépendance de l'Eglise de France se trouvait bien mieux garantie entre le roi et le pape, toujours en désaccord et en querelle, que si le roi eût été seul maitre et chef temporel de l'Eglise comme l'était le roi d'Angleterre.

L'assemblée chercha donc à contenter le roi, sans s'aliéner à tout jamais le pontife. Elle accepta l'extension de la régale à tout le royaume, et chargea le plus savant et le plus éloquent de ses membres, Bossuet, de rédiger la déclaration dogmatique, qui formait le principal objet de sa réunion.

La Déclaration du 19 mars 1682 frappa d'une égale réprobation ceux qui s'efforçaient de renverser les libertés gallicanes, appuyées sur les canons et la tradition des Pères, et ceux qui, sous prétexte de ces libertés, portaient atteinte à la primauté de saint Pierre et de ses successeurs.

Le clergé déclarait que l'Eglise n'a reçu de puissance de Dieu que sur les choses spirituelles, que les fois et princes ne peuvent être déposés par elle ni directement, ni indirectement, ni leurs sujets déliés du serment de fidélité par l'autorité des chefs de l'Eglise, et que celte doctrine doit être inviolablement suivie comme conforme Ma parole de Dieu, à la tradition des Pères et aux exemples des saints. Le clergé de France rappelait les décrets du saint concile œcuménique de Constance sur l'autorité des Conciles généraux. Il affirmait la légitimité des libertés de l'Eglise gallicane et son 'intention de maintenir inébranlables les bornes posées par les règles et constitutions reçues dans le royaume. Enfin il déclarait les jugements du pape révocables, tant que le consentement de l'Eglise ne les avait point confirmés.

L'œuvre de Bossuet était considérable et solide : elle plaçait la couronne au-dessus des atteintes de la papauté, elle affirmait l'autonomie de l'Eglise de France, elle reprenait la vieille idée de la supériorité des Conciles sur les papes.

Mais il est aisé de voir que le gallicanisme des évêques se fût exprimé avec bien plus de force, s'ils n'avaient craint de tomber sous la tyrannie royale.

De son côté, Louis XIV sembla s'effrayer de ses propres audaces, il lui parut dangereux d'éterniser les discussions sur des questions aussi épineuses, et, le 23 juillet, après une suspension de quelques semaines, il prorogea indéfiniment l'assemblée du clergé.

Si l'on considère la durée de la lutte, l'importance du problème et la nature extraordinaire des moyens mis en jeu par le roi, on

ne manquera pas de s'étonner que les résultats aient si faiblement répondu à l'attente générale. C'est une preuve de plus que la politique de Louis XIV manqua toujours, de profondeur et ne visa jamais au delà, des résultats immédiats.

Satisfait d'avoir obtenu gain de cause dans l'affaire du droit de régale, et content d'avoir évoqué aux yeux du pape le spectre du schisme, il se laissa reprendre par les jésuites et congédia l'assemblée qui se préparait à censurer la morale des casuistes.

Le pape, de son côté, ne perdit aucune occasion de témoigner au roi son ressentiment, mais n'osa pas condamner la Déclaration du clergé de France.

Les deux adversaires s'entendirent tacitement pour ne plus reparler de cet incident, et la Déclaration, qui aurait pu arrêter à jamais l'autocratie pontificale, réussit tout au plus à mettre une pierre sur son chemin.

La célèbre affaire du quartier des ambassadeurs montra une dernière fois toute l'infatuation et l'imprudence de Louis XIV. Les ambassadeurs étrangers avaient le droit d'exclure la police romaine des quartiers qu'ils habitaient, et ces quartiers servaient naturellement de repaires aux contrebandiers et aux malfaiteurs de profession. Profitant des changements qui se produisaient dans le personnel des ambassades, le pape avait peu à peu obtenu de la plupart des souverains d'Europe qu'ils renonçassent à un usage devenu odieux et ridicule. L'ambassade française étant devenue vacante en janvier 1687, le pape demanda au roi de vouloir bien suivre l'exemple des autres Etats ; mais Louis XIV répondit superbement qu'il n'avait jamais été réglé par l'exemple d'autrui, et que Dieu l'avait établi pour donner l'exemple aux autres, non pour le recevoir. Et, pour montrer combien il tenait au glorieux privilège de donner asile aux filous et aux spadassins dans le quartier de son ambassadeur à Rome, il ordonna à son nouveau représentant, le marquis de Lavardin, de faire son entrée dans la ville à la tête d'une garde de 800 gentilshommes. Le pape refusa de le recevoir, mit en interdit l'église Saint-Louis des Français, et, l'année suivante, nomma archevêque de Cologne le prétendant allemand Clément de Bavière, au lieu du candidat français Guillaume de Furstenberg.

Tels étaient, sous Louis XIV, les rapports du roi de France et du Saint-Siège. A moins de guerre déclarée, ils ne pouvaient être plus mauvais.

La royauté aurait dû concourir, de tout son pouvoir, au progrès moral de l'Eglise ; elle ne fit que lui donner les pires exemples et aider à sa corruption.

Elle aurait dû la faire rentrer dans le droit commun au point de vue financier ; elle ne sut que la menacer, la vexer, la piller ou se laisser berner par elle.

Elle aurait dû soutenir les libertés gallicanes contre l'autocratie pontificale ; elle ne sut tirer aucun parti sérieux de ses avantages.

Elle aurait dû défendre les protestants contre le fanatisme catholique ; nous verrons dans les prochaines leçons comment elle abdiqua ce beau rôle et se montra plus fanatique et plus cruelle que l'Eglise elle-même.

Et, de tout cela, nous conclurons que, hors du droit, il n'est rien de grand.