LES CÉSARS JUSQU'À NÉRON

TABLEAU DU MONDE ROMAIN SOUS LES PREMIERS EMPEREURS

LIVRE PREMIER. — DE L'EMPIRE

CHAPITRE PREMIER. — PAIX ROMAINE.

 

 

§ II. — TEMPS DES SUCCESSEURS D'AUGUSTE.

Malgré le conseil d'Auguste, que Tibère appelait un ordre[1], Claude envahit la Bretagne (an 43) et légua à ses successeurs une série de guerres inutiles à la grandeur de l'empire. Mais, du reste, la tradition d'Auguste fut suivie ; car je n'appelle pas conquête la réunion parfois momentanée de quelques monarchies vassales, dont les rois ne laissaient pas d'héritier, ou que supprimait, par forme de châtiment, la police des Césars[2].

Rome, en effet, aux temps de Claude et de Néron, pouvait se croire en sûreté contre les barbares. Elle était une, instruite, prévoyante, contre des peuples épars, ignorants, divisés. Profiter des querelles, encourager les révoltes, soulever des compétiteurs, se faire donner des otages que l'on renvoyait plus tard pour être rois, telle était la constante diplomatie de Rome, sur le Rhin sur le Danube, sur l'Euphrate. J'ai longtemps guerroyé en Germanie, disait Tibère, et j'ai plus fait par la politique que par les armes[3].

En effet, par sa seule politique, Rome poussait les barbares à leur ruine. Les Germains, quand leur grande ennemie n'était plus là, tournaient les armes contre eux-mêmes. Armin, pour avoir voulu maintenir, par un peu de pouvoir, la ligue qu'il avait formée, Armin passait pour un tyran et était assassiné (an 21). Marbod, chez les Suèves plus accoutumés cependant au pouvoir d'un seul, Marbod succombait devant des querelles intestines (an 19), et s'en allait mourir en Italie, prisonnier de Tibère. Les deux grandes ligues teutoniques furent ainsi dissoutes. Ces peuples guerroyaient pour leurs incertaines limites, se heurtaient, changeaient de demeure, parfois étaient détruits, parfois venaient demander asile sur la terre romaine. Les belles plaines de la Gaule ne cessaient pourtant pas de leur faire envie ; la somnolence de l'aigle romaine les encourageait ; ils essayaient de craintives et rapides invasions, pillant quelques terres et se retirant à la hâte comme le moucheron qui s'est posé sur la crinière du lion endormi. Le lion romain se secouait dans son repos et se soulevait lentement pour une défense qu'il croyait à peine nécessaire. Une sorte de trêve s'établissait entre le barbare toujours tenté, effrayé toujours, et le Romain, sentinelle endormie sur sa vieille lance, qui mettait volontiers son sommeil d'aujourd'hui sous la protection de sa gloire passée. Les incursions étaient rares, la défense était molle. Le Germain laissait sommeiller les vedettes romaines ; les clairons romains ne venaient plus éveiller les échos des forêts teutoniques. Rome qui n'avait plus, pour pressentir ses adversaires d'au delà du Rhin, le coup d'œil de César et d'Auguste, Rome se reposait sur cette trêve tacite qu'elle croyait une paix, et une paix éternelle.

Sur le Danube, sa sécurité pouvait être plus grande encore. L'empire de Marbod s'était brisé, et, à sa place, des royautés vassales, d'humbles monarques qui recevaient leur couronne de César, habituaient la rive gauche du fleuve à l'obéissance envers Rome[4]. Ce qui restait de peuples indépendants se consumait en guerres intestines ; en face d'eux, une seule légion, paisible spectatrice de leurs combats, était debout sur le bord du fleuve, veillant à la sûreté de la rive romaine[5]. La flotte romaine recueillait les fugitifs ; Rome, afin que la guerre fût éternelle, se faisait la protectrice des vaincus.

Sur l'Euphrate enfin, d'interminables révolutions affaiblissaient l'empire des Parthes. La diplomatie romaine trouvait son compte dans tous les crimes[6]. Parmi ces compétiteurs renversés et rétablis d'un jour à l'autre, qui se faisaient la guerre avec le fer ou le poison, le candidat de Rome était toujours celui qui n'était pas sur le trône. Elle avait toujours en réserve quelque jeune Arsacide qu'elle s'était fait donner comme otage et qu'elle avait façonné à la romaine : au jour des révolutions, arrivait sur l'Euphrate ce prétendant oublié, avec ses habitudes civilisées, ses compagnons grecs, son dédain pour l'ivrognerie et pour la chasse ; odieux à la noblesse, aimé du peuple. Par ces luttes perpétuelles, la puissance du roi des rois était abaissée. Rome le traitait en vassal[7] ; ces otages reçus et gardés à Rome, ces rois donnés par César, acceptés, demandés quelquefois par les Parthes[8], c'étaient, aux yeux de Rome, autant d'actes de sa suzeraineté universelle. L'Arménie, cette royauté arsacide, n'était déjà plus qu'un fief romain[9].

Ainsi rassurée contre ces trois grands ennemis, Rome avait eu bon marché de moins redoutables voisins. Par la soumission de la Thrace longtemps inquiète et remuante (an 43), la Macédoine était en sûreté. Depuis la défaite de Tacfarinas[10], Rome n'avait plus à guerroyer en Afrique. La frontière du nord et de l'orient, cette ligne de plus de mille lieues qui commençait au Zuyderzée et finissait aux sables d'Arabie, était gardée habituellement par vingt légions[11] (cent vingt mille hommes) ; et même il fallait des canaux à creuser, des routes à construire, des mines à exploiter pour occuper le loisir du soldat. En Syrie, avant la dernière guerre, on voyait des vétérans qui avaient passé leur temps de service à trafiquer et à s'engraisser dans les villes sans savoir seulement ce qu'était une palissade ou un fossé[12]. Gardée moins par sa force que par la terreur de son nom, Rome proclamait que, rassasiée de gloire, elle en était venue au point de souhaiter la paix même aux peuples étrangers[13].

En effet, jusqu'où ne va pas le nom de Rome ? Quel peuple n'a entendu parler de sa grandeur ? Autour d'elle s'étend le cercle immense de ses provinces ; ces peuples sans nombre, ces milliers de villes qui lui paient l'impôt et obéissent à ses proconsuls : — plus loin le cercle indéfini de sa suzeraineté : les princes qui lui rendent hommage, les peuples germains qui, à titre d'impôt, combattent pour elle, l'Arménie à qui Néron vient de donner un roi : — plus vaste et indéfini encore, le cercle des peuples que Rome tient dans l'épouvante ou qu'elle protège, mais qui tous écoutent avec une respectueuse terreur le moindre bruit qui vient des bords du Tibre, peuples d'une douteuse liberté ; telles les nations du Bosphore et celles du Caucase, contre lesquelles Néron allait tenter une folle guerre. Jusqu'où ne sont pas allées les armées romaines ? Vers le nord-est, elles sont arrivées à trois journées de marche du Tanaïs[14]. Vers le midi, Ælius Gallus les a menées jusqu'au bout des déserts de l'Arabie, expédition malheureuse, mais où il n'a pas perdu plus de sept hommes dans les combats[15]. Suetonius Paulinus, en dix jours, est arrivé au delà du mont Atlas, et, à travers des plaines couvertes d'une cendre noire, a pénétré jusqu'au Niger[16]. Les cohortes du préfet d'Égypte ont remonté le Nil jusqu'à la capitale de l'Éthiopie, et les députés de la reine noire, Candace, sont venus se jeter aux pieds d'Auguste[17]. Un autre général est allé troubler, dans les sables africains, les peuples à demi fabuleux qui les habitent, et est revenu dans Rome triompher de vingt nations que Rome ne connaissait pas[18].

Allez plus loin. Où Rome n'a pas conduit ses armées, elle est présente par ses commerçants et ses voyageurs, par son luxe ou par sa science. Néron a fait rechercher les sources du Nil jusqu'en un lieu où des marais immenses arrêtent également le piéton et le batelier[19]. Les îles Fortunées, trop bien connues, ne sont plus le séjour des bienheureux, et depuis que le roi Juba y a établi une fabrique de pourpre, la mythologie, chassée de ces rivages, a dû porter plus loin ses traditions poétiques[20]. L'Inde, déjà pénétrée par les navigateurs macédoniens, déjà accessible par deux routes de terre, se rapproche de Rome par la découverte d'Hippalus : cet Égyptien a observé la marche des vents réguliers que connaissaient les seuls Arabes, et une flotte de cent vingt navires marchands, d'après ses instructions, S'est embarquée sur la mer Rouge ; chaque été la flottille romaine arrive dans l'Inde en quatre-vingt-quatorze jours, et revient avant l'année écoulée[21].

Enfin sur l'Océan, la conquête de la Bretagne a dû agrandir la sphère de la géographie antique. Une flotte romaine, probablement sous le règne de Claude, a fait le tour de cette île, qu'auparavant on appelait un monde. Elle a reconnu Ierné (l'Irlande), pays barbare où le fils se nourrit, dit-on, de la chair de son père. Elle a soumis les Orcades ; elle a enfin, en naviguant sur une mer paresseuse que la rame pouvait à peine soulever, aperçu la terre de Thulé[22]. Thulé est le nom que l'antiquité donne toujours à la dernière terre signalée vers le nord[23]. Pythéas la place où est le Jutland ; il la peint comme une côte sablonneuse qui mêle à la mer l'arène de ses dunes, où les nuits d'été sont à peine de quelques heures[24]. Pline la fait remonter vers le pôle, la met à l'entrée d'un océan de glace, y compte six mois de jour et six mois de nuit. Et à son tour le poète tragique, inspiré peut-être par des traditions antiques, prophétise le temps où l'Océan, ce lien de la terre, laissera passage à l'homme vers des contrées nouvelles, et où la lointaine Thulé ne sera plus l'extrémité du monde[25].

Or, les peuples que Rome va chercher si loin à leur tour viendront à elle. Le Sahara lui enverra pour l'amphithéâtre ses lions, ses serpents énormes et sa girafe merveilleuse ; de main en main, de peuple en peuple, l'ambre de Livonie, la soie du pays des Sères (la Chine) lui sera apportée : Tant il faut, s'écrie Pline, de fatigues et de voyages pour que nos matrones aient des habits qui ne les voilent pas ![26] L'Inde, non contente de trafiquer avec Rome, veut communiquer avec elle par des ambassadeurs. Deux ambassades indiennes[27] après des fatigues infinies, sont arrivées à Auguste ; et, de même qu'Alexandre reçut à Babylone des députés gaulois et espagnols, le fils d'Atia dans Tarragone a reçu les députés qui lui demandaient son amitié au nom d'un Porus, souverain de six cents rois. Et enfin une ambassade chinoise (nous sommes autorisés à le dire) serait venue dans la ville de Rome saluer le chef du grand Empire (Ta-thsin), et un traité a réglé la marche des caravanes qui désormais apporteront en Chine l'or romain et donneront à Rome la soie dont Rome ignore même le secret[28]

Au contraire, hors de Rome, hors de l'influence et de la portée de son nom, que trouvons-nous ? Voyez ces steppes immenses qui s'étendent entre la Baltique et la mer Noire, dans lesquelles s'échelonnent les deux races gétique et sarmatique, qui seront célèbres dans l'avenir, qui sont obscures et méprisées aujourd'hui. Les plus proches voisins de Rome sont les Daces, déjà puissants et connus, les pères, dit-on, de la race slave d'aujourd'hui : plus loin et plus obscurs, les Venèdes ou Vandales (Venedi, Vendili), illustres au siècle de la destruction de l'empire et dans l'histoire slave du moyen âge ; — au delà, parmi ces tribus sarmates qui les poussent sur le Danube, tous les degrés et tous les caprices de la barbarie. Ceux-ci noircissent leur visage et ne combattent que par des nuits sombres, bataillon funéraire dont nul, dit-on, ne supporte le regard ; ceux-là pourrissent dans la torpeur et la saleté, ignorant le mariage et se souillant par une promiscuité honteuse. — Les Finnois (Fenni) ont pour lit la terre, pour vêtements des peaux de bête, pour aliments le produit de leur chasse, pour armes des flèches garnies d'arêtes de poisson ; les branches des arbres sont leur demeure : Bienheureux, dit Tacite dans un accès de misanthropie à la façon de Rousseau, qui ne craignent ni hommes ni dieux, et n'ont plus même un vœu à faire ![29] — Voulez-vous marcher davantage ? Voulez-vous entrer dans le domaine de la géographie fabuleuse ? Êtes-vous curieux de connaître les Oxions à têtes d'hommes sur des corps de bêtes, les bienheureux Hyperboréens, les Agathyrses aux cheveux bleus ; les monts Riphées, l'axe du monde, lieux où les ténèbres sont éternelles : toutes choses que Tacite a la bonté de ne pas affirmer et qu'il laisse dans un doute prudent[30] ?

Ainsi, près de Rome la lumière, loin de Rome la barbarie : à mesure qu'on s'éloigne d'elle, les ténèbres s'épaississent ; on arrive au. monde des fables et des chimères. N'est-elle pas en droit de se dire le centre du monde ? Bien que ses conquêtes n'aient pas dépassé le Rhin et l'Euphrate, que ses voyageurs ne dépassent guère l'Elbe et l'Oxus[31], tout ce qui est civilisé la connaît ; tout ce qui la tonnait vient à elle ; tout ce qui s'approche d'elle sent plus ou moins son influence. Son empire, comme un vaste édifice, projette autour de lui une grande ombre sous laquelle décroît et l'indépendance et la barbarie des nations. Si quelques peuples, disgraciés de Jupiter, vivent en dehors de cette influence et, comme dit Pline, de cette immense majesté de la paix romaine[32], leur obscurité permet de les oublier, et Rome ne perd pas son temps à compter tout ce qu'il y a de nations errantes par delà l'Ister[33]. Elle dit, sans soupçonner qu'on puisse l'accuser de mensonge, que toute terre habitable, toute mer navigable lui obéit[34] ; elle dit à meilleur droit encore : Il n'est pas de nation au monde qui ne soit ou subjuguée au point d'avoir presque disparu, ou maîtrisée au point d'être réduite au repos, ou pacifiée au point de n'avoir qu'à se réjouir de notre domination et de notre triomphe[35]. Et quand ses armées se trouvent en face des barbares, et que ceux-ci crient : Qui vive ? on n'hésite pas à répondre : les Romains, maîtres des nations[36]. Ainsi était constituée la puissance romaine au dehors. Maintenant c'est le secret intérieur de l'empire qu'il nous faut connaître, le secret de sa force, de sa cohésion, de sa durée, en un mot, de ce que nous avons appelé l'unité romaine.

 

 

 



[1] Augustus id consilium vocabat, Tiberius præceptum. (Tacite, in Agricola, ibid.)

[2] Voici celles de ces réunions qui ont été définitives : Sous Auguste, le royaume des Galates (an 728). Dion, LIV. Strabon, XII. — Sous Tibère celui de Cappadoce. Dion, LVII. Tacite, Annal., II, 42. Josèphe, Ant., XVII. 15 (an de J. C. 18). — Sous Caligula, la Mauritanie (an 40) Dion, LX — Sous Claude, la Judée après la mort d'Agrippa (an 48) ; l'Arabie-Idumée (an 49, Josèphe) ; la Thrace (an 46. Tacite, XII, 63) ; la Lycie (an 43. Dion, LX. Suet., in Claud., 5). — Sous Néron, le Pont-Polémoniaque (an 66), le royaume de Cottius dans les Alpes. (Dion, LX.)

[3] Tacite, Annal., II, 17.

[4] Tacite, German., 42 ; Annal., XII, 30.

[5] Ne victores, successu elati, pacem nostram turbarent. (Annal., XII, 56.)

[6] Omne scelus externum cum gaudio habendum, dit un gouverneur romain. Tacite, Annal., XII.

[7] Claude parle au roi parthe Méherdate de Romano fastigio Parthorumque obsequio. (Tacite, Annal., XII, 11.) Déjà le roi parthe, Phraate, cuncta venerantium officia ad Augustum verterat. (Id., II, 1.) Strabon en dit autant : ils ont renvoyé leurs trophées, confié leurs fils à Auguste, soumis aux Romains le choix de leur roi. VII, in fine.

[8] Tacite, Annal., XII, 10.

[9] Armenii semper romanæ ditionis aut subjecti regis quem imperator delegisset, dit un chef romain à peu près prisonnier des Parthes ; et tout ce que répond le Parthe vainqueur, c'est : Imaginem retinendi largiendive penes nos (Romanos), vim penes Parthos. (XV, 13, 14.)

[10] Ans 17-24. V. Tacite, Annal., II, 52 ; III, 73, 74 ; IV, 4, etc.

[11] Il semble même qu'après la mort de Néron, il n'y eut plus que trois légions au lieu de quatre sur le Danube.

[12] V. Tacite, Annal., XI, 18 (an 47) ; XIII, 35 (an 59).

[13] Claude au roi parthe Méherdate (an 50). Tacite, Annal., XII, 10.

[14] Tacite, Annal., XII, 17 (an 50).

[15] An de Rome 719. Strabon.

[16] Ou plutôt jusqu'au Gyr. Pline, Hist. nat., V, 1 (an de J.-C. 42).

[17] Strabon (an de Rome 732).

[18] Cornelius Balbus sous Tibère (Pline, ibid., V, 5). Il aurait pénétré jusque vers le 25e degré de latitude.

[19] Senec., Nat. quæst., VI, 8 : Pline, ibid., VI, 29.

[20] Pline, Hist. nat., VI, 31, 37. Horace, Epod., 26.

[21] Strabon.

[22] Tacite, in Agricola, 10. Pline, ibid., IV, 30 (16) et Pomponius Mela, contemporain de Claude, parlent des Orcades, ce qui indique que ce voyage, où elles furent découvertes, diffère du voyage de circumnavigation ordonné par Agricola sous Domitien.

[23] Ultima omnium que memorantur, Thule. Pline, II, 77, 112 ; IV, 30 (16).

[24] Strabon.

[25] SENEC., Trag.

Venient annis

Secula seris

Quibus Oceanus

Vincula rerum

Laxet, et ingens

Pateat tellus,

Nec sit terris

Ultima Thule.

[26] Tanto labore, tanto itinere paratur, ex quo matrone transluceant. (Pline, II, 4.)

[27] Ans de Rome 739 et 734. Suet., in Aug., 21. Hieronym., Chronic. Orose, VI, 21. Strabon, XV, 1. Florus, IV, 12 (qui joint ici les Sères avec les Indiens). — Aurel. Victor, de Cæsaribus. Horace, Carmen seculare : Jam Scythæ responsa petunt, superbi nuper, et Indi. Et, d'après l'inscription d'Ancyre, lue en 1861 par M. Perrot plus complètement qu'elle ne l'avait été jusque-là, des ambassades des rois de l'Inde avaient été envoyées à Auguste, ce qui n'était arrivé jusque-là à aucun chef romain.

[28] V. sur ce sujet M. Reinaud, Relations de l'Empire romain avec l'Asie orientale (§ 1er, p. 114 et s.). Après avoir établi l'identité des Sères avec les Thince ou Chinois, il cite Horace comme témoin des relations politiques de Rome avec les Sères (Od., III, 29 ; IV, 15), et Florus (IV, 12) qui atteste le fait de l'ambassade, ajoutant que le teint des ambassadeurs prouvait bien qu'ils étaient nés sous un autre ciel et que leur voyage avait duré quatre ans.

Ta-thsin est le nom que les annales chinoises donnent à l'empire romain. Elles reproduisent aussi l'appellation de César (Kai-sa).

[29] Rem difficillimam assecuti sunt ut illis ne voto quidem opus sit. German., cap. ult.

Et Horace de même :

Campestres melius Scythæ

Vivunt et rigidi Getæ

Quorum plaustra vagas rite trahunt domos.

(Ode, III, 24.)

[30] Quod ego, ut incompertum, in medio relinquam. (Germania, in fine. V. aussi Pline, Hist. nat., IV, 2.)

[31] Strabon, XI, 13.

[32] Immensa pacis romanæ majestate. (Pline, Hist. nat., XXVII, 1.)

[33] Et quidquid ultra Istrum vagarum gentium est.... Gentes in quibus Romana pax desinit. (Senec., de Providentia, 4.)

[34] Josèphe, de Bello, II, 16. Denys d'Halicarnasse. — Et Virgile : Romanos rerum dominos.

[35] Cicéron.

[36] Florus, IV, 12. C'est ce que dit M. Reinaud dans son Mémoire déjà cité : Tel était le prestige exercé par le nom Romain, que jusqu'au règne du grand Constantin, le nom de Rome se trouve dans toutes les bouches, amies ou ennemies, depuis l'océan Atlantique jusqu'à la mer de Chine, depuis la mer Baltique, le Palus-Méotide et la mer Caspienne jusqu'au fleuve Niger, aux sources du Nil et à la mer des Indes, et que toute secousse qui ébranlait Rome ébranlait le vieux monde tout entier. Il n'avait pas existé d'empire pareil et l'on n'en verra peut-être plus de semblable. p. 18.