CARTHAGE

 

II. — CARTHAGE AVANT LES GUERRES PUNIQUES.

 

 

Les tribus libyennes qui peuplèrent la Tunisie, à l'origine, ne devaient guère différer des Berbères de nos jours, leurs descendants. Elles habitaient, nous dit Hérodote, des huttes formées de quelques pieux soutenant des nattes de joncs et d'asphodèle : ce sont les gourbis d'à-présent. Les Libyens appelaient eux-mêmes mapalia ou magalia, ces cabanes légères qui ressemblaient, suivant Salluste, à une barque renversée[1]. Le village de La Malga derrière la colline de Saint-Louis, dont le nom a conservé le souvenir de ces anciennes magalia, parait désigner l'emplacement occupé par le campement des indigènes, lorsqu'ils venaient, comme les tribus nègres dans nos colonies actuelles, trafiquer avec les marchands carthaginois et leur apporter la poudre d'or, l'ébène, l'ivoire et les épices, pour recevoir en échange les étoffes, les bijoux, les verroteries et les autres produits manufacturés dans les ateliers de la Phénicie, de Cypre ou de l'Égypte[2].

Ces premiers habitants de la côte d'Afrique furent, de bonne heure, visités par les navigateurs phéniciens qui, poussés dans les parages de l'Occident par leur instinct commercial, touchèrent successivement aux côtes de la Grèce, de l'Italie, de la Sicile, de l'Afrique, de l'Espagne, qu'ils jalonnèrent de stations, longtemps avant la guerre de Troie. A l'époque où Sidon, à l'apogée de sa puissance, avait l'hégémonie sur toutes les villes de la côte syrienne, vers le xvi' siècle avant notre ère, de nombreux comptoirs étaient déjà ouverts tout le long du littoral africain ; le contact de ces hommes de l'Orient avec les tribus libyennes avait commencé à créer une race bâtarde, les Liby-Phéniciens, qui peuplèrent la côte, comme de nos jours, la race maltaise, issue de croisements analogues[3].

Sur l'emplacement où devait s'élever Carthage, les Sidoniens avaient installé un comptoir appelé Cambé ou Caccabé, dans le but de faire concurrence à la colonie tyrienne d'Utique, établie de l'autre côté de la presqu'île[4]. Un souvenir lointain de cette primitive colonisation se trouve rappelé sur des monnaies de Sidon, frappées vers le milieu du IIe siècle avant notre ère : Sidon se prévaut, sur ces pièces, du titre de métropole de Cambé, d'Hippone, de Citium et de Tyr[5].

De récentes découvertes archéologiques ont permis de déterminer l'emplacement précis de la colonie de Cambé. C'était sur le bord de la mer, dans la plaine comprise entre l'emplacement des ports et Bordj-Djedid. La colline de Bordj-Djedid et les terrains mamelonnés qui l'entourent servirent de nécropole à ces premiers colons ; ils marquent, par conséquent, les limites extérieures de leur établissement commercial. Le mobilier funéraire recueilli dans leurs tombeaux, vases en terre cuite, lampes, statuettes, colliers, bagues et bijoux, ressemble à celui des tombeaux de la Phénicie même, et trahit l'influence prépondérante de l'Égypte sur le commerce méditerranéen dans ces siècles lointains. Les ports de Carthage n'existaient point encore ; ils ont été plus tard creusés de main d'homme. Les navires phéniciens étaient d'un faible tonnage : ils pouvaient s'approcher du rivage, qui fut bordé d'un quai analogue à ceux dont on a retrouvé des traces dans d'autres stations phéniciennes. Le cap Carthage et l'éperon de Bordj-Djedid les abritaient assez bien contre les vents du large[6].

Nous ne savons rien de l'histoire de la colonie sidonienne ; pourtant, l'examen du cimetière de Bordj-Djedid, qui a continué, d'ailleurs, à être un lieu de sépulture au début de la colonie tyrienne, a permis de remarquer que les tombeaux y sont exactement orientés sur Sidon ou sur Tyr. N'y a-t-il là, dit M. Vernaz, qu'une simple coïncidence, due au hasard ? Faut-il y voir, au contraire, le souvenir, hautement accusé, de la métropole ? Faut-il y voir encore la manifestation d'un sentiment religieux ?... Si l'on songe à l'importance que devait avoir, pour les enfants de Tyr, cette direction vers la patrie, qu'ils avaient appris à reconnaître à travers les mers, sans carte ni boussole ; si l'on se souvient que la divinité s'incarnait pour eux dans Melkart, le Dieu-Soleil qui les avait guidés à travers l'inconnu, cette double hypothèse devient au moins vraisemblable. L'Israélite, l'Arabe ne tournent-ils pas, eux aussi, après bien des siècles, leurs regards vers les villes saintes ? Et par une analogie plus frappante encore, les Égyptiens n'ont-ils pas orienté vers l'est, à 3' 40" près, les grandes pyramides, ces autres tombeaux ? Phéniciens, Israélites, Arabes, Égyptiens n'ont-ils pas eu le même berceau dans ce coin de l'Orient, d'où sont sorties toutes les religions de l'ancien monde, et cette communauté d'origine n'est-elle pas un argument en faveur d'une certaine communauté de tradition ? Je suis donc tenté d'admettre que cette orientation des tombes est due à l'union de ces deux souvenirs : la patrie et son Dieu, en même temps qu'à l'idée de survie, si nettement démontrée par le dépôt, dans les caveaux funéraires, d'aliments réels ou figurés, idée qui se serait confondue, dans la pensée des colons phéniciens, ces éternels voyageurs, avec celle d'un suprême départ pour lequel, suppléant à l'impuissance des morts, les vivants auraient orienté le tombeau comme un dernier navire[7].

Si l'on en juge par le mobilier des chambres sépulcrales, Cambé n'était qu'un simple comptoir, installé sur le bord de la mer, d'une manière assez précaire, pour faire le troc avec les tribus libyennes du voisinage. On ne trouve guère, autour des cadavres, de productions d'un art indigène : ce sont des bijoux et des pierres gravées de fabrication égyptienne, des terres cuites cypriotes ou phéniciennes, des vases de terre ornés de lignes géométriques ou de zones d'animaux, sortis des ateliers de Cypre, de Rhodes ou des îles de la mer Égée. Gambe ne pouvait se développer, à cause de la proximité de sa rivale tyrienne, Utique, plus ancienne, plus grande, pourvue d'un meilleur port, et qui absorbait, avec Hippone, la plus grande partie du commerce de l'Orient avec l'Afrique. Il fallut une immigration nouvelle de colons phéniciens pour changer la face des choses.

Une tradition prétend que des vaisseaux tyriens conduits par Ezoros ou Zoros et Carchedon, seraient venus, dès avant la guerre de Troie, renforcer la colonie languissante et donner une vigoureuse impulsion à son commerce, en fondant Carthage[8] S'il n'y a guère lieu de s'arrêter à cette légende que rapporte Philiste de Syracuse, le récit de Timée que nous allons relater et que l'on adopte généralement, mérite-il plus de créance ?

Dans le cours du IXe siècle, Mutton Ier, roi de Tyr, était mort en laissant son trône à deux enfants en bas âge, Pitmelioun, célèbre dans les fictions poétiques sous le nom de Pygmalion, et Élissar, plus âgée que son frère. Les deux factions rivales qui se disputaient le pouvoir à Tyr, prirent pour chef le frère et la sœur ; le parti démocratique se groupa autour de Pygmalion, le parti aristocratique autour d'Élissar et de son mari Sicharbal, le Sichée de Virgile, grand prêtre de Melkart. La faction populaire, plus audacieuse, l'emporta, et Pygmalion régna seul, au détriment de sa sœur. Au bout de quelques années, le retour au pouvoir du parti aristocratique étant à redouter, Pygmalion n'hésita pas à faire assassiner Sicharbal dans, lequel il voyait un rival dangereux. Alors, Élissar, pour venger son mari, trama à son tour un complot contre son frère. La conspiration fut découverte, et les trois cents patriciens, membres du sénat, se trouvèrent compromis avec Élissar et convaincus de haute trahison. La colère de Pygmalion allait s'appesantir sur eux, lorsqu'ils réussirent à s'emparer des navires ancrés dans le port. Plusieurs milliers de citoyens s'y embarquèrent en toute hâte et prirent la mer pour aller fonder sur une terre plus hospitalière une nouvelle Tyr, sous la conduite d'Élissar, à qui cette migration forcée valut le surnom de Didon la fugitive[9].

Les émigrants se dirigèrent vers la côte d'Afrique où les établissements tyriens étaient nombreux et où ils étaient assurés de trouver des compatriotes, des parents mêmes, disposés à les bien accueillir. C'est ainsi qu'ils vinrent jeter l'ancre devant Cambé qui les reçut avec allégresse et se prépara à leur faire une place à côté d'elle. Les abords de l'établissement sidonien étaient alors occupés par des Liby-Phéniciens, tributaires du roi libyen Iapon. Élissar entra en pourparlers avec eux et ce prince, et elle leur acheta, moyennant une redevance annuelle, un vaste terrain où fut bâtie la ville neuve, Kart-hadschat : c'est ce nom dont les Grecs, par corruption, ont fait Carchedon, et les Romains, Carthage. Didon, poursuit la légende, ayant obtenu des Liby-Phéniciens, pour elle et ses compagnons, autant de terre qu'il en peut tenir dans la peau d'un bœuf, immola un de ces animaux, puis elle en découpa la peau en lanières assez étroites pour en envelopper toute la colline qui, de là prit le 'nom de Byrsa. Il est aisé de deviner que la dernière partie de ce récit ne repose que sur un jeu de mots : le rapprochement du mot grec βύρσα, qui signifie cuir, peau, et du mot phénicien bosra dont le sens est citadelle, forteresse.

Tout n'est pourtant pas à dédaigner dans le récit de l'hégire d'Élissar, dont le vieux Caton, Trogue-Pompée, saint Augustin se sont fait l'écho, tandis que Virgile donnait à Didon l'immortelle consécration de sa poésie. En effet, Carthage s'est toujours réclamée de Tyr sa métropole, et chaque année elle envoyait un tribut au temple fameux du Melkart tyrien ; en outre, l'origine aristocratique des émigrants tyriens semble confirmée par la constitution politique et sociale de Carthage qu'elle sert en même temps à expliquer. Enfin, le développement que prit, dès avant le VIe siècle, la puissance carthaginoise, et sa prépondérance quasi soudaine sur tous les autres établissements phéniciens d'Afrique, ne peuvent s'expliquer que par une extension subite donnée à sa population et à son commerce maritime. Il faut admettre que, longtemps avant le vie siècle, une nombreuse colonie tyrienne, chassée peut-être par les invasions des Assyriens en Phénicie, vint se joindre à colonie sidonienne de Cambé : voilà ce qui paraît certain.

Sous l'empire romain, des monnaies frappées à Tyr et s'inspirant de la légende plus que de l'histoire, ont pour type Didon sur une galère, fuyant la colère de Pygmalion, ou bien Didon arrivée en Afrique et présidant à la construction de Byrsa[10]. Sur le Virgile du Vatican, une belle miniature représente des tailleurs de pierres qui ébauchent des blocs de marbre et des colonnes pour le palais de la Fugitive.

La nouvelle ville (Kart-hadschat) se développa à l'ouest et au sud, du côté de la plaine que commandent Byrsa et la colline dite de Junon Céleste. Ces collines elles-mêmes servirent de nécropole comme celle de Bordj-Djedid, devenue insuffisante. Bientôt, les colons tyriens songèrent à créer un port capable de donner un abri sûr à leurs vaisseaux qui ne pouvaient être suffisamment protégés par le mouillage de la côte, contre les fortes tempêtes. Ce port fut creusé, à côté de Cambé, dans la partie la plus basse du littoral. Soit dès ce moment même, soit plus tard, il fut constitué en un double bassin, le port marchand et le Cothon ou port militaire : nous en voyons encore aujourd'hui les vestiges, entre le dar Mustapha ben Ismaïl et le Khram ; l'ouverture, unique, donnant sur la mer, était près de ce dernier palais. A un moment donné, il fallut enfin construire une forteresse pour protéger la ville et mettre à l'abri d'un coup de main les richesses commerciales accumulées dans les docks. Byrsa qui dominait les ports et toute la presqu'île, se trouvait désignée par la nature pour remplir ce double rôle : la colline fut ceinte d'un rempart de deux mille pas de circonférence[11] ; on en nivela le sommet bombé, pour le convertir en plate-forme, et par suite de ces travaux de terrassement, les anciens tombeaux, qu'on eut garde de violer, se trouvèrent enfouis sous le sol à une grande profondeur. Byrsa devint l'acropole et l'on vit s'élever sur son sommet, comme le temple de Minerve à Athènes, le fameux sanctuaire d'Eschmoun, à peu près à l'endroit que couronne la coupole de la chapelle de Saint-Louis. Les mêmes travaux de nivellement furent exécutés, sans doute plus tard, sur la colline dite de Junon, et des tombeaux puniques s'y trouvèrent de la même manière ensevelis dans les entrailles du sol où nous allons aujourd'hui les découvrir.

Cette période des annales de Carthage est, aussi bien que l'histoire de sa fondation, environnée de ténèbres ; tout ce qu'il est permis d'affirmer avec assurance, c'est que Carthage se construit et se développe rapidement, tandis qu'Hippone et Utique s'affaiblissent à son profit. Elle devient le centre d'un puissant empire, à la fois continental et maritime. Dès avant le vie siècle, les Carthaginois conquièrent pied à pied toute la région qui s'étend de la Petite Syrte à la frontière de la Numidie et ils bordent d'une ceinture d'escales de commerce (emporia) la côte de la Grande Syrte jusqu'aux confins de la Cyrénaïque.

Au moment où Carthage devient sérieusement tangible pour l'historien, c'est-à-dire au commencement du VIe siècle, son domaine se partage en trois zones : la Zeugitane ou Carchédonie qui comprend, outre les environs immédiats de Carthage, Hippo Diarrhytus (Bizerte), Utique, Tunis, Clypea (Klibia) et toute la presqu'île du cap Bon ; puis, dans l'intérieur des terres, Vaga (Béja), Balla Regia (Hammam-Darradj), Sicca Veneria (Le Kef), Zama. La seconde zone était la Byzacène, avec les villes de Hadrumète (Sousse), la Petite Leptis (Lemta), Thysdrus (El-Djem), Taparura (Sfax), Tacape (Gabès). Dans la troisième, étaient compris les emporia échelonnés depuis Tacape jusqu'à la Grande Leptis (Lebda), et parmi lesquels il faut citer Gichthis (Sidi-Salem-Bou-Ghrara), les ruines appelées aujourd'hui Medeina, sur le lac des Bibans, où l'on remarque encore de grands quais de débarquement, Sabratha, Macartea (Tripoli) et enfin l'île Meninx ou des Lotophages (Djerba). Ainsi Carthage, dès cette époque, est maîtresse de toutes les routes de l'Afrique : elle accapare tout le commerce du Soudan. Elle va chercher à s'étendre en Sicile et en Espagne où elle se heurtera aux Grecs et aux Romains.

Ce fut dans la Cyrénaïque que le conflit éclata pour la première fois. Les Grecs de Cyrène ayant cherché à disputer un terrain neutre aux Carthaginois qui voulaient s'y établir, les deux partis convinrent d'envoyer, de part et d'autre, deux ambassadeurs partant, les uns de Carthage, les autres de Cyrène : l'endroit de la côte où ils devaient se rencontrer, serait la limite respective des deux États. Les Carthaginois députèrent deux frères nommés Philènes. Les deux frères, raconte Salluste, firent la plus grande diligence, tandis que les députés cyrénéens allèrent plus lentement, soit que ce fût de leur faute, soit qu'ils eussent été contrariés par le temps, car il s'élève souvent dans ces déserts, comme en pleine mer, des tempêtes qui arrêtent les voyageurs Les Cyrénéens se voyant un peu en arrière, et craignant d'être punis, à leur retour, du tort que leur retard aurait causé à leur pays, accusent les Carthaginois d'être partis avant le temps, et soulèvent mille difficultés ; ils sont décidés à tout plutôt que de consentir à un partage aussi inégal... Bref, les envoyés de Cyrène cherchant à tromper les ambassadeurs carthaginois, ceux-ci, pour bien marquer le point où ils étaient arrivés et ne pas perdre un pouce de territoire, s'y firent enterrer vivants. Plus tard, Carthage reconnaissante éleva deux mausolées, les Autels des Philènes, au lieu même de leur sépulture (probablement à Mouktar)[12], à ces héroïques jeunes gens, bien dignes des honneurs divins, dont le dévouement conquit à leur patrie toute une portion du littoral de la Grande Syrte avec le territoire des tribus libyennes des Nasamons et des Lotophages.

La ruine de Tyr par Nabuchodonosor, en 574, permit à Carthage de se substituer à sa métropole dans la domination de la Méditerranée. Les colonies phéniciennes fondées par Tyr et Sidon„en Sicile et en Espagne, se voyant compromises dans leur liberté ou leur existence, appellent les Carthaginois qui volent à leur secours, et dès lors, commence, sur la Méditerranée occidentale, la domination punique (Pœni)[13]. La colonisation de la Sicile par les Grecs est subitement arrêtée : Rhodiens et Cnidiens sont chassés de Lilybée ; les Phocéens qui, en 600, avaient fondé Marseille, sont expulsés de Cyrnos (la Corse). Les îles Aegates, la Sardaigne, Gaulos (Gozzo), Malte, Cossura (Pantellaria) et toute la partie occidentale de la Sicile passent aux mains des Carthaginois. Ceux-ci s'installent de même sur la côte d'Espagne et aux Iles Baléares ; sur la côte de fer, ils fondent les villes Métagonites, parmi lesquelles Igilgilis (Djidjelli), Saldœ, Icosium (Alger), Iol (Cherchel), Siga, Rusadir.

Vers 550, la lutte inévitable s'engagea en Sicile, entre Grecs et Carthaginois. L'armée punique, commandée par le suffète Malthus, conquit l'ile presque tout entière. Quelque temps après (en 536), les Phocéens et les Massaliotes étaient battus devant Alalia, et les Carthaginois devenaient les seuls maîtres de tout le bassin occidental de la Méditerranée : nul n'eut le droit d'y naviguer que leurs vaisseaux dont la proue était ornée d'un monstre grimaçant pour effrayer les étrangers.

La peste vint interrompre le cours de cette grande prospérité. Les Carthaginois, voyant dans ce fléau un signe de la colère des dieux, crurent les apaiser en immolant des enfants sur l'autel de Moloch. Ces atrocités, dit Justin[14], ne firent qu'irriter le Ciel et attirer de nouveaux malheurs sur Carthage : La haine des dieux, raconte l'historien romain, vint punir de tels forfaits. Longtemps vainqueurs en Sicile, les Carthaginois, ayant porté leurs armes en Sardaigne, y perdirent, dans une cruelle défaite, la plupart de leurs soldats. Ce revers fut attribué à Malchus, et ce général, injustement accusé, malgré ses succès antérieurs en Sicile et en Afrique, fut banni avec les débris de son armée vaincue. Indignés de ces rigueurs, les soldats envoient des députés à Carthage, d'abord pour solliciter leur retour et le pardon de leurs revers, et bientôt pour déclarer qu'ils obtiendront par la force des armes ce qu'on refuse à leurs prières. Prières et menaces sont également dédaignées. Alors, Malchus et ses soldats s'embarquent et paraissent en armes sous les murs de la ville. Là ils jurent au nom des dieux et des hommes, qu'ils ne viennent point pour asservir, mais pour recouvrer leur patrie, et montrer à leurs concitoyens que c'est la fortune et non le courage qui leur a manqué dans le dernier combat. Les communications sont coupées, et la ville assiégée est réduite au désespoir. Sur ces entrefaites, Carthalo, fils du général exilé, revient de Tyr, où il était allé, de la part des Carthaginois, offrir à Melkart la dîme du butin que Malchus avait fait en Sicile. Il passe en vue du camp de son père qui l'appelle auprès de lui. Carthalo fait répondre qu'avant de connaître ses devoirs privés de fils, il doit satisfaire au devoir public de la religion. Malchus est indigné de ce refus ; il n'ose toutefois outrager dans son fils la majesté même des dieux ; mais peu de jours après, Carthalo ayant obtenu du peuple un sauf-conduit, retourne vers son père, et se montre à tous les regards couvert de la pourpre du sacerdoce et des bandelettes du sacrificateur. Malchus, continue l'historien romain, lui reproche amèrement de venir, par l'éclat et le luxe de ses vêtements, insulter à ses malheurs, et oubliant à son tour qu'il est père, il ordonne de saisir Carthalo, puis il le fait crucifier sur un gibet qu'il expose en vue des assiégés. Au bout de quelques jours, les rebelles parviennent à s'emparer de Carthage. Malchus, le chef de cette première révolte des mercenaires, y entre comme dans une ville ennemie ; soutenu par la faction populaire, il fait mettre à mort dix sénateurs. Mais son triomphe est de courte durée : bientôt, accusé d'aspirer au trône, il est envoyé au supplice, expiant ainsi, ajoute Justin, le double parricide qu'il avait commis contre son fils et sa patrie.

Magon, fils de Hannon, succéda à Malchus dans la dignité de suffète et le commandement de l'armée ; il acheva la conquête de la Sardaigne, puis celle des Baléares où il fonda Port-Mahon. Sous son impulsion vigoureuse, Carthage augmente ses forces militaires et ses arsenaux, décuple le nombre de ses vaisseaux, conclut des traités de commerce avec les Étrusques, les Latins, les Grecs de Sicile et d'Italie. Le premier traité entre les Carthaginois et les Romains est de l'an 509 avant J.-C., un an après l'expulsion des Tarquins, sous le consulat de Junius Brutus et de Marcus Horatius. Polybe nous en a conservé le texte : Entre les Romains et leurs alliés, d'une part, et les Carthaginois et leurs alliés, d'autre part, il y aura amitié aux conditions suivantes : Ni les Romains ni leurs alliés ne navigueront au delà du Beau-Promontoire (cap Bon), à moins qu'ils n'y soient poussés par la tempête ou contraints par leurs ennemis. S'ils y sont poussés malgré eux, ils n'y pourront rien acheter ni rien prendre, sinon ce qui sera strictement nécessaire pour le radoub de leurs vaisseaux ou pour leurs sacrifices aux dieux ; ils en partiront au bout de cinq jours. Les marchands pourront faire le commerce à Carthage, mais aucun marché ne sera valable s'il n'est conclu en présence d'un crieur public et d'un greffier. Il en sera de même pour tout ce qui se vendra en Afrique ou en Sardaigne. Si quelques Romains abordent dans la partie de la Sicile qui est soumise aux Carthaginois, ils y jouiront des mêmes droits que les Carthaginois eux-mêmes. Les Carthaginois, de leur côté, n'inquiéteront en aucune manière les Antiates, les Ardéates, les Laurentins, les Circéens, les Terracéniens ni aucun des peuples latins qui obéissent aux Romains. Même pour ceux qui ne sont pas sous la domination romaine, les Carthaginois n'attaqueront pas leurs villes. S'ils en prennent quelqu'une, ils la rendront intacte aux Romains. Ils ne bâtiront aucune forteresse dans le pays des Latins. S'ils y débarquent en armes, ils n'y passeront pas la nuit[15].

Dès cette époque, les Romains, on le voit, veulent fermer l'Italie aux Carthaginois. Au reste, le principal objectif de ces derniers était alors la Sicile, où ils ne se trouvaient les maîtres qu'à demi.

Asdrubal, fils aîné de Magon, qui lui succéda vers l'an 500, comme chef de l'armée, fut onze fois investi de la dignité de suffète ; il périt en Sardaigne vers 485.

Les forces que rassembla, peu après, son frère Amilcar, pour essayer d'achever la conquête de la Sicile, témoignent du degré de puissance auquel était parvenue la grande république africaine. Sa flotte se composait de deux cents galères, sans compter un nombre énorme de vaisseaux de transport ; l'armée de débarquement montait, dit-on, à trois cent mille hommes, Cependant, Amilcar fut battu par Gélon, roi de Syracuse, et tué devant Rimera, en 480, le jour même où Xerxès livrait la bataille des Thermopyles. On dit que 150,000 soldats de Carthage périrent dans le combat ; quant au nombre des prisonniers, il fut si grand qu'il semblait que toute la Libye fût réduite en captivité. C'est cette brillante victoire des Grecs que célèbre Pindare dans sa première Pythique, composée en 474. Gélon imposa aux Carthaginois une contribution de guerre de deux mille talents et l'obligation de bâtir, à Carthage même, deux temples où seraient gravées et exposées en public les stipulations du traité.

Les deux chefs de la puissante famille des Barcides, Asdrubal et Amilcar, que nous avons vus, tout à l'heure, si longtemps à la tète des affaires, laissaient chacun trois enfants. Ceux d'Asdrubal s'appelaient Annibal, Asdrubal et Sapho ; ceux d'Amilcar étaient Himilcon, Hannon et Giscon[16]. Tous héritèrent, à des degrés divers, de l'autorité dont leur famille avait été investie jusque-là et ils se montrèrent dignes de leur grand nom. Sous leur habile gouvernement, les Maures, les Numides et toutes les tribus libyennes du nord de l'Atlas sont soumises au joug. Grâce à leur courage, à leur intelligence, à leur ambition personnelle, Carthage atteint l'apogée de sa puissance et de son expansion, en dépit des guerres siciliennes. Reine de la Méditerranée, elle envoie ses vaisseaux au delà des colonnes d'Hercule ; la côte occidentale du Maroc est couverte de comptoirs ; d'autres vaisseaux remontent vers le nord sur les côtes du Portugal. De hardis explorateurs comme Hannon et Himilcon, tous deux fils d'Amilcar, visitent les côtes de l'Afrique et de l'Europe depuis le Gabon jusqu'au delà de l'Angleterre. Vers l'an 460, Hannon, d'après sa relation qui nous a été conservée sous le nom de Périple d'Hannon, part avec 30.000 personnes et 250 vaisseaux à cinquante rames, et il fonde sur l'Atlantique trois cents stations, parmi lesquelles Tingis (Tanger) et Cerné, dans une île située entre les caps Juby et Bojador. Il y eut un temple d'Astarté-Tanit aux Iles Canaries, et les établissements de Madère furent si prospères, son climat fut trouvé si heureux, que les marchands enrichis vinrent y séjourner et lui donnèrent le nom d'île fortunée[17].

Himilcon succéda en Sicile à Amilcar ; les brillants succès qu'il obtint furent interrompus par une maladie qui emporta la plus grande partie de son armée ; il dut se rembarquer avec les quelques bataillons qui lui restaient. Il parut, raconte Justin, dans le port de Carthage, couvert d'un vêtement d'esclave, en signe de deuil. A son aspect, les citoyens s'empressent et lui prodiguent des consolations. Mais lui, sourd à leur voix, lève les bras au ciel, déplorant à la fois son malheureux sort et le désastre de son armée. Ce vaincu de la peste traverse le forum et, arrivé au seuil de sa demeure, il se retourne pour adresser un dernier adieu à la foule qui se presse sur ses pas ; puis, il fait fermer les portes, sans même permettre à ses fils de paraître devant lui, et il se donne la mort, en regrettant de ne l'avoir pas trouvée plus glorieuse sur un champ de bataille.

Un siècle durant, la lutte continua en Sicile entre Grecs et Carthaginois avec des alternatives de succès et de revers. Les tyrans de Syracuse, Denys l'Ancien, Denys le Jeune, Timoléon, Agathocle luttent tour à tour pour arrêter les Africains qui, parfois refoulés dans leurs anciennes possessions du sud-ouest de l'île, reviennent sans cesse à la charge[18].

Tandis qu'avaient lieu ces luttes extérieures, la conspiration d'Hannon, dans Carthage même, mit la république à deux doigts de sa perte. Hannon, raconte Justin[19], Hannon, le premier citoyen de Carthage, dont la richesse excessive était redoutable pour la république, employa ses trésors à l'asservir, et voulut, en égorgeant le sénat, se frayer une route à la royauté. Il choisit, pour l'exécution de son crime, le jour des noces de sa fille, afin de cacher plus aisément, sous le 'masque de la religion, l'affreux dessein qu'il méditait. Il fait dresser, sous les portiques publics, des tables pour les citoyens, et dans l'intérieur de son palais, un festin pour le sénat, afin de le faire périr en secret et sans témoins par des boissons empoisonnées, et d'envahir plus aisément l'empire privé de ses chefs. Instruits de ce dessein par ses serviteurs, les magistrats le déjouèrent sans le punir : ils craignaient qu'avec un homme aussi puissant la découverte du crime ne fût plus funeste à l'État que le projet de son exécution. Se bornant donc à prévenir la conspiration, ils fixèrent les frais des noces par un décret qui, s'appliquant à tous les citoyens, semblait moins désigner le coupable que réformer un abus général. Hannon, entravé par cette mesure, excite les esclaves à la révolte, fixe une seconde fois le jour de massacres, et voyant encore sa trame découverte, s'empare d'un château fort avec vingt mille esclaves armés. Là tandis qu'il appelle à son secours les Africains et le roi des Maures, il tombe aux mains des Carthaginois qui le battent de verges, lui font crever les yeux, rompre les bras et les jambes, puis, lui donnent la mort aux yeux du peuple ; enfin, son corps déchiré est mis en croix. Ses fils et tous ses parents, même étrangers à la conspiration, sont livrés au supplice, afin que de cette race odieuse il ne survécût personne qui pût imiter son crime ou venger sa mort.

Parmi les épisodes de la lutte des Carthaginois contre les Grecs en Sicile, l'un des plus étranges est, à coup sûr, l'audacieux coup de main que le tyran de Syracuse, Agathocle, tenta contre Carthage elle-même. Les Carthaginois assiégeaient Syracuse lorsqu'Agathocle, laissant dans la ville une garnison suffisante, et trompant la vigilance de l'ennemi, réussit à prendra la mer et à passer en Afrique avec l'élite de ses troupes. Il débarque auprès des Latomies, aux carrières d'El-Haouria, non, loin du cap Bon, brûle ses vaisseaux et s'empare successivement de Neapolis (Nebeul), d'Hadrumète (Sousse), de Thapsus, de Tunis et de deux cents bourgs où les Carthaginois avaient de splendides villas. Alors ceux-ci, saisis d'une terreur soudaine, se mirent à faire de grands sacrifices à Melkart et à Moloch. Ils envoyèrent au Melkart tyrien de riches présents, et immolèrent au terrible Moloch deux cents enfants choisis dans les plus illustres familles de la ville. Ils comptaient par là apaiser la colère des dieux dont ils avaient, au temps de leur prospérité, négligé le service, par fraude ou coupable avarice.

Pour comble d'infortune, une conspiration qui rappelait celle d'Hannon éclata dans Carthage. Les deux chefs de l'armée, raconte Diodore de Sicile[20], Hannon et Bomilcar étaient divisés par des haines héréditaires. Ce dernier, qui depuis longtemps aspirait à la tyrannie, voulut profiter du désarroi général pour réaliser ses espérances. Sous prétexte de passer en revue les troupes réunies dans l'un des faubourgs de Carthage de formation récente, Megara (La Marsa), il fit sortir des rangs tous les soldats sur lesquels il ne pouvait compter, puis à la tête de cinq cents citoyens de Carthage et de 4000 mercenaires soudoyés, il se proclama lui-même tyran de sa patrie. Il divisa ses troupes en cinq colonnes et les fit entrer en même temps par cinq rues différentes, où elles massacrèrent tous les hommes qu'elles rencontrèrent et mirent en fuite ceux qu'elles ne purent atteindre. Un tumulte effroyable s'éleva alors dans toute la ville : les Carthaginois, dans le premier moment, crurent que l'ennemi l'avait envahie et qu'elle lui avait été livrée par trahison ; mais quand la vérité fut connue, toute la jeunesse courut aux armes pour repousser le tyran. Bomilcar, de son côté, continuant à s'avancer par les rues, cherchait à gagner le forum et faisait tomber sous ses coups un grand nombre de .citoyens désarmés. Tandis qu'il s'efforçait de parvenir à cette place, les Carthaginois s'emparèrent des maisons élevées qui la bordaient, et de là lancèrent une grêle de traits qui blessèrent un grand nombre de ceux qui avaient pris part à l'entreprise et ne pouvaient échapper aux flèches tombant de tous côtés, le lieu où ils étaient étant découvert et n'offrant aucun abri. Les insurgés ainsi maltraités se formèrent tous en colonne serrée et essayèrent, en traversant de nouveau les rues étroites qu'ils venaient de parcourir, de retourner à la ville neuve (Megara). Accablée dans sa marche par les traits qui lui étaient lancés sans relâche du haut des toits, à mesure qu'elle passait à portée des maisons, cette troupe parvint néanmoins à gagner une hauteur où elle se posta, et bientôt tous les Carthaginois étant accourus en armes, prirent position en face des insurgés ; enfin, des parlementaires, choisis parmi les sénateurs les plus habiles, conclurent un accommodement en promettant l'amnistie aux rebelles. Ce traité fut observé à l'égard de tous les révoltés, dans la crainte d'exposer la ville à de nouveaux dangers ; mais Bomilcar en fut excepté[21]. Complétant le récit de Diodore, Justin ajoute : Pour punir sa trahison, les Carthaginois le firent mettre en croix au milieu du forum, voulant ainsi que ce lieu, qui l'avait vu comblé d'honneurs, servit de théâtre à son supplice. Bomilcar supporta avec courage la cruauté de ses concitoyens, et du haut de sa croix, comme d'une estrade élevée, il leur reprocha leurs crimes, rappelant le meurtre d'Hannon faussement accusé de prétendre à la tyrannie, l'exil de Giscon innocent, leurs votes secrets contre son oncle Amilcar qui avait voulu faire d'Agathocle l'allié et non l'ennemi de Carthage. Après avoir à haute voix exhalé sa colère devant un peuple immense, il expira[22].

Les généraux ambitieux, — et ce sont les meilleurs, — étaient le danger de la république. Bomilcar mort, personne à Carthage n'était capable de chasser Agathocle dont les soldats venaient rôder jusque sous les remparts de la ville. Heureusement pour les Carthaginois, le désarroi se mit dans les troupes siciliennes ; plusieurs des alliés africains sur lesquels comptait Agathocle firent défection ; lui-même, rappelé en Sicile par les événements, dut laisser le commandement des troupes à son fils Archagathe et à son lieutenant Eumarque qui ne réussirent pas à se maintenir ; l'armée syracusaine quitta finalement l'Afrique où elle était restée trois ans (d'août 310 à octobre 307)[23].

Après la mort d'Agathocle en 288, les Carthaginois, grâce aux divisions intestines des Grecs, rétablirent leur prépondérance en Sicile. En 280, quand ils virent le fameux roi d'Épire, Pyrrhus, envahir l'Italie méridionale et menacer la Sicile, ils envoyèrent leur général Magon devant Ostie avec 120 galères, pour offrir à Rome, contre l'ennemi commun, des secours qui furent alors dédaignés. Mais deux ans plus tard, le danger devenant plus pressant, une alliance fut conclue entre Rome et Carthage[24]. Pyrrhus envahit aussitôt la Sicile. En vain, les Carthaginois, en 277, lui proposèrent de le reconnaître seul maître de toute à l'exception du port de Lilybée : cette proposition fut repoussée, et Pyrrhus impitoyable se prépara à passer en Afrique et à renouveler l'expédition d'Agathocle. Ce fut en ce moment que le roi d'Épire reçut des députés du Samitium et de Tarente, le suppliant de revenir en Italie pour chasser les Romains. On dit que Pyrrhus, en s'éloignant de la Sicile, s'écria : Quel beau champ de bataille je laisse là aux Romains et aux Carthaginois ! Cette prédiction ne devait pas tarder à s'accomplir au pied de la lettre : la première guerre punique commence en 268 avant J.-C.[25]

 

 

 



[1] Hérodote, IV, 190 ; Salluste, Jugurtha, XVIII ; Pline, Hist. Nat., XVI, 70.

[2] Otto Meltzer, Geschichte der Karthager, t. I, pp. 55 et 63 à 72 ; Ch. Tissot, Géog. comp., t. I, pp. 302, 391, 411, 445, 480, 586.

[3] Otto Meltzer, Geschichte der Karthager, t. I, pp. 60-63 ; Ch. Tissot, Géogr. comp. de l'anc. prov. d'Afrique, t. I, p. 436.

[4] Étienne de Byzance, s. v° Χαρχηδών. Suivant une tradition rapportée par Justin (XVIII, 5), on aurait trouvé, en creusant le sol pour l'installation de la colonie, une tête de cheval, ce qui expliquerait le type du cheval, le plus ordinaire sur les monnaies de Carthage. Il est évident que cette légende a été inspirée par ce type monétaire et par le rapprochement qu'on a fait du nom de Caccabé ou Carcabé avec le terme sémitique סוקפה, qui signifie tête. Sur l'étymologie du nom de Caccabé, voyez O. Meltzer, op. cit., t. I, p. 478, note 19.

[5] E. Babelon, Les Perses achéménides, Introd., p. CLXXXVI.

[6] J. Vernaz, dans la Revue archéol., 3e série, t. X, 1887, pp. 161 à 164.

[7] J. Vernaz, dans la Revue archéol., 3e série, t. X, 1887, p. 159.

[8] Appien, Punica, VIII, 1 ; cf. Boulé, Fouilles à Carthage, pp. 1 et suiv. ; O. Meltzer, op. cit., t. I, p. 105. Il est évident que le nom de Zoros n'est autre que celui de la ville de Tyr (Sour) ; celui de Carchedon est le nom grec de Carthage.

[9] Timée, Fragm. 23 ; voyez Movers, Phœnizisches Alterthum, t. II, p.363 ; Maspero, Hist. ancienne des peuples de l'Orient, 4e édit., p. 473 ; F. Lenormant et E. Babelon, Hist. ancienne de l'Orient, t. VI, pp. 518 et 612 ; Tissot, Géogr. comp., t. I, p. 527 et suiv. ; le récit de Timée est critiqué et révoqué en doute par O. Meltzer, Geschichte der Karthager, t. I, pp. 106 et suiv. ; voyez aussi l'article Dido dans Roscher, Ausf. Lexicon der griech. und röm. Mythologie.

[10] E. Babelon, Les Perses achéménides, Introd., p. CXCIII.

[11] Paul Orose, IV, 22, éd. Migne, p. 914.

[12] Tissot, Géogr. comp., t. II, p. 241.

[13] Voyez à ce sujet, Edw. A. Freeman, The History of Sicily, t. I, p. 15 et suiv. (Oxford, 1891).

[14] Justin, XVIII, 7.

[15] Polybe, Hist., III, XXII-XXIII ; cf. Ch. Tissot, Géogr. comp., t. I, p. 159 ; Helbig, L'épopée homérique, trad. Trawinski, p. 39.

[16] Justin, XIX, 2.

[17] Diodore de Sicile, V, 19 et 20. Cf. G. Perrot et Ch. Chipiez, Histoire de l'art dans l'antiquité, t. III, p. 48. Sur le périple d'Hannon, voyez l'étude de M. Curt Th. Fischer, dans les Untersuchungen auf dem Gebiet der alten Länder und Völkerkunde, Erstes Heft : Hannonis Carthaginiensis periplo (Leipzig, 1893, in-8° de 134 pages).

[18] Sur cette période des guerres de Sicile, voyez les t. III et IV de Edw. Freeman, The History of Sicily (Oxford, 1892). Le tome IV de cet important ouvrage a été publié en 1894, après la mort de l'auteur, par M. Arthur J. Evans.

[19] Justin, XXI, 4.

[20] Diodore Sic., XX, 10 et 44.

[21] Diodore Sic., XX, 44.

[22] Justin, XXII, 7.

[23] Diodore Sic., Hist., XX, 51 ; cf. Ch. Tissot, Géogr. comp., t. I, p. 538.

[24] Justin, XVIII, 2 ; Polybe, III, 25. Cf. Duruy, Hist. des Romains, I, 440.

[25] Voyez, sur cette période, Rudolf Schubert, Geschichte des Pyrrhus, pp. 201 et suiv. (Königsberg, 1891), et Julius Beloch, dans L'Hermes, 1893, t. XXVIII, p. 481 et suiv.