LE GÉNÉRAL LA FAYETTE

1757-1834

 

LE GÉNÉRAL LA FAYETTE.

 

 

XVIII

 

La Fayette arrive à Metz et s'efforce d'établir aussitôt une sévère discipline parmi ses troupes (janvier 1792). — Lettre à Washington (22 janvier). — Triste état de l'armée. — Le général Biron ne veut pas servir sous ses ordres et conteste ses talents militaires. — Il envoie un mémoire politique au ministre Dumouriez. — Effectif de l'armée du Centre. — Généraux employés sous ses ordres. — Arrestation d'émigrants à Sierck et découverte d'un complot (13 février 1792). — Luckner et La Fayette sont appelés à Paris pour discuter un plan de campagne 24 au 25 février. — Luckner se présente à l'Assemblée législative (26 février). — Diverses opinions émises dans le Conseil du roi. — La Fayette se prononce pour la guerre offensive. — Narbonne veut donner sa démission de ministre de la guerre et Luckner et La Fayette l'en dissuadent (4 mars). — La Fayette est chargé d'envahir les Pays-Bas. — Mot piquant de Rochambeau à ce sujet. — Narbonne expose à l'Assemblée les opinions émises par les généraux (6 mars). — La Fayette est retenu à Paris par la démission du ministre de la guerre et l'avènement d'un cabinet girondin. — Lettre à Washington (15 mars). — Il doute de la guerre et critique le nouveau ministère. — Préparatifs de la fête en l'honneur des Suisses de Châteauvieux. — Collot d'Herbois en est le promoteur et est soutenu par Robespierre et Marat. — Les constitutionnels y voient une manifestation contre La Fayette et ils ont pour porte parole André Chénier. — La Fayette repart pour Metz (20 mars 1792). — Rochambeau est retenu à Paris par la maladie. — Les Autrichiens prêtent à La Fayette le projet d'enlever le roi. — Lettre de Cobenzl à Kaunitz (30 mars). — Biron déclare à Talleyrand qu'on ne peut confier sans danger à La Fayette l'armée active et le destin de la France (7 avril). — On fait courir le bruit de l'arrivée du général à Paris. — On l'accuse de vouloir empêcher la fête en l'honneur des soldats de Châteauvieux. — Attaques de Robespierre et de Collot-d'Herbois à la tribune des Jacobins (6 et 9 avril). — Entrefilet du Patriote français (10 avril). — Lettre de Marat à Pétion (11 avril 1792). — Démenti donné par le Journal de Paris (12 avril). — Protestation et démission de Gouvion (9 et 17 avril). — Hymne d'André Chénier sur la fête des Suisses (15 avril). — Strophe relative à La Fayette. — Marie-Joseph Chénier fait un chœur pour cette cérémonie. — La Fayette va goûter le bouillon à l'hôpital de Metz. — Circulaire aux officiers généraux (19 avril). — Lettre politique à sa femme (18 avril). — Robespierre demande qu'on enlève de l'Hôtel de Ville le buste de La Fayette. — Brissot décline toute solidarité avec le général. — Déclaration de guerre (20 avril). — Il se plaint que les officiers cherchent à émigrer (21 avril). — Il annonce à ses troupes la déclaration de guerre et assiste à la bénédiction des étendards du 3e régiment des chasseurs à cheval (22 avril). — Il reçoit les dernières instructions ministérielles et fait expédier les ordres pour le rassemblement de l'armée (24 avril). — Il demande des instructions pour l'envahissement du pays de Liège (25 avril). — Dumouriez lui répond qu'il peut pénétrer sans scrupule dans ce pays (28 avril). — Popularité de La Fayette parmi les soldats. — Annonce de la déroute de Quiévrain et du massacre de Théobald Dillon (30 avril). — Il ne faut attaquer qu'avec la presque certitude du succès. — Mauvaises dispositions des Belges à notre égard. — La Fayette adresse à son armée une proclamation à la fois politique et militaire (1er mai). — Il se concerte avec Luckner et expose la détresse de son armée (3 mai). — Il se plaint qu'on ait déclaré la guerre, sans qu'on ait prêt sur rien (6 mai). — Démission de Rochambeau. — Les gardes du prince-évêque de Liège promènent dans les rues de cette ville l'effigie de La Fayette et la sabrent. — Lettre du nouveau ministre de la guerre Servan à La Fayette, pour se concilier les bonnes grâces de celui-ci (9 mai). — Nouvelles du général envoyées de Givet à la Société des Jacobins (12 mai). — Rochambeau cède le commandement de l'armée du Nord à Luckner (19 mai). — Combat d'Hamptinne soutenu par Gouvion (23 mai). — Eloge des troupes par La Fayette (24 mai). — Lettre de félicitations de Servan (27 mai). — Propositions d'accommodement faites aux Autrichiens par La Fayette. — Dépêche de Kaunitz à Mercy-Argenteau (26 mai). — Polémique avec le ministre de l'intérieur Roland sur le patriotisme de ses troupes (23 et 30 mai). — Vive réplique de Roland (6 juin). — Il fait l'éloge de ses soldats (9 juin). — Mouvements militaires. — Occupation du camp retranché de Maubeuge (7 juin). — Reconnaissance en avant de Maubeuge et escarmouche (9 juin). — Combat de Glisuelle (11 juin). — Mort de Gouvion et regrets exprimés par La Fayette. — Lettre de Washington. — Il applaudit au renvoi des ministres girondins Servan, Roland et Clavière, et témoigne son approbation à l'Assemblée nationale et au roi (16 juin). — La lecture de sa lettre provoque une grande agitation dans l'Assemblée (18 juin). — Observations de Vergniaud et de Guadet. — Renvoi de la lettre à la commission des Douze. — Attaques contre La Fayette dans la presse et à la tribune des Jacobins. — Opinion de Robespierre, Danton, Camille Desmoulins. — Lettre politique à Lajard (22 juin). — Envoi de Bureaux-Pusy au maréchal Luckner et réponse de celui-ci (22 et 23 juin). — La Fayette rentre à Maubeuge, adresse deux ordres du jour à son armée, laisse le commandement au maréchal de camp d'Hangest et part pour Paris (26 juin 1792).

 

A peine arrivé à son quartier général de Metz, La Fayette s'occupa d'établir dans les troupes de l'armée du Centre une sévère discipline. Il se rappelait l'armée prussienne qu'il avait vu manœuvrer en Silésie, et il voulait faire profiter son pays des leçons qu'il avait reçues en cette occasion. La situation était difficile, en raison de l'émigration de la plupart des officiers, de la mauvaise volonté des restants et du relâchement de surveillance qui en résultait. Sur ce point, La Fayette écrivait, le 22 janvier 1792, à Washington :

Les régiments réguliers sont loin d'être complets. Les bataillons volontaires vont très bien. En général les soldats et sous-officiers sont patriotes, mais peu. disciplinés.. Un tiers des officiers est bon ; un autre tiers est déjà parti ; le reste, très mal intentionné, s'en ira aussi bientôt, j'espère. Ceux qui nous ont quittés sont assez bien remplacés. Nous manquons d'officiers généraux. La plupart sont tores. Je continue — et je suis le seul qui, à cause de ma popularité, puisse le tenter — à établir une sévère discipline, en dépit des clameurs jacobines, et je pense que l'armée ira bien[1].

 

Il dota son armée d'une compagnie d'artillerie à cheval, à l'instar des Prussiens, et créa des bataillons de chasseurs à pied et des compagnies franches. Ses talents militaires étaient contestés : le duc de Biron, qui avait été son compagnon d'armes en Amérique, écrivait, le 20 décembre 1791, à Talleyrand : Vous savez bien que je ne servirai pas dans l'armée de M. de La Fayette. Je ne veux pas plus de sa gloire que de ses sottises. Le 6 janvier 1792, il disait au même : Il faut suppléer, autant que possible, aux talents militaires et à l'expérience qui manquent au général[2].

Tout en se préoccupant de ses soldats, La Fayette, constitutionnel endurci, ne se désintéressait pas de la politique : il fit porter au ministre Dumouriez un mémoire par lequel il promettait son concours au ministère girondin, si celui-ci s'engageait à faire respecter les lois, la dignité royale, les autorités constituées, la liberté religieuse[3]. Le 2 février 1792, le ministre Narbonne fit part au général des mesures prises pour augmenter l'effectif de son armée et mettre celle-ci en proportion avec les armées du Rhin et du Nord[4]. L'armée du Centre, à la date du 10 mars 1792, grâce à ses renforts, se trouva comprendre 30.107 hommes ; elle embrassait les départements de la Moselle, de la Meuse, de la Meurthe et des Vosges. La Fayette avait sous ses ordres les lieutenants généraux de Paignat[5] et de Franc[6], et les maréchaux de camp de Riccé[7], de Wurmser[8] et de Ligniville[9].

Le 13 février 1792, les gardes champêtres de la commune de Sierck, dans l'arrondissement de Thionville, arrêtèrent trois particuliers, qui émigraient. Ils trouvèrent dans leurs bagages des écrits portant que la ville de Metz était sûre pour les émigrants et que le général La Fayette était aussi méprisé des honnêtes gens que des canailles. Le juge de paix Hentz, futur conventionnel, avertit le commandant en chef de l'armée du Centre, du complot ourdi contre lui, et il vint à Paris pour renseigner l'Assemblée sur ce fait important[10].

Cependant les bruits de guerre prenant de la consistance, le ministre Narbonne pria le maréchal Luckner et le général La Fayette de venir rejoindre à Paris le maréchal Rochambeau, afin que tous trois s'entendissent avec le roi et les ministres sur les mesures à prendre. Luckner et La Fayette arrivèrent, le 24 ou le 25 février 1792, dans la capitale[11]. Le premier alla remercier l'Assemblée, le 26 février, et il dut, en raison de son accent allemand, faire lire son discours par Narbonne[12]. Au Conseil du roi, on discuta le plan de campagne. Rochambeau, disait-on, opinait pour la paix, tandis que ses deux collègues se prononçaient pour la guerre offensive[13]. Les discussions furent si vives, que Narbonne voulut donner sa démission. Luckner et La Fayette l'en dissuadèrent dans des lettres, datées du 4 mars 1792, et rendues publiques[14], et le ministre se laissa convaincre. Toutefois, on arriva à s'entendre : La Fayette devait entrer dans les Pays-Bas avec quarante mille hommes et être soutenu par Rochambeau, tandis que Luckner opérerait sur le Rhin. Rochambeau avait proposé La Fayette pour cette invasion, parce qu'il s'agissait de révolution. Or, avait-il dit avec finesse au roi : Votre Majesté sait que M. de La Fayette s'y connaît mieux que personne[15].

Le 6 mars 1792, Narbonne vint faire connaitre à l'Assemblée les observations faites par les généraux sur la nécessité de réunir tous les moyens nécessaires pour rendre l'armée telle qu'on puisse l'opposer aux puissances militaires de l'Europe, sans avoir besoin de compter sur les ressources du désespoir, et les réformes demandées pour arriver à ce résultat : 1° assurer le prêt en monnaie, 2° augmenter le traitement en proportion de la perte des assignats ; 3° former des bataillons francs pour y recevoir les déserteurs ; 4° assurer l'exécution des réquisitions militaires ; 5° décharger les généraux d'armée de toute responsabilité dans les opérations des trésoriers et paveurs ; 6° donner au général le droit de faire des règlements de police et discipline correctionnelle[16].

Les généraux prolongèrent leur séjour à Paris. La démission du ministre de la guerre, l'arrivée aux affaires d'un cabinet girondin, retenaient La Fayette dans la capitale. Le 16 mars 1792, il écrivait à Washington :

J'ai été appelé de l'armée à la capitale pour une conférence entre les deux autres généraux, les ministres et moi, et je vais à présent retourner à mon poste. La coalition des puissances continentales pour ce qui touche nos affaires est certaine et ne sera pas rompue par la mort de l'empereur[17]. Mais, quoique les préparatifs de guerre continuent, il est encore douteux que nos voisins osent s'approcher pour éteindre une flamme aussi communicative que celle de la liberté.

 

Si La Fayette doutait encore de la guerre, il était certain de l'influence néfaste du ministère girondin, qu'il jugeait avec passion :

Il s'est opéré des changements dans le ministère. Le roi a choisi son conseil dans la portion la plus violente du parti populaire, c'est-à-dire dans le club des Jacobins, espèce d'institution jésuitique, plus propre à faire déserter notre cause qu'à nous attirer des prosélytes.

 

De plus, la fête projetée en l'honneur des Suisses de Châteauvieux soulevait les polémiques les plus violentes. Collot-d'Herbois, Robespierre, Marat et la majorité des Jacobins en soutenaient la nécessité ; les constitutionnels s'élevaient au contraire contre un projet qu'ils sentaient dirigé contre leur chef, La Fayette. André Chénier prêtait à ces derniers le secours de son talent et de sa plume incisive. Le général eut quelque peine à s'arracher au spectacle de cette lutte ; toutefois, il repartit pour Metz, le 20 mars 1792[18], tandis que Rochambeau, malade,  menacé d'une hydropisie de poitrine, était hors d'état de rejoindre son armée[19], au grand désappointement de ceux qui le considéraient comme l'homme de guerre le plus propre à conduire nos armées[20].

Le 30 mars 1792, le comte Louis de Cobenzl écrivait à Kaunitz que La Fayette pourra faire quelque tentative vers Trêves et Coblentz, mais qu'il ne s'éloignera pas de la frontière, parce qu'on lui suppose le projet de se saisir, en cas de guerre, de la personne du roi et de la famille royale et de la transporter, avec son corps d'armée, dans l'intérieur du royaume ou vers les provinces méridionales, pour avoir des otages précieux, lorsque tôt ou tard il sera réduit à capituler[21]. D'autre part, le 7 avril, le général Biron écrivait de Valenciennes à Talleyrand :

Il me semble que si M. de Rochambeau ne peut pas revenir, le seul parti à prendre serait de faire passer le maréchal de Luckner à notre armée et de laisser le commandement de celle d'Alsace à M. de Gelb, qui, avec le Rhin devant lui, sera plus que suffisant à une très bonne défensive. Le nom de Luckner fera beaucoup et le danger de confier à M. de La Fayette l'armée active et le destin de la France sera moins grand[22].

 

Les ennemis de La Fayette l'attaquaient de tous les côtés : ils firent courir le bruit qu'il était venu de nouveau à Paris, dans le but de s'opposer à la fête des Suisses de Châteauvieux. A cette fausse nouvelle, ce fut une explosion de colère dans la presse du parti avancé. Au club des Jacobins, on l'attaqua avec violence et on l'accusa de vouloir empêcher la fête projetée en l'honneur des soldats de Châteauvieux. Le 6 avril, Robespierre s'écriait :

C'est La Fayette que nous avons ici à combattre ; c'est La Fayette, qui, après avoir fait dans l'Assemblée constituante tout le mal que le plus grand ennemi pouvait faire à la patrie, c'est lui qui, après avoir feint de se retirer dans ses terres pour briguer la place de maire, non pour l'accepter, mais pour la refuser, afin de se donner par là un air de patriotisme, est ensuite promu au généralat de l'armée française, pour mettre fin aux complots ourdis depuis trois ans[23].

 

Le 9 avril, Collot-d'Herbois disait :

Je dis que l'ennemi de la chose publique, c'est cet homme qui ose opposer sa volonté au vœu national, ce personnage nouvellement arrivé à Paris qui se nomme La Fayette[24].

Le Patriote français, du 10 avril 1792[25], renfermait ces menaces significatives :

On dit que M. La Fayette est à Paris. Que vient-il y faire ? Croit-il retrouver encore le 17 juillet ? Non, il ne retrouvera que les hommes du 14 juillet. Que vient-il faire enfin ? Nous tromper ? Le temps de l'erreur est passé. Relever son crédit ? Il est perdu sans ressource. La séance d'aujourd'hui l'a prouvé, la journée entière l'a prouvé.

 

Marat écrivit au maire Petion, le 11 avril 1792, et lui dénonça que le sieur Mottié est accouru à Paris pour travailler l'armée et faire manquer la fête civique pour les tristes restes de Châteauvieux[26]. Le Père Duchesne mettait dans la bouche de Mme Veto des propos accusant La Fayette, le fidèle Blondinet, d'avoir manigancé avec son cousin Bouillé le massacre de Nancy.

D'autre part, le Journal de Paris, du 12 avril 1792, démentait le bruit de la présence de La Fayette dans la capitale :

On a affirmé à la tribune des Jacobins et on a publié dans le journal de cette société que M. de La Fayette était arrivé à Paris et que c'était lui qui excitait l'opposition presque universelle qui s'est élevée parmi les citoyens de la capitale, et surtout dans la garde nationale, contre la fête scandaleuse préparée pour des soldats rebelles, que la justice de la nation suisse avait condamnés aux galères et que la clémence de la nation française en a tirés. Il est faux que M. de La Rivette soit venu à Paris, et c'est un mensonge très gratuit ; mais tous les moyens sont bons pour l'esprit de parti.

 

Au sein de l'Assemblée législative, Gouvion protestait, le 9 avril, contre la présence des soldats de Châteauvieux, assassins de son frère, tué à Nancy, et donnait, le 17, sa démission de député de Paris pour aller servir à l'armée du Centre, sous les ordres de son ancien chef[27]. Le 15 avril, la fête des soldats de Châteauvieux eut lieu, et dans l'hymne satirique qu'André Chénier publia, le jour même, sur ces guerriers illustrés par le sang de Desilles, on pouvait lire cette strophe sur La Fayette :

Un seul jour peut atteindre à tant de renommée,

Et ce beau jour luira bientôt !

C'est quand tu conduiras Jourdan à notre armée

Et La Fayette à l'échafaud[28].

En même temps, on chantait à la cérémonie une ronde et un chœur en l'honneur des Suisses de Châteauvieux, dont les paroles étaient de Marie-Joseph Chénier et la musique de Gossec.

Tandis qu'on vilipendait ainsi La Fayette, il était à Metz et s'occupait avec zèle du bien-être de ses troupes. Il allait, à l'hôpital, goûter la soupe et il faisait observer au médecin Marchand que le bouillon était trop faible[29].

Le 19 avril 1792, il adressa une circulaire aux officiers généraux pour leur annoncer l'intention du roi que l'armée fût campée dans ses positions le ter mai. En conséquence, il pressait la formation des équipages et demandait l'état des bataillons de volontaires et de ligne et des régiments de troupes à cheval qui en auraient été formés. Il ajoutait :

Je finirai par une observation relative aux équipages des officiers. Les sommes allouées par l'Etat sont modiques, sans doute, mais je compte établir, dans l'armée que je commande, une simplicité et une frugalité que les armées de l'ancien régime ne connaissaient pas et qui convient également aux mœurs d'un peuple libre et à la vraie discipline militaire.

 

Le même jour, il envoya une circulaire aux commissaires ordonnateurs et aux trésoriers militaires[30]. Le 18 avril, il adressa une lettre politique à sa femme, où il parlait de la tourbe jacobine, que formaient Robespierre, Danton, Camille Desmoulins, et déclarait que ses amis et lui serviraient quiconque voudra faire le bien, défendre la liberté et l'égalité, maintenir la Constitution, en repoussant tout ce qui tend à la rendre aristocrate ou républicaine. De son côté, Robespierre demandait, le 20 avril, la suppression des bustes de Bailly et de La Fayette, qui se trouvaient à l'Hôtel de Ville, et un autre membre le changement de nom de la rue La Fayette[31]. Le 23, la Société des Jacobins projetait d'adresser à l'Assemblée une pétition réclamant la destitution du général[32]. Le 25, Brissot affirmait n'avoir eu aucune relation directe ou indirecte avec La Fayette depuis le 23 juin 1791, et il disait :

Vous qui croyez voir dans La Fayette un nouveau Cromwell, vous ne connaissez ni La Fayette, ni votre siècle, ni le peuple français. Cromwell avait du caractère, mais La Fayette n'en a pas : on ne devient pas protecteur sans caractère. Quand même il aurait du caractère, cette Société renferme une foule d'amis de la liberté, qui périraient plutôt que de le soutenir. J'en fais le premier le serment ; ou l'égalité régnera en France, ou je mourrai en combattant[33].

 

Le 20 avril, la guerre fut déclarée au roi de Bohème et de Hongrie. Le 21, La Fayette se plaignit au ministre de la guerre De Grave que les officiers cherchaient des prétextes pour émigrer et il demanda que l'Assemblée maintint la plus sévère discipline[34].

La nouvelle de la déclaration de guerre lui parvint le dimanche 22 avril, par un courrier extraordinaire. Aussitôt il ordonna que les troupes l'attendissent dans leurs quartiers ; il s'y rendit avec ses généraux et il apprit aux soldats que la guerre était décidée contre les ennemis de notre liberté. Les cris de Vive la nation ! Vive le roi ! Vive M. de La Fayette ! accueillirent cette nouvelle. Le même jour, le 3e régiment de chasseurs à cheval fit bénir ses étendards, que le maire de la ville, La Fayette et les deux frères La Tour-Maubourg présentèrent au grand-vicaire de l'évêque de Metz. Celui-ci prononça un discours politique, où il tonna contre les anarchistes qui, sous un masque populaire, servent l'aristocratie et détruisent la Constitution, en semant partout la méfiance et le désordre[35].

Le 24 avril, un aide de camp de Dumouriez lui apporta, vers les cinq heures du soir, les dernières instructions ministérielles. Sur-le-champ les ordres furent expédiés et, le 25, à quatre heures du matin, tout était prêt pour le rassemblement de l'armée. Le même jour, La Fayette prévint le ministre de la guerre que les troupes étaient pleines d'enthousiasme, que ses instructions étaient exécutées, et qu'il serait, le 28, à Givet. Il demanda des éclaircissements sur certains points. Le pays de Liège, dit-il, n'étant pas terre autrichienne, sur quel pied dois-je m'y annoncer ? Puis, il ajouta, de sa main, le post-scriptum suivant :

La question que je vous fais, Monsieur, sur la manière dont je dois envahir le pays de Liège, si nous sommes en état de le faire, porte également sur toute invasion de territoire qui ne se reconnaîtra pas dépendant du roi de Bohême et de Hongrie. Personne ne connaît et n'a plus pratiqué que moi le principe que tout usurpateur de la souveraineté du peuple ne peut être reconnu par des hommes libres, mais la Constitution a décrété les formes de déclaration de guerre au nom de la nation et j'ai besoin que vous me répondiez sur cet objet[36].

 

Le ministre des affaires étrangères, Dumouriez, répondit, le 28 avril 1792, à La Fayette, qu'il ne devait avoir aucun scrupule à envahir le pays de Liège, et il lui en donnait les raisons :

Nous avons déclaré la guerre au roi de Bohême et de Hongrie ; le général français a droit et il est de son devoir de poursuivre les Autrichiens, partout où il les trouve et partout où on les reçoit, et d'occuper les postes qu'ils occupaient pour la sûreté des opérations militaires. Il n'est tenu, par toutes les lois de la guerre et même par le droit des gens, qu'à observer vis-à-vis des peuples et du souverain que la neutralité la plus exacte, s'ils restent exactement neutres ; mais, dès qu'ils ont admis, sans se plaindre, les Autrichiens, dès qu'ils leur ont donné de gré à gré logement et secours, ils n'ont pas droit de se plaindre de ce que les Français viennent dépister leurs ennemis, et ils leur doivent les mêmes secours et la même neutralité, ou bien ils se déclarent ennemis eux-mêmes et doivent, sans aucune difficulté, être traités comme tels[37].

 

La Fayette jouissait d'une extrême popularité dans son armée ; bien qu'il fût sévère sur la discipline, les soldats l'adoraient et disaient : Hommes et chevaux, nous nous ferions couper en quatre pour lui[38]. Il poussa ses troupes en avant ; le 29, ses patrouilles rencontraient celles de l'ennemi et, le 30, son avant-garde était à Bouvines[39]. Cette belle ardeur se calma par la nouvelle de la déroute de Quiévrain et du massacre du maréchal de camp Théobald Dillon et du colonel du génie Berthois, par leurs propres soldats[40]. Le 30 avril 1792, le ministre de Grave annonçait, en termes indignés, ces tristes événements à La Fayette. De telles horreurs, disait-il, sont bien loin des mœurs d'un peuple qui doit aimer la liberté, puis il ajoutait :

Maintenant où il me paraît prouvé que le Brabant n'est rien moins que disposé à l'insurrection, je suis d'avis que vous n'attaquiez qu'avec la presque certitude du succès. Peut-être serez-vous mieux instruit que ne l'a été le ministre des affaires étrangères des mouvements de Brabant ? Peut-être votre nom réveillera-t-il dans le cœur du peuple l'amour de la liberté ? Mais, à moins de preuves certaines de la disposition des Belges à secouer le joug autrichien, je ne vous demande plus de rien hasarder, car un second échec serait tout ce qu'il aurait de pire. Ainsi, mon cher général, ne suivez l'instruction que je vous ai envoyée qu'avec la plus grande espérance de succès[41].

 

Il ne s'agissait donc plus d'envahir les Pays-Bas, puisqu'on s'était mépris sur les sentiments des Belges, mais de manœuvrer avec prudence. Ces nouvelles instructions n'étaient pas encore parvenues à La Fayette quand, le ter mai, il adressa à son armée en marche une proclamation à la fois militaire et politique. Aux soldats de la patrie, il déclarait que dans cette guerre, devenue un combat à mort entre nos principes et les prétentions des despotes, il s'agit des droits de chaque citoyen et du salut de tous. Et aux soldats de la liberté, il disait :

Soyez patients, infatigables. Votre général doit prévoir, ordonner, et vous, obéir. Soyez généreux, respectez l'ennemi désarmé ; des troupes qui feraient toujours quartier et n'en recevraient jamais seraient invincibles. Soyez désintéressés ; que l'idée honteuse du pillage ne vienne jamais souiller la noblesse de nos motifs ; soyez humains ; faites partout admirer nos sentiments et bénir nos lois ; soyez enfin, comme votre général, décidés à voir triompher la liberté ou ne pas lui survivre.

 

Aux soldats de la Constitution, il donnait l'assurance que, pendant qu'ils allaient défendre la patrie, les discussions intestines ne troubleraient pas leurs foyers et que le Corps législatif et le roi s'uniront intimement dans cet instant décisif pour assurer l'empire de la loi[42].

La Fayette se concerta avec le maréchal Luckner et fut chargé d'occuper le camp retranché de Maubeuge. La situation était des plus délicates et des plus précaires. Le 3 mai, le général dénonça au ministre la pénurie et la détresse de son armée, qui l'empêchaient de se porter en avant[43]. Le 6, il le prévint qu'il avait occupé la position de Rancennes et placé deux avant-gardes sur le territoire autrichien, une vers Luxembourg et l'autre à Bouvines. Sa deuxième division était autour de Dun et le corps du maréchal de camp Riccé près de Longwy[44]. Il ajoutait ces paroles désespérantes : Je ne puis concevoir comment on a pu déclarer la guerre, en n'étant prêt sur rien.

Pendant ce temps, Rochambeau, malade, envoyait sa démission et, malgré le refus du roi de l'accepter et la proposition de lui accorder un congé, malgré les supplications de Biron, déclarant que l'armée du Nord était perdue si son chef la quittait, il réclamait un successeur[45]. A Liège, les gardes du prince-évêque promenaient dans les rues l'effigie de La Fayette et la sabraient[46].

Le 9 mai 1792, le ministre de la guerre de Grave fut remplacé par le maréchal de camp Joseph Serran. Celui-ci écrivit, le 10, à La Fayette, une lettre particulière, qu'il convient de reproduire ici, parce qu'elle montre les précautions que le ministre girondin prenait pour se concilier les bonnes grâces du général[47].

J'ai l'honneur de vous prévenir, Monsieur, que. le roi vient de me nommer au ministère de la guerre pour satisfaire aux pressantes sollicitations de M. de Grave, que sa santé a forcé de demander sa retraite. Laissez-moi, Monsieur, en me rappelant à votre souvenir, me féliciter des relations que ma place et celle si intéressante que vous occupez vont établir entre nous. Plus que jamais nous avons besoin de nous opposer aux ennemis de notre Constitution, et l'homme, qui eut le courage de quitter sa famille et sa patrie pour aller combattre en Amérique sous les drapeaux de la liberté, a plus de droit qu'aucun autre de défendre et d'affermir celle de son pays. Mais nous avons contre nous notre caractère, nos mœurs et nos habitudes. Vous êtes fait, Monsieur, après avoir parlé un des premiers des droits de l'homme, pour exiger impérieusement des hommes qui sont sous vos ordres obéissance aveugle à la loi, et surtout courage, discipline, patience et sobriété. Quand on a combattu à la tête de soldats sans habits, sans souliers, sans tentes et sans nourriture, on peut impunément tout exiger de ceux qui se sont voués à la défense de la patrie et de la liberté naissante. Permettez-moi de vous l'observer, on a trop accoutumé nos soldats à croire qu'il leur fallait du numéraire, et nos officiers se croient encore trop autorisés à revendiquer des moyens de satisfaire à des besoins qu'ils ont rendus très mal à propos de première nécessité. Avec du pain, de la viande, du riz, l'officier et le soldat devraient pouvoir vivre, et tout cela peut leur être fourni directement et être acheté chez nous en papier. Réfléchissez à cela, Monsieur ; c'est à un ami de la Constitution et de la Liberté que je communique mes idées, et c'est M. de La Fayette que je consulte[48].

 

Le 11 mai, Rochambeau indiqua à La Fayette les mesures à prendre pour repousser l'ennemi en cas d'attaque[49]. Les Jacobins surveillaient le général. De Givet, on écrivait à la Société des amis de la Constitution, le 12 mai : M. La Fayette se conduit assez bien. Le plus grand ordre règne dans son armée[50]. En effet, La Fayette semblait uniquement préoccupé de ses devoirs militaires ; il correspondait avec Servan, qui lui avait envoyé Alexandre Berthier, et il s'entendait avec ses collègues[51]. Rochambeau se retira définitivement et céda, le 19 mai, le commandement de l'armée du Nord à Luckner[52].

Les opérations militaires étaient calmes : toutefois, le 23 mai 1792, Gouvion fut attaqué à Hamptinne, près de Florennes, par des forces supérieures ; il se retira sous le canon de Philippeville, après une résistance honorable, et non sans laisser trois pièces d'artillerie aux mains de l'ennemi. Le 24, La Fayette informa de ce combat le ministre et fit l'éloge de Gouvion et de ses troupes[53]. Servan communiqua la dépêche du général à l'Assemblée dans la séance du 26, et le 27 il écrivit à La Fayette :

Les louanges que vous donnez à si juste titre à M. Gouvion, ainsi qu'au courage et à la sagesse des officiers et des soldats, ont été parfaitement senties ici, et l'on se félicite d'avoir des troupes qui savaient manœuvrer et combattre. Le roi en a témoigné une grande satisfaction, ainsi que l'Assemblée. Je vous prie d'en faire part au général, aux officiers et aux soldats[54].

 

A cette même époque, La Fayette fit faire, par l'abbé Lambinet, aux Autrichiens, des propositions d'accommodement, si nous en croyons la dépêche suivante adressée, le 26 mai 1792, par Kaunitz à Mercy-Argenteau :

La démarche de La Fayette repose sur un des mobiles que Votre Excellence a remarqués, mais les assurances d'un homme comme La Fayette ne méritent aucune confiance. On ne peut compter sur la fin de l'anarchie et le rétablissement de l'ordre que si le roi est parfaitement libre, et cela n'est pas à attendre tant que la force réunie des cours alliées ne sera pas rassemblée. Si l'embarras de La Fayette est la cause secrète de sa démarche, il cherchera à y donner suite, et Votre Excellence ne devra pas l'éconduire, ni même rejeter la proposition d'un armistice ; elle devra, par des tours convenables, spécieux et dilatoires, traîner le tout en longueur pour gagner ainsi un peu de ce temps qui est nécessaire aux deux armées. Du reste, la plus grande partie des propositions d'accommodement, faites par l'abbé Lambinet au nom de La Fayette et détaillées dans votre rapport, n'offrent que des bases qu'on ne peut adopter[55].

 

En quoi consistaient ces proposition, et même, ont-elles réellement existé ? On l'ignore. La Fayette, qui avait toujours les yeux tournés vers la capitale et qui était hanté par le spectre de l'anarchie, désirait-il un armistice pour pouvoir aller porter secours au roi et rétablir l'ordre ? Cela est vraisemblable, car il avait alors maille à partir avec le ministère girondin, dans la personne du ministre de l'intérieur Roland. Ce dernier lui avait dénoncé, le 23 mai, La Colombe et Berthier, prévenus d'avoir dit que soldats français étant des lâches, la supériorité numérique de l'armée ne saurait être trop grande. Le 30 mai. La Colombe démentit le propos et déclara que le mot de lâches ne s'appliquait qu'à ceux qui avaient fui devant l'ennemi au lieu de combattre sous les ordres du général Biron[56]. Le même jour, La Fayette attestait à Roland le patriotisme de ses soldats et disait :

Quant à mon armée, telle qu'elle existe aujourd'hui, je compte sur elle autant qu'elle compte sur moi ; notre confiance réciproque est fondée sur l'amour de la liberté, le respect des lois, la haine des factions et le mépris pour leurs chefs[57].

Il y avait là une querelle plus politique que militaire entre le général et le ministre girondin. Celui-ci, qui n'avait pas encore reçu la réponse de La Fayette, lui écrivit de nouveau le 5 juin, puis, le lendemain, lui répliqua dans des termes remarquables. Il terminait sa lettre par ces considérations :

Vous professez, Monsieur, le respect pour les lois, l'amour de la liberté, sans doute aussi de l'égalité, car elle est le gage de la liberté et la hase de notre Constitution. Vous avez juré de les servir, vous vous devez tout entier à leur défense, et, d'après ce que vous avez fait et promis, ce qu'on espère et ce qu'on a droit d'exiger de vous, il ne vous est plus possible d'avoir de gloire, ni d'existence que par elles. Il n'y a plus de milieu pour vous : il faut que vous soyez l'un des héros de la Révolution, ou que vous deveniez le plus infâme des Français ; il faut que votre nom soit à jamais béni ou abhorré. Dans cette situation, il faut que ce qui vous environne annonce votre civisme, atteste votre sincérité. C'est à cause de cela même que, moins prévenu, vous m'auriez remercié, et, quand vous l'aurez reconnu, c'est vous seul qu'il faudra féliciter ; car j'ai fait tout ce que je veux et tout ce que je devais, en vous disant la vérité[58].

 

Le 1er juin 1792, La Fayette écrivit, du camp de Rancennes, au ministre de la guerre Servan, pour l'avertir qu'il formait des compagnies franches et qu'il songeait à une compagnie de braconniers garde-chasse qui s'offrent à lui et pourraient lutter contre les Tyroliens et autres troupes légères ennemies[59]. Le 9, il lui disait :

Je ne puis, Monsieur, donner trop d'éloges à la conduite des troupes qui composent cette armée. Je voudrais, pour le bien de la chose publique, en avoir une plus nombreuse, mais il n'en existera jamais une plus patriote et plus attachée à tous ses devoirs[60].

 

La Fayette faisait manœuvrer son armée. Le 5 juin 1792, il posta son avant-garde à Beaumont et, le lendemain, à Glisuelle. Le 7, les troupes entrèrent dans le camp retranché de Maubeuge. Le 9, le général, avec neuf escadrons de hussards et de chasseurs et quelques fantassins, reconnut le pays entre cette ville et Mons. Il eut une légère escarmouche avec l'ennemi et resta maître du terrain, après avoir eu deux ou trois tués et cinq ou six blessés[61]. Le 11 juin, il fut attaqué par les Autrichiens à Glisuelle et les repoussa, mais le maréchal de camp Gouvion périt, frappé d'un boulet de canon[62]. La Fayette éprouva un vif chagrin de la mort de son compagnon d'armes des guerres d'Amérique, de son major général de la garde nationale, et, du camp retranché de Maubeuge, il écrivit le même jour à Servan :

Je n'aurais donc, Monsieur, qu'à me féliciter du peu de succès de cette attaque [des ennemis], si, par une cruelle fatalité, elle n'avait pas enlevé à la patrie un de ses meilleurs citoyens, à l'armée un de ses plus utiles officiers, et à moi un ami de quinze ans, M. de Gouvion. Un coup de canon a terminé une vie aussi vertueuse qu'utile. Il est pleuré par ses soldats, par toute l'armée ; il le sera par la garde nationale de Paris et par tous ceux qui sentent le prix d'un civisme pur, d'une loyauté inébranlable, et de la réunion du courage aux talents. Je ne parle pas de mon affliction personnelle : mes amis me plaindront.

Pendant que La Fayette guerroyait à l'armée du Centre, Washington lui écrivait, le 10 juin 1792 :

Dans la révolution d'une grande nation, nous ne pouvons pas être surpris des vicissitudes auxquelles les individus sont exposés, et les changements qu'ils subissent seront toujours en proportion de la valeur de leur caractère public. Aussi n'ai-je pas été surpris, mon cher Monsieur, en recevant votre lettre datée de Metz, que vous avez eu la bonté de m'écrire le 22 janvier. Je sais bien que votre tranquillité personnelle et votre bonheur privé ne sont pas votre objet principal, et, jusqu'à ce que la paix et la tranquillité soient rendues à votre pays sur des fondements permanents et honorables, je suis bien persuadé que vous ne pourrez pas jouir longtemps d'un repos domestique, que vous désirez ardemment[63].

 

Le 12 juin 1792, Louis XVI renvoya les trois ministres girondins Servan, Roland et Clavière, et remplaça les deux premiers par Dumouriez et Mourgue. A cette nouvelle, La Fayette écrivit, le i 6 juin, à l'Assemblée nationale une longue lettre politique, où, après avoir applaudi à la chute d'un ministère, que ma correspondance accusait depuis longtemps, il traçait aux représentants du pays la marche à suivre pour sauver la chose publique. Il accusait la faction jacobine d'avoir causé tous les désordres, conseillait de rallier tous les citoyens autour de la Constitution, de garder le pouvoir royal intact et indépendant, de révérer le roi, de faire succéder au règne des clubs celui de la loi, et il terminait par cette déclaration :

Messieurs, j'ai obéi à ma conscience, à mes serments : je le devais à ma patrie, à vous, au roi, et surtout à moi-même, à qui les chances de la guerre ne permettent pas d'ajourner les observations que je crois utiles, et qui aime à penser que l'Assemblée nationale y trouvera un nouvel hommage de mon dévouement à son autorité constitutionnelle, de ma reconnaissance personnelle et de mon respect pour elle[64].

Le même jour, 16 juin, La Fayette envoya au roi une copie de cette lettre et il le félicita sur l'acte qu'il venait d'accomplir :

Persistez, sire, fort de l'autorité que la volonté nationale vous a déléguée, dans la généreuse résolution de défendre les principes constitutionnels contre tous leurs ennemis. Que cette résolution, soutenue par tous les actes de votre vie privée comme par un exercice ferme et complet du pouvoir royal, devienne le gage de l'harmonie qui, surtout dans les moments de crise, ne peut manquer de s'établir entre les représentants élus du peuple et son représentant héréditaire. C'est dans cette résolution, sire, que sont pour la patrie, pour vous, la gloire et le salut. Là vous trouverez tous les amis de la liberté, tous les bons Français rangés autour de votre trône pour le défendre contre les complots des rebelles et les entreprises des factieux. Et moi, sire, qui dans leur honorable haine ai trouvé la récompense de ma persévérante opposition, je la mériterai toujours par mon zèle à servir la cause à laquelle ma vie entière est dévouée, et par ma fidélité au serment que j'ai prêté à la nation, à la loi et au roi[65].

 

Ainsi La Fayette, de son camp de Maubeuge, en face de l'ennemi, régentait l'Assemblée nationale et le roi. Sa lettre, lue dans la séance du 18 juin par un des secrétaires, souleva une grande agitation parmi les députés[66]. On applaudit d'abord et on en vota l'impression ; mais Vergniaud fit justement observer qu'un général ne pouvait et ne devait adresser ses conseils que par l'organe du ministre. Guadet mit en doute l'authenticité de la lettre et s'écria : Lorsque Cromwell tenait un tel langage, la liberté était perdue en Angleterre, et je ne puis me persuader que l'émule de Washington veuille imiter la conduite de ce Protecteur. L'Assemblée renvoya alors la lettre au Comité des douze.

L'ingérence de La Fayette dans les débats législatifs fut sévèrement jugée dans la presse libérale. Condorcet reprocha au général, dans la Chronique de Paris, du 19 juin, d'accorder sa confiance à des intrigants et d'avoir commis en cette circonstance la plus grave des fautes[67]. Robespierre, dans le n° VI du Défenseur de la Constitution, publiait contre La Fayette un virulent article sous ce titre : Robespierre, citoyen français, à La Fayette, général d'armée[68]. Il concluait en ces termes :

Il n'est pour l'Assemblée nationale que deux alternatives : il faut, ou qu'elle déploie contre La Fayette une énergie digne de cet attentat, ou qu'elle descende au dernier degré de la faiblesse et de l'avilissement.

A la tribune des Jacobins, le soir du 18 juin, ce fut un débordement de colère contre La Fayette. Robespierre, le premier, s'écria :

Frappez La Fayette et la nation est sauvée. Quand le décret sera porté, la nation entière l'exécutera... Je finis par une réflexion. Le salut de la France est attaché au sort de La Fayette ; si on lui donne le temps d'achever ses complots, c'est fait de la liberté, mais, s'il est renversé sur-le-champ, la cause du peuple triomphe, et la liberté avec lui[69].

Danton appuya en ces termes la proposition de Robespierre :

Il n'est pas douteux que La Fayette ne soit le chef de cette noblesse coalisée avec tous les tyrans de l'Europe, et, s'il est vrai que la liberté soit descendue du ciel, elle viendra nous aider à exterminer tous ses ennemis.

Fabre d'Eglantine et Chabot parlèrent dans le môme sens, et Camille Desmoulins dit :

Vous savez bien que voilà deux ans que je me tue à crier aux départements : M. La Fayette est un grand coquin ! Aujourd'hui, quand j'ai vu sa lettre, j'ai dit d'abord : c'est un grand imbécile... Mais non, certes, ce n'en est pas un, car il a un conseil composé des meilleures têtes, des Du Port, etc.[70].

 

Le résultat de ces discours fut la rédaction d'une lettre de la Société des amis de la Constitution adressée, le 21 juin 1792, aux sociétés affiliées pour leur dénoncer La Fayette, qui de son camp, étend un bras protecteur sur le monarque, sur l'Assemblée nationale, et menace tous les courageux citoyens de l'Empire[71].

Malgré les reproches de ses adversaires et même de ses partisans. La Fayette continua, imperturbablement à mêler l'armée à la politique. Le nouveau ministre de la guerre, Lajard, était de ses amis. Le général lui écrivit, du camp de Bavay, le 22 juin, et, après lui avoir parlé des affaires militaires, il ajouta :

Tous ces objets, mon cher Lajard, quoique bien intéressants, le sont moins encore que notre situation politique ; c'est sur elle que doivent se porter tous les efforts de tous les bons citoyens. II n'y en a pas un que je ne tente plutôt que de voir la liberté, la justice et la patrie sacrifiées à des factieux. Mon combat avec eux est à mort, et je veux le terminer bientôt, car dussé-je les attaquer tout seul, je le ferai, sans compter ni leur force, ni leur nombre[72].

Le même jour, 22 juin, La Fayette reçut la nouvelle de l'affaire du 20 juin et il fut outré de l'attaque des Tuileries par le peuple et de la position critique du roi. Il envoya aussitôt Bureaux de Pusy au maréchal Luckner pour conférer avec lui sur la situation politique et militaire et lui demander s'il pourrait, sans inconvénient, quitter son armée pendant quelques jours et se rendre à Paris. Il le chargea d'une lettre, où il faisait au maréchal sa profession de foi :

Depuis que je respire, c'est pour la cause de la liberté. Je la défendrai jusqu'à mon dernier soupir contre toute espèce de tyrannie, et je ne puis me soumettre en silence à celle que des factions exercent sur l'Assemblée nationale et le roi, en faisant sortir l'une de la Constitution que nous avons tous jurée et en mettant l'autre en danger de sa destruction politique et physique. C'est celle des dix-neuf vingtièmes du royaume ; mais on a peur, et moi, qui ne connais pas ce mal-là, je dirai la vérité[73].

Luckner reçut Bureaux de Pusy avec bienveillance et estime, écouta ses explications et le congédia en lui remettant une lettre pour La Fayette, dans laquelle il déclarait ne pouvoir se porter en avant et laissait à son collègue la responsabilité du voyage qu'il voulait faire à Paris[74].

Le 25 juin 1792, La Fayette, rentré dans Maubeuge, demanda au ministre de renforcer ses régiments et il ne put s'empêcher de faire une sortie politique :

J'avoue, mon cher Lajard, que je ne sais comment arranger une combinaison de guerre tant que nos affaires intérieures seront dans cette situation anarchique, criminelle et inconstitutionnelle, qui décuple les moyens de nos ennemis et nous ôte tous ceux que nous devions avoir. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Un premier point essentiel est de garantir complètement toutes les places. Il y a eu beaucoup de négligence à cet égard. et j'ai été obligé de faire pour Longwy et Montmédy d'assez mauvais marchés, qui n'auraient pas eu lieu si l'on avait pris un système général.

La place de Verdun que l'on s'obstine à regarder comme de troisième ligne, et qui devient, par le fait, le point le plus important de mon commandement, doit attirer toute votre attention, et je crois que nulle dépense ne doit être épargnée pour la fortifier et l'approvisionner. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Il faudrait trouver un moyen de renforcer nos régiments de ligne, car nos escadrons et nos bataillons de dépôts se réduisent à rien. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Nous avons, dans les canonniers, un déficit vraiment effrayant ; c'est cependant notre seul point de supériorité sur les Prussiens. Joignez aussi l'artillerie à cheval, c'est une arme excellente. Le roi de Prusse amène, dit-on, six cents canonniers à cheval ; du moins M. Dumouriez me l'a mandé sur une lettre de M. Kellermann. Je voudrais que toutes nos pièces de huit et tous nos obusiers fussent servis par des canonniers montés. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

En vérité, mon cher Lajard, tout en dictant cette lettre, je me demande à quoi nous serviront ces dispositions si indispensables et si urgentes pour peu qu'on tarde encore à ramener par une crise salutaire l'ordre au dedans et à faire respecter la Constitution dont un des pouvoirs vient d'être si atrocement avili et sera peut-être ouvertement attaqué. L'indignation de l'armée à cet égard est un sentiment qui l'honore et que je partage plus que personne[75].

 

Soudain, l'obsession devint trop forte, les préoccupations politiques remportèrent sur les devoirs militaires. La Fayette, dont rien ne pouvait modérer l'audacieuse ardeur, crut que sa présence à Paris remettrait tout en ordre et qu'il sauverait à la fois la chose publique et le roi. Tout au moins pensait-il agir selon sa conscience, sans s'inquiéter du résultat. Les différents corps de son armée lui avaient envoyé des adresses exprimant leur dévouement à la Constitution, leur attachement pour lui et leur zèle à combattre les ennemis du dehors et les factieux du dedans. Ces témoignages, dictés par les chefs, confirmèrent encore La Fayette dans sa résolution. Toutefois il adressa, le 26 juin 1792, un ordre du jour à l'armée pour la remercier de ses sentiments et pour en modérer l'expression, de façon à éviter toute interprétation fâcheuse. Il terminait par ces mots :

Quelque soigneux que soit le général d'éviter pour l'armée jusqu'à la moindre apparence de reproche, il lui promet que, dans toutes les démarches personnelles, qui pourront contribuer au succès de notre cause et au maintien de la Constitution, il bravera seul, avec constance et dévouement, toutes les calomnies comme tous les dangers[76].

 

Le soir du même jour, il avertit ses soldats qu'après avoir pris, avec le maréchal Luckner, les mesures nécessaires pour mettre l'armée à l'abri de toute atteinte, il allait, dans une course rapide, exprimer à l'Assemblée nationale et au roi les sentiments de tout bon Français et demander en même temps qu'on pourvoie aux différents besoins des troupes[77].

Puis, laissant le commandement au maréchal de camp d'Hangest, La Fayette quitta Maubeuge avec un seul aide de camp et se dirigea sur la capitale, sans avoir pris conseil de personne et sans même avoir prévenu le ministre de la guerre[78].

 

 

 



[1] Je ne puis que renvoyer, pour l'état de l'armée française à cette époque, au chapitre II du livre de M. A. Chuquet, La première invasion prussienne.

[2] Cf. Archives historiques de la guerre, armée du Nord, registre de correspondance du général Biron, p. 18 et p. 32.

[3] Cf. Mémoires de La Fayette.

[4] Minute, Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[5] Joseph de Paignat, lieutenant général depuis le 6 février 1792.

[6] Jean-Louis, chevalier de Franc d'Anglure, lieutenant général depuis le 6 février 1792.

[7] Gabriel-Marie de Riccé, maréchal de camp depuis le 13 janvier 1792.

[8] Maximilien-Constantin de Wurmser, maréchal de camp depuis le 30 juin 1791.

[9] René-Charles-Elisabeth de Ligniville, maréchal de camp depuis le 13 janvier 1792.

[10] Hentz exposa les faits devant l'Assemblée nationale, le 23 février 1792. (Cf. Moniteur, t. XI, p. 502.)

[11] La Fayette était encore, le 20 février 1792, à Metz d'où il écrivit au ministre Narbonne. (Cf. Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.) — Le Patriote français, de Brissot, annonçait, le 24 février 1792 (n° 928, p. 220) : M. Rochambeau est encore à Paris. Le ministre de la guerre a écrit à MM. Luckner et La Fayette de s'y rendre, pour y concerter les opérations d'une guerre que la Cour ne veut pas.

[12] Cf. Moniteur, t. XI, p. 487.

[13] Le Patriote français annonçait, le 1er mars 1702 (n° 934, p. 244) : On assure que Luckner veut la guerre offensive, Rochambeau la paix, et M. La Fayette la guerre offensive, s'il y a guerre. — Le 7, il disait (n° 940, p. 269) : Luckner persiste toujours à croire que l'on est trompé par les négociations, que l'on aura la guerre et qu'il vaut mieux la prévenir. Il est incroyable que l'on laisse le commandement à M. Rochambeau, qui veut la paix, précisément dans la partie par laquelle il faudrait attaquer ; c'est la vraie place de Luckner.

[14] Cf. Mémoires de La Fayette.

[15] Cf. Mémoires de La Fayette. — Voir aussi Mémoires de Dumouriez, t. II, p. 225, et Jomini, t. II, p. 12 et 17.

[16] Cf. Moniteur, t. XI, p. 367.

[17] L'empereur Léopold II était mort brusquement le 1er mars 1792.

[18] On lit dans la Chronique de Paris, du 21 mars 1792 (n° 81, p. 324) : M. La Fayette est parti hier pour se rendre à Metz.

[19] On lit dans le Journal de Paris, du 4 avril 1792 (n° 95, p. 386) : Pendant que les généraux Luckner et La Fayette sont allés rejoindre les armées dont ils ont le commandement, le maréchal de Rochambeau est retenu ici par le mauvais état de sa santé.

[20] Cf. Arch. hist. de la guerre, armée du Nord, registre de correspondance de Biron, lettre du 31 mars 1792 à Dumouriez, p. 91.

[21] Cf. Vivenot, Quellen politik zur deutschen Kaiserpolitik Oesterreichs, 1873, t. Ier, p. 229.

[22] Cf. Arch. hist. de la guerre, armée du Nord, registre de correspondance de Biron, p. 122. — Le 13 avril, Dumouriez écrivit à Biron : Soyez sûr, mon ami, que M. de La Fayette ne commandera point l'armée du Nord, que, si M. de Rochambeau se trouvait malheureusement hors d'état de faire la campagne, on y ferait passer le général Luckner.

[23] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. III, p. 465.

[24] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. III, p. 479.

[25] N° 974, p. 404.

[26] Cf. le texte de cette lettre de Marat aux Pièces justificatives, n° XXI.

[27] On publia sur ce fait une caricature, dont je possède un exemplaire, et qui a pour légende : La démission motivée du 17 avril 1792. Elle représente : 1° Gouvion à la tribune, disant : Je pleure mon frère et l'inutilité de sa mort pour tous les contre-révolutionnaires, même des deux Chambres. — 2° Bouillé le traître, avec cette légende : Je ne laisserai pas pierre sur pierre. — 3° La Fayette, son parent, avec cette légende : L'appel nominal. — 4° Malseigne. — 5° Denou.

[28] Cet Hymne d'André Chénier fut publié dans le Journal de Paris du 15 avril 1792, n° 106, p. 429.

[29] Le 15 avril 1792. le médecin Marchand écrivait à La Fayette (Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre) : Dans les différentes visites que vous avez faites à l'hôpital de Metz depuis votre arrivée, vous avez constamment trouvé le bouillon trop faible et les diverses épreuves que vous avez fait faire sous vos yeux, quoiqu'elles aient produit quelque amélioration, n'ont pu totalement corriger le défaut dont vous vous plaignez et qui existe dans ledit hôpital depuis l'ordonnance de 1788.

[30] Minute, Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[31] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. III. p. 515.

[32] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. III, p. 523.

[33] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. III, p. 528. — Dans le Patriote français du 14 avril 1792 n° 978, p. 426. Brissot avait protesté contre l'accusation d'avoir vécu de la table de La Fayette, déclarant qu'il n'avait diné chez le général que deux ou trois fois en 1789.

[34] Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[35] Ces détails sont empruntés à une lettre, datée de Metz, 24 avril 1792, et publiée dans le Journal de Paris, du 29 avril, n° 120, p. 484.

[36] Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[37] Copie certifiée par Dumouriez, Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[38] On lit dans le supplément au Journal de Paris, n° 57, 25 avril 1792 : On écrit de Metz que M. de La Fayette a éprouvé, de la part de la noblesse, des désagréments qui ont mis de son côté le peuple qui la hait et les officiers qu'elle affecte de ne pas recevoir. Il maintient la discipline avec une extrême sévérité et les soldats ne l'en aimera que mieux. Leur expression ordinaire, en parlant de lui, est : Hommes et chevaux, nous nous ferions couper en quatre pour lui.... Tous les jours la parade défile en sa présence au son de l'air Ça ira. Les soldats sont enchantés et le peuple, qui s'y trouve toujours en foule, bat la mesure des pieds et des mains.

[39] Cf. lettre de La Fayette écrite de Givet, le 2 mai, au ministre. (Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.)

[40] Cf. A. Chuquet, La première invasion prussienne, p. 46, et Jacques Charavay, Les généraux morts pour la patrie, p. 1.

[41] Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[42] Cf. Moniteur, t. XII, p. 391.

[43] Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[44] Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[45] Cf. lettre du ministre de la guerre à Rochambeau, du 2 mai 1792, lettres de Rochambeau, du 4 mai au ministre et du 8 mai à l'Assemblée nationale, et lettre de Biron au ministre, du 8 mai. (Arch. hist. de la guerre, armée du Nord.)

[46] Cf. Chronique de Paris, du 8 mai 1792, n° 130, p. 516.

[47] Cette lettre n'a pas été insérée dans les Mémoires de La Fayette.   

[48] Arch. hist. de la guerre, armée du Centre, cahier n° 1 bis.

[49] Copie certifiée par Rochambeau. Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[50] Cf. Journal des débats et de la correspondance de la Société des amis de la Constitution, n° 57, du 24 mai 1792.

[51] Cf. lettre de Servan à La Fayette, en date du 19 mai 1792. (Arch. hist. de la guerre, armée du Centre, cahier n° 1 bis.)

[52] Cf. les adieux de Rochambeau à son armée, en date de Valenciennes, 19 mai 1792. (Impr., Arch. hist. de la guerre, armée du Nord.)

[53] Cf. Moniteur, t. XII, p. 490.

[54] Arch. hist. de la guerre, armée du Centre, cahier n° 1 bis. — Le Journal de la guerre, qui recevait des communications d'officiers ou de soldats des armées, dit dans son n° XXIX, du 30 mai 1792 : Les lettres du général sont d'une adresse infinie : il n'est pas moins de toute vérité que M. de Gouvion a été battu, qu'il a perdu canons, tentes, munitions de toute espèce ; il est certain que nos troupes ont montré le plus ferme courage. Qui a jamais douté de la valeur française ?

[55] Cf. Vivenot, Quellen zur politik der deutschen Kaiserpolitik Oesterreichs, 1874, t. II, p. 53.

[56] Cf. Moniteur, t. XIII, p. 2 et 3.

[57] Cf. Mémoires de La Fayette.

[58] Cf. Moniteur, t. XIII, p. 22.

[59] Cf. Mémoires de La Fayette.

[60] Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[61] Cf. dans le Journal de Paris, du 14 juin 1792, n° 166, p. 671, un extrait d'une lettre d'un officier de l'armée de La Fayette, en date de Maubeuge, 10 juin.

[62] Cf. Jacques Charavay, Les généraux morts pour la patrie, p. 2.

[63] Cf. Jared Sparks, t. X, p. 234.

[64] Orig., Arch. nat., C 353. — Le texte de cette importante lettre a été souvent réimprimé ; on le trouvera dans les Mémoires.

[65] Cf. Mémoires de La Fayette.

[66] Déjà, le 4 juin 1792, La Fayette avait été accusé de trahison par une dénonciation lue par Chabot, dans son rapport sur le comité autrichien, et il avait trouvé un défenseur dans Aubert Dubayet, qui exprima son mépris pour de telles calomnies proférées contre les généraux.

[67] Voici un passage de l'article de Condorcet : M. de La Fayette est-il l'ennemi de la libertés Non, mais la préférence constante qu'il accorde aux intrigants sur les honnêtes gens, aux gens adroits sur les hommes éclairés, aux valets complaisants sur des amis même indulgents, mais fermes, lui ont fait commettre bien des fautes, et celle-ci est la plus grave de toutes. Il lui reste un moyen de la réparer, c'est de rompre hautement, publiquement, sans aucune réserve, avec les agents imbéciles ou fripons qui en ont été les complices.

[68] Cet article a été reproduit dans l'Histoire parlementaire de la Révolution, t. XV, p. 78 à 98.

[69] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. IV, p. 11, et Ernest Flamel, Histoire de Robespierre, t. II, p. 187 et 188.

[70] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. IV, p. 12 à 15.

[71] Cf. Aulard, La Société des Jacobins, t. IV, p. 32. — Le 25 juin 1792, Sillery réfuta les calomnies dirigées par La Fayette contre les Jacobins. (Cf. Bibl. nat., Lb30 172, et Aulard, p. 49.)

[72] Orig., Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[73] Copie, Arch. nat., C 358.

[74] Voici le plus curieux passage de cette lettre. datée du quartier général de Menin, 23 juin 1792 (Copie, Arch. nat., C 358) : À l'égard de que vous me demandez sur la question de savoir si j'improuverais que vous sous absentassiez pour quelques jours de votre armée, je ne puis, sur cet article, que vous renvoyer à vous-même et vous laisser juge des inconvénients ou des avantages que vous trouveriez à une démarche sur laquelle je ne puis avoir aucune opinion. Ce que j'ai à vous demander, c'est le concert de vos opérations avec les miennes, et je suis bien persuadé que vous prendrez, dans toute hypothèse, des mesures telles que le service et le bien de la chose publique n'en souffriront pas.

[75] Arch. hist. de la guerre, armée du Centre.

[76] Copie signée par La Fayette, Arch. nat.. C 358. — Cf. Pièces justificatives, n° XXII.

[77] Cf. ordre du jour du 26 juin 1792 (copie signée par La Fayette, Arch. nat., C 358.) — Cf. Pièces justificatives, n° XXIII.

[78] Cf. Mémoires de La Fayette.