Vers 1543 ou 1544, peut-être avant, il était de retour dans les contrées du bas-Rhône et y roula quelque temps. A Valence des Allobroges, il connut un excellent apothicaire, dont le nom plus tard ne lui était pas resté présent à l'esprit, mais dont la science mathématique l'ébahit, quand il vit dans son cabinet ce que vit Aristippe aux rives de Syracuse ou d'ailleurs, après avoir perdu tout son bien en mer : des lignes et des quadratures, sinon une pergula d'Archimède. A Vienne, il eut l'occasion de connaître quelques personnages dignes d'une suprême louange, dont l'un était Hieronymus Montuus, docteur de l'Université de Montpellier, plus tard installé à Lyon et qui devint premier médecin de François II, et l'autre un jeune homme dont on pouvait tout attendre : Franciscus Marius. A Avignon, en revanche, il n'en allait pas de la sorte : ils étaient là plusieurs, à l'Université, qui se souciaient assez peu de ce que Jésus-Christ nous a commandé quand il a dit : Préparez-vous un trésor au Ciel, car les larrons n'y dérobent point et les banques n'y font faillite. Les médecins de ce pays-là préfèrent la richesse en ce misérable monde, qui tôt périt, à celle qui serait à jamais durable, en quoi ils sont comme Tantale : tant et tant, et pourtant ils n'ont rien... Et Marseille n'a rien à envier à Avignon, car s'il est une ville où la médecine soit mal administrée, c'est celle-là. Les docteurs en médecine y sont pourtant gens de bien, et principalement maître Loys Serre, homme savant et docte, un second Hippocrate pour le diagnostic. Mais les apothicaires... Ah ! ces apothicaires ! Ne vous fiez nulle part à eux : pour un bon, il y en a cent et mille mauvais. Les uns sont trop pauvres pour pouvoir mettre ce qu'il faut dans les médicaments ; les autres sont riches, mais avares et corrompus à ce point que, de peur de n'être payés à leur gré, ils omettront le tiers ou, si possible, la moitié de la recette ; il en est d'ignorants qui ne savent ni ne veulent rien savoir, et voilà un méchant défaut chez un apothicaire ; d'autres sont sales et malpropres et fabriquent leurs drogues déshonnêtement. Dans ses voyages en France, Nostradamus avait vu faire des choses si énormes par les apothicaires, qu'il en était venu à penser qu'il n'est pas d'art manuel où il se produise autant d'abus que dans le leur. Ceux de Marseille étaient parmi les plus mauvais : on n'oserait dire les méchancetés qu'ils commettaient en composant leurs drogues, et dans une ville où les navires apportent pourtant les médicaments simples de partout !... Je pense que notre homme s'y trouvait à la fin de 1544, lorsque la pluie se mit à tomber de telle façon en Provence qu'on eût cru voir recommencer le Déluge. Le Rhône déborda, la Camargue devint un grand lac et partout l'inondation tendit ses miroirs au ciel obscur. Le fleuve renversa une partie des murailles d'Avignon ; les corps déterrés des cimetières flottèrent sur les eaux. C'est de là que naquit la grande peste d'Aix, qui commença le 31 mai 1546 et dura neuf mois Comme Avignon et Marseille, Aix était remarquable par sa saleté : L'usage des fosses des privés n'y étant pas reçu, écrira quelqu'un un siècle plus tard, il faut aller faire ses affaires sur le toit des maisons, ce qui empeste fort les logis et même toute la ville, principalement lorsqu'il pleut, l'eau entraînant dans les rues toute cette ordure, de sorte qu'il fait fort mauvais à cheminer en ce temps-là : à Aix il pleut comme m..., disait le proverbe. Aussi ne faut-il pas s'étonner si la peste fit des progrès surprenants. Le Parlement se retira prudemment à Pertuis ; au reste la plupart de ses membres étaient atteints et il se trouvait réduit à une seule chambre. Des médecins s'étaient enfuis, d'autres moururent. La ville fit appel à des étrangers, dont fut Nostradamus. Astruc assure que la communauté d'Aix le pria par une délibération solennelle de venir arrêter les progrès de la maladie ; mais les archives de la ville ne contiennent aucune trace d'une délibération de ce genre. Au reste il n'est pas bien sûr que c'ait été un si grand honneur pour lui, que d'avoir été ainsi mandé : en pareil cas les villes faisaient appel à tous les médecins disponibles, non établis à demeure en quelque endroit, et elles les payaient des deniers municipaux naturellement. Cette fois, il s'agissait bien de peste. En effet, on nomma la maladie de 1546 charbon provençal parce que les malades se couvraient de taches et devenaient noirs comme charbons. Mais presque toutes les épidémies étaient alors ainsi nommées et passaient pour inexplicables ; les médecins eux-mêmes, tel Ambroise Paré, les considéraient comme des manifestations de l'ire de Dieu contre lesquelles la meilleure médication était de s'en remettre à la grâce du Christ et à l'intervention de saint Roch, de saint Prudent ou de saint Charles Borromée, sinon comme des calamités engendrées par des conjonctions fâcheuses des astres. En 1596 encore, on annoncera officiellement que l'inspection du ciel fait prévoir une recrudescence du mal. Au début du XVIIe siècle même, le bureau de santé de Sisteron interdira soudain l'entrée de la ville sous prétexte qu'on est sous l'influence d'un mauvais quartier de lune. Aide-toi, le Ciel t'aidera : on s'aidait. Néanmoins, persuadé de l'origine céleste et inéluctable des calamités, on se sentait plus enclin à se résigner, à désespérer ou à lutter par la seule prière, qu'à combattre le fléau avec méthode et par des moyens naturels. Et puis quel moyen employer ? Au XIVe siècle, un Traité de l'épidémie, rédigé par les maîtres du collège des médecins de la Faculté de Paris, recommandait de se ménager tout d'abord, et, notamment, de n'abuser point des plaisirs de l'amour ; de purifier l'air par des fumigations d'ambre et de musc, ou, au moins, de bois odoriférants, comme genévrier, frêne et aloès ; d'arroser les chambres de vinaigre et d'en avaler à tous les repas, quitte à en corriger les inconvénients pour l'estomac par de la cannelle ou de l'eau de mastic, qui en détruisent la malice ; d'aspirer le moins d'air possible, surtout lorsqu'on se trouve proche des malades ; et d'user d'antidotes divers, tels que l'émeraude qui préserve de tout venin quand on la porte sur soi, le grenat, la turquoise ou l'améthyste, et enfin d'avaler de l'ail, beaucoup d'ail, énormément d'ail. Au XVIe siècle, les municipalités prenaient ainsi des mesures sages, mais, hélas ! on ne les respectait guère. Ceux qui soignaient les malades, qui les portaient ou les approchaient, devaient tenir à la main des baguettes blanches, noires ou rouges ; les médecins avaient des habits de cuir rouge ou des sortes de cagoules, ou des bonnets jaunes, ou des marques de même couleur sur leurs vêtements, voire à leurs pieds des clochettes ou cymbales, afin que pussent s'éloigner ceux qui par mégarde ne les auraient point vus d'abord. Les maisons où se trouvaient des pestiférés étaient marquées par des bottes de paille, des croix peintes, des croix de bois. Il était défendu de jeter les linges souillés dans la rivière : ils devaient être incinérés. On soldait des hommes pour monter la garde aux portes des villes et arrêter les passants suspects. On en payait d'autres pour brûler et désinfecter : parfumeurs, désaireurs, purgeurs, marrons, marqueurs, nettoyeurs, bosserands, officiers de purge, éventeurs, ainsi les nommait-on selon les pays. On interdisait les assemblées, foires, noces et jeux de toute sorte. On fermait les bourdeaux et chassait ou emprisonnait les filles communes. On commandait même de nettoyer, les rues, chose inouïe, et de curer les égouts... Mais tout cela, en réalité, ne se faisait guère ou ne se faisait point, et comment en eût-il été autrement, puisque beaucoup de gens, de médecins même ne voulaient point croire que la maladie s'attrapât par contagion, voyaient la cause de tout dans les conjonctions des planètes et se riaient des précautions ? En 1545, comme le roi François était campé près de Montreuil où régnait une épidémie, le duc d'Orléans, son second fils, se rendit avec d'autres jeunes seigneurs dans une maison où venaient de mourir huit personnes, et là s'amusa à renverser les lits, à se couvrir par dérision de leurs plumes, et à se montrer ainsi déguisé dans plusieurs tentes du camp. Deux heures plus tard, il était couché, délirant de fièvre, et il mourut peu après. Mais de pareils exemples ne convainquaient pas et, devant la marche du fléau, qui semblait fatale, la peur et le désespoir s'emparaient des populations, le désordre régnait partout et la mort fauchait à grands coups. Quand Nostradamus élu et stipendié par la cité d'Aix, arriva, les gens de tout âge étaient frappés. Les cimetières étaient si pleins qu'on ne savait plus où enterrer les morts. La plupart des malades tombaient en frénésie le second jour, et ceux-là périssaient sans que les taches noires leur vinssent, mais leurs urines étaient subtiles comme du vin blanc et, après leur décès, la moitié de leur corps était de la couleur du ciel, rempli de sang violet. Les autres, à qui les taches venaient, mouraient subitement en parlant, en mangeant, en buvant, sans avoir nulle altération de bouche. Plusieurs avaient comme des charbons ; ceux qui les avaient derrière en éprouvaient une démangeaison et réchappaient pour la plupart, tandis que tous ceux qui les avaient devant finissaient mal. Quelques-uns, peu nombreux, étaient marqués sous les oreilles — on en vit surtout au début — ; ceux-là vivaient six jours, très rarement sept. D'autres avaient le charbon derrière l'épaule ou devant la mamelle : il leur venait un saignement de nez violent qui ne cessait ni jour ni nuit jusqu'à leur mort. La pestilence parut moins virulente à la fin ; mais au début et au milieu, si violente et maligne était la contagion qu'à cinq pas d'un pestiféré on attrapait sa maladie, et que dis-je à cinq pas ! son seul regard suffisait à contaminer les autres, tant la ville était infectée. Chaque jour Nostradamus faisait la visite de toute la cité et jetait hors des murs les pestiférés : le lendemain il s'en trouvait plus qu'auparavant. Parmi d'autres choses étonnantes, il se rappelait qu'étant allé visiter une femme, il l'appela à la fenêtre et elle y parut : elle était déjà occupée à coudre son linceul sur sa personne, commençant par les pieds. Quand vinrent les alabres, comme on dit en langue provençale, qui portent et inhument les pestiférés, ils trouvèrent en entrant dans la maison la femme morte et couchée au milieu de la chambre, à côté de son frère dont elle n'avait pu coudre le linceul qu'à demi. Et des choses de ce genre arrivèrent en trois ou quatre endroits. Que faire ? Les saignées, les médicaments cordiaux purgatifs et autres ne servaient à rien, ni même la thériaque d'Andromachus. Plusieurs affirmaient que cette peste était punition divine, car alentour de la ville, à une lieue à la ronde, tout le monde était en bonne santé. Les vivres se trouvaient en abondance et presque à vil prix, mais la mort arrivait si subitement que le père ne tenait compte de son enfant et que beaucoup abandonnaient leurs femmes et leur famille, sitôt qu'ils les voyaient frappés de la peste. D'aucuns se jetaient dans les puits, d'autres se précipitaient par leur fenêtre sur le pavé, le tout par frénésie. Les femmes enceintes avortaient et expiraient quatre jours plus tard, tandis que leur nouveau-né mourait subitement, le corps tout violet comme si le sang se fût épandu sous la peau. Bref, telle était la désolation qu'on trépassait, l'or et l'argent à la main, faute de pouvoir se faire apporter un verre d'eau. Si Nostradamus ordonnait quelque médicament, le malade mourait néanmoins, et le remède dans la bouche : ce que notre docteur attribue non à l'inefficacité de la drogue, mais au fait qu'elle était trop parcimonieusement donnée. Aix avait pourtant l'un des meilleurs apothicaires qu'au cours de sa carrière Nostradamus ait jamais rencontré, voire celui peut-être à qui il eût décerné la palme : c'est à savoir le pur et sincère Joseph Turel Mercurin. En outre, notre médecin avait inventé ou connaissait une poudre de senteur de parfaite bonté et excellence, dont l'odeur rend une suavité agréable et de longue durée, et qui chassait si bien le mauvais air que tous ceux qui en usèrent et portèrent dans la bouche furent sauvés : devers la fin on trouva par une expérience manifeste que ceci préserva un monde de la contagion. Hélas ! cet incomparable médicament ne se peut faire qu'une fois par an, au temps des roses !... En voici du moins la recette : Prenez de serrature [sciure] où le rament de bois de cyprès le plus vert que vous pourrez trouver une once ; d'iris de Florence six onces ; de girofles trois dragmes ; calami odorati trois dragmes ; ligni aloes six dragmes. Faites le tout mettre en poudre, qu'il ne s'évente ; et puis prenez de roses rouges incarnées trois ou quatre cents, qui soient bien mondées, toutes fraîches, qui soient cueillies avant la rosée, et les ferez fort piler dans un mortier de marbre avec un pestel de bois ; et quand les roses seront à demi pilées, mettez-y dedans la poudre susdite, et la tournez, piler fort et en arrosant un peu de suc de roses. Et quand le tout sera bien mêlé, faites-en de petites ballotes [pilules] plates, faites-en la mode de trocis[1] ; et les faites sécher à l'ombre, car elles sont de bonne odeur. Et notez que de cette composition se fait, après, savon muscat, poudre de cyprès, poudre de violette, pommes de senteurs, parfums, oiselets de cyprès, eaux aromatisées. Et pour rendre la composition plus excellente, y mettrez du musc et d'ambre gris selon votre pouvoir et vouloir. Que si les deux sont unis, je ne doute point que ne fassiez une odeur très souveraine et agréable. Et ledit musc et ambre gris pulvérisés et dissolus avec de suc de roses, et puis mixtionné dedans et séché à l'ombre. Hormis la bonté et odeur que cette composition rend aux choses et compositions susdites, si est-ce que si en portiez à la bouche, en bien peu vous rendra la bouche tout le jour d'une merveilleuse odeur ; ou si la bouche était puante, ou par les dents corrompue ou par mauvaises vapeurs sortant de l'estomac, ou qui aurait quelque ulcère puante en sa personne, ou quelque cas étrange, ou, en temps de peste, en porter à la bouche souvent, ne se peut trouver odeur qui plutôt déchasse le mauvais et pestiféré air. La peste d'Aix dura de mai 1546 à janvier 1547 environ, et Chavigny assure que les magistrats avaient été si satisfaits des services de Nostradamus ils le retinrent trois ans au service de la cité. Mais il n'en faut rien croire : non seulement on n'a rien retrouvé dans les archives à ce sujet, mais encore quelques mois plus tard notre homme était à Lyon, fort occupé à lutter contre une épidémie encore. Laquelle ? Une peste, dit-il, mais on employait ce mot pour désigner toute sorte de maladies contagieuses. Un auteur assure qu'il ne s'agissait que de la coqueluche[2]. Mais en ce temps toute maladie était dangereuse, surtout lorsqu'on transportait le malade dans un hôpital. On ne peut s'imaginer qu'avec peine aujourd'hui les séjours d'horreur qu'étaient jadis les hôpitaux. A la fin du XVIIIe siècle encore, à Paris même, et à l'Hôtel-Dieu, les malades étaient à ce point entassés que chacun d'eux ne pouvait disposer que de cinq mètres cubes quarante dans les plus petites salles, ces quantités approchent beaucoup de celles où un homme ne peut pas vivre vingt-quatre heures, disait un médecin du temps. L'empereur Joseph II, ayant vu couchés côte à côte dans un même lit un mort, un malade et un agonisant, ne put s'empêcher de témoigner à Louis XV son indignation : le roi ordonna par lettres patentes en 1732, qu'il fût remédié à cette situation ; mais on ne fit rien. Sous Louis XVI, en 1786, on mettait encore six malades dans des lits faits pour en contenir trois : chacun d'eux disposait parfois d'environ vingt-trois centimètres d'espace en largeur, au plus de trente-cinq. La vermine et la gale étaient à demeure sous les draps ; non seulement les malades atteints de la petite vérole même n'étaient pas isolés, mais les chemises à peine lavées, les autres linges qui ne l'étaient pas du tout passaient de l'un à l'autre, et l'on installait l'arrivant dans les draps où le contagieux venait de mourir. Chaque couche était garnie d'un lit de plume et d'une paillasse. De temps en temps on changeait l'un et l'autre. La plume était séchée, triée et battue, puis servait à nouveau, pleine de miasmes. Quant à la paille, on la renouvelait dans les salles mêmes des malades, au milieu d'une puanteur suffocante. Les agonisants et ceux-là qui salissaient leurs couches malgré eux étaient placés ensemble sur des bois de lit où la paille était simplement amoncelée et maintenue par une alèze ; c'était sur ce fumier aussi qu'on déposait souvent les entrants, en attendant qu'on eût trouvé où les loger. Vers les quatre heures du matin, on ôtait cette paille infecte pour la changer et on la posait sur le plancher, l'odeur qui se répandait dans tout l'hôpital était alors si affreuse qu'on la pouvait à peine supporter. Aussi la mortalité était-elle de vingt-deux pour cent. Les cadavres cousus dans une serpillière étaient entassés par cinquantaines sur un chariot qui, la nuit, les menait au cimetière de Clamart. Si tel était l'état de l'Hôtel-Dieu de Paris en 1786, à la veille de la Révolution, qu'on imagine ce que pouvait être celui des hôpitaux du XVIe siècle ! Les malades couchés par six, têtebêche, dans de mauvais lits, forcés de se placer sur le flanc comme les noirs dans l'entrepont des négriers, mangeant aux mêmes écuelles malodorantes, s'abreuvant aux mêmes pots de fer mal rincés, dévorés de puces, de punaises, de poux sous des draps souillés de sang et de pus, échangeant leurs haleines et leurs germes, mêlant leurs plaintes, suant, bavant, fientant dans la même couche ; et le plancher taché d'ordures où traînent des linges putrides, et le défaut d'air, la puanteur... Ce qu'il y a d'admirable, c'est qu'il en réchappât. A Lyon Nostradamus fut aidé dans sa lutte contre la contagion par un apothicaire du nom de René le Pilier Vert — Au Pilier vert était, je pense, l'enseigne de la boutique de ce René — qui faisait ses drogues en homme de bien. En revanche, il y retrouva Philibert Sarrazin, qu'il avait jadis connu à Agen, et à qui il avait enseigné ses premiers principes, étant plus âgé que lui. Sarrazin était médecin de l'Hôtel-Dieu, l'hôpital où avait appartenu Rabelais. Il paraît que Nostradamus eut quelques contestations avec lui, et, en effet, quoiqu'il l'appelle notable personnage et vante son incomparable savoir, on sent bien à travers les gros éloges qu'il lui décerne tout de même qu'aux autres qu'il lui gardait rancune. C'est que l'autre à Agen l'avait déjà compromis. Sarrazin faisait si peu mystère de ses opinions religieuses qu'il dut quitter Lyon. J'ai ouï dire, écrit Nostradamus, que Phil. Sarracenus s'est retiré à Ville Franche. Illi nec invideo ; mais il me semble que, selon sa doctrine, qu'il ne devait aller là, car leur règne ne sera guère durable, on entend qu'il veut parler du règne des réformés. Et, en effet, l'autre n'y resta guère, car dès 1550, il s'était réfugié à Genève, dont il devint bourgeois en 1555 et où il mourut vingt ans plus tard. |
[1] Le Dictionnaire de Trévoux indique que trochisque est un terme de pharmacie qui désigne une composition sèche dont les ingrédients sont mis en poudre fort subtile. On l'incorpore avec quelque liqueur, la réduit en une masse dont on fait de petits pains qu'on met à sécher à l'air, dans l'ombre, en les écartant du feu. Il y a des trochisques de toute sorte : purgatifs, altératifs, apéritifs, etc.
[2] M. Parker, sans référence précise.