LES MÉTÈQUES ATHÉNIENS

LIVRE PREMIER. — CONDITION JURIDIQUE DES MÉTÈQUES ATHÉNIENS.

SECTION III. — RÉCOMPENSES ET PRIVILÈGES ACCORDÉS AUX MÉTÈQUES.

Texte mis en page par Marc Szwajcer

 

 

CHAPITRE PREMIER.PRIVILÈGES DIVERS.

§ 1.

Dans un des chapitres les plus intéressants de son livre sur les Proxénies grecques,[1] M. Monceaux a montré que les Athéniens ont fait, tout autant que les Romains, l'usage le plus habile de la collation des différents privilèges dont l'ensemble constituait le droit de cité complet. En même temps que l'auteur de la République des Athéniens attribuée à Xénophon et que Démosthène nous font connaître les idées des hommes politiques d'Athènes sur ce point, les inscriptions nous en montrent l'application. A Athènes comme à Rome, l'État ne cédait les droits du citoyen que l'un après l'autre, et à titre de récompense pour des services rendus : « Les métèques étaient donc répartis en autant de catégories qu'il y avait de parties constitutives du droit de cité. » De là ces séries de décrets successifs, dont nous avons plusieurs exemples, destinés à récompenser le même personnage.

Cette politique, Athènes l'a appliquée non seulement à ses métèques, mais à tous les étrangers, simples particuliers ou peuples, ses amis ou ses alliés : c'est la proxénie qui a été, pour ces derniers, un des instruments les plus efficaces de la puissance athénienne. Mais nous n'avons naturellement à nous occuper ici que des récompenses accordées aux étrangers habitant Athènes, aux métèques.

Ces récompenses étaient de diverses sortes : les unes purement honorifiques, d'autres conférant des privilèges réels. Parmi ces dernières, l'isotélie et la proxénie, qui contenaient tout un ensemble de privilèges, avaient pour effet de créer de véritables catégories d'hommes, qu'on désignait d'un nom spécial, les isotèles et les proxènes. Les autres au contraire ne conféraient que des privilèges isolés.

Les récompenses honorifiques paraissent avoir été assez rares ; en général, on les joignait à d'autres privilèges d'un ordre plus positif. Nous ne voyons guère en ce genre qu'un décret de l'année 304/3 rendu en l'honneur du médecin public Phidias de Rhodes : en récompense des bons soins qu'il avait donnés aux Athéniens et, surtout, de ce que récemment il les avait donnés gratuitement (κα νν πιδέδωκεν αυτν δημοσιεειν δωρεάν). On lui accorda simplement des éloges et une couronne de feuillage.[2] On peut y ajouter le décret ou plutôt les deux décrets rendus en l'honneur du philosophe Zénon de Kition, et rapportés par Diogène Laërte. M. Henri Droysen en a démontré d'une façon ingénieuse l'authenticité, en prouvant que Diogène a fondu ensemble deux décrets, rendus l'un du vivant de Zénon, l'autre après sa mort.[3] Par le premier, les Athéniens, reconnaissants des services qu'il avait rendus pour l'éducation des jeunes gens, lui décernèrent des éloges, une couronne d'or et une statue de bronze ; par le second, ils décidèrent qu'il serait enseveli aux frais de la cité au Céramique. Ce dernier honneur paraît avoir été fort rare, de même d'ailleurs que l'érection d'une statue ; nous ne parlons pas, bien entendu, de l'époque romaine, où les statues seront au contraire prodiguées.

On peut rattacher à la catégorie des privilèges honorifiques un droit dont nous ne connaissons que quatre exemples se rapportant à des métèques : c'est le droit de se présenter (πρσοδος) devant le Conseil et le Peuple. On le voit accordé, pour lui et ses descendants, à un certain Epicharès, en qui nous pensons qu'il faut voir un métèque[4] ; au héraut Euclès en récompense des services qu'il avait, lors de la chute des Trente, rendus à la cause populaire[5] ; et à Nicandros et Polyzélos, à qui il est décerné en même temps que l'isotélie.[6]

Enfin nous pensons qu'il faut encore envisager de la même façon le privilège qui fut accordé aux Acarnaniens réfugiés à Athènes après la bataille de Chéronée. Le décret rendu en leur faveur spécifie qu'ils auront le droit διδναι δίκας κα λαμβάνειν καθάπερ 'Αθηναοι [7] ; cette clause ne peut avoir qu'un sens : les Acarnaniens ne relèveront pas du Polémarque, magistrat des étrangers pour certaines affaires, et toutes les actions intentées ou soutenues par eux iront devant les magistrats ordinaires ; de plus, ils pourront intenter des actions publiques. C'était là, à n'en pas douter, un privilège purement honorifique, qui n'avait d'autre but que de distinguer des métèques ordinaires ces nouveaux venus.

§ 2.

Quant aux privilèges d'ordre positif, tous peuvent se ramener à deux catégories : le droit personnel, et le droit réel, ou à ce que les Romains appelaient jus connubii et jus commercii.

Or nous ne connaissons pas un seul exemple d'πιγαμία, c'est-à-dire de jus connubii, accordée à un métèque. Même dans les décrets conférant toute une série de récompenses, il n'est jamais question de l'épigamie. Il semble donc que les Athéniens, qui distribuaient assez volontiers les avantages matériels du droit de cité, aient voulu cependant empêcher la fusion par mariages des étrangers domiciliés avec les citoyens.

Tous les privilèges accordés par décrets aux métèques athéniens relèvent donc du droit réel, non du droit personnel.

C'était, tout d'abord, le droit de propriété, c'est-à-dire le droit d'acquérir en Attique soit des terres, soit des maisons, soit l'un et l'autre à la fois. Ce privilège était fort rarement accordé seul, et faisait généralement partie de ces ensembles de privilèges qu'on appelait l'isotélie et la proxénie.

Les inscriptions ne nous font connaître qu'un seul cas où le droit d'acquérir des biens-fonds en Attique ait été accordé à des métèques sans être accompagné d'autres privilèges. Il s'agit du décret récompensant les étrangers qui avaient pris part au complot contre Phryuichos, l'un des Quatre-Cents, et dans lesquels M. Foucart a reconnu, comme nous l'avons dit, des περίπολοι. Deux d'entre eux reçurent le droit de cité, et les quatre autres le titre de bienfaiteur et le droit illimité d'acquérir en Attique des terres et des maisons : κα γκτησιν εναι ατος μπερ 'Αθηναίοις, κα γηπέδων κα οκίας, κα ικησιν Άθνησι.[8]

Dans tous les autres cas, l'γκτησις est toujours accompagnée d'autres privilèges de même nature.

Un des plus recherchés de ces privilèges était l’atélie, ou exemption, partielle ou totale, des divers impôts qui pesaient sur les métèques.

C'était, tout d'abord, l'exemption de la taxe particulière des métèques, du metoikiou. Le plus ancien exemple que nous en ayons est un fragment de décret du quatrième siècle, conférant l'atélie du metoikion à un Sicilien et à ses descendants : εναιΑ…..τ Σικελιώτηι τλειαν το μετοικίου οκοντι Άθνησι ατ κα κγόνοις.[9]

C'est le seul texte mentionnant l'atélie du metoikion que M. Schenkl reconnaisse s'appliquer à un métèque, tandis qu'il n'admet pas que trois autres décrets du même genre comportent la même conclusion.[10] C'est d'abord le décret rendu, en 338/7, en faveur des Acarnaniens qui avaient combattu avec les Athéniens à Chéronée : on leur donne, outre le droit illimité d'γκτησις (de maisons seulement, non de terres), l'exemption du metoikion s'ils viennent habiter Athènes, οίκοσιν Άθνησιν τλεσιν μετοικίου, et d'autres privilèges encore[11] ; tous ces privilèges seront valables jusqu'à ce qu'ils retournent dans leur patrie, ως ν κατλθωσιν.

Le second décret, très mutilé, devait conférer les mêmes privilèges à des Thessaliens réfugiés à Athènes après la guerre Lamiaque ; on y reconnaît l'atélie du metoikion, et la clause ως ν κατλθωσιν.[12]

Le troisième, encore plus mutilé, était un décret semblable, rendu sans doute dans des circonstances analogues, et où figure également l'exemption du metoikion.[13]

Nous ne voyons pas pourquoi M. Schenkl n'admet pas que ces textes s'appliquent à des métèques[14] ; d'après lui, ces étrangers, réfugiés à Athènes par suite de circonstances extraordinaires, n'étaient pas des métèques, et on leur avait conféré des privilèges spéciaux qui, sans les égaler aux citoyens, les mettaient au-dessus des métèques. Nous ne le contestons nullement ; mais cela n'empêche pas que ces étrangers, tant qu'ils restaient à Athènes, ne pouvaient être que des métèques ; et la preuve en est précisément qu'on les exemptait du metoikion, mais qu'on les soumettait aux eisphorai. Il faut en conclure seulement que l'exemption du metoikion devait être accordée fort rarement aux métèques fixés héréditairement à Athènes, et qu'on le réservait surtout pour les cas extraordinaires, comme don de bienvenue pour les étrangers amis d'Athènes qui pouvaient être forcés de s'y réfugier à un moment donné.

C'est par une faveur du même genre que le décret rendu entre 375 et 365 en l'honneur du roi de Sidon Straton dispensait du metoikion les Sidoniens qui viendraient s'établir à Athènes pour quelque temps[15] : il s'agissait, nous le démontrerons ailleurs, de permettre à ces négociants de ne pas être inscrits, quelle que fût la durée de leur séjour, sur la liste des métèques ; cette inscription n'aurait en effet comporté pour eux que des charges sans bénéfices, puisqu'ils n'avaient pas l'intention de se fixer à Athènes.

On voit en somme que, si l'on excepte ces métèques que l'on peut appeler des métèques d'occasion, l'atélie du metoikion était fort rare. Et cela se comprend : nous avons essayé de montrer la vraie nature de cette taxe, et comme quoi elle était nécessaire pour contrôler l'état civil des étrangers fixés à Athènes. A vrai dire, on s'étonne plutôt, non de ce que l'atélie du metoikion ait été si rare, mais de ce qu'on l'ait conférée parfois à des métèques fixés définitivement à Athènes, et dont cependant on ne voulait pas faire des isotèles.

L'atélie des liturgies paraît avoir été plus fréquente peut-être que celle du metoikion, mais bien rare encore. Démosthène, dans le discours contre Leptine, dit formellement qu'il pouvait y avoir exemption des liturgies pour les métèques comme pour les citoyens.[16] Il n'y a d'exception, ajoute-t-il, que pour la triérarchie (qui n'intéresse pas les métèques) et pour les eisphorai levées en vue de la guerre, dont personne ne peut être exempté, pas même les descendants d'Harmodios et d'Aristogiton.

Mais en même temps Démosthène affirme que ces exemptions étaient très rarement accordées ; Leptine, qui demandait qu'on supprimât toutes les atélies, prétendait que, notamment pour les liturgies des métèques, on ferait ainsi rentrer parmi les contribuables beaucoup de dispensés. Démosthène au contraire affirme que ces métèques exemptés des liturgies ne sont pas plus de cinq, ou de dix au maximum.[17] Il est évident que Leptine et Démosthène exagèrent chacun dans leur sens ; mais certainement le nombre des métèques atèles était très restreint, comme l'était le nombre des citoyens atèles mêmes. On sait assez avec quelle peine les Athéniens se décidaient à rayer de la liste des chorèges l'un de ceux que leur fortune mettait en état de remplir cette charge : il s'en fallait même de beaucoup que tous les proxènes eussent l'atélie : « Autre chose est d'être proxène, autre chose d'obtenir l'atélie, » dit Démosthène.[18]

En fait, sur huit cas d'exemptions des liturgies que nous connaissons pour le quatrième siècle, six se rapportent à des proxènes[19] ; un autre à Leucon, prince du Bosphore, pour qui l'atélie ne pouvait guère avoir qu'une valeur honorifique ; le dernier enfin, à Astycratès de Delphes, qui seul était citoyen, et citoyen de date récente.[20] Les textes ne nous font donc connaître aucun métèque proprement dit qui ait joui de ce privilège.

Démosthène, dans le passage où il rappelle l'atélie accordée à deux de ces proxènes, deux Byzantins qui avaient livré leur ville à Thrasybule, emploie l'expression τλειαν πάντων, que l'on retrouve dans un décret de proxénie.[21] Que faut-il entendre par là ? il ne peut s'agir, au moins dans le second de ces textes, de l'exemption du metoikion, puisque les proxènes en étaient exempts de droit. Il s'agit, comme l'a reconnu M. Monceaux,[22] de l'exemption des liturgies et de l'eisphora. Nous en trouvons la preuve dans le décret en faveur des Sidoniens, qui est à ce point de vue de la plus haute importance : il énumère en effet toutes les charges qui pouvaient peser sur les métèques, en stipulant que les Sidoniens établis à Athènes seront exempts de toutes. Or ces charges sont désignées ainsi : μ ξεναι ατος μετοίκιον πράττεσθαι, μηδ χόρηγον [23] καταστσαι, μηδ'εσφορν μηδεμίαν πιγράφειν.

Si nous n'avions que ce texte, on ne pourrait en conclure qu'il existait pour certains métèques une atélie de l'eisphora, puisque précisément ces Sidoniens sont soustraits à la condition des métèques. Mais les deux autres textes que nous avons indiqués le prouvent : il est certain que quelques métèques, on récompense de grands services à coup sûr, joignaient à l'exemption des liturgies celle des eisphorai.

Or, nous l'avons déjà dit, Démosthène affirme de la façon la plus absolue que nul n'était exempt des eisphorai, pas plus que de la triérarchie,[24] c'est-à-dire des liturgies militaires. Et en fait, nous ne connaissons aucun citoyen qui en ait été exempté. Il faut donc conclure que sur ce point les métèques pouvaient être plus favorisés que les citoyens eux-mêmes, tout en reconnaissant que cette faveur exceptionnelle devait être extrêmement rare. Dans tous les cas, les métèques, pour ce qui est de l'exemption des liturgies, étaient traités tout aussi favorablement que les citoyens, et les exemptés paraissent avoir été aussi nombreux, ou, si l'on veut, aussi peu nombreux, chez les uns que chez les autres.

En résumé, toutes ces faveurs, éloge et couronne, droit de propriété, exemption du metoikion et des liturgies, pouvaient s'accorder ensemble ou séparément : dans l'un comme dans l'autre cas, elles n'avaient pas pour résultat de constituer une classe d'hommes particulière, que l'on pût désigner d'un nom spécial.

 

CHAPITRE II.L’ISOTÉLIE.

§ 1.

On a beaucoup discuté sur la nature exacte de l'isotélie, et, à vrai dire, les auteurs anciens, les lexicographes au moins, ne s'accordent guère là-dessus. On peut répartir en trois catégories les définitions qu'ils donnent de l'isotélie et des isotèles.

Pour les uns, les isotèles sont des étrangers faits citoyens : Ίσοτελες μν λέγει τος ξένους τος τετυχηκτας τς σης τιμς τος πολίταις [25] ; — Ο κατ ψήφισμα μεταβαίνοντες ες τ τν δημοποιήτων δίκαιον, σοτελες νομάζοντο.[26]

Nous savons ce qu'étaient les δημοποίητοι auxquels Suidas assimile les isotèles : c'étaient des étrangers faits citoyens par décret du peuple, et qui jouissaient de tous les droits politiques, si ce n'est que l'accès à l'Archontat et aux sacerdoces leur était fermé.[27]

Pour montrer l'erreur d'Ulpien et de Suidas, il suffit de dire que nous savons d'une façon certaine que les isotèles relevaient de la juridiction du Polémarque.[28] Or le Polémarque était le juge des étrangers seuls, mais de tous les étrangers, ou, pour mieux dire, de tous les non citoyens.

Pour d'autres lexicographes, les isotèles sont des étrangers admis à participer à tous les droits des citoyens, sauf aux droits politiques : Ίσοτελ εκάλουν τν τν νόμων κα πάντων τν πραττομένων μετέχοντα ξένον ο παλαιο, πλν ρχς.[29] — Ό ξένος μετέχων τν νόμων κα τν πραττομένων πάντων πλν ρχς.[30]Ίσοτελς, τετιμημένος μέτοικος ν τ σ τάγματι τος πολίταις, κα τ μν μετοίκιον μκ τελών, πάντα δ χων τ ατ τος πολίταις, πλν το ρχειν.[31]

A la vérité, les mots ρχ et ρχειν ne doivent pas être pris dans le sens étroit de « l'accès aux magistratures, » mais aussi, de participation à l'Assemblée du peuple et aux tribunaux ; autrement dit, ils désignent les droits politiques dans toute leur étendue, comme le prouve un passage d'Aristote.[32]

Néanmoins, la définition est fausse encore. Non seulement les isotèles ne jouissent d'aucun des droits politiques, mais ils n'ont même pas l'épigamie avec les citoyens, et, comme nous le verrons, s'ils peuvent avoir le droit de posséder des biens-fonds en Attique, ils ne l'ont pas nécessairement.

Et en effet, ce n'est pas en cela que consiste l'isotélie, et d'autres passages des lexicographes la définissent plus exactement : Ίσοτελες * μέτοικοι τ μν ξενικ τέλη μ τελοντες, τ δ σα τος στος τελοντες.[33]Μέτοικοι σα τος στος τέλη διδντες [34] : les isotèles sont des métèques dispensés des taxes particulières aux métèques, et assimilés pour l'impôt aux citoyens.

L'étymologie même du mot confirme cette explication : il s'agit de l'égalité devant les charges et non devant les droits. Les isotèles ne sont point des citoyens : ils restent métèques et ne diffèrent des autres métèques que par la nature des impôts qu'ils payent. Les expressions très nettes dont se sert l'auteur des Lex. Seguer., τ μν ξενικ τέλη μ τελοντες nous permettent d’affirmer que les isotèles étaient exempts de tous les impôts qui frappaient les métèques. C'est ce qui est d'ailleurs confirmé par d'autres textes : ainsi Lysias, cité par Harpocration, disait que l'isotélie comportait l'exemption du metoikion (το μετοικίου φεσις),[35] et Harpocration ajoute, en citant cette fois Théophraste, que les isotèles étaient aussi exempts des autres taxes des métèques, κα τν λλων ν πραττον ο μέτοικοι φεσιν εχον. Ce qu'il faut entendre par là, c'est évidemment la taxe des commerçants en détail, et les liturgies des métèques ; ils participaient donc aux liturgies des citoyens, σα τος στος τέλη διδντες.

En un mot, l'isotélie nous apparaît comme un privilège financier et nullement politique, c’est ainsi, et ainsi seulement, que peut s'expliquer le mot σοτέλεια dans le décret rendu en 363/2 en faveur d'Astycratès de Delphes et de ses dix compagnons, qui avaient été expulsés de Delphes par les Amphictyons, comme partisans d'Athènes, et qui s'étaient réfugiés à Athènes. Il y est stipulé qu'Astycratès sera fait citoyen et jouira de l'atélie, et que ses compagnons recevront l'isotélie καθάπερ Άθηναίοις [36] ; cette clause, rapprochée de celle qui confère l'atélie à Astycratès, ne peut s'appliquer qu'aux charges financières.

Il y avait cependant dans l'isotélie autre chose encore ; elle constituait, comme la proxénie, en même temps qu'un avantage matériel, un honneur. Le titre d'isotèle était un titre honorifique : la preuve en est que ceux qui en étaient revêtus n'oubliaient jamais de le faire figurer sur les pièces officielles. Ainsi Théodotos, qui dans l'affaire de Chrysippos contre Phormion avait servi d'arbitre privé, est désigné par son titre d'isotèle.[37] De même, les isotèles qui remplissent une charge quelconque dans une thiase ou un érane font toujours mention de leur titre : ainsi Æschylion et Chabrias, l'un greffier de l'érane de Zeus Sôter, l'autre hiérope du temple d'Artémis Syriaau Pirée sont qualifiés d'isotèles.[38] Sur les inscriptions funéraires aussi, ce titre suit toujours le nom du métèque qui en était revêtu, tandis que sur aucune inscription funéraire on ne voit figurer la qualité de métèque.[39] Enfin, même dans les actes officiels de la cité, on mentionnait toujours le titre des isotèles : c'est ainsi que sur la liste des contribuables qui ont versé une epidosis lors de la guerre de Chrémonide, figure le nom de Sosibios, isotèle.[40] Parfois même, le mot σοτέλεια figurait en tête du décret conférant ce privilège, et en grandes lettres comme cela se faisait pour les décrets conférant la proxénie ou le droit de cité.[41] Le titre d'isotèle remplaçait donc, dans les pièces officielles, la mention par laquelle on désignait d'ordinaire les métèques, c'est-à-dire l'indication du dême dans lequel ils étaient domiciliés, indication qui ne figure jamais pour les isotèles.[42]

Ajoutons enfin que l'isotélie comportait encore autre chose : comme la proxénie, il semble bien qu'elle ait conféré régulièrement un minimum d'avantages et d'honneurs, auxquels pouvaient s'en ajouter d'autres, de nature variable. Ce sont ces clauses facultatives qu'il nous reste à examiner en détail, pour nous rendre un compte exact de ce qu'était l'isotélie.

§ 2.

Tout d'abord, l'isotélie était-elle héréditaire, et les avantages accordés à un isotèle passaient-ils nécessairement à ses descendants ?

On a cru longtemps qu'il en était ainsi pour la proxénie, ce que les inscriptions ont démontré être inexact.[43] Or ce qui est vrai de la proxénie l'est aussi de l'isotélie. Ce qui montre qu'elle n'était pas nécessairement héréditaire, c'est que dans les décrets la conférant figure parfois une clause spéciale, en vertu de laquelle les descendants de l'isotèle jouiront des mêmes privilèges que lui. C'est ainsi que le décret rendu en l'honneur d'Euxénidès de Phasélis stipule qu'il sera fait isotèle, κα ατν κα κγόνους.[44] Si on le stipule formellement, c'est évidemment parce que l'isotélie n'entraînait pas de droit cette conséquence, qui est loin de figurer d'ailleurs sur tous les décrets de cette nature.

Les inscriptions funéraires nous fournissent un exemple de cette hérédité de l'isotélie : une stèle du Céramique, qui paraît dater du milieu du troisième siècle, contient les noms de Γρυς σοτελς, de Νικώ sa femme, et de Θεόφιλος σοτελς, qui est évidemment son fils.[45]

L'hérédité était donc un privilège spécial, indépendant de l'isotélie, et qui pouvait s'y ajouter.

Quant aux avantages financiers, qui, nous l'avons dit, étaient la partie la plus importante de l'isotélie, ils n'étaient pas les mêmes pour tous les isotèles : là aussi il y avait un minimum, auquel pouvaient s'ajouter des avantages accessoires. Il faut, pour délimiter exactement les privilèges des isotèles à ce point de vue, les rapprocher des atèles et des proxènes.

Les isotèles n'étaient nullement exempts des liturgies : la preuve en est que la loi proposée par Leptine devait enlever l'immunité des liturgies à ceux d'entre eux qui l'avaient reçue, comme aux citoyens et aux métèques atèles.[46] Leur seul privilège devait consister en ce qu'ils étaient inscrits, pour ce service, sur les listes des citoyens, et non sur celles des métèques. Ainsi il faut admettre, à défaut de renseignements précis, qui nous manquent, que les isotèles chargés d'une chorégie avaient à diriger un chœur de citoyens et non de métèques, et que dans les concours d’εανδρία et d' εοπλία ils concouraient avec les citoyens, et non ν θνεσι. C'est ce qui explique que les Athéniens aient plus facilement accordé l'isotélie que l'atélie : par exemple, lorsque Astycratès et ses compagnons furent reçus à Athènes, lui seul obtint, avec le droit de cité, l'atélie, et on se borna à donner aux autres l'isotélie.

Il est plus difficile de voir nettement les rapports de l'isotélie avec la proxénie. Il est certain que, parmi tous les privilégiés non citoyens, les proxènes occupaient le premier rang : les auteurs citent toujours les étrangers habitant Athènes dans le même ordre : métèques, isotèles, proxènes.[47] Il n'est néanmoins pas certain que les proxènes aient joui, en vertu de leur titre même de proxènes, de tous les privilèges attachés à l'isotélie. Un décret conférant l'isotélie s'appliquerait, d'après la restitution de M. Köhler, à un proxène.[48] M. Monceaux refusait d'admettre cette restitution, parce que le texte est unique et surtout parce que les proxènes, d'après lui, devaient avoir a priori l'isotélie, et que c'eût été conférer le moins à qui avait le plus.

Mais un nouveau texte, publié par M. Cavvadias, est venu confirmer le premier : c'est un fragment de décret en faveur d'un personnage dont le nom manque, qui lui confère, pour lui et ses descendants, lorsqu'ils habiteront Athènes, la proxénie, l'évergésie, l’isotélie et le droit de propriété.[49]

Les proxènes étaient donc rangés, pour les liturgies et les eisphorai, parmi les métèques, et non parmi les citoyens. Et cela n'a rien de bien surprenant, si l'on songe que cette disposition n'avait guère de portée pratique pour les proxènes, qui étaient généralement absents d'Athènes. Ajoutons enfin que l'on conférait bien parfois la proxénie à un étranger après l'avoir fait citoyen, ce qui est assurément plus surprenant.[50]

Pour ce qui est des eisphorai, il n'y avait pas plus d'immunité pour les isotèles que pour les métèques ou les citoyens. Seulement les isotèles, comme pour les liturgies, étaient inscrits pour le payement des eisphorai sur les listes des citoyens, et non sur celles des métèques. C'est ce qu'on exprimait ainsi : τς εσφορς εσφέρειν μετ 'Αθηναίων.[51] Ils faisaient donc partie des symmories de citoyens. Il est vrai que sur deux des quatre décrets où figure cette formule, le mot d'isotélie est absent ; il semble que cette clause relative à l'eisphora soit là détachée de l'isotélie proprement dite. Mais on doit en conclure que l'isotélie la comprenait nécessairement, puisque pour tous les impôts les isotèles étaient assimilés aux citoyens.

Une formule analogue se trouve aussi quelquefois appliquée au service militaire : les décrets rendus en faveur des Thessaliens réfugiés à Athènes après la guerre Lamiaque, et en faveur d'Eu-démos de Platées, stipulent le droit de « faire campagne avec les Athéniens, » στρατεύεσθαι ατν τς στρατιάςμετ 'Αθηναίων [52] ; le décret en faveur de Nicandros et Polyzélos renferme la même clause, sous une forme un peu différente : τς στρατείας στρατεεσθαι ταν κα 'Αθηναοι στρατεύωνται.[53] Dans les deux derniers de ces décrets, cette clause est jointe à la clause précédente, relative au payement de l'eisphora. On a voulu voir dans cette formule, στρατεύεσθαι τς στρατείας κα τς εσφορς εσφέρειν μετ Αθηναίων, la formule même de l'isotélie.[54] Nous ne croyons pas que cela soit exact : l'isotélie devait donner aux isotèles l'égalité avec les citoyens devant tous les impôts, et l'égalité devant l'eisphora seule devait n'être, comme l'atélie du metoikion, qu'une partie détachée de l'isotélie. Il devait en être de même de l'égalité devant le service militaire, qui devait faire aussi partie intégrante de l'isotélie, mais qui pouvait aussi en être détachée, comme privilège spécial. C'est le décret public par M. Cavvadias qui nous donne la formule la plus complète de l'isotélie : égalité avec les citoyens devant les impôts ordinaires, les eisphorai, et le service militaire :

[κ]α τ[ς] εσφορς εσφ-

έρειν κα τ τέλη τελεν καθάπ-

ερ 'Αθηναοι κα τς στρατείας

στρατ[εύ]εσθαι μετ 'Αθηναίων.

Et encore est-il à remarquer qu'il n'est pas fait mention des liturgies.

Le droit de propriété faisait-il aussi nécessairement partie de l'isotélie ? On l'admet généralement,[55] en se fondant sur ce que Lysias, qui était isotèle, possédait des maisons. Mais cela ne prouve rien : nous avons vu l’γκτησις conférée par décret, quoi qu'en dise Böckh, à de simples métèques[56] ; d'autre part, le décret en l'honneur d'Euxénidès de Phasélis lui confère à la fois, pour lui et ses descendants, l'isotélie et le droit d'acquérir une maison à Athènes[57] ; enfin le décret publié par M. Cavvadias et le décret on l'honneur de Nicandros et Polyzélos confèrent aux personnages honorés, pour eux et leurs descendants, l'isotélie et le droit de posséder terre et maison.[58]

C'est donc que l'isotélie ne comportait pas forcément ce droit.

Et, à ce propos, personne ne semble avoir remarqué que, si l'isotélie n'était pas toujours héréditaire, l’γκτησις l'était forcément dans une certaine mesure. Non pas que les descendants de ceux qui en avaient été gratifiés eussent par cela même le droit d'acquérir des terres ou des maisons nouvelles : il fallait pour cela une clause spéciale, conférant ce droit à titre héréditaire.[59] Mais ils continuaient certainement à jouir en toute propriété des acquêts faits par leurs ascendants. La discussion à laquelle se livre Böckh pour prouver que Lysias était isotèle avant l'anarchie est donc inutile et ne prouve rien : il pouvait fort bien avoir hérité ses maisons de son père Képhalos, qui en possédait à coup sûr, qu'il fut isotèle ou qu'il eût simplement reçu le droit de propriété.[60]

On pouvait donc conférer l'isotélie sans l’γκτησις, comme on pouvait conférer l’γκτησις sans l'isotélie. Seulement il est probable que le plus souvent l’γκτησις était accordée en même temps que l'isotélie, avec ou sans restrictions.

Quant à l'épigamie, nous ne savons sur quoi se fonde M. R. Dareste pour affirmer que les isotèles en jouissaient, ainsi que de l’γκτησις.[61] Nous pouvons affirmer qu'aucun texte ne fait mention de ce privilège, pas plus pour les isotèles que pour les simples métèques.

En résumé, l'isotélie nous apparaît comme un ensemble de privilèges déterminés nettement, ou, pour mieux dire, comme comprenant un minimum invariable de droits, auxquels pouvaient s'en joindre d'autres. Mais les divers privilèges dont elle se composait essentiellement pouvaient être eux aussi accordés séparément, auquel cas ceux qui en étaient gratifiés n'entraient pas dans la classe des isotèles.

Il nous reste maintenant à montrer ce que représentaient exactement les privilèges accordés aux isotèles : car, étant admis ce que nous avons dit des obligations financières et militaires des métèques, on ne voit pas bien au premier abord quel intérêt les isotèles pouvaient avoir à « payer les eisphorai et faire campagne avec les Athéniens. »

§ 3.

Pour ce qui est des finances, nous avons essayé de démontrer que, ni pour les eisphorai, ni pour les liturgies, les métèques n'étaient pas plus chargés que les citoyens. L'avantage accordé aux isotèles consistait donc simplement en ceci : d'abord, ils étaient exempts du metoikion et des ξενικά ; ensuite, ils étaient portés, pour les eisphorai et les liturgies, sur le rôle des citoyens et non sur celui des métèques.

Pour le service militaire, que faut-il entendre par στρατείας στρατεύεσθαι μετ 'Αθηναίων ? Il n'est pas possible d'admettre que les isotèles aient fait partie de l'armée active et pris part aux expéditions hors de l’Attique : l'isotélie dans ce cas aurait bien été encore un honneur, si l'on veut, mais aurait entraîné des charges effectives que l'État n'avait pas plus d'intérêt à imposer aux isotèles que ceux-ci à les rechercher. Ce qu'il faut entendre par là, c'est que les isotèles servaient dans les rangs des citoyens et confondus avec eux, au lieu de faire partie des bataillons de métèques, mais tout en continuant, comme les métèques, à ne faire partie que des bataillons de l'armée territoriale. Nous croyons qu'il faut voir des isotèles dans les deux γγραφοι de la liste des soldats athéniens tués en 425/4, dont nous avons déjà parlé. Ce document nous montre que les isotèles n'étaient pas absolument assimilés aux citoyens, puisqu'ils n'étaient pas rangés, comme eux, par tribus, mais simplement inscrits « à la suite. »

C'est-à-dire que sur tous ces points, eisphorai, liturgies et service militaire, l'isotélie nous apparaît comme un privilège purement honorifique ; c'est un honneur de « combattre avec les Athéniens » et « de payer les eisphorai avec les Athéniens. » Le seul privilège positif qu'elle conférât était donc l'exemption du metoikion et des ξενικά, c'est-à-dire assez peu de chose en somme. Seulement les isotèles étaient, de par leur titre même, plus aptes, en quelque sorte, à recevoir de la cité d'autres avantages, et il n'est pas douteux que l’γκτησις par exemple ne leur ait été accordée plus facilement qu'aux simples métèques.

Pourquoi donc l'isotélie paraît-elle avoir été si recherchée ? Pour la même raison qui faisait que les citoyens riches tenaient à honneur de s'acquitter des triérarchies et des chorégies, dont ils ne retiraient aucun profit matériel, puisque souvent ils s'y ruinaient.

Il s'agissait, pour les uns comme pour les autres, d'obtenir de la cité quelque distinction honorifique, éloges et couronne pour les uns, isotélie pour les autres, qui les distinguât du commun des Athéniens ou du commun des métèques. Pour les isotèles, ne plus payer le metoikion, c'était quitter ostensiblement la classe des métèques, dont le metoikion était comme le signe sensible, pour se rapprocher de la classe des citoyens : c'était en effet sur les listes des citoyens qu'ils figuraient, au moins pour deux choses, les contributions et le service militaire. Mais, ce qui achève bien de montrer que les isotèles au fond restaient des métèques, et ne différaient d'eux que par certains avantages plus honorifiques que positifs, c'est que leur situation devant les tribunaux athéniens ne changeait pas. Devant le Polémarque, dit Aristote, vont les affaires privées des métèques, des isotèles et des proxènes.[62] C'est à tort que Meier et Schömann affirment que les isotèles pouvaient agir devant les tribunaux absolument comme les citoyens[63] : ils s'appuient sur une clause du décret relatif aux Acarnaniens, διδναι δίκας κα λαμβάνειν καθάπερ 'Αθηναοι.[64] Mais On ne peut appliquer à tous les isotèles cette clause, qui apparaît ici comme une faveur spéciale pour des étrangers venus à Athènes en fugitifs et qui n'avaient pas l'intention de s'y fixer définitivement.

Ainsi, ni les avantages conférés de plein droit par l'isotélie, ni ceux qui s'y ajoutaient souvent, ne changeaient au fond la condition légale des isotèles, qui à vrai dire ne cessaient pas d'être des métèques. Par exemple, il ne paraît pas que les isotèles aient joui, en dehors de leurs prérogatives financières et militaires, de droits particuliers dans les autres branches de l'administration athénienne. Nous avons vu un isotèle, Théodotos, remplir les fonctions d'arbitre privé[65] ; mais tout porte à croire que les métèques pouvaient les remplir aussi bien que les isotèles.[66] Quant au droit qu'avaient les isotèles, et que n'avaient pas, à ce qu'il semble, les métèques, de servir de mystagogues pour l'initiation aux mystères d'Eleusis,[67] c'était encore un privilège tout honorifique, et qui ne modifiait en rien leur condition légale.

Si l'on ajoute enfin que le nombre des isotèles était fort restreint (il n'y a que douze épitaphes d'isotèles, sur un total de 2.663 épitaphes trouvées en Attique), et qu'il est en somme fort peu question d'eux dans les auteurs et les inscriptions, on reconnaîtra que cette classe d'hommes n'a jamais eu une grande importance. Les isotèles n'étaient bien, comme le dit Sainte-Croix,[68] que les premiers des métèques, et tout ce que nous savons des métèques s'applique également à eux.

§ 4.

L'isotélie ainsi définie et délimitée, il reste à montrer encore comment et à qui elle se donnait.

Il est certain que la qualité d'isotèle ne pouvait s'obtenir sans l'intervention de l'autorité publique. Les lexicographes sont d'accord pour nous présenter l'isotélie comme une récompense décernée par le peuple aux métèques qui l'avaient méritée : τιμή τις διδομνη τος ξίοις φανεσι τν μετοίκων, dit Harpocration [69] ; — γένετο δ τοτο τος μετοίκοις π τς πόλεως, ος εδόκουν ε πεποιηκναι τ κοινόν, dit Suidas [70] ; — enfin Pollux, précisant, dit qu'elle est conférée par décret : ος ν τοτο κ ψηφίσματος πρξ.[71]

Nous avons eu déjà l'occasion de citer plusieurs de ces décrets conférant l'isotélie à des métèques ; le plus intéressant par ses considérants, sur lesquels il convient d'insister, est le décret rendu vers l'an 200 avant notre ère en l'honneur d'Euxénidès de Phasélis [72] : « Attendu qu'Euxénidès s'est montré bienveillant envers le peuple des Athéniens, qu'il a acquitté régulièrement toutes les eisphorai que le peuple a imposées aux métèques ; que dans la dernière guerre il a volontairement équipé douze matelots ; que récemment il a fourni gratuitement des cordes pour les catapultes ; qu'il s'est acquitté avec zèle de tout ce que lui ont ordonné les stratèges et les taxiarques, et qu'en tout il se montre l'ami du Conseil et du Peuple athénien… »

Les motifs allégués sont de deux sortes : d'abord des motifs généraux et assez vagues, puis d'autres plus précis, telle que la régularité à payer les eisphorai et le zèle à fournir des epidoseis. C'est là le ε πεποιηκναι τ κοινόν dont parle Suidas, et la récompense, τιμή, est décernée par décret du peuple, δοξεν τ δήμ, décret qui naturellement devait être précédé d'un probouleuma du Conseil.

L'isotélie ne se donnait pas exclusivement aux métèques, mais c'est surtout à eux qu'elle se donnait. Outre l'exemple d'Euxénidès, nous avons encore celui d'Hermaeos ; quoique le décret lui conférant l'isotélie soit très mutilé, on peut reconnaître les motifs qui lui ont valu cette récompense, et qui ne laissent pas de doute que ce fût un métèque : ενους ν τ δήμ …. τς στρατείας στρατεεται μετ το δήμου [73] εσφορςδκα μνς ργυρίου : bienveillance envers le peuple, exactitude à remplir ses devoirs militaires et à payer les contributions de guerre, zèle à fournir des epidoseis, tels sont les mérites qui ont valu l'isotélie à Hermaeos comme à Nicandros et à Polyzélos.[74]

C'est sans doute aussi aux métèques que s'adressait Thrasybule, lorsqu'il promettait l'isotélie aux étrangers qui l'aideraient à délivrer Athènes de la tyrannie des Trente.[75]

Enfin, au dire de Xénophon,[76] on aurait donné l'isotélie à tous les étrangers qui consentiraient à travailler dans les mines ; était-ce une mesure générale et permanente, ou une mesure prise seulement de son temps, c'est ce que le texte ne permet pas de reconnaître. Dans tous les cas, il ne pouvait en résulter la création d'une nombreuse catégorie d'isotèles, car on sait que les mines étaient exploitées surtout au moyen d'esclaves.[77]

Un passage de Photius attribue aussi l'isotélie à des affranchis ; il mérite d'être remarqué, quoique les termes en soient vagues et même inexacts : ’Iσοτελς * ξελεύθερος, μετέχων τν νόμων, μττοίκιον δ ο φέρων.[78] L'intérêt de ce passage vient de ce qu'il touche à une question que nous aurons à traiter à fond : celle de la situation respective des métèques et des affranchis, question que nous nous contentons d'indiquer pour le moment.

Les proxènes aussi, nous l'avons vu, pouvaient parfois recevoir l'isotélie[79] ; le fait devait se présenter rarement, parce que l'isotélie n'avait pas d'intérêt pour la plupart des proxènes, qui n'habitaient pas Athènes.

Enfin les lexicographes nous disent qu'on la donnait parfois à des cités et à des peuples entiers ; ils citent un passage de Théophraste : οτος δέ φησιν ς νιαχο κα πλεσιν λαις ψηφίζοντο τν τέλειαν 'Αθηναοι, σπερ Όλυνθίοις κα Θηβαίοις ; par atélie, il faut probablement entendre l'isotélie, puisque ce fragment de Théophraste figure sous le titre ’Iσοτελς κα σοτέλεια.[80] Nous ne savons pas exactement, il est vrai, à quoi fait allusion le texte de Théophraste, ni à quel moment Athènes aurait donné l'isotélie aux habitants d'Olynthe et de Thèbes ; mais on peut conjecturer que c'est, pour les Olynthiens, après la destruction de leur cité par Philippe, et, pour les Thébains, après la bataille de Chéronée, on même temps que l'on vota les décrets proposés par Hypéride. Nous possédons d'ailleurs un fragment de décret analogue, que M. Schenkl nous paraît avoir restitué d'une façon satisfaisante[81] :

………………………………………δ]

[έδο]χ[θαι τῷ δήμῳ ἐπαινέσαι μὲν τὸν δ]

ῆμον τῶ[νν καὶ στεφανῶσαι ἀυτόν χρ]

υσῷ στε[φάνῳ ἀπὸ … … … δραχμῶν]

ἀρετῆς ἕν[εκα καὶ φιλοτιμίας τῆς εῖς τ]

ὸν δῆμον τ[ὸν 'Αθηναίων καὶ εἶναι …. σ]

ἰσοτελε[ῖς αὐτοὺς καὶ ἐκγόνους ἀυτῶν]

Άθήνησιν ὀικοῦντας ·…………………

La faveur accordée ainsi à une cité consistait évidemment en ce que ceux de ses habitants qui voudraient venir habiter Athènes y seraient admis dans la classe des isotèles. C'est donc dans cette catégorie de décrets qu'il convient de ranger les deux décrets, dont nous avons déjà parlé plusieurs fois, rendus en faveur des Acarnaniens après la bataille de Chéronée et des Thessaliens après la guerre Lamiaque.[82] Il faut remarquer seulement que dans ces deux cas Athènes ne conféra pas la totalité des privilèges de l'isotélie, mais, à ce qu'il semble du moins, une isotélie partielle.

En étendant ainsi l'isotélie non seulement aux métèques proprement dits, mais aux étrangers, Athènes se procurait le moyen de récompenser des alliés fidèles et de dédommager des alliés malheureux. L'isotélie fut entre les mains des hommes d'État d'Athènes, comme la proxénie, quoique à un moindre degré, un instrument politique, qui permettait de ne pas prodiguer le droit de cité, et de le réserver pour les cas et les personnages les plus importants.

§ 5.

Peut-on assigner une date à la création de l'isotélie et de la classe des isotèles ? M. Schenkl le croit[83] : d'après lui, le décret conférant l'atélie du metoikion à un Sicilien, décret qui paraît dater du premier quart du quatrième siècle, serait le dernier exemple de ce privilège,[84] qui dès lors aurait été remplacé par l'isotélie. La simple atélie du metoikion et l'isotélie n'auraient donc jamais coexisté ; l'une aurait succédé à l'autre, et le premier exemple d'un décret conférant l'isotélie serait le fragment de décret où l'isotélie paraît conférée à un proxène.[85]

Ces deux fragments de décrets sont d'ailleurs à peu près contemporains, et datent environ de la 100e Olympiade. Le premier paraît le plus ancien des deux, à cause de l'emploi de la forme ναι, qui est remplacée dans le second par la forme εναι. M. Schenkl en conclut que, lors de la révision des lois faite sur la proposition de Tisaménos, une des modifications introduites fut précisément la transformation de l'atélie du metoikion, qui devint l'isotélie.

Cette conclusion nous paraît inadmissible. D'abord le premier décret est aussi bien que le second, quoi qu'en dise M. Schenkl, postérieur à la réforme de Tisaménos, comme le prouve l'emploi des lettres ioniennes. De plus, même en admettant qu'il soit plus ancien, on ne saurait tirer pareille conclusion de l'absence d'autres textes épigraphiques antérieurs ou postérieurs, vu l'extrême rareté des inscriptions de ce genre. D'ailleurs il existe, en réalité, des inscriptions qui prouvent au moins que l'atélie du metoikion se donnait encore dans le reste du quatrième siècle : ce sont ces décrets en faveur des Acarnaniens, des Thessaliens et d'autres réfugiés à Athènes, en qui M. Schenkl refuse, on ne sait pourquoi, devoir des métèques. Enfin et surtout, deux autres textes très précis, et que M. Schenkl a vainement essayé d'interpréter autrement, prouvent formellement et que l'atélie du metoikion existait encore à l'époque des orateurs, et que l'isotélie existait avant l'année d'Euclide.

Démosthène, dans le discours contre Leptine, s'efforce de montrer la contradiction dans laquelle tombe son adversaire on voulant d'une part supprimer l'atélie des liturgies pour tous, sauf pour les descendants d'Harmodios et d'Aristogiton, et en voulant d'autre part faire rentrer les liturgies ordinaires dans la catégorie des dépenses sacrées, dont précisément l'ancienne loi n'exemptait pas les descendants d'Harmodios et d'Aristogiton. Et il demande à son adversaire : « Sur quoi donc porte l'exemption que tu prétends leur laisser, que nos ancêtres leur ont donnée, si, comme tu le dis, les liturgies sont comprises dans les dépenses sacrées ? car les lois anciennes ne les dispensent ni des contributions de guerre ni des triérarchies, et quant aux liturgies, si elles rentrent dans les dépenses sacrées, ils n'en sont pas non plus dispensés. Cependant la stèle porte qu'ils sont dispensés. De quoi donc ? serait-ce du metoikion ? car il ne reste plus que cela. Non sans doute, mais bien des liturgies ordinaires, etc.[86] »

Démosthène plaisante, en faisant une hypothèse absurde ; mais il n'aurait même pu la faire, si l'atélie du metoikion n'avait pas été chose connue et usitée de son temps.

L'autre texte est un passage du Pseudo-Plutarque, dans la Vie de Lysias,[87] d'après lequel l'orateur, après s'être vu dépouiller du droit de cité que lui avait fait conférer Thrasybule, aurait passé le reste de sa vie dans la condition d'isotèle. Les expressions dont se sert l'auteur ne permettent pas de décider s'il fut fait isotèle à ce moment, ou s'il l'était déjà auparavant. Mais, s'il n'a été fait isotèle qu'après la Restauration, ce ne peut être qu'à la suite du décret d'Archinos qui lui retirait le titre de citoyen, et comme dédommagement. Or tout cela s'est certainement passé avant que les Nomothètes eussent achevé la révision de toutes les lois et promulgué les résultats de cette révision. L'isotélie, aussi bien que l'atélie du metoikion, devait donc figurer dans les lois préexistantes.

M. Schenkl a raison de dire que l'on ne peut rien conclure du passage du discours de Lysias contre Eratosthène où l'orateur déclare que lui et son frère Polémarque possédaient trois maisons.[88] Leur père Képhalos pouvait en effet, vu les liens d'amitié qui l'unissaient à Périclès, avoir obtenu l’γκτησις. Mais, pour la même raison, on pourrait aller plus loin et supposer qu'on lui avait accordé l'isotélie, et l'isotélie à titre héréditaire. Ce qui tendrait à le faire croire, c'est précisément l'octroi de ce droit de propriété, que nous avons vu si rarement accordé aux métèques, tandis qu'il faisait presque régulièrement partie de l'isotélie.

Il n'y a donc pas lieu d'introduire entre l'atélie du metoikion et l'isotélie le rapport de temps que veut y introduire M. Schenkl. Les deux privilèges ont coexisté, et c'est un pur hasard si nous n'avons pas d'exemples plus anciens de l'isotélie. L'un et l'autre d'ailleurs n'étaient, comme l’γκτησις, autre chose que des parcelles du droit de cité, que le peuple athénien distribuait en guise de récompense aux métèques qui avaient montré le plus de zèle à le servir. Ces divers privilèges différaient les uns des autres, non seulement de nature, mais de valeur, et l'isotélie était un des plus recherchés, étant un des plus complets. Mais cela n'empêchait nullement les autres de subsister à côté de l'isotélie : c'étaient au contraire autant de degrés inférieurs qui souvent devaient précéder l'octroi d'un privilège plus important.

La date de la création de tous ces privilèges pour les étrangers, et par conséquent de la formation d'autant de catégories différentes au sein de la classe des métèques, nous échappe naturellement ; d'autant plus qu'il ne faut pas se représenter cette création comme résultant d'un acte législatif unique, mais bien comme le résultat d'habitudes entrées dans les mœurs longtemps peut-être avant de passer dans les lois. Mais on peut affirmer que la nécessité de conférer certains privilèges aux étrangers s'est imposée dès que ces étrangers ont été nombreux à Athènes, c'est-à-dire, comme nous le verrons, de fort bonne heure.

Si l'on admettait la restitution proposée d'abord pour les premières lignes du décret relatif aux clérouques de Salamine, on pourrait faire remonter au temps de Pisistrate l'origine de l'isotélie. On sait que ce décret, le premier assurément qui ait eu à régler la condition de clérouques athéniens, date en effet de Pisistrate ou tout au moins des Pisistratides. Avant la découverte d'un second fragment, on s'accordait pour lire ainsi les premières lignes :

’'Εδοξεν τ δμ * [τος λαχντας]

οκεν (ν) Σαλαμνι [ξν Αθηναίοι]

σι τ[ε]λεῖν καὶ στρατ[εύειν * ….[89]

Et M. Köhler rapprochait ingénieusement cette formule de la formule du quatrième siècle dont nous avons parlé : στρατεεσθαι τς στρατείας κα τς εσφορς εφέρειν μετ 'Αθηναίων, dont il faisait la formule même de l’isotélie. Il faut dire toutefois que le rapprochement n'était pas absolument exact, le terme τελείν étant plus compréhensif que εσφορς εφέρειν; pour nous, cette dernière expression, nous l'avons dit, devait s'appliquer à des métèques gratifiés de ce privilège spécial, sans jouir pour cela de l'isotélie. Mais c'est bien à la formule réelle de l'isotélie que correspondait la formule appliquée aux premiers clérouques athéniens : « faire campagne et payer l'impôt avec les Athéniens. » Aussi y avait-il un rapprochement intéressant, et qu'indiquait M. Köhler, à faire entre la condition de ces clérouques et celle des isotèles : les uns et les autres admis à supporter les mêmes charges financières et militaires que les Athéniens, et, à ce qu'il semble, exclus les uns et les autres des droits politiques, pour des motifs différents il est vrai, les isotèles comme incapables, les clérouques simplement comme absents. On pouvait croire que là était l'origine de la condition des isotèles, et qu'on avait pris pour modèle cette première catégorie de demi-citoyens qui étaient les clérouques. Malheureusement la découverte d'un second fragment de l'inscription est venue prouver que toutes les restitutions tentées étaient fort incertaines, et il faut s'en tenir à l'opinion de M. Kirchhoff, qui déclare toute tentative de restitution inutile, puisqu'on ne peut connaître la longueur de l'inscription et le nombre des lettres de chaque ligne.[90] Nous ne pouvons, donc affirmer ni que l'isotélie ait existé au sixième siècle, ni surtout que le droit des clérouques lui ait servi de base et de modèle.

 

CHAPITRE III.LA PROXÉNIE ; LE DROIT DE CITÉ.

§ 1.

Entre les isotèles et les citoyens proprement dits, il y avait encore deux classes d'hommes, les proxènes et ceux qu'on appelait les nouveaux citoyens, c'est-à-dire ceux qui tenaient ce titre non de leur naissance, mais d'un décret du peuple : d'où leur nom de δημοποίητοι. Ces derniers formaient vraiment une catégorie à part, puisqu'ils ne jouissaient des droits des citoyens qu'avec certaines restrictions.[91]

Nous n'avons à étudier pour elle-même ni l'une ni l'autre de ces deux classes de personnes ; nous avons simplement à envisager la proxénie et le droit de cité comme des récompenses auxquelles les métèques pouvaient aspirer, aussi bien que les étrangers.

Les proxènes étaient, on le sait, les plus favorisés parmi tous ceux qui n'avaient pas obtenu le droit de cité, et qui restaient par conséquent compris dans la catégorie générale des ξένοι. C'est ce qu'exprime l'auteur du Lexique des Orateurs en ces termes : ο προτιμώμενοι τν ξένων π' 'Αθηναίων πρόξενοι καλοντο, ο δ λοιπο σοτελες, ο δ μετοίκων τελοντες μέτοικοι.[92]

Si l'isotélie a été parfois conférée à des proxènes, l'inverse a eu lieu, et sans doute beaucoup plus fréquemment. Au premier abord pourtant, il semble assez étrange que la proxénie ait pu être conférée à des étrangers résidant à Athènes. Elle n'était pas, en effet, seulement un honneur, mais une fonction, puisque les proxènes devaient recevoir les envoyés officiels d'Athènes dans les cités étrangères, et même les simples citoyens athéniens en voyage.[93]

Il est probable qu'à l'origine et pendant longtemps la proxénie ne fut que cela, et qu'elle ne fut décernée qu'à de véritables étrangers, résidant dans la cité et ne venant à Athènes qu'à l'occasion. Puis peu à peu on en vint à considérer la proxénie surtout comme un honneur, analogue aux diverses atélies et à l'isotélie, et qu'on pouvait accorder indifféremment aux étrangers et aux métèques.[94] Il est impossible d'ailleurs de saisir le moment où s'est opérée cette transformation : les textes épigraphiques concernant la proxénie décernée à des métèques sont rares, et dans beaucoup de cas on ne sait s'il s'agit de métèques ou d'étrangers. Voici les documents les plus probants.

Tandis que le plus ancien décret de proxénie conservé remonte au milieu du cinquième siècle,[95] il ne semble pas que l'on trouve avant le quatrième siècle d'exemples de la proxénie conférée à des métèques.

Nous pensons qu'il faut voir un métèque dans cet Epicharès à qui un décret du Conseil avait accordé la proxénie, et à qui un amendement porté devant le Peuple conféra en plus le droit, pour lui et ses descendants, d'acquérir terres et maisons, et de comparaître en personne devant le Conseil et le Peuple.[96] Ce qui nous porte à voir en lui un métèque, c'est d'abord que son nom n'est pas suivi de l'ethnique, comme cela a lieu le plus souvent pour les étrangers ; c'est ensuite l'octroi de l’γκτησις, qui n'avait guère d'intérêt pour un étranger. On peut même se demander si toutes les fois que l’γκτησις est ainsi jointe à la proxénie, il ne s'agit pas d'un métèque, car on ne voit pas bien pourquoi on aurait accordé le droit de propriété à quelqu'un qui n'en aurait eu que faire.[97] Mais, en laissant de côte tous ces textes douteux, nous en trouvons trois pour lesquels il n'y a pas de doute, et où l'on voit la proxénie conférée à des métèques. C'est d'abord le décret rendu en faveur d'Héracleidès de Salamine de Cypre, de l'année 325/4.[98] Les honneurs qui lui sont conférés sont l'éloge et une couronne d'or ; la proxénie et l'évergésie, qui, on le sait, vont presque toujours ensemble ; le droit de propriété complet (γς κα οκίας) et celui de faire campagne et de payer les eisphorai avec les Athéniens ; le tout pour lui et ses descendants. C'est-à-dire qu'on accumule sur une seule personne tous les privilèges possibles, en dehors du droit de cité, ce qui suffit pour nous montrer l'importance du personnage, évidemment un des grands négociants en céréales du Pirée.

A la même époque se place le décret conférant la proxénie au médecin Evénor, d'Argos Amphilochicon (322/1).[99] Le Conseil avait proposé simplement de lui décerner la proxénie et l'évergésie à titre héréditaire ; le peuple y ajouta, outre des éloges et une couronne de feuillage, l’γκτησις complète, également à titre héréditaire, mais, par une précaution curieuse, et dont nous ne connaissons pas d'autre exemple, stipula formellement qu'il ne jouirait pas des droits politiques et religieux des citoyens, πέχονπ τν κοινν κα τν ερν.

Enfin, près d'un siècle plus tard, on décerna à un métèque qui avait fourni une epidosis considérable pour la réfection des fortifications du port de Zéa, Apollagoras ou Apollas, outre des éloges et une couronne de feuillage, la proxénie et l’γκτησις γς κα οκίας; seulement on fixa à deux talents la valeur maximum de la terre qu'il pourrait acquérir.[100]

Ces rares exemples montrent que les Athéniens furent aussi peu prodigues envers les métèques de la proxénie que de l'isotélie, et qu'ils l'accordaient beaucoup plus facilement aux étrangers qu'aux métèques. Cela va de soi d'ailleurs : la proxénie donnée à un étranger lui conférait autant de charges que d'honneurs, et c'est Athènes en somme qui en retirait le plus de profit. Aux métèques au contraire, elle n'imposait aucune charge nouvelle, et ne conférait que des privilèges, et des privilèges fort enviables : en effet, outre les avantages matériels qu'ils en retiraient, il n'est pas douteux qu'ils aient joui de la considération toute particulière qui s'attachait, à Athènes, aux véritables proxènes de la cité.[101]

§ 2.

Le droit de cité enfin, cette récompense suprême, devait naturellement être plus rare encore, et ne s'accorder qu'aux métèques qui, après avoir épuisé toute la série des autres privilèges, avaient continué à mériter la bienveillance du peuple athénien.

N'ayant pas ici à étudier l'usage qu'ont fait en général les Athéniens de la collation de ce droit, nous nous bornons à renvoyer aux ouvrages les plus récents sur ce sujet,[102] nous réservant simplement d'étudier l'application qui en a été faite aux métèques. Il s'agit de relever les passages des auteurs ou des inscriptions qui nous montrent le droit de cité conféré à des métèques, soit en masse et par mesure générale, soit individuellement et par faveur particulière.

A en croire les orateurs athéniens, le peuple aurait prodigué au quatrième siècle le droit de cité. L'auteur du discours Περ συντάξεως prétend que les Athéniens, auparavant avares du droit de cité au point de ne pas l'avoir accordé à leurs alliés et bienfaiteurs Ménon de Pharsale et Perdiccas de Macédoine, le cèdent maintenant, et pour de l'argent, à des fils d'esclaves.[103] Isocrate, renchérissant, déclare que les Athéniens, plus fiers de leur naissance que tous les autres, confèrent ce droit de cité plus facilement que les Triballes et les Lucaniens ne confèrent le leur, pourtant si obscur.[104] Et plus loin il affirme que peu à peu les étrangers ont remplacé les citoyens, morts pendant les grandes guerres.[105]

Qu'on accordât déjà plus facilement le droit de cité au quatrième siècle qu'au cinquième, cela est possible ; mais il y a dans les expressions des deux écrivains une exagération évidente, et les faits positifs mentionnés par les historiens et les inscriptions démentent absolument cette façon de voir. Enfin les précautions nouvelles dont on entoura au quatrième siècle la collation du droit de cité[106] suffiraient pour montrer qu'alors comme au cinquième siècle, ce droit était une faveur fort recherchée et difficilement accordée.[107] Ce n'est qu'après Alexandre que l'on commença à le prodiguer, jusqu'au moment où, l'abus étant devenu scandaleux, à cause du trafic auquel il donnait lieu, Auguste, au dire de Dion Cassius, défendit aux Athéniens de le vendre.[108]

Le premier exemple que nous connaissions du droit de cité conféré à des métèques est fort ancien, et du plus haut intérêt : il s'agit des métèques que Clisthène fit entrer dans la cité.[109] Mais ce fut une mesure toute d'exception, révolutionnaire même ; nous ne faisons que l'indiquer, devant y revenir et y insister.

A deux autres reprises encore, on conféra le droit de cité à des métèques par mesure générale et en masse. La première fois, ce fut dans les dernières années de la guerre du Péloponnèse. La cité, épuisée par le désastre de Sicile, venait de voir sa dernière flotte battue d'abord dans le golfe d'Éphèse, puis bloquée dans le port de Mytilène. Il s'agissait de faire un effort suprême et de dégager cette flotte, que commandait Conon. C'est alors que, manquant d'hommes, on décida que les Cavaliers monteraient à bord de la flotte de secours, et qu'on enrôlerait en masse esclaves et métèques, en promettant la liberté aux premiers, le droit de cité aux seconds. C'est ainsi qu'il faut comprendre un passage de Diodore de Sicile, où il dit qu'après les désastres de la guerre du Péloponnèse, beaucoup de métèques et d'autres étrangers furent faits citoyens pour combler les vides, ce qui permit d'équiper la flotte qui devait vaincre aux Arginuses.[110] Le droit de cité et la liberté ne durent être donnés que conditionnellement, et pour stimuler l'ardeur des esclaves et des métèques, et non, comme le dit Diodore, leur être conférés de prime abord.

C'est ainsi en effet que se passèrent les choses dans une circonstance plus grave encore, après la bataille de Chéronée. C'est Hypéride qui, prenant la parole dans l'Assemblée du peuple, proposa les mesures extrêmes qui seules permettraient de prolonger la résistance : déposer au Pirée les objets sacrés, avec les femmes et les enfants, donner la liberté aux esclaves et le droit de cité aux métèques.[111] Nous savons qu'en fait ce décret ne fut pas intégralement appliqué, si tant est qu'il l'ait été partiellement. Philippe ayant hâté les négociations, il n'y eut pas lieu de combattre de nouveau, et le décret n'avait été rendu que conditionnellement, c'est-à-dire qu'on se réservait de tenir compte des mérites et des services de chacun.[112]

En dehors de ces quelques occasions où le droit de cité fut donné à des métèques par mesure générale et dans un besoin pressant, les exemples de naturalisation accordée à des particuliers sont fort rares. Il faut dire que la plupart du temps il est impossible de reconnaître si les décrets conférant le droit de cité, presque tous mutilés, s'appliquent à des métèques ou à des étrangers.

Un seul décret s'applique certainement à un métèque : c'est le décret conférant le droit de cité au médecin Evénor ; il est postérieur à celui par lequel on lui avait donné la proxénie,[113] nous montrant ainsi que le droit de cité ne devait être que le couronnement de toute une série de récompenses. Les motifs allégués sont, d'abord le motif vague et en quelque sorte officiel, l’ενοια qu'il a toujours montrée envers le peuple athénien ; puis des motifs plus précis : il a donné ses soins à tous ceux, citoyens ou métèques, qui en ont eu besoin, et enfin il vient de contribuer à une epidosis pour la somme d'un talent. En récompense, le peuple lui décerne des éloges et une couronne de feuillage, et le fait Athénien, lui et ses descendants.

Parmi les métèques faits citoyens dont nous parlent les auteurs, il faut citer, pour la première moitié du quatrième siècle, les deux banquiers célèbres, Pasion et son successeur Phormion, tous deux d'origine servile.[114] L'un d'eux au moins, Pasion, avait rendu à la cité des services pécuniaires importants, sous forme d'epidoseis,[115] et sans doute aussi sous forme de prêts avantageux. Dans la seconde moitié du même siècle, vers 325, on voit le droit de cité donné, probablement à l'instigation de Démosthène, au fameux marchand de salaisons Chaeréphilos et à ses trois fils, Pheidon, Pamphilos et Pheidippos.[116] Les poètes comiques prétendirent que c'était par amour des salaisons que les Athéniens s'étaient montrés si généreux.[117] A. Schaefer pense avec raison[118] que Chaeréphilos avait dû faire, dans cette année 326/5 qui fut une année de disette, de larges distributions de salaisons (on sait que les salaisons jouaient un grand rôle dans l'alimentation des Athéniens), et peut-être aussi de céréales, céréales et salaisons étant des produits du Pont, avec lequel commerçait Chaeréphilos.

En même temps qu'à Chaeréphilos, on donna aussi le droit de cité à deux banquiers, Epigénès et Conon, sans doute pour des services de même nature, c'est-à-dire des epidoseis considérables.[119]

La rareté de ces textes prouve que le droit de cité fut accordé plus difficilement encore aux métèques que la proxénie et l'isotélie. Et d'une façon générale, nous pouvons dire que les privilégiés de tout ordre parmi les métèques, ceux qui jouissaient de titres purement honorifiques, ou du droit de propriété, ou de l'atélie du metoikion et des liturgies, etc., étaient fort peu nombreux. Les métèques pouvaient aspirer à un assez grand nombre de privilèges divers, mais un petit nombre seulement d'entre eux les obtenait.

Faut-il en conclure qu'on traitait durement les métèques, et que la condition de ceux qui n'obtenaient aucun de ces privilèges était misérable ? Nullement, et on peut même dire que si Athènes a pu se montrer avare de privilèges envers ses métèques, c'est parce qu'elle leur avait fait à tous une condition fort supportable. La situation des métèques athéniens comportait suffisamment d'avantages enviables pour attirer à Athènes et au Pirée les marchands et les industriels étrangers, et les privilèges particuliers qu'on leur faisait entrevoir pour l'avenir ne devaient servir qu'à faire naître et à entretenir chez eux une émulation des plus favorables aux intérêts de la cité.

 

 

 



[1] Page 114 et suiv.

[2] C. I. Α., II, add. nov. 256 b.

[3] Hermès, XVI, 291 et suiv.

[4] Cf. plus loin, liv. I, sect. iii, ch. iii, § 1.

[5] C. Ι. Α., II, 73.

[6] Δελτ., 1889, 91.

[7] C. I. Α., II, 121, 1. 26 et suiv. ; la restitution donnée par Schubert (De Proxenia attica, 55) n'est pas douteuse.

[8] C. Ι. Α., Ι, 59 ; on sait que souvent la valeur des terres ou maisons que l'on permettait d'acquérir était fixée par le décret même ; cf. par exemple, C. I. Α., II, 380, où il n'est nullement dit, comme l'a cru M. Monceaux (Proxénies, 99) que l'on donnera au personnage honoré une terre de la valeur de deux talents, mais bien qu'on lui donnera l’γκτησις, c'est-à-dire le droit d'acheter et de posséder une terre jusqu'à concurrence de la valeur de deux talents.

[9] C. I. Α., II, 27 ; les restitutions de M. Köhler nous paraissent certaines.

[10] Op. cit., 186.

[11] C. I. Α., II, 121.

[12] C. I. A., II, 222.

[13] C. I. Α., II, 224.

[14] C'est à tort d'ailleurs qu'il rapproche de ces textes Démosthène, XX, 60 (?), où l'on voit l'atélie donnée à des étrangers faits proxènes, c'est-à-dire soustraits précisément à la condition des métèques.

[15] C. I. Α., II, 86.

[16] Démosthène, XX, 18 : « Εσί γὰρ δήπου παρ' μν α τε τν μετοίκων λειτουργίαι καὶ α πολιτικαὶ, ν έκατέρων στ τοῖς ερημένοις τέλεια. »

[17] Démosthène, XX, 20. 21.

[18] Ibid., 132.

[19] C. I. Α., II, 42. 54. 91. 131. 144 ; — Démosthène, XX, 42 ; cf. C. I. Α., II, 85 ; — Démosthène, XX, 60 ; cf. Bull. corr. hell., XII, 164, où il s’agit peut-être simplement de l'isotélie.

[20] C. Ι. Α., II, 54.

[21] Démosthène, XX, 59 ; C. I. Α., II, 144.

[22] Op. cit., 99.

[23] Par ce terme, le rédacteur du décret entendait évidemment désigner toutes les liturgies religieuses ; c'est ainsi que Démosthène l'emploie souvent (XX, 19, et pass.).

[24] Démosthène, XX, 18. 26.

[25] Scol. Démosthène, c. Lepi., 466, 6.

[26] Suidas,’Iσοτελεῖς, Ι.

[27] Cf. Gilbert, I, 177.

[28] Pollux, VIII, 91.

[29] Thomas Magister, s. v.

[30] Mœris, s. v.

[31] Ammonius, Ισοτελς καὶ μέτοικος ; répété par Ptolémée, Hermès, XXII, 408.

[32] Aristote, Pol., III, 1, 4 : « Τν δ'ρχν α μν εσι διηρημέναι κατ χρόνον, στ' νίας μν λως δς τν ατν οὐκ ξεστιν ρχειν, δι τίνων ρισμένων χρόνων ; δ'όριστος, οον δικαστς καὶ κκλησιαστής. »

[33] Bekker, Anecd., T, 267, 1.

[34] Hésychius, Ίσοτελες ; cf. Suidas, Ίσοτελες 2, = Photius, s. v.

[35] Harpocration, Suidas, Photius, Ίσοτελς καὶ σοτέλεις.

[36] C. I. A., II, 54.

[37] Pseudo-Démosthène, XXXIV, 18.

[38] C. I. A., II, 616 ; — II, 3, 1333.

[39] C. I. Α., II, 3, 2723-2734 ; le petit nombre de ces inscriptions (douze) n'a rien de surprenant, et on ne doit pas en conclure qu'on n'inscrivait pas régulièrement le titre des isotèles : nous verrons qu'en réalité ils étaient fort peu nombreux.

[40] C. Ι. Α., II, 334.

[41] C. I. Α., II, 279 ; cf. 280.

[42] Dans les inscriptions des « phiales des affranchis » figurent deux isotèles, patrons d'affranchis, et qui sont désignés simplement par leur titre d'isotèles (Acad. Berlin, 1887, II, p. 1199, n° 43, col. 1, l. 10 ; — 1888, I, p. 251, n° 36, col. 1, l. 9. 13).

[43] Monceaux, 104.

[44] C. I. Α., II, 413. — La même clause figure dans un décret en l'honneur d'un personnage inconnu (Δελτίον, 1888, p. 224), et dans le décret en l'honneur de Nicandros et Polyzélos (Ibid., 1889, 91 ; la restitution σοτέλειαν nous paraît certaine).

[45] C. I. A., II, 3, 2724.

[46] Démosthène, XX, 29 : « Δι τ γεγράφθαι ἐν τ νόμ διαρρήδην ατο μηδένα μήτε τν πολιτν μήτε τν σοτελν μήτε τν ξένων εναι τελ. » — Dans aucune inscription il n'est question des liturgies des isotèles.

[47] Aristote-Kenyon, 58 ; Pollux, VIII, 91.

[48] C. Ι. Α., II, 48 ; nous ne voyons d'ailleurs pas d'autre restitution possible.

[49] Δελτίον, 1888, ρ. 224 :

[πρόξενον καὶ ε]

ερ]γέτην Άθ[ηναίων εναι καὶ α

τν καὶ ἐκγόνους καὶ δ[έδοσθαι

ατος σοτ[λε] οἰκο [σιν Ά-

θήνησιν.

L'inscription, d'après M. Cavvadias, qui l'a publiée seulement en caractères ordinaires, est de la seconde moitié du quatrième siècle. La restitution de la première ligne ne paraît pas douteuse.

[50] Monceaux, 101.

[51] C. I. Α., II, 121, décret en faveur des Acarnaniens qui ont combattu à Chéronée ; — II, 176, décret en faveur d'Eudémos de Platées ; — Δελτίον, 1888, p. 224 ; — 1889, 91.

[52] C. I. Α., II, 176 ; 222.

[53] Δελτ., 1889, 91.

[54] Köhler, Mittheil., IX. 119.

[55] Böckh, I, 627 ; cf. 177 et 379 ; Caillemer (Daremberg-Saglio, Egktésis) ; et, avec plus d'hésitation, Schenkl, 222. 225.

[56] C. I. A., I, 59.

[57] C. I. Α., II, 413.

[58] Δελτίον, 1888, p. 224 ; 1889, 91.

[59] C. I. Α., II, 41 : « Εναι δὲ καὶ γῆς γκτησιν καὶ οἰκίας Έπιχάρει ατ καὶ ἐκγόνοις. »

[60] Platon, Rép., 327 a.

[61] Plaidoyers civils de Démosthène, I, 311.

[62] Aristote-Kenyon, 58.

[63] Op. cit., 754 ; à la vérité, Meier et Schömann ont surtout en vue le privilège qui consistait à ne pas avoir besoin devant les tribunaux de l'assistance d'un prostate, assistance qui, d'après eux, aurait été obligatoire pour les métèques. Nous laissons de côté pour le moment cette question du prostate, que nous aurons bientôt à discuter à fond.

[64] C. I. A., II, 121.

[65] Pseudo-Démosthène, XXXIV, 18.

[66] Nous ne savons où Böckh a pris que les isotèles avaient le droit d'affermer les mines : il l'affirme à quatre reprises différentes (I. 177. 379. 407. 627), mais sans jamais citer aucun texte à l'appui de cette assertion. Il a sans doute en vue Xénophon (Rev., IV, 12), qui a un tout autre sens ; cf. plus loin, liv. I, sect. iii, ch. ii, § 4.

[67] Pseudo-Démosthène, LIX, 21.

[68] Op. cit., 189.

[69] Harpocration, Suidas, Photius, Ίσοτελς καὶ σοτέλεια.

[70] Suidas, Ίσοτελής, 1.

[71] Pollux, III, 56.

[72] C. I. Α., II, 413. — Cf. le décret en l'honneur de Nicandros et Polyzélos, δελτ., 1889, 91.

[73] C. I. Α., II, 360 : « στρατεύεσθαι μετὰ τοῦ δήμου » n’est pas la même chose que « στρατεύεται μετὰ'Αθηναίων » ; la première formule désigne simplement le service militaire accompli dans l’armée athénienne ; la seconde, le service accompli dans les rangs des citoyens.

[74] Δελτ.,1889, 91.

[75] Xénophon, Hell., II, 4, 25.

[76] Rev., IV, 12.

[77] Böckh, I, 90 et suiv.

[78] Photius, Ισοτελής ; cf. Hésychius, s. v.

[79] C. I. Α., II, 48 ; — Δελτίον, 1888, ρ. 224.

[80] Harpocration. Suidas, Photius, s. v.

[81] C. I. Α., II, add. 97 c ; Schenkl, p. 222. Il y a bien quelques difficultés : le nom du peuple en question paraît bien court (quatre lettres au génitif pluriel, cinq à l'accusatif : l'inscription est gravée στοίχηδον) ; de plus, la mention de l’ρετ paraît bizarre appliquée à un peuple entier. Mais nous ne voyons aucune autre restitution satisfaisante : HMON ne peut être la fin d'un nom d'homme, étant suivi de Τωι. ·

[82] C. I. Α., II, 121. 222.

[83] Op. cit., 187.

[84] C. I. Α., II, 27.

[85] C. I. Α., II, 48.

[86] Démosthène, XXIX, 129. 130 : « Άλλὰ μὴν γέγραπται γ'ἀτελεῖς αὐτοὺς εἶναι. Τίνος ; τοῦ μετοικίου ; τοῦτο γὰρ λοιπόν. »

[87] 8. 9 : « Καὶ οὕτως ἀπελαθείς τῆς πολιτείας τὸν λοιπόν χρόνον ᾤκησεν σοτελς ν. »

[88] XII, 18.

[89] C. I. Α., IV, 2, 1 a ; Köhler, Mittheil., IX, 117 et suiv. ; Foucart, Bull. corr. hell., XII, 1 et suiv.

[90] C. I. Α., IV, 3, p. 164.

[91] Gilbert, Handb., I, 177.

[92] Dekker, Anecd., I, 298, 27 ; pour la proxénie en général, voir Monceaux.

[93] Voir, pour le détail, Monceaux, 106 et suiv.

[94] Ibid., 299 et suiv.

[95] C. I. Α., IV, 1, p. 9.

[96] C. I. Α.. II, 41.

[97] Dans plusieurs décrets, on voit figurer, après la mention de l’ἔγκτησις, les mots κατά τὸν νόμον (C. I. Α., II, 20, 8 ; Mittheil., VIII, 218). M. Monceaux (p. 98, note 6) en conclut qu'à une certaine époque tous les proxènes l'avaient de droit. La conclusion ne nous paraît pas évidente : à quoi bon cette mention de l’ἔγκτησις, si tous les proxènes l'avaient eue de droit ? Nous serions plutôt porté à croire qu'à cette époque la loi avait fixé une fois pour toutes le maximum de valeur des biens-fonds qu'un étranger pouvait acquérir en Attique, et que les mots κατά τὸν νόμον font allusion à cette restriction légale.

[98] Mittheil., VIII, 211.

[99] C. I.A., II, 186.

[100] C. I. Α., II, 380.

[101] Sur cette considération dont jouissaient les proxènes athéniens, cf. Monceaux, 104.

[102] Buermann, Animadversiones de titulis atticis, quibus civitas alicui confertur sive redintegratur (Jahrbücher von Philol., 10 suppl. bd., 1879). — Caillemer, La naturalisation à Athènes (Mémoires de l'Acad. de Caen, 1880). — Szantὸ, Untersuchungen über das allische Bürgerrecht, Vienne, 1881. — Cuillemer, Démopoiétos (in Daremberg-Saglio).

[103] Pseudo-Démosthène, XIII, 23. 24.

[104] Isocrate, VIII, 50.

[105] Ibid., 88.

[106] Szantô, 2.

[107] M. Guiraud a très bien montré pourquoi les Athéniens ne pouvaient pas prodiguer le droit de cité (Revue internationale de l'Enseignement, VIII, 1, 236 et suiv.).

[108] Dion, LIV, 7.

[109] Aristote, Pol., III, 1, 10.

[110] Diodore, XIII, 97 : « 'Αθηναοι δὲ κατὰ τὸσυνεχς λαττωμένοι περιπίπτοντες, ποιήσαντο πολίτας τος μετοίκους καὶ τν λλων ξένων τος βουλομένους συναγωνσασθαι. » Cf. Xénophon, Hell., I, 6, 24 ; — Aristophane, Gren., 33. 706, et scol.

[111] Pseudo-Plutarque, Vie d'Hyper., 8 ; cf. Lycurgue, c. Léocr., 41 ; Suidas, s. v. Ύπεψηφσατο.

[112] Dion Chrysost., XV, 21.

[113] C. I. Α., II, 187.

[114] Démosthène, XLV, 34 ; Pseudo-Démosthène, LIX, 2.

[115] Démosthène, XLV, 85.

[116] Dinarque, I, 43 ; cf. Hyper., fr. 222 (Oraf. ait., II, 427).

[117] Fragm. com. graec, III, 385. 413. 482.

[118] Demosthenes und seine Zeit ², III, 296, note 4.

[119] Dinarque, I, 43.