LA TRIÈRE ATHÉNIENNE - ÉTUDE D’ARCHÉOLOGIE NAVALE

 

CHAPITRE  VII. — LES MANŒUVRES.

 

 

§ 1er. — Les manœuvres dormantes.

On appelle manœuvres[1] tous les cordages qui servent à manœuvrer un navire. On distingue les manœuvres courantes et les manœuvres dormantes. On nomme[2] manœuvres courantes toutes celles qui ne sont pas essentiellement immobiles : ainsi les bras, balancines, itagues, drisses, boulines, écoutes, cargues, amures, hale-bas, palans, caliornes, caudelettes, etc., sont rangés dans cette classe. Les cordages immobiles, ou ceux sur lesquels on agit rarement pour les allonger ou les raccourcir, sont des manœuvres dormantes ; tels sont les étais, les haubans, les galhaubans, les bosses fixes, les suspentes de basses vergues, etc. Les câbles, les tournevires et quelques autres cordages sont des cordages libres, qu’on ne peut ranger parmi les manœuvres courantes.

Les Grecs connaissaient la différence entre les câbles et les cordages ; ils appelaient les premiers σχοινία et les seconds τοπεΐα. Nous voyons en effet, que, dans les inscriptions navales, les σχοινία sont distincts des καλώδια[3] ; or les καλώδια font partie des τοπεΐα parmi lesquels les σχοινία ne figurent jamais. C’est donc par erreur que les lexicographes confondent ensemble les τοπεΐα et les σχοινία[4]. Chez Harpocration[5] du reste, le poète Strattis, dans les Macédoniens, emploie le mot τοπεΐα pour désigner des cordages qui servent à hisser un objet pesant, et Archippos, dans l’Όνος, entend par là des cordes qui courent sur des poulies. Les τοπεΐα sont donc les manœuvres, tandis que les σχοινία sont les câbles. Bœckh croit que le nom des premiers leur vient de ce qu’ils ont chacun leur place déterminée dans les navires. Dans tous les cas, le mot τοπεΐα est un mot générique, qui comprend plusieurs espèces de cordages, sans que les Grecs paraissent avoir tenu compte de la distinction usuelle dans notre marine entre les manœuvres dormantes et les manœuvres courantes. Il embrasse en effet dans nos inscriptions[6] un certain nombre de cordages dont nous aurons à déterminer la nature, et, en outre, les drisses qui sont au nombre de deux, le racage double, les deux écoutes, les deux bras, le χαλινός. Or nous verrons que, par les cordages qui ne sont pas plus explicitement désignés, il faut entendre les manœuvres dormantes. Du reste, grâce aux inscriptions navales, aux lexicographes, aux monuments figurés et aux recherches de Bœckh[7] complétées par Graser[8], nous connaissons à peu près les noms de toutes les manœuvres, sauf quelques exceptions comme les ris et les boulines ; nous n’aurons donc guère ici qu’à vérifier et à enregistrer les résultats acquis.

Nous nous occuperons d’abord des manœuvres dormantes.

Nous voyons figurer dans les inventaires des arsenaux des agrès appelés καλώδια et κάλοι. — Les deux mots sont identiques, comme le montre Bœckh, et désignent le même objet[9]. On les donnait au triérarque par glènes ; on appelle ainsi des paquets d’une corde ordinairement pliée en spirale, à tours égaux, superposés les uns aux autres[10]. Les glènes portent dans les inscriptions le nom de μηρύματα καλωδίων[11]. On en donnait à chaque triérarque dix-huit par tétrère ; il est possible, bien que nous ne sachions rien de précis à cet égard, que le chiffre fût le même pour les trières et pour les triacontores[12]. Nous trouvons bien mentionnés dans une de nos inscriptions[13] quarante de καλώδια ; mais il s’agit là de cordages de triacontores et non d’une triacontore en particulier. Nous n’avons donc pas à nous préoccuper de ce nombre.

Reste à déterminer ce qu’on entendait par ces κάλοι ou καλώδια. Les inscriptions navales les comprennent parmi les manœuvres, mais sans les confondre avec la drisse, le racage, les écoutes, les bras et le χαλινός[14]. Les textes et les lexicographes prennent le mot dans un sens plus général et entendent par là même des cordages auxquels nos inscriptions donnent un nom distinct. Ainsi, pour Hesychius[15], ce sont des cordes qui servent à hisser et à amener la vergue et la voile, par conséquent les drisses. Pour le Scol. d’Apollonius de Rhodes[16], ce sont à la fois les cargues de la voile, les étais, les écoutes et les amures. Souvent on entend par là les cargues ; ainsi quand on disait, comme dans Aristophane[17] et dans Euripide[18], πάντα κάλων έξιέναι, ou proverbialement πάντα κάλων σείειν ou κινεΐν[19], cela voulait dire larguer toutes les voiles, mettre toutes les voiles dehors. Aussi le Grand Etymologique[20] fait-il venir le mot κάλοι de χαλάν qui signifie larguer. C’est dans ce sens que le prend Pollux dans le passage cité plus haut, lorsqu’il dit (I, 107) : Nous naviguions en laissant aller tous les cordages, avec tous les cordages dehors. De même, Eustathe[21] entend par le mot κάλοι : Les cordages qui, attachés au milieu de la vergue, servent à hisser et à amener la voile, et qui sont ainsi nommés de χαλάν. Pour Hérodote (II, 36, 4), les κάλοι sont simplement les cordages de la voile. Euripide[22] se sert de ce terme pour désigner l’amarre de poupe, et les lexicographes en font un synonyme de câble[23]. Enfin Thucydide[24] l’applique à une remorque, lorsqu’il dit que les Syracusains longent la côte en se faisant remorquer jusqu’à Messine.

On voit par là que, dans la langue vulgaire, le mot κάλοι est un terme générique, par lequel on entend les cordages et les câbles. Le sens en est plus resserré, mais encore assez large, dans les inscriptions navales. Des dix-huit glènes de cordages qui lui étaient attribuées par l’État, le triérarque devait tirer les principales manœuvres qui ne sont pas mentionnées dans nos inscriptions[25], et, bien qu’il n’y soit question que du grand mât et de la grand voile, peut-être suffisaient-elles pour lui fournir les cordages des autres mâts et des autres voiles.

C’est sous ce terme de κάλοι ou de καλώδια qu’il faut chercher les manœuvres dormantes, les haubans, les étais et les galhaubans. Le hauban[26] est un gros cordage capelé à la tête du mât et lui servant d’appui latéral. L’extrémité supérieure du hauban est façonnée en anneau ; l’autre est garnie le plus ordinairement d’un cap de mouton au moyen duquel on le raidit. Chaque mât a ses haubans, qui, l’étayant contre les mouvements du roulis dont il pourrait être ébranlé, sont utilisés comme montants d’échelles, dont les enfléchures sont les échelons. On peut admettre, avec Bœckh[27], que les haubans n’étaient pas désignés autrement que par le mot κάλοι. C’est en effet l’expression qu’emploie Lucien, lorsqu’il veut parler d’un matelot qui grimpe dans la voilure[28]. D’autre part, le Scol. d’Apollonius de Rhodes[29] et Phavorinus cités par Bœckh[30] entendent précisément, par le mot κάλοι ou κάλωες, les cordages qui consolident le mât de chaque côté du navire : οΐς ό ίστός ίσχυρός ποιεΐται άφ' έκατέρου τοΰ πλευροΰ τής νεώς, ce qui est précisément la définition du hauban. Ainsi donc, quoique les lexicographes donnent au mot κάλοι bien d’autres sens que nous avons énumérés, nous pouvons admettre que, dans une acception plus restreinte, celui-ci s’appliquait spécialement aux haubans ; au moins ne trouvons-nous pas d’autre mot en grec qui les désigne. Graser[31] admet qu’il y en avait quatorze dans les trières pour le grand mât ; c’est le chiffre des haubans des galères génoises du moyen âge, tel que nous le donnent les documents publiés par Jal dans son Archéologie Navale ; quant aux mâts άκάτειοι, ils avaient, selon lui, dix haubans de chaque côté. Ce sont là des hypothèses que nous n’avons ni à combattre ni à approuver, puisque nous ne possédons à cet égard aucun renseignement positif. L’un des deux navires marchands du bas-relief Torlonia semble présenter huit haubans à tribord, l’autre quatre.

Parmi les cordages que le triérarque devait tirer des dix-huit μηρύματα καλωδίων qui lui étaient assignés par l’État, il faut citer presque à coup sûr les étais et les galhaubans, dont ne parlent pas les inscriptions navales et dont l’existence nous est attestée par des textes précis ; ce sont du reste des manœuvres assez importantes pour qu’aucun navire, si ce n’est absolument dans l’enfance de la marine, ne puisse s’en passer. L’étai est[32] un cordage qui, passé en collier autour de la tête d’un mât, va se fixer par son extrémité inférieure sur le pont ou derrière un autre mât. Il fortifie le mât contre les mouvements que fait le navire de l’avant à l’arrière, et c’est pour cela qu’il est dans le plan vertical qu’on peut supposer passant par la quille. Chaque mât a un, quelquefois deux étais. Le second étai reçoit le nom de faux-étai. L’étai est d’un usage aussi ancien que le hauban et l’on peut dire que le mât. Quant au galhauban, c’était[33] le hauban du mât de hune ou galant ; il est aujourd’hui le hauban du mât de hune et celui du mât de perroquet. L’étai s’appelait chez les Grecs πρότονος ; il était souvent double, et certains lexicographes ne le distinguent pas du galhauban. Eustathe (130, 44), il est vrai, entend par ce mot les cordages qui servent à hisser et à amener la voile, ou plutôt ceux qui attachent la vergue au mât, c’est-à-dire soit les cargues ou les drisses, soit le racage. Mais, quoiqu’il ajoute que le mot est encore employé dans ce sens par les peuples du Levant, cette explication, qui se contredit elle-même, no peut tenir contre les informations plus exactes que nous trouvons ailleurs chez lui, ainsi que chez d’autres lexicographes. Les πρότονοι ou πρότονα, dit-il (1452, 58), sont les cordages qui assujettissent le mât pour le consolider. Les anciens appellent de ce nom les cordages qui vont de la hune à l’avant et à l’arrière. On voit qu’ici il entend par ce mot à la fois les étais et les galhaubans. Ailleurs (1728, 64), il fait remarquer que l’étai était en général double, et que, puisque dans Homère les πρότονοι étant rompus, le mât tombe en arrière, c’est que les πρότονοι étaient destinés à maintenir le mât par devant. Le scoliaste d’Apollonius de Rhodes (I, 1204) explique qu’ils tiennent le mât par en haut, comme les coins introduits dans la carlingue le fixent par en bas. Ailleurs Apollonius de Rhodes (I, 563) dit qu’après avoir dressé le grand mât on l’assujettit au moyen d’étais qu’on tend à bâbord et à tribord (έκάτερθεν). Il faut noter que le scoliaste entend le mot autrement et prétend qu’il s’agit de l’avant et de l’arrière ; il serait donc ici question à la fois des étais et des galhaubans ; mais il se corrige lui-même deux vers plus loin[34], quand il ajoute que les πρότονοι sont les cordages qui vont de chaque côté du mât à l’avant du navire. Hesychius définit les πρότονοι[35] les cordages qui maintiennent le mât de chaque côté. Ailleurs, il est vrai, il les confond avec les galhaubans[36]. Mais Lucien[37] distingue très nettement ces deux manœuvres l’une de l’autre, lorsque, parlant d’un navire où tout se passe à rebours de l’usage ordinaire, il ajoute : Et peut-être le πρότονος est-il tendu vers l’arrière. Nous voyons par là que le πρότονος se dirigeait vers l’avant et correspondait parfaitement à notre étai.

Eustathe (1728, 54) rapproche le πρότονος d’un autre mot, έπίτονος, qui semble pour lui avoir une signification analogue. Il rappelle ailleurs[38] que l’έπίτονος est un cordage qui consolide le mât et qui, si l’on y regarde de près, diffère du πρότονος. Si, d’après lui (1729, 30), l’έπίτονος désigne le cordage qui sert à élever la vergue le long du mât, il a soin d’avertir que ce n’est pas là le sens primitif du mot, et que les anciens désignaient par ce terme un cordage qui maintenait le mât. Le Scoliaste de l’Odyssée confond également l’έπίτονος avec la drisse ; mais Graser explique cette confusion d’une manière satisfaisante. En effet, la drisse était double et chacune de ses extrémités venait s’attacher au bord du navire, l’une d’un côté, l’autre de l’autre. La seule chose qui la distinguât du galhauban, c’est qu’elle descendait de la hune et non de l’extrémité du mât, et que le galhauban est assujetti plus à l’arrière du vaisseau. Mais ce sont là pour le spectateur des différences délicates et qui peuvent échapper ; voilà pourquoi, bien que l’έπίτονος désigne le galhauban, les lexicographes ont pu se tromper et le confondre avec la drisse.

Du reste, s’il y a quelque difficulté à trouver la dénomination de ces manœuvres, il n’y en a point à constater leur existence. Elles sont fréquemment représentées sur les monuments figurés. Outre les haubans, l’étai est figuré sur le bas-relief Torlonia sous la forme d’un gros câble terminé par une poulie et assujetti à l’avant du navire au moyen d’un palan. Sur une monnaie d’Alexandrie sous Néron[39], nous voyons l’étai qui part du mât au-dessous de la hune aboutir sur le pont juste derrière le petit mât de l’avant. Si le dessin est exact, le bas des haubans, qui sont au nombre de quatre, se laisse apercevoir sous le bord inférieur de la voile gonflée ; ils sont même munis des enfléchures qui les transformaient en échelles. Ce sont sans doute deux haubans qui sont représentés sur la fig. 96[40], bien que, sur la monnaie, celui de tribord s’écarte beaucoup vers l’arrière et qu’on aperçoive à bâbord, indépendamment du hauban principal, un autre cordage qui semble fixé environ à la moitié du mât.

En se reportant à la fig. 89, on distinguera les haubans au nombre de trois ; les cordages qui viennent se fixer à tribord sensiblement en arrière du mât sont vraisemblablement les galhaubans ; l’étai est figuré à tort par l’artiste en deçà de la voile, tandis qu’en réalité il devrait être au delà. Sur la fig. 91, les cordages qui descendent de la tête du mât jusqu’au pont sont évidemment les haubans ; sur la fig. 93, on aperçoit très distinctement l’étai qui va obliquement de l’extrémité du mât à la proue, cinq haubans visibles sous le bord inférieur de la voile un peu relevée par le vent[41], et enfin deux galhaubans qui se dirigent vers l’arrière. Il est inutile de citer d’autres exemples qui ne nous apprendraient rien de nouveau.

§ 2. — Les manœuvres courantes.

Parmi les manœuvres courantes, nous avons déjà parlé de celles qui servent à relever la voile, comme les cargues ; à en diminuer la surface, comme les ris ; enfin à la raidir pour l’exposer plus complètement au vent, comme les boulines. D’autres sont employées à hisser la vergue à la tête du mât, comme la drisse ; à la maintenir adhérente au mât, comme le racage ; à la soutenir dans sa position horizontale ou à en élever une des extrémités, tandis qu’on abaisse l’autre, comme les balancines. Enfin la voile a besoin d’être assujettie par chacun de ses coins inférieurs au plat-bord, et c’est là l’office des écoutes et des amures ; il faut aussi qu’on puisse faire tourner la vergue autour du mât dans un plan horizontal pour orienter la voile selon la direction du vent ; dans ce cas, la vergue et la voile obéissent à des bras. C’est de ces dernières catégories de manœuvres que nous allons nous occuper.

Les manœuvres courantes ont besoin, pour exercer leur action, d’accessoires indispensables, qui sont les poulies, les cosses et les clans. La poulie[42] est un rouet de bois dur ou de métal tournant autour d’un axe, porté par deux supports ou par un billot de bois creusé, nommé en France caisse. On a confondu abusivement le rouet et la caisse, et la poulie est devenue l’ensemble de ces deux parties distinctes, le contenant et le contenu. Dans certains cas, le cordage se meut non sur une poulie, mais en passant par un clan. On appelle ainsi[43] une mortaise ouverte dans l’épaisseur ou de la muraille d’un vaisseau, ou du pied d’un mât, ou de la tête d’un mât, pour recevoir un rouet qui y est logé et qui tourne librement sur son axe. Ces clans sont placés dans le dessein de faciliter le passage ou le mouvement de certains cordages, ainsi que de changer à volonté leur direction. Ainsi, dans la galère, le calcet était percé d’un clan qui donnait passage aux amans, comme le montre la figure 88. Quand on a simplement besoin de soutenir un cordage qui doit parcourir un certain espace, on se sert de cosses, c’est-à-dire d’anneaux de fer cannelés et garnis de petits cordages, qui y sont tortillés en façon de fourrure, pour conserver les gros cordages qui passent au travers des cosses.

Nous verrons par les textes et par les monuments figurés que les mâts des anciens étaient percés de clans. Quant aux poulies et aux cosses, il n’en est pas question dans les inscriptions navales. Il est difficile d’admettre, avec Bœckh, que l’État les donnait cependant comme accessoires naturels des cordages ; nous avons vu en effet que ces cordages étaient en grande partie donnés enroulés en glènes et sans avoir reçu de destination spéciale. Quand le triérarque les convertissait en manœuvres ayant leur destination déterminée, il est vraisemblable qu’il les garnissait à ses frais des accessoires nécessaires. La poulie était connue des Grecs, qui l’appelaient τροχιλία. Il y a, dit Pollux (I, 94), un engin qu’on nomme τροχός et τροχιλία ; d’autres, par lesquels passent les cordages, s’appellent κίρκοι ; car κίρκοι est poétique et κύκλοι est une expression particulière. Ailleurs (X, 31), à propos des divers instruments qui servent à tirer l’eau d’un puits, il cite encore la poulie, dont il énumère les différentes parties. Le Scol. d’Aristophane[44] définit simplement la poulie un rouet de bois, au moyen duquel on puise l’eau dans un puits. Les deux mots τροχός et τροχιλία étant distingués par Pollux n’avaient vraisemblablement pas un sens absolument identique ; on peut penser que la poulie dans sa forme la plus simple, c’est-à-dire composée d’un simple rouet en fer ou en bois tournant sur son axe, portait le nom de τροχός ; au contraire, la poulie perfectionnée s’appelait τροχιλία. Quant aux κίρκοι par lesquels passaient les cordages et que Pollux (X, 133) mentionne encore une fois à propos des manœuvres, il est difficile de ne pas y voir, avec Graser, les cosses. Eustathe (1734, 22) nous apprend qu’on les faisait en fer, mais qu’on se servait aussi pour les fabriquer d’autres matières analogues.

Il arrive souvent que dans un navire, une fois arrivé au port par exemple, on abaisse les vergues supérieures jusqu’à la hune et la vergue de la grand voile jusqu’au pont. On les hisse à leur place, quand on a besoin de s’en servir. Cette double opération s’accomplit au moyen de la drisse. La drisse[45] est un cordage destiné à hisser ou élever à la place qu’il doit tenir une vergue, une flamme, un pavillon ou tout autre objet. Quelquefois ce cordage est simple et passe dans une poulie fixée au-dessus de l’endroit où doit être hissé l’objet qu’on élève ; quelquefois, et c’est le cas lorsque la chose à porter est lourde, la drisse est un palan attaché à l’extrémité d’une itague. L’itague[46] est le nom d’un cordage qui porte à l’une de ses extrémités un poids qu’il doit hisser, non pas seul, mais à l’aide d’un palan fixé à l’autre de ses extrémités. Les antennes des bâtiments latins sont levées et baissées au moyen d’itagues simples ou doubles, selon la grosseur de l’antenne ; ces itagues ont conservé le nom d’aman qu’elles avaient dans les galères de France. Elles passent dans une ou deux poulies tournant dans la tête du mât. Il en est de même pour les vergues de hune de quelques navires ; mais, en général, dans les bâtiments carrés, la tête du mât de hune, que l’on ne doit pas affaiblir, n’est point percée d’un clan pour recevoir la poulie d’itague. L’itague passe alors dans une poulie attachée à la tête du mât. Les vergues de hune de tous les grands bâtiments sont portées par deux itagues.

D’après Bœckh, l’itague porterait le nom d’έπίτονος, que nous avons attribué au galhauban, et les ίμάντες seraient les balancines. C’est là une double erreur déjà relevée par Graser. L’itague est désignée par le mot ίμάς. On remarquera que les trières, les tétrères et les triacontores athéniennes avaient une double itague, puisque celle-ci figure en nombre double dans les inscriptions navales ; le mot, dans les exemples que nous allons citer, est du reste souvent employé au pluriel. Si Suidas et Photius[47] entendent simplement par 1p.ciweç des courroies, des liens, Photius[48], citant Aristagoras, fait observer ailleurs que ces cordages ont du rapport avec la voile, et Hesychius[49] que ce sont des manœuvres. Apollonius de Rhodes (4, 889) dit qu’on hisse en la déployant la voile au moyen des ίμάντες de la vergue. Hesychius[50] entend par là les agrès qui servent à hisser la vergue du navire, et c’est également la définition de l’antiatticiste dans les Anecdota d’I. Bekker[51]. Tous ces textes sont trop précis pour que nous hésitions à reconnaître dans les deux ίμάντες fournis aux triérarques par l’État athénien la drisse double de la grande vergue. Du reste, indépendamment de ces passages, il faut, malgré les objections de Bœckh, tenir compte de ce fait que l’itague a conservé les noms d’amans en bas-latin, d’aman en français, d’amante en ancien provençal, en italien et en espagnol, qui sont certainement dérivés d’ίμάς. Le Scol. de Pindare[52] constate que l’itague de la drisse passait par un clan ménagé dans le calcet.

La balancine[53] est un cordage qui, descendant de la tête du mât, va au bout d’une vergue pour la soutenir à cette extrémité. La balancine est en usage depuis les temps antiques ; on la voit représentée dans les peintures navales de Pompéi, comme dans les figures des barques égyptiennes. Aussitôt qu’une vergue un peu lourde ou devant porter une voile un peu large fut hissée à un mât, on dut sentir le besoin de garantir les extrémités de cette vergue contre l’effort du vent qui tendait à les rompre. Les soutenir par un cordage solide dut être la première idée qui vint au navigateur menacé de voir sa vergue se briser entre le point d’attache de la drisse et l’empointure de la voile. La balancine est un auxiliaire très utile quand on hisse la voile. Presque toutes les vergues ont des balancines qui sont simples, ou, au contraire, faites d’un petit palan et nommées balancines doubles. Quelques-unes ont des balancines supplémentaires qu’on nomme fausses balancines, bien qu’au besoin elles fassent l’office de balancines véritables. Une des principales raisons pour lesquelles Bœckh applique aux balancines le nom d’ίμάντες, c’est qu’il serait étonnant que des manœuvres si importantes ne fussent pas mentionnées par les inscriptions navales ; mais les étais et les galhaubans n’y figurent pas non plus. Il faut donc croire que les balancines étaient une de ces manœuvres, que le triérarque devait faire établir sur son navire au moyen des dix-huit glènes de cordages qu’il recevait. Graser leur donne, avec raison, le nom de κεροΰχος, bien que les grammairiens ne nous renseignent sur ce mot que d’une façon fort insuffisante. Hesychius ne fait que citer le κεραιοΰχος, en constatant que c’est un cordage[54]. Mais la composition même du mot nous indique qu’il devait servir à maintenir la vergue, et le scoliaste d’Aristophane[55], citant Phérécrate dans les Argiens, nous apprend qu’il était destiné à porter le dauphin, δελφινοφόρος τε κεροΰχος. Si l’on songe que le dauphin était suspendu à l’extrémité de la vergue, on verra que la balancine était, de toutes les manœuvres, la plus nécessaire pour contrebalancer l’effort d’un poids si lourd au bout de la vergue. C’est, du reste, le sens qu’avait en latin le mot ceruchus[56].

Supportée par la drisse et maintenue horizontale par les balancines, la vergue avait une tendance à s’éloigner du mât, quand la voile était gonflée par la brise. Elle devait donc y être fortement assujettie ; mais il fallait que le cordage fit assez lâche pour lui permettre de glisser le long du mât, tout en l’empêchant invinciblement de s’en éloigner. C’était là l’office du racage. Les mouvements du navire, dit Jal[57], l’action du vent sur la voile, celle des cordages qui aident à mettre la voile et la vergue dans les positions diverses, où elles doivent être pour faire tout leur office, tendent sans cesse à éloigner la vergue du mât. On a éprouvé qu’il était bon que le mât et sa vergue fussent rapprochés et, pour cela, on a imaginé d’entourer le mât d’un certain collier dont les extrémités sont attachées à la vergue. Quelquefois ce collier est un cercle de fer ; le plus souvent, et surtout quand le mât et la vergue sont gros, il est fait d’un chapelet de boules de bois et de planchettes traversées par une corde nommée bâtard de racage. Ce chapelet est ordinairement à plusieurs rangs. Les boules sont nommées pommes de racage ; les planchettes ont le nom de bigots. Les vergues d’une médiocre grandeur ont, d’ordinaire, des racages faits d’une simple corde ; les vergues de hunier ont les racages à chapelet que nous venons de décrire ; les basses vergues ont généralement un double collier de racage fait d’un cordage fort et garni de cuir qu’on nomme drosse de racage ; sur cette drosse est un palan de racage servant à la raidir ; ce palan existe aussi dans les navires à antennes, dont les vergues latines sont retenues aux mâts par des racages à pommes et à bigots ; il a le nom d’anqui. Ce nom d’anchi, qui existe aussi en Italien sous la forme d’anchino, nous le retrouvons dans le latin anquina, défini par Isidore[58] : Un cordage qui assujettit l’antenne au mât. Il n’y a donc nulle difficulté à reconnaître le racage double dans l’άγκοινα διπλή des tétrères, le racage simple dans l’άγκοινα des trières[59]. Les grammairiens[60], qui du reste ne nous renseignent que très imparfaitement sur la nature de l’άγκοινα, l’ont confondue avec un autre agrès, les άγκάλαι, dans lequel nous avons reconnu un cordage ou un cercle de fer qui retient ensemble les deux parties d’une vergue d’assemblage ; mais cette confusion même est instructive. En effet, on sait qu’άγκάλαι signifie proprement les bras repliés pour serrer fortement un objet ; c’est précisément là la fonction de l’άγκοινα et, d’autre part, il y a une ressemblance frappante entre le cordage enroulé autour des deux morceaux qui forment la vergue et celui qui serre la vergue contre le mât. C’est cependant une erreur, que de confondre, ainsi que Bœckh, les άγκάλαι d’Hesychius et les άγκύλαι de Pollux, — mots qu’il regarde, du reste, comme synonymes, — avec l’άγκοινα.

Si maintenant nous cherchons sur les monuments figurés les agrès que nous venons de définir, il nous sera aisé de les reconnaître, bien que le gréement soit souvent représenté d’une façon sommaire L’un des navires du bas-relief Torlonia nous montre les clans percés dans la tête renflée du mât pour donner passage à certains cordages. Dans une monnaie de Nicomédie sous Commode[61], les deux cordages qui pendent du haut du mât jusque sur le pont semblent bien être la drisse double passant par la poulie qui est au-dessus de la vergue. L’affirmation n’est cependant pas absolue ; car on pourrait y voir aussi, soit deux haubans, soit les extrémités inférieures des deux balancines. Sur les monnaies et les pierres gravées, les balancines qui sont souvent représentées ne laissent ordinairement apercevoir quo leur partie supérieure ; l’autre est cachée par la voile ou a été négligée par l’artiste ; elle pouvait en effet se confondre avec les haubans, les galhaubans, l’itague de la drisse. Une particularité notable, c’est que ces balancines sont bien plus nombreuses que chez nous. L’un des navires du bas-relief Torlonia en a quatre de chaque côté du mât. Nous en voyons deux de chaque côté du mât sur le navire de la figure 30 et sur celui de la figure 96. Sur cette dernière, si le dessin est exact, le double cordage qui figure à la croisée de la vergue et du mât ne peut être que l’άγκοινα διπλή.  On conçoit que les anciens aient multiplié les balancines, si l’on songe que leurs cordages étaient moins gros que les nôtres et que leurs vergues devaient supporter le poids considérable du dauphin. En se reportant à la figure 94[62], on verra, outre les deux balancines, le clan percé à la tête du mât dans lequel elles sont passées, bien que, suivant la coutume, leur partie inférieure ne soit peut-être pas représentée ; car on ne voit pendre le long du mât que deux manœuvres, qui peuvent être des cargues ou des itagues, aussi bien que les balancines. La figure 91 nous montre, au-dessus de la vergue et au-dessous des quatre balancines, deux objets demi-circulaires de chaque côté du mât. Il faut vraisemblablement y voir les poulies des itagues de la drisse.

Nous avons maintenant à nous occuper des manœuvres plus particulièrement employées pour orienter la voile et lui faire présenter sa surface au vent. On appelle bras[63] un cordage attaché à l’extrémité d’une vergue pour lui imposer le mouvement à droite ou à gauche, selon que l’on a besoin de présenter au vent, à gauche ou à droite, la voile portée par cette vergue. Quelquefois le bras est simple ; plus souvent, arrêté par une de ses extrémités à un point de la muraille du navire ou à un des cordages fixes du gréement, il passe dans une poulie, que suspend un pendeur ou un anneau de corde embrassant le bout de la vergue. Chaque vergue a deux bras : l’un à son extrémité droite, qu’on nomme bras de tribord ; l’autre à l’extrémité opposée, qu’on nomme bras de bâbord. Tandis que le coin supérieur de la voile est fixé au bout de la vergue, le coin inférieur est attaché au plat-bord au moyen d’une écoute[64]. L’écoute est une corde attachée à l’angle inférieur ou point d’une voile dont elle a pris le nom. Elle sert à étendre la voile déployée ; chaque voile a son écoute ou ses écoutes, à laquelle ou auxquelles elle donne son nom. Par contraction cependant, au lieu d’écoute de la grande voile, on dit : la grande écoute ; au lieu d’écoutes des huniers, on dit : écoutes de hune. Indépendamment de l’écoute, le coin inférieur des basses voiles d’un vaisseau est pourvu d’un cordage qu’on nomme amure[65] ; lorsque la direction du vent s’éloigne de celle de la route proposée, on en fait usage pour porter le coin de chacune de ces voiles déployées, c’est-à-dire celui qui se trouve du côté du vent, en avant du mât auquel chaque voile appartient... Souvent l’amure d’une basse-voile est double, c’est-à-dire qu’elle forme un palan... On dit d’un navire, qu’il a les amures à bâbord ou à tribord, quand les amures des basses voiles qui fonctionnent sont colles de bâbord ou de tribord. Il prend les amures d’un autre bord, lorsque, courant les amures à tribord par exemple, il vire de bord et s’établit pour courir les amures à bâbord. Faire la manœuvre que nous venons d’indiquer, c’est changer d’amures.

Nous voyons par les inscriptions navales que chaque navire athénien recevait de l’État deux ύπέραι et deux πόδες pour la grand’voile. C’étaient les bras et les écoutes. En effet, si Hesychius[66] se borne à dire à propos des ύπέραι que ce sont certains cordages du navire, Harpocration[67] en explique plus clairement la nature. Ce sont, dit-il, des cordages qui servent à faire tourner horizontalement la vergue, et, pour montrer la corrélation qui existe entre le bras et l’écoute, il cite le proverbe grec : lâcher le bras pour chercher à saisir l’écoute, qui s’applique à ceux qui sacrifient l’important à l’accessoire. Le scoliaste d’Homère[68] entend par ύπέραι, les cordages ou les poulies attachés au haut de la toile, tandis qu’elle est maintenue en bas par les écoutes, en d’autres termes, les manœuvres qui servent à faire tourner la vergue autour du mât. Eustathe (1534, 4) donne du mot plusieurs explications qui, au premier abord, ont l’air de différer les unes des autres. D’après lui, les ύπέραι sont des cordages qui servent à faire tourner la vergue ou plus exactement deux manœuvres fixées de chaque côté à l’extrémité de la vergue et dont les matelots se servent pour la faire tourner. Les anciens, entendant par ύπέρα un cordage de la vergue qui sert à la haler ou à la laisser aller, citent le proverbe lâcher le bras pour chercher à saisir l’écoute, applicable à ceux qui abandonnent l’important pour courir après l’inutile... Ils disent encore que les ύπέραι sont les cordages assujettis au haut de la voile ou les poulies. » De ces trois explications, la dernière, sans être inexacte, manque de précision. La première donne une idée très juste de la nature et de la fonction du bras. Quant à la seconde, elle a été reproduite par divers grammairiens[69] ; mais ceux-ci, la comprenant mal, ont ajouté, après διατείνεται qui a pour sujet κέρας, soit τό ίστίον, qui n’est pas le mot exact, bien que la voile tourne en même temps que la vergue, soit σχοινίον, qui est ici absolument dénué de sens. Cette seconde explication semble différer de la première ; mais Bœckh l’y a ramenée fort ingénieusement. En effet, quand on veut obliquer la voile pour mieux prendre le vent, on fait tourner la vergue autour du mât, et pour cela on tire sur l’un de ses bouts τείνεται, διατείνεται, et, au contraire, on laisse aller l’autre άνίεται. Ces deux termes ne font donc qu’exprimer la double action à laquelle la vergue est soumise, quand on veut en changer la direction, et justifient pleinement l’identification des ύπέραι avec les bras.

Les cordages attachés au point de la voile, dit le Scol. d’Apollonius de Rhodes[70], sont les πόδες ; à la suite de ceux-ci viennent les πρόποδες. Quand Apollonius de Rhodes[71] décrit la manœuvre qui consiste à larguer la voile, il s’exprime ainsi : Ayant hissé la voile, ils la déployèrent au moyen des deux πόδες. C’est bien là, comme nous l’avons vu, la fonction que Jal assigne aux écoutes. Les marins appellent πόδες, dit le Scol. d’Aristophane[72], les cordages attachés aux deux côtés de la toile. Quant à Eustathe (1534, 24), après avoir défini assez exactement les πόδες, il donne du mot plusieurs explications absolument erronées : On appelle πόδες les deux cordages inférieurs qui assujettissent la voile vers l’avant et vers l’arrière ; on les nomme πόδες, parce qu’ils sont en bas de la voile. Ils sont à l’opposé des ύπέραι dont nous avons parlé et qui jouent le rôle de la tête par opposition avec ces pieds... Lykophron appelle les voiles ποδωτά λίνα. Les anciens disent encore : les πόδες sont des cordages qui, dans le navire, tiennent la voile... ou bien : ce sont des manœuvres frappées sur chacun des côtés de la voile. Toutes ces définitions conviennent plus ou moins bien à l’écoute ; mais, dans le reste du passage, les πόδες sont confondus avec l’étai, les bras, les galhaubans, ce qui ne peut provenir que d’une corruption du texte ou d’une inexplicable ignorance. L’identification des écoutes et des πόδες[73] n’en reste pas moins absolument certaine.

Si l’on examine ce passage d’Eustathe, on verra que ce ne sont pas seulement les écoutes qu’il désigne par le mot πόδες. En effet l’écoute fixe la voile vers l’arrière ; c’est l’amure au contraire qui la porte et l’assujettit vers l’avant. Il faut donc supposer que le terme πόδες pouvait s’appliquer à la fois à l’écoute et à l’amure. Cependant le scoliaste d’Apollonius de Rhodes indique un autre mot, πρόπους, qui, par son sens naturel, désigne assez heureusement l’amure, puisque celle-ci est en avant de l’écoute et tendue vers la proue, comme l’écoute est tendue vers la poupe. C’est, du reste, ce qu’a très bien vu Smith.

Voyons maintenant la représentation figurée de ces agrès. Sur la monnaie déjà citée de Tarse, fig. 96, les deux bras de la vergue semblent assujettis à tribord, le navire naviguant près du vent. Quant aux deux écoutes elles sont reportées tout à fait vers l’arrière. Les écoutes sont visibles sur les deux navires du relief Torlonia et sur un grand nombre de pierres gravées, mais, à cause des procédés d’indication sommaires de l’artiste, il est souvent difficile de dire exactement où elles sont fixées. En général, leur point d’attache est assez près et parfois même en arrière de la cahute du timonier. Ce qui est plus curieux, c’est la façon dont se comportent les bras. Sur la gemme reproduite en partie fig. 90, le bras de bâbord est attaché au petit mât incliné de l’avant et celui de tribord est reporté très loin vers l’arrière. Sur une autre gemme, fig. 97[74], l’un des bras va également du bout de la vergue au mât de proue, tandis que l’extrémité de l’autre est fixée à l’épaisse lentille de la poupe que surmontent les aphlastes.

Une gemme également publiée par Graser[75] nous montre les matelots occupés à orienter la voile autrement qu’elle ne l’était : un des bras est fixé à l’arrière, mais un matelot a saisi l’autre, vraisemblablement pour le changer de place, tandis qu’un autre homme de l’équipage s’occupe des écoutes. Sur la figure 95, l’une des écoutes n’est pas apparente, mais l’autre est fixée ainsi que l’un des bras à l’arrière du vaisseau, tandis que l’autre va trouver le petit mât de l’avant. Nous voyons ailleurs[76] un matelot en train d’opérer la manœuvre désignée chez les grammairiens par les mots τείνεται, διατείνεται. Il tire à lui de toute sa force l’un des bras pour modifier la direction de la vergue. Nulle part nous n’apercevons les amures.

Les navires du relief Torlonia nous montrent d’une façon très instructive comment les haubans se trouvaient fixés aux deux bords du vaisseau et l’étai à la proue. Les autres manœuvres devaient être tournées autour de grosses chevilles également visibles sur ces deux navires et sur les bâtiments de guerre dont nous reproduisons ici l’avant, fig. 98[77] et 99[78].

 

 

 



[1] Jal, Gl. n., art. Manœuvre.

[2] Jal, Gl. n., art. Courant, 2.

[3] Έφ. άρχ., Inscr. 3124, col. 1, l. 1 et suiv. Parmi les agrès dus par Philodèmos figurent : τών κρεμαστών καλώδια ΙΙΙ, σχοινία έξδάκτυλα ΙΙΙ.

[4] Suidas, s. v. : τοπεΐον. Photius, s. v. : τοπεΐα. Hesychius, s. v. : τοπηία. Scol. Callimaque, H. in Del., 315.

[5] Harpocration, s. v. : τοπεΐον. Cf. Pollux, VII, 150, et X, 130.

[6] Έφ. άρχ., Inscr. 3122, col. 1, l. 138 et suiv. Pour les trières et pour les triacontores le mot τοπεΐα a la même signification et comprend les mêmes agrès.

[7] Urkund., p. 144-158.

[8] De R. N., § 78, et, dans le Philologus, l. c., § 106-113.

[9] Έφ. άρχ., Inscr. 3124, col. 1, l. 3, Philodèmos, entre autres agrès, doit à l’État τών κρεμαστών καλώδια ΙΙΙ. Ibid., Inscr. 3145, col. 2, l. 66, parmi les τοπεΐα figurent κάλως ΙΙΙΙΙ.

[10] Jal, Gl. n., art. Glène. — Cf. Eustathe, 1710, 42.

[11] Έφ. άρχ., Inscr. 3122, col. 1, l. 59 et suiv. Ibid., l. 70 et suiv. et passim.

[12] Έφ. άρχ., Inscr. 3122, col. 1, l. 138 et suiv.

[13] Έφ. άρχ., Inscr. 3122, col. 3, l. 42 et suiv.

[14] Έφ. άρχ., Inscr. 3122, col. 1, l. 138 et suiv.

[15] S. v. : κάλοι.

[16] Argonautes, I, 566.

[17] Chevaliers, v. 756.

[18] Médée, v. 278.

[19] Suidas et Photius, s. v. : πάντα κάλων σείειν. Suidas, s. v. : κάλως.

[20] S. v. : κάλοι.

[21] 1534, 8. Cf. 1452, 65, et Scol. Odyssée, ε, v. 260.

[22] Médée, v. 770.

[23] Hesychius, s. v. : κάλος. Zonaras, s. v. : καλώδια.

[24] Thucydide, IV, 25 et le Scol.

[25] Cf. Luc., Dial. Mort., 4, 1.

[26] Jal, Gl. n., art. Hauban.

[27] Urkund., p. 146.

[28] Τό πλοΐον, ch. 4. L’un des navires du bas-relief Torlonia nous montre un matelot dans l’attitude décrite ici par Lucien et grimpant le long d’une échelle de corde, formée sans doute de deux haubans pourvus de leurs enfléchures.

[29] Argonautes, I, 565.

[30] Urkund., p. 146.

[31] Suite du De R. N., § 107.

[32] Jal, Gl. n., art. Etai.

[33] Jal, Gl. n., art. Galhauban.

[34] Scol. Apollonius de Rhode, I, 566.

[35] S. v. : προτόνοισι.

[36] S. v. : πρότονοιοί έκατέρωθεν τοΰ ίστοΰ σχοΐνοι έπιτεταμένοι εΐς τήν πρώραν καί πρύμναν [έμπροσθεν]. Le dernier mot est à supprimer ; ou bien il faut ajouter : καί όπισθεν, et choisir entre les deux membres de phrase dont l’un est visiblement la glose de l’autre.

[37] Jup. trag., ch. 47.

[38] 1452, 61. Cf. Hesychius, s. v. έπίτονος.

[39] Graser, Die ditesten..., pl. D, 614b.

[40] Graser, Die ditesten..., pl. D, 429b, Tarse sous Alexandre Sévère.

[41] Ils ont été oubliés par le graveur sur le dessin qui figure dans cet ouvrage.

[42] Jal, Gl. n., art. Poulie.

[43] Jal, Gl. n., art. Clan.

[44] Lysistrata, v. 722.

[45] Jal, Gl. n., art. Drisse.

[46] Jal, Gl. n., art. Itague.

[47] Suidas et Photius, s. v. : ίμάντες.

[48] S. v. : ίμάντες.

[49] S. v. : ίμάντες.

[50] S. v. : ίμάς.

[51] Anecdot., 100, 26.

[52] Néméen., V, 94.

[53] Jal, Gl. n., art. Balancine.

[54] S. v. : κερουλκός.

[55] Chevaliers, v. 762.

[56] Lucain, 8, 176 ; 10, 495. Valerius Flaccus, I, 469 : Temperet ut tremulos Zetes fraterque ceruchos.

[57] Gl. n., art. Racage.

[58] XIX, 47. Anquina, funis quo ad malum antenna constringitur. De qua Cinna :

Atque anquina regit medium fortissima cursum.

Les anciens connaissaient aussi les pommes de racage ; car il ajoute : Malus dictus, qui quasi quibusdam maleolis ligneis cingitur, quorum volubilitate facilius elevantur (antennæ).

[59] Έφ. άρχ., Inscr. 3122, col. 1, l. 141 et suiv.

[60] Hesychius, s. v. : άγκοΐναι. Zonaras, s. v. : άγκοίνη. Apollon., Lex. : άγκοΐναι.

[61] Graser, Die ältesten..., pl. D, 319b.

[62] Voyez, dans les Annales de l’Instit. de corresp. archéol., t. 44, 1872, le navire publié par H. Jordan, Tav. d’Agg., B. La vergue horizontale est soutenue par quatre balancines. De l’extrémité de la vergue partent deux cordages, —ce sont des bras ou des cargues — qui vont se fixer à l’avant du navire. Le protonos part de la tête du mât au-dessous de l’άτρακτος et descend également vers l’avant. Cinq cordages dont on aperçoit la partie intermédiaire, (la partie supérieure est cachée par la voile, l’inférieure par la divinité debout à l’arrière) ; peuvent être les galhaubans. On aperçoit le bas des deux haubans qui soutiennent le mit des deux côtés du navire.

[63] Jal, Gl. n., art. Bras.

[64] Jal, Gl. n., art. Écoute.

[65] Jal, Gl. n., art. Amure.

[66] S. v. : ύπέραι.

[67] S. v. : άφείς τήν ύπέραν, τόν πόδα διώκει.

[68] Odyssée, ε, v. 260.

[69] I. Bekker, Anecdot., p. 312, 13.

[70] Argonautes, 1, 566.

[71] Argonautes, 2, 931.

[72] Chevaliers, v. 436.

[73] Le nom de pieds donné aux cordages qui assujettissent les extrémités inférieures de la voile et celui de bras, qui désigne en français les cordages fixés au bout de la vergue, s’expliquent d’eux-mêmes si l’on se reporte à la monnaie de Kymê publiée par Graser, Die ältesten..., pl. D, 348b ; le mât y est remplacé par une femme qui, les deux bras étendus, tient devant elle une voile gonflée par le vent ; pour que la voile eût ainsi son effet, il faudrait, — détail que le graveur a négligé par une raison d’élégance, — que la femme eût ses deux pieds sur les deux extrémités inférieures de la voile.

[74] Graser, Die Gemmer, I, 82.

[75] Graser, Die Gemmer, II, 78.

[76] Graser, Die Gemmen, II, 77.

[77] Graser, Die ältesten..., pl. D, 134b, Macédoine.

[78] Graser, Die ältesten..., pl. D, 143b, Bottiée.