Après la conclusion du concordat et les premières querelles suscitées par sa-non exécution, Louis XI et le souverain pontife en arrivèrent rapidement à un conflit aigu provoqué par la question bourguignonne et par l'attitude violente des légats avignonnais. Ce conflit va pousser le roi à des mesures de représailles qui amèneront à leur tour la grave rupture de 1478. Au début, Sixte IV crut un instant avoir trouvé un terrain d'entente la croisade. Au lendemain du concordat le pape avait espéré que Louis XI se déciderait enfin sinon à partir pour la croisade, tout au moins à lui fournir des subsides financiers. Le roi, qui se trouvait alors à court d'argent, fit comme toujours de vagues promesses et émit même l'idée de réunir un concile à ce sujet[1]. La croisade était le vœu de Sixte IV comme de tous ses prédécesseurs. L'échec des négociations avec Louis XI qui fut presque la cause de la mort du cardinal grec, n'avait pas empêché la conclusion d'une ligue générale sous la direction du pape qui, en février, songeait à y faire participer tous les princes chrétiens[2]. Cette ligue aboutit à une expédition contre le Turc, expédition qui obtint quelques succès puisque les ambassadeurs milanais annoncèrent à leur maitre en octobre que la croisade pontificale avait pris une île aux infidèles et délivré un certain nombre de chrétiens[3]. En 1474, après l'ambassade de l'évêque de Viterbe, pour prouver sa bonne volonté à Louis XI il envoya en Bourgogne, comme légat, l'évêque de Sebenigo, Luc de Tollentis, pour exhorter le duc à la paix. Le légat devait essayer de faire cesser les querelles entre l'empire et la France, Louis XI et l'Angleterre, afin d'arriver à l'expédition contre le Turc. L'évêque devait aussi proclamer le jubilé[4]. A cette occasion, par suite de la grande affluence des pèlerins à Rome, le pape demanda au roi l'autorisation de faire effectuer des achats de blé en France, notamment dans la province d'Aquitaine où la récolte avait été très abondante, par Jean-Baptiste Centurion, marchand génois[5]. Sixte IV qui avait toujours la croisade en vue, reçut ensuite avec joie, la nouvelle, apportée par le père Guiscard, que le roi désirait la paix et il espéra alors pouvoir partir contre les Turcs[6]. Il envoya des légats à l'empereur et au duc de Bourgogne pour faire cesser toutes les querelles et l'évêque de Forli fut chargé de cette mission[7]. Le pape tint ensuite une diète à Rome pour l'expédition sainte et il invita tous les princes chrétiens à lui envoyer leurs ambassadeurs. Ces efforts n'aboutirent pas car le pape écrivit à la seigneurie florentine que personne n'avait répondu à cet appel nemo visus est ad salutem sese erigere. Cet échec semble n'avoir pas découragé Sixte IV qui songea à réunir en congrès les princes chrétiens à Rome. Il sollicita à cet effet l'intervention de Florence[8]. C'eût été, en effet, un magnifique spectacle que de voir partir enfin cette croisade tant désirée l'année même du jubilé. Voulant à tout prix se concilier le pieux Louis XI, le pape accordait des faveurs spéciales à ses sujets. Sur la prière du roi, il concédait les indulgences à tous ceux qui ne pouvaient, par suite d'empêchement, aller visiter les basiliques de Rome, à condition de verser à l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem qui se dévouait pour la foi contre les Turcs, la quatrième partie des dépenses que leur aurait occasionné le voyage de Rome[9]. Enfin, heureux de voir les hostilités entre la France et l'Angleterre suspendues, Sixte IV, toujours pour inciter le roi il la croisade, lui envoyait pour imposer la paix aux princes du royaume, Nicolas, évêque de Modène[10]. Ce légat ne fut pas, dès l'abord, agréable au roi. Il semble même, c'est le mantouan Arrivabene qui nous l'apprend, que Louis XI ne voulut en aucune façon en entendre parler[11]. Pourtant le roi finit par s'adoucir et en 1456, au mois de janvier, il lui permit d'exercer sa légation. L'évêque de Modène avait reçu les encouragements du cardinal de Pavie qui lui écrivait de Sienne Dieu te donnera la persuasion nécessaire pour exhorter les princes à cesser leurs querelles, pour pacifier le royaume affligé et pour engager le roi et ses sujets à se tourner de tout cœur contre les ennemis de la foi[12]. En août 1475, Sixte IV lui donnait pour tâche de faire conclure la paix entre le roi, les ducs de Bourgogne et de Bretagne et il l'autorisait à faire arrêter ceux qui voudraient lui susciter des difficultés[13]. Le légat avait pour mission de voir, outre ces grands personnages, le duc et la duchesse de Bourbon, le roi, et de les pousser à favoriser la croisade. Regem deprecetur, ducem amoneat, utrumque obtestatur per Xti passionem ad pacem, concordiam animos flectant, disent les instructions pontificales qui engagent très vivement l'évêque à ne pas faire fi du concours féminin. Il est aussi chargé d'enquêter sur une affaire d'usure dont se plaignait le roi et de recommander à Louis XI de ne plus faire molester Avignon par ses officiers[14]. En décembre 1475, nouvelles et semblables instructions. L'évêque priera le roi de ne pas ajouter foi aux paroles des calomniateurs qui essaient de le brouiller avec le Saint-Père, il l'incitera, au lieu de provoquer la tenue d'un concile, à aider pécuniairement la croisade, pourvoira à un certain nombre de bénéfices, relèvera Louis XI de son vœu de ne plus manger de viande, et enfin, c'est là la demande la plus importante qui va de nouveau provoquer un conflit aigu entre les deux princes, il réclamera la démission de l'archevêque de Lyon comme légat[15]. En mai 1476[16], il lui donnait toute une série de pouvoirs dans le royaume, le droit de dispenser pour l'obtention des bénéfices, pour la remise des ordres sacrés, pour la résidence. Pour être agréable au pape, le roi permit alors au nonce envoyé pour certaines grandes causes et matières de se pouvoir nommer légat et messager du pape. Il l'autorisa par lettres enregistrées au Parlement à jouir pour cette fois seulement de ses droits, mais sans déroger aux usages du royaume et sans empiéter sur les droits royaux. Par contre le légat dut jurer de ne rien entreprendre contre les libertés et franchises de l'Eglise de France[17]. Louis XI envoyait de son côté à Rome, pour négocier avec le pontife, Jean d'Avron, maître de son hôtel[18]. Sixte IV, pour lui prouver sa bonne volonté, non seulement se rendait à ses désirs au sujet de la répression de l'usure, mais encore il redonnait sur sa prière et celle de René, à l'évêque de Marseille, les droits qu'il lui avait enlevés en permettant au chapitre de se soustraire à la juridiction épiscopale[19]. Malheureusement les affaires d'Avignon et l'entrée en scène du violent cardinal de Saint-Pierre-ès-liens, Julien de la Rovère, neveu de Sixte IV, d'une part, la partialité montrée par Sixte IV dans la question bourguignonne d'autre part, précipitèrent la crise. Sixte IV montra toujours une grande tendresse pour Charles le Téméraire. Il essaya par ses conseils de le détourner de ses folles entreprises et, par son intervention auprès des cours étrangères, d'arrêter ou de diviser ses ennemis. En 1475, une ligue contre la France se forma en Italie à l'instigation de la Bourgogne. La duchesse de Savoie, Yolande, entraînée par l'ascendant que le Téméraire exerçait sur elle, crut un moment trouver en lui un puissant allié contre les ingérences importunes de son frère dans ses Etats. Elle obtint le concours du duc de Milan, Galéas Marie, qui ne déguisait pas à ce moment son hostilité contre Louis XI dont les projets sur la Provence l'inquiétaient. C'est ainsi que, grâce à Yolande de Savoie et aussi à l'habileté de Guillaume de Rochefort, négociateur du Téméraire, fut conclu le traité de Montcalier (30 janvier 1475), traité que Galéas, toujours prudent, s'empressa de ne pas exécuter[20]. Nous voyons en effet, en 1476, le duc de Milan négocier à la fois avec l'empire, la Bourgogne et la France. N'obtenant pas, comme il l'espérait malgré les instances réitérées du duc l'investiture du Milanais qu'il demandait à l'empire — et nous avons ainsi l'explication des fluctuations de sa politique —, il se tourna vers la France et proposa à Louis XI de se jeter avec lui sur le Téméraire pendant que celui-ci se trouvait aux prises avec les Suisses[21]. La même année (1475) le légat pontifical, Alexandre Nanni, évêque de Forli, faisait signer à Frédéric III et à Charles le Téméraire, d'abord la trêve de Neuss (12 juin 1475), puis le traité de Nancy (17 novembre 1475), qui étaient en théorie destinés à réconcilier tous les princes en vue de la croisade, mais qui devaient en réalité permettre au Téméraire de porter toute son attention du côté de la Suisse. En cette affaire le rôle du légat fut des plus actifs. Il se fit inconsciemment ou volontairement le complice du duc, car en le débarrassant des Allemagnes, il lui permettait de se tourner contre la France et ses alliés. La papauté ne cachait donc pas ses préférences. La partialité de Rome envers la Bourgogne apparut plus clairement encore en 1476, lorsque, après la trêve de Soleuvre conclue avec Louis XI antérieurement au traité de Nancy (13 septembre 1475), le duc se jeta sur les Suisses d'abord, sur la Lorraine ensuite. Ces traités de Soleuvre et de Nancy eurent donc, comme on l'a fait justement remarquer, des résultats tout à fait opposés à ceux qu'en attendait Charles le Téméraire. Ils le lancèrent dans des expéditions contre la Lorraine, l'Alsace, les Suisses, campagnes dont l'issue devait être fatale au grand duc d'Occident[22]. A ce moment, quoique les ambassadeurs milanais accrédités auprès du duc de Bourgogne déclarent que Louis XI se pique par les mesures qu'il prend d'intriguer tout le monde, la politique du roi est très nette[23]. Pour relever et son influence et la considération de son royaume, il rassembla de nombreuses troupes[24]. Il agit directement contre le duc en favorisant des tentatives hostiles à son autorité. Il bannit de sa cour certains seigneurs qui, après entente avec le duc de Lorraine, s'emparèrent de Vaudémont, dont la garnison bourguignonne fut expulsée[25]. En même temps il poussait de toutes ses forces les Suisses à la guerre, leur déclarant qu'il romprait toutes les trêves signées et qu'il envahirait la Bourgogne dès qu'ils auraient pris l'offensive[26]. A cet effet il expédiait de Lyon à Grenoble 40o chariots d'artillerie afin de menacer la Provence, la Savoie ou le Piémont et d'être prêt à toute éventualité[27]. En un mot, Louis XI, en s'établissant avec une forte armée à Lyon, à proximité de la Suisse, venait y attendre la fin de la lutte qui devait déterminer son attitude[28]. Il rendait ainsi courage aux ennemis de la Bourgogne, intimidait ses alliés ; séparait la Bourgogne de la Provence, effrayait le Milanais toujours hésitant et menaçait la Savoie d'une dépossession. Le Téméraire, malgré la paix de Soleuvre, se rendait très bien compte des agissements hostiles de son suzerain. Il savait qu'on ne pouvait en aucune façon compter sur lui et il aurait voulu dès ce moment commencer la guerre contre le roi pour se prémunir définitivement contre ses entreprises[29]. Malheureusement la guerre suisse ne devait pas lui en laisser le loisir et Charles le Téméraire disparut sans pouvoir réaliser son rêve la reconstitution de l'ancien royaume de Lotharingie. Il fut écrasé une première fois à Grandson le 3 mars 1476. Pour lui permettre de se relever et pour lui procurer en même temps un allié puissant, la papauté intervint aussitôt. Le légat du pape en Allemagne, Alexandre de Forli, qui désirait la pourpre et qui avait été l'un des promoteurs de la paix de Nancy, s'entremit pour amener la signature d'un traité définitif entre l'empereur Frédéric III et le duc vaincu. L'un des plénipotentiaires de l'empereur à Nancy, Georges Hesler, chanoine et archidiacre de Cologne, protonotaire apostolique et impérial, à qui Sixte IV avait aussi promis le chapeau, vint à Lausanne en avril 1476 et il contribua avec Alexandre de Forli au succès des négociations qui furent engagées avec le duc[30]. L'empereur et l'archiduc Sigismond d'Autriche offrirent à Charles leur aide contre les Suisses mais d'après les ambassadeurs milanais, ces propositions n'étaient pas sérieuses. Elles étaient destinées à capter la confiance du Téméraire pour le faire définitivement adhérer au projet de mariage autrichien[31]. La paix fut solennellement proclamée à Lausanne le jour de Pâques (15 avril 1476), après la réunion du légat, du duc et des ambassadeurs dans la cathédrale Notre-Dame. Alexandre de Forli, l'évêque de Sebenico, Luc de Tollentis, ambassadeur pontifical auprès de Charles le Téméraire, les envoyés de Frédéric III assistèrent à cette proclamation faite par Guillaume de Rochefort. La paix était conclue entre les deux princes, pour eux et leurs héritiers, à perpétuité pour leurs sujets, leurs villes et leurs seigneuries. L'empereur et Sigismond s'engageaient à ne prêter aucune assistance à ces bandes de voleurs rebelles à l'empire et hostiles à tous les princes qu'étaient les Suisses[32]. L'empereur, pour arriver à ses fins le mariage bourguignon fit déclarer par ses envoyés qu'il voulait exécuter pleinement le traité de Nancy, par lequel il s'était engagé à attaquer l'Union de Constance et avait permis au duc de recouvrer le landgraviat d'Alsace et de détruire les Suisses. L'aide prêtée par Frédéric III au duc fut d'ailleurs négative. L'empereur n'ignorait pas, en effet, les dispositions des Suisses à l'égard du Téméraire. Il avait, pour montrer ses bonnes dispositions, envoyé, en même temps qu'il expédiait des ambassadeurs à Lausanne, le comte Henri de Rechberg et Hesler à la diète de Lucerne et les avait chargés de négocier une paix entre les Suisses et le duc. Les Suisses feignirent d'accepter les propositions impériales, mais pour gagner du temps, ils ajournèrent leur réponse, demandant, les Bernois surtout, la convocation d'une assemblée générale des députés des hautes et basses ligues à Bâle. Ils purent ainsi attendre l'arrivée d'un messager de Louis XI, qui avait dû faire un détour considérable par la Lorraine et Baie. Ce messager apportait une lettre du roi datée de Lyon, encourageant les Suisses à la résistance. Louis XI leur annonçait la réunion d'une armée dans le Dauphiné, tout à proximité du théâtre de la guerre, afin de pouvoir les secourir plus facilement[33]. Le protonotaire impérial, en arrivant à Lausanne, était donc fixé sur les intentions des Confédérés et ses efforts durent tendre avant tout à tirer de Charles le Téméraire, alors malade, le plus grand nombre d'avantages pour son maitre. L'empereur ayant atteint son but, s'en tint à une neutralité prudente. Il ne secourut pas le duc, retirant tout le profit de l'alliance sans rien donner. Il méritait ainsi le jugement que portait sur lui Mathias Corvin, roi de Hongrie : C'est un homme artificieux qui s'entend merveilleusement à attacher une cloche au col de ceux qu'il redoute pour qu'ils ne puissent remuer la tête sans faire du bruit[34]. Le duc profita de la paix pour marcher aussitôt contre les Suisses, mais son expédition aboutit à un second désastre, celui de Morat (22 juin 1476). De nouveau la papauté rentre en scène. Le légat, pour diviser les ennemis de Charles le Téméraire, vient négocier avec les Suisses. Il voit les principaux membres de la ligue de Constance[35], dont deux surtout, les évêques de Bâle et de Strasbourg, l'écoutèrent par égard pour les instructions pontificales dont il était porteur. Les conférences qui eurent lieu à Bâle en novembre et décembre 1476 n'aboutirent à aucun résultat. Le légat y arriva le 6 novembre. Il avait reçu pleins pouvoirs du pape et de l'empereur pour négocier une paix générale entre tous les belligérants. Malheureusement il ne connaissait pas les intentions du duc qu'il avait quitté depuis quelque temps. Les Suisses s'en montrèrent très étonnés. L'évêque de Forli tenta d'arriver à la conclusion du traité en essayant d'épouvanter les délégués par le péril turc, mais ceux-ci réclamèrent avant toutes choses que le duc posât les armes. Le légat demanda deux ou trois jours de répit qu'on lui accorda, mais sans plus. Il déclara alors ce qu'il comptait faire. Il dit que le duc évacuerait la Lorraine et que l'on signerait une suspension d'armes, prélude d'une paix générale. Pour montrer sa bonne volonté, il envoya au Téméraire un abbé et son auditeur afin de le sonder. L'un des envoyés devait rester auprès du duc, l'autre revenir porter la réponse à Bâle. Le temps s'écoula de la sorte sans qu'on eût des nouvelles du duc, et malgré les supplications du légat l'assemblée se sépara. Alexandre de Forli écrivit d'Einsisheim pour demander l'ouverture de nouvelles négociations. Les délégués suisses délibérèrent à ce sujet à Lucerne en décembre 1476 et une nouvelle entrevue fut fixée à Bâle. Le duc de Lorraine et les autres alliés des Suisses devaient y prendre part ainsi que le légat et le docteur Hesler[36]. Ces lenteurs, calculées de part et d'autre, avaient un but précis. Comme le duc de Bourgogne se trouvait alors devant Nancy, le légat voulait lui permettre d'emporter cette ville avant qu'elle ne fût secoure et les Suisses, secrètement payés par Louis XI, voulaient faire gagner du temps au duc de Lorraine qu'ils étaient très fermement décidés à ne pas abandonner. Ces négociations multiples aboutirent donc finalement à un échec complet. Le Téméraire trouva la mort devant Nancy, le 5 janvier 1477. La papauté n'en avait pas moins joué dans cette crise un rôle de tout premier plan. Elle s'était constamment opposée aux projets de Louis XI. On comprend dès lors sans peine que le roi s'en soit alarmé et l'on s'explique aisément son attitude franchement hostile envers le Saint-Siège qu'il voulut, en l'effrayant à maintes reprises, obliger à abandonner le parti bourguignon. Quant au conflit au sujet d'Avignon, il était latent depuis longtemps déjà. En janvier 14,4, Louis XI, intervenant dans les affaires intérieures des Etats pontificaux, avait déclaré que le pape n'avait aucun droit sur la rivière du Rosne. Il avait octroyé aux habitants et au légat des lettres pour empêcher la démolition d'un paliz qu'ils avaient construit sur les rives du fleuve[37]. Le pape s'en plaignit amèrement, déclarant que les agents royaux, notamment le sénéchal de Beaucaire, qui envahissait fréquemment le territoire pontifical, infligeaient des vexations sans nombre à ses sujets[38]. Il demanda réparation de ces offenses au roi et le pria de soustraire ses sujets comtadins à la juridiction du sénéchal[39]. Le souverain pontife tient surtout à ce que les officiers royaux ne puissent pas se vanter d'envahir, sans en être réprimandés, les territoires du Saint-Siège. Sixte IV revient à maintes reprises sur ces empiétements. Le sénéchal de Beaucaire, sans avoir cure de la dignité ecclésiastique, ayant fait arrêter le procurateur du cardinal de la Rovère, il réclama sa mise en liberté et donna des ordres à l'évêque de Modène à ce sujet. Il demande, puisque le roi est en paix avec la sainte Eglise, la cessation des hostilités. Il réclame pour son neveu la possession effective de l'abbaye de Saint-Esprit-d'Avignon dont le roi l'avait pourvu[40]. Enfin, en attendant son remplacement définitif, sollicité sans doute par Julien, il substitua à l'archevêque de Lyon, pour administrer le Comtat en son absence, Constantin, évêque de Spolète. C'était un acheminement vers la révocation de la légation qui ne devait pas tarder[41]. Ce fut en février 1470 que le pape envoya en France, pour réclamer les secours du roi contre les Turcs[42], Julien de la Rovère, cet instrument fatal des maux de l'Italie, d'un naturel farouche, turbulent, inquiet. Il lui recommandait de ne lever les décimes du jubilé qu'avec l'autorisation expresse de Louis XI[43]. Ce prélat, déjà évêque d'Avignon, pour qui, en novembre 1474, Sixte IV avait érigé Avignon en archevêché, modifiant ainsi les circonscriptions ecclésiastiques de la France — ce qui amena des conflits avec l'autorité royale[44] —, fut substitué comme légat à Charles de Bourbon, le 13 mars En modifiant, par sa bulle de 1474, la circonscription d'Avignon, le pape avait par cette extension d'attributions donné à son neveu des pouvoirs plus étendus. Ces faits, les querelles au sujet d'Avignon, à propos desquelles le pontife avait fulminé une sentence d'excommunication contre les officiers royaux, le retrait de la légation, suffirent pour aigrir Louis XI contre le nouveau légat Celui-ci, qui ne partit pour se rendre en Avignon que le 19 février 1476[45], se rendait si bien compte des sentiments de Louis XI qu'il lui envoya le protonotaire de Viterbe pour savoir quel accueil lui serait fait. Le roi répondit que le cardinal pouvait venir exercer sa mission, mais qu'il ne voulait pas entendre parler d'un légat autre que l'archevêque de Lyon. Ce ne fut pas du goût de la cour pontificale, écrit Arrivabene à Mantoue[46]. Dans une autre lettre, le même diplomate, à propos de l'ambassade du doyen de Lyon, dit que le roi avait fait déclarer au pape qu'il ne voulait pas de son neveu comme légat et qu'on ne lui en parlât plus[47]. Aussi Julien fut-il très prudent. Il voulut tout d'abord faire croire qu'il n'était venu que pour visiter son diocèse, et le pape — auquel l'ambassadeur royal demanda le chapeau pour l'archevêque de Lyon — lui écrivit de ne pas trop s'avancer. Mais bientôt sa nature fougueuse reprenant le dessus, le cardinal déclara qu'étant venu pour délivrer les papalins de la tyrannie de l'archevêque de Lyon, il ne les abandonnerait point. Les Avignonnais accusaient en effet les officiers du légat de méconnaître les lois de la justice et de ne tenir aucun compte des exemptions accordées par le pape aux habitants. Aussi refusèrent-ils leur obéissance au légat en avril 1476[48]. Pour tout concilier, Sixte IV proposa de nommer un intérimaire à Avignon[49]. De son côté Louis XI tenait toujours fermement pour son parent[50]. Les princes de la maison de Bourbon — le légat était frère de Jean II, duc de Bourbon, de Pierre, sire de Beaujeu et de Louis, bâtard de Bourbon, amiral de France — s'étaient adressés au roi pour qu'il défendit l'honneur et les prérogatives de leur frère. Louis XI, qui ne désirait qu'un prétexte pour intervenir dans le conflit, envoya, pour leur complaire, 3 à 400 lances au secours du légat. Il manda le cardinal de la Rovère à Lyon. Mais l'envoyé pontifical déclara qu'il voulait auparavant s'acquitter de la mission dont le pape l'avait chargé pour le duc de Bourgogne. Le roi en conçut un vif mécontentement, car on lui laissa entendre que le cardinal ne s'entourait que de personnes acquises à Ferrand et à Charles et qu'il voulait se passer du roi pour régler le différend[51]. Louis XI écrivit alors de Saint-Symphorien au cardinal de ne pas pousser plus loin. Il l'arrêta à trois lieues de Lyon où il se rendait pour se justifier ita volente rege et non permittente ulterius ire neque retrocedere. Julien écrivit au souverain pontife pour lui expliquer sa conduite L'évêque de Lyon agit de même[52]. Louis XI, qui voyait avec dépit, au moment où il allait recueillir la riche succession provençale, l'installation à Avignon d'un personnage hostile à sa politique, qu'il soupçonnait en outre d'entretenir des intelligences secrètes avec le Téméraire et de vouloir favoriser la cession des domaines angevins au Bourguignon, ne pouvait donc que se prononcer contre le légat. Le conflit devint tellement aigu que l'armée royale marcha sur le Comtat. Louis XI eût pu justement l'annexer, La Rovère n'étant venu en Avignon que pour en chasser les Français, prendre possession de cette forteresse et, grâce à cette position inexpugnable — réalisant ainsi les désirs exprimés jadis par Paul II —, barrer au roi le chemin de la Provence. Toutefois, Avignon, contrairement à ce qu'avance M. Rey[53], fut occupé manu militari par les troupes françaises. L'un
des envoyés du duc de Milan, Petrasanta, annonça en effet de Turin (17 mai 1476) cette importante nouvelle à son
maître. Le vice-gouverneur de Nice a mandé, dit-il, au conseil de Turin, que
l'un de ses émissaires avait vu de ses propres yeux la prise de possession
d'Avignon par les gens du roi de France. Le due de Bourbon y est entré en
armes, s'est saisi du château papal et y a fait arborer les armes et les
couleurs françaises[54]. Ces menaces ne
turent pas les seules auxquelles recourut Louis XI. En 1475, il lança son
ordonnance sur la visite des bulles pontificales. Les bulles et actes de la
cour de Rome étant introduits furtivement en France au détriment des libertés
de l'Eglise gallicane, le roi adressa du Plessis-du-Parc, le 8 janvier 1475,
une ordonnance au sire de Gaucourt, conseiller et chambellan, député à
Amiens, avec charge de vérifier désormais ces pièces avant leur publication. Après avis, avons advisé, conclu et délibéré de mettre en
aucunes bonnes villes d'icelluy nostre royaume, aucunes personnes notables et
à nous seures et féables auxquelles toutes manières de gens de quelque estat
et condition qu'ils soient venans de la dicte cour de Rome seront tenus
monstrer et exhiber les lettres, bulles et austres écritures qu'ils porteront
pour estre veues et visitées et sçavoir si elles peuvent tourner à aucun
préjudice ou dommage à nous et aux privilèges, franchises et libertés de
ladicte Eglise gallicane. Le Sire de Gaucourt auquel le roi donne
pleins pouvoirs à cet effet aura le droit de retenir et d'emprisonner les
porteurs et de requérir la force publique. Louis XI choisit ce personnage
parce qu'il avait en lui une confiance particulière je
vous prie tant que je puis que vous me y servez ainsi que j'en ai en vous ma
fiance et parce qu'il savait qu'il était ung
grant clerc très versé en matière de
bénéfices[55]. En même temps, le roi défendait aux religieux de se mêler des affaires de l'Etat[56]. De plus, il astreignait les tenants de bénéfices à la résidence. Les évêques et autres bénéficiaires faisant fi des exigences des saints canons, ce qui amenait le dépérissement des bénéfices qui vont du tout à ruine et à désolation au grand détriment des âmes des fondateurs d'iceux bénéfices, le roi, par l'ordonnance du 8 janvier 1475, enregistrée au Parlement le 15 du même mois, décide que tous les tenants viennent et se retirent dedans cinq mois après la publication de ces présentes sur leurs bénéfices estant en notre dit royaume et y fassent résidence continuelle et sur ce peine de privation du temporel de leurdits bénéfices[57]. Car ainsi, dit Louis XI, nous plaist-il estre fait. Du même Plessis-lès-Tours et à la même date partirent
aussi les lettres pour la convocation d'un concile général dans le royaume.
Le roi revenait ainsi à son moyen favori d'intimidation. Il imitait en cette
circonstance la politique de son prédécesseur, Philippe le Bel, qui agitait
constamment comme un épouvantail aux yeux de Clément V, pour l'amener à céder
à ses désirs, la menace du procès à la mémoire de Boniface VIII. Fort des
canons du concile de Constance qui permettaient au roi toutes et quantes fois qu'il voudrait et verrait estre
expedient d'assembler l'Eglise universelle de cinq ans en cinq ans,
sans que le pape et les cardinaux aient d'autres droits que celui d'y
consentir, et les princes, seigneurs et gens
d'église de la chrétienté d'y obéir et comparoir, Louis XI prenant
pour prétexte les maux de la république chrétienne — les schismes, les
simonies, le Turc —, demanda au pape d'ordonner et
établir ledit concile, au moins de le consentir ainsi qu'il est tenu de le
faire. Cette proclamation royale fut affichée à Saint-Pierre de Rome.
En même temps, le roi avisait les archevêques, évêques, abbés, prélats et
autres clercs de son royaume de se tenir prêts à se réunir dans sa bonne
ville de Lyon désignée à cet effet[58]. La nouvelle fut
fort peu goûtée par Sixte IV. Arrivabene nous apprend que cette convocation
du concile de Lyon frappa presque le pape de stupeur[59]. Pour exposer ses motifs au souverain pontife, Louis XI lui envoya le doyen de Lyon. Le mantouan Arrivabene, qui nous fournit sur cette ambassade les plus curieux détails, écrit à son maitre, le 2 mai ifyjQ, que le doyen a eu avant Pâques une audience générale et sommaire de Sixte IV qui l'a vivement blâmé d'avoir toujours favorisé la Pragmatique, ce dont il a été très mécontent. Le pape reçut de nouveau l'envoyé royal après l'octave de Pâques. Le doyen exposa la question du concile et demanda qu'il se tint à Lyon, ville admirablement située pour cela, offrant toutes sortes de commodités au pape et à sa cour. Le roi passera les monts pour venir personnellement à la rencontre du Saint-Père. Le pontife communiqua ces demandes au consistoire, Le doyen obtint ensuite une audience privée au sujet de laquelle on ne sut rien par suite de la discrétion du pape. Dans un second consistoire, Sixte IV déclara que son désir le plus vif serait d'accéder à la demande du roi, mais que les conditions déplorables du temps présent et le péril turc ne le permettaient pas. Il remercia le roi de ses offres et termina son discours par de belles et douces paroles. Le cardinal des Ursins abonda dans le sens du pape, disant que le concile n'était pas en ce moment de saison, et que le pape seul avait le droit de le convoquer. L'unique devoir du roi est de pacifier son royaume pour voler à la croisade. On crut — dit Arrivabene — que le doyen allait répliquer, mais il accepta les raisons qu'on lui fournit et se contenta simplement de justifier son maitre. Louis XI ne mettra pas ses menaces à exécution. Le roi — et ceci prouve que les Italiens connaissaient aussi bien Louis XI que celui-ci les connaissait — ne fera rien. C'est une nature particulière, quand on lui résiste, il ne va pas plus loin. Aussi l'ambassadeur partira-t-il cette semaine et, conclut philosophiquement notre mantouan, on ne parlera plus de rien[60]. Louis XI, en effet, défendit bien de nouveau d'exporter de l'argent à Rome[61], mais il ne persista pas dans cette politique. Le cardinal abaissa sa superbe et l'accord fut rétabli par les diplomates provençaux, notamment par Palamède de Forbin, à l'entrevue de Lyon en 1476[62]. Le cardinal légat y arriva au milieu de mai et fut tout d'abord très mal reçu par le roi. Louis XI finit pourtant par se laisser fléchir sur les instances du roi René. Mais le représentant du pape dut renoncer à sa légation, la restituer à l'archevêque de Lyon, obliger les Avignonnais à prêter serment de fidélité au roi et promettre d'aller lui-même à Rome solliciter le chapeau pour son adversaire. Le cardinal accorda en outre la dispense pour le mariage de la fille de Louis XI, Jeanne, avec le futur Louis XII. L'entrevue de Lyon fut donc un triomphe éclatant pour la politique royale[63]. Julien de la Rovère n'eut pas à se repentir de ses concessions. Il devint alors fort en honneur auprès du roi qui le combla d'attentions. Cette faveur du légat excita les défiances de la cour romaine. Le cardinal de Pavie écrivit, en effet, à ce moment Nous nous défions de tous ces honneurs que l'on rend au légat en France, ce pourrait bien être un marché passé à notre désavantage et peut-être paierons-nous bien cher ce que l'on parait nous concéder[64]. Louis XI autorisa Julien à posséder dans le royaume tous les bénéfices dont il avait été ou pourrait être pourvu. Par lettres patentes de Lyon (15 juin 1476) il déclara à ses parlements et à ses officiers judiciaires que c'était son plaisir et vouloir que toutes les personnes qui avaient quelque affaire bénéficiale à traiter en cour de Rome s'adressassent désormais au cardinal La Rovère nostre très cher et grant amy[65]. Il lui permettait en outre d'exercer dans le royaume ses facultés de légat, quoiqu'il ne lui en eut pas demandé, comme de coutume, l'autorisation. Quant à Charles de Bourbon, qui resta légat a latere, il fut fait cardinal par Sixte IV en décembre 1476. La légation de Julien n'avait pas interrompu les négociations déjà en cours entre les deux souverains. En janvier 1477, le roi invitait l'évêque de Mende à faire publier dans son diocèse l'indulgence accordée par le pape à tous ceux qui prieraient Dieu chaque jour pour le bien de la paix et de l'union du royaume[66]. Il leur suffira de dire vers midi troys Ave Maria pour avoir 300 jours de pardon et d'indulgence pour chaque jour qu'ils le diront, ce qui se nomme l'Ave Maria de la pouex. Louis XI intervint aussi pour faire réintégrer Jean de Beauveau à Anvers et en attendant il écrivit au pape pour qu'on bailla à maistre Jehan de la Vignolle doyen de ladite église, l'administration, régime et gouvernement de l'espirituel dudit évêché[67]. Par contre, le pape se refusa à dépouiller le cardinal d'Angers encore vivant de certains bénéfices qu'il possédait dans le diocèse de Rouen au profit de clercs favorisés par le roi[68]. Il lui envoyait, sans doute pour l'adoucir, au moment de sa plus grande querelle avec La Rovère, le sénéchal de Jérusalem, comte palatin et procureur pontifical, Jean de Navarre, pour qui il réclamait bon accueil[69]. Il lui recommandait aussi le sort de la reine Caroline de Chypre[70]. Toujours pour rendre Louis XI favorable à Julien, le pape lui écrivait, en mars 1476, qu'il avait donné le monastère de Saint-Saturnin alors vacant à l'un de ses protégés, qu'il avait réduit au minimum la taxe à percevoir et qu'il agirait de même à l'avenir pour les autres bénéfices[71]. Malgré tout, le roi ne se gênait guère. Il violait, sans scrupules, les stipulations concordataires et recommandait, en mars 1477, aux religieux du Bec-Hellouin, au cas où leur abbaye viendrait à vaquer, la candidature de son confesseur, l'évêque d'Avranches, Jean Boucart[72]. Après l'entrevue de Lyon, les rapports s'améliorèrent. Pour plaire au roi, aux cardinaux et à son neveu. Sixte IV accorda à l'archevêque de Lyon l'église de Clermont (juillet 1476). Pour cela, il fut obligé de transférer l'évêque de Clermont à Cahors et le prélat de cette ville à Carcassonne. Ce dernier évêque se trouvant ainsi sans bénéfice et presque réduit à la mendicité, le pape pria le roi de le pourvoir d'un bénéfice vacant ou devant bientôt le devenir[73]. Malgré ces concessions, le roi protestait vivement auprès du sacré collège contre l'atteinte portée à son droit de patronage sur l'abbaye de Prüm par suite du rattachement de ce monastère à l'archevêché de Trèves. Il demandait que l'on confirmât la nomination qu'il avait faite de Robert, comte de Warneburk, à cette abbaye[74]. Il insistait auprès de Sixte IV pour que l'on rétablit dans la dignité d'abbé de Tournus son beau-frère, François de Savoie, qui en avait été dépossédé par le feu duc de Bourgogne[75]. Il obtenait la nomination d'un protonotaire apostolique pour obliger le duc de Bretagne à lui prêter serment sur une relique de la vraie croix conservée dans l'église de Tours[76]. Il évoquait devant le grand conseil, pour être agréable au Saint-Père, la cause d'un nommé Nicolas de la Harmant, qui lui apportait certaines lettres en forme de brief et que l'on avait, à la requête de l'évêque de Langres, enfermé à la Conciergerie[77]. Il écrivait à Sixte IV pour faire obtenir à Pierre Midi, bachelier en décrets, la première prébende vacante au chapitre de Bourges et il en informait ledit chapitre afin de peser sans doute sur sa décision[78]. Cela ne l'empêchait pas d'ailleurs d'intervenir, au mépris des droits juridiques des ordinaires, dans un procès pendant entre l'abbé de la Trinité de Vendôme et l'évêque de Chartres, Miles d'Iliers, ce prélat subtil et capcieux en matière de procès, au sujet d'un conflit de juridiction, et il était heureux, en 1478, de l'appoinctement donné par le Parlement à l'avantaige et entretenement des previllièges de l'abbé contre l'évêque[79]. Quant au pape, il faisait tous ses efforts pour être agréable au roi, au point même de mécontenter l'ambassadeur de Portugal qui partit de Rome malcontenteza. On présume, dit Arrivabene, que le pape en ce moment n'a pas voulu déplaire au roi : Multi presumero chel papa in questi tempi non havo voluto despiacere lo re de Franza[80]. Le roi, enfin, annexait les Etats bourguignons et cet accroissement de puissance ne laissait pas que d'intéresser et les Etats italiens et le souverain pontife. Arrivabene, en annonçant à son maître ces annexions et la possibilité d'un accord entre Louis XI et Maximilien, ne faisait sans doute que refléter la pensée de Sixte IV quand il disait, comprenant clairement le danger de cette union pour la péninsule, che in fino sacordino et in prejudicio de tuta italia[81]. Toute la politique menaçante du roi n'avait eu en somme qu'un seul but intimider le pontife et lui arracher de nouvelles concessions. Louis XI avait fini par s'apercevoir que le concordat limitait en partie son autorité sans restreindre bien considérablement les droits du Saint-Siège. Aussi avait-il, après 1472, recommencé sa guerre contre l'Eglise pour amener le pape à une nouvelle transaction. Malgré la convocation du concile de Lyon, il ne songeait pas à pousser jusqu'au schisme. Sa politique ne devint plus ferme et plus tracassière que parce qu'il fut à l'intérieur débarrassé du Téméraire. Il peut une fois encore orienter sa politique vers l'Italie. La conjuration des Pazzi vient lui fournir l'occasion désirée. Libre à l'intérieur, il va de nouveau porter son attention sur l'Italie, sa patrie d'élection. L'appel de Laurent lui ouvre toutes grandes les voies. Grâce au complot qui faillit jeter bas les Médicis, Louis XI va faire trembler tous les potentats italiens et le souverain pontife. En devenant, malgré Sixte IV, l'arbitre de la péninsule, il va montrer au Saint-Père qu'il est un adversaire avec lequel il faut désormais compter. |
[1] Vast. oc, 417.
[2] Milano. A. di Stato. Potenze catere, Roma, ior février 1472. Jean de Novare et Nicodemo au duc.
[3] Milano. A. di Stato. Potenze estere : Roma, 17 oct. 1472. Jean de Novare au duc.
[4] A. du Vatican. Fondo Borghese. Série I, n° 34, f° 35 (février 1474).
[5] Legrand. Pièces hist., XXIII, 2 (janvier 1475).
[6] Legrand. Pièces hist., XXIII, 13 (janvier 1475).
[7] Legrand. Pièces hist., XXIII, 184 (juin 1475).
[8] Firenze. A. di Stato. Alla Signoria. Signori. Responsive. Copiari n° 4, (12 septembre 1475).
[9] A. du Vatican. Sixti IV. Reg. 679, f° 8 et 86 (6 août, 1er mars 1475).
[10] Legrand. Pièces hist., XXIII, 347 (septembre 1475).
[11] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 1er septembre 1478. Arrivabene au marquis.
[12] A. du Vatican. Arm. XXXIX, n° 10, f° 109. (Le cardinal de Pavie à l'évêque de Modène, 29 juillet 1475.)
[13] A. du Vatican. Sixti IV. Reg. 679, f° 6, 18 (1er août 1470, mai 1476).
[14]
A. du Vatican. Sixti IV. Reg. 679, f° 3 (6 août 1475). Arm. XXXII, n° 13, f° 307. — Fondo Borghese, S.
I, n° 34, f° 145.
[15] Politicorum, Arm. II, n° 55, f° 85. A. du Vatican. — Arm. XXXII, n° 13, f° 276.
[16] A. du Vatican. Sixti IV. Reg. 679, f° 19b, 20 (7 mai 1476).
[17] Pithou. Preuves, II, p. III, 61.
[18] Buser. oc, 151.
[19] A. du Vatican. Sixti IV. Reg. 666, f° 101b (février 1476).
[20] Toutey. oc, 190-5.
[21] Gingins. Dépêches, II, 20.
[22] Toutey. oc, 287.
[23] Gingins. II, 94. Petrasanta au duc de Milan. Turin, 24 avril 1476.
[24] Gingins. II, 33. Jean Blanco au duc de Milan. Lyon, 7 avril 1476.
[25] Gingins. II, 72. Ant. d'Appiano au duo. Lausanne, 18 avril 1478.
[26] Gingins. II, 218. Panigarola au duc. Au camp de Morrens, 4 juin 1476.
[27] Gingins. II, 98. Ant. d'Appiano au duc. Lausanne, 25 avril 1476.
[28] Gingins II, 212. Ant. d'Appiano au duc. Gex, 2 juin 1476.
[29] Gingins. II, 129. Panigarola au due. Lausanne, 8 mai 1476, et II, 178. Ant. d'Appiano au duc. Lausanne, 14 mai 1476.
[30] Gingins. II, 27, 50.
[31] Gingins. II, 52. Panigarola au duc. Lausanne, 12 avril 1476. Le duc signa d'ailleurs une promesse de mariage entre sa fille Marie et Maximilien, au camp de Lausanne, le 6 mai 1476, promesse garantie par l'évêque de Forli, mais qui resta secrète jusqu'à la mort du Téméraire.
[32] Gingins. II, 59. Panigarola au duc. Lausanne, 10 avril 1476.
[33] Gingins, II, 63, notes 15 et 16.
[34] Gingins, II, 127. Il cite la lettre de Mathias Corvin adressée de Bude au Téméraire le 7 mai 1476.
[35] La ligue de Constance fut signée dans cette ville le 31 mars 1474. Les délégués des villes de la Haute-Allemagne, de la Suisse, de l'archiduc Sigismond d'Autriche et de Louis XI s'y étaient réunis le 27 mars. Une ligue de dix ans fut conclue entre les évêques de Strasbourg, de Bâle, les membres de la Basse-Union et les cantons confédérés Zurich, Berne, Lucerne, Soleure, Uri, Schwitz, Unterwalden, Zug et Glaris, pour assurer la paix et le repos de ces pays contre les courses à main armée qui les menaçaient. Si des difficultés venaient à surgir, elles devaient être soumises à l'arbitrage du roi de France.
La ligue de la Basse-Union dont il est question plus haut, avait été conclue l'année auparavant (14 mars 1473) entre Mulhouse. Strasbourg, Schlestadt, le margrave de Bade, les évêques de Strasbourg et de Bâle d'une part, et les cantons suisses Berne, Zurich, Lucerne, Zug et les pays forestiers (Schwitz, Uri, Unterwalden) d'autre part, pour se garantir contre l'ambition de Charles le Téméraire (cf. Toutey, oc.).
[36] Segesser. oc, II, 618-636.
[37] Legrand. Pièces hist., XXII, 261 (26 janvier 1474).
[38] Martène, II, 1509.
[39] Legrand. Pièces hist., XXIII, 209 (juillet 1475).
[40] Legrand. Pièces hist., XXIII, 361 (octobre 1475).
[41] Legrand. Pièces hist., XXIII, 359 (octobre 1475).
[42] A. du Vatican. Sixti IV. Reg. 680, f° 79 (février 1475). Julien de la Rovère, de Savone, neveu de Sixte IV, évêque de Carpentras, évêque puis archevêque d'Avignon (1474), cardinal de Saint-Pierre-ès-liens (1471), évêque d'Ostie, grand pénitencier, mourut pape sous le nom de Jules II.
[43] Legrand. Pièces hist., XXIV, 38 (février 1476).
[44] Rey. oc, 156. La bulle du 22 novembre 1474 qui érigea en archevêché le siège d'Avignon, avec les évêchés de Carpentras, de Cavaillon et de Vaison comme suffragants, évêchés qui ressortissaient précédemment de l'archevêché d'Arles, fut un acte d'indépendance le la curie romaine. Cette bulle était en outre attentatoire aux libertés de l'Eglise gallicane en ce sens qu'elle portait modification des circonscriptions ecclésiastiques du royaume de France sans l'avis préalable du roi. La province ecclésiastique d'Avignon devenait de ce chef indépendante de Vienne et d'Arles et le rattachement de l'évêché de Vaison au diocèse de l'archevêché d'Avignon était une diminution de l'autorité de l'archevêque de Vienne et de Lyon, primat des Gaules.
[45] Mantova. A. Gonzaga. Potenze eslere Roma, 20 février 1476. Le cardinal au marquis.
[46] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 8 avril 1476. Arrivabene au marquis.
[47] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 2 mai 1476. Arrivabene au marquis.
[48] Gingins, II, 35-6. Jean Blanco au duc. Lyon, 7 avril 1476.
[49] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 7 mai 1476. Arrivabene au marquis.
[50] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 14 mai 1476. Arrivabene au marquis.
[51] Gingins. Dépêches, II, 35.
[52] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 20 mai 1476. Arrivabene au marquis.
[53] Rey. oc, 170.
[54] Gingins, II, 186. F. Petrasanta au duc. Turin, 17 mai 1476.
[55] Lettres, VI, 39. Ordonnances, XVIII, 169. Pithou, Preuves I, 215.
[56] Mathieu. oc, XI, 474.
[57] Pithou. Preuves, I, p. II, 137. Ordonnances, XVIII, 168.
[58] Pithou. Preuves, II, p. IV, 95. Legrand. Pièces hist., XXIV, 14.
[59] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 2 mars 1476. Arrivabene au marquis.
[60] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 2 mai 1476.
[61] Mathieu. oc, XI, 474.
[62] Lecoy. oc, I, 413.
[63] Rey. oc, 180 et sq.
[64] Jacobi Papiensis : Epistolæ, 648.
[65] Ordonnances, XVIII, 196. Legrand. Pièces hist., XXIV, 144.
[66] Lettres, VI, 34.
[67] Lettres, VI, 37.
[68] Legrand. Pièces hist., XXIV, 17.
[69] Legrand. Pièces hist., XXIV, 30.
[70] Legrand. Pièces hist., XXIV, 62.
[71] Legrand. Pièces hist., XXIV, 66.
[72] Lettres, VI, 48.
[73] Legrand. Pièces hist., XXIV, 155.
[74] Legrand. Pièces hist., XXIV, 77.
[75] Lettres, VI, 109. (La lettre est datée du début de 1477, mais le roi y parle du duc de Bourgogne comme étant défunt.)
[76] Lettres, VI, 215.
[77] Lettres, VI, 227.
[78] Lettres, VI, 247.
[79] Lettres, VI, 258, 311, 339.
[80] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 25 février 1477. Arrivabene à Barbara.
[81] Mantova. A. Gonzaga. Potenze estere : Roma, 21 juillet 1477. Arrivabene au marquis.