LES CÉSARS JUSQU'À NÉRON

 

NÉRON.

 

 

§ II. — NÉRON ET SON PEUPLE.

Mais c'étaient là les affaires du palais et non celles de l'empire.

Tandis que le sang impérial coulait ainsi, sang privilégié, querelles domestiques auxquelles le peuple avait rarement l'indiscrétion de se mêler, Néron laissait le pouvoir à Sénèque et à Burrhus, négligeant assez les affaires de l'État pour les abandonner à ceux qu'on appelait les honnêtes gens. Après le meurtre d'Agrippine, il eut même une recrudescence de popularité : il rappela d'exil les disgraciés de sa mère, éleva des tombeaux à ses victimes, faisant ainsi étalage des cruautés d'Agrippine. Trois ans après le matricide (an 63)[1], Thraséa lui-même louait ce gouvernement qui avait aboli le lacet et le bourreau ; Rome, qui avait souffert Séjan, Tibère, Caligula, Claude, Messaline, Agrippine, ne devait pas se montrer difficile en fait de miséricorde et de clémence.

Cependant le caractère impérial se développait. Ce caractère avait son côté élégant, artistique, civilisé, ses prétentions au talent et ses ambitions soi-disant innocentes. Caligula, quelque fou qu'il pût être, n'avait été ni un génie oisif, ni une intelligence éteinte. Néron à son tour était trop empereur pour ne pas avoir tous les goûts de son siècle. Poète, il rassemblait chez lui les beaux esprits du temps, qui venaient dans ces soirées littéraires apporter chacun son hémistiche, et de ces hémistiches réunis étaient formés les poèmes de Néron[2]. Orateur, il se fit décerner la palme de l'éloquence (sans concours, il parlait trop mal). Philosophe, il appelait les stoïques à sa table, et se divertissait de leurs disputes. Que sais-je ? il était peintre, sculpteur, chanteur, joueur de lyre[3]. Bien mieux, il était cocher. Ces manies d'artiste rendaient-elles Néron plus noble et meilleur ? Non : on n'est pas une grande âme parce qu'on est un grand artiste, encore moins parce qu'on est un artiste médiocre. D'ailleurs, selon la morale et la loi romaines, les talents de ce genre étaient choses réprouvées, interdites, déshonorantes[4] : jouer de la lyre était une honte ; danser, c'était abdiquer toute pudeur virile. La vieille morale, impuissante contre les arts, était assez puissante encore pour dégrader les artistes.

. Ajoutez à cela cet esprit de la décadence romaine qui matérialisait toute chose. La peinture et la sculpture n'étaient plus ces arts sacrés du temps de Phidias ; le talent du cocher et celui du pantomime étaient bien autrement populaires. La musique même, la passion favorite de Néron qui eut toutes les passions ; la musique, cet art si grave et si saint de la Grèce, qui en avait fait un des fondements de la cité, la musique n'était plus qu'un métier de mendiant. Elle n'accompagnait plus que les tueries de gladiateurs, les soubresauts des funambules, l'orgie des festins. Et il faut le dire, des arts à la volupté, de la volupté à la corruption, de la corruption au meurtre, le passage était plus court que nous ne pouvons le comprendre.

Quant à Néron, sa mère, avec cette dignité hautaine que la corruption tempérait, ses deux malins avec leur indulgente vertu, le gênèrent quelque temps. Mais, une fois délivré de sa mère, sa passion éclata. Les occasions ne manquaient pas. Il y eut des fêtes théâtrales, même en l'honneur d'Agrippine morte, qu'on prétendait honorer en même temps qu'on la maudissait. Il y en eut en l'honneur de la première barbe de Néron, fête domestique dont les courtisans surent faire une fête publique (an 59). Il y eut des jeux Juvénaux, institués cette année même par Néron, où tous, au gré du prince, étaient conviés à remplir un rôle ; il y eut des jeux Quinquennaux (an 60), autre fondation néronienne, divertissements littéraires et dramatiques, imités de la Grèce et trop fidèlement imités de la Grèce[5]. Or, était-il possible que le prince ne contribuât pas de ses propres talents aux divertissements de son peuple ? Était-il possible que l'art, ou ce qu'il appelait l'art, étant tellement mis en honneur, le prince artiste ne se révélât pas ?

Sénèque et Burrhus eux-mêmes n'osèrent résister au torrent. Tout ce qu'ils cherchèrent à obtenir, ce fut que Néron se contentât de produire ses talents dans une réunion intime, devant un public choisi. Comme les princes modernes ont la comédie dans leurs appartements, Néron eut dans ses jardins du Vatican un cirque fermé au peuple, dans lequel il conduisait les chars pour le bonheur de ses amis ; dans son palais, un théâtre de société où il chantait seulement pour ses intimes.

Mais bientôt le peuple, bon courtisan, fit tapage, ne voulut plus de ses chanteurs ni de ses cochers roturiers, et demanda Néron[6] ! Comment le lui refuser ? Néron parut donc sur le théâtre du peuple, appelé de son nom par le préteur Gallion, tenant en main la cithare et vêtu de l'habit des chanteurs publics. Il y parut, timide, d'autant plus qu'il sentait la médiocrité de son talent, tremblant devant ses juges, essuyant la sueur de son front, saluant le peuple, accordant sa lyre et disant humblement : Mes seigneurs, écoutez-moi avec bienveillance.

Croyez-vous cependant que l'empereur sur la scène ne sera plus l'empereur ? qu'au moment où il chante Attys devant le peuple et les soldats, son cortège de centurions l'abandonnera ? qu'il n'aura pas un consulaire pour porter sa lyre, un consul pour faire l'annonce du spectacle et réclamer l'indulgence du public en faveur de ce timide débutant ? que Burrhus et Sénèque (oui, ces deux sages !) ne seront pas auprès de lui pour le souffler, et ensuite pour lever les mains, agiter leur tunique et donner le signal des applaudissements ; qu'il n'aura pas — d'autant que sa voix est faible et enrouée — cinq mille chevaliers romains, jeunes, robustes, enrôlés sous le nom d'Augustani, destinés, non pas seulement à l'applaudir, mais à le chanter et à passer les nuits et les jours à exalter sa beauté divine et sa voix divine ? qu'à leur suite, tout le peuple, bon gré mal gré, ne sera pas requis d'applaudir, de bénir, de chanter, d'adorer[7] ?

Croyez-vous même que Néron, abaissant la dignité impériale, et surtout la dignité romaine, à ces métiers de cocher, de chanteur, de comédien, que Horne tenait pour un déshonneur, ne voudra pas avoir des compagnons de son déshonneur ? N'y a-t-il pas eu, je ne dirai pas chez lui, — ce n'est guère possible, à raison de son âge et de la faiblesse de son esprit —, mais chez les affranchis qui le dirigeaient, un parti pris de tuer par le déshonneur tout ce qui restait de l'ancienne Rome, et d'achever par la prostitution la ruine de cette noblesse que Tibère avait mutilée par là proscription ? Hélas ! la noblesse ne s'y prêtait que trop ; sous César, sous Auguste, sous Tibère, il s'était vu de honteux exemples, et c'est une gloire pour Claude de s'être opposé à cet avilissement[8]. Mais aujourd'hui, c'est bien autre chose. Les jeux Juvénaux et les jeux Quinquennaux ont été spécialement établis pour faire monter sur le théâtre ceux qui n'en faisaient pas métier, et pour donner à Néron des collègues qui le relèvent en se déshonorant. Que nul donc ne rougisse des tréteaux ! Si Néron chante, il faut pour accompagner sa voix, un chœur de sénateurs, de consulaires et de matrones ; s'il monte sur la scène, il faut que toute l'aristocratie l'y accompagne. Une école est ouverte où, jeunes et vieux, toute la noblesse vint apprendre l'art des histrions. D'abord Néron a gagné à des prix énormes quelques nobles ruinés ; la peur, l'esprit de cour, la force au besoin, en amèneront assez d'autres[9]. Ne cherchez plus la vieille Rome au temple, au Forum et au sénat ; six cents chevaliers, quatre cents sénateurs, des femmes de grande famille, sont appareillés pour l'arène ; d'autres chantent, conduisent des chars, jouent de la Otite, font les bouffons. Le monde vaincu va contempler là les descendants de ses vainqueurs, rire des lazzis d'un Fabius ou des grandes tapes que les Mamercus se donnent[10]. Tacite ne veut pas les nommer par respect, dit-il, pour leurs aïeux ; mais Dion est Grec et ne craint pas de prononcer les noms de ces Romains : Il y avait là, à ces jeux mêmes que Néron donnait en l'honneur de sa mère assassinée par lui (an 60), des Macédoniens assis au spectacle, qui disaient : Celui-ci est un petit-fils de Paul-Émile ;des Siciliens : Voilà un Claudius ;des Carthaginois : Voilà un Scipion ;des Romains enfin, qui les connaissaient et les nommaient tous[11]. La vertu de Thraséa elle-même a joué un rôle dans les jeux Juvénaux ; la noblesse d'une Élia Catulla vient, à quatre-vingts au, danser sur le théâtre ; la bonne renommée d'un chevalier romain est à cheval sur un éléphant[12]. Ceux mêmes qui, trop vieux ou trop infirmes, ne peuvent faire autrement, chantent ou font semblant de chanter dans des chœurs. Quelquefois la honte les prend, et, tout en obéissant au maitre, ils ne voudraient pas se déshonorer devant le peuple ; ils masquent leur visage. Mais ce que le maitre veut, c'est justement les déshonorer ; le peuple, complice de Néron, demande qu'on ôte les masques et Néron les fait ôter. C'est ainsi que les pantomimes, jusque-là adorés des sénateurs et châtiés par le sénat, objet des sévérités officielles et des admirations privées, expulsés périodiquement de l'Italie et y revenant toujours, se vengent da dédain de la vieille Rome en lui tendant la main pour monter sur les tréteaux ; l'ami de Néron, l'histrion Paris, que plus tard il fera mourir par jalousie d'artiste, aujourd'hui, afin de gagner ses éperons de citoyen, se fait donner par son prince tous les patriciens pour camarades[13].

Il y a quelque chose de plus déshonorant encore. Cette prostitution de la noblesse par le théâtre ne suffit pas, il en faut une autre. Les jeux Juvénaux avaient déjà été accompagnés de scandales de ce genre ; et plus tard, à une époque où Néron était dans la plénitude de sa puissance, une de ses innombrables fêtes fut signalée par des excès qu'il n'est pas possible de raconter. Dans cette orgie monstrueuse, tout ce qui s'appelait encore noblesse, honneur, vertu, pureté, liberté, ou du moins tout ce qui jusque-là en avait prétendu porter le nom, fut jeté en proie à une démocratie (qu'on l'appelle ainsi si l'on veut) de prolétaires, de déshonorés et d'esclaves[14]. Néron était démocrate, oui sans doute ; il l'était, non pour ennoblir ce qui est petit, mais pour avilir ce qui est grand. Sa politique était de dégrader autrui, comme lui-même se dégradait. Dans cette lutte par la prostitution, l'aristocratie qui la subit est coupable comme le prince qui l'inflige ; il faut qu'elle soit déjà bien corrompue pour ne pas rejeter au prix de sa vie cette corruption dernière. Mais que dire du prince qui, pour tuer l'aristocratie, ne sait mieux faire que de l'associer à ses plaisirs, de la faire aussi vile que lui-même et de la jeter dans la fange où il vit ?

Cependant, il faut dire aussi le noble côté des choses ; dans cette triste histoire, nous le rencontrons si rarement ! Tous ne cédaient pas, tous ne s'avilissaient pas ; il y eut même sous Néron, peut-être parce que la dégradation était plus grande, des résistances plus nombreuses et plus hardies que sous Tibère. La fierté de l'aristocrate, du Romain, de l'homme libre, de l'homme de cœur, se relève parfois. Des hommes se rencontrent ou qui se refusent à l'outrage au risque de leur vie, ou qui, après l'avoir subi, ne se consolent pas. Bien des gens peut-être, qui d'eux-mêmes seraient montés volontiers sur le théâtre, gardent rancune à Néron de les y avoir fait monter de force.

Néron voit donc s'élever son grand et sérieux ennemi. Le stoïcisme a un peu retrempé le vieil esprit romain. Il se fait une alliance entre la philosophie et le patriciat, entre la vieille Rome et la Grèce nouvelle, une alliance défensive contre l'esprit impérial. Le sénat, qui garde encore depuis l'avènement de Néron quelque liberté de délibération, laisse cette opposition se trahir ; le jurisconsulte Cassius fait entendre dans son sein ces graves paroles : Plus d'une fois, pères conscrits, j'ai vu proposer dans cette enceinte des mesures contraires aux lois et aux traditions de nos aïeux ; et si je ne les ai pas combattues, ce n'est certes point que je ne crusse plus sages et plus justes en toute chose les règlements de nos pères. Mais d'un côté, je ne voulais pas affecter devant vous un amour. exagéré des traditions antiques ; de l'autre, si nous avons quelque autorité, je ne crois pas qu'il faille l'affaiblir par des luttes continuelles, et j'ai voulu la garder entière pour le jour où la chose publique aurait besoin de nos conseils[15]. Cassius, un de ces hommes dont il semblerait que l'espèce n'eût pas dit survivre à la bataille de Philippes, conserve chez lui l'image du meurtrier de César son aïeul, avec cette inscription : Au chef de parti[16]. En même temps, au milieu des voluptés de Rome, des hommes, des femmes se rassemblent dans les jardins pour entendre le philosophe cynique Démétrius, cet homme hardi qui répond à Néron : Tu me menaces de la mort, la nature te rend ta menace ; qui, en plein gymnase, en face du sénat, des chevaliers et de César, tonne contre les bains, le luxe, toutes les délicatesses de la vie romaine[17]. Et, tandis que toute la domesticité militaire du palais, les centurions aux barbes de bouc, la jeunesse musculeuse du prétoire[18], s'insurge contre la philosophie, raille le manteau du stoïque, vend pour cent as cent de ces docteurs grecs[19] ; le stoïcisme, qui est politique de sa nature et pousse le sage vers les affaires, quoi que puisse faire le prudent Sénèque pour l'en écarter[20], le stoïcisme se constitue en parti.

Ce parti a déjà son chef et son futur empereur. Un homme allié à la maison des Césars, d'un extérieur sévère, d'une chaste simplicité dans sa maison, entouré de philosophes, vivant dans la retraite et d'autant plus remarqué, Rubellius Plautus, est déjà signalé à Néron comme un homme (écoutez bien cette parole) qui ne feint pas même le goût de l'oisiveté[21], tant il fallait qu'on fût inutile, si l'on ne voulait passer pour dangereux ! Ses amis se croient déjà si forts, qu'il suffit d'une comète et d'un coup de tonnerre (signes de révolution, disait le peuple) pour faire parler tout haut de son règne et pour le perdre. Pourtant il ne mourut pas sur l'heure. On l'avertit de se soustraire à la calomnie, de se sacrifier au repos public ; on lui rappela qu'il avait en Asie de beaux biens où il pourrait vivre tranquille sans craindre amis ni délateurs ; on l'éloigna doucement sans oser même l'exiler (an 60) : tant on était loin encore de la tyrannie emportée des premiers empereurs, tant la clémence était encore populaire !

Mais, quand la mort de Burrhus (an 62), hâtée par Néron, l'eut fait enfin sortir de page ; quand l'homme selon son cœur, Tigellin, fut devenu préfet du prétoire ; quand Sénèque, au milieu des embrassements de son maitre qui lui demandait de ne pas se retirer, n'en comprenant que mieux la nécessité de le faire, se fut éloigné de Rome pour aller mûrir sa philosophie dans une austère solitude : quand Néron fut libre de tous ces obstacles, le génie impérial commença à se faire voir dans sa nudité. Et, dès l'abord, une toute petite, tout innocente, tout obscure accusation de lèse-majesté se glissa devant le sénat contre un poète satirique. Cette fois encore, à force de louanges pour César, Thraséa parvint à escamoter aux délateurs leur succès, et à détourner un arrêt de mort ; mais le César pur-sang s'était révélé.

Il alla bientôt plus loin. Deux exilés lui faisaient peur : à Marseille, un Sylla, bien déchu pourtant ; en Asie, Plutus, grave et calme au milieu des philosophes ; l'un redouté comme indolent et pauvre, l'autre comme riche et comme penseur. Des assassins partirent de Rome, au bout de six jours furent à Marseille au souper de Sylla, et le tuèrent. — La mort de Plautus fut remarquable. Il était populaire en Asie, soutenu à Rome par le parti stoïque qui l'avait fait avertir, appuyé par la sympathie du général victorieux Corbulon. Cependant Néron n'envoya contre lui qu'un centurion et soixante hommes. Aussi y eut-il une velléité de résistance. Il fallait, disait-on, autour de lui, repousser cette poignée d'hommes ! Avant que César fût averti, et que de nouveaux ordres fussent donnés, que d'événements pouvaient naître ! Chose inouïe, une guerre contre César fut sur le point d'éclater ! Le parti stoïque allait combattre ! Mais cette idée de guerroyer contre César étourdissait les esprits : et, de l'avis de ses philosophes, Plautus, homme énergique et brave, se laissa tuer paisiblement par ce détachement qu'un eunuque commandait[22]. — On porta les deux têtes à César ; il se moqua de la calvitie précoce de Sylla et du long nez de Plautus. Il écrivit au sénat, ne s'avouant pas l'auteur de leur mort, mais outrageant leur mémoire, ce qui en disait assez. Tout cela se passait — car les voluptés de Néron, dit Tacite, ne lui faisaient pas perdre un crime — pendant qu'il allait faire admirer sa belle voix à Naples, pendant qu'à Rome il soupait magnifiquement au coin de toutes les places, et se servait de toute la ville comme de sa maison ; pendant que Poppée accouchait à Antium (an 63)[23], lieu de naissance favori des Césars ; que le sénat votait des sacrifices pour son ventre, courait tout entier à Antium pour la féliciter, et, au bout de quatre mois, la petite fille étant morte, faisait celle-ci déesse, lui donnait un temple et un prêtre. Tout cela se passait enfin à côté de cette orgie de l'étang du Tibre à laquelle nous avons fait allusion plus haut, et dans laquelle la dernière des infamies s'était revêtue de toute la solennité d'un mariage. Tout cela se passait en un mot, au milieu de magnificences tellement monstrueuses, que Tacite lui-même[24] demande la permission de n'en parler qu'une fois.

Pendant ces magnificences, l'incendie de Rome éclata (19 juillet 64). Suétone et Dion accusent Néron d'en être l'auteur ; Tacite, moraliste plus sévère, est pourtant plus réservé. Je ne me mêle pas de décider cette vieille question ; mais l'esprit artiste, le dilettantisme en fait de spectacles, l'amour de la poésie en action, allaient assez loin chez Néron pour que, Rome une fois en feu, il prit son parti de la voir briller. Ce fut seulement le troisième jour de l'incendie qu'il arriva d'Antium. La flamme, maîtresse de la ville, se promenait dans les rues tortueuses de Rome, ondulait sur ses collines, faisait écrouler dans le Tibre les étages irrégulièrement amoncelés de ses immenses maisons. Du haut des Esquilies, Néron pouvait entendre cette confusion de clameurs, ces luttes inutiles, ces fuites, ces cris de brigands, ces menaces des incendiaires qui disaient tout haut : Ne nous arrêtez pas, nous avons des ordres ! Il pouvait voir cette masse de peuple, tramant ses blessés et ses morts, se réfugier au milieu du champ d'Agrippa entre les monuments et les tombes, et chercher un abri partout où il n'y avait pas un toit[25].

Au milieu de ce spectacle une pensée se présentait à lui : la place allait devenir libre pour son palais. Sa demeure, jusque-là misérablement confinée sur deux collines, était détruite grâce aux dieux ; cette Rome vieille, ignoble, grossièrement rebâtie après l'incendie de Brennus, allait faire place à une Rome néronienne, toute magnifique de symétrie et de grandeur ; dans cet écroulement de quelques saintes masures pleurées des vieillards, Néron avait entendu le craquement d'une ville surannée et d'un palais indigne de lui. Ne croyez-vous pas que la vue d'un spectacle si grandiose, la pensée d'une œuvre si belle, son génie et ses prétentions d'architecte, de peintre et de poète, peuvent bien faire taire le peu qu'il y avait d'humanité au cœur de Néron ? Et alors, qu'il ait songé, comme on dirait aujourd'hui, à faire de Rome une monumentale destruction, pour lui préparer une résurrection monumentale ; qu'au bout de six jours, le feu n'ayant pas achevé son ouvrage, il l'ait fait rallumer par son ami Tigellin pour durer trois jours encore ; qu'il ait fait battre à coups de balistes et de catapultes les vieilles murailles qui restaient debout, et dont il convoitait l'emplacement pour son palais ; qu'au milieu de ces pensées, du haut de la tour de Mécène, en habit de tragédien, il ait chanté ses vers sur l'embrasement de Troie ; que dans son enthousiasme, il se soit écrié que la flamme était belle : en tout cela je ne vois rien de trop inhumain pour un César[26].

Sur quatorze régions de Rome, trois sont rasées au niveau du sol, sept n'offrent plus que des vestiges d'édifices. Aux yeux de ceux qui, en politique ou en architecture, ont le suprême amour de la ligne droite, rien n'est plus heureux pour un État que d'être bouleversé, et pour une ville que de brûler ; l'un et l'autre vont renaître selon la règle et au compas. Mais hélas ! comment renaissent les villes ? En 1694, la ville de Dieppe fut bombardée par les Anglais au point d'être à peu près détruite, et on ne manqua pas de s'en réjouir parce qu'on allait, disait-on, refaire là une belle ville ; on eut même, comme au temps de Néron, la dureté de refuser aux habitants la permission de profiter de leurs débris et de leurs caves pour reconstruire leurs maisons là où elles étaient ; et on fit une série de maisons les plus sottement uniformes qui fussent au monde, et, comme l'uniformité était prescrite pour le dedans aussi bien que pour le dehors, toutes uniformément privées d'escalier. En 1666, Londres fut brûlée, et elle aussi fut rebâtie administrativement, régulièrement, symétriquement, et l'on en a fait une cité qui, malgré sa richesse et sa splendeur, est la plus ennuyeuse pour les yeux qui se puisse trouver.

Il en est ainsi de la Rome néronienne. Elle se relève sans doute aux frais des provinces qui, écrasées de pillage et d'impôts, pleurent ces coûteuses splendeurs ; elle se relève, comme par magie, toute belle et toute régulière, nous dit-on, avec des rues spacieuses, la hauteur des constructions mesurée, des portiques et des terrasses sur toutes les façades[27]. L'ignorante architecture des Tarquins ne choquera plus par un grossier contraste la classique architecture grecque des empereurs : plus de ces rues tortueuses et sombres du moyen âge de Rome, de ces étages surplombants, de ces insulæ indécemment pittoresques. Les vieillards pourront bien murmurer que Rome, ainsi ouverte aux ardeurs du soleil, sera moins saine ; les peintres réclameront peut-être en faveur des effets de lumière, des contours hardis, des formes originales, que la vieille ville présentait. Mais l'architecture officielle, qui en notre siècle a démoli à Alger les balcons de l'architecture moresque et a fait une rue large dans Venise, répondait à tout par les ineffables beautés de l'angle droit ; et Néron, ravi devant son œuvre, prononçait que Rome n'était plus Rome, et que son nom, trop peu glorieux pour elle, serait changé en celui de Néropolis.

Si le peuple est logé avec tant de magnificence, que sera-ce de César ? Qu'est devenue la petite maison d'Auguste sur le mont Palatin, suffisante pour lui, indigne de ses successeurs ? Tibère l'a augmentée d'un nouveau palais ; Caligula l'a conduite jusqu'au Forum ; Néron lui-même, l'agrandissant d'un autre côté, l'a étendue sur tout le Palatin, lui a fait enjamber la voie Sacrée, l'a menée jusqu'au mont Esquilin, et lui a fait rejoindre les vastes jardins de Mécène[28]. Mais aujourd'hui Rome a recule autour du palais de Néron, et lui a laissé ses coudées franches pour s'embellir et s'étendre. A l'œuvre donc, merveilleux instruments du génie de César, ministres de ce Jupiter, vous que ce dieu emploie à faire ses miracles, Severus et Celer, hommes de génie et d'audace, qui, maniant comme un jouet la puissance impériale, obtenez par l'art tout ce que la nature voudrait refuser ![29]

Avec une promptitude incroyable, sur le mont Palatin, sur le Célius, sur l'Esquilin et dans la vallée qui les sépare, depuis le grand cirque jusqu'au rempart de Servius Tullius, bien au delà de Sainte-Marie Majeure ; au centre même de Rome et dans l'intérieur du pomœrium, la Rome légale et religieuse ; sur un espace de 2.000 mètres sur 500 environ, égal au sixième de la ville actuelle et au tiers du pomœrium[30] : la Maison-d'Or s'élève[31]. En avant de la Maison-d'Or, un lac ; autour du lac, des édifices épars qui semblent une ville ; entre la façade et le rivage, le vestibule où le maitre de la maison fait attendre ses clients, c'est-à-dire où Néron fait attendre tous les peuples du monde, et au milieu, le colosse de Néron, haut de 120 pieds[32], d'argent et d'or ; plus loin, des portiques longs d'un mille, à triple rang de colonnes. Dans l'intérieur, tout se couvre de dorures, tout se revêt de pierres précieuses, de coquilles, de perles ; les souterrains même sont ornés de peintures qui ont rempli à elles seules toute la vie d'un artiste[33]. Dans les bains, un robinet amène Peau de mer ; un autre, des eaux sulfureuses d'Albula. Un temple de la Fortune, construit avec une pierre nouvellement découverte, blanche et diaphane, semble, les portes fermées, s'illuminer d'un jour intérieur[34]. Les salles de festin, si multipliées et si particulièrement fastueuses dans les maisons romaines, ont des voûtes lambrissées qui changent à chaque service, des plafonds d'ivoire d'où tombent des fleurs, des tuyaux d'ivoire qui jettent des parfums ; d'autres, plus belles encore, tournent sur elles-mêmes jour et nuit, comme le monde. Mais ce sont là les moindres grandeurs du palais de Néron : voici des lacs, de vastes plaines, des vignes, des prairies, puis les ténèbres et la solitude des forêts, des vues magnifiques ; au sein de Rome et des palais, des daims bondissent, des troupeaux vont au pâturage. C'est le parc anglais dans toute sa magnificence ; mais quel nabab de la Grande-Bretagne a placé son parc au milieu d'une ville ? Aussi Néron est-il presque content cette fois : Je vais enfin, dit-il, être logé comme un homme[35].

Sa maison pourtant ne dura guère plus que lui ; il l'avait laissée inachevée ; après lui, Othon signa un ordre de dépensé de 50 millions de sesterces (13 millions de fr.) seulement pour la finir. Vitellus, après Othon, la trouva encore imparfaite et se plaignit d'être bien mal logé. Vespasien n'en voulut pas ; sur la place, et avec les débris du palais de Néron, s'élevèrent des monuments nouveaux. Sous Vespasien, le temple de Claude, que Néron avait détruit, se releva[36] ; sous Hadrien, le temple de Vénus et de Rome remplaça l'atrium du palais de Néron[37]. Une partie de son lac devint le Colisée[38], ses jardins firent place aux thermes de Titus[39]. Rome s'ouvrit passage à travers ces splendides ruines, et eut son chemin libre pour aller rejoindre la voie Appia. Quant an colosse de Néron, il fut plusieurs fois promené de place en place ; Hadrien employa vingt-quatre éléphants pour le mouvoir jusqu'à l'endroit où l'on a encore retrouvé les restes de son piédestal[40]. Vespasien et Titus remplacèrent la tête de Néron par celle du Soleil ; Commode y mit la sienne : les statues romaines étaient habituées à ces changements d'identité[41]. Ces passagères grandeurs avaient coûté cher à l'empire. Il n'avait pas suffi à Néron de mettre la main sur tous les débris de l'incendie, et, en se chargeant du déblai, d'interdire à chacun le retour dans les restes de sa demeure. Ce ne fut pas même assez de toute une moisson de couronnes jadis offertes par les villes à Néron artiste, et que Néron empereur n'avait pas voulu recevoir ; salaire négligé en des temps meilleurs, et que ce pauvre musicien réclama plus tard. Il fallut un pillage général de l'empire qui montre bien que, pour être dur aux grands de Rome, le système impérial n'était pas non plus si doux aux petits et aux provinces. La souscription fut ouverte dans tout l'empire ; souscription que Néron sollicitait comme une grâce et qu'on n'avait garde de refuser, où vinrent se ruiner villes et citoyens, Italie et provinces, cités libres et cités conquises, hommes et dieux. Les dieux, dit Tacite, tombèrent dans le butin. L'or des triomphes et des vœux publics fut enlevé des temples ; les vieux pénates de Rome furent fondus ; Delphes à lui seul fournit 500 statues de bronze. Des émissaires de Néron parcoururent la Grèce, allèrent jusque dans les villages, et rapportèrent, pour embellir les boudoirs des prostituées impériales, une moisson de dieux, la troisième, je crois, et non la dernière que fournit aux empereurs cette inépuisable Grèce[42].

Mais quelle n'est pas l'injustice du peuple de Rome ! En vain Néron pille le monde à son profit, lui ouvre, après l'incendie, ses jardins comme retraite, fait venir d'Ostie et des villes voisines tout ce qui lui est nécessaire, donne le blé à trois sesterces le boisseau[43] ; en vain, tout en sacrifiant les maisons, il épargne de son mieux les hommes ; en vain, pour rassurer le peuple contre de futurs caprices incendiaires et de nouvelles manies d'artistes, ordonne-t-il les meilleures mesures contre de nouveaux embrasements, le peuple persiste à rejeter sur lui le crime de l'incendie, et ce crime, le moins prouvé de ceux de Néron, est celui de tous qui l'a rendu le plus impopulaire.

Que veut donc le peuple ? Les superstitions les plus rares et les plus oubliées sont remises en vigueur pour expier les souillures de Rome et pour que le ciel lui pardonne le crime de Néron. Le livre poudreux des sibylles consulté par les prêtres, les lectisternes et les veilles sacrées, la procession des matrones qui va chercher en pompe de l'eau de mer pour en asperger la statue de Junon, tout cela ne suffit pas : le sang, et le sang humain, est pour l'antiquité le grand moyen d'expiation. Rome, qui se vante d'avoir aboli les sacrifices humains par toute ta terre, n'en a pas moins conservé l'usage, au moment des grands dangers, d'enterrer vifs un Gaulois et une Gauloise, un Grec et une Grecque ; et Néron, chaque fois qu'une comète parait au ciel, cherche, par le conseil de son astrologue, quelque illustre victime pour le bourreau. Que le sang coule donc, que Rome soit purifiée, que le peuple se taise, et que Néron demeure décidément innocent !

 

 

 



[1] Tacite, Annal., XIV, 48.

[2] Tacite, Annal., XIII, 3 ; XIV, 16. Suet., 52. Martial, VIII, 66. Il avait fait un poème sur la guerre de Troie (Xiphilin, LXII. Juvénal, VIII, 230, et le scholiaste Servius, Énéid., V. 370) qu'il chantait, dit-on, dans l'incendie de Rome. (Tacite, XV, 39. Suétone. Xiphilin.) — Il voulait aussi écrire un poème sur l'histoire romaine (Xiphilin). — Sur ses poèmes satiriques, V. Suet., in Domit. ; Tacite, Annal., XV, 49. Suet., in Vita Lucani, Pline, Hist. nat., XXXVII, 3, et Sénèque, Quæst. nat., I, 5, citent de ses vers ; on connaît aussi ceux que Perse rapporte :

Torve mimalloneis implerunt cornua bombis, etc.

(Perse, I, 99.)

[3] Suet., 52, 53. Tacite, Annal., XIII, 3. Dion Chrysost., 71.

[4] J'ai déjà cité ci-dessus, les expressions de Tacite et de Suétone. V. encore les endroits cités ci-dessous, et Juvénal comparant le crime de Néron à celui d'Oreste (Juvénal, Sat., VIII, 215 et suiv.)

[5] Monnaies de l'an 60 : CERT(amen) QUINQ(uennale) ROM(æ). Une table avec une urne et une couronne.

[6] Ut studia sua publicaret. Tacite, XIV, 14. Xiphilin, p. 698.

[7] Tacite, Ann., XIV, 16. Xiphilin, 699.

[8] Dion, LX, p. 669. D.

[9] Principe senatuque auctoribus... qui vim quoque adhibeant. (Tacite, Annal., XIV, 20.) Pecunia et sæpius vi. (Hist., II, 62.) Juvénal nous indique bien que cet oubli de la dignité personnelle, souvent volontaire et acheté, fut souvent aussi imposé par la menace (VIII, 193.)

[10] V. comme Juvénal flétrit cette dégradation de la noblesse (VIII, 189.)

Et sur les nobles devenus gladiateurs, V. les vers suivants 187-210, Sat., II, 101 et suiv. Suet., in Ner., 12. Senec., Ép., 87-99 ; Quæst. nat., VII, 31. Quintilien, VIII, 5. Sur les femmes s'exerçant au même métier, Juvénal, VI, 179 et suiv. 245-266. Ce dernier fait appartient surtout à l'époque suivante, celle de Domitien ; mais Dion et Tacite (Annal., XV, 32), à moins qu'on ne veuille forcer son texte, prouvent bien qu'il ne fut pas étranger à celle de Néron.

[11] Apud Xiphilin, LXI, 17.

[12] Notissimus eques romanus elephanto insedit. (Suet., in Ner., 12.)

[13] V. sur tout ce qui précède Tacite, Annal., XIV, 14, 15, 20, 21 ; XV, 32. Suet., in Ner., 11, 12. Dion. LXI, p. 697, 698. Vitellius depuis défendit, par un édit sévère, l'admission des chevaliers sur la scène. Même dans les provinces, les entrepreneurs de spectacles spéculaient sur cette dégradation des fils de famille. Tacite, Hist., II, 62.

[14] Xiphilin, LXII, p. 707. Tacite, XV, 27. (Souper donné par Tigellin à Néron. Lupanaria fœminis illustribus impleta... etc.) V. encore Xiphilin, d'après Dion, LXII.

[15] Tacite, XIV, 43.

[16] Duci partium. (Tacite, Annal., XVI, 7. Suet., 37.)

[17] V., sur ce philosophe ami d'Apollonius, Épictète, in Arriano, I, 25. Philostrate, IV, 8, 14 ; V, 1, 9 ; VI, 6 ; VIII, 5. Son amitié avec Thraséa. Tacite, Annal., XVI, 34 et suiv. Sénèque, passim.

[18] Gens hircosa centurionum.... varicosi centuriones. (Perse, V, in fine.)

[19] Et centum Græcos nudo centusse licetur. (Perse, V, in fine.)

[20] Senec., Epist., 37, 73, et Tacite, Annal., XIV, 16 ; XVI, 22. Suet., 52.

[21] Tacite, Annal., XIV, 22, 57, 58, 59.

[22] Tacite, Annal., XIV, 56, 59. Xiphilin, LXIII.

[23] Sacrifices faits par les frères Arvales, le 21 janvier 63, en accomplissement des vœux qui avaient été faits pour la délivrance et la santé de Poppæa Augusta. — Le 10 avril, à cause de l'arrivée de Néron Claudius et de Poppæa Augusta... ; on a immolé à la Junon (au génie) de Poppæa Augusta une vache, à la Junon de Claudia Augusta une vache. Marini, Atti dei frati Arvali, Tab. XVII.

[24] Tacite, Ann., XV, 37.

[25] Une inscription curieuse (Orelli, 736) désigne un terrain sur lequel il était défendu de bâtir, semer ou planter, pouce que tous les magistrats venaient y faire des sacrifices au jour des vulcanales, par suite d'un vœu longtemps négligé, qui avait pour but de préserver la ville des incendies. Ce vœu datait de l'époque où Rome, au temps de Néron, avait brillé pendant neuf jours.

[26] Tacite, Annal., XV, 39 et suiv. Suet., in Ner., 16, 38. Xiphilin ex Dione, LXII.

[27] Suétone, in Ner., 16, 38. Tacite, XV, 42-45.

[28] Suet., in Ner., 30. Tacite, Annal., XV, 39. Cette partie du palais qui allait rejoindre les Esquilies et le jardin de Mécène, s'appela Domus transitoria, probablement parce qu'elle laissait un passage à la voie Sacrée ou à d'autres rues qui allaient rejoindre la voie Appia.

[29] Tacite, Annal., XV, 40.

[30] La Rome d'aujourd'hui a 638 hectares, et la Maison-d'Or devait en occuper 80 à 100, plus que le Louvre et les Tuileries réunis.

[31] Il ne faut donc pas prendre à la lettre ces expressions de Pline : Domus aureæ AMBIENTIS urbem. (Hist. nat., XXX, III, 3). Bis vidimus urbem CINGI domibus principum, Caii et Neronis. Ce ne sont que des locutions hyperboliques familières aux anciens. Autant vaudrait entendre littéralement l'épigramme rapportée par Suétone :

Roma domus fiet : Veios migrate, Quirites.

Si non et Veios occupat ista domus.

(In Ner., 39.)

Mais on peut, ce me semble, comprendre Pline en ce sens que Néron, par la construction de son nouveau palais, ferma la voie Sacrée à laquelle la Domus transitoria donnait passage, imposa par là une gène excessive aux communications, et tint ainsi Rome comme assiégée.

[32] Suet., in Ner., 31, dit 120 pieds ; Pline (Hist. nat., XXXV, 7), 110 ; Dion (LXVI, 25), 100 ; Aur. Victor., 102. Ces différences peuvent s'expliquer par les manières différentes de prendre les mesures, en comprenant ou non le piédestal, les rayons de la tête, etc.

[33] Amulius. La Maison-d'Or, dit Pline, fut la prison de son talent. Hist. nat., XXXV, 10. Des fouilles faites depuis 1811, sous les thermes de Titus, ont fait retrouver des constructions qui doivent avoir appartenu à la partie de la Maison-d'Or bâtie sur l'Esquilin. V., entre autres, Nibby, Roma, parte antica, Terme di Tito.

[34] Tanquam inclusa luce, non transmissa. (Pline, Hist. nat., XXVI, 22.)

[35] V. Tacite, Annal., XV, 45 ; Suet., 31 ; Pline, Hist. nat., XXXIII, 3 ; Martial, I, II.

[36] Martial, de Spect., 2.

[37] V. Nibby, Tempio di Venere e di Roma ; Martial, de Spect., 2 ; Spartien, in Hadrian., 18.

[38] Martial, de Spect., 2.

[39] Martial, de Spect., 2.

[40] Martial, de Spect., 2. Dion, LXVI, 15. Spartien, in Hadrian., 18.

[41] Ainsi, Caius voulut remplacer par sa propre tête celle de Jupiter Olympien. Dion, LIX, p. 662. Suet., in Calig., 22. Un homme qui avait remplacé la tête d'Auguste par la sienne fut condamné sous Tibère. Suet., in Tiber., 58. Tacite, Annal., I, 74, V. Pline, Hist. nat., XXXV, 2. Hieronyme, in prophet. Habacuc., 4. Dans la prévoyance de ces changements, on détachait par avance la tête de la statue au moyen d'une cavité que dissimulait la draperie. Comment un serpent se glissa dans une cavité pareille et fit remuer une tête de Séjan, V. Dion, LVIII, 7.

[42] Suet., 38. Tacite, Annal., XV, 25. Pline, Hist. nat., XXXIV, 8. Pausanias, V, 25, 26 ; IX, 27 ; X, 7. Dion Chrysost., Or. XXXI, ad Rhode.

[43] Ce qui revient à 8 francs 53 cent. l'hectolitre. Tacite, Annal., XV, 39.