Idée des grands travaux qui se rattachent à Charlemagne. — Les tours. — Les phares. — Les camps. — Les églises. — Cathédrale d'Aix — Traditions sur les églises de Cologne et de Mayence. — Le grand pont du Rhin. — Le grand canal. — Jonction du Danube et du Rhin. — Commerce. — Unité des monnaies. — Le maximum. — Le luxe. — Les pelleteries. — Les joyaux. — Foires et marchés. — Marine. — Les ponts. — Construction des navires. — Gardes des ports et rivières. — État des corporations de nautoniers. 768-814. Lorsqu'un homme supérieur a dominé une génération par sa renommée, les traditions populaires lui attribuent toutes les grandes choses que son époque a produites. On réunit en lui les œuvres d'un temps, les labeurs des races couchées au tombeau ; il est comme le symbolisme des merveilles d'une civilisation morte : existe-t-il un temple brisé, des vestiges, des ruines monumentales ? c'est toujours cet homme qui les a laissés en passant dans la vie. Autour de lui se groupent tous les événements, toutes les pompes d'un siècle. Ainsi se présente le souvenir de Charlemagne ! parcourez les villes du Rhin et du Mein, Mayence, Francfort, Cologne, Aix-la-Chapelle, les cités allemandes ou belges, chaque pan de muraille en ruines, chaque palais démoli, ces églises en décombres, c'est toujours le vieil empereur qui les a construits. Dans le Midi même de la France, les tours larges et carrées de l'art romain lui sont attribuées, témoin la tour Magne de Nîmes[1]. Depuis les rochers des Pyrénées où retentit Roncevaux, jusque chez les Saxons où le nom de Witikind est encore si populaire, il n'y a, qu'une seule tradition : Charlemagne a tout fait, il est le fondateur de tout ce qu'il y a de puissant et de fort pendant les VIIIe et IXe siècles. Il est donc bien difficile de préciser dans les recherches de l'histoire le vrai ou le faux de toutes ces traditions ; Charlemagne fut le grand constructeur de monuments publics, nul n'en doute ; il avait emprunté aux idées romaines ce besoin de laisser de longues traces de son nom ; ses rapports avec les Lombards, ses visites fréquentes à Rome, ses relations avec la Grèce lui avaient donné le goût et les moyens d'accomplir de larges œuvres d'art. Dans l'intérêt de son système militaire d'abord, il s'occupa spécialement de la construction de fortes tours et de camps retranchés à la manière des légions, pour protéger ses frontières contre l'invasion des peuples voisins. On en trouve encore des vestiges qui par leur caractère datent du VIIIe et IXe siècle ; elles sont construites comme les tours carrées que les Romains établissaient dans les pays conquis pour maintenir les peuples domptés ; elles se réduisent à quatre fortes murailles dont quelques-unes crénelées, avec des ouvertures et des jours[2]. A côté des tours, sur les côtes, des phares pour l'observation des mers ; le poète saxon et le moine de Saint-Gall[3] rapportent que dans la crainte des invasions des Nortmans Charlemagne avait fait construire quelques-uns de ces phares qui se renvoyaient des signaux entre eux pour indiquer la présence des flottes ennemies. Plus tard, lorsque les terribles invasions des Nortmans menacèrent toutes les côtes de la Gaule et les fleuves qui fécondent les terres, ces tours placées çà et là furent destinées à préserver les pays des pirates scandinaves. Quand elles furent négligées aux jours de décadence, les Nortmans vinrent jusqu'aux monastères et aux cités de la Seine et de la Loire : fatale désolation qui assombrit tout le IXe siècle. Charlemagne s'applique surtout à la construction des chapelles et basiliques ; le christianisme étant son principe de civilisation, sa puissance de gouvernement, non seulement il protège les monastères, les dote de trésors, les enrichit de redevances, mais il en construit de nouveaux. Maître des mines et des forêts germaniques, il envoie à Rome l'étain, le plomb, les charpentes nécessaires pour les églises du monde chrétien ; mais la cathédrale de son amour, c'est à Aix qu'il a construit[4] ; il dépouille Ravenne de ses marbres, de son porphyre pour élever la chapelle royale où il prie à chaque solennité, et dans laquelle sera construit son vaste tombeau ; à' Aix, il tiendra la cour plénière de la mort pendant les âges, et son oreille n'entendra plus d'autre trompette que celle du jugement dernier. Si vous visitez la vieille cité, vous voyez partout des traces de Charlemagne ; à Aix, ces eaux qui coulent brûlantes dans ce vaste réservoir où l'ouvrier descend chaque jour pour boire dans la tasse de cuir commune à tous comme les hanaps du moyen âge[5], c'est Charlemagne qui les a découvertes ; il a fait bâtir la piscine où les pauvres souffreteux se faisaient guérir, et où lui-même aimait à se baigner. Cette cathédrale, qui est la gloire et le fleuron de la cité plus vieille que Cologne, c'est l'empereur qui l'a fait construire, les fondements ont été posés par lui ; là se voient encore la chaise de pierre froide où il s'assit, le trésor resplendissant de sa mémoire, le tombeau où il voulut être couché, lui l'homme fort[6], au dessous du grand dôme de pierre. La cathédrale d'Aix est antérieure à l'art gothique ; le byzantin domine, il n'y a rien de l'école sarrasine et de ces petites fantaisies du XIIe siècle ; il y a des additions que la marche du temps a faites, que l'ignorance est venue ajouter à la simple basilique, mais la pensée de ce monument est du le siècle ; la piété des générations a disputé ces débris aux âges qui brisent tout. Mayence, Cologne, Francfort veulent avoir également des cathédrales et des monuments publics dont l'origine remonte à Charlemagne. Le vieil empereur, pour les populations germaniques, est un conquérant, un législateur, un saint ; sa grandeur n'a pas été seulement passagère sur la terre, elle rayonne encore dans le ciel an milieu des anges, des confesseurs et des martyrs[7]. Dans ces pays du Rhin, où les confréries de maçons firent de si grandes choses, on a placé Charlemagne parmi les chefs de ces confréries ; les traditions le représentent, lui, avec Renaud de Montauban, Roland et les paladins les plus fameux, tous échangeant leurs manteaux de comtes contre le simple vêtement de l'ouvrier[8] pour élever des cathédrales et bâtir des monastères. Renaud, l'équerre en main, a porté des moellons pour la basilique ; et ces traditions fantastiques, mêlées aux légendes sur les œuvres des anges et des saints, expliquent la plupart des créations merveilleuses de Cologne, de Mayence, de Francfort et d'Aix-la-Chapelle. Ces monuments gigantesques n'ont pu être conçus que par des empereurs ou des paladins aux bras nerveux, qui se réunissaient aux ouvriers par un sentiment de pénitence. Cathédrales, châteaux fortifiés sur les collines du Rhin, tours isolées, tous ces monuments se rattachent à l'histoire de Charlemagne ; à Fulde, chaque brin d'herbe sur les ruines vous dit le nom du grand empereur. Parmi ces œuvres immenses que l'on attribue à un seul homme, il est quelques projets dont les chroniques laissent trace, et qui peuvent montrer à quel point d'activité était parvenue l'intelligence de Charlemagne. Les traditions rapportent que l'empereur avait fait construire un vaste pont sur le Rhin[9], en face de Mayence ; les arches en furent emportées par une crue du fleuve, et cet événement causa une vive tristesse à Charlemagne, qui le fit rebâtir en bois. Si l'on remarque la largeur du fleuve à Mayence, la rapidité des flots du Rhin, on doit reconnaître que si le génie de l'empereur aimait à vaincre les difficultés de la nature et ne connaissait pas les obstacles, l'art de l'ouvrier devait être déjà porté à une grande perfection. La solidité des cathédrales et des édifices constate à quel point de grandeur l'art était parvenu. Charlemagne avait à sa disposition non seulement des hommes de race germanique, patients, laborieux, mais encore les ouvriers lombards, qui avaient hérité de toutes les traditions de l'ancienne Rome[10], et les Grecs, que nul ne pouvait égaler dans les ouvrages d'adresse. Les machines de guerre étaient poussées à une fronde perfection, et les Romains se trouvaient encore là les maîtres de tous pour élever une tour ou rendre solide une muraille. Ce pont du Rhin vis-à-vis de Mayence, rebâti sur pilotis en bois et en pierres, fut incendié par l'imprudence des mariniers, et la fin du règne de Charlemagne ne permit pas de le reconstruire[11]. Un projet plus vaste, plus gigantesque, dont l'exécution rivalise peut-être avec les plus beaux travaux modernes, c'est la résolution prise par Charlemagne de joindre le Rhin et le Danube par un large canal ; Ratisbonne et Mayence étaient les points extrêmes de la ligne : l'importance de ce canal n'avait point échappé à l'empereur ; il voulait joindre la Baltique à la mer Noire ; on pourrait naviguer par le Rhin et le Mein, de l'Océan jusqu'à Constantinople. Dès que l'empereur est maître des terres qui s'étendent de la Belgique à la Hongrie, ce projet préoccupe son esprit[12] ; la distance de Mayence à Ratisbonne est de cent lieues environ ; les canaux de Drusus et de Corbulon, le premier qui joint le Rhin à l'Yssel, et le second qui réunit le Rhin à la Meuse, lui donnent l'idée d'un plus vaste travail qui enlacerait comme deux grands frères le Danube et le Rhin. Charlemagne visite lui-même le pays, sonde les rivières, reconnaît la possibilité de son œuvre, et y met la main avec ardeur[13]. Quand vous visitez Ratisbonne à trois lieues dans les terres, vous trouvez une petite rivière qui se nomme encore l'Altmulh ; elle prend sa source près de Rattembourg en Franconie ; aujourd'hui elle n'est plus empiétement navigable, parce que toutes les belles campagnes ont fait des saignées à la rivière et absorbent ses eaux. En remontant cette rivière l'espace de sept lieues, on se trouve à peu de distance de la Riza, que nous retrouvons encore en Franconie sous le nom de Retnitz ; la Retnitz passe à Nuremberg, et se jette par Bamberg dans le Mein[14]. Ce système fluvial se rattache à de très courtes distances comme une belle lisière d'argent ; il n'y avait qu'à lutter contre des obstacles de terrain et la difficulté de naviguer dans des rivières où les lits ne sont pas toujours profonds. Du Rhin au Mein, les eaux se marient dans de larges nappes ; du Mein à la Retnitz, rien de plus simple encore ; on arrivait ainsi jusqu'à Nuremberg : le travail pénible était seulement d'ouvrir un chemin de l'Altmulh à la Retnitz, et ce chemin offert aux eaux fut le canal large de vingt pieds que l'empereur fit creuser avec une activité infatigable. Les annales de Fulde nous donnent quelques détails sur ces travaux remarquables, et le poste saxon les a célébrés dans ses vers ; il indique ce canal comme un fossé grand et très grand[15] ; dans quelques parties il avait près de trois cents pieds de large, comme un vaste bassin. On eut à lutter pour l'accomplir contre les courses des Saxons, et ce qui était plus difficile à vaincre encore, contre les continuels éboulements de terre. Charlemagne, pour encourager les travailleurs, fit lui-même le voyage de la canalisation qu'il voulait ouvrir. Du Danube où, il s'embarqua à Ratisbonne[16], il entra dans l'Altmulh, la remontant jusqu'au canal dans une petite barque très frêle ; le fossé n'était point achevé ; il se rendit par terre jusqu'à la Retnitz, où, se réembarquant, il suivit le cours de la rivière jusque dans le Mein ; il séjourna quelque temps à Wurtzbourg et à Francfort, où il tint une diète solennelle. On peut voir encore aujourd'hui quelques vestiges de ce canal ou de ce vaste creusement de terre ; ce n'est plus qu'un fossé, et le village qui est situé à peu de distance a retenu encore le nom de Graben, traduction du mot fossé en langue germanique[17]. On ne sait quelles grandes et mélancoliques pensées vous saisissent au cœur lorsqu'on parcourt ces fleuves, ces rivières, ces terres que Charlemagne foula de ses pieds pour concevoir l'œuvre immense d'une canalisation germanique. Que les projets de l'homme sont fragiles ! où sont les traces de sa grandeur ? A Charlemagne il faut aussi attribuer la construction de ces palais, de ces fermes modèles qu'on trouve encore en Bavière, en Saxe, colonies complètes qui font l'objet de ses capitulaires : les rois mérovingiens avaient déjà construit quelques-unes de ces résidences au milieu des forêts épaisses de la Gaule, véritables bourgs qui depuis se changèrent eu cités. Charlemagne leur donna une grande extension ; il existe encore quelques vestiges à Francfort des palais carlovingiens[18] ; en France, plusieurs villes doivent leur origine à ces fermes ou colonies royales ; là étaient les marchands, les ouvriers, les constructeurs, les colons et les paysans qui cultivaient la terre ; les produits de l'agriculture étaient réservés au service des tables souveraines, et ces fermes modèles devinrent le principe d'un grand commerce et d'une industrie active. Dans ces temps primitifs où les idées ne se présentent jamais nettement, on ne peut pas dire d'une manière absolue que Charlemagne protégea le commerce ; ce serait là un de ces systèmes qu'il ne faut jamais proclamer hautement en histoire parce qu'ils sont faux ; le commerce naît, se développe de lui-même, on ne le crée pas plus qu'on ne le domine. L'administration régulière de Charlemagne favorisa des rapports plus actifs et plus sûrs ; les comtes, les juges, les missi dominici firent cesser la plupart de ces pillages et de ces dévastations qui empêchaient les rapports de ville à ville, de province à province. Comme Charlemagne eut des relations politiques avec la Grèce, les Lombards, les califes et les Sarrasins, il dut s'ensuivre une plus active fréquence dans les rapports, une plus grande sûreté dans les relations ; on put transporter les épices de la Syrie, les tapis de Bagdad, les soies de Constantinople, les reliquaires d'or, les ouvrages d'ivoire, les vins d'Espagne, les parfums d'Arabie. Ce commerce était la suite des rapports politiques avec l'Orient, la conséquence des nouvelles voies ouvertes de peuple à peuple. La vie des pieux pèlerins indique que déjà les navires francs au IXe siècle visitaient les villes de Syrie[19]. Mais, roi de race germanique, Charlemagne avait trop à faire pour assurer sa conquête, affermir sa domination ; il s'occupait donc peu du commerce ; esprit militaire ennemi du luxe, il proscrivit les habits somptueux et les riches décors des cours plénières, débouché naturel pour les produits de l'industrie, car un empire sans luxe est la mort pour les transactions commerciales. Cependant, dans quelques- uns de ses capitulaires
l'empereur prescrit des dispositions qui se rattachent plutôt encore à
l'administration du commerce qu'à son agrandissement ; il veut établir
l'unité des monnaies et des mesures au milieu de ces peuples si divers par
leurs habitudes, leurs coutumes et leurs lois ; il fixe la valeur de la livre
d'argent, du denier, il les partage, les subdivise, afin que cette base
devienne commune à toutes les transactions ; il voudrait qu'il n'y eût qu'une
monnaie dans toute l'étendue de son empire. Cette unité partant d'une base
simple le préoccupe ; il en est question dans trois ou quatre capitulaires[20], et ce qu'il y a
de plus curieux encore, c'est que l'on retrouve dans ces actes l'idée
première du maximum qui fut appliquée plus tard à l'époque d'énergie de la
révolution française. La pensée d'une taxe pour les marchandises, la fixation
d'un taux qu'elles ne puissent dépasser appartiennent nécessairement à un
pouvoir fort et violent qui ne tient compte d'aucun intérêt pour arriver au but
d'organisation sociale qu'il se propose[21]. Le luxe, ce
grand mobile des transactions commerciales, est proscrit avec cette brutalité
moqueuse qui caractérise souvent son pouvoir. Les chroniques nous ont
conservé quelques traits de raillerie de Charlemagne contre ses barons trop
luxueux, et le moine de Saint-Gall, ce poétique conteur des anciens temps,
nous apprend quel stratagème l'empereur employa pour dégoûter ses courtisans
des vêtements somptueux[22] : Un certain jour de fête, dit le chroniqueur, après la célébration de la messe, Charles dit aux siens : Ne
nous laissons pas engourdir dans un repos qui nous mènerait à la paresse,
allons chasser jusqu'à ce que nous ayons pris quelque animal, et partons tous
vêtus comme nous le sommes. La journée était froide et pluvieuse ;
Charles portait un habit de peau de brebis qui n'avait pas plus de valeur que
le rochet dont la sagesse divine approuva que saint Martin se couvrit la
poitrine pour offrir, les bras nus, le saint sacrifice. Les autres grands,
arrivant de Pavie où les Vénitiens avaient apporté tout récemment des
contrées au delà de la mer toutes les richesses de l'Orient, étaient vêtus
comme dans les jours fériés d'habits surchargés de peaux d'oiseaux de
Phénicie entourées de soie, de plumes naissantes du cou, du dos et de la
queue des paons, enrichies de pourpre de Tyr et de franges d'écorce de cèdre[23] ; sur quelques-uns brillaient des étoffes piquées, sur
quelques autres des fourrures de loir. C'est, dans cet équipage qu'ils
parcoururent les bois ; aussi revinrent-ils déchirés par les branches
d'arbres, les épines et les ronces, percés par la pluie et tachés par le sang
des bêtes fauves ou les ordures de leurs peaux. Qu'aucun de nous, dit
alors le malin Charles, ne change d'habits jusqu'à l'heure où on ira se coucher
; nos vêtements se sècheront mieux sur nous[24]. A cet ordre, chacun, plus occupé de son corps que de sa
parure, se mit à chercher partout du feu pour se réchauffer. A peine de
retour et après être demeurés à la suite du roi jusqu'à la nuit noire, ils furent
renvoyés à leurs demeures. Quand ils se mirent à ôter ces minces fourrures et
ces fines étoffes qui s'étaient plissées et retirées au feu, elles se
rompirent et firent entendre un bruit pareil à celui de baguettes sèches qui
se brisent. Ces pauvres gens gémissaient, soupiraient et se plaignaient
d'avoir perdu tant d'argent dans une seule journée. Il leur avait auparavant
été enjoint par l'empereur de se présenter le lendemain avec les mêmes
vêtements. Ils obéirent ; mais tous alors, loin de briller dans de beaux
habits neufs, faisaient horreur avec leurs chiffons infects et sans couleur.
Charles, plein de finesse, dit au serviteur de sa chambre : Frotte un peu
notre habit dans tes mains et rapporte-nous-le. Prenant ensuite dans ses
mains et montrant à tous les assistants ce vêtement qu'on lui avait rendu
bien entier et bien propre, il s'écria : Ô les plus fous des hommes ! quel
est maintenant le plus précieux et le plus utile de nos habits ? Est-ce le
mien que je n'ai acheté qu'un sou ou les vôtres qui vous ont coûté non
seulement des livres pesant d'argent, mais plusieurs talents ? Se
précipitant la face contre terre, ils ne purent soutenir sa terrible colère.
Cet exemple, Charlemagne le donna si bien, non pas une fois seulement, mais
pendant tout le cours de sa vie, qu'aucun de ceux qu'il jugea dignes d'être
admis à le connaître et à recevoir ses instructions n'osa jamais porter à
l'armée et contre l'ennemi autre chose que ses armes, des vêtements de laine
et du linge. Si quelqu'un d'un rang inférieur et ignorant cette règle se
présentait à ses yeux avec des habits de soie ou enrichis d'or et d'argent,
il le gourmandait fortement et le renvoyait corrigé et rendu même plus sage[25] par ces paroles : Ô toi, homme tout d'or ! ô toi, homme
tout d'argent ! ô toi, tout vêtu d'écarlate ! pauvre infortuné, ne te
suffit-il pas de périr seul par le sort des batailles ? Ces richesses dont il
eût mieux valu racheter ton âme, veux-tu les livrer aux mains des ennemis
pour qu'ils en parent les idoles des gentils ? Le goût des pelleteries, des étoffes de soie, des longs manteaux, des agrafes d'or s'était répandu parmi les seigneurs francs ; l'époque si luxueuse, si orientale de Dagobert[26] se reproduisait sous le règne de Charlemagne ; les comtes, les juges aimaient à déployer un grand luxe ; les femmes, toutes chargées de bandelettes d'or, avaient des bracelets comme dans les cérémonies publiques de Byzance ; les meubles d'ivoire se multipliaient dans les palais ; ou incrustait les livres du, Vieux et Nouveau Testament, on enluminait les manuscrits[27], les Francs portaient des gants de peau de daim et des couronnes au front ; on se parait de beaux joyaux, même dans les diètes et assemblées de comtes et de barons ; les évêques portaient des crosses d'or, des mitres d'or, des chapes d'or. Les échanges et les achats de marchandises se faisaient dans les foires, lendits et marchés permis et indiqués par les chartres ; comme les routes étaient peu sûres, les marchands venaient par caravanes ; quelques-uns de ces marchés et lendits autour des cathédrales, où venaient se pourvoir les nobles hommes, les monastères et le peuple, étaient devenus célèbres ; là s'étalaient les marchandises, les joyaux précieux ; on y voyait groupés sous des tentes des marchands saxons, lombards, bretons, grecs, sarrasins et surtout juifs, sous la protection du saint patron du lieu et de la crosse abbatiale. Toutes les denrées étaient franches d'impôt, sauf la redevance au monastère qui prêtait la place ; plusieurs diplômes de Charlemagne autorisent ces marchés ; selon les anciennes coutumes[28], on y vendait tout, même le serf acheté en Saxe et en Bretagne, rasé comme les serviteurs de Dieu aux monastères[29]. C'était l'objet de la plainte continuelle des hommes saints et pieux, qui ne pouvaient souffrir ce commerce d'hommes. Il faut lire les exhortations de quelques-uns des évêques qui cherchent à éteindre parmi les chrétiens cette habitude d'acheter des hommes, cette vente de chair humaine. Les transports des marchandises se faisaient par les rivières, par les chemins ou les voies dont les vestiges restent encore ; les Romains avaient coupé la Gaule de mille routes pavées, monuments utiles de leur grandeur ; à travers ces voies, les marchandises étaient apportées aux foires et marchés ; durant la route, elles étaient exemptes du péage, du droit de tonlieu et d'une multitude d'autres redevances que la coutume avait établies au profit du comte ou de l'évêque. Quand elles venaient de pays lointains, ces marchandises embarquées sur des navires aux mille rames voguaient sur les mers ; la plupart de ces navires saxons, danois ou frisons venaient de la Baltique[30] ; c'étaient des barques longues, découpées en forme de pirogue, de manière à pouvoir lutter contre la tempête[31]. Dans la Méditerranée, ces barques étaient sarrasines, lombardes ou grecques ; ici, elles se rapprochaient des galères romaines ; Marseille dans la Méditerranée, Venise dans l'Adriatique avaient déjà leur importance commerciale, et l'on citait les flottes grecques comme vigoureusement armées, puisqu'elles résistaient par le feu grégeois aux invasions des Sarrasins. Charlemagne voulut avoir aussi sa marine ; il fit creuser des ports, et Boulogne lui doit son agrandissement et la fondation du phare qui annonce aux vaisseaux l'approche de la terre. La marine du IXe siècle était tout à la fois militaire et marchande ; l'empereur avait compris déjà qu'au midi et au nord son empire était également menacé par les navires saxons et sarrasins[32] ; la préoccupation de ce danger se révèle dans l'esprit de ses lois et de ses mesures ; il s'en inquiète, il les voit partout, et le moine de Saint-Gall raconte encore un de ces épisodes qui font connaître le caractère et la triste prévoyance de Charlemagne sur le sombre avenir de son empire : Charles, qui toujours était en course, arriva par hasard et inopinément dans une certaine ville maritime de la Gaule narbonnaise. Pendant qu'il dînait et n'était encore connu de personne, des corsaires normands vinrent pour exercer leurs pirateries jusque dans le port. Quand on aperçut les vaisseaux, on prétendit que c'étaient des marchands juifs, africains ou bretons ; mais l'habile monarque, reconnaissant à la construction et à l'agilité des bâtiments qu'ils portaient non des marchands, mais des ennemis, dit aux siens[33] : Ces vaisseaux ne sont point chargés de marchandises, mais remplis de cruels ennemis. A ces mots, tous ses Francs, à l'envi des uns des autres, courent à leurs navires, mais inutilement ; car les Normands, apprenant que là était celui qu'ils avaient coutume d'appeler Charles le Puissant, craignirent que toute leur flotte ne fût prise dans ce port ou ne fût détruite, et ils évitèrent par une fuite rapide, non seulement les glaives, mais même l'approche de ceux qui les poursuivaient. Cependant le religieux Charles, saisi d'une juste crainte, se levant de table, se mit à la fenêtre qui regardait l'Orient et demeura très longtemps le visage inondé de pleurs. Personne n'osant l'interroger, ce prince belliqueux, expliquant aux grands qui l'entouraient la cause de ses larmes, leur dit : Savez-vous, mes fidèles, pourquoi je pleure si amèrement ? Certes, je ne crains pas que ces hommes réussissent à me nuire par leurs misérables pirateries ; mais je m'afflige profondément que, moi vivant, ils aient été près de toucher ce rivage, et je suis tourmenté d'une violente douleur quand je prévois de quels maux ils écraseront mes neveux et leurs peuples. Ainsi le moine de Saint-Gall fait parler Charlemagne, le puissant monarque ! il a le pressentiment de la -ruine qui menace son empire ; et cette appréhension des Normands est si grande, qu'elle le trompe sur la nationalité de ces navires qu'il voit de loin ; la Gaule narbonnaise était plus exposée aux excursions des Sarrasins qu'à celles des Normands ; les Scandinaves n'avaient point touché encore la Méditerranée, les Maures étaient aussi hardis pirates qu'eux, leurs flottes pillaient la Provence, la Septimanie[34], et ce que l'empereur prit pour des Normands n'était peut-être que ces Maures d'Espagne ou d'Afrique ; une profonde confusion règne sur ce point dans les chroniques. Au milieu des grandes désolations de ce temps, on ne sait d'où vient le mal ; on l'éprouve et on s'en prend toujours à la cause dominante. Quand le moine de Saint-Gall écrivait, les Normands étaient les grands fléaux, et la génération leur attribuait tous les maux qui fondaient sur elle. Ce fut pour éviter ces ravages que Charlemagne établit un double système de fortifications à l'embouchure des fleuves par où les Sarrasins et les Normands pouvaient pénétrer dans les grandes cités ; il fit établir des phares, des tours, des ponts militaires à chaque embouchure des fleuves qui se perdaient dans l'Océan, la Méditerranée ou l'Adriatique, sur le Rhin, la Loire, la Seine, la Gironde et le Rhône[35] ; et pour appuyer ces fortifications, il dut y avoir sous les ordres de chaque comte une flotte de petits navires qui gardaient l'embouchure et la défendaient contre toutes les tentatives de l'ennemi. Des ouvriers formés en corporations, et qu'on a retrouvés désignés dans les chartres sous le nom de mutes, furent chargés de construire des ponts surmontés de tours[36], où se tenaient des hommes d'armes vigilants pour empêcher le passage des pirates normands et sarrasins. Ces navires devaient protéger les petites barques marchandes qui naviguaient d'un port à un autre. Quand Charlemagne vit le danger qui le menaçait par mer, il prit ses mesures pour se défendre contre les invasions des nouveaux Barbares. Ainsi, en toutes choses sa pensée fut complétée, il ne laissa rien à demi. Mais ces précautions multipliées résultèrent plutôt d'un système militaire que d'une protection raisonnée pour le commerce : les idées d'industrie, de transactions commerciales n'arrivent généralement qu'aux époques d'une civilisation plus avancée ; Charlemagne était avant tout un homme de guerre, un barbare aux proportions germaniques. S'il est poussé doucement par les papes Adrien et Léon vers la civilisation romaine, il conserve jusqu'à la fin les goûts et les habitudes de son origine ; à lui, il ne faut qu'un manteau de loutre, une peau de mouton pour se couvrir ; il se confie à ses yeux flamboyants, à sa main de fer pour administrer et gouverner l'empire que son génie a fondé ; il se raille du luxe ; il veut que ses leudes restent dans leur simplicité guerrière ; il a peur de les voir se ramollir ; il garde les splendeurs pour les jours de solennité, lorsqu'il veut montrer à tous qu'il a hérité de l'empire romain, et qu'il peut égaler en éclat les princes qui règnent à Byzance ! |
[1] J'ai visité à deux reprises les vestiges de la tour Magne, placée près du beau jardin et des eaux qui murmurent à Nîmes ; est-ce un monument romain, wisigoth ou carlovingien ? Il n'y a là aucun caractère distinct ; toutefois les recherches de l'érudition ont attribué à Charlemagne la construction de cette tour. Il faut se rappeler que Louis le Débonnaire fut longtemps le roi méridional. Voyez Dom Vaissète, t. Ier de sa grande Histoire du Languedoc.
[2]
Toutes ces ruines carlovingiennes sont dépouillées d'ornements ; on peut en
voir quelques débris encore à Poitiers, à Saint-Benoît-sur-Loire. La tour de
Saint-Faron de Meaux était du VIIIe siècle. Mabillon a donné la description de
l'abbaye de Saint-Ricquier, qui datait du VIIIe siècle. Voyez Sœcul. IV. Benedict., t. Ier, page
111.
[3] Monach. S. Gall., lib. II.
[4] Je crois qu'il est difficile de mettre en doute que le cintre ou la rotonde de l'église d'Aix-la-Chapelle ne soit la même que celle que fit construire Charlemagne ; le plan avait été dressé par lui, comme le dit Alcuin, Epist. IV. Théodulfe donne le nom de Hiram en souvenir de David à l'architecte qui bâtit le temple. Théodulfe, liv. III. Une chronique dit que la basilique d'Aix-la-Chapelle avait été construite avec les pierres des démolitions de la cité de Verdun. (Chron. Hugon. Flavin. MSS. Labbe., t. Ier, p. 117.)
[5] J'ai vu à Aix-la-Chapelle cet immense concours d'ouvriers qui viennent boire à la source d'eau chaude. Il était six heures du matin ; ils s'y rendaient avec un ordre et un calme respectueux, buvaient leur verre d'eau chaude et s'en revenaient en donnant un souvenir à Charlemagne. La fontaine est dans un fond où l'on descend par deux rangées d'escaliers. La piscine commune n'existe plus.
[6] Il m'a été dit qu'un remarquable sculpteur, chargé de composer la statue de Charlemagne pour la Chambre des Pairs, était allé à Aix-la-Chapelle pour mesurer les ossements de l'empereur ; il affirme que ces os sont ceux d'un homme d'une taille ordinaire. Je crois que l'artiste a été trompé ; les débris du crâne et de la main, s'ils sont réellement de Charlemagne, paraissent immenses.
[7] J'ai assisté au jubilé septennal d'Aix-la-Chapelle ; les reliques du grand Charlemagne sont montrées au peuple. Il y avait à Aix plus de 17.000 pèlerins allemands.
[8] Voyez la chanson de gestes de Renaud de Montauban et la légende sur la cathédrale de Cologne. Maugis aussi se fait maçon, et Charlemagne porte des pierres d'une grosseur énorme par humilité.
[9] Monach. S. Gall, lib. Ier. Tout le monde sait qu'il n'existe aujourd'hui à Mayence qu'un simple pont de bateaux.
[10] Je crois que pour tout ce qui touche à l'art, le siècle de Charlemagne emprunta beaucoup à Constantinople et à Rome ; les monuments d'architecture le constatent : la plupart des artistes étaient Grecs ou Romains. Je ne partage pas l'opinion de M. de Bastard, qui fait un art purement franc-gaulois ; je crois que cet art était la barbarie et n'allait pas au delà des peintures sauvages du Mexique et de l'Inde ; l'art grec corrigea tout. Sur ces questions d'art, on ne saurait trop lire ce qu'a publié d'ingénieux M. Dideron, l'un des esprits les plus remarquables et les plus avancés dans ces questions d'art du moyen âge.
[11] Voyez Éginhard, De vita Carol. Magn.
[12] Il existe une dissertation spéciale sur ce grand canal de jonction du Danube avec le Rhin. Elle est l'œuvre de M. Schœpflin, qui était associé étranger de l'ancienne Académie des inscriptions et belles-lettres (1765).
[13] L'origine de ce projet peut se reporter de 794 à 800, après la guerre des Saxons et des Huns.
[14] J'ai voulu faire cette route en 1837 pour suivre les traces de Charlemagne et pénétrer son projet de canalisation ; mais aujourd'hui tout n'est plus navigable ; on y suppléera sans doute par les tracés de vastes chemins de fer qui couvrent déjà l'Allemagne.
[15] Fossatum magnum et maximum. D'après les chroniques de Moissac et de Lorch, il avait 2.000 pas de long et 300 pieds de large. Voyez aussi le moine d'Angoulême.
[16] La présence de Charlemagne à Ratisbonne est de 704.
[17] Les habitants vous montrent une petite jetée qui règne jusqu'au village de Dettenheim, et qu'ils disent être les vestiges du grand canal carlovingien. M. Schœpfling avait rapporté le fait, et je l'ai vérifié en 1837.
[18] On m'a montré à Francfort-sur-le-Mein des pans de murailles et des vestiges qu'on dit se reporter à Charlemagne. Il existe même, à ce qu'on croit, un palais du grand empereur ; mais ce palais ne me paraît pas se reporter aussi haut ; il se marie merveilleusement avec cet ensemble de maisons du XIVe siècle qui font de Nuremberg et du vieux Francfort les villes les plus pittoresques de l'Allemagne.
[19] On ne pourra jamais écrire l'histoire du commerce en Orient si on ne suit les annales des pèlerinages à Jérusalem ; autour du tombeau de Jésus-Christ se tenait une grande foire : Diversarum gentium undique prope innumera multitudo 15 die septembris anniversario more in Hierosolymis convenire solet ad commercia mutuis conditionibus et emtionibus peragenda.
[20] Comparez Leblanc (Traité des Monnaies), qui a donné une très belle dissertation sur les monnaies carlovingiennes et les capitulaires de 779, 794, 805 et 808.
[21]
Il y a ainsi peu de chose de nouveau dans les idées humaines. Charlemagne alla
jusqu'à fixer le prix des fourrures, chaperons et rochets. (Capitul., ad ann. 808, art. 5.)
[22] Voyez Capitul., 789,
et Eginhard, Vita Carol., cap. 23.
[23] Monach. S. Gall., lib. II. Ceci peut donner une idée des vêtements de luxe de cette époque et de l'étendue du commerce avec Byzance. Ces vêtements somptueux des leudes et barons venaient de Rome, de Venise, de Constantinople.
[24] C'était là une de ces railleries que se permet la puissance, une de ces leçons données souvent par Charlemagne. Le moine de Saint-Gall fait de Charlemagne le grand éducateur des hommes d'armes et même des clercs. Les capitulaires contiennent des articles très sévères contre le luxe ; toutefois Charlemagne devient plus indulgent après son élévation à l'empire ; il sent le besoin de la splendeur dans ses cours plénières. Voyez Monach. S. Gall et Eginhard, De vita Carol.
[25] Monach. S. Gall., lib. II.
[26] L'époque de Dagobert est plus byzantine qu'on ne croit pour les arts. Voyez la Dissertation sur le commerce de la première race, par l'abbé Carlier, 1753.
[27] Il existe encore quelques manuscrits enluminés de l'époque carlovingienne, ce sont des bibles ou des missels ; ils ont été presque tous reproduits dans la somptueuse collection de M. de Bastard ; ils prouvent le contraire de ce qu'affirme M. de Bastard, car tous révèlent l'origine byzantine.
[28] Il existe mime une de ces chartres originales avec scel pour les privilèges commerciaux dans la précieuse Collection des archives du royaume. (Carton 2. Carlovingiens.)
[29] Capitul. Carol. Magn., lib. VI, art. 119 et 423. Capit., ann. 803, art. 2 et 3.
[30] Les relations diplomatiques se traitaient même par les marchands. En voici un exemple saxon : Interea Godefridus rex Danorum per quosdam neguncianies mandavit duci qui Fresiam prœvidebat, adisse se quod ei imperator esset iratus. (Annal. Matens., ad ann. 809.)
[31] On trouva dans la Seine, vers le milieu du XVIIIe siècle, une barque en forme de pirogue ; on lut un mémoire à l'Académie des inscriptions, et on ne douta pas que ce ne fût là un débris de ces barques scandinaves qui effrayèrent les paisibles monastères du moyen âge.
[32] Ce fut en 802 que parurent sur les côtes les premières barques des Normands. Voyez Capitul. 2. Éginhard, Vit. Carol.
[33] Monach. S. Gall, liv. II. Il règne une étrange confusion sur les coltines et les pirateries des Normands ou Sarrasins dans la Méditerranée ; il est difficile de les distinguer : les Hongres, les Sarrasins et les Normands sont les trois peuples qui se précipitent sur l'empire, et les chroniques les confondent souvent. Je crois que les Sarrasins furent les vrais pirates de la Méditerranée, comme les Normands le furent de l'Océan et des rivières de la Gaule. Comparez au reste le travail de M. Reinaud sur les Sarrasins et mon Mémoire sur les invasions des Normands dans les Gaules.
[34] Reinaud, Invasions des Sarrasins dans les Gaules. Dom Vaissète a parfaitement traité toutes ces questions dans son admirable Histoire du Languedoc, t. Ier.
[35] Éginhard, De vita Carol. Magn.
[36] Dom Félibien a donné à la suite de sa grande Histoire de Paris un travail très bien fait sur la corporation des nautes de la Seine. Voyez t. Ier.