Mme
Jeanne de France était demeurée à Amboise. Pour prendre possession du Berry,
il lui restait à remplir les formalités de l'investiture féodale ; après
l'enregistrement de l'ordonnance au Parlement, elle devait, en vertu de son
nouveau titre, prêter foi et hommage au roi. Louis XII, le 3 février, par
lettres patentes datées d'Angers, délégua son cousin le maréchal de Gié pour
accomplir en son nom cette formalité, qui fut remplie le 16 de ce mois. En
même temps, il chargea l'un de ses conseillers ecclésiastiques, Pierre du
Refuge, de mettre Jeanne en possession du duché. Celle-ci, de son côté,
délégua Guichard de Vaubrion, son maître d'hôtel, avec la mission de parler
pour elle à ses nouveaux sujets, et elle se fit précéder à Bourges de la
notification suivante : A
nos tres chiers et bien amez, les gens d'église, bourgeois, manans et
habitans de notre ville et cité de Bourges. De par la duchesse de Berry. Tres
chiers et bien amez, il a pieu au Roy nous donner le duchié de Berry,
avecques autres terres et seigneuries, comme contenu est en ses
lettres-patentes, lesquelles ont esté veriffiez en ses cours de parlement,
chambre des comptes et Trésor à Paris. Et pour nous mettre en pocession, a
décerné ses lettres à l'arche-diacre de Reffuge, rung de ses consceillers en
ses cours de Parlement, qui, à notre requeste, ce transporte audit Bourges
pour nous en faire délivrance et bailler la pocession. Si vous prions que
entendez dilligemment à l'exécution dudit Refuge, tellement que ayons matière
de nous contenter de vous. Et, au surplus, veuillez croire notre amé et féal
Guichart de Vauxrion, notre maistre d'ostel, auquel avons donné charge vous
dire aucunes chouses de par nous, et adjouter foy en ses parolles. Tres chers
et bien amez, Notre Seigneur vous ait en sa garde. Escrip à Amboise ce XVIIe
jour de feuvrier. Jehanne de France[1]. P. du
Refuge partit de Paris le 12 février 1499, arriva à Châteauneuf le vendredi
15 ; le samedi 1G, il mit en possession le procureur de Madame et prit le
chemin de Bourges où il parvint le mardi 19. Dès son arrivée dans cette
ville, il manda Jean Salat, lieutenant général, Jean Fradet, lieutenant
particulier, Pierre du Brueil et Giles Pain, avocat et procureur du roi, leur
fit entendre le sujet de son voyage, leur donna lecture de sa commission, et
invita Fradet, alors échevin, à réunir le maire et les échevins, ses
collègues. Le lendemain, mercredi, François Bochetel, Jean Fradet, Pierre
Ami, Pierre Filsdefemme, Bernardin Alabat, maire et échevins de la ville de
Bourges, Jacques Treignac, avocat de la ville, se rendirent près du
commissaire du roi, et Jacques Treignac, prenant la parole, déclara le corps
municipal prêt à obéir aux ordres du roi. On convoqua en assemblée plénière
les bourgeois le jour même et dans cette réunion publique fut donnée lecture
des ordres du roi et des lettres par lesquelles la nouvelle duchesse mandait
aux gens de Bourges qu'ils délibérassent de lui être bons sujets, et qu'elle
était délibérée de leur être bonne dame et princesse. Le
lendemain, jeudi 21 février, le commissaire se transporta avec les officiers
du roi dans la grande salle de l'ancien palais des ducs de Berry où se
rassemblèrent également le maire, les échevins et plusieurs habitants de tout
état ; les officiers de Bourges adressèrent quelques observations à l'égard
des cas royaux dont le Parlement avait ordonné que la connaissance
appartiendrait au bailli de Saint-Pierre-le-Moûtier et insistèrent pour que
l'expédition de ces affaires fût maintenue à Bourges, requête dont ils se
bornèrent à demander acte et que le roi accueillit favorablement[2] ; puis le commissaire royal mit
le procureur de Madame en possession du duché, reçut le serment des officiers
du bailliage ; d'Artaud de Villejon, prévôt et maître des eaux et forêts,
enjoignit aux receveurs du domaine et des aides de bailler les deniers de
leurs recettes à partir du for décembre dernier à Madame. De Bourges, P. de
Refuge se rendit à Châtillon où il opéra de même[3]. Des
lettres patentes du 16 juin 1499 réglèrent définitivement la constitution et la
constatation de l'apanage[4]. Enfin,
au commencement du mois de mars 1499, Jeanne de France dit adieu à Amboise
pour prendre la route de sa nouvelle résidence. Le 12 mars, elle couchait à
la porte de la ville, dans l'abbaye des bénédictins de
Saint-Sulpice-lès-Bourges, et le lendemain elle fit son entrée solennelle[5]. Hélas,
Bourges n'était plus Bourges. Dès ses premiers pas, Jeanne dut ne point
reconnaître l'ancienne métropole qu'elle avait jadis habitée et qu'elle avait
vue un grand centre de fortune, d'arts, de commerce. Un incendie effroyable,
en 1487, avait brûlé plus de la moitié de la ville, presque tous les
établissements publics et 7.000 maisons ; il avait ruiné et forcé à
l'émigration un grand nombre de négociants et porté à la prospérité de la
cité-un coup fatal, mortel, dont elle n'a jamais pu se relever[6]. Ce n'était donc plus dans une
cité splendide et pleine de mouvement, c'était dans une ville ruineuse et
dépeuplée, encore sous l'impression d'une terrible catastrophe, que
s'avançait Jeanne. Quel vaste champ d'action pour sa charité ! Quelles
promesses d'infortunes à secourir ! Quelle moisson de bienfaits ! Il est vrai
que son arrivée dut mettre mal à l'aise plus d'un de ses nouveaux sujets ;
tous ces habitants, ces notables du Berry qui, six mois auparavant, venaient
au procès de divorce se répandre en détails accablants pour leur nouvelle
duchesse, dans l'espérance de plaire au roi dont, par une juste punition, il
se trouvaient maintenant séparés ; tous ces avocats et hommes de loi de
Bourges qui se faisaient traîner à Tours, qui avaient rassasié Jeanne
d'ennuis et de dégoûts avant de consentir à lui prêter leur ministère et qui
briguaient l'honneur de plaire à leur royal adversaire, maintenant ils se
voyaient appelés à porter leurs respects aux pieds même de la victime. Plus
d'un, sans doute, se fit alors d'amères réflexions ; aucun ne fut inquiété ni
de près ni de loin. Seul, le bailli du Berry sous Charles VIII, Gilbert
Bertrand, sire de Lis-Saint-Georges, céda sa place et reçut une compensation
; il eut pour successeur son beau-frère Vincent Dupuy, sire de Vatan[7], dont la famille, après avoir
montré à Jeanne de France une ingratitude exceptionnelle, s'empressait
maintenant, de même que la famille d'Amboise, de faire amende honorable. La
ville de Bourges, malgré ses épreuves, reçut convenablement sa nouvelle
princesse ; elle dépensa pour la réception 1.327 livres 10 sous tournois[8], ce qui était une sorte de
moyenne, car, en 1488, lors de l'entrée d'Anne de Beaujeu, on lui avait
offert, seulement en cadeaux, plus de 1.300 livres[9], mais on n'avait donné que 1.000
livres à Anne de Bretagne en 1493[10]. La
duchesse s'installa dans le vieux palais, épaisse construction féodale, où
Charles VII avait reçu Jeanne d'Arc. S'il fallait en croire les Orléanais du XVe
siècle, une duchesse d'Orléans n'aurait guère eu à se louer de se voir
transportée à Bourges. « Les quatre éléments y défaillent, disaient tout
simplement les députés de l'Université d'Orléans au Parlement en 1469[11] : 1° la terre, qui est bien
pauvre, joignant de Sologne ; n'y a qu'une petite rivière pareille à celle de
Saint-Marcel ; ainsy y défaut l'air ; et quartement y défaut le feu, car n'y
a bois quo par charrois et le faut aller chercher bien loin. » N'exagérons
rien ; sans doute le fleuve qui arrose Bourges n'a pas les magnificences de
la Loire, mais, si éprouvée qu'elle eût été par l'un des quatre éléments, par
le feu, la ville conservait encore une grande importance en vertu d'une
certaine force acquise dont le ralentissement ne devait se faire sentir que
progressivement et peu à peu. Pour le moment, on ne voyait que constructeurs
; l'horrible incendie de 1487 forçait la plupart des communautés à rebâtir ou
à restaurer leurs cloîtres et leurs églises, les bourgeois opulents à
reconstruire peu à peu leurs habitations renversées : l'abbaye de
Saint-Sulpice se trouvait encore presque en ruines ; l'église de Saint-Bonnet
pensait à sortir de ses cendres ; une charitable association de bourgeois et
de marchands s'organisait pour réunir les fonds nécessaires à l'érection du
nouvel Hôtel-Dieu et de sa chapelle ; la maison commune de Bourges, l'hôtel
de la famille Lallemant allaient s'élever avec leurs délicieuses pages de
sculpture[12]. Le
château des ducs de Berry, dont il ne reste que les caves et quelques débris,
bâti le long des remparts de la ville, dominait la campagne. Le duc Jean qui
l'avait érigé y avait englouti des monceaux d'or sans réussir peut-être à en
faire un monument ni bien commode ni bien remarquable ; vaste spacieux, le
palais de Jeanne de France appartenait naturellement à la vieille école des
fenêtres rares, étroites et profondes ; mais il y régnait un grand luxe
intérieur. Antoine Astezan, secrétaire de Charles d'Orléans, qui le visite au
milieu du XVe siècle, le dépeint au marquis de Montferrat comme un palais
aussi riche que celui de Crassus ; le château n'est pas fini, dit-il, et il a
déjà couté 100.000 écus d'or[13]. A côté du palais et faisant
partie du même massif de constructions, s'élevait la merveille de Bourges
dont on ne voit plus vestige aujourd'hui, la Sainte-Chapelle du palais où le
duc Jean s'était complu à prodiguer les marques de sa magnificence. Comblée
de richesses, cette Sainte-Chapelle avait été érigée sur le modèle de celle
de Paris, mais, selon le dire unanime des plus excellents architectes, la
copie surpassait l'original. C'est le vrai chef-d'œuvre de l'architecture
gothique, dit La Thaumassière. « Elle est bâtie sur piliers et presque
tout à jour ; les vitres ont été faites d'un verre qui est impénétrable aux
rayons du soleil quoyqu'il en reçoive la clarté[14]. » Intérieurement revêtue des
peintures dont les figures sont faites avec tant d'art, dit un Italien du XVe
siècle, qu'elles paraissent vivantes[15], on y voyait de toutes parts
reliques dans des caisses d'or et d'argent, croix d'or, pierres précieuses,
statues de saints peintes et dorées. Par un contrat du 10 mai 1401, le duc
Jean l'avait pourvue d'une quantité si prodigieuse de joyaux, do vaisseaux
d'or et d'argent, de reliques, pierreries, peintures, ornements et livres[16] que le récit, selon la
Thaumassière, en serait presque incroyable si nous n'en avions la preuve
constante par le contrat, qui fait voir les grandes richesses et la
libéralité presque immense du célèbre fondateur. On admirait surtout, au
milieu de la nef, une vaste couronne de lumière d'orfèvrerie ciselée, pendue
à seize grosses chaînes de fer, qui était considérée comme l'un des ouvrages
de ce genre les plus beaux et les plus parfaits du royaume. Cette couronne,
d'une circonférence de soixante pieds (20 mètres), supportait cent soixante
cierges. Elle se divisait en travées ciselées à jour dans le même goût et
avec les mêmes ornements que l'édifice. Chaque travée portait quatre fleurs
de lys et un petit ours en relief qui tenait une banderole aux armes de
Berry, puis un petit pilastre, surmonté d'un clocheton et orné d'un cerf en
relief issant à mi-corps, qui la séparait de la travée voisine. Les cierges,
d'un clocheton à l'autre, se posaient sur des branches de lys en saillie
garnies de fleurs et de feuilles, et par derrière sur des chandeliers garnis
de fleurs de lys fleuronnées. Toute cette grande pièce était montée à vis et
se démontait facilement. Il paraît qu'on ne l'avait allumée qu'Il. ne fois,
le jour de la consécration de la Sainte-Chapelle, le i8 avril 1403. Elle fut
allumée pour la seconde et la dernière fois le jour des obsèques de Jeanne de
France[17]. L'extérieur
de la chapelle répondait entièrement au luxe resplendissant de l'intérieur.
Sur la façade principale régnait une galerie élégante en forme à la fois de
porche et de promenoir, où nous aimons à nous représenter Jeanne de France,
avec sa suite et ses officiers, avec son cortège de chevaliers et de moines,
sous les arceaux gothiques. En cette apparition de la fille de Louis XI, nous
saluons un des derniers tableaux du moyen âge et d'un monde qui s'en va. La
cruelle destinée de ceux qui paraissent sur la scène du monde à l'heure d'une
des grandes évolutions qu'accomplissent nos générations est de ne trouver
dans la grandeur même par laquelle ils se rattachent au passé que souffrance,
angoisses et périls ; ainsi fut plus tard ce bon et vertueux Louis XVI dont
le nom se représente sans cesse à notre esprit lorsque nous cherchons à
retracer la chronique des douleurs de Jeanne de France. En 1499 aussi, les
ruines d'un passé nous entourent, non pas des ruines matérielles, mais des
ruines morales et profondes qui en présagent encore beaucoup d'autres. De
toutes parts, la Renaissance va éclater, elle va envahir la France avec son
art nouveau, avec son esprit de critique, avec son incroyance, avec un
ensemble d'éléments inconnus prêts à changer la face de la terre : on
aperçoit, au fond de l'océan, un monde nouveau, de toutes parts des horizons
encore inexplorés ou oubliés se découvrent et éblouissent l'humanité
surprise. Au milieu de cet univers en plein travail de germination, la fille
de Louis XI montant à la Sainte-Chapelle de Bourges nous semble comme
l'incarnation dernière de la foi profonde du moyen âge, de sa grandeur
morale, de son énergie, de sa poésie. Éblouissants vitraux, arceaux qui ne
semblez pas toucher à la terre et qui vous élancez dans les espaces célestes
avec la pensée humaine, saintes reliques, monuments merveilleux de la foi, de
l'amour immatériel, de l'enthousiasme pur, clochers gracieux, qui découpés à
jour vous perdez dans les airs et par vos légers tintements mêlez un parfum
de prière à l'air même que respirent les nations dociles, vous êtes le cadre
idéal et pur où le souvenir de la fille de saint Louis doit se graver
éternellement dans nos mémoires. C'est là que nous voulons la voir, non point
avec le faste que donne le rang royal, — elle l'a dépouillé, — non, elle nous
apparaît ici avec l'immortelle grandeur de l'expiation, vêtue de sa robe
sombre, gravissant lentement les marches symétriques qui montent à la
lumineuse chapelle, tout entière déjà, comme elle doit l'être aux dernières heures
de sa vie, sous la main de Dieu dont la gloire commence à lui apparaître.
C'est là que nous la voyons sur le chemin d'un nouveau triomphe. Dernier
rejeton de la race des croisés et des croyants, victorieuse de l'infortune et
du temps, elle inaugure une vie nouvelle et elle dira comme l'apôtre son patron
: « Ma véritable victoire, celle qui met sous mes pieds le monde entier,
c'est ma foi... » Dans
cette galerie qui précédait l'église, on voyait la statue du duc magnanime
qui l'avait fondée et celles de tous les rois prédécesseurs ou aïeux de Jean.
On y avait ajouté diverses curiosités ; des os de géant auxquels se
rattachaient des légendes, un grand cerf empaillé qu'on disait avoir vécu
trois cents ans[18]. De là, l'œil dominait le
jardin du palais jusqu'au rempart ; plus loin, la Grosse-Tour où avait été
enfermé Louis XII ; par derrière et tout près, s'élevaient l'église dite de
Montermoyen et l'énorme colosse de la cathédrale de Bourges. La
courte administration de Jeanne de France dans le Berry n'a laissé aucune
trace. Les registres do sa trésorerie n'existent plus aux Archives du Cher.
Nous n'en avons pu trouver aucun débris. Le nom traditionnel de Bonne
Duchesse sous lequel elle est restée connue dans son pays résume seul son
administration et, du reste, il la caractérise suffisamment. En son temps, la
justice suivit un cours' équitable et régulier, et vingt ans après sa mort,
lorsqu'une autre duchesse de Berry, femme d'un grand esprit mais bien
différente de Jeanne, la sœur de François Ier, Marguerite, voulut réformer
les institutions judiciaires et instituer des assises ou grands-jours, on lui
répondit que, s'il lui plaisait de faire rendre la justice dans la forme et
par les procédés adoptés du temps de la feue duchesse de Berry, cela serait
plus utile à la chose publique que l'institution projetée[19]. Que
pourrait-on ajouter à cet éloge ? Il résume tout ce que nous voudrions dire. Nous
savons aussi que, sous le principat de Jeanne, le 9 juin 1499, la population
de Bourges, toujours très friande de mystères, fit représenter des monstres
de la Passion qui attirèrent beaucoup de gens de bien ; mais ces
représentations étaient très fréquentes et ne faisaient que continuer les
traditions locales. On en avait donné déjà en 4498. Les Comptes-de-Ville
nomment l'entrepreneur, Jean Caillyn, auquel les bourgeois allouèrent une
indemnité de vingt sous[20]. C'est ainsi qu'on s'amusait en
ce temps-là. Pourtant,
si court qu'il ait été, puisqu'il n'a duré que cinq années, le gouvernement
de Jeanne a attaché son nom à une œuvre considérable, la création du collège
actuel de Bourges. Bourges,
qui possédait une célèbre Université où a professé Cujas, n'avait encore à la
fin du XVe siècle d'autre école secondaire que les écoles entretenues par le
chapitre de la cathédrale. Un docteur-régent de l'Université, François
Rogier, conçut la généreuse ambition de créer à ses frais un collège, en
l'honneur de la B. Vierge Marie. Mais, comme en réalité il n'avait assez de
biens pour le faire, il se trouva arrêté par le défaut de ressources et, dans
l'impossibilité de mener à bonne fin son œuvre, il allait la voir périr
misérablement en germe entre ses mains. C'est dans cette situation désespérée
que Jeanne adopta l'entreprise du docteur Rogier et se chargea de la mener à
bien, de la soutenir et de la doter. Elle avait d'autant plus de mérite à reprendre
une pensée déjà funeste à son premier auteur que ses propres ressources à
elle-même étaient assez limitées, car elle ne possédait rien en propre et, si
le roi lui avait assuré de beaux revenus, ce n'était pourtant que des
revenus, que des usufruits ; par conséquent elle ne pouvait entreprendre de
doter un établissement qu'en diminuant le service de sa maison et en
amassant, pour produire le capital, ses épargnes annuelles. C'est ce qu'elle
fit. Le 18 novembre 1502, sur la demande instante de Rogier, elle accepta le
don du collège, vulgairement appelé le Collège Sainte-Marie, qu'il
avait commencé à élever en la paroisse de Notre-Dame-de-la-Fourchault, rue de
Mirebeau, à côté de la maison de ville. La duchesse s'engagea à achever les
constructions et elle institua le fondateur, maître François Rogier, grand-maître
régent de l'établissement pour toute sa vie. Louis d'Amboise, évêque
d'Autun, est l'un des témoins de l'acte constitutif de cette fondation qui
fut définitivement régularisée en 1505[21] L'existence du collège
Sainte-Marie, d'abord très précaire, ne fut en effet consacrée qu'à ce
moment, lorsque Madame Jeanne, ayant reçu quelques biens d'un héritage dont
nous parlerons tout à l'heure, put lui léguer les fonds nécessaires à
l'entretien de dix boursiers. Au XVIe siècle, il acquit une véritable
importance par suite des libéralités d'un riche et généreux citoyen de
Bourges, Jean Nicquet. La
sollicitude de la duchesse fut appelée aussi sur les affaires
ecclésiastiques, alors importantes dans la ville de Bourges où les couvents
tenaient beaucoup de place ; le relâchement qui se glissait dans les cloîtres
n'en faisait point pour le pays un sujet d'édification. Les ordres religieux,
comme le reste, traversaient une crise générale qui ne pouvait manquer de
préoccuper l'autorité civile. Un bref d'Alexandre VI, da 17 août 1499, relate
par exemple la vie scandaleuse que menaient, dans le duché de Bretagne, les
religieux de tout ordre : il nous dépeint les religieux des deux sexes
chassant et mangeant en chevaux et en chiens le revenu du couvent ; les
religieuses recevant des visites d'hommes dans leur cloître, au mépris de la
règle et des plus élémentaires convenances. Le pape commet les évêques de
Dol, de Tréguier, de Rennes et de Saint-Brieuc, avec de pleins pouvoirs pour
y porter remède[22]. En Berry, Jeanne de France,
plus zélée peut-être qu'Anne de Bretagne, met elle-même la main à la réforme,
quoique les abus fussent moins criants. Elle
devait trouver dans l'accomplissement de cette œuvre nécessaire un ferme
appui en la personne de l'archevêque de Bourges, Guillaume de Cambray. Ce
prélat, né d'une famille berrichonne répandue dans les fonctions publiques et
même à la cour, — son père était panetier de Charles VIII, — avait d'abord
fourni une carrière distinguée dans la magistrature et n'entra dans les
ordres qu'assez tard, en 1457. Conseiller au Parlement et au Grand-Conseil,
puis maître des requêtes, il avait résigné ces fonctions pour devenir vicaire
à la cathédrale de Bourges, et, après un rapide passage par les divers degrés
de la hiérarchie ecclésiastique du pays, successivement chanoine, archidiacre
de la Sologne, doyen du chapitre, il avait été élu archevêque par son
chapitre, malgré la vive opposition de trois ou quatre membres[23]. Il survécut encore à Jeanne de
France et mourut fort âgé. Déjà
l'abbé de Saint-Sulpice, Guy Juvénal, qui était en outre un littérateur
distingué, avait mis à la raison les religieux de son antique monastère, et, après
la réforme des esprits, il s'occupait de réparer les murs du couvent. Les
religieuses de Saint-Laurent donnaient à Bourges l'exemple des plus grands
désordres. La duchesse avait souvent pénétré dans leur maison ; elle les
avait vues de près et d'abord elle pensa sérieusement à les chasser pour
installer les Annonciades à leur place ; les difficultés de l'entreprise
l'obligèrent sans doute à modifier ses vues et elle essaya de bons conseils
pour ramener dans la voie de l'honnêteté cette réunion de femmes égarées.
Elle n'y réussit qu'avec beaucoup de peine ; longtemps elle ne rencontra
qu'indifférence ou dérision ; enfin sa patience obtint quelques meilleurs
résultats ; elle arriva à rétablir la règle et, d'accord avec l'archevêque,
elle fit venir à Bourges des religieuses d'autres couvents du même ordre qui
avaient déjà subi une réforme, afin d'infuser à la communauté convalescente
un sang nouveau et plus généreux[24]. Ainsi,
dans le milieu secondaire où l'avaient reléguée les évènements, Jeanne de
France prenait à cœur ses devoirs de duchesse et en remplissait fermement
toutes les obligations. Elle s'y appliqua tellement qu'elle allait fort peu
dans ses terres de Châtillon-sur-Indre et de Châteauneuf-sur-Loire, car ces
deux domaines n'étaient guère que deux châteaux de plaisance. Bans les
derniers temps de sa vie, entièrement consacrés à la partie austère et
sérieuse de sa tâche, elle cessa même complètement de s'y rendre. Aussi
avons-nous peu de chose à dire de ces deux seigneuries. Chatillon-sur-Indre,
situé sur les bords de la Touraille et considéré déjà comme une fraction de
cette province, avait autrefois appartenu à Tanneguy Duchâtel. C'était une
terre de peu d'étendue, située sur l'Indre, à dix lieues de Châteauroux et à
cinq de Loches, en air serein et en pays très-agréable. « Le château,
dit La Thaumassière, est à l'une des extrémitez de la ville ; au-devant
duquel y a une haute tour appelée la Tour-de-l'Aigle ; au derrière du château
il y a une belle terrasse bâtie sur les murs de la ville, qui a son aspect
sur la rivière et sur de grandes prairies. La ville est décorée d'une église
collégiale, fondée avant l'an 1112, comme le justifie une charte de cette
année, de Léger, archevêque de Bourges, qui fait mention d'Hervé, chanoine de
Châtillon. » Jeanne,
trouvant le château trop loin de l'église, lit consacrer une chapelle
particulière à laquelle l'archevêque de Bourges attacha une indulgence de
quarante jours en faveur des visiteurs qui y viendraient à certains jours de
fête[25]. Il est
évident qu'un sentiment de devoir retenait Madame Jeanne à Bourges, car nous
n'avons trace de son passage à Châteauneuf-sur-Loire que le 16 février 1500[26]. Cette vieille châtellenie, qui
occupe sur les bords de la Loire une agréable situation, était pourtant une
belle résidence, aimée des rois de France et notamment de saint Louis, dont
les souvenirs de bienfaisance s'y conservent encore, et devenue l'apanage
habituel des reines ou des duchesses dans leur veuvage. Marie de Clèves
l'habita ainsi après la mort de son mari
[27] et, avant elle, Valentine de
Milan, veuve du grand-père de Louis XII, avait en partie reconstruit le
château ; de tous côtés elle avait répandu sur les murs l'emblème de sa
douleur : une chante-pleure, avec ces mots : « Rien ne m'est plus — plus
ne m'est rien. » Ce
séjour convenait donc merveilleusement à la situation particulière de la
duchesse de Berry. La poésie s'alliait à ses mélancoliques souvenirs :
successivement pris par les Anglais et repris par Jeanne d'Arc, il avait
ensuite abrité la poétique cour de Charles d'Orléans, et même son gouverneur
Jean de Garancière[28] est plus connu par des vers que
comme capitaine de Châteauneuf. C'est dire que sa position agréable, ses
jardins toujours délicieux[29], son air vif, ses courtilz
ou ses grandes terrasses qui s'étendaient en pente douce jusqu'aux bords du
fleuve, sa vue qui embrassait tout le val de la Loire où l'on distinguait,
parmi quelques clochers de villages, la petite église de Germigny érigée par
Charlemagne, la masse imposante de l'abbaye bénédictine de Saint-Benoît-sur-Loire,
jadis un grand foyer intellectuel, et dans le lointain peut-être les tours du
château de Sully qui annoncent le voisinage de Gien, tout cela résonnait
encore de l'écho des muses qui avaient dû en célébrer les charmes. Un
autre attrait puissant retenait à Châteauneuf les ducs et même les duchesses
d'Orléans : c'était la chasse[30] ; car à la porte de la ville
commençait l'immense forêt d'Orléans, grande de cent-vingt à cent-quarante
mille arpents compacts[31], aménagée en jeunes futaies de
cent-cinquante, de cent-soixante ans, sous lesquelles palefrois et destriers
pouvaient galoper à l'aise. Auprès de la ville s'étendaient deux mille
arpents de futaies plus vieilles[32], arbres vénérables, pour qui la
durée d'un siècle n'est rien, au pied desquels le temps glisse comme une
ombre sans les atteindre. Plus d'un subsiste encore, au fond de son enceinte
forestière[33], qui a pu entendre passer
Jeanne de France ou Jeanne d'Arc dans le silence de la forêt. Les dépendances
du château comprenaient aussi un vaste parc enclos ou garenne, renommé, par
l'abondance de ses lapins qui s'ébattaient librement en troupeaux, sous une
garde tutélaire, au grand plaisir des habitants du château ; heureux lapins !
ils ne connaissaient d'autre ennemi que la Loire qui parfois, il est vrai,
montait jusque dans leurs terriers[34]. Et puis de grands étangs
conservaient une belle réserve de poissons ; c'était d'abord le réservouer
du château, puis l'étang de la Folye, lo Grand-Étang de cinquante arpents et
demi, l'étang de Giblois de quatre-vingts arpents[35]. Ainsi Châteauneuf possédait
tout ce que pouvait aimer une princesse : un beau Château, des eaux, des
forêts, des jardins, un beau fleuve ; mais tout cela n'attire point Jeanne de
France ; d'autres soins la réclament ailleurs et remplissent sa vie. L'Hôtel-Dieu
de Châteauneuf date cependant du temps de son administration et elle créa
dans cette petite ville un couvent d'Annonciades[36], ce qui donne à croire que ses
sollicitudes pénétraient partout, sans bruit, puisque nous n'en pouvons
saisir aucune trace que leurs fruits ; tant la main qui répandait la semence
de la justice par toutes ses terres prenait, pour se laisser ignorer, autant
de souci qu'on en met d'ordinaire à se faire connaître I C'est
le lieu de dire aussi que Jeanne n'apportait pas moins de soin à la gestion
de ses affaires privées. On trouva dans ses papiers divers états de
situation, dressés successivement, qui montrent l'esprit d'ordre et de
méthode de la fille de Louis XI. Nous n'avons plus que les titres de ces
actes domestiques de maîtresse de maison : « Une
décharge en parchemin qui paroist avoir été scellée de son sceau, donnée par
ladite bienheureuse Jeanne à Madame d'Aumont, dame de Châteauroux, de ce
qu'elle avoit fait et géré dans ses affaires et mannié bijoux et autres
hardes, ladite descharge signée d'elle, Jeanne de France, du 27 décembre
1502, et contresignée par son secrétaire... « ...
Un estat de sa maison et des gages qu'elle donnoit à ses gens. Plus un
inventaire de la tapisserie et meubles fait le 27 décembre 1501. « Plus
un inventaire de la vaisselle d'argent de Madame la duchesse, fai t par
Chardon, son secrétaire, le 14 janvier 1500[37]... En
1504, par suite d'un concours de circonstances vraiment dramatiques, la
duchesse de Berry se trouva appelée à recueillir les débris d'un opulent
héritage, celui de la famille d'Armagnac. Nous n'avons pas à rappeler ici les
destinées si diverses de cette famille, son grand rôle dans l'histoire,
l'exécution de Jacques d'Armagnac par ordre de Louis XI, tandis que ses
enfants, placés, dit-on, sous l'échafaud, voyaient couler le sang de leur
père. Les six enfants entrés dans la vie sous les auspices de ce lugubre
baptême eurent une vie bien agitée. Presque aussitôt orphelins de mère et
réduits à la gêne, deux d'entre eux moururent jeunes ; sous Charles VIII ils
obtinrent la restitution des biens de leur père, et l'aînée des quatre
survivants, Catherine, épousa le due de Bourbon, mais elle mourut très peu de
temps après. Son frère, le duc de Nemours, devenu le dernier représentant
mâle de la famille et envoyé à Naples comme vice-roi sous Louis XII, se fit
glorieusement tuer sur le champ de bataille de Cérignoles. Restaient deux
filles, Charlotte et Marguerite, qu'on appelait Mesdemoiselles de Nemours ;
seules héritières de biens immenses et d'un grand nom, bien traitées d'Anne
de Bretagne, elles semblaient fatalement destinées à épouser des hommes en
faveur. Le maréchal de Gié, à peine veuf de Françoise de Penhoët, prit pour
femme Marguerite, quoiqu'il eût bien près de cinquante ans. Quant à
Charlotte, sa main fut l'enjeu d'une brigue des plus vives entre le vieil
Alain d'Albret, décidément bien malheureux en matière de mariage, et le
vicomte de Fronsac, fils aîné du mari de sa sœur ; ce dernier finit par
l'emporter. Tous
ces évènements se précipitent et se mêlent d'étranges douleurs : le 23 avril
1503, la mort du duc de Nemours ; le 8 juin, le partage des biens de la
famille entre les deux sœurs[38] ; le 15 juin, mariage de
Marguerite avec le maréchal de Gié[39] ; Marguerite meurt en novembre
et se fait ensevelir dans la chapelle du splendide château de son époux, au
Verger, en Anjou ; en janvier 1504, lorsque la tombe de sa sœur bien-aimée se
fermait à peine, Charlotte épousa Charles de Rohan, vicomte de Fronsac[40]. Charlotte meurt au mois
d'août. Ainsi, en un an, la Providence avait moissonné toutes ces vies. La
maison d'Armagnac n'existait plus. Charlotte
ne laissait comme héritières naturelles que Mesdames les duchesses de Bourbon
et de Berry, ses parentes éloignées. Son testament[41], écrit le 12 août 1504,
contient un grand nombre de pieux souvenirs et de legs en faveur de ses
serviteurs, de son médecin, de son aumônier ; il est rempli de l'expression
de sa touchante tendresse pour son mari, loin duquel elle mourait, et pour le
maréchal de Gié qui se trouvait à la fois son beau-père et son beau-frère.
Elle demande qu'on l'enterre près de sa sœur, dans l'église du Verger ; elle
lègue à son mari, dans l'espoir qu'il priera pour elle, tout ce dont la
coutume lui permet de disposer et l'institue son exécuteur testamentaire avec
k cardinal Ph. de Luxembourg[42], évêque du Mans, et un écuyer,
fidèle serviteur de son beau-père, Bernard de La Roque, sénéchal de
Carcassonne. Par
suite de ces dispositions, Charles de Rohan se trouvait héritier des biens de
Charlotte dans les comtés d'Armagnac, de Rodez et de Castres ; de la vicomté
de Martigues, en Provence ; de la baronnie de Lunel ; des seigneuries d'Essé
et d'Ayen, en Limousin ; des comtés de Perdiac et de Lisle en Jourdain, avec
les châteaux et baronnies qui en dépendaient. Toutefois,
dans le règlement de la succession, la vicomté de Martigues revint
définitivement aux héritières naturelles de Charlotte. La succession se
liquida avec rapidité et les deux sœurs ne partagèrent pas leur part commune
d'héritage ; elles se bornèrent à prendre possession, chacune de leur côté et
en ce qui les concernait, des terres qui leur étaient dévolues, c'est-à-dire
des terres suivantes : la baronnie de Sablé, les vicomtés de Châtellerault et
de Martigues, la seigneurie de Mayenne-la-Juhel, dans le Maine, la seigneurie
de Nouvion, en Vermandois, et diverses terres dans le comté de Guise. Le 30
novembre 1504, la duchesse de Berry chargea Jean d'Aumont de rendre hommage
au roi pour ces nouvelles possessions[43]. Jean d'Aumont s'en acquitta le
10 décembre[44] et le 13 du même mois Jeanne
donna mandat au même sire d'Aumont et à Guillaume Ponceton de prendre
possession en son nom de sa part dans ces divers domaines[45]. La
situation financière de la duchesse de Berry, par le fait de cet héritage, se
trouvait sensiblement améliorée. Du
reste, Jeanne s'était créé une vie en tout convenable à son rang et à son
état. Une petite cour s'était formée près d'elle, cour que n'alimentait pas
assurément la soif des honneurs ni l'ambition, cour toute d'affection et
dévouement ; et les membres des familles dont elle avait eu le plus à se
plaindre n'étaient pas les moins empressés à y tenir leur place, tant on
savait la duchesse oublieuse des injures, tant ceux qui avaient pris part à
ses disgrâces cherchaient à montrer leur repentir I Les
conseillers intimes et personnels de Jeanne étaient, avec l'archevêque
Guillaume de Cambray et Guy Juvénal, abbé de Saint-Sulpice, son confesseur le
P. Gilbert Nicolas et l'aumônier G. Passerin, et pour la gestion
administrative du duché le sire Pierre d'Aumont, chevalier, seigneur de la
Chatre, de Châteauroux et autres lieux[46] ; ce dernier, bien qu'engagé au
service de Louis XII, dont il était lieutenant général en Bourgogne,
s'occupait activement, même de loin, des affaires de Madame Jeanne[47]. Son
conseil officiel se composait d'Antoine Le Bègue, seigneur de la Bourde, son
maître d'hôtel, et de honorables et sages maîtres, Jehan Salat, Gencien
Deloynes, Jacques de Treignat (ou de Treignac), tous hommes de loi et
d'administration[48]. Citons
encore parmi ses serviteurs : Martin Chambellan, d'une famille notable de
Bourges[49], Jacques de Contre-Moret,
seigneur de Savoye, un de ses gentilshommes[50], Bienaimé Georges, seigneur de
Mannay, son écuyer et son collaborateur particulier en matière
d'architecture, Guichart de Vaubrion, son maître d'hôtel, Jehan Denis,
contrôleur de sa dépense, Jehan Gouineau, son clerc d'office[51]. Mais la
duchesse donna surtout une preuve de sa magnanimité en choisissant pour «
trésorier de sa sainte-chapelle »[52], c'est-à-dire pour confident
intime et pour ministre de ses générosités cachées Louis d'Amboise, nommé
évêque d'Autun en 1501, le propre neveu de son juge. Elle ne cessa même de
témoigner à ce prélat la plus entière confiance et la plus vive sympathie,
comme si par cette affection touchante elle tenait à bien montrer qu'elle
avait tout oublié ou bien qu'elle ne se rappelait les injures et les tortures
du passé que pour s'en venger par les bienfaits. Louis s'en montra digne. En
aucune circonstance il ne manque de prouver à Jeanne son dévouement ;
successeur de son oncle en 1502 sur le siège d'Albi, tous ses actes tendent à
effacer de son côté le passé par un éclatant repentir, par la réhabilitation
de la victime, et il se crut tenu de continuer l'œuvre de Jeanne après sa
mort[53]. Dans
l'entourage particulier de la duchesse nous voyons un petit cercle de femmes
que l'affection et la communauté de pensées lui attachaient par les liens les
plus désintéressés et les plus forts. C'était d'abord sa dame d'honneur,
Françoise de Maillé, héritière en partie des grands biens de l'antique maison
de Chauvigny et mariée depuis 1480 au sire d'Aumont. Et puis
une jeune dame, toute dévouée à Madame Jeanne de France et qui s'était donné
pour mission de lui ressembler, une femme du plus haut rang, mais de celles
qui usent du monde comme n'en usant point, Jeanne Malet de Graville, fille
d'un des serviteurs les plus distingués de Charles MM, nourrie à la cour et
donnée en mariage à un neveu de Louis d'Amboise, Charles d'Amboise, héritier
du beau château de Chaumont-sur-Loire et seigneur de Meillant en Berry. Le
mari de Mme de Chaumont, un vrai d'Amboise[54], toujours bien en cour, pétri
d'ambition, vivait au loin, courant la carrière des honneurs qui
s'accumulaient sur sa tête sans paraître ni l'écraser ni le rassasier. Placé
tout jeune encore, par la faveur de son oncle le cardinal, à la tête d'une
armée française qui devait défendre le Milanais, il justifie cette haute
mission par son habileté ; aussi atteint-il comme d'un bond les plus hauts
degrés de la grandeur : amiral, grand-maître et maréchal de France,
gouverneur de Paris en 1504, il commande en chef l'armée avec laquelle Louis
XII entre à Gênes. En 1509 il triomphe à Agnadel, recueille l'opulent
héritage de son oncle et meurt prématurément en 1510 dans son gouvernement du
Milanais[55], Les richesses qu'il avait
amassées au-delà des monts lui avaient permis de reconstruire le château de
Meillant et d'en faire, ce qu'il est encore aujourd'hui, un des fleurons de
l'architecture française[56] ; mais on ne manquait pas de
dire : « Milan a fait Meillant. » Mme de
Chaumont, que venait trouver au fond du Berry le bruit des illustres actions
de son époux, partageait modestement pendant ce temps—là les pieuses
occupations de Madame Jeanne. Elle ne fut pas heureuse. Veuve de bonne heure,
avec un seul enfant, un fils, son digne héritier, qu'elle perdit en 1524 sur
le champ de bataille de Pavie, elle se décida à se remarier lorsqu'elle se
vit sans enfants ; elle épousa un certain René, de Milly, sieur d’Illiers, un
atroce dissipateur qui, après ne lui avoir épargné aucun chagrin, lui donna
enfin, en 1532, la triste satisfaction d'un second veuvage. Madame de
Chaumont mourut elle-même en 1540 ; elle légua à l'Annonciade de Bourges son
cœur et de beaux revenus. Nous
voyons encore venir à Jeanne de France une grande, une incommensurable
infortune. La belle Charlotte d'Albret, dont le mariage avec César Borgia avait
été la rançon des propres malheurs de la duchesse de Berry, Charlotte
d'Albret elle-même, délaissée de son misérable époux, jeune et éclatante de
beauté, vient déposer dans le sein de Jeanne le fardeau de ses douleurs et
lui demander un appui, un secret de force. Peu après son mariage, César était
reparti pour l'Italie continuer sa vie de brigandage cosmopolite et jamais sa
jeune femme ne le revit. Mais elle avait un bonheur que Jeanne ne connaissait
pas : elle trouvait pour son cœur défaillant un aliment nouveau dans les
douceurs de la maternité. César l'avait laissée mère d'une fille, Louise
Borgia, que plus tard Louis de La Trémoille épousa en secondes noces.
Charlotte garda soigneusement sa fille auprès d'elle et l'éleva sous ses yeux
dans le vieux château féodal de la Motte-Feuilly, qui était une forteresse de
la même école que Linières et bien dissemblable des modernes richesses de
Meillant. De là, voisine de Bourges et isolée par la honte même de son
mariage, la pauvre femme, flétrie avant l'âge, venait souvent se réfugier
près de la duchesse, comme dans la citadelle inaccessible de la sagesse, autrefois
rêvée par les philosophes[57], d'où l'on savoure au loin le
spectacle des flots agités et des fureurs de la tempête, à condition de se
maintenir soi-même dans des régions supérieures. Amie de
Bretagne avait cherché à attirer Charlotte à la cour, et elle s'en faisait un
mérite auprès du pape[58]. En 1508, nous la voyons
adresser un présent à sa cousine, la duchesse de Valentinois[59]. Mais Charlotte préférait sa
tranquille retraite[60]. Comme
Jeanne, elle institua directeur de sa conscience le P. Gilbert Nicolas, qui
dirigea aussi dans les voies de la sainteté Marguerite de Lorraine, duchesse
d'Alençon. Plus tard, elle se montre toute dévouée à l'œuvre de l'Annonciade
; elle assiste à la réception dans l'ordre d'Anne d'Orval, fille de Jean
d'Albret d'Orval, sa cousine et sa demoiselle d'honneur[61]. Elle
survécut plusieurs années à Jeanne et la perte d'une telle amie dut exciter
dans son cœur une douleur bien profonde. Lorsqu'elle mourut au mois de mai
1514[62], jeune encore, son dernier vœu
fut exaucé sa dépouille reposa près des restes mortels de la sainte duchesse. Touchante
réunion que cette dernière et éternelle association dans le repos de la tombe
de deux femmes qu'un égal concours de malheurs avait rapprochées dans la vie
! Louise
Borgia, sa fille, voulut toutefois lui faire ériger, dans la modeste église
de la Motte-Feuilly, un magnifique mausolée : sur une table de marbre noir
était couchée sa statue en marbre blanc avec le riche costume que portaient
alors les femmes d'un rang élevé. Cette statue, aujourd'hui brisée en trois
morceaux et indignement mutilée, est adossée à la muraille d'une chapelle :
çà et là sont dispersées de petites figures qui représentent la Force, la
Tempérance et la Justice. On montre encore, dans l'église, un banc où la
tradition raconte que Charlotte venait habituellement s'asseoir et, près du
château, s'élève un if colossal dont les proportions attestent une vieillesse
reculée, et sous lequel elle versa peut-être plus d'une fois des larmes. Une
jeune fille partageait volontairement aussi l'exil de Jeanne de France.
Jeanne de Bourbon, fille de Guy de Bourbon qui fut gouverneur de Berry en
1484, ne voulut pas, paraît-il, quitter la bonne duchesse, et l'on dit
qu'elle mourut de douleur de sa perte dans le palais ducal d'où elle n'avait
plus voulu sortir ; Anne de Bretagne la fit enterrer dans la Sainte-Chapelle
de Bourges, à côté de Jean le Magnifique[63]. Ainsi
les femmes qui avaient à se plaindre de grandes infortunes accouraient auprès
de la bonne duchesse. Au mois de juillet 1502, une autre femme encore bien
malheureuse, Béatrix d'Aragon, reine de Hongrie, arriva à Bourges, où elle
fut reçue par les habitants sous un poêle à ses armes ; elle put raconter à
Jeanne les cruelles vicissitudes de sa vie. Fille de Ferdinand Pr, roi de
Sidle, elle avait été mariée à Mathias Corvin, le fils du célèbre Jean
Huniade, devenu en 1458 roi de Hongrie. A sa mort, elle parvint à faire
désigner, comme le successeur de Corvin, Ladislas, fils de Casimir, roi de
Pologne, qui l'épousa, mais qui, bientôt après, la répudia sous prétexte de
stérilité. Sans doute, sa vie n'avait pas été irréprochable et pure comme
celle de Jeanne : mais il y avait trop de conformité dans leur sort pour
qu'un vif courant de sympathie ne se soit pas établi entre elles[64]. Jeanne
reçut encore, en 1500, une autre visite notable, mais celle-ci dans un
équipage bien différent. Le cardinal Ascanio Sforza, qui avait été le grand
instrument de l'élection à la papauté d'Alexandre VI Borgia, venait d'avoir
son tour des revers de la fortune. Surpris au château de Rivalta par les
Vénitiens pendant qu'il faisait le siège de Milan, il ne put pas s'enfuir à
temps et on le livra aux Français. Louis XII l'envoya dans la grosse tour de
Bourges, pendant que son frère, Louis le Maure, allait achever sa vie au
donjon de Loches. Allié à Jeanne de France[65], le cardinal put recevoir plus
d'une fois sa visite et s'entretenir à loisir avec elle des brusques retours
des choses de ce monde : le roi, du reste, voulut qu'il fut bien traité et,
sachant que la grosse tour est mal neublée et utencillée, il donna
l'ordre à la ville de Bourges de fournir au capitaine les meubles et
utencilles glu seront nécessaires pour la provision et acoustrement de ladite
tour, sauf remboursement par la personne chargée de la dépense dudit
cardinal'[66]. Enfin, s'il fallait en croire la tradition, Jeanne aurait même reçu à Bourges la visite de Louis XII repentant, ou tout au moins le roi serait venu à la dérobée revoir la malheureuse femme qu'il avait quittée et, caché derrière une tapisserie de la Sainte-Chapelle, il l'aurait, de loin, aperçue en prières[67]. En tout cas, par un sentiment facile à apprécier, le roi ne parut jamais officiellement à Bourges du vivant de la duchesse : mais on sait qu'en réalité il vint quelquefois dans les environs. En 1500, il était à Mehun-sur-Yèvre, en 1502 également et même il s'avança jusqu'à la chapelle Saint-Ursin où la ville envoya des députés pour le saluer[68]. |
[1]
Orig Arch. de la mairie de Bourges, AA. 14 (communication par M. de la Guère).
[2]
Déclaration du 29 mars, Bréquigny, t. XXI, p 174.
[3]
Bibl. nat. De Camps, t. LI, fol. 33i.
[4]
Arch. nat. K. 77, n° 41 bis.
[5]
Journal de Delacroix, notaire royal à Bourges de 1492 à 1543
(communication par M. de la Guère). Elle entra le 14 mars seulement, suivant le
registre de J. Thiboust (Arch. du Cher, D. 33). Le 14 mars n'était pas,
comme le dit Raynal, le jeudi de la Passion, mais le jeudi précédent, Pâques
étant, cette année-là, le 31 mars.
[6]
Raynal, Histoire du Berry, t. III, p. 157-159.
[7]
Raynal, p. 287.
[8]
Arch. de la mairie de Bourges, C. 558, mandement de 1499 (M. de la Guère).
[9]
Raynal, p. 161.
[10]
Mairie de Bourges, AA. 34 (M. de la Guère).
[11]
Raynal, p. 355.
[12]
Raynal, passim.
[13]
Lettre d'Ant. Astezan, analysée par M. Berriat-Saint-Prix, Magasin
encyclopédique, 4802, t. XLIII, p. 209.
[14]
Histoire du Berry, p. 113.
[15]
Ant. Astezan — « Chascun desdictz piliers au-dedans de ladite chapelle est
garny d'une statue ou figure plus grande que le naturel, représentant l'un des
apostres ou des évangélistes, si bien et parfaictement labourez par la main du
tailleur et outre ce enrichis et revestuz d'or, argent et couleurs par la main
du second Appelles ou autre aussi excellent peintre qu'il ne reste que la
parolle pour les affirmer vivans. » Chaumeau, Histoire du Berry, 1566.
[16]
Une grande bibliothèque y était annexée. C'est dans la salle du chapitre que
fut rédigé l'acte connu sous le nom de Pragmatique sanction (Catherinot, Les
églises de Bourges).
[17]
Raynal, t. II. Chaumeau, Nicolas de Nicolaï, Labouvrie, etc.
[18]
Chaumeau. — La Sainte-Chapelle de Bourges, incendiée en 1693 et en partie
abattue par un ouragan en 1756, fut définitivement supprimée en 1757.
[19]
23 janvier 1524. Raynal, t. III, p. 216, d'après le Registre capitulaire.
[20]
Raynal. — Indiqué dans la Chronique de J. Batereau (rééditée par M.
Julien Havet, Cabinet historique, 1882).
[21]
Orig. Arch. nat. P. 1359, cote 665.
[22]
Arch. de la Loire-Inférieure, Tr. des Ch. de Bretagne, E. 45, orig. parch.
[23]
Gallia Christiana, t. II, p. 92. — Mandement du roi au chapitre, du 28
janvier. Arch. de la Mairie de Bourges, AA. 13 (M. de la Guère). — V. Chenu, Antiquitez
de Bourges.
[24]
Raynal, t. III. p. 217. Ces religieuses remontaient à une institution de
Charlemagne et étaient fort riches (Bill. Nat, mss. fr. 24033). Leur réforme
fut complétée par une bulle du cardinal d'Amboise du 7 des ides de mars 1506.
(Arch. du Cher).
[25]
25 sept. 1499. — Arch. du Cher, Sainte-Jeanne, tit. 1, chap. 12 et 13. Orig.
coté : Permission à Madame la duchesse Jeanne de France de faire benistre et
dédier la chappelle du chasteau de Chastillon sur-Indre.
[26]
Mentionné, Manuscrit 430, Bibliothèque d'Orléans.
[27]
C'est à Châteauneuf qu'avait été arrêté le contrat de mariage de Jeanne de
France.
[28]
Promenade à Châteauneuf-sur-Loire, Orléans, imp. Chenu, 1859.
[29]
Ces jardins, au XVe siècle, étaient soustenus en bon état et le
jardinier en chef s'appelait Simon Belon (V. ma Condition forestière de
l'Orléanais au moyen âge, p. 497).
[30]
La chasse tenait une très grande place dans la vie de Châteauneuf. Les
habitants de tous les villages environnants étaient tenus, en échange de leurs
droits d'usage, d'aller à la chasse quand ils en seraient requis par le
seigneur de Châteauneuf. (Condition forestière..., p. 464.)
[31]
Voir ma Condition forestière de l'Orléanais au moyen âge, p. 81.
[32]
Condition forestière de l'Orléanais au moyen âge, p. 406, visite de
1543.
[33]
Un arrêt du Parlement, en 1259, parle déjà d'un arbre célèbre qu'on appelait le
Chêne-aux-Cent-Branches (Condition forestière..., p. 442). Un auteur
cite le plus gros et le plus ancien chêne de l'Orléanais comme situé près de
Châteauneuf : la moderne des Brières, âgée de 800 ans. (Promenade etc.,
1859, p. 23.)
[34]
Notamment en 1456. Condition forestière..., p. 511, 493, 507, 510, etc.
Marie de Clèves aimait à chasser dans la garenne, car en 1483 et 1485 nous
voyons que la garenne « n'a point esté baillée afferme, et est retenue en la
main de Monseigneur le duc pour le desduit de Monseigneur le duc et de Madame
la duchesse. » (Ibid., p. 496.)
[35]
Condition forestière..., p. 430-431.
[36]
La mairie actuelle occupe une partie de l'ancien monastère, rue des Dames. —
L'abbé Bardin, Châteauneuf, son origine, ses développements,
Châteauneuf, 1864, p. 56.
[37]
Arch. du Cher. Liasse des imprimés divers. Inventaire sommaire des titres
concernant la bienheureuse Jeanne de France, duchesse de Berry (papier, 2
ff., s. l. n. d. sans signature ; paraît du XVIIIe siècle).
[38]
Bibl. nat. mss. Doat 228, f° 42.
[39]
Arch. nat. P. 13801, n° 43.
[40]
Bibl. nat. mss. Colbert 82, p. 138.
[41]
Arch. nat, P. 13801, coté 3189. — Bibl. Nat., mss. Doat 228, f° 163. — V.
Anselme, III, 431.
[42]
Le cardinal mourut en 1519 (Gallia purpurata).
[43]
Acte mentionné dans l'Amateur d'autographes, par M. Et. Charavay,
janvier 1873, p. 8, n° 4, et dans le Catalogue de la vente du vicomte de Fer...,
1866, où il n'est pas exactement analysé. — Anne de Bourbon rendit hommage
séparément pour chacune de ces terres. — Arch. nat. P. 1373', coté 2148 et 2148
bis (Sablé), 688 (Mayenne-la-Juhel), 679 (Châtellerault), 3190 (Martigues).
[44]
Arch. nat. P. 13591, coté 687. — Suivi de l'exécutoire des gens des Comptes. —
Collation faite sur l'orig. le 31 janv. 1504 à la Chambre des Comptes.
[45]
Inventaire des titres de la maison ducale de Bourbon, par Lecoy de la
Marche, n° 7648. Cette pièce y est portée en déficit. Elle a figuré dans la
vente du vicomte de F. (L'Amateur d'autographes, janv. 1873, p. 8, n°
2). Mais la date du 13 décembre indiquée parait devoir être lue 15 décembre,
selon le P. Anselme (t. IV, p. 874).
[46]
Chaumeau, Hist. du Berry, p. 154. — Le P. Anselme, t. IV. p. 874. — Jean
d'Aumont devint ensuite maréchal de France. Il est surtout connu par un
scandaleux et violent procès avec son beau-frère, Hardouin de Maillé.
[47]
Arch. nat. P. 1359¹, coté 612.
[48]
Acte de 1505, Arch. nat. P. 1357, coté 665.
[49]
A son dernier voyage à Bourges, en 1498, Charles VIII était descendu chez
Guillaume Chambellan (Raynal, III, 172).
[50]
Chaumeau.
[51]
Acte du 9 mars 1503-1504. Arch. nat., P.1359', cote 609, et Arch. du Cher.
[52]
Arch. nat. P. 1359, coté 665. Le trésorier de la Sainte-Chapelle était une
sorte d'évêque indépendant, ne relevant que du roi et du pape, et qui disposait
d'un grand nombre de bénéfices (Catherinot, Les Églises de Bourges).
[53]
Louis d'Amboise recevait aussi du roi une pension de 4.000 liv. tournois (Rôle
des gages, du 7 juin 1505. Arch. net. K. 78, n° 2). Il devint cardinal en 1506
(Gallia Christiana, t. I, p. 34.)
[54]
V. Legendre, Vie du cardinal d'Amboise.
[55]
Son portrait, au Louvre, par Léonard de Vinci, a été plusieurs fois gravé (V. Magasin
pittoresque, 1847, t. XV, p. 313). Leroux de Lincy, Vie d'Anne de
Bretagne, t. II, p. 123.
[56]
Raynal, t. III, p. 273.
[57]
Templa serena de Lucrèce.
[58]
Le pape la remercie dans le bref suivant : Charme in Christo filie nostre Anne, Francorum
Regine chrme et Britanie ducisse. —
Alexander papa VI. (Orig. parch. aux Arch. de la Loire-Inférieure, E. 45).
[59]
Catalogue de Joursanvault, n° 206.
[60]
Raynal, XIII, p. 226-227.
[61]
H. de la Ceste.
[62]
César Borgia périt misérablement en Espagne, et les comtés de Diois et de
Valentinois furent réunis au domaine royal par lettres patentes du 18 février
1506 (Bibl. nat., mss. Doat 228, f° 242).
[63]
Pierquin de Gembloux, p. 321-322.
[64]
Raynal, t. III, p. 237.
[65]
Galeas Sforza avait épousé Bonne de Savoie, sœur de la mère de Jeanne.
[66]
Mandement de Lyon, 11 juillet. Ach. de la mairie de Bourges, F. 4. (Communiqué
par M. de la Guère.)
[67]
Biographes de Jeanne.
[68]
Raynal, t. III, p. 242.