CHARLEMAGNE

TOME PREMIER. — PÉRIODE DE LA CONQUÊTE

 

CHAPITRE II. — ORGANISATION DE L'ÉGLISE ET DE LA SOCIÉTÉ.

 

 

L'église gauloise et franque. — Les clercs et les hommes d'armes. Métropolitains et évêques. — Fondation des monastères. — Neustrie. — Austrasie. — Aquitaine. — Germanie. — Les légendes. — Apostolat sur terres barbares. — Les reliquaires. — Les églises. — Conciles provinciaux. — Institutions municipales. — Les villes, les bourgs. — Souvenir de Rome et des Gaules.

SEPTIÈME ET HUITIÈME SIÈCLES.

 

Dans le passage si violent des invasions et de la conquête l'église n'avait pu conserver ce caractère d'unité régulière que la papauté imprima plus tard à la grande forme catholique ; la société offrait alors un mélange de lois civiles et de canons ecclésiastiques, contusion perpétuelle entre les hommes d'armes et les clercs, entre les comtes et les évêques. L'église primitive des Gaules s'était organisée sur les anciennes circonscriptions de l'empire, avec ses provinces et ses métropoles, divisions territoriales que Rome avait jetées au monde. La Gallia christiana partageait les métropoles et les suffragances en treize provinces comme la Gaule impériale ; le métropolitain représentait dans l'organisation spirituelle le magistrat que l'empereur déléguait au gouvernement de ces provinces[1].

Après la conquête des Francs, les mêmes circonscriptions restèrent ; mais alors se manifeste la confusion des hommes d'armes et des clercs : l'évêque, l'abbé agitent souvent la framée dans les batailles ; ils se font suivre aux forêts séculaires par les meutes de chiens et les faucons ; couverts d'un fer impénétrable, ils combattent à outrance[2]. A son tour, l'homme d'armes devient possesseur de l'abbaye ou de l'évêché ; il amène dans les grasses terres ses soldats, ses suivants ou ses concubines ; il leur distribue les manses, il en partage les revenus ; des femmes même reçoivent en fief des évêchés ou des abbayes : c'est un chaos que la dictature des papes n'a pas encore débrouillé. La conquête se mêle aux vieilles lois de l'église, l'esprit barbare à l'esprit chrétien ; par là s'expliquent souvent les étranges canons que l'on trouve répandus dans la collection des conciles des Gaules ; c'est une lutte entre les principes bruts et primitifs des nations germaniques et les idées de moralité qu'enseigne l'église du Christ ; il s'agit d'imposer un frein aux passions, à la colère des sens et des appétits sensuels qui éclatent comme ta foudre. L'amour de la femme est le principe le plus actif parmi ces nations conquérantes ; quand la passion bouillonne au cœur avec énergie, pourquoi l'homme franc ne la satisferait-il pas en pleine liberté ? Qu'importe qu'il soit associé à une compagne pour la vie ! qu'importe qu'il ait des concubines dans son palais, ou que la femme qu'il aime soit sa parente à un très proche degré ! Le sang parle, nul ne peut le retenir... Les conciles primitifs des Gaules se ressentent de ces mœurs ; ils n'ont pas toujours ce caractère de haute pureté que les papes imprimèrent plus tard au système catholique[3] ; les canons révèlent le mélange des idées cléricales et des violences des hommes d'armes. Les clercs n'assistaient pas seuls aux conciles, les comtes y venaient avec leurs passions vives, brutales ; l'épiscopat, habituellement d'origine romaine, comptait dans ses rangs quelques-uns de ces Francs fougueux qu'aucun frein n'arrêtait ; il n'était donc pas étonnant que la pureté des lois de l'église s'altérât dans ces assemblées. On permet aux hommes d'armes de répudier la chaste épouse, la concubine n'est point flétrie, on tolère et on explique les entraînements de la chair. Plus tard, il faudra suivre le laborieux travail de la papauté pour reconstituer le mariage et protéger la sainteté du toit domestique[4].

La division romaine des métropoles et des suffragances survivait, je le répète, à cette confusion des lois civiles et religieuses ; la puissance de l'épiscopat se rattachait à cette juridiction qui s'exerçait sur la province ecclésiastique. Dans chaque cité, antique résidence du préteur ou du magistrat, la métropole s'établissait de plein droit ; mais pour les pays plus récemment rattachés au christianisme, c'était le pape qui décidait des institutions métropolitaines ; on en voit un exemple pour l'évêché de Mayence. Dès que ce vaste bourg de la Germanie fut converti aux lois du Christ par saint Boniface, Zacharie écrivit pour y fixer la résidence du métropolitain[5] : de Mayence, il pouvait surveiller toute l'église de Germanie, et saint Boniface continuer sa prédication sous la chape et la mitre de l'épiscopat[6]. Cette correspondance des papes, des conciles et des évêques est curieuse ; Rome est déjà le principe que l'on va consulter sur toutes les questions morales : il semble que le pape, persécuté dans sa ville sainte par un patriciat turbulent, domine le monde chrétien par le seul ascendant de sa parole. Ce travail est une longue lutte, et la suprématie papale prend la dictature universelle au Xe siècle, sous Grégoire VII, heureusement pour la morale universelle et le principe régulier du gouvernement[7].

A côté de l'institution hiérarchique des évêques se trouve la fondation des monastères, qui exercèrent une si active puissance de civilisation. Au milieu des invasions barbares, les âmes fatiguées du monde et de ses agitations se consacraient à la solitude et à Dieu. La plupart des basiliques que nous voyons aujourd'hui, ces ruines, ces débris nous indiquent la grandeur et la destinée des ordres monastiques dans les Gaules. Le vu siècle fut surtout célèbre par la fondation des abbayes et des monastères. Si l'on examine la plupart des villes de France, les gros bourgs, les villages, tous doivent leur fondation au monastère, établi d'abord dans les lieux les plus incultes avec une régularité merveilleuse. D'abord s'élevait un pieux oratoire, un ermitage au désert, ainsi le dit la chronique ; des cellules se groupaient autour, et une communauté religieuse changeait cet ermitage en une famille dans laquelle l'on priait, l'on travaillait et l'on jeûnait pour Dieu et l'édification des hommes[8]. Ces cellules une fois agrandies, de pieuses confréries transformaient en basilique la petite chapelle : si un saint abbé y mourait à l'état de martyr ou de confesseur, on recueillait ses reliques, les gouttes de son sang, ses ossements précieux ; une châsse aux formes byzantines avec l'image du saint était façonnée dans le monastère. De toutes parts on accourait en pèlerinage, car la châsse, ressource des malades et des souffreteux, paraissait éclatante de miracles. La foule des pèlerins accourait donc là ; mais quand cette foule était bien pressée, il fallait l'abriter par l'hospitalité, et l'on élevait pour elle quelques maisons en bois, quelques gîtes modestes ; les marchands affluaient bientôt pour offrir leurs denrées et exercer leur industrie, ainsi qu'on le voyait aux landys de Saint-Denis ; et de là les foires et marchés, qui obtenaient chartes et privilèges au nom de l'abbé, puis du comte ou du roi ; l'activité se montrait partout : à côté du monastère se bâtissait un bourg, le bourg devenait ville. Telle fut l'origine de la plupart des cités de France, que la reconnaissance du peuple dotait du nom d'un saint patron : cellules et ermitages, châsses bénites, foires et bourgs furent la cause et le principe de la fondation des cités dans les Gaules ; les générations oublieuses effacent en vain ces souvenirs, ils sont incrustés dans les pierres comme ils sont écrits dans les vieilles chartes de la patrie[9].

La géographie monastique des Gaules au vin' siècle est curieuse, parce qu'elle signale les progrès et les développements de l'esprit de règle ; partout où un monastère se fonde, on peut dire qu'il y a tendance vers une organisation plus parfaite de la société. Dans la Neustrie, les abbayes et les monastères se multiplient. Il se montre dans cette partie de la Gaule une suite de grands saints avec leurs légendes ; tous ont rendu d'immenses services à la civilisation de ces contrées naguère ravagées par l'invasion barbare : voici les deux Germain, dont on voyait les reliques dans les monastères bâtis sur les rives de la Seine : l'un, saint Germain, vieil évêque d'Auxerre — l'Auxerrois, ainsi le surnomment les légendes — ; l'autre, saint Germain des Prés, dans les prés fleuris qui devinrent l'Université. Sainte Geneviève sur la montagne, souvenir de la vierge de Nanterre qui sauva le pays des ravages des Barbares et préserva Paris de la famine. A deux lieues sur la Seine, saint Denis, célèbre par son trésor, ses chroniques, ses foires et landys ; Saint- Denis où s'écrivait l'histoire du pays comme un acte de religion et de patriotisme.

Quel précieux catalogue que celui des saints nationaux dans la Neustrie ! Gervais, Eloi l'orfèvre, Landry le fondateur des hôpitaux, Méry ou Méderie, tous artisans ou clercs, dont les châsses brillaient plus que la couronne des rois dans les basiliques construites à leur honneur. Saint Ouen de Rouen ; saint Martin de Tours ou saint Wandrille le Picard avaient leurs cellules hospitalières ; saint Bertin voyait construire le monastère de Sithieu ; Hubert le coureur Ides bois avait converti les sauvages habitants des Ardennes, plus barbares que les bêtes féroces ; saint Hubert, dont les reliques guérissaient les morsures d'animaux enragés : que ne pouvait la foi pour relever le moral de l'homme[10] ! A l'extrémité de l'Océan, sur un promontoire appelé la tombe et le péril de la mer quand les flots se brisaient en vagues écumeuses, on venait de fonder le monastère du Mont-Saint-Michel[11] pour préserver les matelots ; et saint Boniface créait en Germanie, sur une rivière paisible, l'abbaye de Fulde, où devait s'écrire, au milieu des travaux de la terre défrichée, les annales des Carlovingiens[12]. Partout en Neustrie, en Austrasie, en Aquitaine et en Germanie, les solitaires fondations s'établirent sous l'aile de saintes renommées ; les communautés plantèrent la vigne sur les coteaux du Rhin et du Rhône, défrichèrent les vastes plaines, imposèrent l'ordre, le travail, la règle, la hiérarchie, et fondèrent les vastes cités qui portent encore leur nom dans la Germanie ou la Gaule[13].

Ces fondations monastiques inspirèrent les légendes, traditions poétiques du christianisme, drames colorés qui eurent pour but d'enseigner au monde, par l'intervention du Ciel, les vérités morales et les lois de l'humanité. A toutes les époques, la reconnaissance des peuples pour les grands services rattache à l'histoire de l'homme de génie ou au bienfaiteur de l'humanité quelque chose de merveilleux : aux actions véritables de la vie vient se joindre la partie dorée, on enchâsse d'or et de rubis le sépulcre modeste où ses débris sont déposés. Ainsi fait la légende des saints, récit enthousiaste de ce que le serviteur et le disciple ont vu ou entendu dire sur la vie de celui dont les ossements sont déposés dans la chasse précieuse. Ces récits merveilleux contiennent presque tous une leçon morale ; aux fougues de la guerre, à l'impatience des barbares, les légendaires opposent les douceurs de la solitude, les spectacles de la paix et du repos. Si les hommes d'armes, violents et colères, oppriment les serfs et les petits qui labourent la terre, les légendes racontent comment la main du comte — du graff, du hern — s'est desséchée lorsqu'il a voulu piller le bien du peuple et le reliquaire de l'église ; les prières et les exhortations d'un saint abbé ont arrêté les conquérants farouches ; le jeûne, l'abstinence sont opposés à ces hommes d'armes qui dévorent le bien du pauvre et savourent la venaison dans les festins. Un comte fougueux a renvoyé sa chaste épouse de son lit nuptial, la légende raconte bientôt comment la mort est venue à lui, au milieu des banquets sensuels[14] ; un pauvre serf qui s'est fait ermite et moine exerce plus de puissance par les miracles, que le comte ou le duc ; les légions du ciel accourent à ses prières. Les diables sont les instruments que les légendes emploient pour comprimer le méchant.

La biographie des saints est le plus naïf récit de ce temps ; elle encourage lés faibles, terrifie le puissant ; c'est dans les bollandistes qu'il faut apprendre le moyen âge : ces Plutarques de la solitude écrivaient avec foi les miracles qui avaient préservé le faible de la vengeance du fort. Les légendes furent le frein unique peut-être qui préserva la société des violences de la guerre ; ces mythes du christianisme furent en harmonie avec l'état social ; il y eut des lieux sacrés contre la main violente des hommes d'armes, il y eut des faiblesses respectées, une morale sous les vives impressions de la croyance : lisez les miracles de saint Germain écrits par le moine Aimoin[15] ; l'histoire de saint Benoît, le prédicateur d'Angleterre ; la biographie de Martin de Tours ; l'exemple de ces hommes pieux avait préparé les générations vers une voie meilleure. Dans une société brutale, il fallait de douces légendes qui relevassent la femme, protégeassent les faibles enfants, les serfs, la cité, la foire et les pèlerins : Geneviève, noble Geneviève la brabançoise, n'es-tu pas là l'image de la femme persécutée par le traitre et le fort, et que la main de Dieu conduit et sauve contre les outrages du majordome déloyal ?[16]

Quelques-unes de ces légendes racontent la vie voyageuse des saints qui se vouent à l'apostolat dans les terres inconnues ; si la plupart des moines se renferment dans la cellule pour apprendre au monde qu'il y a un bonheur en face de Dieu et de soi-même, si quelques autres prient et jeûnent pour habituer la société aux privations — lorsque les hommes d'armes, dans la joie des festins, se repaissaient de venaison —, d'autres clercs se consacrent à la vie voyageuse pour annoncer la parole ; et c'est quand la société est entourée de barbares en dehors de la civilisation et de la foi chrétienne, que des évêques pleins d'un grand zèle s'acheminent vers ces contrées incultes pour prêcher et convertir. Saint Benoit Biscop ou Bischop[17] enseigne les peuples de l'heptarchie saxonne, Wilfrid ou Boniface le Saxon lui-même se fait l'apôtre de la Germanie ; il fonde en passant des villes, des monastères dans la Hesse, dans la Thuringe aux noires forêts[18]. Tous ces pays sont couverts de hordes barbares ; il y a des peuplades sauvages même dans les Ardennes ; on y adore les idoles du vieux monde : rien n'arrête les apôtres, ni la cruauté des Frisons ni la haine implacable que les Saxons portent aux principes et aux lois du christianisme. Ils partent pour enseigner la vérité, ils n'emportent avec eux que quelques lettres des papes et des princes ; ils prêchent pour faire connaître partout la vérité de Dieu, la sainteté du mariage, la vie et la mission du Christ. Souvent, pour couronner leur œuvre, les apôtres souffrent le martyre ; un tumulte de peuple les sacrifie aux pieds des idoles, ils tombent sous la hache ou la framée. Ainsi finit saint Boniface[19] sur la terre indomptée des Frisons ; on lui arracha les entrailles, on brisa son crène sur ce sol ensanglanté.

Les ossements précieusement recueillis des martyrs s'enchâssaient dans les reliquaires, que les églises appellent leur trésor : trésor, en effet, de foi et de protection pour le petit et le faible ! Ces reliquaires contiennent des débris précieux, ils sont couverts d'or enchâssant les pierres, les émeraudes, les topazes, qui brillent comme la lumière du jour. Ces châsses sont l'objet de l'adoration des fidèles, qui viennent y déposer leurs présents : la dent du sanglier qui les a menacés, la hache d'armes quia rebondi sur leurs têtes ; serfs, peuples, Romains et Francs accourent pour prier devant ces reliques qu'ils accompagnent en procession solennelle au milieu des parfums, des fleurs et de l'encens. Dieu refuse-t-il la pluie aux campagnes désolées ? c'est au reliquaire que l'on recourt pour obtenir la rosée bienfaisante. Une maladie, une famine, affligent-elles le pays ? les prières retentissent au pied de la chasse : c'est le trésor, la fortune de l'église. On dépose des ex-voto, des luminaires ; on prie, on jeûne en son honneur. Sur le type de ces reliquaires se construisent les cathédrales lombardes ou byzantines du VIIIe siècle ; on se fait gloire et honneur d'imiter en tout les tombes des saints ; on les transforme en basiliques, comme on les a d'abord façonnées en argent ou en vermeil, selon l'us de l'orfèvre Éloi, le maitre et l'ouvrier du reliquaire de saint Martin de Tours. Un petit fragment d'os de l'évêque vénéré a été souvent l'origine et la source de ces beaux monuments du moyen âge, panthéons chrétiens çà et là répandus : chaque cathédrale a sa légende, comme chaque légende sa cathédrale. La plus curieuse lecture pour le moyen âge, ce sont les récits sur la vie des saints ; vous y voyez la tempérance précitée, l'abstinence de la chair, les jeunes, sorte de règlement de police, famine régulière dans les grandes famines si fréquentes à ces époques ; vous y voyez des exemples de modération. Au milieu d'une société violemment ébranlée, la vie monastique fut le contrepoids apporté à l'existence active, violente des hordes barbares ; la solitude du monastère est opposée à la fougue errante des peuplades de Germanie[20].

L'action des conciles, bien qu'irrégulière encore, vint à l'appui des lois politiques pour l'ordre des sociétés ; ces conciles furent fréquents dans les Gaules au VIIIe siècle. Comme il y avait un grand relâchement dans les mœurs, il fallut recourir aux lois ecclésiastiques pour les comprimer. Ces actes se ressentent du mélange perpétuel des hommes d'armes et des clercs : rien n'est distinct ; une disposition purement d'église est à côté d'un acte de police sociale ; les règles du mariage surtout préoccupent les conciles ; les passions des sens sont les plus difficiles à comprimer parmi les nations brutales ; tout ce qui tient au mouvement du sang, la colère et l'incontinence dominent les peuples primitifs. La discipline des clercs tient la première place ; il faut ramener l'ordre dans l'église d'abord, pour le faire prévaloir ensuite dans la société. On peut considérer les conciles de Nantes et de Verberie[21] comme les deux extrémités du système ecclésiastique dans les Gaules pendant tout un siècle. Le concile de Nantes[22], qui est fort ancien, conserve une empreinte romaine ; il ne s'agit que de discipline cléricale : On doit entendre la messe à sa paroisse ; chaque dimanche, à la porte de l'église, on demandera s'il est des personnes qui aient entre elles des inimitiés ; elles devront se réconcilier avant la messe. Les clercs ne pourront rester avec aucune femme, et celles-ci, même dans l'église, ne s'approcheront jamais du chœur. Les sépultures auront lien sous le portique des églises ou dans le parvis ; chaque prêtre ne peut avoir qu'une église, la dime n'est pour eux qu'une solde des pauvres et des pèlerins. On peut répudier sa femme pour adultère. Le repas du prêtre doit consister en un morceau de pain et un calice de vin ; l'homicide est puni de quatorze ans de pénitence. Les femmes ne peuvent se mêler d'affaires publiques, elles doivent travailler à des ouvrages d'aiguille ; nul ne peut se déplacer en aucun cas qu'avec la permission de l'évêque. On doit faire abattre au plus tôt les arbres druidiques pour lesquels le peuple conserve encore de la vénération ; puis on brisera les pierres que la superstition des vieux Gaulois consacrait aux divinités inconnues[23].

A l'autre extrémité de la période, le concile de Verberie se ressent des mœurs de la nation conquérante ; ou peut dire que si le concile de Nantes est romain, celui de Verberie est franc. Ainsi la continence y est moins respectée ; on suppose le cas possible d'un prêtre qui s'est marié avec sa nièce ; les circonstances de répudiation s'y trouvent multipliées ; le concile prévoit les hypothèses les plus diverses de l'inceste et de l'adultère, comme s'ils étaient fréquents ; la chasteté du toit domestique ne parait nullement gardée. Si une femme se plaint que son mati n'a jamais consommé le mariage, dit le concile, qu'ils aillent à la croix ; et si ce que la femme dit est vrai, qu'ils soient séparés et qu'elle fasse cc qu'elle voudra[24]. On renouvelle aux clercs la défense de porter les armes, leur plus chère distraction ; on pose des restrictions pour la chasse, des peines pour les homicides ; c'est un code de police sociale. Ces conciles provinciaux n'ont aucun caractère d'universalité ; ils sont souvent spéciaux à une métropole, à une cité, à une circonscription diocésaine ; quelquefois aussi ils comprennent toutes les églises des Gaules[25]. En aucun cas, ils ne peuvent s'étendre aux lois générales de l'église ; ce sont comme des additions aux capitulaires, aux diplômes, aux actes des assemblées royales. Dans le VIIIe siècle, il se produit un mélange de lois religieuses et civiles : quelle différence réelle peut-on trouver entre les conciles et les capitulaires ? Les uns et les autres s'occupent également de l'église, du peuple, des lois pénales et des prescriptions administratives ; plus d'un capitulaire porte sur l'organisation épiscopale, et plus d'un concile s'occupe des comtes, d'un bourg et des envoyés du roi, par une confusion perpétuelle de chaque système. C'est en vain que l'on voudrait séparer méthodiquement la double organisation civile et de l'église, elles s'enchâssent dans les mêmes codes[26].

Quelle était au reste cette organisation civile au VIIIe siècle ? Les sociétés politiques n'éprouvent pas même par la conquête des changements complets et absolus, les niasses sont de granit ; lorsqu'une civilisation existe, l'établissement d'une génération nouvelle de conquérants ne brise pas l'ancien ordre social ; c'est comme une couche qui vient se poser sur la vieille terre ; les Romains s'établirent dans les Gaules avec leurs vastes et fortes institutions, et cependant les habitudes gauloises survécurent : on ne brise pas les traditions d'un peuple, les coutumes survivent longtemps après que la conquête s'est stabilisée. Il en fut ainsi des Francs ; l'esprit systématique seul a pu croire au passage rapide d'un ordre social à un autre. Quand on examine de près les documents de l'époque gauloise, romaine et franque, on voit que la triple nationalité se maintient ; les coutumes, les lois en sont empreintes. La conquête a laissé survivre une multitude de principes antiques sur l'état des personnes, des cités et des propriétés territoriales.

Le premier caractère qu'il faut reconnaître à ces temps, c'est la personnalité des lois ou des codes applicables à chaque peuple ; il ne s'agit pas encore de nations stabilisées, mais de tribus qui conservent chacune leurs coutumes, leurs institutions politiques. Les Gaulois, les Romains ont le code Théodosien[27] ; les Francs, la lex salica ou ripuaria ; les Lombards, les leges longobardorum ; les Visigoths, les conciles d'évêques qui empruntent aux lois de Rome la plupart de leurs prescriptions[28]. Il n'y a rien de territorial, si bien que lorsque les Francs, les Bourguignons se transportent dans de nouvelles terres, ils y viennent avec leur code particulier. Ainsi l'état des personnes, au VIIIe siècle, se règle sous mille formes diverses, par les lois propres à chaque peuple : serfs, hommes libres, clercs, hommes d'armes, évêques, comtes ; tous ont leurs prérogatives écrites dans leur législation spéciale. Il est faux d'établir que les Romains ou les Gaulois étaient tous serfs ou soumis à une domination exclusive sous la main des Francs, qui seuls campent comme des conquérants sur les terres des vieux possesseurs. Les évêques, les clercs, les comtes même appartiennent souvent à la race gauloise et romaine ; cette civilisation ne s'est point effacée, elle s'est mêlée, confondue, parce que lorsqu'un peuple est parvenu à un degré très avancé, la conquête s'associe aux faits anciens, mais ne les détruit pas.

Partout la société gauloise se révèle avant l'époque carlovingienne, et spécialement dans l'organisation des municipes ; la commune n'est pas née spontanément au Xe siècle comme un fait de sédition[29] ; les institutions municipales ne sont pas sorties du peuple dans un jour de tumulte et d'effervescence de serfs. Toute la Gaule romaine était couverte de villes, de cités avec leurs privilèges, leurs curies : au midi, Arles, Aix, Carpentras, Marseille, Fréjus ; au nord, Amiens, Auxerre, Tournay, Saint-Quentin. On trouve dans ces cités l'établissement complet de la curie, des magistrats municipaux ; il existe un régime tout entier, et la loi Julia municipalia organisait la police des villes dans les Gaules[30]. Rome admettait les corporations, l'élection libre des citoyens ; les collèges de négociants, de marchands, les fautes de la Saône et de la Durance avaient conservé une grande renommée dans les fastes de l'empire[31]. Les institutions ne s'étaient point effacées par le passage de la conquête, bien des municipes s'étaient maintenus à travers les âges.

Il y eut plus d'ordre qu'on ne croit dans l'établissement des Barbares ; il se fit une sorte de partage : ici, les vaincus s'engagèrent à cultiver la terre moyennant tribut ; là, les divisions furent plus égales ; la civilisation romaine survécut, et Clovis, pour stabiliser les conditions de son gouvernement, fut obligé d'adopter la religion des Romains ; la sainte légende de Clotilde fut comme le symbole de ce passage des Francs aux mœurs et aux coutumes chrétiennes ; Clotilde fut l'image de la patrie antique devant laquelle s'agenouilla le chef des Barbares. Aussi trouve-t-on partout, sous la première race, des vestiges d'institutions antérieures. Si les Francs saliques ou ripuaires-gardèrent leurs lois, les Romains, les Gaulois conservèrent aussi leurs institutions primitives ; les lois impériales devinrent celles de l'église, du clergé : les conciles se ressentent des fortes études que les évêques ont faites des institutes et du code Théodosien[32]. Ces études influent même sur les lois des rois francs ; on voit qu'ils ont étudié la législation de Rome ; les préambules des édits mérovingiens signalent cette tendance vers les codes conservés comme traditions parmi les Gaulois soumis à Rome. Presque toutes les formules sont rédigées dans cet esprit[33] ; les rois mérovingiens cherchent à ployer leurs fiers compagnons sous les coutumes plus modérées des vaincus. Les Francs, dit Agathias, ont adopté la plus grande partie du droit romain ; ils sont régis par les mêmes lois, ils se marient à la manière des Romains, dont ils ont embrassé la religion, car tous les Francs sont chrétiens et catholiques ; ils ont dans leurs villes des magistrats, des évêques ; ils ne diffèrent des Romains que par leurs habits et leur langage[34].

Ce fait est essentiel à noter, parce qu'il constate les éléments dont Charlemagne se servit pour accomplir son grand œuvre. Il ne dut pas seulement employer la civilisation franque et germanique, il invoqua la force chrétienne et pontificale mêlée aux souvenirs de Rome. Les institutions grecques et byzantines[35] même dominaient les Barbares ; les codes, les basiliques avaient gardé leur renommée et leur influence ; Gaulois, Romains, Francs, tous se mêlèrent à la face des autels dans la communion du même Christ. Les codes servirent de base aux conciles et aux capitulaires, leur empreinte se fait sentir même dans les formules des conquérants ; ceux-ci eurent sans doute des coutumes spéciales, bientôt elles se confondirent. Les curies, les municipes furent le principe des communes ; les magistratures se perpétuèrent sous d'autres noms, les corporations se maintinrent dans des conditions presque semblables.

Si un grand nombre de Gaulois et de Romains se trouvaient réduits à l'état de colons, les Francs demeurèrent libres et fiers ; là fut une première distinction. On dut payer une somme plus forte à raison de ce qu'on avait tué un Franc ou un Romain ; le vainqueur fut affranchi de tout impôt, il ne dut que le service de son corps pour la bataille. En dehors de ces distinctions, il n'y eut pas de divisions absolues ou de séparations complètes entre les races conquérantes et conquises ; le passage d'un état social à un autre fut presque insensible ; les Francs n'imprimèrent qu'un moment la tradition germanique sur les terres soumises, et les Carlovingiens furent peut-être l'expression la plus fière de cet esprit de la conquête. La puissance de la civilisation et de ses merveilles est si grande, que l'on verra Charlemagne, le petit-fils de Charles Martel, le maire du palais, le Germain par excellence, empreindre souvent ses actes et ses lois de l'esprit romain. La pensée définitive de Charlemagne, empruntée aux empereurs et aux papes, ne fut-elle pas de reconstituer l'empire d'Occident d'après les bases et les traditions de Rome ?

 

 

 



[1] Combien n'est-il pas à regretter qu'il manque encore plusieurs métropoles au beau travail de la Gallia christiana. Les nouveaux bénédictins la continuent ; j'espère que ce travail national s'achèvera. Je le mets au niveau des bollandistes, Act. Sanct., auxquels il manque aussi plusieurs mois.

[2] Voyez la défense faite par le concile de Verberie, art. 16 ; Concil. Gall., t. II.

[3] Voici quelques-uns des articles les plus remarquables des Conciles des Gaules. Le père Sirmond et Fleury s'efforcent d'excuser les évêques ; ils sont trop Gallicans pour reconnaître l'admirable influence des papes, qui seuls mirent de l'unité dans la confusion. Baluze, Ier, 162. Hist., V, 637.

1. De conjugiis in tertio et quarto gradu.

2. De eo qui cum usons suæ filia carnale commercium habuit.

3. Quod relictam sacerdotis uxorem ducere non liceat.

4. De feminis sponte vel invita vel sine virorum consensu velatis.

5. De eo cui mortem uxor cum aliis machinata est.

6. De ingenuo qui ancillam durit pro ingenua, et de ingenua quæ servo nupsit pro ingenuo.

7. De servo qui ancillam suam concubinam habuit, et illa relicta domini ancillam vult ducere.

8. Servus à domino libertate donatus, si postea cum ejus ancilla mœchatur, cogi potest ut uxorem illam habeat.

9. De muliere quæ virum suam in alio pago sequi non vult.

10. De filio qui cum noverca mœchatus est.

11. De eo qui cum privigna vel cum uxoris sonore mœchatur.

12. De eo qui cum duabus sororibus dormierit.

13. Qui ancillam volens uxorem duxit, cum ea permaneat.

14. Ut ab episcopis vagis presbyteri non ordinentur.

15. Presbyter degradatus potest in necessitate baptizare.

16. Ne clerici arma gerant.

17. De muliere quæ viri impotentiam causatur.

18. De eo qui cum uxoris suæ consobrina mœchatur.

19. De servo et ancilla, si per venditionem separentur.

20. Ut chartularius qui cum ancilla fornicatur, eam libertate donatam uxorem habere cogatur.

21. Qui uxorem velari permisit, aliam ne ducat.

Baluze, Ier, 165. Hist., V, 637.

1. De illo qui cum uxore fratris sui fornicatus est.

2. De illo qui sponsam filii sui oppresserit.

3. De eo qui filiastrum aut filiastram ante episcopum tenuerit.

4. De illo qui cum filiastra, ignorante matre, fornicatus est.

5. De illo qui cum duabus sororibus fornicatus est.

6. Si quis propter faidam fugit.

7. De incestis.

8. De parricidis.

9. Item de incestis.

[4] Concil Gall., t. II, p. 1 à 50. J'ai montré dans mon Hugues Capet ce grand travail moral de la papauté, t. III.

[5] Nous ordonnons, disait le pape Zacharie à saint Boniface, par l'autorité de saint Pierre, que la susdite église de Mayence soit à perpétuité métropole, pour vous et pour vos successeurs ; qu'elle ait sous elle cinq villes, savoir : Tongres, Cologne, Worms, Spire et Utrecht. Gall. Concil., t. Ier, p. 581.

[6] Avant l'institution de cette métropole, Boniface avait la dignité de chorévèque (τοΰ χώρου έπισκπου, évêque des champs), dignité qui n'avait aucun territoire file.

[7] Zacharie exerce spécialement une grande influence. Son pontificat est du 30 novembre 741. L'histoire de la papauté sous Grégoire VII se trouve dans mon Hugues Capet, t. III.

[8] Le VIIe siècle est l'époque de la fondation des monastères de Sithieu Fontenelle, Chelles, Corbie. Saint Benoît est toujours le fondateur primitif de ces monastères qui travaillent et prient. Consultez le grand et modeste Mabillon dans ses Annal. ordin. sanct. Benedict. Je place aussi très haut ses Act. Sanct. Mais la collection des bollandistes est plus largement conçue.

[9] On a compté que les ⅝ des bourgs et villes de France doivent leur origine à des monastères. La Belgique surtout leur est redevable de ses actives cités. Liège, la ville des métiers, tire son origine de la translation des reliques de saint Lambert ; il y eut un tel concours de peuple, qu'une ville fut fondée autour de la eldis.se du saint. La date de cette translation est du 28 avril 720. Vita sanct. Lamberti. Dans les Origines de la ville de Liège.

[10] Vita Huberti ab ipsius discip. script. apud Surium, 3 nov. Le père Roberti, fort chasseur lui-même, a beaucoup disserté sur saint Hubert dans un petit opuscule : Questiones Hubertinœ.

[11] Voyez la légende sur la fondation du Mont-Saint-Michel. Sigebert in Chronic. ad ann. 709.

[12] Je suis passé deux fois à Fulde, sur la route de Francfort à Leipsick ; il reste à peine quelques souvenirs de la vieille abbaye.

[13] La plupart des chartes originales des Carlovingiens conservées aux archives du royaume sont relatives aux dons faits aux monastères de Saint-Denis et de Saint-Germain, véritables fondations nationales.

[14] J'ai passé ma plus extrême jeunesse à l'étude des bollandistes, et mon goût d'histoire est venu de cette lecture profonde, assidue. Les Act. Sanct. ord Sanct. Benedic de Mabillon sont aussi une des lectures les plus attrayantes pour ceux qui veulent suivre l'histoire.

[15] Aimoin est un des plus actifs biographes des saints, il a écrit De miracul. sanct. German, De miracul. sanct. Genoref. ; c'est une imagination ardente et poétique. Voyez le texte donné par D. Bouquet, t. VII, p. 348.

[16] Il ne faut pas prendre sainte Geneviève de Brabant pour la Geneviève de Nanterre.

[17] Ce Benoît, saxon, ne doit pas être confondu avec saint Benoît le fondateur ; il naquit en 628. On trouve sa vie écrite par Bède, dans The history of forst Werermouth abbots, par Ware, Dublin, 1664.

[18] Concil. Gall., t. Ier, p. 550-580. Les voyages de saint Anschaire au nord de la Scandinavie appartiennent au IXe siècle.

[19] La vie si dramatique de saint Boniface a été écrite par son disciple Willibad, Saxon comme lui. Bollandistes, 1er juin, p. 410.

[20] Je regrette que l'histoire des monastères n'ait point été écrite sous ce point de vue ; elle aurait bien mieux expliqué le moyen âge que la simple étude des lois incertaines et des chroniques généralement trop brèves du XIIe siècle.

[21] Le père Sirmond a publié avec un grand soin la Collection des conciles de la Gaule ; c'est dans ces précieux documents qu'il faut rechercher l'histoire des lois de police sociale du Ve au VIIe siècle.

[22] Le concile de Nantes est marqué de l'année 650. Flodoard en parle, liv. II, chap. Ier ; il est en entier dans le Concil. Gall., t. page 601.

[23] Au VIIIe siècle encore il existait des vestiges du culte gaulois et druidique, surtout dans la Bretagne, qui est longtemps demeurée une terre à part.

[24] Art. 17 dit concile ; aller à la croix, c'est incontestablement l'épreuve de la croix dont il est question.

[25] Les canons du concile de Verberie se trouvent dans le Concil. Gall., t. II, p. 1. Il y a des conciles qui n'appliquent ces dispositions qu'à de simples localités.

[26] La confusion perpétuelle des deux principes de l'église et de la conquête a été la cause première de la plupart des erreurs dans lesquelles sont tombés les écrivains systématiques préoccupés de la législation des Gaules : Mably n'a vu que la politique ; Montesquieu a tenu peu de compte des conciles et ne s'est inquiété que des lois barbares. Je crois qu'il est impossible de parler de la législation du Ve au IXe siècle sans donner une large part au droit canonique.

[27] L'influence du droit romain ou plutôt du droit byzantin est immense dans les Gaules ; c'est une erreur de trop donner à l'action des lois barbares ; elles ne s'appliquent qu'à une très petite partie de la population, c'est-à-dire aux conquérants.

[28] Quand je remonterai aux institutions barbares, j'aurai besoin de réhabiliter la loi des Visigoths, spécialement ecclésiastique. Montesquieu l'avait vivement attaquée en la traitant de bigote ; c'est qu'avec sa portée remarquable d'esprit, Montesquieu n'a pu se défendre des impressions du XVIIIe siècle contre les prêtres.

[29] La théorie de la commune, née tout à coup par la révolte au Xe siècle, est, je le répète, une de ces découvertes qui tiennent aux circonstances politiques et momentanées. Quand elle fut écrite en 1827, l'histoire servait d'instrument comme toute autre arme ; elle avait commencé comme une polémique dans le Censeur européen, elle se continuait comme articles du Courrier français. La commune, réunion ou groupe de citoyens, est antique comme le municipe et la corporation ; chaque jour on découvre des chartres de municipes bien antérieures aux séditions des serfs. Voyez le travail de M. Pardessus : Bibliothèque de l'école des chartres, t. Ier, 3e livraison.

[30] Angers, Bourges, Cavaillon, Clermont, le Mans, Meaux, Orléans, Paris, Saintes, Tours, Toul, Uzès avaient de vieilles et grandes institutions municipales avant la révolte des serfs au Xe siècle, et dans une époque plus ancienne on trouve d'autres municipes. M. Raynouard en a donné les preuves, malheureusement avec trop de partialité.

[31] Ces corporations de nautes sont très antiques, les plus antiques peut-être ; il existe des vestiges de leur institution sente à Paris. Nautæ Parisiaci. (Voyez Mém. de l'Acad. der Inscrip., t. Ier.)

[32] J'ai souvent comparé les conciles, surtout avec les codes Théodosien et Justinien dans des études spéciales du droit ; il y a des emprunts mutuels et une contusion évidente. C'est au reste l'opinion de M. de Savigny.

[33] Voyez les formules recueilles en France et en Allemagne par Bignon, Sirmond, Baluze, Mabillon, Goldast et le Thesaurus de Schilter ; celles de Marculfe sont les plus curieuses.

[34] La question des compositions a été évidemment épuisée par Mably et Montesquieu.

[35] Cette influence de la cour de Constantinople sur les Francs est considérable dans la première race ; elle se continue encore sous Charlemagne ; je regrette qu'elle n'ait pas été suffisamment aperçue dans les travaux modernes.