HISTOIRE GRECQUE

TOME QUATRIÈME

LIVRE CINQUIÈME. — LA DOMINATION DE SPARTE EN GRÈCE (DE 404 A 379 AV. J.-C.).

CHAPITRE QUATRIÈME. — LA GUERRE DE CORINTHE.

 

 

§ II. — AVANT ET APRÈS LA PAIX D'ANTALCIDAS.

Cet acte était un chef-d'œuvre de l'art diplomatique Clair et simple en apparence, il avait une portée que les plus perspicaces seuls pouvaient apprécier. Il était rédigé de manière à satisfaire tout d'abord pleinement le Grand-Roi. C'est lui qui, en qualité de vainqueur de Cnide, se voyait adjuger le principal profit, par la reconnaissance de sa domination absolue en Asie-Mineure et à Cypre ; puis, à ne considérer que la lettre du traité, on tenait compte des intérêts des États ligués contre Sparte ; car le but qu'ils avaient poursuivi dans leur lutte était de briser le despotisme de Sparte en Grèce, et ce despotisme était supprimé par la clause qui assurait à tous les États grecs leur complète autonomie. Mais le sens qu'il fallait attacher à cette disposition ne fit à Sardes l'objet d'aucune discussion. Tiribaze se contenta de soumettre aux ambassadeurs réunis le message royal, comme la base immuable de la paix ; l'exécution en fut laissée aux États helléniques, et dans ce but, on convoqua à Sparte une deuxième conférence, qui se tint probablement encore dans l'été 387.

Les séances y furent plus animées que dans le château du satrape : on y traita de la véritable signification du deuxième article de la paix[1].

Sparte se posa comme l'État chargé par la Perse de l'exécution du traité[2] ; car, si par une adroite précaution l'on avait évité de lui déférer formellement cette mission, on avait admis par une convention tacite que l'État le plus directement associé à la confection du traité de paix et jouissant de la pleine confiance de la cour de Perse aurait à surveiller l'exécution du pacte, et les termes mêmes de la dernière phrase signifiaient assez nettement que, contre toute résistance, il pouvait compter sur l'énergique assistance des armes et des trésors de la Perse. On traduisit alors le message royal en dialecte lacédémonien : il portait en substance que tout assujettissement récemment tenté d'un État par l'autre était en contradiction avec l'autonomie des républiques grecques garantie par la paix et tenu pour non avenu ; par conséquent, Argos devait renoncer à Corinthe, et Thèbes, à la souveraineté sur les villes de Béotie. On en vint aux scènes les plus vives. Les Thébains prétendaient représenter toute leur région, comme ils l'avaient toujours fait dans les conventions conclues lors de la guerre de Corinthe, et leurs députés reçurent pour instructions de ne signer qu'en qualité de Béotiens. Mais les Spartiates ayant immédiatement pris les armes, ils furent contraints de céder[3]. Orchomène fut reconnue comme État indépendant, et l'on envoya des ordres pour relever aussi Platée[4].

Argos eut le même sort. Les Argiens pouvaient se prévaloir de ce que Corinthe s'était librement attachée à eux, et l'on ne voyait guère pourquoi un État n'aurait pas le droit, en vertu même de son autonomie, de se réunir à un État voisin. Mais les Spartiates ne voulaient voir dans cette union détestée qu'une oppression injuste, qu'un parti seulement avait facilitée à Corinthe. Sparte leva sur le champ une armée pour marcher sur Argos : les Argiens, pris au dépourvu, durent céder et retirer leur garnison de Corinthe. Les bannis y rentrèrent du même coup, ces bannis qui pendant six ans avaient poursuivi leur but avec une merveilleuse énergie et qui voyaient maintenant leurs intrigues aboutir au plus heureux dénouement. Ils furent, comme on le dit à Sparte, accueillis à bras ouverts par leurs compatriotes, c'est-à-dire que l'on considéra leur retour comme mettant un terme au terrorisme d'une petite faction et rétablissant enfin l'ordre légal[5]. Le parti adverse dut quitter la place : la petite république fut relevée avec ses anciennes frontières, et Corinthe, liée aux Lacédémoniens plus solidement que jamais, leur servit comme par le passé de gardienne des portes de la Péninsule.

On voit comment, derrière ces articles de paix d'apparence si bénigne et inoffensive, se cachait une ardeur belliqueuse armée de pied en cap. Agésilas se plaisait plus que personne à la manifester. Il s'était réconcilié avec le parti d'Antalcidas, puisque la paix de ce dernier n'était pas un bouclier derrière lequel on voulait se blottir, mais une épée aiguisée contre les ennemis de Sparte. Un rude coup venait de frapper les plus fiers d'entre eux, et il y avait une amère vérité dans ce mot avec lequel Agésilas excusait les Spartiates à propos de leurs relations avec le Grand-Roi : on ne pouvait pas dire que Sparte médisait ; au contraire, les choses en étaient au point que le roi des Mèdes laconisait[6], tant le Grand-Roi, sans le vouloir, avait pourvu aux intérêts de Sparte, de même que dans son précédent traité avec Conon il avait travaillé pour Athènes tout en voulant ne travailler que pour lui-même.

Pourtant, il y avait entre ces deux actes une grande différence. Conon était entré comme simple particulier au service de la Perse et avait usé de son influence dans un but patriotique ; aujourd'hui, à l'instigation de Sparte, on reconnaissait dans toutes les formes la Perse comme la puissance à qui il appartenait de décider des affaires grecques. On avait fondé un droit international tout nouveau, un nouveau groupement d'États ayant son centre de gravité à Suse. La Perse était la véritable grande puissance, et les grands États de la Grèce étaient retombés au rang d'États secondaires, de clients de la Perse, sur la volonté de laquelle ils étaient obligés de se régler, contre la volonté de laquelle il leur était interdit de rien changer à leurs rapports respectifs. Le Grand-Roi était le suzerain de la Grèce. Il convoquait des congrès d'États grecs, et les députés de ceux-ci recevaient humblement ses commandements ; il pouvait, dans tous les débats intérieurs qui lui paraissaient assez importants pour qu'il s'en occupât, intervenir en paroles et en actes et prononcer en dernier ressort ; toute violation de la paix équivalait à une rébellion contre le maître reconnu.

Cette situation était le résultat nécessaire de la politique grecque : Sparte avait, dès le début de la guerre du Péloponnèse, fait la cour aux Perses, et Athènes avait imité cet exemple. On s'était des deux parts habitué chaque jour davantage à faire dépendre ses propres succès de l'attitude du Grand-Roi, et c'est ainsi que cet empire en décomposition, que cette Perse vaincue dans toutes les batailles, refoulée de toutes les côtes, avait été mise à même par ses vainqueurs de prendre le rôle d'arbitre suprême dans la lutte engagée entre les États grecs. La défaite d'Athènes était l'œuvre de la Perse, comme aussi le rétablissement de son indépendance. Le Roi tient en sa main le sort des Hellènes, disait un proverbe déjà répandu alors en Grèce[7]. La situation que traduit ce dicton, quoique réalisée depuis longtemps, fut reconnue et libellée dans le traité d'Antalcidas. Par là, l'ère glorieuse des guerres de l'Indépendance était pour ainsi dire annihilée, et l'on inaugurait un régime tout opposé à celui pour lequel on avait lutté à Salamine, à Platée, à Mycale ; les Perses avaient fini par atteindre le but en vue duquel ils avaient jadis expédié leurs armées en Grèce. Mardonius n'avait jamais réclamé que la reconnaissance d'un protectorat perse en Grèce, et aujourd'hui la Grèce d'Europe vivait sous la dépendance avouée de la Perse. En ce qui concerne la Grèce d'Asie, le principe dont la Perse ne s'était jamais départie, à savoir, que toute la côte d'Asie-Mineure lui appartenait, était solennellement reconnu par tous les Grecs. L'Hellade d'au delà de la mer était de nouveau séparée de celle d'en deçà, et, pour la première fois depuis la bataille de Mycale, le Grand-Roi se trouvait maître absolu de l'Asie-Mineure ; il commandait à tous les ports et disposait pour ses fins des milices, des navires, des ressources pécuniaires des villes, dont il avait besoin plus que jamais pour rétablir sa puissance à Cypre et en Égypte. Les malheureuses villes, si souvent délivrées sans jamais devenir libres, parce qu'elles avaient toujours dû servir tour à tour aux desseins des divers États maîtres de la mer, tombèrent sous une domination qui contrastait avec le traitement plein de douceur et de gâterie qu'elles avaient antérieurement éprouvé de la part de Mardonius et de Cyrus. On leur fit d'autant plus lourdement sentir le joug nouvellement imposé, qu'elles s'y étaient plus longtemps soustraites. On bâtit des citadelles dans les villes et on y mit garnison ; on détruisit les places qui firent des tentatives d'insurrection, et on leva le plus d'impôts possible[8] La flotte perse dominait la mer d'Ionie et de Carie, et, bien que les possessions persiques eussent été très précisément limitées au continent, — en sorte que même la ville de Clazomène, séparée de la terre ferme par un étroit chenal, leur avait été adjugée par clause expresse, — une pareille ligne de démarcation n'a été en aucun temps ni valable ni observée, et chacun était amené à se dire que l'État qui occupait tous les ports et places d'armes de la côte annexerait à son empire, à la première occasion, les îles adjacentes de Chios, Samos, etc. Elles étaient sans défense par elles-mêmes, et la paix qui empêchait toute formation d'une puissance capable de pourvoir à leur protection livrait par conséquent les îles et tout l'Archipel aux Perses. Ce qu'il y avait de plus déplorable dans cet état de choses, c'est que les ressources de l'Asie-Mineure, une fois abandonnées par les Hellènes, allaient servir aussitôt à rendre possible au Grand-Roi la soumission d'autres Hellènes, et notamment la répression du soulèvement le plus fécond en espérances que jamais population grecque eût tenté contre la Perse, autrement dit, la défaite d'Évagoras.

Évagoras avait dû reconnaître dès le début que l'alliance avec Artaxerxès ne pouvait être durable. Pendant quelque temps, l'un se mit au service des intérêts de l'autre ; les vaisseaux d'Évagoras formaient, en effet, la majeure partie de la flotte qui rendit aux Perses la domination de leurs côtes et de l'Archipel, et cette suprématie des Perses eut à son tour pour résultat que les murs d'Athènes furent relevés et que cette ville fut mise en état de devenir pour Évagoras une alliée indépendante. Cependant, la défiance du Grand-Roi envers Évagoras ne s'était pas éteinte, et, immédiatement après la victoire de Cnide, la tension des rapports dégénéra en hostilité.

Ne fût-ce qu'en considération de sa propre sûreté, Évagoras devait se préoccuper d'étendre sa puissance de Salamine, la ville de la côte orientale, sur les autres villes de l'île ; or, il subsistait à Cypre neuf ou dix petits royaumes que gouvernaient des familles helléniques ou phéniciennes sous la suzeraineté perse[9]. Ce morcellement assurait l'autorité du Grand-Roi. Celui-ci ne pouvait donc assister paisiblement à l'agrandissement d'Évagoras ; il ne pouvait pas fermer l'oreille aux sollicitations de ses vassaux assaillis dans Amathonte, Cition et autres villes. Une île de cette dimension — sa longueur n'est pas moindre que la distance entre le promontoire le plus méridional et le plus septentrional du Péloponnèse —, offrant de telles ressources en métaux, bois, grains, etc., et une situation qui en faisait l'annexe indispensable de tout État ambitieux de dominer la mer entre l'Asie-Mineure, la Phénicie et l'Égypte, une pareille île ne devait pas tomber aux mains d'un seul, à plus forte raison aux mains d'un personnage audacieux qui donnait la prépondérance aux éléments nationaux les plus dangereux pour la Perse, qui ne se restreignait pas à l'île, mais nouait des relations avec Athènes, avec Syracuse, avec l'Égypte, sans doute aussi avec les villes maritimes grecques de la côte méridionale d'Asie-Mineure. Telles étaient les circonstances qui firent naître la guerre de Cypre, guerre de dix ans[10] sur terre et sur mer, qui commença par une lutte entre Salamine et les petites cités, devint ensuite, en s'étendant, une guerre offensive contre la Perse, et se termina enfin par le siège de Salamine.

La première guerre eut lieu dans l'île. Les troupes de l'empire perse y prirent part, sous la direction du dynaste carien Hécatomnos et d'Autophradate, satrape de Lydie ; mais cette immixtion resta sans effet et n'empêcha pas Évagoras d'affermir et d'étendre sa puissance. Il fit de Salamine la capitale d'un empire insulaire indépendant, qu'il organisa tout à fait sur le modèle hellénique[11]. Il introduisit le système monétaire rhodien et frappa des pièces d'or comme le Grand-Roi[12]. Acoris, qui gouvernait l'Égypte séparée de la Perse depuis 411 (Ol. XCII, 2)[13], était un allié actif, parce qu'il était de son intérêt de ne pas laisser retomber aux mains des Perses Cypre, le poste avancé du bassin du Nil, et de n'y pas laisser reconstituer une place d'armes perse contre l'Égypte. Les Athéniens aussi restèrent fidèles à Évagoras et lui prêtèrent une assistance efficace : Chabrias réussit notamment en 388 (Ol. XCVIII, 1) à remporter à Cypre de brillantes victoires[14]. L'île presque entière fut soumise, de sorte qu'Évagoras put passer alors à des entreprises au dehors. Il se tourne contre les villes de Phénicie, qui avaient si longtemps tenu l'île sous une dépendance oppressive ; il emporte Tyr d'assaut ; il entraîne la défection de la Cilicie[15] : la flotte que Conon avait commandée devait être la dernière que le Grand-Roi aurait recrutée pour son service dans les pays côtiers du Taurus et du Liban. Tous les vassaux mécontents s'unirent dans une grande coalition ; les provinces les plus considérables étaient en révolte : l'empire des Achéménides était mis en question.

On comprend maintenant la politique pacifique d'Artaxerxès à l'égard des Hellènes. Il lui fallait sa liberté d'action, la libre disposition de ses armées et de ses trésors. Il avait encore une autre raison de souhaiter la pacification de la Grèce, c'est qu'il voulait pouvoir tirer des mercenaires de tous les pays grecs. Aussi Tiribaze pressa de toutes manières la conclusion des négociations avec Antalcidas, et à peine étaient-elles terminées, que l'on commença sur terre et sur mer des préparatifs tels qu'on n'en avait point vu de pareils depuis les jours de Xerxès. Une flotte de 300 voiles fut tirée des villes d'Ionie ; Tiribaze la conduisit à Cypre et commença l'attaque qui inaugura la dernière phase de cette guerre[16].

Évagoras ne perdit point courage. Avec les croiseurs qu'il avait dans le canal de Cilicie, il parvint à couper les vivres à l'armée de débarquement ; il livra avec ses 200 trirèmes un grand combat naval à l'ennemi, fut heureux au début, puis battu et enfermé dans Salamine[17]. Abandonné d'Athènes, insuffisamment appuyé par l'Égypte, il se vit réduit enfin à entamer des négociations, et, après la disparition de son adversaire le plus acharné, Tiribaze[18], il eut l'habileté d'obtenir au moins la possession, à titre de vassal du Grand-Roi, de sa principauté héréditaire de Salamine (385 : Ol. XCVIII, 4)[19].

Ainsi finit l'insurrection hellénique à Cypre, ce soulèvement qui était, à un siècle d'intervalle, la continuation des combats livrés pour l'indépendance en Ionie et dans l'Hellade. Évagoras fut abandonné par les Athéniens, bien qu'il eût repris l'œuvre de Cimon et vengé le sang des guerriers athéniens qui avait coulé inutilement dans la glorieuse bataille engagée sur terre et sur mer autour de Salamine. Les États grecs étaient si remplis de leur jalousie mutuelle et de leurs intérêts égoïstes, que la seule lutte nationale qui ait été soutenue en ce temps et le héros qui avait conquis par la Grèce l'île la plus riche de la Méditerranée n'éveillèrent chez eux aucune émotion. Ils laissèrent Cypre s'affaisser de nouveau sous le joug du roi barbare, et ce furent les Grecs d'Ionie qui durent aider leur maître à l'asservir.

Tel fut le principal profit que les Perses tirèrent de la paix d'Antalcidas ; aussi cette paix fut-elle, dans toute la force du terme, une victoire pour la Perse et une défaite pour les Hellènes, qui reniaient la plus belle époque de leur histoire nationale et déshonoraient la mémoire de leurs plus grands héros. Mais l'humiliation fut d'autant plus ignominieuse pour les Grecs qu'ils n'avaient pas succombé dans la lutte sous une force supérieure, mais qu'ils se ravalaient eux-mêmes devant un ennemi qui, sur terre et sur mer, avait toujours eu le dessous contre eux et dont la faiblesse à l'intérieur était plus grande et plus manifeste que jamais. Pour se perdre mutuellement, ils s'étaient imposé, d'abord isolément puis en commun, l'opprobre du joug étranger, et, si les coquetteries à la cour de Perse étaient chez eux un vieux péché, l'aveu public et général d'un si honteux asservissement et de la renonciation accomplie dans toutes les formes à la situation que les Grecs avaient tenue dans la mer Égée depuis la bataille de Mycale, cet aveu constituait un acte qui fatalement allait émousser le sentiment de l'honneur dans les États, et anéantir ce qui restait encore de dignité nationale.

Pourtant, quelque grave que fût la défaite morale des Grecs, les conséquences matérielles en furent moindres qu'on ne l'aurait pu croire d'après le langage hautain du traité de paix. Le nouveau suzerain de la Grèce était en effet hors d'état d'exercer une suzeraineté réelle. Les affaires intérieures de la Grèce restaient donc abandonnées comme auparavant aux États grecs, et surtout aux deux États qui, dans le dernier traité encore, avaient été reconnus comme les deux puissances prépondérantes de la Grèce. Aussi l'intelligence des événements ultérieurs demande-t-elle un coup d'œil rétrospectif sur la situation d'Athènes et de Sparte avant et immédiatement après la paix d'Antalcidas.

Athènes avait, au temps où Sparte guerroyait en Élide et en Asie-Mineure, goûté une série d'années tranquilles, et il semble que sa prospérité se soit alors peu à peu relevée. Nous apercevons dans l'ordre financier les traces de bien des changements qui témoignent d'un certain sens économique et d'un contrôle plus sévère des travaux commandés par l'État. Ainsi, par exemple, on spécifiait maintenant dans les plébiscites les sommes affectées à la gravure de l'exemplaire officiel sur le marbre, au lieu qu'auparavant on se contentait de désigner les fonctionnaires chargés de solder la dépense[20]. Une autre innovation fut la réunion du trésor d'Athéna à celui des autres divinités dans l'acropole, et l'institution d'une trésorerie commune[21]. Ces innovations et d'autres encore ne permettent pas de démêler le lien qui les rattache à l'archontat d'Euclide[22]. En somme, on n'y peut méconnaître une louable tendance à l'épargne et à l'ordre, comme à la simplification des services publics.

On ne persista malheureusement point dans cette voie, et on ne laissa pas la ville appauvrie reprendre des forces. Dès que, grâce à une sage économie, on eut de nouveau amassé quelques ressources, les anciens errements financiers recommencèrent. Sous l'archontat de Diophantos (395/4 : Ol. XCVI, 2), on distribua des gratifications au peuple, à raison d'une drachme par homme[23], et à la même époque on ressuscita l'ancien système des indemnités[24] Le principal promoteur de cette mesure fut le démagogue Agyrrhios, qui dans les affaires intérieures avait supplanté les précédents chefs de la cité, Thrasybule et Archinos, et avec eux tout le parti des démocrates modérés ; il flattait impudemment les convoitises des basses classes, et il introduisit de nouveau en leur faveur l'indemnité pour l'assemblée du peuple, ou bien il l'éleva à une demi-drachme[25].

La situation financière ne pouvait manquer de retomber à bref délai dans le désarroi le plus complet, et la pénurie du Trésor eut pour effet à son tour que l'on eut recours à tous les expédients imaginables pour faire arriver l'argent aux caisses publiques. Le plus funeste de ces expédients fut aussi par malheur le plus employé, c'est-à-dire une justice partiale. On a une triste opinion du sens moral qui dirigeait la majorité des citoyens en ces temps où l'on trouvait tout naturel que le Conseil, dès qu'il ne pouvait plus couvrir les dépenses courantes, accueillît des accusations de haute trahison pour obtenir de l'argent par confiscation[26], où les accusateurs osaient dire aux juges que les fonds manqueraient s'ils ne prononçaient pas la condamnation demandée, où Lysias, défenseur des malheureux enfants d'Aristophane, déclarait ouvertement que sa tâche lui serait rendue plus pénible par cette circonstance que, d'une part, la fortune en question passait pour très considérable et que, de l'autre, le Trésor public avait le plus grand besoin d'être alimenté[27]. Lysias ne se hasarde même pas à en appeler à l'équité des citoyens contre de pareilles pratiques ; il n'y oppose qu'une autre considération politique, en cherchant à leur faire comprendre que le profit éphémère de confiscations illégales est dépassé par le préjudice plus sensible qu'entraînent nécessairement pour les citoyens les inimitiés qu'elles ont excitées[28]. Il est vrai que l'on chercha aussi d'autres remèdes. Euripide, peut-être le deuxième poète tragique du nom, proposa une loi par laquelle on prélèverait 2 ½ % du capital imposable, pour réunir de cette façon une somme de 500 talents[29]. Il a donc dû évaluer le total du capital imposable à 20.000 talents (près de 118.000.000 de francs[30]). Cette loi de finance fut naturellement fort bien accueillie de la masse indigente ; mais le but désiré et promis ne fut pas atteint, et l'orateur si vanté tomba promptement dans une complète disgrâce auprès de ses concitoyens. Cela se passait au moment où Agyrrhios arrivait à l'apogée de son crédit, et où le poète Aristophane, dans son Assemblée des femmes (393 : Ol. XCVI, 4), gémissait sur le pitoyable état de la ville et les meneurs incapables qui dirigeaient le peuple. Les orateurs ne parlaient plus du tout de ce qui pouvait contribuer à l'intérêt général, mais des avantages momentanés que la masse avait à gagner. Exploiter les fonctions publiques à son profit personnel, et faire fortune comme ambassadeur avec les présents de la Perse, était chose qu'on ne regardait plus comme déshonorante ; et même des citoyens émérites, des hommes qui avaient pris part à la délivrance de la ville et s'étaient montrés de véritables bienfaiteurs du peuple, succombèrent à la tentation dans cette époque malheureuse et démoralisante. Tel fut, par exemple, Épicrate, qui, sans avoir peut-être reçu d'argent de Timocrate, fut condamné pour corruption[31].

Tel était l'état d'Athènes quand commença la guerre courte Sparte. Assurément, la république était plus incapable que jamais de mener à bout avec ses propres forces une entreprise glorieuse. Alors parut Conon, et son arrivée fut pour Athènes un jour de fête comme elle n'en avait pas vu depuis la rentrée d'Alcibiade. Et combien la joie était plus pure et plus complète aujourd'hui ! C'était le patriote le plus fidèle qui revenait ; il arrivait les mains pleines ; il apportait un bonheur inespéré, sans bornes. Une vie nouvelle s'éveilla dans Athènes, un joyeux sentiment de gratitude releva les citoyens, refoula l'égoïsme et ranima le patriotisme. On offrit de riches hécatombes aux dieux sauveurs ; Conon consacra de magnifiques offrandes sur l'acropole et à Delphes[32]. Dans le Pirée, de nouveau relié à Athènes, il bâtit un sanctuaire d'Aphrodite, telle qu'on l'adorait à Cnide, en souvenir de la victoire navale de Cnide[33] ; en même temps sans doute on reconstruisit les chantiers et arsenaux que les Trente avaient détruits. Athènes, la veille une pauvre et faible ville de province, s'était, comme par un coup de baguette magique, transformée en une cité riche et puissante, alliée du Grand-Roi comme de l'opulent et triomphant roi de Cypre. Dans l'ivresse de cette prospérité, on célébra Conon comme un demi-dieu et on lui dressa une statue d'airain sur la terrasse qui domine l'agora, à côté de Harmodios et d'Aristogiton[34], honneur qui n'avait encore été conféré à aucun citoyen.

A ce moment, l'Athènes d'autrefois parut se relever tout d'un coup. La mer était purgée de tous les bâtiments ennemis ; à Cythère, un Athénien était installé comme gouverneur[35], et toutes les îles et les villes côtières qui par suite de la victoire avaient fait défection à Sparte, Cos, Téos, Éphèse, Samos, Chios et les Cyclades, semblaient déjà autant de possessions nouvelles assurées aux Athéniens[36]. En outre, l'Eubée et les Chalcidiens de Thrace avaient accédé à la ligue séparatiste, qui d'ailleurs n'aurait pas abouti sans Conon. Les plans de Conon allaient plus loin encore. Sur son avis, Eunomos et Aristophane, qui avec son père Nicophémos comptait parmi les plus fidèles partisans de Conon, se rendirent à Syracuse pour engager Denys à contracter une alliance de famille avec Évagoras et à entrer dans la ligue contre Sparte, ambassade qui obtint au moins pour résultat de faire contremander le départ des navires syracusains destinés à secourir Sparte[37].

En même temps, on reconnaissait dans Iphicrate l'homme éminemment propre à ravir aussi dans la guerre continentale leur gloire aux Spartiates. Les Athéniens déployèrent sur les champs de bataille leur ancienne bravoure. Un tombeau dans le Céramique honora les guerriers tombés à Corinthe, et, au seuil du Dipylon on ensevelit Dexiléos, qui sous l'archontat d'Eubulide (394/3 : Ol. XCVI, 3) avait péri à l'âge de vingt ans, en combattant parmi les cinq chevaliers, et dont la statue de marbre a été retrouvée en bon état de conservation[38]. Ces Cinq, selon toute apparence, ont dû se signaler avant la bataille de Léchæon par quelque fait d'armes exceptionnel, et il est probable que les chevaliers, mal vus du peuple à cette époque, cherchaient l'occasion de relever leur honneur.

Mantithéos, qui sous les Trente avait appartenu au corps des chevaliers, raconte lui-même, dans le discours que Lysias a composé pour lui, comment il se comporta au début de la guerre. Lorsque, dit-il, vous Athéniens, vous conclûtes l'alliance avec les Béotiens, et qu'il vous fallut marcher au secours d'Haliarte, Orthoboulos m'enrôla dans la cavalerie. Mais, comme je voyais l'opinion répandue que la cavalerie ne jouerait dans la lutte imminente qu'un rôle secondaire, j'allai trouver Orthoboulos, pendant que d'autres passaient indûment dans la cavalerie, et me fis rayer de la liste des cavaliers, car je tenais pour honteux de prendre part à cette campagne en toute sécurité personnelle, tandis que la majorité de mes concitoyens aurait à courir des dangers. Lors donc que les jeunes gens de mon dème se furent rassemblés avant le départ, et que je vis parmi eux quelques hommes braves et courageux, mais qui manquaient des ressources nécessaires pour s'équiper, j'émis la proposition que les plus fortunés devaient assister les indigents, et je fis moi-même cadeau à deux hommes de trente drachmes chacun. Quand plus tard on entreprit l'expédition de Corinthe et qu'un grand nombre demeurèrent en arrière, parce qu'il était évident qu'il y aurait de grands risques à courir, je réussis à combattre au premier rang, et, bien que notre tribu eût souffert plus que toutes les autres et perdu la plupart des siens, je reculai pourtant plus tard que le digne Thrasybule, qui aime à adresser à tout le monde le reproche de lâcheté[39].

Cette peinture nous donne une idée exacte de ce qui se passait au début d'une guerre, lors d'une levée en Attique : on v voit que tantôt l'argent et les objets d'équipement, tantôt le courage faisait défaut. De l'argent, Conon en apporta, et, pour suppléer à l'absence de courage chez les citoyens, on eut des mercenaires ; on ne manqua même pas d'habiles capitaines. Mais ce qui manqua dans toute la guerre, du commencement à la fin, ce fut un but déterminé et un véritable homme de confiance, capable de diriger et de soutenir la république. Le parti de la paix, appuyé par tous ceux qui aimaient leurs aises, le parti d'Andocide, paralysait les efforts. Enfin, même les patriotes, ceux qui voulaient la guerre, n'étaient pas d'accord entre eux. Thrasybule de Stiria fut appelé à les diriger, mais ce n'était rien moins qu'un personnage populaire, comme le prouve la raillerie de Mantithéos. Il commit la faute, comme jadis Thémistocle, de se targuer de ses services trop haut et trop fréquemment ; il se croyait, à titre de libérateur d'Athènes, des droits supérieurs à ceux des autres. Aussi entra-t-il en conflit même avec son vieux compagnon Archinos, et fut condamné sur la plainte de ce dernier pour une proposition illégale[40]. Ses airs d'importance déplurent au public, et l'on comprend que l'on se soit senti plus à l'aise sous la direction d'un Agyrrhios[41].

L'apparition de Conon améliora soudain la situation. On se retrouva en face d'abondantes ressources et de fermes desseins. Tout se rassembla de nouveau autour d'un seul homme Mais l'influence de Conon fut de courte durée. Agent de la Perse et patriote athénien, son double rôle était intenable. Sa mission ne pouvait consister qu'à délivrer Athènes de l'interdit qui pesait sur elle, qu'à lui rendre la liberté de ses mouvements, à lui procurer des alliés, et à ouvrir pour ainsi dire la porte à une nouvelle histoire. Le reste dépendait de l'attitude des Athéniens ; il ne s'agissait pour eux que de reprendre courage, l'âme prête à tous les sacrifices, et de continuer à bâtir par eux-mêmes sur la base récemment posée. Cet essor ne se produisit pas. Les citoyens avaient été gâtés par Conon. Au lieu de profiter avec reconnaissance des bienfaits reçus, ils prirent de l'humeur quand l'argent devint plus rare et que la flotte des Perses cessa de tenir la mer libre de navires ennemis. Aussi le crédit de Conon baissa à mesure qu'Andocide gagnait en influence ; puis l'explosion de la guerre de Cypre vint contribuer à anéantir son prestige. Les Athéniens se virent réduits, par le fait d'Évagoras, au même état que les Lacédémoniens par le fait de Cyrus. Ils avaient été l'un et l'autre les instigateurs de l'alliance avec la Perse, puis les causes de la brouille. Conon disparut de la scène obscurément et mourut à Cypre vers 389[42]. Les fruits de ses victoires furent perdus avant qu'on eût pu en profiter, et l'alliance avec Évagoras, cette alliance si périlleuse maintenant, qu'on répugnait à rompre mais qu'on n'osait pas davantage utiliser énergiquement, fut tout ce qui resta de la politique de Conon.

Après l'éloignement de Conon, Thrasybule reparut au premier plan. Mais nous avons vu combien sa situation était fausse et ses ressources insuffisantes. En outre, on éprouvait de la méfiance contre les généraux envoyés au dehors, de qui on attendait l'exécution ponctuelle de leurs instructions tout en leur prescrivant d'entretenir eux-mêmes leur armée. La méfiance contre Thrasybule grandit au point que lui, le libérateur d'Athènes, on le crut en voie d'aspirer à la tyrannie. Après sa mort, les choses allèrent plus mal encore quand Agyrrhios prit le commandement des vaisseaux sans pouvoir rien faire. Il se livra des combats par-ci par-là, sans unité, sans objectif : on n'avait aucune prise sur Sparte ; il fallait se borner à veiller à ce qu'elle ne conclût pas avec la Perse des conventions isolées. On sentait universellement le lamentable état de la patrie ; tout le monde en désirait le changement et aspirait au repos. Mais personne ne saisit le moment avec plus de noblesse et d'élévation que Lysias, qui, lors des Jeux olympiques (juillet 388), tenta de profiter des sentiments que la fête inspirait aux assistants pour rappeler à leur mémoire leur devoir national, et pour tâcher, autant qu'il était en lui, de hâter la fin de cette malheureuse guerre, en cours depuis tantôt huit ans. La fête, dit-il, a été fondée pour maintenir la concorde parmi les Hellènes. C'est la discorde qui nous a jetés dans l'opprobre où nous nous trouvons maintenant. D'un côté, c'est le roi de Perse, de l'autre, le tyran de Sicile qui menace la liberté des côtes helléniques. Il est de notre devoir d'apaiser nos querelles intestines pour tourner nos forces réunies contre l'ennemi commun[43]. L'orateur rappelle aux Spartiates leur devoir ; chefs nés des Hellènes, ils ne pouvaient pas permettre que la Grèce s'abîmât ainsi. C'était une politique vraiment nationale, digne des plus beaux temps de la Grèce. Ces sentiments généreux étaient encore vivants à Athènes.

C'est là par conséquent que la politique d'Antalcidas devait soulever la plus vive opposition. Les Athéniens en effet pouvaient moins que personne s'y prêter sans encourir la plus profonde humiliation, s'il leur fallait abandonner les villes dont ils avaient revendiqué la protection comme un droit de la métropole, et de plus abandonner leur plus grand bienfaiteur, le noble Évagoras, auquel ils venaient de dresser une statue sur l'agora. C'est en faveur d'Évagoras que le parti de Conon fit ses derniers efforts. Surtout Aristophane, fils de Nicophémos, avait travaillé à appuyer les sollicitations du roi, qui demandait du secours. Il avait même engagé dans cette affaire la plus grande partie de sa fortune et amené ses amis, par ses prières et ses cautions, à faire des avances au Trésor public[44]. Le désastre qui frappa les navires en route pour Cypre entraîna probablement la chute d'Aristophane et de son père. Tous deux furent accusés de haute trahison et, sans enquête régulière, exécutés en vertu de la loi martiale (389)[45]. C'était une victoire du parti de la paix, qui condamnait les complications extérieures de toute sorte. Pourtant, la cause d'Évagoras ne fut pas abandonnée encore. Chabrias, l'année suivante, passa la mer avec dix vaisseaux et 800 mercenaires et accomplit de grandes choses. Quelles perspectives ouvertes si l'on poussait plus loin la victoire, si l'on maintenait cette union étroite, fondée sur des intérêts semblables, avec les princes des deux plus riches pays de l'ancien monde, dont les ressources étaient mises à la disposition des Athéniens !

C'est juste à ce moment qu'arriva l'injonction d'accéder à une paix qui, en réalité, allait être conclue contre les princes de Cypre et d'Égypte. A coup sûr, une partie considérable du peuple s'opposa à ce qu'on rappelât de Cypre le général victorieux et qu'on rompît déloyalement un pacte dont les fruits commençaient à mûrir. Mais le parti de la paix l'emporta. Les Spartiates furent assez habiles pour se contenter provisoirement de l'abaissement d'Argos, de Corinthe et de Thèbes. On fit des concessions aux Athéniens, et comme, en ce qui concernait l'Archipel, on n'avait arrêté aucune disposition spéciale, ils purent se flatter de l'espoir de reconquérir peu à peu l'empire des îles. Tout d'abord, il leur importait de sortir de la détresse qu'avaient amenée chez eux les pirateries des Éginètes et la privation des convois de l'Hellespont. Leur acquiescement fut décisif et marqua la fin de cette guerre de huit ans qui, sous tous les rapports, avait porté à la Grèce le plus grand préjudice.

C'était une guerre commencée par les Perses et terminée par les Perses ; une guerre qui, dès le début, avait étouffé le sentiment national et bien peu contribué à réveiller l'énergie et le courage. Le plus grand profit était échu aux Athéniens, sans leur concours, car la plus importante victoire avait été remportée sans eux. Mais la petite guerre que les Grecs s'étaient faite entre eux était plutôt une sorte de brigandage, qui assauvagit le peuple et ruina le pays sans remède. Agésilas transporta dans l'Hellade la manière de combattre employée contre les Barbares ; il mit le pays ennemi à feu et à sang, fit déraciner les arbres fruitiers, et exerça sans pudeur la traite humaine sur ses compatriotes. Jamais non plus citoyens d'une même ville ne luttèrent entre eux avec plus d'acharnement et de passion qu'à Corinthe.

Mais le résultat le plus sérieux de la guerre, c'est la transformation occasionnée dans l'organisation des armées par les campagnes d'Asie. Car pendant que les États de la Grèce tombaient en décadence, les aptitudes guerrières de la race n'avaient fait que croître en renommée ; sa supériorité était reconnue de tous les Barbares, à ce point qu'ils ne croyaient pas pouvoir vaincre les Grecs ni vaincre sans eux. Aussi recherchait-on les recrues de race hellénique partout où l'on guerroyait.

Jadis on n'avait vu s'engager au service de l'étranger que des individus sans véritable patrie, c'est-à-dire n'appartenant pas à une société politique organisée qui pût tirer pour elle-même parti de leurs forces, comme les Arcadiens, les Crétois, les Cariens, les Thessaliens ; puis les individus expulsés de leur pays, gens sans domicile et menant une existence précaire. Mais depuis que, grâce à Cyrus, l'état de mercenaire avait brillé d'un nouvel éclat, le goût s'en répandit chaque jour davantage. Jusque-là, n'avoir point de patrie était le plus grand malheur qui et frapper un Grec : maintenant les choses avaient changé. Les divisions et la guerre civile avaient détruit le patriotisme local et l'attachement au sol natal. Ce sentiment avait fait place à des aspirations vers les perspectives lointaines, au goût des aventures. Aussi les natures les plus nobles, comme Xénophon par exemple, ne se faisaient pas scrupule de prendre du service auprès d'un prince perse, quand l'occasion s'offrait d'accomplir des exploits chevaleresques. L'orgueil national y trouvait d'ailleurs une ample satisfaction, et chaque jour perçait avec plus de vivacité l'idée que la bravoure et la civilisation grecques étaient appelées à transformer les pays de l'Orient.

Le système de recrutement des mercenaires grecs en Asie Mineure réagit sur la mère patrie. Il florissait depuis longtemps déjà sur mer, et souvent une flotte avait cherché à affaiblir l'autre par l'élévation de la paie. Mais sur le continent, la guerre de Corinthe fut le début et l'isthme la patrie des armées mercenaires. Un certain Polystratos y recruta des troupes avec l'argent de Conon. Iphicrate en prit le commandement, et c'est lui qui assigna au soldat mercenaire son rôle et sa place dans l'histoire grecque en accomplissant une réforme très opportune dans l'organisation militaire d'Athènes[46]. La fourniture d'un équipement complet supposait l'aisance ; or, le nombre des citoyens aisés s'était bien réduit, et ceux qui pouvaient le plus facilement faire face aux dépenses étaient précisément les plus amollis et les plus délicats : ils ne constituaient pas, à coup sûr, le meilleur élément pour la guerre. Les armes pesantes étaient calculées uniquement en vue de l'ancienne manière de combattre ; elles supposaient des fronts de bataille réguliers, qui supprimaient l'habile utilisation du terrain et les mouvements tactiques ; elles étaient calculées de manière à ménager le plus possible le sang des citoyens. Le guerrier, équipé de pied en cap, avait auprès de lui un valet pour lui porter son bouclier et prendre soin de ses armes. Avec ce système, l'armée se trouvait inutilement grossie, et la facilité de ses mouvements en était entravée.

En outre, Iphicrate comprit que dans une guerre avec Sparte, qui restait invariablement attachée à son ancienne organisation militaire, une innovation intelligente était le meilleur moyen de s'assurer la supériorité sur l'ennemi. Démosthène avait déjà, grâce à l'emploi de troupes légères et d'une tactique nouvelle, remporté d'importants succès ; Iphicrate exécuta une série de modifications radicales. Il allégea les armes défensives, en introduisant un bouclier rond plus petit et en remplaçant les jambières d'airain par une espèce de guêtres ; par contre, il rendit les armes offensives plus efficaces en allongeant la lance et en substituant au glaive l'épée[47]. Cet armement plus léger permit aux hommes d'emporter plus de provisions et d'effectuer des marches plus longues. C'est ainsi qu'il créa la nouvelle infanterie de ligne, les peltastes, incomparablement plus propres aux manœuvres rapides dans les défilés et les montagnes que les lourdes masses des milices citoyennes.

Les rapports du général étaient tout autres avec ces troupes recrutées qu'avec ses concitoyens. Parmi les mercenaires pouvait et devait régner la plus sévère discipline ; il y avait moins à les ménager ; ils relevaient immédiatement de la personne du général, qui leur procurait solde, honneur et butin ; les mercenaires d'Iphicrate le suivirent de Corinthe jusqu'à l'Hellespont. Iphicrate, de basse origine lui-même, avait une nature éminemment propre au maniement des hommes Il était d'une impitoyable sévérité et pourtant aimé. Il pouvait se risquer à abattre sur place une sentinelle qu'il trouvait endormie ; il savait dompter les plus farouches et exploiter leurs passions dans l'intérêt du service ; il déclarait sans ambages que les plus avides d'argent et de plaisirs étaient ses préférés. Tout dépendait de l'humeur des hommes, et Iphicrate, avec son grand talent de commandement et d'organisation, possédait aussi le don de trouver le mot juste au moment opportun. En un laps de temps incroyablement court, la nouvelle armée fut prête et donna aussitôt aux Athéniens une supériorité décidée sur les champs de bataille. La seule défaite que les Spartiates aient essuyée pendant la guerre leur fut infligée par les peltastes.

Sans nul doute, Iphicrate a médité de tout autres plans encore que ceux qu'il a pu réaliser. Qui croira qu'il n'ait eu d'autre but en accomplissant ces réformes militaires que d'exécuter de temps à autre un coup de main heureux ? Il n'était pas seulement un hardi chef d'armée, mais une tête politique, au regard pénétrant et aux vastes Pensées. De tous ceux qui appuyèrent la politique de Conon et cherchèrent à assurer à Athènes le fruit de ses bienfaits, c'est lui qui a le plus fait, et de beaucoup. Il a montré comment il fallait enfoncer les portes de la Péninsule, qui jusqu'alors avait été comme la citadelle inaccessible de la puissance spartiate ; il a enseigné comment on pouvait porter la terreur jusqu'au sein de Sparte ; le premier il a garni l'Acrocorinthe de troupes athéniennes, et le premier apprécié l'importance de cette forteresse dans l'économie générale de la Grèce ; il a conçu l'audacieuse pensée de conquérir Corinthe pour Athènes, car l'occupation de cette place était en réalité le moyen le plus sûr d'étouffer les velléités d'intervention de Sparte, un meilleur moyen en tout cas que le couloir muré de Léchæon, qu'il fallait garder sous une perpétuelle menace de guerre et qui se trouvait rebâti ou rasé suivant l'issue de la dernière affaire. Comme les Corinthiens reconnaissaient eux-mêmes qu'en qualité d'État secondaire ils étaient incapables de résister aux Lacédémoniens, il semblait que ce fût la mission d'Athènes de garder Corinthe avec ses troupes, et il est possible qu'il y ait eu à Corinthe même un parti qui voulait l'annexion à Athènes et non pas à Argos. Ce qui est certain, c'est qu'Iphicrate engagea dans Corinthe une lutte sanglante avec le parti argien, qu'il en mit à mort quelques membres, qu'une fois l'annexion à Argos opérée, on réclama le départ des mercenaires athéniens et que toute la population d'Argos marcha pour effectuer la prise de possession de Corinthe. Mais Iphicrate n'était pas homme à abandonner volontairement un pareil poste. Il s'offrit à garder l'Acrocorinthe ; mais on ne voulut point à Athènes s'engager dans une politique si audacieuse, et Iphicrate déposa son commandement, indigné de la pusillanimité de ses concitoyens, qui refusaient de se servir de .l'arme qu'il leur avait forgée[48]. Par la suite on a fait un mérite aux Athéniens, en considérant le fait comme une preuve de magnanimité et de sage modération, de n'avoir pas accueilli les plans d'annexion de leur général[49]

C'est à cette heureuse réforme de l'armée qu'Athènes dut un tel essor de sa puissance qu'elle a pu même sur terre humilier Sparte, terrifier l'Arcadie et songer à l'établissement d'une place d'armes athénienne dans la Péninsule.

D'autre part, les funestes conséquences de l'innovation se firent aussi bientôt sentir. La solidarité intime de l'armée et de la cité, cette union étroite sur laquelle reposait la force des anciens États, se relâcha. Tout ce que fut l'armée, elle le fut grâce 'à son général. Les citoyens se retirèrent de plus en plus du service militaire ; il se forma une caste militaire, tenue en dehors de la vie civique, une classe d'hommes remuants, sans patrie, épiant toujours l'occasion d'exercer le métier des armes et dont la présence, par conséquent, augmentait singulièrement le danger dès qu'il éclatait quelque part la moindre échauffourée. L'argent désormais décidait de tout. Pour de l'argent, les soldats se laissaient enrôler sans s'informer de la cause dont il s'agissait. C'était l'argent qui maintenait la cohésion parmi les troupes. Les corps des Hellènes, dit Lysias, appartiennent à ceux qui peuvent payer[50]. Ainsi le peuple se divisa en deux moitiés : la première, continuellement sous les armes, devint étrangère à la patrie ; la seconde, la véritable cité, se déshabitua du service militaire. Au lieu de la bravoure calme du citoyen sédentaire, qui combattait pour sa maison et son foyer, ce qui décida de la fortune des États, ce fut la fougue brutale d'aventuriers sans patrie, gens dont la conduite dépendait du caractère des chefs, et dont la fidélité durait juste aussi longtemps que les ressources de la caisse militaire.

Ce fut un malheur pour Athènes qu'elle ait ressenti plutôt les fâcheux résultats que les bons effets du système des mercenaires. Athènes était la seule ville où cette troupe eût été organisée avec un génie créateur et dans un esprit patriotique, et où elle obtint aussitôt le plus grand succès ; mais ce succès, on ne sut pas le conserver : on n'eut pas le courage de laisser faire le général des mercenaires, et il en résulta que ses hauts faits restèrent sans influence sur le dénouement de la guerre. Ce fut surtout le malheur d'Athènes que, pendant toute la durée de la guerre, elle flotta çà et là sans consistance entre des tendances politiques de la nature la plus diverse ; des hommes comme Thrasybule et Archinos, Agyrrhios, Conon, Andocide, Iphicrate, ont eu du crédit l'un après l'autre et même l'un à côté de l'autre. Aucun d'eux n'est devenu, d'une façon durable, l'homme de confiance de la république et le chef de la cité. Aussi ne pouvait-il être question d'une politique ferme ; on s'accoutuma à attendre du dehors les impulsions et les résolutions, au lieu de se proposer et de poursuivre des fins particulières avec une énergie continue. Il s'ensuivit qu'Athènes, en dépit des divers succès isolés qu'elle remporta pendant cette guerre, avait en somme plus perdu que gagné. A la fin de la lutte, elle était plus profondément ébranlée qu'auparavant : elle avait perdu tous ses alliés ; elle avait trouvé ses meilleurs citoyens suspects, et elle avait reconnu de nouveau l'insuffisance de ses propres ressources ; il lui fallut enfin, sous la pression de la nécessité, conclure une paix qui atteignait profondément l'honneur de la cité et ne répondait en rien au but primitif de la guerre. Celle-ci n'avait été qu'un soulèvement contre Sparte, commencé à seule fin de lui disputer le droit d'intervenir dans les affaires des autres États. Or, à la fin de la guerre, la prépondérance de Sparte reposait sur une base nouvelle, dont elle tira parti pour s'arroger, avec une plus grande assurance que par le passé, le droit d'immixtion dans le régime intérieur des autres États.

Sparte avait, sous les formes les plus variées, invariablement maintenu sa vieille politique. Indifférente à l'honneur national, elle ne tendait qu'à dominer en Grèce ; elle acceptait sans y regarder tout appui qu'elle pouvait trouver pour ses prétentions à l'hégémonie. Ces prétentions, elle les avait fait valoir par les armes, par les traités et par l'autorité divine. Ces moyens étant devenus impuissants et la guerre du Péloponnèse ayant été terminée en fait par le Grand-Roi, c'est ce monarque que l'on présente dans toutes les formes comme l'autorité destinée, en l'absence de toute autre, à régler en faveur de Sparte l'équilibre politique de la Grèce. Au lieu du dieu de Delphes, ce fut le roi des Barbares par qui Sparte se fit confirmer en qualité d'État directeur de la Grèce. D'après le texte du traité, tous les États, il est vrai, étaient égaux aux yeux du Grand-Roi ; lui seul était le maître suprême, et la Perse la seule grande puissance, du trône de laquelle émanaient les conditions de la paix. Mais Sparte était chargée d'appliquer le traité. Les Spartiates avaient l'obligation de surveiller dans ce but les affaires helléniques ; ils avaient le droit d'exécution contre ceux qui feraient résistance au nouvel ordre de choses. Ils revendiquèrent donc en d'autres termes l'hégémonie en Grèce, en vertu des pleins pouvoirs conférés par le roi, et cette situation concordait absolument avec leur propre politique. C'était eux, en effet, qui avaient rédigé eux-mêmes ces pleins pouvoirs dans le sens de leurs intérêts ; ils avaient eu l'art d'imprimer le sceau royal aux exigences de leur ambition. Ils prirent vis-à-vis du Grand-Roi des engagements qui de tout temps avaient résumé leurs propres aspirations, l'engagement d'empêcher en Grèce l'élévation de toute grande puissance, de maintenir la Grèce divisée en petits États faibles et sans défense[51].

Sparte occupait maintenant la situation la plus favorable. Elle avait déjà de longue date des adhérents dans tous les États, et elle était toujours considérée par la majorité des Grecs comme l'État appelé à la direction des affaires nationales. Lysias ne disait-il pas l'année même qui précéda la paix : Les Lacédémoniens passent pour les chefs des Hellènes, et à bon droit, à cause de leur bravoure innée, de leur science militaire, et parce que seuls ils habitent un pays qui n'a jamais été ravagé, sans forteresses, sans discordes civiles, invaincus, et toujours sous l'empire de la même constitution[52]. Sparte était sortie victorieuse de tous les dangers ; toutes les coalitions contre elle avaient avorté il n'y avait plus d'ennemi en campagne, ni d'État énergique nulle part ; le désir de la paix était général, et, si la nouvelle forme de l'hégémonie choquait bien des gens, le sentiment de l'honneur national s'était trop émoussé dans la grande masse pour que la grandeur de Sparte en fût compromise. Les autres États aussi s'étaient humiliés devant le Grand-Roi, et Sparte n'avait fait, en définitive, que montrer plus d'habileté que ses rivaux à gagner le puissant allié et à s'assurer de son appui.

En tirant prudemment parti de la paix, Sparte aurait pu arriver à tout et habituer peu à peu les États à une subordination pacifique. Mais ce n'est pas à cela que songeait Sparte ; son ambition n'était point satisfaite, mais pressée d'un nouvel aiguillon ; elle n'était pas au terme, mais au début de ses plans. Dix-neuf ans après la bataille d'Ægospotamoi, elle voyait pour la seconde fois ses ennemis désarmés, et ce qu'elle voulait maintenant, c'était mener à bonne fin, avec plus d'habileté et un meilleur succès, l'œuvre commencée alors. Elle ne voulait avoir dans la Perse qu'une assurance couvrant sa propre domination, et dans l'autonomie garantie aux États qu'un piège contre leur liberté. Au fond, tout était mensonge dans cette paix. C'est l'indépendance des États grecs qu'on proclame et leur sujétion qu'on vise. C'est de la Perse que partent les arrêts imaginés à Sparte, et le Grand-Roi dicte la paix comme suzerain de l'Hellade, tandis qu'il est lui-même plus impuissant que jamais et incapable de se protéger sur son propre territoire contre les bandes helléniques.

 

 

 



[1] Sur les délibérations du congrès de Sparte, voyez XÉNOPHON, Hellen., V, 1, 32-33.

[2] XÉNOPHON, Hellen., V, 1, 36. PLUTARQUE, Artaxerxès, 21.

[3] XÉNOPHON, Hellen., V, 1, 33.

[4] PAUSANIAS, IX, 1, 4.

[5] XÉNOPHON, Hellen., V, I, 34.

[6] PLUTARQUE, Agésilas, 23.

[7] ARISTOTE, Phys. auscult., IV, 3, p. 310 b : la Perse est le moteur.

[8] ISOCRATE, Panégyrique, § 117. De Pace, § 97.

[9] Les inscriptions cunéiformes permettent d'affirmer l'existence de dix principautés à Cypre (RAWLINSON, Herodotus, I, p. 483. BRANDIS, Assyrien in Paulys Realencyclopädie, I, p. 1898).

[10] DIODORE, XV, 9. ISOCRATE, Évagoras, § 64. Ces dix ans se décomposent comme il suit : De 394 à 391, soumission des principautés cypriotes (DIODORE, XIV, 98) : de 391 à 387, guerre avec la Perse, sans résultat sérieux de 386 à 385, apogée de la puissance d'Évagoras, puis perte de la flotte, capitulation. Cf. ENGEL, De Evagora, 1846. De tempore quo divulgatus sit Isocratis Panegyricus, 1864. RAUCHENSTEIN, Isocrate, V, 22.

[11] ISOCRATE, Evag., § 47-50.

[12] BRANDIS, Münzwesen, p. 364 sqq.

[13] Le roi Nephereus envoie des secours aux Spartiates en 396 (DIODORE, XIV, 79). Acoris régnait depuis 392 environ (DIOD., XIV, 98. XV, 2 sqq.).

[14] XÉNOPHON, Hellen., V, 1, 10. CORN. NEPOS, Chabrias, 2.

[15] ISOCRATE, Evag., § 62. DIODORE, XV, 2.

[16] DIODORE, XV, 2. L'armée de terre, commandée par Oronte, montait à 300.000 hommes (DIOD., ibid.).

[17] DIODORE, XV, 3.

[18] Tiribaze, à la suite de rapports calomnieux, est destitué (DIODORE, XV, 8).

[19] DIODORE, XV, 9. Cf. ISOCRATE, Evag., § 63.

[20] R. SCHÖNE, Griechische Reliefs, p. 17. W. HARTEL, Studien über attisches Staatsrecht und Staatsurkunden, p. 130 sqq.

[21] KIRCHHOFF, Bemerkungen zu den Urkunden des Schatzes der anderen Götter, p. 54. SCHÖNE (op. cit., p. 29) a reconnu une représentation symbolique de cette réunion des deux départements du Trésor dans le groupe d'Athéna et Déméter.

[22] On manque de documents émanant de la Trésorerie aux dates voisines de l'archontat d'Euclide, un peu avant et un peu après.

[23] BÖCKH, Staatshaushaltung, I, p. 235 sqq.

[24] ARISTOPHANE, Eccles., 308.

[25] Cf. ARISTOPH., Eccles., 184, SIEVERS, op. cit., p. 99. On sait que c'est là une question mal élucidée, et il n'est pas inutile de rappeler les éléments de la discussion. Harpocration (s. v. Θεωρικά) et le scoliaste d'Aristophane (ad Eccles., 102) attribuent l'invention de la solde ecclésiastique à Agyrrhios ; mais on entend dire aussi que cette solde a été instituée par un certain Callistratos (Parœm. Græc., I, p. 437), et portée à trois oboles par Cléon (SCHOL. AR., Plutus, 330). Le système des indemnités autres que la solde militaire ayant été aboli à la suite du coup d'État de 411 (THUCYD., VIII, 97), la gratuité des services publics se maintint quelque temps mais la μισθοφορία rentra peu à peu dans les mœurs et les lois. Agyrrhios a dû ou rétablir la δίαιτα des ecclésiastes ou la porter de 1 à 3 oboles (½ drachme). Les contradictions relevées entre les textes, et qui proviennent sans doute de la confusion faite par les auteurs entre les diverses sortes d'indemnités, expliquent qu'il reste là des points obscurs.

[26] Sur les confiscations, voyez BÖCKH, Staatshaushaltung, I, p. 518.

[27] LYSIAS, Orat. XIX, § 11. Cf. BLASS, Attische Beredsamkeit, p. 526.

[28] LYSIAS, Orat. XVIII, § 17.

[29] ARISTOPHANE, Eccles., 824 sqq.

[30] BÖCKH, Staatshaushaltung, I, p. 642.

[31] DEMOSTH., De fals. legat., § 277. Timocrate était l'agent d'Artaxerxès.

[32] Ce sont des offrandes faites par testament (LYSIAS, Orat. XIX, § 39).

[33] Le sanctuaire était dédié à Aphrodite Εΰπλοια (PAUSAN., I, 1, 3). Cf. DEMOSTH., in Androt., § 72.

[34] DEMOSTH., in Leptin., § 70. Elle était groupée avec celles de Timothée et d'Évagoras devant le portique de Zeus Eleutherios (PAUSAS., I, 3, 2). Cf. E. CURTIUS, Attische Studien, II, p. 20.

[35] Nicophémos, gouverneur de Cythère (XÉNOPHON, Hellen. IV, 8, 8). Sur les conséquences de la victoire de Cnide, voyez BÖCKH, Staatshaushaltung, I, p. 546.

[36] DIODORE, XIV, 84. Statues de Conon et de Timothée à Samos et à Éphèse (PAUSANIAS, VI, 3, 16).

[37] LYSIAS, Orat. XIX, § 19 (d'après la correction de Sauppe).

[38] RANGABÉ, Eunomia, 31 mai 1863. Götting. Nachrichten, 1863, p. 100. SALINAS, Monumenti sepolcrati scoperti in Atene, 1863.

[39] LYSIAS, Orat. XVI, 13-15. Sur le rôle de Thrasybule, cf. Philologus, XVII, p. 445.

[40] ÆSCHINE, in Ctesiph., § 195.

[41] Agyrrhios amiral à la place de Thrasybule (XÉNOPHON, Hellen., IV, 8, 31).

[42] LYSIAS, Orat. XIX, 39. Cf. RAUCHENSTEIN, Lysias.

[43] LYSIAS, Olympic., [XXIII], § 4-5. Cf. SCHÄFER in Philologus, XVIII, p. 188.

[44] LYSIAS, Orat. XIX, 21 sqq.

[45] LYSIAS, Orat. XIX, 7.

[46] DÉMOSTHÈNE, Philipp., I, § 23. Cf. ARISTOPHANE, Plutus, 173. HARPOCRATION, s. v. ξενικόν.

[47] DIODORE, XV, 44. CORN. NEPOS, Iphicrate, 1.

[48] DIODORE, XIV, 92.

[49] ARISTID., Panathen., § 167. Cf. REHDANTZ, Vitæ Iphicratis, Chabriæ, Timothei, p. 16.

[50] LYSIAS, Orat. XXXIII, § 5.

[51] Sur la paix d'Antalcidas considérée comme une conséquence de la vieille politique de Sparte, consulter principalement l'article de HERBST (N. Jahrbb. für Philologie, LXXVII, p. 704).

[52] LYSIAS, Orat. XXXII, § 7.