CHARLEMAGNE

TOME PREMIER. — PÉRIODE DE LA CONQUÊTE

 

CHAPITRE XIII. — GÉOGRAPHIE ET LIMITES DE L'EMPIRE DE CHARLEMAGNE.

 

 

Fusion de la Neustrie et de l'Austrasie. — Les terres de l'empire. — Les duchés tributaires. — Les marches. — La royauté lombarde. — L'Aquitaine. — La Septimanie. — La Provence. — Limites exactes sur les frontières d'Espagne. — Dépendances du royaume des Lombards. — Spolette. — Bénévent. — Frioul. — Vénitie. — Istrie. — Croatie. — Dalmatie. — Pannonie. — Les marches de Bretagne. — Les frontières du Nord. — Les Saxons. — Les Frisons. — Les Bohémiens. — Les Bavarois. — Frontières de l'empire à l'Orient. — Les trois grands voisinages. — La Grèce. — Les Sarrasins. — Les Scandinaves.

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Les récits des chroniques sont empreints d'une profonde obscurité sur les limites précises du vaste empire de Charlemagne ; les conquêtes du glorieux chef des Francs sont à peu près accomplies sur la fin du VIIIe siècle ; empereur, il n'ajoute rien à son territoire, il protège, il organise ce qu'il a acquis ; on le voit réprimer les révoltes, rattacher les liens de quelques vassaux rebelles : mais les conquêtes effectives, durables, se terminent avec le VIIIe siècle, à l'époque où Charlemagne va revêtir la pourpre des empereurs. Cette vie se divise donc en deux parties : la période conquérante, dans laquelle les Francs débordent sur leurs voisins ; la période organisatrice, qui voit le système se régulariser par les capitulaires. Avant de commencer cette seconde partie de la grande histoire carlovingienne, il me parait important de retrouver les limites du vaste tout réalisé par Charlemagne, et d'indiquer pour ainsi dire la géographie de la conquête.

Une distinction première doit s'établir dans ces investigations : toutes ces terres qui forment l'empire[1] ne sont pas régies d'après un même principe d'administration ; il y a des pays véritables patrimoines héréditaires de la race franque et carlovingienne ; d'autres ont été ajoutés comme simples marches ou frontières ; puis viennent les pays tributaires, sous le gouvernement de ducs qui se bornent à la foi et hommage, à des redevances souvent incertaines. Presque partout ceux-ci appartiennent à la race nomade ; peuples sans patrie fixe, ils se refoulent les uns sur les autres, le sol n'est qu'un accident dans leur vie de nation, ils le parcourent sans laisser traces ; ces hordes de pasteurs transportent leurs troupeaux, leurs familles confuses des bords du Danube, de l'Elbe, ou du Weser aux cités du Rhin, plus riches, plus civilisées : ainsi furent particulièrement les Saxons.

La division qui formait habituellement le partage de la race mérovingienne, c'est-à-dire l'Austrasie et la Neustrie, s'efface et disparaît peu à peu sous la seconde race ; après la mort de Carloman, on s'habitue à dire la France, la Germanie, sans autre fractionnement. Toute la terre qui s'étend depuis la Loire jusqu'au Rhin forme le centre du grand empire que Charlemagne va organiser ; s'il préfère comme résidences les vieilles cités du Rhin : Cologne, Mayence, Worms, Francfort, Aix-la-Chapelle[2], il vient quelquefois aussi habiter les forêts de Compiègne, ses fermes de l'Oise, de la Marne et de la Seine ; mais l'Austrasie est toujours le pays central, le cœur de l'empire.

L'Aquitaine, la plus ancienne des provinces soumises à la domination des Francs — car elle l'est déjà à l'époque mérovingienne — subit une transformation avant de se fondre dans l'empire[3] : soumise à des ducs héréditaires qui ne devaient que la foi et le tribut, elle passa sous l'administration des comtes, c'est-à-dire sous le régime administratif qui domine l'empire ; plus tard cette Aquitaine, érigée en royaume, forme le patrimoine d'un des fils de Charlemagne ; elle comprend alors toute l'étendue de terre depuis la Loire jusqu'à la Garonne, les cités de Bourges, Limoges et Périgueux ; puis, constituée en royaume, elle embrasse dans sa dépendance l'ancienne Septimanie, la Provence, et comme fiefs inhérents à elle, la Gascogne et la marche des Pyrénées jusqu'à l'Èbre[4], qui forme la limite méridionale de l'empire. Cette marche d'Espagne est un pays de montagnes, une frontière gardée par les comtes, avec des cités fortes de leurs tours, de leurs remparts romains, telles que Pampelune, Urgel, Saragosse et Tortose. Dans la péninsule hispanique, l'empire de Charlemagne ne s'est point étendu au delà de l'Èbre ; quelques émirs ou alcayds se sont faits tributaires jusqu'à Valence et Murcie : les chroniques rapportent que plusieurs de ces alcayds vinrent aux cours plénières pour prêter leur foi et hommage ; mais ce fut là une souveraineté passagère ; la limite naturelle reconnue de l'empire fut l'Èbre, elle ne s'étendit pas plus loin : la marche d'Espagne, qui fut inhérente au royaume d'Aquitaine, ne dépassa pas ce fleuve qui roule ses eaux depuis les montagnes de la Navarre jusqu'à la Méditerranée.

Si la marche d'Espagne fut la frontière militaire de l'empire au Midi, et l'avant-poste du royaume d'Aquitaine, la Bretagne fut à son tour comme la marche ou frontière occidentale de la France[5]. Charlemagne établit des camps militaires à la manière des Romains sous des comtes, gouverneurs qui dominaient ces populations indomptées, vieux débris des nations druidiques. L'administration de la Bretagne varie peu sous les Carlovingiens ; elle se maintient telle que les rois francs l'ont fondée ; sa langue, ses mœurs font de l'Armorique un tout que les rois dominent et gouvernent par un système militaire ; les diplômes qui désignent cette province sous le nom de marche de Bretagne indiquent aussi plus d'une fois les noms des comtes et gouverneurs des cités ; un de ces comtes militaires avait la supériorité sur tous les autres, et les légendes de Roncevaux ne disent-elles pas que Roland, le grand paladin, neveu de Charlemagne, était gouverneur des marches de Bretagne ?

Le royaume des Lombards, dépendance de l'empire des Francs, éprouve à cette époque une transformation : simple tributaire et vassal à l'origine avec ses rois Astolphe et Didier, il devient une dépendance absolue du vaste tout : Vérone, Pavie, Milan, ses capitales, saluent la couronne de fer au front du suzerain ; puis la conquête réunit successivement le Bénévent, le Frioul, Spolette, la Pouille et la Calabre à titre de fiefs relevant de la même couronne, et les terres des Lombards deviennent alors royaume d'Italie[6]. L'idée romaine domine l'organisation de ce royaume ; Charlemagne reconstitue le vieux Latium ; toujours d'intelligence avec les papes, il leur cède un vaste domaine pour s'assurer à jamais la domination morale sur l'Italie. Il gouverne jusqu'au fond de la Calabre ; quand il a dompté le peuple de la montagne jusqu'à la mer, depuis la l'ouille jusqu'à Ravenne, il le confond dans un seul royaume ; il veut faire de l'Adriatique un golfe sous sa main avec la Vénitie, l'Istrie, la Croatie, la Dalmatie, pays habités par des peuplades nomades qui s'affranchissent du joug des Grecs pour passer sous l'épée des Francs : si l'on en excepte Venise naissante, il y a peu de cités, et des riches colonies, débris de l'empire romain, des hautes montagnes, des solitudes profondes sont toute la richesse de ces contrées à l'aspect sauvage ; Attila les a traversées en conquérant. Ainsi sur un point de l'Adriatique, la Calabre et la Pouille ; sur l'autre, la Dalmatie ; comme poste avancé, la Corse, qui est pour l'Italie ce que les îles Baléares sont pour l'Espagne. Telle est la géographie de l'empire de Charlemagne, qui déjà conçoit son œuvre clans la vaste proportion des empereurs d'Occident : les Romains se servaient des peuples soumis pour en conquérir d'autres, ils avaient dans leurs légions les archers des îles Baléares ; intrépides avec leurs mœurs sauvages et leurs habitudes incultes, ils lançaient leurs traits avec la vigueur du Parthe.

Pour lier l'Italie à l'Allemagne, Charlemagne a soumis les Bavarois qui habitent entre le Danube et l'Issel, jusqu'aux montagnes du Tyrol, sur les frontières des Allemands[7]. Depuis le jugement et la flétrissure du duc Tassillon, les Bavarois sont entrés sous la domination absolue. La Pannonie est conquise jusqu'aux monts Krapacks ; la domination des Francs s'étend sur les forêts qu'arrose le Raab et sur les hautes montagnes qui voient la source de la Vistule ; l'Oder forme au Nord la limite des conquêtes. Les guerres contre les Bohémiens, les Esclavons ont donné Ratisbonne et Prague jusqu'à la Wartha ; comme ce sont là des peuplades nomades, Charlemagne ne les fait point gouverner par des comtes, il ne les soumet pas au régime de son administration régulière ; il adopte encore pour eux le système des tribus et de l'hommage, et c'est ce qui jette encore quelque confusion sur les limites réelles de son empire. Il dompte plutôt des hordes que des terres, les peuplades plutôt que les montagnes et les fleuves qu'elles parcourent, et sur ces limites extrêmes qu'il ne peut toujours maintenir, il n'exige que l'hommage et les tributs, marques de vasselage : les nations esclavonnes de la Bohème, de la Pannonie, les Dalmates et les Croates[8] sont donc placés sur l'extrême frontière, comme ces Barbares qui entouraient l'empire romain ou qui menaçaient Byzance ; seulement, Charlemagne a la main forte pour réprimer leurs tentatives ; il les contient, il les dompte, tandis que les empereurs grecs subissaient leur loi et achetaient leur repos par des tributs d'or, de soie et de pierres précieuses.

A l'extrémité nord, la limite de l'empire de Charlemagne paraît être le duché de Sleswick et la Baltique jusqu'à l'Oder ; ces terres nourrissaient les Saxons Ostphaliens et Nortelbins, presque complètement domptés à l'époque où l'empire d'Occident se groupe sur de larges proportions. Les diplômes indiquent l'existence des comtes et marquis, gouverneurs des marches et frontières jusque dans l'Ost-Frise, et ces côtes de l'Océan, battues par la tempête, avaient conservé quelque chose de sauvage comme les dunes de la Bretagne. Au milieu des rochers existait une population hardie de pirates qui dévastaient au loin les mers ; les barques des Frisons avaient répandu partout de sinistres terreurs[9]. L'administration régulière de l'empire s'exerçait difficilement sur ces terres mal connues, et sur des peuples qui habitaient des retraites inaccessibles ; là étaient des hommes indépendants qui ne reconnaissaient le joug d'aucune puissance[10], pas même celle de l'Océan et de ses vagues. Lorsque des peuples sont fixés sur des territoires, rien n'est plus facile que de déterminer les limites d'un domaine et le caractère de la souveraineté ; mais avec ces hordes nomades qui se transportent çà et là, comment était-il possible de tracer exactement les frontières du grand empire ?

A cette époque on ne tirait pas les frontières au cordeau, aucun traité ne déterminait les limites des états ; quelques tours défendaient les marches ; le comte ou le gouverneur se plaçait, comme les Romains, dans une ville principale, et quelques leudes, avec leurs hommes de bataille, se posaient sous des tentes ou dans des forts construits pour protéger le fleuve ou la montagne qui séparait une peuplade de l'autre. Les excursions continuelles étendaient les états du conquérant victorieux, comme les batailles perdues les restreignaient aussi dans des limites plus étroites. On aurait dit le sol ébranlé et ondulant sous une sorte de tremblement perpétuel, tant il changeait de maitres et de dominateurs ! Charlemagne fut le premier d'entre tous qui sembla s'inquiéter de poser des limites régulières à ses états. Lorsqu'il fonda l'empire, ses possessions s'étendaient du Midi au Nord, de l'Èbre jusqu'à la Baltique, sur un espace de quatorze degrés ; de l'Occident à l'Orient, ses frontières s'étendaient de l'Océan breton jusqu'à la Pannonie et aux monts Krapacks, dans une étendue de vingt-cinq degrés ; enfin, en le mesurant horizontalement depuis l'Escaut jusqu'à la Calabre, on comptait dix-sept degrés[11]. Ainsi, les liantes montagnes, les grands fleuves, tout avait été franchi par lui ; il se trouvait maitre d'un empire presqu'aussi étendu que celui des Romains en Occident, si vous en séparez la Grande-Bretagne, alors soumise à l'heptarchie saxonne. Charlemagne étend sa domination sur l'Italie, la France actuelle, une portion de l'Espagne, toute l'Allemagne, la Bavière, la Saxe, l'Illyrie, l'Autriche, la Prusse, et au nord la Hollande, la Belgique, ce qui embrasse aujourd'hui une population de quatre-vingts millions d'habitants. Cette évaluation ne peut être prise au point de départ du mie siècle, mais les terres sont les mêmes, et les démarcations n'ont pas changé.

Éginhard, le secrétaire de Charlemagne, a tracé lui-même la description du vaste œuvre de son seigneur et de son maitre. Le royaume des Francs, dit-il, tel que le lui transmit Pépin, était déjà sans doute étendu et fort ; mais il le doubla presque, tant il l'agrandit par ses nobles conquêtes. Ce royaume, en effet, ne comprenait avant lui que la partie de la Gaule située entre le Rhin, l'Océan, la Loire et la mer Baléare ; la portion de la Germanie habitée par les Francs, bornée par la Saxe, le Danube, le Rhin et la Saale, qui sépare les Thuringiens des Sorabes, le pays des Allemands et la Bavière. Charles y ajouta par ses guerres mémorables, d'abord l'Aquitaine, la Gascogne, la chaîne entière des Pyrénées, et toutes les contrées jusqu'à l'Ebre, qui prend sa source dans la Navarre[12], arrose les plaines les plus fertiles de l'Espagne, et se jette dans la mer Baléare sous les murs de Tortose ; ensuite, toute la partie de l'Italie qui de la vallée d'Aoste jusqu'à la Calabre inférieure, frontière des Grecs et des Bénéventins, s'étend sur une longueur de plus d'un million de pas ; en outre, la Saxe, portion considérable de la Germanie, et qui, regardée comme double en largeur de la partie de cette contrée qu'habitent les Francs, est réputée égale en longueur ; de plus, les deux Pannonies, la Dacie située sur la rive opposée du Danube, l'Istrie, la Croatie et la Dalmatie, à l'exception des villes maritimes, dont il voulut bien abandonner la possession à l'empereur de Constantinople, par suite de l'alliance et de l'amitié qui les unissaient ; enfin, toutes les nations barbares et farouches qui occupent la partie de la Germanie comprise entre le Rhin, la Vistule, le Danube et l'Océan : quoique parlant à peu près une même langue, elles différaient beaucoup par leurs mœurs et leurs usages ; mais il les dompta si complètement, qu'il les rendit tributaires. Les principales étaient les Wélétabes, les Sorabes, les Obotrites et les Bohémiens : ce fut avec celles-là qu'il en vint aux mains ; mais il accepta la soumission des autres, dont le nombre est plus grand[13].

Désormais les trois grandes races devant lesquelles le nouvel empire va se trouver en face ou en contact sont les Grecs, les Sarrasins, les Scandinaves : les Grecs touchent aux terres de la domination de Charlemagne sur plusieurs points, par la Dalmatie, la Sicile et la Pouille ; à mesure que les Francs reculent vers le Danube, ils s'approchent des Byzantins et des Barbares qui les environnent ; 2° les Sarrasins ; par l'Èbre, le nouvel empire est en présence de la civilisation arabe, des royaumes maures de Valence, de Murcie, de Cordoue et de Séville. Les Grecs et les Sarrasins ne sont pas à redouter, la période conquérante des Arabes est finie, ils ne s'étendent plus comme un torrent ; ils sont arrêtés, comprimés. Depuis la bataille de Poitiers, la puissance sarrasine rétrograde, elle n'est pas assez forte pour empêcher le développement de l'organisation carlovingienne et l'institution de l'empire d'Occident ; les califes mêmes ne peuvent plus rien dans le mouvement nouveau qu'imprime à la nation française la puissante personnalité de Charlemagne[14].

Les Grecs sont réduits à plus d'impuissance encore : comment pourraient.ils lutter contre la vigoureuse et jeune institution de l'empire d'Occident ? Que pourraient-ils opposer à cet empereur géant qui se couvre de fer et de cottes de maille ? A Byzance, la ruse, l'adresse, l'admirable débris d'une grande civilisation ; dans les cours plénières de Charlemagne, la force énergique et toutes les puissances que donnent l'habitude des guerres, la force du corps et de la volonté ! Aussi ce n'est ni par les Grecs, ni par les Sarrasins que l'œuvre de Charlemagne sera menacée : les uns le reconnaissent avec inquiétude, mais ils le subissent, car il n'est pas moyen de le combattre ; les autres cherchent à traiter avec cette puissance nouvelle que le fatalisme leur fait subir, car Dieu est grand et Mahomet est son prophète.

L'institution du grand empire franc n'est donc plus menacée que par les Barbares au nord et au centre de l'Europe ; la réaction scandinave sera terrible contre l'empire de Louis le Débonnaire et de Charles le Chauve ; les fils des Saxons et des Danois prendront leur revanche contre les conquêtes franques : Charlemagne s'est montré sur l'Elbe et la Baltique, et cinquante ans plus tard les Scandinaves viendront sur la Seine et la Loire. Au centre, les races tartares et esclavonnes, refoulées par l'épée jusqu'aux steppes de la Sarmatie, saisiront à leur tour l'épée et viendront sous le nom de Hongres ravager les plus belles terres de Bourgogne, d'Austrasie et même de Neustrie. Connue toutes les grandes œuvres formées par la conquête, l'empire de Charlemagne était mal joint, mal lié ; il demandait nécessairement une main ferme, une intelligence supérieure, un génie à la hauteur du puissant monarque qui va être salué du titre d'empereur d'Occident dans les basiliques de Rome. Après lui, tout devait finir !

 

 

 



[1] Il n'existe pas de travail spécial sur les véritables limites de l'empire de Charlemagne ; d'Anville est encore ce qu'il y a de plus précis. M. de la Bruère a écrit une dissertation, mais très arriérée et très imparfaite, Paris, 1745.

[2] Ses résidences principales étaient alors Eresbourg, Ferden, Francfurth, Sigebourg, Mayence, Worms, Cologne, Aix-la-Chapelle.

[3] L'Aquitaine avait pour frontières la Bretagne et la Septimanie.

[4] Les cités dont parlent le plus fréquemment les chroniques sur cette limite sont Pampelune, Saragosse, Huesca, Urgel, Lents, Barcelone, Tortose et Tarragone.

[5] La Bretagne comprenait aussi ce qui était plus spécialement indiqué sous le nom de marches britanniques entre la Loire et la Sarthe ; elle avait pour limite la Seine.

[6] Les vieilles chroniques indiquent Spolette, Bénévent, Salerne, Reggio comme des fiefs dépendant des terres de Charlemagne, si ce n'est directement, au moins par l'hommage. C'est dans le Codex Carolinus, cette grande correspondance des papes avec Charlemagne, qu'il faut rechercher les véritables limites du royaume d'Italie.

[7] La limite des terres occupées par les Bavarois me paraît être alors Ratisbonne. Au pied des hautes montagnes de la Bohème, Charlemagne avait creusé un fossé profond : Hic fossam duxit Carolus. La forêt Noire faisait partie de la Thuringe.

[8] Aussi les premières cartes géographiques ne désignent-elles aucune villes, elles partagent les pays au delà du Danube, du Raab et de la Drave, par la division des montagnes et des fleuves ; puis par cette seule indication : Istria, Croatia, Dalmatia, Pannonia, etc.

[9] Le plus au nord sont les Nortelbins au delà de l'Elbe ; les Ostphaliens sont entre le Weser et l'Elbe ; on trouve indiqués Ferden et Bremen ; les Angrivariens ont pour limite l'Ems, les Ost-Frisons l'embouchure du Rhin.

[10] Consultez pour la géographie du Nord l'admirable Vita sancti Anscharii archiepisc. Hamburg, dans les Bollandistes. On la trouve avec de savantes notes dans Langebeck, Rer. Danic. scriptor., t. I, p. 929.

[11] Je ne comprends ici ni les îles de Corse, de Sardaigne, les Baléare et la Sicile, qui furent conquises par Charlemagne et presque immédiatement enlevées par les Sarrasins.

[12] Eginhard, de Vita Caroli Magni, in fin.

[13] Rien ne parait plus précis que le récit d'Eginhard. J'ai eu le bonheur, dans des voyages successifs, de parcourir toutes les limites du vaste empire de Charlemagne depuis l'Ebre jusqu'au Holstein ; depuis la Normandie jusqu'au Danube et la Bohême ; quelle différence de civilisation ! mais en Allemagne, les mœurs carlovingiennes vivent encore puissantes.

[14] C'est ce qui me semble parfaitement résulter des recherches de M. Reinaud sur les invasions des Sarrasins. Au reste, sur la géographie des Arabes, M. Reinaud prépare un savant travail qui précédera la publication de la géographie d'Aboulféda.