HISTOIRE DES EMPEREURS ROMAINS

 

DE PHILIPPE À GALLIEN

LIVRE UNIQUE

§ IV. Émilien.

 

 

C. VOLUSIANUS AUGUSTUS II. - ..... MAXIMUS. AN R. 1004. DE J.-C. 253.

C. ou M. Julius Æmilianus, que nous nommons simplement Émilien, ne fit que paraître sur la scène, et son règne ne dura pas quatre mois. Il doit pourtant être mis au rang des empereurs, puisqu'il fut reconnu par le sénat, qui l'ayant d'abord déclaré ennemi public sur la réquisition de Gallus, lui déféra tous les titres de la puissance impériale lorsqu'il le vit vainqueur. Émilien avait eu soin de se concilier l'affection de cette compagnie par des lettres écrites aussitôt après son élection faite en Illyrie par les soldats. Il y protestait qu'il se regardait comme le lieutenant du sénat à qui il laisserait toute l'autorité du gouvernement, se renfermant dans la conduite des armées. II promettait d'établir la paix dans l'empire en délivrant la Thrace et les provinces voisines des incursions des Barbares, et en allant faire la guerre aux Perses qui recommençaient à troubler l'Orient par quelques actes d'hostilité. On peut croire que ce langage si soumis, et qui exprimait de si bonnes intentions, avait déjà fait une favorable impression sur le sénat, et le succès décida ses suffrages.

Émilien tint parole au moins en partie. Il se conduisit dans Rome avec beaucoup de modestie et de douceur ; il avait des manières tout-à-fait populaires, qui même furent prises par les soldats pour bassesse et pour oubli de son rang. Peut-être la crainte influait-elle dans ces grands dehors de modération qu'il faisait paraître : car il ne fut pas un instant paisible ; et dès qu'il fut délivré de Gallus, il vit s'élever contre lui un rival plus redoutable en la personne de Valérien.

Ce sénateur tenait depuis longtemps un rang illustre dans Rome et jouissait d'une très-grande réputation. Gallus l'avait chargé, comme je l'ai dit, de lui amener les troupes de Gaule et de Germanie pour se défendre contre l'attaque d'Émilien. Valérien s'acquitta fidèlement de sa commission ; mais avant qu'il pût arriver, déjà celui qu'il servait n'était plus. Ce fut dans la Rhétie qu'il apprit la mort de Gallus ; et l'armée qu'il conduisait se voyant un chef d'un grand nom, et dédaignant l'obscurité de la naissance d'Émilien, saisit l'occasion qui s'offrait de faire un empereur, et proclama Valérien Auguste. Il n'est point dit si Valérien eut quelque part à la détermination des soldats, ni s'il fit des façons de résistance. Il était assez judicieux pour ne désirer que faiblement l'empire, et assez franc pour se prêter de bonne grâce et sans répugnance hypocrite au vœu de ceux qui l'élisaient. Il marcha donc à leur tête vers Rome : mais il n'eut pas besoin de combattre.

Émilien éprouva le même sort que Gallus. Ses soldats avaient plus d'estime pour le chef ennemi ; que pour leur propre empereur. D'ailleurs ils sentaient l'inégalité de leurs forces. Ils résolurent donc de se défaire d'Émilien, et ils le tuèrent à Spolette jusqu'où il s'était avancé. Valérien, vainqueur sans avoir tiré Pépée, et peut-être même sans avoir vu le camp de son adversaire, fut reconnu unanimement dans tout l'empire.