HISTOIRE GRECQUE

TOME PREMIER

LIVRE DEUXIÈME. — DE L’INVASION DORIENNE AUX GUERRES MÉDIQUES.

CHAPITRE PREMIER. — HISTOIRE DU PÉLOPONNÈSE.

 

 

§ IV. — ÉTATS DU CENTRE ET DU LITTORAL OCCIDENTAL.

Sparte ne pouvait plus se contenter de conserver ce qu’elle avait acquis, depuis qu’elle était entrée dans la voie des conquêtes et qu’elle avait réuni en un domaine compacte plus du tiers de la péninsule. Pendant les guerres de Messénie, les ennemis qu’elle avait dans le Péloponnèse avaient manifesté trop clairement leurs tendances pour qu’après sa victoire elle ne songeât pas, avant tout, à terrasser pour toujours le parti anti-spartiate, et à affermir sa puissance en l’étendant encore plus loin dans la péninsule. C’était là la pensée de la communauté dorienne, et les rois eux-mêmes comptaient sur des guerres heureuses pour améliorer leur position ; car, toute annexion nouvelle, en augmentant le nombre de leurs sujets non doriens, ne pouvait que contribuer à leur rendre la liberté de leurs mouvements à l’intérieur.

La direction qu’allait prendre leur politique belliqueuse ne pouvait être douteuse. Aussi bien, la grande région centrale de la péninsule avait été le point d’appui et la réserve de tout le soulèvement messénien. Les villes arcadiennes avaient fait aux exilés un accueil hospitalier et leur avaient accordé le droit de cité ; les filles d’Aristomène s’étaient mariées à Phigalia et à Héræa, et élevaient leurs enfants dans la haine de Sparte. La guerre de Messénie avait été en même temps une guerre d’Arcadie, et Phigalia, forteresse assise dans la vallée de la Néda, non loin d’Ira, avait déjà été prise une fois en 659 (Ol. XXX, 2) par les Spartiates[1] Cependant, ils n’avaient pas réussi à prendre pied dans cette région sauvage.

Ils n’en mirent que plus d’énergie à renouveler leurs attaques du côté de l’est, par où l’accès était plus facile.

Là, il n’y a à franchir que des chaînons peu élevés pour passer de la vallée haute de l’Eurotas dans le bassin de l’Alphée ; les sources du fleuve se rassemblent sur ce vaste plateau, dont les bourgades éparses ont trouvé de bonne heure un centre fixe dans la ville des Tégéates. Une partie de la population arcadienne, tout ce qui habitait sur le versant de l’Eurotas, était, depuis longtemps déjà, réduite à la, condition de périèques ; maintenant, le moment semblait venu de consolider et de compléter cette conquête, de venger une ancienne injure qu’on avait reçue de Tégée, d’effacer par de nouvelles victoires le souvenir de la captivité des rois spartiates Charilaos et Théopompos, d’autant plus que, l’Arcadie, après la chute d’Aristocrate, s’était de nouveau fractionnée en simples gouvernements cantonaux. En conséquence, aussitôt que les Arcadiens eurent refusé d’expulser les Messéniens, les armées de Sparte envahirent la Tégéatide, et les rois cherchèrent à prouver à leurs soldats, par des oracles émanés de Delphes, que cette vaste plaine allait être bientôt mesurée au cordeau et partagée entre les Spartiates.

Mais on apprit bientôt combien il est difficile de conquérir un pays hérissé de hautes montagnes, peuplé d’hommes vigoureux et sobres. Les Spartiates éprouvèrent un désastre complet, et, au lieu de partager à leur gré le terrain convoité, beaucoup d’entre eux, faits prisonniers, allèrent travailler aux canaux de l’Alphée et connurent par expérience le sort des prisonniers de guerre[2]. La force était impuissante contre Tégée, l’inébranlable boulevard de l’indépendance des montagnards ; on dut s’apercevoir à Sparte que la politique de conquête avait ses bornes, et l’oracle de Delphes, soucieux comme toujours de la gloire des Héraclides et de l’accroissement de leur prestige, indiqua vers 560 à l’Agiade Anaxandridas, le cinquième successeur de Polydoros, un autre moyen. On vaincrait, selon lui, grâce aux ossements d’Oreste qui, ensevelis dans le sol tégéate, devaient être transportés secrètement à Sparte[3]. Mais le transfert de ses reliques était déjà sans doute le résultat d’un retour de fortune qu’avaient amené à la longue la ténacité de Sparte et la supériorité de sa tactique. Des deux côtés, on était las d’une guerre ruineuse ; Sparte avait dû renoncer au projet de subjuguer l’Arcadie, et, grâce à l’héroïsme des citoyens de Tégée, qui ont préservé l’Arcadie du sort de la Messénie, la politique extérieure de Sparte s’est trouvée jetée dans une autre voie, dans celle des traités. Pour faciliter un arrangement, on utilisa les cultes rendus des deux côtés aux mêmes héros, et on fit revivre les souvenirs de la glorieuse hégémonie d’Agamemnon, qui s’était étendue jadis jusque sur l’Arcadie. Les Héraclides de Sparte furent reconnus pour ses successeurs, et, en signe d’hommage, les cendres d’Oreste furent transportées solennellement en Laconie. Enfin, sur la ligne de partage des eaux, là où les sources de l’Alphée touchent à celles de l’Eurotas, s’éleva une colonne sur laquelle étaient inscrits les traités entre Tégée et Sparte[4].

Les Tégéates, en se ralliant à la politique de Sparte et en s’obligeant à servir sous les étendards des Héraclides, purent accepter cette condition nouvelle sans faire tache à leur honneur militaire. La place d’honneur qui leur fut laissée à l’aile gauche de l’armée fédérale[5] atteste que les Spartiates étaient heureux d’avoir transformé en compagnons d’armes ces opiniâtres ennemis, et la fidélité avec laquelle Tégée persista dans cette alliance est une preuve de la valeur de ses citoyens, tout aussi honorable que la persévérance heureuse dont ils avaient fait preuve dans la lutte soutenue pour leur indépendance.

La colonne élevée au bord de l’Alphée marque un changement de direction dans la marche de l’histoire péloponnésienne ; c’est alors seulement que les principes de droit public, posés dans les siècles antérieurs par les législateurs de Sparte, exercèrent toute leur influence.

Déjà, en effet, Lycurgue, étendant ses vues au delà des affaires intérieures du pays et embrassant du regard toute la péninsule, avait reconnu, paraît-il, la nécessité de réunir toutes les races et les États qu’elle renfermait au sein d’un droit commun. Or, parmi les races qui l’avaient envahie, la race étolienne était, après les Doriens, celle qui possédait le plus d’énergie propre ; elle s’était répandue le long du rivage occidental, comme les Doriens du côté de l’est. La péninsule avait ainsi deux centres de gravité. Si donc elle voulait provoquer dans son sein un développement vigoureux et général, il fallait préalablement rattacher les uns aux autres les États de l’ouest et ceux de l’est par un lien pacifique et durable. Pour cela, il fallait un centre religieux, un sanctuaire universellement révéré, aussi bien des tribus amenées par les invasions que des races fixées dès l’origine dans le pays.

Or, le Zeus pélasgique avait un antique sanctuaire dans la vallée de l’Alphée, à l’endroit où le plus grand fleuve de la péninsule débouche des gorges de l’Arcadie dans le pays plat qui forme le littoral occidental. C’était une hauteur qui portait, comme le Lycée arcadien, le nom de la demeure des dieux, Olympos ; au pied, Zeus, le dieu qui descend avec l’éclair, avait marqué sur le sol des empreintes sacrées, où le croyant se sentait tout près du dieu invisible ; là s’élevait l’autel de Zeus, cimenté avec la cendre des sacrifices, et des familles sacerdotales y révélaient ses volontés. Cet oracle subsistait depuis longtemps déjà lorsque furent fondés les États d’Élis et de Pisa, et les Achéens qui vinrent d’Héliké, sous la conduite d’Agorios le Pélopide, pour prendre part à la fondation de Pisa, adoptèrent ce culte de Zeus ; ils y associèrent le culte héroïque de leur ancêtre Pélops, et instituèrent des jeux en son honneur.

Héra y fut adorée à côté de Zeus : sou temple était le sanctuaire fédéral des deux États voisins, et le chœur des seize femmes qui tissaient en commun le vêtement d’Héra représentait les seize petites villes qui se trouvaient également réparties  entre l’Élide et la Pisatide. Ce système fédératif fut également appliqué au culte de Zeus, à qui l’arrivée des Pélopides achéens avait donné une importance toute nouvelle. Pisa, plus faible dès le principe que sa rivale Élis, chercha à s’appuyer sur elle pour protéger ses sanctuaires contre ses voisins du sud et de l’est, notamment contre les Arcadiens, qui revendiquaient d’anciens droits sur les bouches de l’Alphée, et Élis, de son côté, vit dans la participation qui lui était offerte à la gestion des affaires religieuses une occasion favorable d’étendre son pouvoir et son influence au delà de ses frontières. Les deux États se partagèrent la surveillance du culte. Olympie fut un centre pour les États de la côte occidentale et leur fournit, lorsque Sparte chercha à se rattacher à eux, la forme d’association la mieux appropriée qu’on pût trouver[6]. En effet, Zeus, surtout tel que le concevait la race achéenne, était le pasteur commun des peuples, le plus ancien dieu fédéral de tous les Hellènes et, en même temps, le protecteur des possessions des Héraclides dans le Péloponnèse. De son côté, Sparte se rallia d’autant plus volontiers à son culte d’Olympie, que ce culte était étroitement associé avec celui de Pélops, vénéré comme le fondateur des jeux olympiques ; c’était, en effet, chez les Héraclides une politique de famille que d’honorer de toutes manières la race des Pélopides.

On conservait encore au temps des Antonins, dans le temple de Héra à Olympie, un disque de bronze qui contenait, gravées en caractères circulaires, les dispositions légales concernant la fête solennelle d’Olympie[7] Aristote a étudié cette inscription, qu’il considérait comme le document le plus important de l’histoire du Péloponnèse ; d’après son témoignage,. le nom de Lycurgue y figurait à côté du roi éléen Iphitos. Mais il n’est dit nulle part que le document lui-même fût contemporain et ait été rédigé par les personnages indiqués, au nom de leurs gouvernements respectifs. Ils pouvaient aussi bien être cités sur une inscription de beaucoup postérieure, comme les auteurs de l’entente mutuelle établie entre les deux pays. Quoi qu’il en soit, le roi Iphitos passait dans la tradition locale pour le véritable fondateur de la fête fédérale, pour celui qui en avait étendu l’influence et la portée au delà des régions limitrophes. C’est pour cela que, dans le vestibule du temple de Zeus, se voyait une grande statue de femme en bronze, représentant la trêve olympique (Έχεχειρία), et, à côté d’elle, Iphitos, qu’elle couronnait en signe de reconnaissance. Quoique le Piséen Cléosthène soit cité en même temps que lui, il n’en est pas moins vrai qu’alors la prépondérance et la préséance honorifique étaient déjà passées du côté d’Élis.

Le nom d’Iphitos marque la phase la plus importante dans l’élaboration progressive de cet ordre de choses. On ne parvenait pas à le rattacher d’une manière bien sûre à ses prédécesseurs de la race d’Oxylos. Il porte même le titre d’Héraclide ; du moins, c’est lui qui aurait introduit le culte d’Héraclès, antipathique jusque-là aux Éléens, et qui se serait mis en rapport, lui et son peuple, avec le dieu de Delphes. Par là, Élis et Sparte devinrent, pour ainsi dire, de la même famille, et capables d’une fraternité plus intime. Ce fut à la même époque que l’ancienne liaison contractée avec l’Achaïe, liaison dont l’appel adressé à Agorios est la preuve, fut rompue et remplacée par une sympathie décidée pour Sparte ; c’est aussi vers le même temps qu’auront été imaginées les légendes accréditées sur cette fraternité d’armes, formée jadis entre Oxylos et les Héraclides. Élis et Sparte se rencontraient dans les intérêts de leur politique et, pour se garantir leur appui réciproque, elles conclurent auprès du sanctuaire de Zeus, à Pisa, un pacte, qui était déjà réglé dans ses principales dispositions et solidement établi lorsque la victoire de Corœbos (776 av. J.-C.) inaugura la liste régulière des vainqueurs olympiques et, du même coup, l’histoire authentique du sanctuaire fédéral[8].

La base de cette fédération était la reconnaissance de Zeus olympique comme protecteur commun et la participation en commun à sa fête qui, d’après les statuts, devait être célébrée, à titre de fête fédérale, tous les cinq ans, lors de la pleine lune qui suivrait le solstice d’été. Cette convention entraînait une foule de mesures qui mirent en contact intime les parties jusque-là séparées de la péninsule et portèrent d’heureux fruits. Des routes furent ouvertes ; il y eut des règlements pour l’époque des fêtes ; on contracta des obligations réciproques. Élis fut confirmée dans son droit de présidence qu’elle avait enlevé aux Piséens ; les Éléens furent chargés d’annoncer par des messagers sacrés l’approche de la fête. Cet avis donnait le signal de la trêve ; les chemins qui conduisaient à Pisa devaient être libres et exempts de danger ; une sécurité parfaite devait régner dans tous les alentours du temple. Quiconque troublait ce repos par un acte de violence était cité devant le tribunal des Éléens ; le condamné devenait l’esclave du dieu offensé et ne pouvait être racheté que moyennant une somme déterminée. Le temple eut son trésor ; il s’établit une série de préceptes qui firent loi, comme formant le droit sacré d’Olympie.

Ce fut surtout l’Élide qui, grâce à l’habileté de ses hommes d’État, profita des avantages de cette association. Ce pays, le plus dépourvu de défenses naturelles qui Mt dans la péninsule, sans cesse exposé aux incursions des montagnards de l’Arcadie, obtint par son alliance avec Sparte que le plus puissant État du Péloponnèse non seulement lui garantit l’intégrité de son territoire, mais se déclarât prêt à considérer en général toute attaque dirigée contre ce territoire comme une rupture de la trêve olympique[9]. Ainsi délivrée de toute entrave, l’Elide put étendre sans obstacles et affermir sa puissance envahissante au sud du Pénéios.

De son côté, grâce à ce pacte, Sparte cessa d’être quelque chose comme un canton du Péloponnèse ; elle prit une influence dominante sur les affaires générales du pays, dont elle devenait en quelque sorte le chef-lieu. Comme représentant la population dorienne, elle régla avec Élis les statuts olympiques d’après les idées doriennes. Déjà, à partir de la quinzième fête, les concurrents couraient nus sur les bords de l’Alphée comme sur les rives de l’Eurotas, et dès le début, la couronne d’olivier fut le prix du vainqueur. Sparte réglementa, d’accord avec Élis, l’admission de ceux qui manifestaient le désir de prendre part aux sacrifices communs et aux jeux[10].

Mais, par contre, les Pisates, eux, avaient été traités comme les citoyens de Crisa au pied du Parnasse. Ils durent se résigner à voir le sanctuaire fondé par leurs aïeux, aux portes de leur ville, passer, avec les honneurs et les droits qui y étaient attachés, entre des mains étrangères. Ils en conçurent une rancune profonde, qui n’attendait qu’une occasion pour se faire jour.

Ce moment arriva lorsqu’une famille énergique, sortie de leurs rangs, sut s’emparer, avec l’aide du peuple, du pouvoir absolu. C’était la famille d’Omphalion, qui appartenait probablement à une branche de la noblesse étolienne émigrée à Pisa. Le fils d’Omphalion, Pantaléon, prit les rênes du gouvernement au moment où les Spartiates étaient tellement absorbés par les désordres intérieurs qui suivirent la première guerre de Messénie qu’il leur était impossible de faire sentir leur influence au dehors. Fortifié par l’alliance de l’Arcadie, Pantaléon sut si bien mettre ce temps à profit qu’il reconquit les droits et honneurs enlevés aux Piséens ; il célébra la vingt-septième Olympiade (672) au nom de son pays, à droits égaux avec les Éléens[11]

Les circonstances devinrent encore plus favorables lorsque le Téménide Phidon se mit en campagne à l’est de la péninsule, avec autant de succès que de vigueur, repoussa les Spartiates de la région qu’ils avaient enlevée à la frontière de l’Argolide, les battit en rase campagne à Hysiæ[12] et traversa l’Arcadie pour aller anéantir l’influence de Sparte jusque sur la côte occidentale. Élis se trouvait non seulement délaissée par ses alliés, mais encore, en lutte avec les Achéens qui nourrissaient depuis longtemps contre leurs voisins un juste ressentiment, à cause du refus d’admettre à Olympie les familles achéennes. Ainsi, le dynaste argien réussit à atteindre le but de ses désirs ambitieux. En qualité d’héritier d’Héraclès, il offrit dans le champ sacré d’Altis, tracé par son ancêtre, le grand sacrifice dont le prestige s’étendait déjà au delà de la péninsule. Il célébra la fête (c’était la vingt-huitième depuis Corœbos) avec les Pisates[13] ; les Éléens en furent exclus, ainsi que les Spartiates ; l’hégémonie de la péninsule, que les Spartiates croyaient déjà tenir dans leurs mains, était retournée à la dynastie qui occupait le trône d’Agamemnon.

Toutefois, ces brillants succès eurent peu de durée. Les Spartiates paraissent avoir réussi, même avant l’explosion de la révolte de Messénie, à venir au secours des Éléens, qui faisaient aussi, de leur côté, tous leurs efforts pour rentrer en possession de leurs droits. La vingt-huitième fête fut rayée, comme révolutionnaire, de la liste des Olympiades, et les suivantes furent de nouveau célébrées sous la présidence des fonctionnaires expulsés. Mais le ferment de discorde n’était rien moins qu’éliminé. Pisa gardait sa dynastie et maintenait ses prétentions sur Olympie. Elle profita encore une fois des embarras de Sparte — c’était, d’après la chronologie admise plus haut, l’année qui suivit le commencement de la seconde guerre de Messénie — pour rassembler une année de Pisates, d’Arcadiens et de Triphyliens, et pour célébrer en leur propre nom, après avoir exclu de force les Éléens, la trente-quatrième Olympiade (644)[14]. Ce fut le dernier triomphe de l’audacieuse race des Omphalionides. En effet, après la chute d’Ira, que le parti anti-spartiate, et ce fut sa grande faute, avait abandonné à son sort, il se produisit aussitôt un revirement complet, et les Spartiates ne perdirent pas un moment pour régler à leur avantage les affaires d’Élide. Pise fut encore cette fois traitée avec beaucoup d’égards, sans doute parce qu’on n’osait pas souiller le domaine sacré du temple avec le sang de ceux qui l’habitaient. Ils conservèrent leur indépendance et même une part dans la direction de la fête olympique.

On montra moins de ménagements pour les complices du dernier soulèvement. Les villes de Triphylie, qui avaient leur centre dans le temple de Poseidon à Samicon, et qui, bien que fondées par des Minyens, étaient étroitement unies à l’Arcadie, furent détruites à cette époque ; les Spartiates tenaient à faire place nette en cet endroit, sur la frontière de l’ancienne Messénie, et à couper court de ce côté à toute tentative de soulèvement. A Lépréon, deux partis, analogues aux Guelfes et Gibelins, s’étaient trouvés en présence[15] : le parti messénien avait pour chef Damothoïdas, gendre d’Aristomène ; mais l’autre avait été assez fort pour envoyer des secours aux Spartiates en Messénie. Pour prix de ses services, Lépréon non seulement resta debout, mais encore fut agrandie et renforcée parla suppression de localités moins considérables. Elle était destinée à offrir, sur les frontières de l’Arcadie, de l’Élide et de la Messénie, une place forte, un point d’appui précieux pour les intérêts de la Laconie.

Les affaires d’Élide semblaient ainsi réglées pour longtemps par Sparte, après la fin de la guerre de Messénie ; mais l’ancienne inimitié entre Élis et Pisa ne s’endormait pas.

Pantaléon avait laissé deux fils, Damophon et Pyrrhos[16]. Déjà l’aîné, Damophon, était surveillé avec défiance par les princes éléens ; on crut apercevoir les préparatifs d’une nouvelle rupture. Les Éléens franchirent une première fois la frontière ; ils la repassèrent après que les traités eurent été jurés de nouveau. Mais à peine Pyrrhos fut-il arrivé au pouvoir que, résolu à briser la chaîne qui le rivait à la confédération, il appela aux armes contre Elis toute la vallée de l’Alphée. La Triphylie se joignit encore à lui, ainsi que les bourgades voisines d’Arcadie qui, sans prendre officiellement part à la lutte, étaient toujours prêtes à envoyer au secours des Pisates des bandes de volontaires. Cette guerre décida du sort de toute la côte occidentale. Les Pisates étaient hors d’état de résister aux armées réunies d’Élis et de Sparte ; leurs forces étaient insignifiantes ; leur petit pays n’était même pas uni à l’intérieur, et, comme cette fois ils avaient témérairement violé la trêve religieuse, on n’eut plus aucun égard à l’antique sainteté de leur ville. Elle fut rasée, et même si méthodiquement et si complètement, qu’on en cherchait vainement les traces plus tard sur les coteaux plantés de vignes qui avoisinaient Olympie. Tout ce qui resta d’habitants dans le pays devint tributaire du temple de Zeus. Une grande partie d’entre eux émigra par la côte voisine pour se soustraire au joug abhorré des Éléens, entre autres les Dyspontiens, tandis que leurs voisins, les Létrinéens, qui s’étaient rangés du côté d’Élis, demeurèrent en paix sur leur territoire. Cette exécution doit avoir eu lieu aussitôt après la première année de la cinquante-deuxième olympiade (572), car, d’après une tradition bien fondée, cette olympiade fut la dernière où les Pisates eurent part à la direction de la grande fête nationale[17].

La Pisatide fut, après la Messénie, le second pays que la force effaça de l’histoire de la péninsule. Son nom seul retentit encore, comme jadis, dans la bouche du peuple et dans la langue des poètes ; en outre, à part le chef-lieu, Pisa, dont sa rivale prit la place, l’ancien groupe des huit bourgades comprises dans le pays ne fut pas anéanti[18]. Elles subsistèrent, à titre de communes rurales, sous la souveraineté d’Élis, et, de même que les plantes continuent à fleurir sur les champs de bataille et lés tombeaux, de même, après tant de luttes, la sainte confrérie des seize femmes qui brodaient la robe de fête de Héra resta comme une image gracieuse de l’ancienne fraternité des deux pays.

Les familles privilégiées qui occupaient l’antique résidence d’Oxylos et dirigeaient les destinées de l’Élide avaient enfin atteint leur but. Le pays voisin, objet de leur haine, était asservi : le leur était doublé et en même temps protégé contre les attaques du dehors par des traités qu’une sanction nouvelle venait de confirmer. Elles transportèrent alors l’administration du temple d’Olympie dans leur capitale, à Élis, et la ruine totale de Pisa leur garantit que, dans cette région, aucune localité ne serait désormais en état de leur disputer la direction des jeux.

Comme la dernière guerre avait été faite au nom du dieu d’Olympie, le butin lui en fut adjugé, et les Éléens, en leur qualité de trésoriers du temple, se chargèrent d’employer l’argent pour son honneur. L’honneur de Zeus était pour eux une forme commode dont ils usaient pour satisfaire leur propre ambition ; en effet, sous prétexte de grossir le trésor du temple, ils vinrent à bout, par force, par ruse et par achats de terrains, d’étendre pas à pas leur domaine de plus en plus loin au sud. La Triphylie elle-même, désarmée par Sparte, devint de cette façon pays de périèques vis-à-vis de l’Élide qui, composée désormais de douze districts, — dont quatre dans le bassin du Pénéios, le pays des vainqueurs, et huit dans les contrées soumises ou région des périèques —, d’ailleurs solidement et régulièrement constituée, s’étendit depuis le Larisos achéen jusqu’à la Néda au sud. Ce brillant résultat atteste l’habileté politique des familles qui avaient en main le pouvoir et qui vivaient en groupe isolé sur les bords du Pénéios.

Elles avaient profité avec une grande sagacité, pour le maintien de leurs privilèges, des conditions dans lesquelles se trouvait le pays. En effet, bien que jouissant d’une grande étendue de côtes, l’Élide, à cause du manque de ports, était destinée par la nature, non pas à l’industrie de la navigation, mais à l’agriculture pour laquelle elle était, grâce à la fertilité uniforme de son sol, mieux douée que tout autre pays du Péloponnèse. Favoriser l’agriculture fut la préoccupation constante du gouvernement. Une loi agraire faite avec un soin minutieux, et que l’on faisait remonter à Oxylos, défendait d’emprunter de l’argent sur le fonds de terre assigné par l’État ; on voulait par là maintenir l’aristocratie militaire amenée par l’invasion en possession de ses fiefs, prévenir l’appauvrissement des familles et le bouleversement du cadastre.

Les petits propriétaires devaient vaquer tranquillement à leurs affaires et ne pas être obligés de se rendre à la ville même pour vider leurs procès. On institua dans ce but des juges locaux, qui habitaient au milieu des paysans et donnaient audience à jour fixe dans leurs tournées. A cause de la trêve de Dieu, il n’y avait point de villes fortifiées ; la population, d’ailleurs très dense, vivait dans de simples hameaux ou dans des métairies isolées. Comme le pays produisait en abondance du blé,’ du vin et des fruits, on ne tirait rien du dehors ; les lagunes de la côte fournissaient d’excellents poissons, les montagnes, du gibier. Le peuple vivait heureux, sans se lasser de l’uniformité du bien-être. A l’abri du mouvement qu’auraient provoqué le commerce et la vie des grandes villes, les familles qui dirigeaient, d’après des principes arrêtés, les destinées du pays conservèrent durant des siècles leurs privilèges. De là l’esprit de suite, la prudence et le succès relativement considérable de la politique éléenne[19].

Ce qui faisait le bonheur des Éléens, c’était l’éloignement de Sparte, qui avait besoin d’eux sans qu’ils eussent à redouter sa puissance ; leur bien le plus précieux était le patronage d’Olympie, source inépuisable d’expédients et de prétentions dont ils savaient tirer tout le parti possible. Aussi travaillaient-ils sans cesse, non seulement à entretenir dans sa splendeur la fête olympique, mais à l’embellir par des innovations faites à propos, et à la garantir contre la concurrence d’autres jeux[20]. Il y avait longtemps qu’on était sorti du cercle étroit des exercices spartiates ; à la course simple s’étaient ajoutées la course double et la course prolongée ; puis la lutte, saut, le jet du disque et du javelot et le pugilat, exercices qui, depuis la avine olympiade (708), formèrent une série complète, sous le nom de Cinq-Combats ou Pentathlon. Ces assauts se livraient tous dans le Stade qui s’enfonçait entre les pentes boisées des collines d’Olympie.

Une nouvelle époque s’ouvrit lors de l’introduction des jeux équestres. On aplanit l’Hippodrome, champ de courses qui avait environ deux fois la longueur du Stade, et qui rejoignait celui-ci à angle droit. Ce fut à la XXVe olympiade (680) que les quadriges s’alignèrent pour la première fois sur la rive de l’Alphée. Mais, comme les Grecs avaient l’habitude de rattacher tout ce qui se faisait de nouveau à d’anciennes traditions, on fabriqua alors la légende d’après laquelle Pélops aurait gagné jadis à la course des chars le pays perdu par son ancien roi, quoique la statue d’Hippodamie, ornée du diadème de la victoire, se trouvai dans le Stade. Après la course des chars s’introduisit la course des chevaux montés, ainsi que le Pancration, qui réunissait la lutte et le pugilat (Ol. XXXIII, 1. 648). Puis, il y eut, à l’imitation des assauts entre hommes, des combats de jeunes garçons.

C’est ainsi que se multiplièrent les modes de combats, et, plus l’intérêt grandit, plus on eut égard aux inclinations des diverses races helléniques, plus le programme des jeux olympiques s’ouvrit avec complaisance même à des exercices décidément antipathiques à l’austérité dorienne. A mesure que le caractère national de ces jeux s’affirmait davantage, les Éléens gagnaient d’autant en considération ; ils devinrent une puissance hellénique, et leurs magistrats, qui devaient à leur compétence dans les choses de tradition une autorité inébranlable, s’appelaient Juges des Hellènes (Hellanodikes), parce qu’ils avaient à prononcer, d’après d’anciens principes, sur l’admission des citoyens helléniques aux concours et sur le résultat des combats. L’examen des concurrents avait lieu à Élis, dans le gymnase de la ville. Ce gymnase devint un établissement national, où même des Grecs appartenant à d’autres États prirent de plus en plus l’habitude de venir faire leurs dix mois d’exercices, pour avoir plus de chances de gagner la couronne olympique. La gloire et le profit qu’Élis retirait de la direction des jeux avaient éveillé la jalousie des Pisates et provoqué ces luttes acharnées dont nous avons parlé plus haut. Après la défaite de leurs voisins, les Éléens eurent pour eux seuls l’honneur et le profit, et c’est ainsi que, par un enchaînement de circonstances heureuses, la petite ville assise sur les bords du Pénéios, qui n’avait point de renommée homérique à invoquer, devint la capitale de toute la côte occidentale. Tout en tenant sa grandeur de Sparte, elle s’est fait une position indépendante de Sparte, un rôle national qui étend son prestige sur toute la péninsule et même au delà.

Sparte avait laissé aux Éléens le côté religieux de l’association dont Olympie était le centre, avec tous les avantages qui pouvaient y être attachés. Mais elle prit pour elle les droits politiques. Une fois qu’elle eut vu, par la résistance de l’Arcadie, qu’il lui serait impossible d’aller plus loin dans la voie ouverte par les guerres de Messénie, elle ne songea plus à être le seul État de la péninsule, mais seulement le premier ; au lieu de chercher à dominer les États plus faibles, elle visa à les diriger. De même qu’elle s’efforçait de réveiller ou de conserver partout les souvenirs de l’époque achéenne, elle voulait aussi rétablir l’hégémonie d’Agamemnon dans la personne des rois Héraclides de Sparte, et elle utilisa dans ce but, avec un succès complet, le caractère sacré du sanctuaire national. Elle avait place à côté des Éléens, à titre de protectrice d’Olympie, de gardienne des traités[21]. A l’époque des fêtes, elle veillait, les armes à la main, à l’observation de la trêve, et les troupes des confédérés devaient aussi être prêtes à marcher pour la même cause. L’oracle de Delphes avait donné sa consécration au sanctuaire d’Olympie, et lui avait conféré un caractère amphictyonique analogue à celui que Delphes avait eu longtemps, pour les Doriens. L’année de la fête olympique était réglée d’après l’année pythique de quatre-vingt-dix-neuf mois lunaires. Apollon, vénéré à Sparte comme l’auteur du pacte social, figura également à côté de Zeus comme gardien des institutions olympiques[22]. A l’exemple des Spartiates, leurs alliés s’engagèrent à reconnaître les lois émanées d’Olympie, et à déposer ainsi qu’à prendre les armes selon qu’elles l’ordonneraient. L’influence de Sparte élargit le cercle des adhérents d’Olympie, et, par contre, cette adhésion fut le soutien de sa puissance. Ce n’est pas sur les bords de l’Eurotas, mais sur ceux de l’Alphée que Sparte s’est acquis sou hégémonie ; c’est là qu’elle est devenue la tête de la péninsule, une tête qui savait voir de loin et imprimer au corps une direction énergique. Disposant d’une puissance propre supérieure à celle de tous les Etats de la péninsule pris isolément, il lui appartenait d’avoir voix décisive dans les conseils de la confédération. Ses citoyens, rompus à l’art de la guerre, étaient naturellement les instructeurs militaires et les généraux de la péninsule. Pour l’empêcher d’abuser de sa puissance, il y avait des traités placés sous la foi du serment et sous la surveillance du Zeus olympique ; d’ailleurs, on était en droit de croire que, après les expériences qu’elle avait faites en Arcadie, Sparte avait mis pour toujours un frein à ses convoitises et accepté sagement les limites assignées par la force des choses à sa domination territoriale. Les différends survenus entre les membres de la confédération furent réglés par des magistrats péloponnésiens qui s’appelaient, comme les juges des concours à Élis, Hellanodikes. Les querelles plus graves furent déférées au tribunal religieux d’Olympie[23].

C’est ainsi que des germes presque inaperçus produisirent une nouvelle confédération grecque qui, tout en aspirant au rôle d’institution nationale, comme l’indique le nom d’Hellènes qui apparaît toujours en tête des associations à forme amphictyonique, embrassait en même temps un groupe déterminé de pays, borné par des limites naturelles. C’est à ce groupe que la fête de Pélops, célébrée en commun sur les bords de l’Alphée, a fait donner le nom collectif d’île de Pélops ou Péloponnèse[24].

Cependant, autant la péninsule semble destinée par la nature à former un tout, autant l’unité y a été de tout temps difficile à établir. Aussi, même dans l’intérieur de la région, la fédération et le développement des institutions qui s’y rattachaient se heurta contre une résistance opiniâtre, parce que des villes et des États considérables prirent des tendances tout à fait hostiles à l’esprit de Sparte et à tout ce qui émanait de ce foyer du dorisme.

Le mécanisme de la constitution spartiate est tellement artificiel, il s’est élaboré peu à peu, après de longues luttes, dans des circonstances si exceptionnelles, il est tellement basé sur les conditions topographiques particulières à Sparte, qu’on ne doit pas être surpris si rien de semblable ne s’est réalisé dans les autres contrées du Péloponnèse, quoique les Doriens y aient pénétré aussi bien qu’en Laconie et y aient acquis des propriétés foncières dans des conditions analogues. Une pareille organisation était surtout impraticable sur le littoral septentrional et oriental de la péninsule, où les nouveaux États avaient pour base une population maritime de race ionienne. Là, il était impossible d’arriver jamais à cet isolement vis-à-vis de l’extérieur qui était la condition fondamentale d’une constitution à la spartiate. Là, les nouveaux États se virent entraînés dans le mouvement général du monde grec ; c’est par là que les relations entre les deux rivages de la mer Égée devaient commencer à se rétablir, et c’est là aussi, par conséquent, que se prononça le plus ouvertement la réaction contre le système politique de Sparte.

 

 

 



[1] PAUSANIAS, VIII, 39, 2. O. MUELLER, Dorier, I, 152.

[2] Luttes contre Tégée (E. CURTIUS, Peloponnesos, I, 252). Le résultat fut d’abord fâcheux pour les Spartiates. Captivité des rois de Sparte (PAUSANIAS, VIII, 43, 5. POLYEN, VIII, 34). Sparte reprend le dessus à, partir du règne d’Anaxandridas, fils de Léon (PAUSANIAS, III, 3, 9).

[3] HÉRODOTE, I, 67. Les ossements d’Oreste sont transportés à Sparte quelque temps avant l’ambassade envoyée en Lydie (HÉRODOTE, I, 68).

[4] PLUTARQUE, Quæst. Græc., 5. E. CURTIUS, Peloponnesos, I, 262. C. CURTIUS, De act. public. cura ap. Græc., p. 7.

[5] HÉRODOTE, IX, 26.

[6] Sur Olympie, v. E. CURTIUS, Peloponnesos, II, 51, et une leçon du même auteur sur Olympie (Berlin, 1852).

[7] PLUTARQUE, Lycurgue, 1. PAUSANIAS, V, 20, 1. O. MUELLER, Dorier, I, 130.

[8] Les anciens distinguent, et très nettement, entre la fondation des jeux et le commencement de la liste des vainqueurs. MAX DUNCKER, d’après CAR. MUELLER (Chronogr., 130) identifie l’olympiade d’Iphitos avec celle de Corœbos et fait de ce dernier le premier de tous les vainqueurs. UNGER (Philol., XXIX) se rallie à cette opinion qui est acceptée également par BUNSEN (Æginetica, V, 433) et, non sans hésitation, par PETER, à la date de 776, mais a été solidement réfutée par LEPSIUS (Kœnigsbuch, I, 79), par BRANDIS (De temp antiq. rat., p. 3) et, tout récemment, par H. GELZER (Rhein. Mus., XXVIII, p. 25). Il n’y a pas d’auteur ancien qui fasse de Lycurgue et de Corœbos des contemporains, et une pareille hypothèse embrouillerait encore davantage la chronologie, déjà si incertaine, de l’époque de Lycurgue.

[9] POLYBE, IV, 73 sqq. E. CURTIUS, Peloponnesos, II, 94.

[10] J’ai discuté ailleurs les objections faites à ma manière de voir par G. BUSOLT, Die Lakedæmonier und ihre Bundesgenossenschaft, et réitérées dans ses Forschungen zur griechischen Geschichte, 1880. (Cf. E. CURTIUS, Sparta und Olympia ap. Hermès, XIV [1879], p. 129 sqq.).

[11] Selon Strabon (p. 355) les 26 premières Olympiades ont été célébrées régulièrement.

[12] Ol., XXVII, 4. 669 av. J.-C. (PAUSANIAS, II, 24, 7).

[13] La XXVIIIe Olympiade (668 av. J.-C.) est la première qui ait été présidée par les Pisates, suivant Julius Africanus (éd. Rutgers, p. 11).

[14] A la date de Ol. XXX, Julius Africanus dit : Πισαΐοι Ήλείων άποστάντες ταύτην τ' ήξαν καί τάς έξής κβ', c’est-à-dire, de la XXXe à la LIIe Olympiade (660 - 572). Suivant Pausanias (VI, 22, 2) au contraire, la XXXIIe Olympiade (644) fut célébrée par Pantaléon. Il veut dire celle-là seule, tandis que les autres l’auraient été sous la présidence commune. Il s’ensuit qu’en 644, les Spartiates devaient être occupés ailleurs, ce qui s’explique si la seconde guerre de Messénie a éclaté en 645 (Ol., XXXIII, 4). Cf. CLINTON, Fast. Hellen., I, 192, et l’avis conforme de BURSIAN (De tempore quo templum jovis Olympiæ conditum sit, Jenæ, 1872).

[15] E. CURTIUS, Peloponnesos, II, 85.

[16] PAUSANIAS, VI, 22, 3-4. WEISSENBORN, Hellenika, p. 14.

[17] Sur la destruction de Pisa, voyez E. CURTIUS, Peloponnesos, II, 48. 108.

[18] E. CURTIUS, Peloponnesos, II, 48. 114.

[19] État de l’Élide (E. CURTIUS, Peloponnesos, II, p. 7).

[20] STRABON, p. 354.

[21] G. BUSOLT (op. cit.) nie absolument le protectorat de Sparte et le traité sur lequel elle se fondait. Il élimine des rapports entre Sparte et Élis toute préoccupation religieuse et veut y ait eu symmachie, mais non amphictyonie. Ses arguments sont presque tous des preuves négatives. On a expliqué (E. CURTIUS, ap. Hermès, XIV, p. 139) comment la fédération politico-religieuse, qui n’est pas, si l’on veut, une amphictyonie centraliste et complète, pourvue d’un conseil fédéral et d’assemblées régulières, s’est groupée autour de deux centres autonomes, l’un religieux, l’autre politique, Élis et Sparte.

[22] Sous le nom d’Apollon Θέρμιος, auteur des statuts olympiques (PAUSANIAS, V, 15, 7).

[23] ARISTOTE ap. HARPOCRATION, s. v. Tribunal religieux du conseil olympique (PAUSANIAS, VI, 3, 7).

[24] Pélops était à Olympie le premier des héros (PAUSANIAS, V, 13, 1) ; aussi est-ce là que le nom de Πελοπόννησος a été donné à la péninsule.