LES GUERRES DE LA RÉVOLUTION

WISSEMBOURG

 

CHAPITRE III. — MAYENCE OU LA MORT.

 

 

I. Beauharnais. Conférences de Bitche. Plan d'attaque. Dispositions des alliés. — II. La marche en avant. Engagements du 19 et du 22 juillet. Capitulation inattendue de Mayence. Retraite de l'armée du Rhin. — III. L'armée de la Moselle. Leimen. Fureur de Houchard. Incendie du Carlsberg. — IV. Houchard, général en chef de l'armée du Nord. Schauenburg lui succède.

 

I. Alexandre, vicomte de Beauharnais, était major en second du régiment de La Fère-infanterie, plus tard le 52e, lorsqu'il fut envoyé par la noblesse du bailliage de Blois aux Etats-Généraux. Il embrassa les idées nouvelles avec ardeur, proposa dans la fameuse nuit du 4 août l'égalité des peines et l'admissibilité des citoyens à tous les emplois, déclara que le roi ne devait ni jouir du droit de paix et de guerre, ni posséder une maison militaire, ni mener les troupes en personne. Un des premiers, il avait compris que l'heure finale de l'ancien régime avait sonné. J'étais, disait-il, républicain dans le sein de la Constituante ; c'est moi qui ai fait les motions d'autoriser le mariage des prêtres et de leur faire quitter le costume, d'approuver le divorce ; je n'ai cessé de combattre les rois, les nobles et les modérés de tout genre. Sa chaude recommandation valut à Grégoire le siège épiscopal de Blois. Deux fois, il présida l'Assemblée, et ses collègues applaudirent au sang-froid et au tact qu'il montra dans cette fonction difficile ; il occupait le fauteuil lorsqu'eut lieu l'événement de Varennes. Après la session, il reprit du service et devint successivement adjudant-général à l'armée du Nord, chef de l'état-major de Biron et de Deprez-Crassier, commandant de la division du Haut-Rhin. On le vil à Strasbourg se prononcer avec éclat pour le parti populaire ; il proposait au club que la sainte ampoule fût portée à Paris et l'huile qu'elle renfermait, brûlée solennellement en présence de la Convention, sur l'autel de la patrie ; il signait une adresse qui demandait la mort de Louis XVI ; il sollicitait la suspension des administrateurs du Bas-Rhin qu'il accusait de royalisme ; il offrait douze louis d'or à l'auteur du meilleur discours sur les moyens de susciter l'esprit public en Alsace.

Il avait alors trente-trois ans. Fait au tour, comme dit un de ses contemporains, aussi beau que Hérault de Séchelles et que Lauzun, il avait par ses succès de boudoirs excité la jalousie de sa femme Joséphine Tascher de la Pagerie. Mais à sa jolie figure, à son air noble, à sa tenue élégante, à ses manières douces et aimables, il joignait une façon de s'exprimer pleine d'aisance et 8i'esprit, une vive intelligence, un jugement droit, et partout où il passa, à l'Assemblée électorale de Blois, à la Constituante, dans les clubs et les armées, il séduisit à première vue, enleva les suffrages et ne trouva que des prôneurs de son mérite. Luckner faisait son éloge. Custine vantait sa sagesse et son zèle. Biron le regardait comme le meilleur chef d'état-major qu'on pût avoir, d'autant, ajoutait-il, qu'il y a dans sa vie de brillantes époques de patriotisme qui sont d'un excellent exemple. Les plus farouches Jacobins l'estimaient ; quelques-uns blâmaient sa liaison avec une jeune Strasbourgeoise, la fille du commissaire des guerres Rivage ; tous reconnaissaient qu'il avait, la confiance et l'affection du soldat : c'était le général qui déployait la plus grande activité et les talents les plus remarquables, celui qui témoignait le plus pur républicanisme, le seul, disait Garnerin, qui se soit entouré de francs patriotes et n'ait pas la morgue de ses prédécesseurs. Gateau le félicitait d'avoir rétabli la société patriotique et militaire de Wissembourg qui, par ses soins, marchait vigoureusement. Laveaux lui reprochait de traiter Ferrier d'intrigant, mais avouait qu'ou pouvait tout exiger et tout attendre de lui. Lacoste le nommait le premier général de la République. Ruamps louait ses vertus civiques qui n'étaient pas plus équivoques que ses connaissances en tactique et en stratégie.

Mais, suivant le mot d'un bon juge, Beauharnais était instruit et peu guerrier. Il n'avait pas le coup d'œil, l'instinct du champ de bataille. Faible, timide, il manquait, dans le péril pressant, de nerf et de hardiesse. Comme Biron, auquel il ressemble par certains côtés, il craignait de se compromettre, et se défiait de lui-même. Ce qui lui faisait défaut, rapporte Legrand, c'était une audace de conception et d'exécution qui, jointe à un grand fonds d'instruction, constitue l'habile général en chef ou le ministre capable de diriger la guerre. Le Comité de salut public lui proposait la succession de Bouchotte ; Beauharnais objecta que ses talents ne répondraient pas à son zèle et qu'il fuirait toujours les postes éminents ; il n'osait se jeter au milieu des orages d'une révolution, en un moment où la constitution n'était pas forte, en un temps où divers partis divisaient l'opinion publique et empêchaient les fonctionnaires d'avoir un guide constant dans leur conduite[1].

Beauharnais resta donc à la tête de l'armée du Rhin et tenta de débloquer Mayence en concertant ses opérations avec Houchard. Mayence était le mot de ralliement ; Mayence ou la mort ! criaient les troupes ; conventionnels, journalistes, officiers de l'état-major, soldats ne s'entretenaient que de Mayence et des moyens qu'il faudrait mettre en œuvre pour délivrer la ville assiégée ; les armées de la Moselle et du Rhin ne seraient-elles jamais que les armées de l'arme au bras[2] ?

Le 7 juin se tint à Bitche une conférence à laquelle assistaient, outre Beauharnais et Houchard, lés commissaires Du Roy, Laurent, Ruamps et Montaut. Beauharnais représenta qu'il fallait secourir Mayence dans le délai le plus court et profiter de la supériorité du nombre : les ennemis, affirmait-il, se sont sûrement dégarnis sur la frontière de l'Alsace, soit qu'ils nous croient pour longtemps dans l'état de stagnation, soit qu'ils aient besoin de toutes leurs forces pour attaquer sérieusement la place. Mais Houchard, moins impatient que Beauharnais, jugeait que ses bataillons n'avaient pas une organisation assez solide. Si chacun, disait-il, était à sa besogne et savait ce qu'il doit faire, et si l'on y tenait la main, nous gagnerions prodigieusement. Il déclara donc que son armée n'était pas prête. Pouvait-elle manœuvrer en grand contre les Prussiens ? N'avait-elle pas une quantité considérable de recrues qu'on devait dresser et former plusieurs semaines encore avant de les mener à l'ennemi ? Beauharnais répliqua que les circonstances lui semblaient impératives, qu'il serait plus utile de lancer les troupes en pleine expédition que de les exercer à de petites manœuvres souvent inexécutables, qu'un simple mouvement en présence de l'adversaire valait mieux que toutes les menues prescriptions du métier. On se sépara sans rien décider[3].

Une seconde conférence eut lieu le 27 juin à Bitche. Cette fois, on résolut de marcher en avant et de délivrer Mayence sans retard. Généraux et commissaires étaient d'accord. Il fallait faire diligence pour sauver la forteresse. Les troupes murmuraient, s'indignaient de leur inaction ; elles paraissaient suffisamment instruites ; elles connaissaient leur force ; elles avaient reçu tant de recrues que l'armée du Rhin comptait 60.000 combattants et l'armée de la Moselle 40.000. On pouvait donc, en moins de huit jours, jeter une masse de 400.000 hommes sur les lignes ennemies et, par la puissance du nombre, rompre le cordon d'investissement. D'ailleurs, la moisson allait s'ouvrir et l'on aurait devant soi les plaines immenses du Palatinat couvertes d'une récolte abondante[4].

On convint d'occuper Pirmasens et tous les postes intermédiaires, depuis cette ville jusqu'aux débouchés des gorges d'Annweiler, afin d'assurer les communications entre Beauharnais et Houchard. L'armée du Rhin, poussant sa droite à Germersheim et appuyant sa gauche à Annweiler, emporterait les lignes de la Queich, puis celles de Neustadt et de Spire pour marcher de là sur Worms et Falkenstein. L'armée de la Moselle longerait la Glan, par Waldmohr et Kusel, tournerait ainsi Kaiserslautern et gagnerait Kreuznach. Elle laisserait la Lorraine à découvert, mais elle avait donné, dans sa récente expédition d'Arlon, une rude leçon aux Impériaux. Son flanc gauche serait garanti par un corps qui se dirigerait vers Saint-Wendel, sous les ordres de Delaage, pour se rabattre ensuite sur Lauterecken. Son flanc droit serait protégé par la division des Vosges qui s'avancerait sur Landstuhl, sous la conduite de Pully, et attaquerait de front la position de Kaiserslautern, tout en se liant à Weidenthal avec la gauche de Beauharnais, par un détachement que commanderait René Moreaux. Les deux armées attaqueraient en même temps, selon les forces qu'elles auraient en opposition ; celle de la Moselle ne ferait qu'une fausse attaque ; celle du Rhin refoulerait vigoureusement l'adversaire. On userait de prudence et de circonspection tant qu'on ne serait pas maître du défilé de Neustadt. Mais une fois à Neustadt, on se porterait en avant avec audace pour précipiter la retraite des ennemis, ou pour les enfoncer impétueusement s'ils s'arrêtaient sur les hauteurs en arrière de Göllheim[5].

Mais les alliés étaient sur leurs gardes. Ils prévoyaient que les armées de secours se mettraient en marche lorsqu'elles pourraient fourrager dans la campagne et ils savaient que Beauharnais viendrait nécessairement par Edenkoben, entre la montagne et le Rhin, et Houchard, soit par Kaiserslautern, soit par Kreuznach. Ils prirent leurs mesures en conséquence. Wurmser s'établit à Edenkoben ; Brunswick, à Kaiserslautern, dans une de ses positions favorites ; Hohenlohe, tout près de lui, au camp de Ramstein. Brunswick et Hohenlohe avaient ensemble un corps de 48.000 hommes qui suffirait, croyaient-ils, à contenir les 40.000 Français commandés par Houchard. Si l'armée de la Moselle refusait de livrer une bataille rangée et, se bornant à manœuvrer, tournait Kaiserslautern et poussait sur Kreuznach par Kusel, Hohenlohe, lâchant Ramstein, se jetterait aussitôt, en deux marches, au-devant de l'agresseur à Lauterecken et à Meisenheim pour lui fermer la route de la Glan[6].

 

II. Enfin, l'armée du Rhin s'ébranla. Nous allons, s'écriait Beauharnais, revoir cette ville célèbre d'où nos frères nous tendent les bras, et, le 14 juillet, lorsque les troupes acclamaient, au bruit des salves d'artillerie, la Constitution de 1793, il exprimait l'espoir que les défenseurs de Mayence mettraient bientôt leurs noms au bas de cette charte immortelle[7]. Mais l'armée comptait un trop grand nombre de conscrits qui ne s'étaient pas encore, suivant le mot de l'époque, débarrassés de leur timidité villageoise : les municipalités avaient envoyé des hommes incapables de servir, les uns estropiés, les autres tombant d'épilepsie, d'autres couverts de plaies incurables[8]. Même dans sa proclamation, Beauharnais ne dissimulait pas les craintes que lui inspirait l'indiscipline de ses bataillons : il y avait, disait-il, des traîtres et des lâches qui semaient dans les rangs la terreur et le désordre ; les soldats se croyant vendus, abandonnaient quelquefois leurs positions, et la défection d'un détachement entraînait celle d'une brigade, d'une division ; la déroule devenait générale. Ouvrez les yeux, concluait Beauharnais, livrez à la vengeance des lois ceux qui jettent l'épouvante.

Mais, au lieu d'enlever son armée et de s'avancer rapidement avec la fière assurance qu'il devait prendre en sa supériorité numérique, Beauharnais tâtonna ; il usa, à la Brunswick, de subtiles et minutieuses précautions ; il perdit son temps à refouler les avant-postes et les petits détachements épars dans les bois. Avec un peu de hâte et de hardiesse, il aurait gagné Durkheim le 20 juillet et la hauteur de Grünstadt dès le lendemain ; le 22, de Mayence, D'Oyré entendait son canon et rompait aussitôt les pourparlers[9].

Ce fut le 19 juillet que Beauharnais commença l'attaque. Pendant que 3.000 hommes de la garnison de Landau, commandés par Gilot, tenaient l'adversaire en respect à la lisière des forêts, Ferrier, qui conduisait la droite de l'armée, opérait de vigoureuses démonstrations sur la ligne de la Queich et notamment contre Germersheim. Depuis le 3 juillet, il était en avant de Jockgrim et, dès le 6, il occupait les villages de Rülzheim, de Kuhardt et de Hœrdt. Il dispersa les tirailleurs autrichiens et se saisit de trois autres bourgades, Ottersheim, Knittelheim et Bellheim[10].

La gauche de l'armée du Rhin eut le même succès. D'Arlande, avec la brigade du 13e régiment, s'empara des gorges d'Annweiler. Meynier, avec la brigade du 67e, se rendit maître d'Albersweiler. Landremont, Loubat et Delmas, à la tête de l'avant-garde, chassèrent de Franckweiler, après une fusillade assez vive, les émigrés et le corps franc de Wurmser[11].

Beauharnais établissait ainsi ses communications avec l'armée de la Moselle par le pays de Deux-Ponts. Mais il négligeait de pousser sa pointe et de profiter de l'ardeur de ses soldats. Il n'assaillait de nouveau les alliés que le 22 juillet. Néanmoins, il eut encore l'avantage. La brigade Meynier et les bataillons d'infanterie légère que commandait Delmas tournèrent les hauteurs de la Chapelle Sainte-Anne, où s'élevaient plusieurs redoutes. Les Austro-Prussiens conduits par Spleny, Hotze et Thadden firent leur retraite le long des Vosges, de village en village, de Sainte-Anne à Burrweiler, de Burrweiler à Weyher, de Weyher à Rhodt et à Edenkoben. L'action, entamée vers neuf heures du matin, ne se termina qu'à la nuit close. Si Beauharnais avait su ce qui se passait ! Pris d'une terreur panique, les ennemis se croyaient cernés et se débandaient dans l'obscurité ; seul, le bataillon autrichien Terzy ne faiblit pas et couvrit la fuite.

Ferrier avait moins de bonheur à l'aile droite. Sa division s'était portée en deux colonnes entre les hauteurs d'Essingen et les bois de Bornheim, contre un corps d'émigrés et les troupes légères du général Meszaros. Elle refoula l'adversaire sur toute la ligne et s'avança témérairement d'Ottersheim jusqu'à Niederhochstadt. Mais les Impériaux reçurent des renforts. Malgré leurs assauts réitérés, les carmagnoles ne purent enlever les retranchements de Niederhochstadt. Ils durent reculer après avoir perdu deux canons. Le 9e régiment de cavalerie, vigoureusement chargé par les carabiniers de l'Empereur, ne se rallia que derrière l'infanterie. Heureusement le 3e et le 46e de ligne soutinrent le choc avec fermeté ; le premier rang croisa la baïonnette, le deuxième et le troisième rangs firent le feu de file, et la cavalerie autrichienne qui s'était lancée dans les chemins creux, au milieu des vignes, tourna bride sous une grêle de balles.

Pourtant, la journée était gagnée. Officiers et soldats avaient vaillamment combattu. On citait plusieurs traits de courage héroïque. Le maréchal-des-logis Guéret, porte-drapeau du 98 cavalerie, serré de près par quatre impériaux qui le sommaient de se rendre, en avait tué deux et blessé le troisième ; renversé par le quatrième, il se dégageait de dessous son cheval et revenait au régiment avec son étendard brisé. D'autres encore s'étaient signalés ; Beauharnais louait la valeur distinguée de Delmas, l'intelligence et l'activité de l'adjudant-général Abbatucci, et les soins infatigables du chirurgien Larrey. Le représentant Ruamps exaltait la bravoure des volontaires qui gravissaient des pentes escarpées sous une pluie de projectiles et, parvenus au sommet des hauteurs, mettaient leurs chapeaux au bout de leurs baïonnettes pour acclamer la République victorieuse. Toute l'armée, fière de son triomphe, criait Mayence, Mayence ! L'espoir de délivrer la ville, rapporte un contemporain, enfantait des prodiges ; il est certain, à en juger par l'enthousiasme que les troupes avaient montré et par l'ensemble qui présidait aux opérations, qu'une armée beaucoup moins forte que la nôtre eût fait lever le siège de Mayence, si Mayence eût résisté quelques jours de plus[12].

Déjà Wurmser reculait. Il avait ordre de tenir à Edenkoben, ou du moins en arrière d'Edenkoben, pour couvrir Neustadt. Dans la nuit du 24 au 25 juillet il se rabattit sur la route du Rhin : Edenkoben était abandonné ; le chemin de Neustadt ouvert ; la communication entre les Prussiens et les Autrichiens interceptée. Mais le 23 juillet Mayence capitulait, et cette nouvelle, éclatant de même qu'un coup de foudre au milieu de l'armée du Rhin, y répandait l'indignation et le désespoir. Dans le premier moment, les soldats jurèrent de regarder les Mayençais comme des traitres et de ne pas fraterniser avec eux. Mais lorsqu'ils virent arriver la garnison, lorsqu'ils apprirent les périls qu'elle avait essuyés, leur colère s'apaisa et ils se jetèrent tout émus dans les bras de leurs frères d'armes. Quant à Beauharnais, il était consterné ; il comprenait les conséquences de la reddition de Mayence et songeait douloureusement que les coalisés, maîtres désormais de leurs mouvements, allaient fondre sur l'Alsace avec toutes leurs forces. Cet événement, écrivait-il au Comité, change tous les plans de la campagne, et il déclara dans une proclamation que son armée, dorénavant incapable de jouer un rôle offensif, devait former une barrière et s'opposer à l'irruption imminente[13].

Il voulut un instant faire face derrière les lignes de la Queich. Ces lignes, presque ruinées et négligées depuis longtemps, n'étaient pas en meilleur état que celles de la Lauter, mais elles offraient quelques ressources à la défense. Landau donnait à la gauche de l'armée un appui plus solide que la mauvaise position de Wissembourg, et si Germersheim, qui formait la droite des lignes de la Queich, ne valait pas Lauterbourg, on pouvait, à l'aide des inondations, mettre cette ville à l'abri d'un coup de main. Elle n'eût pas résisté deux heures ; elle n'avait que trois petites redoutes détachées, un ouvrage sans consistance, et le cimetière dont les terres étaient relevées par un mur intérieur. Etablie à Germersheim, l'armée française gardait les lignes de la Queich ; elle préservait de l'invasion le riche pays qui s'étend entre cette rivière et la Lauter ; elle empêchait le blocus de Landau ; postée à l'extrême frontière et en territoire ennemi, elle reprenait cœur[14].

Mais Beauharnais s'imaginait que Germersheim était une place de guerre, et il écoula Ferrier qui lui mon trait un plan inexact où la ville était présentée sous un aspect imposant. Devenu très consultatif, déterminé à ne plus rien ordonner de son chef, il convoqua le 26 juillet chez Ruamps, le seul des commissaires de la Convention qui fût alors à l'armée, les généraux divisionnaires Munnier, Diettmann, Laubadère, Gilot, Landremont. Il exposa son plan d'attaque contre Germersheim ; mais il eut soin d'ajouter qu'on ne devait rien donner au hasard et qu'il y aurait des risques à courir, parce que les Autrichiens avaient fait autour de la place des ouvrages multipliés. Tous les généraux l'approuvèrent ; suivant eux, le moment de tenter une pareille entreprise était passé ; la cavalerie manquait ; un revers causerait l'irrémédiable déroute. Mais si la droite de l'armée ne pouvait s'appuyer à Germersheim, ne fallait-il pas regagner les lignes de la Lauter ? C'était l'opinion de Beauharnais ; toutefois il n'osa l'exprimer nettement ; il craignait de déplaire aux représentants et il assura même qu'il ne ferait la guerre défensive qu'à la dernière extrémité, après avoir assemblé ses généraux de division et recueilli leurs avis[15].

Une vive et brusque attaque de Wurmser précipita sa résolution. Wurmser avait cru que Frédéric-Guillaume lui enverrait des renforts ; mais, loin de le secourir, le roi lui conseillait de refuser sa gauche et de se retirer sur Neustadt. Wurmser, indigné, exaspéré, convaincu qu'il aurait facilement raison d'un adversaire démoralisé, aima mieux livrer bataille, et le 27 juillet il assaillait à Rülzheim l'aile droite de l'armée française commandée par Ferrier. Après une canonnade qui ne lui coûta qu'un seul homme, Ferrier, comme saisi de panique, abandonna successivement Rülzheim, Herxheim, Insheim, sans informer le général en chef, sans même avertir les brigades de Lafarelle et de Mequillet qu'il laissait à découvert et que Beauharnais avait placées en échelons pour le soutenir. Tourné par sa droite, voyant à son centre Mezsaros s'emparer au bout de cinq heures de combat des villages d'Offenbach, de Bornheim et de Dammheim, redoutant que Wurmser ne vint par la plaine et les bois s'établir sur les crêtes de Barbelroth et lui fermer l'entrée de l'Alsace, Beauharnais ordonna la retraite. Elle eut lieu tristement et dans la plus grande confusion. Morne, sombre, rebutée, l'armée sentait son courage se glacer : Elle se croyait trahie, dit un officier ; la reculade inouïe de Ferrier lui donnait la crainte d'être coupée ; la méfiance dans les chefs était extrême ; l'obéissance, nulle ; la désorganisation, complète[16].

 

III. Houchard n'avait pas été plus heureux. Il quitta Sarrebrück le 16 juillet et une semaine plus tard, par Waldmohr, Jägersberg, Kiebelberg, il poussait ses avant-postes à Kusel, tandis que le corps des Vosges, sous les ordres de Pully, se dirigeait de Deux-Ponts sur Mühlbach et Landstuhl, et qu'un détachement, commandé par René Moreaux, marchait de Pirmasens sur Klausen et Leimen. Mais, comme Beauharnais, Houchard, qui se défiait de son armée si peu aguerrie et si peu manœuvrière, n'avançait qu'avec lenteur. Les soldats se plaignaient d'être exercés en temps de guerre comme en temps de paix. Ils ne parcouraient au plus que deux lieues par jour. A tout instant, ils s'arrêtaient, non pour se reposer, mais pour aligner les tentes, pour porter et présenter les armes, pour emboîter et cadencer le pas. Il semble, disaient-ils, qu'on marche uniquement pour se donner de l'appétit[17].

Brunswick eut donc le temps de faire ses dispositions. Hohenlohe vola de Ramstein à Lauterecken. Le colonel Sanitz couvrit la route de Pirmasens à Trippstadt. Ce fut sur ce chemin, dans la montagne, à Leimen, le 22 juillet, que se produisit le choc le plus mémorable. Une compagnie de chasseurs et 80 grenadiers défendaient une hauteur contre 1.500 Français conduits par René Moreaux. Le colonel Sanitz vint au secours du poste avec 470 fantassins, un parti de cavalerie et deux canons. C'était le même Sanitz qui, quatre mois auparavant, avait sauvé le roi de Prusse soudainement attaqué dans le village d'Alsheim par les troupes du général de Blou. Il réunit tout son monde — quatre cents hommes — et simulant des têtes de colonnes, faisant battre la charge, il s'avance avec hardiesse à la rencontre des assaillants. Après une courte fusillade, les Français reculèrent sur Pirmasens. Sanitz s'étonna de son facile succès, et, avec une spirituelle modestie, il assurait que les carmagnoles, l'apercevant de loin sous l'uniforme du régiment Hohenlohe et au milieu d'une brillante escorte, l'avaient pris pour le prince lui-même[18].

Mais le 23 juillet on apprenait au camp prussien la capitulation de Mayence. Le prince de Hohenlohe se hâta d'envoyer la nouvelle au quartier-général français. Houchard refusait de le croire : si Mayence, disait-il avait capitulé, les Prussiens viendraient-ils fraternellement l'en informer ? Non, ils faisaient cette ridicule balourdise parce qu'ils étaient dans la détresse, et ils lui contaient des sornettes pour modérer son ardeur ! Il répondit donc à Hohenlohe sur un ton de raillerie qu'il connaissait depuis quatre jours par un déserteur la reddition de la place, que ce transfuge était mieux instruit que les généraux, et il ajoutait avec une ironie soldatesque qu'il continuerait sa marche, non qu'il fût entêté, mais il avait à Mayence une maîtresse qu'il voulait voir absolument[19]. Il dut pourtant se rendre à la vérité, et, plein de rage, il s'écriait que la garnison de Mayence avait fait son devoir, mais que sa patience, son courage, son dévouement contrastaient étrangement avec la lâcheté de ses chefs. Il osait écrire à Kalkreuth que les soldats n'avaient pas été consultés et n'étaient nullement liés par l'infamie d'un état-major qui leur cachait tout : Je vous déclare et vous direz à votre maître que suis prêt à employer cette même garnison contre vous ![20] Mais, quelle que fût sa colère, il ne pouvait aller plus avant. Son armée recula vers la Sarre. Hohenlohe désirait la poursuivre, la presser, ne la lâcher que sur le glacis de Sarrelouis. Brunswick lui commanda de s'arrêter. Houchard, dit Massenbach, aurait dû laisser ses cheveux dans les défilés et les mauvais chemins ; mais nous étions si généreux ![21]

Houchard se vengea de sa déconvenue en livrant à la dévastation et au pillage ce malheureux pays de Deux-Ponts que les commissaires à grippe avaient près que épuisé. Le 28 juillet, il fit brûler le château du Carlsberg. Quelques heures suffirent pour réduire en cendres cette superbe résidence, gardée naguère comme une sorte de jardin des Hespérides par des grenadiers moustachus, ce palais que l'Allemagne comparait au séjour enchanteur d'une fée, et que le duc Charles avait rempli des meubles les plus précieux et des plus magnifiques collections. On dit que les soldats saccagèrent le cabinet d'histoire naturelle, qu'ils mirent à leurs chapeaux les plumes des oiseaux les plus rares et burent sans façon l'esprit de vin dans lequel étaient conservés les fœtus. Le château de Hombourg subit le même sort que le Carlsberg. Je ne puis croire, écrivait un volontaire, que de pareils ordres émanent de la Convention ; elle est trop juste et trop humaine pour ne pas comprendre de quelle horreur elle se couvrirait ; mais nos agents nous font détester des braves gens qui admirent notre belle Révolution ![22]

 

IV. A peine Houchard regagnait-il la Sarre qu'il recevait l'ordre de remplacer Custine dans les Flandres. Le Conseil exécutif avait d'abord nommé Diettmann[23]. Mais, de même qu'il avait refusé le commandement de l'armée du Rhin, Diettmann refusa le commandement de l'armée du Nord ; il déclara qu'il était attaché à sa division, qu'il n'avait pas les aptitudes nécessaires pour conduire une armée et qu'il resterait à son poste. Après avoir tenté de fléchir l'inaltérable modestie de Diettmann, les commissaires de la Convention, Louis et Pflieger, proposèrent au Comité de salut public Houchard que ses longs services rendaient presque également propre à commander avec succès l'une ou l'autre des armées de la République. N'avait-il pas écrit tout récemment aux fédéralistes de Bordeaux et de Lyon qu'il était le chef des soldats sans-culottes de l'armée de la Moselle et qu'il ne pactiserait pas avec les complices de Dumouriez ? Le Comité de salut public nomma Houchard : le danger, lui mandait-il, était extrême ; Valenciennes avait capitulé le 28 juillet ; la consternation régnait à Paris ; dans cette crise terrible, le Comité jetait les yeux sur Houchard ; le général méritait la confiance de la patrie ; on chérissait son nom depuis longtemps ; il n'écouterait aucune des considérations qui pourraient le retenir à l'armée de la Moselle ; le point du plus grand péril était le poste d'un républicain[24].

Quel serait le successeur de Houchard ? Ferrier avait été proposé par Bouchotte et accepté par le Comité de salut public comme par la Convention[25]. Mais les soldats ne voulaient plus de Ferrier. Ils reconnaissaient enfin qu'on avait eu raison de lui refuser les qualités d'un général, la présence d'esprit, la résolution, le courage même. Sa propre division exigeait sa destitution. Les Jacobins de Wissembourg et de Strasbourg le traitaient de lâche et l'accusaient de devoir son avancement à la faction d'Orléans. Les commissaires de la Convention assuraient que sa réputation d'ineptie était faite, qu'on le regardait partout comme ignorant et poltron, qu'un pareil homme ne pouvait ni commander une division ni même rester à l'armée. Ferrier eut peur ; il refusa les fonctions que Bouchotte lui offrait, et, lorsqu'il se ravisa quelques jours après et demanda le commandement en jurant qu'il l'acceptait et l'accepterait cent mille fois, il était trop tard : le 3 août les représentants avaient nommé provisoirement Schauenburg[26].

Alsacien de naissance, Français de cœur et de langue, Schauenburg comptait trente-trois années de services ; il avait passé par tous les grades et, durant six mois, dirigé l'état-major de l'armée de la Moselle. Il craignait la responsabilité du commandement et protestait que les talents lui manquaient, qu'il serait mieux au second rang qu'au premier : écrire, disait-il, est peu mon fait ; il préférait obéir, dresser le soldat. Mais les commissaires le savaient brave et manœuvrier. Le chef de brigade Valory attestait aux Jacobins de Paris qu'il était excellent tacticien et que l'armée lui devait son instruction. Les troupes l'estimaient et l'aimaient ; il n'avait pas la rudesse de Houchard et sa figure rébarbative ; il était bel homme et affable, dit un de ses subordonnés, et il commandait l'infanterie avec autant d'amabilité que de sagesse ; on avait du plaisir à servir sous lui. D'ailleurs, qui pouvait-on choisir ? Delaage ? Mais Delaage appartenait à la même caste que Schauenburg, et le nombre et la valeur de ses soldats, et non sa propre habileté, avaient décidé la victoire d'Arlon. Pully ? Mais Pully, lui aussi, était noble, et Bouchotte se disposait à le suspendre. Le choix des représentants s'arrêta donc sur Schauenburg ; ils le jugeaient l'homme nécessaire, le seul capable, sinon de mener, du moins de réorganiser l'armée de la Moselle ; son républicanisme ne semblait pas très prononcé ; mais il était simple, honnête, et entouré de bons patriotes, il irait bien, car il avait l'envie de bien aller[27].

 

 

 



[1] Moniteur, 17 mars et 10 nov. 1790 ; Journal de la Montagne, n° 28, 29, 49, 57 ; Chronique de Paris, 31 oct. 1792 ; Luckner à Servan, 1er juin 1792 (Beauharnais dont je fais grand cas) ; Custine à Beauharnais, 23 mai 1793, et au Comité de défense, 5 avril 1793 ; Biron à Servan, 23 août 1792 (A. G.) ; Blanier à Le Brun, 16 déc. 1792 ; Dupérou et Boyer à Le Brun, 4 mai 1793 ; Dubuisson à Le Brun, 18 mai 1793 ; Desfieux à Proli, 27 mai 1793 (A. E.) ; Garnerin aux Jacobins, 20 juin, et Gateau à Bouchotte, 29 juin ; Lacoste à Barère, 19 août (A. G.) ; Ruamps au Comité, 19 juin 1793 (A. N. DXLII 4) ; Gouvion Saint-Cyr, I, 62 ; Wagner, 53 ; note de Legrand (A. G.) ; Recueil Aulard, IV, 482 et 526 ; Dufort de Cheverny, Mém., II, 77, 80, 111, 247, 302 ; Lavallette, I, 122-123.

[2] Beauharnais au Comité, 16 juin 1793 (A. G.) ; Lecomte, L'observateur impartial aux armées, 1797, p. 4.

[3] Beauharnais au Comité, 10 juin ; cf. Houchard au Comité, 3 juin (A. G.).

[4] Assistaient à la conférence, outre Beauharnais et Houchard, deux représentants près l'armée de la Moselle ainsi que Laurent, Louis, Pflieger et Ruamps (lettre de Montaut, Maignet, Soubrany et Gentil, 7 juillet, A. G.).

[5] Projet de marche pour les armées combinées, 13 juillet ; mémoire de Pully ; Schauenburg à Houchard, 12 juin (A. G.).

[6] Massenbach, I, 181.

[7] Le Batave, n° 163, et proclamation de Beauharnais, Moniteur du 12 juillet.

[8] Lettre de Wissembourg, 28 juin (Batave du 8 juillet) ; cf. une lettre de Ritter au Comité, 15 juillet (A. N. AF 247).

[9] Gouvion Saint-Cyr, I, 67.

[10] Moniteur, 25 juillet ; Gesch. der Kriege, I, 198.

[11] Beauharnais à la Convention, 20 juillet (Moniteur du 24) ; Batave, n° 165 (lettre du 20 juillet) ; Journal de la Montagne, n° 57 ; Gebler, p. 24.

[12] D'Ecquevilly, I, 95 ; Gesch. der Kriege, I, 199 ; Gebler, 25-26 ; Beauharnais à la Convention, 23 juillet (Moniteur du 27) ; Journal de la Montagne, n° 69 ; note de Legrand (A. G.).

[13] Wagner, Der Feldzug der Preussischen Armee am Rhein im Jahrt 1793, 1831, p. 58-59 ; Moniteur des 14 et 19 août 1793 ; note de Legrand (A. G.).

[14] Note de Legrand. (A.. G.)

[15] Compte-rendu par Ruamps, Borie, etc., 28 ; Beauharnais à Bouchotte, 25 juillet, et au Comité, 26 juillet ; note de Legrand (A. G.). Ferino proposa vainement de tenir la crête du chemin de Landau à Spire en avant de la Queich et au delà de la forêt, d'envoyer douze à quinze bataillons dans les gorges des montagnes, d'occuper la position entre Hochstetten et Trippstadt, de faire retrancher par l'armée de la Moselle le poste de Kaiserslautern où l'ennemi n'était pas encore ; le projet, dit Legrand, était fort militaire et les alliés n'auraient pu s'avancer dans la Basse-Alsace, sans courir le danger d'être culbutés dans le Rhin.

[16] Gesch. der Kriege, I, 202 ; Zeissberg, I, 210 ; note de Legrand ; Beauharnais au Comité, 29 juillet (A. G.) ; Borie, Milhaud, Ruamps au Comité, 2 août (A. N. DXLII 4 et Rec. Aulard, V, 453) ; Argos, lettre de Wissembourg, 28 juillet, n° du 30, p. 102 ; Journal de la Montagne, n° 69 ; Saint-Cyr, I, 65 ; Soult, Mém., I, 33.

[17] Journal de la Montagne, n° 82 ; Bonneville de Marsangy, Journal d'un volontaire de 1791, 1888, p. 102-103.

[18] Valentini, 36 (cf. Expédition de Custine, 256) ; Pully à Houchard et Houchard à Moreaux, 23 juillet (A. G.) : Pully croit que l'ennemi n'a pas autant de forces que le dit Moreaux ; Houchard reproche à Moreaux d'avoir fait une fausse bravade en attaquant le poste de Leimen avec 1.500 hommes seulement et un canon.

[19] Houchard à Hohenlohe, 23 juillet (A. G.) ; il était, dit Massenbach, l'impolitesse même (Mém., I, 182).

[20] Houchard à Bouchotte et à Kalkreuth, 30 juillet (A. G.) ; cf. Mayence, 292.

[21] Massenbach, I, 182.

[22] Remling, I, 350-358 ; Un volontaire de 1791, p. 118-119 ; Breton, Voyage dans la ci-devant Belgique et sur la rive gauche du Rhin, 1802, II, 119 ; cf. sur les commissaires à grippe et notamment sur Boulay, une lettre instructive du représentant Blaux (Rec. Aulard, III, 496, et IV, 198).

[23] Arrêté du 22 juillet ; Diettmann à Bouchotte, 26 juillet (A. G.). Déjà, le 12 juillet, Bouchotte avait fait choix de Diettmann pour commander l'armée de La Rochelle ; mais Delacroix ayant remarqué que Diettmann avait refusé le commandement de l'armée du Rhin parce qu'il était pour la cavalerie et ne connaissait pas les manœuvres de l'infanterie, la Convention avait nommé Beysser (Moniteur, 14 juillet).

[24] Pflieger et Louis au Comité, 26 juillet ; le Comité à Houchard, 31 juillet (A. G.) ; décret de la Convention, du 1er août (Rec. Aulard, V, 443) ; cf. Moniteur du 22 juillet.

[25] Moniteur, 3 août 1793.

[26] Moniteur, 14 août ; Argos, 30 juillet, p. 103 ; Journal de la Montagne, n° 88 et 96 (réponse de Laveaux au club de Wissembourg) ; les jacobins de Strasbourg aux jacobins de Paris, 9 août ; Richaud, Soubrany, Ehrmann au Comité, 5 août ; Lacoste à Barère, 19 août ; Ferrier à Bouchotte, 13 août (A. G.) ; Schauenburg à la Convention, 1.

[27] Schauenburg aux représentants, 3 août, et à Bouchotte, 7 sept. ; Lacoste et Guyardin au Comité, 4 août ; Richaud, Ehrmann, Hermand, Soubrany au Comité, 4 août ; Prieur et Jeanbon Saint-André au Comité, 12 août (A. G.) ; Journal de la Montagne, n° 46 ; Le Comte, L'Observ. impartial, 10. Balthazar Schauenburg, né au château de Jungholtz, près Souliz (Haut-Rhin), le 31 juillet 1745, entré comme volontaire au régiment de Nassau cavalerie (1759), passé en cette qualité au 53e rég. d'inf. (1762), sous-lieutenant au même régiment (1er mars 1764) et aux grenadiers (1766), lieutenant de la compagnie de Doulach (22 sept. 1767) et des grenadiers (1768), capitaine en deuxième (2 juin 1777), capitaine-commandant (25 mai 1781), major au 96e régiment (24 mars 1785), lieutenant-colonel (1er janvier 1791), colonel (23 nov. 1791), maréchal-de-camp (7 septembre 1792), chef d'état-major de l'armée du centre, ensuite armée de la Moselle (du 7 sept. 1792 au 8 mars 1793), général de division (8 mars 1793). Il avait fait en Corse les campagnes de 1770 et 1771, et devait commander l'armée d'Helvétie en 1798. Il est mort en 1832, à l'âge de 87 ans. Sa naissance, a dit un contemporain, un certain air de hauteur et une fermeté inébranlable pour la discipline, qu'il avait puisée de bonne heure à l'école allemande, le faisaient alors suspecter violemment d'aristocratie. Ses talents et une loyauté qui ne s'est jamais démentie, le portèrent au grade de général en chef. Il a, en qualité d'inspecteur-général de l'infanterie, rendu à l'armée de Rhin et Moselle les plus grands services. C'est lui, pins que tout autre, qui a formé des officiers et créé des soldats. Nul corps ne fut envoyé à l'armée active sans être exercé par ses soins, peu d'officiers-généraux en Europe entendent mieux la manœuvre des troupes et les principes de détail que Schauenburg. (Notes de Legrand, A. G.) Cf. Invasion prussienne, 212.